Bienheureuse Anne-Marie
Taïgi
Née à Sienne (Toscane) en
1769. Son père, pharmacien, va s'installer à Rome où la famille ne tarde pas à
sombrer dans la pauvreté. A douze ans, celle qu'on appelle
« Nanette » travaille dans un ouvroir. A dix-huit ans, elle s'engage
comme femme de chambre. A vingt-et-un ans elle épouse Dominique Taïgi,
domestique au palais Chigi. Ils eurent sept enfants. Elle dut accueillir en
plus ses parents à la maison. « Avec les six écus que je gagnais par mois,
disait son mari, nous serions morts de faim mais grâce aux prières de ma femme,
nous ne manquâmes jamais de quoi que ce soit; c'est pourquoi je la laissai
prier tant qu'elle voulait et ne m'inquiétai plus de rien. » Douce,
affectueuse, ordonnée et toujours joyeuse, Nanette dut supporter les violences
de son mari et le tempérament ombrageux de son père qui maudissait la vie. Elle
éleva bien ses enfants qui témoignèrent avoir eu une enfance heureuse. Derrière
ce quotidien difficile, elle fut gratifiée de phénomènes mystiques, ayant
toujours en vue la couronne d'épines qui la faisait souffrir sans cesse, mais
jouissant de la connaissance claire des personnes qui avaient besoin à tout
instant de sa prière. Elle mourut à Rome le 9 juin 1837. Son corps repose dans
l'église Saint-Chrisogone, au Trastevere.
Bienheureuse Anne-Marie
Taïgi
Mère de
Famille (+ 1837)
Née à Sienne d'un père ruiné, qui s'installe à Rome, elle est contrainte de se louer comme domestique et elle épouse Dominique Taïgi, domestique au palais Chigi. C'est un brave homme mais bourru et très coléreux. Anne Marie garde une patience inaltérable avec lui comme avec ses parents, aigris et grincheux, qu'elle soigne. Elle ne fait rien sans la permission de son époux mais, de son côté, celui-ci accepte aussi l'aventure spirituelle de son épouse et ne s'oppose pas à la grâce de Dieu. Anne-Marie et lui mettront au monde sept enfants mais auront le chagrin d'en perdre trois en bas âge. Mère attentive à l'éducation de ses enfants, femme d'intérieur dont le logement modeste est toujours propre, elle fait la cuisine, coud les vêtements de toute la maisonnée, tient les comptes. Rien ne distingue sa vie de celle des mères de famille qui l'entourent, sinon une certaine humeur enjouée et toujours sereine: " Elle parlait de Dieu, dira son époux, sans devenir ennuyeuse comme le sont beaucoup de dévotes." Et pourtant sa vie est un torrent de grâces mystiques: extases, visions, prescience. Dieu fait irruption qu'elle soit dans sa cuisine ou en pleine lessive. Avec familiarité, elle lui demande : "Laissez-moi, Seigneur, je suis mère de famille." Et cela déborde vers l'extérieur: guérisons, prophéties, lecture dans les cœurs. On vient de loin la consulter. Grand-mère, elle continuera à veiller sur sa famille avec gaieté, malgré la maladie et de terribles crises de doutes.
À Rome, en 1837, la bienheureuse Anne-Marie Taigi, mère de famille. Soumise aux
violences de son mari, elle demeura attentive à prendre soin de lui et de
l'éducation de ses sept enfants, sans rien omettre de son assistance
spirituelle et matérielle aux pauvres et aux malades.
Martyrologe romain
Bienheureuse ANNA-MARIA
TAÏGI
Épouse et mère, Tertiaire
trinitaire
(1769-1837)
Née à Sienne, Anna-Maria
Gianetti suivit son père à Rome où des revers de fortune l'avait contraint
d'aller se fixer. La petite passa à peine deux ans à l'école où elle n'apprit
qu'à lire. Ses parents faisaient retomber leur amertume sur leur fillette, mais
l'angélique pauvrette redoublait de douceur envers eux.
Anna-Maria entra très tôt
en service afin d'aider ses parents. Elle grandissait, pieuse, travailleuse et
coquette, prenant plaisir à se parer. Domenico, qui travaillait au jour le jour
au palais Chigi, homme honnête, rude et prompt à la colère, offrit de
l'épouser; Anna-Maria accepta sa proposition de mariage.
Dans les premiers temps
de son ménage, elle conserva ses habitudes mondaines, aimant à fréquenter le
théâtre des marionnettes et à porter des colliers de verroterie. Après trois
ans de cette vie ainsi partagée entre l'amour de Dieu et l'amour du monde,
Anna-Maria se confessa au Père Angelo de l'Ordre des Servites, se convertit
totalement et, avec l'assentiment de son mari, elle se fit recevoir dans le
Tiers-Ordre des Trinitaires. Domenico ne demandait qu'une chose: que la maison
soit bien tenue et paisible!
Or, les parents
d'Anna-Maria vinrent partager la vie du jeune foyer. Depuis leur arrivée, les
scènes de criailleries qu'elle apaise de son mieux se répètent tous les jours,
car sa mère acariâtre cherche sans cesse querelle à son gendre qui s'emporte
facilement. Atténuant les heurts le mieux possible, elle s'empresse auprès de
son époux trop vif qui jette le dîner par terre avec la table quand un plat lui
déplaît. Après la mort de sa mère, son père vit aux dépens de sa fille et
multiplie disputes sur disputes. Lorsque la lèpre l'atteint, la bienheureuse
Anna-Maria le soigne tendrement et l'aide à mourir chrétiennement.
Pour leurs sept enfants,
la maison risquait de devenir un enfer, mais la bienheureuse demeurait si
surnaturellement douce, que Domenico affirmera que c'était un vrai paradis chez
lui, et que l'ordre et la propreté régnaient partout dans son pauvre gîte.
Anna-Maria se levait de grand matin pour se rendre à l'église, et communiait
tous les jours. Lorsqu'un membre de la famille était malade, pour ne donner à
personne l'occasion de se plaindre et de murmurer, elle se privait de la messe
et de la communion. Pour suppléer à cette privation involontaire, elle se
recueillait pendant les moments libres de la journée.
La bienheureuse
Anna-Maria Taïgi tenait ses enfants toujours occupés. Après le souper, la
famille récitait le rosaire et lisait une courte vie du Saint du jour, puis les
enfants se mettaient au lit après avoir reçu la bénédiction. Le dimanche, ils
visitaient les malades à l'hôpital. Sa tendresse maternelle ne l'empêchait pas
d'appliquer fermement les sanctions méritées, telles la verge ou le jeûne. Ses
enfants profitèrent avantageusement de cette éducation si équilibrée et
devinrent vite l'honneur de leur vertueuse mère et le modèle de leurs
camarades.
Sa délicatesse envers les
humbles était exquise. Elle nourrissait sa servante mieux qu'elle-même; à une
qui cassait la vaisselle par maladresse, elle disait gentiment: «Il faut bien
faire gagner la vie aux fabricants de faïence.»
Lors de sa réception comme
membre du Tiers-Ordre de la Sainte Trinité, la bienheureuse s'était offerte
comme victime expiatrice pour les péchés du monde. En retour de cette généreuse
offrande, Dieu lui accorda la vision permanente d'un globe ou soleil lumineux
dans lequel elle lisait les besoins des âmes, l'état des pécheurs et les périls
de l'Église.
Ce phénomène
extraordinaire dura quarante-sept-ans. Surprise au milieu de ses occupations
domestiques par les ravissements et les extases, Anna-Maria s'efforçait
vainement de s'y soustraire. Grâce à elle, les malades avertis de leur fin
prochaine mouraient saintement. Comme le sort des défunts lui était révélé, sa
compassion pour eux lui inspirait de multiplier ses pénitences afin de libérer
au plus tôt ces pauvres âmes qui venaient la remercier de leur délivrance.
Bien que la bienheureuse
Anna-Maria Taïgi souhaitait ardemment rester ignorée de tous, une foule de
visiteurs composée de pauvres, de princes, de prêtres, d'évêques, du pape même,
accourait pour demander conseil à sa sagesse inspirée. Simple et humble, elle
répondait tout bonnement en se dérobant aux louanges, refusant toujours le plus
petit cadeau.
Or, celle qui répandait
ainsi la sérénité et la lumière autour d'elle, fut privée de consolation
spirituelle pendant vingt ans, et éprouvait le sentiment très net d'être
reléguée en enfer. Pendant sept mois, les angoisses et les ténèbres de son âme
s'étant accrues, Anna-Maria Taïgi expérimenta une véritable agonie, n'en
continuant pas moins à diriger sa maison comme si de rien n'était.
Malgré ses doigts devenus
si douloureux, elle cousait beaucoup afin d'assurer le pain quotidien de la
maisonnée. La femme du gouverneur de Savoie qui avait obtenu tant de grâces par
les prières de la servante de Dieu, voulut lui donner une forte somme d'argent,
mais la bienheureuse la refusa catégoriquement.
Le Lundi-Saint, dans une extase, Anna-Maria apprit qu'elle mourrait le Vendredi-Saint. Après avoir béni tous les siens, et les avoir remercié, elle rendit l'âme dans un cri de bonheur et de délivrance. Il semble que Dieu ait voulu montrer dans la personne de cette admirable bienheureuse, la possibilité d'allier des vertus éminentes et des dons surnaturels exceptionnels à la fidélité aux devoirs les plus humbles et les plus matériels de la vie commune. Le pape Benoît XV béatifia Anna-Maria Taïgi, le 30 mai 1920.
Tiré de Marteau de Langle de Cary, 1959, tome II, p. 338-342 F.E.C. Edition
1932, pp. 201 - Résumé O. D. M.
SOURCE : http://magnificat.ca/cal/fr/saints/bse_anna-maria_taigi.html
ANNA MARIA TAÏGI
La sainte aux sept
enfants
Traduit du livre
italien TAIGI, la santa con sette figli (Città nuova editrice, 1964).
P. Marcel LITALIEN, o.ss.t. Montréal, 1984
TABLE DES MATIÈRES
Ils étaient trois de
Sienne
Les voix et le soleil
La maison Taïgi
Derrière l’histoire
L’ange de Rome
Le martyre de la renommée
Elle triompha des
vainqueurs
Ils étaient trois de
Sienne
" Le saint est mort
! " La nouvelle explose dès les premières heures de la nuit, par des
bandes de jeunes garçons de la rue des " Serpenti " ; elle s’infiltre
dans toutes les petites rues, à travers les ruelles du quartier " des
Monts ", arrive dans les buvettes, grimpe sur tous les balcons, déborde
d’une place à l’autre, jusqu’aux confins de la périphérie de Rome. Puis, de la
périphérie au centre, en un rien de temps, ce fut un fourmillement de nobles,
de pauvres, d’artisans, de prêtres, de soldats, de commerçants, qui affluent
vers le quartier " des Monts " rejoignent la foule accourue de
partout, à travers la ville, à travers le quartier. On circule toute la nuit,
sur la rue des " Serpenti " ; on y circule le jour et la nuit qui
suivirent, jusqu’à ce que la dépouille mortelle de Benoit-Joseph Labre, la
dépouille du saint, soit transportée dans l’église de Sainte-Marie-des-Monts,
pour l’ensevelissement. Un cortège funèbre des plus imposants, suivra la
dépouille ; les Romains n’en ont jamais vu de semblable, si ce n’est celui
auquel ils avaient pris part lors de la sépulture de saint Philippe Néri.
Benoit-Joseph Labre
était, depuis longtemps, une personnage familier et apprécié des romains, de
ceux surtout qui habitaient ce vieux quartier alors le plus populeux et le plus
pauvre de la ville. Pas un homme, pas une femme, pas un enfant qui ne le connut
pas, aux Monts, pour l’avoir vu presque tous les jours, encore jeune cependant,
courbé sous la souffrance et par les privations, maigre comme un ermite et vêtu
de haillons, se traîner dans les venelles, se hâter vers cette église qui
conserverait sa dépouille.
Benoit-Joseph Labre était
né, 35 ans auparavant, dans un petit village de campagne perdu dans on ne sait
quelle contrée de la France. Rapidement, il avait voué sa vie à la pénitence et
aux pèlerinages dé-ci, dé-là, dans les routes interminables de France, de
Suisse, d’Espagne, d’Allemagne. Il s’adonna à cette pratique, jusqu’à
l’épuisement de ses forces ; se traînant les pieds, il s’est oriente vers
l’Italie, a traversé le pays par bien des chemins peu connus, et il a fini par
atteindre Rome où, depuis lors, il avait passé ses journées à prier dans l’une
ou l’autre des nombreuses églises, dans celle de Sainte-Marie-des-Monts qu’il
affectionnait de façon particulière. Il avait passé ses nuits sous l’escalier
d’une mansarde, sous les murs du Quirinal ou un arc quelconque du Colisée.
C’est précisément, en
sortant de l’église de Sainte-Marie-des-Monts que, le 16 avril 1783, Benoit-Joseph
Labre s’affaisse mourant, sur les marches de pierre de la façade de cette
église. Quelqu’un accourt immédiatement, quelqu’un s’offre à le transporter
dans sa maison, à le déposer sur une paillasse, rue des Serpents. Mais le saint
agonisait dans un état irrémédiable et il mourut à 8 heures du soir. La
nouvelle se répandit dans la rue, par la fenêtre, et les bambins cessèrent
alors leur vacarme habituel du soir, pour se faire les hérauts de la nouvelle
sensationnelle qui s’est vite répandue dans les quartiers, dans presque toute
la ville : " Le saint est mort ! le saint est mort ! "
Dans l’intervalle, on
s’affairait à préparer le grand pèlerinage qu’occasionnerait l’inhumation du
pénitent. Il se trouva quelqu’un pour dire que ce pauvre devait être nettoyé,
revêtu et bien disposé, comme la piété l’exige en pareille circonstance. On
suggéra le nom de Santa Giannetti, une pauvre mais brave domestique, habituée à
ce genre d’actes de charité. Elle habitait à quelques pas de là, dans la rue
" delle Vergini ". Il s’agissait de la faire demander.
Ils y allèrent ; et elle
vint, accompagnée d’une jeune fille admirable, sa fille Anne Marie, âgée de
quatorze ans, aux vêtements délicats et élégants pour autant. A l’observer de
plus près, on remarquait sur son visage, les séquelles, caractéristiques de la
variole.
Anne-Marie se tenait à
l’écart, pour permettre à sa mère d’accomplir sa tâche. La maman enleva
pieusement les haillons de ce corps consumé par les maladies et les
mortifications, le lava avec l’aide de l’abbé Marchesi, lui mit des vêtements
propres et le revêtit de la bure de la Compagnie de Notre-Dame-des-Neiges, avec
lequel il fut ensuite enseveli.
Santa Giannetti et sa
fille Anne-Marie n’étaient pas originaires de Rome ; comme Joseph-Benoit, elles
venaient de l’extérieur, mais pas d’aussi loin que le saint pénitent français.
Les deux cents kilomètres de chemin à parcourir pour en arriver à ce vieux
quartier bruyant et misérable, elles les avaient tous, l’un après l’autre,
parcourus à pied.
Elles venaient de Sienne
où elles avaient habité une maison beaucoup plus accueillante que celle qui les
hébergeait, rue " delle Vergini ". Leur existence était aussi
beaucoup moins misérable, si on en juge par les contraintes de la vie qui était
la leur, à ce moment-là.
À Sienne, le vieux Pierre
Giannetti en était venu à se pourvoir d’une pharmacie de premier ordre. Il dut
y investir des heures, des années de travail, des années d’épargne, pour en
arriver, à la fin, à mettre la main sur une boutique parmi les plus belles de
Sienne et de toute la Toscane. Des clients affluaient de partout, quand les
médecins, dans les cas les plus compliqués, prescrivaient des potions et des
liniments spéciaux qui dépassaient les prescriptions banales de la pharmacopée
d’usage commun.
Louis Giannetti, le fils
du pharmacien et pharmacien lui-même, hérita, à la mort de son père, d’un nom
honorable, d’une fortune des plus enviables. Malheureusement, il n’avait pas
comme son père, le tempérament discipliné, le sens de l’épargne, l’aptitude à
ne pas compter les heures de travail. Dans l’espace de quelques années, il
accumula des dettes qui finirent par lui rendre la vie impossible ; il en vint
à la faillite.
Avec son peu de jugement,
sa bonhomie extravagante, sa naïve prodigalité, le pire malheur lui arriva,
celui d’entraîner dans la misère sa propre existence, celle de sa femme Santa,
siennoise comme lui, son unique fillette qui lui était née six mois plus tôt,
le 20 mai 1769, dans la belle maison de la rue " San Martine ", et
avait été baptisée dés le lendemain, dans l’église paroissiale
Saint-Jean-Baptiste, avec les noms : Anne-Marie, Antonia, Gesualda.
Cette même année 1769 qui
avait vu naître Anne-Marie, avait aussi vu naître à Ajaccio, dans l’île de
Corse, le " protagoniste exceptionnel de l’histoire ", celui qui
déciderait, d’une façon tragique, de la vie et de la mort de la moitié de
l’Europe. Les chroniqueurs de l’époque qui ne possédaient pas les vertus des
prophètes, ne pouvaient prévoir ni annoncer les événements futurs, sur un ton
apocalyptique.
Anne-Marie et Napoléon,
nés la même année, sont des êtres humains, des créatures bien distinctes, aux
destinées totalement différentes. Les desseins impénétrables de Dieu les feront
se rencontrer dans le même sillon de l’histoire. Appelés à se rapprocher, l’un
de l’autre, ils firent la preuve d’attitudes opposées à l’égard du pontife
romain.
Elle avait grandi comme
un ange, la fillette de Louis et de Santa Giannetti. Qui la voyait circuler
dans les rues de Sienne, la petite-main dans la main délicate de sa maman, ne
pouvait que s’arrêter pour l’admirer. " On la dirait fille d’un prince,
non celle du pharmacien désaxé " disaient des gens émerveillés de la
douceur, de la beauté des traits de son visage.
Anne-Marie n’était pas
splendide que par les traits de son visage ; depuis sa tendre enfance, sa maman
alimentait en elle la flamme la plus pure de l’amour de Dieu, l’enrichissait
intérieurement, en modelant son caractère, en lui inculquant le sens du devoir,
de la responsabilité, en l’amenant à agir sérieusement, sans porter atteinte à
sa joie, à la vivacité débordante dont elle a toujours fait preuve.
Puis, vint la déchéance
économique, la famine à la maison, le découragement de papa Louis au dehors,
face à la torture de ne pouvoir se soustraire à la chasse de trop de créanciers
qui le harcelaient sans relâche, ne lui donnaient pas le temps et les moyens de
se mettre lui-même en chasse, comme il l’aurait voulu, contre ses nombreux
débiteurs. En somme, en peu de mois, le sol de Sienne brûla à un point tel,
sous les pieds des Giannetti, qu’il ne leur restait qu’une alternative, celle
de fuir.
Mais une fuite lointaine,
sous d’autres cieux, parmi des gens inconnus, pouvait-elle faire oublier le
souvenir amer de la tranquille aisance perdue ? Quitter pour Florence,
Livourne, Pise, Lucques, Arezzo, était trop proche ; il fallait aller plus
loin, encore plus loin : à Rome !
En 1775, de longues
colonnes de pèlerins venant du nord de la péninsule et de toutes les parties de
la vieille Europe empruntaient les routes de Toscane et se déplaçaient vers
Rome. Le pape Pie VI avait inauguré son pontificat solennellement, en ouvrant
la porte sainte de la basilique Saint-Pierre ; l’avantage de gagner les
indulgences de l’Année Sainte était offert.
Le conclave avait duré
cinq mois, des mois éternellement longs qui témoignaient des incertitudes
dramatiques de cette douloureuse époque. À la fin, à l’annonce que le cardinal
Braschi était élu pape, le peuple romain avait donné libre cours à une joie
irrésistible ; elle débordait jour et nuit, en festivités d’une ardeur
irrépressible.
" Vive le pape
Braschi, vive Pie VI ". Toutes les rues de Rome faisaient des souhaits à
l’homme extraordinaire que chacun, du prince au simple palefrenier, connaissait,
estimait, aimait, parce qu’il était doux autant qu’énergique, rempli de
sollicitude autant que de dignité.
Peu de temps après
l’inauguration de l’Année Sainte, le peuple romain, de l’intérieur, s’efforçait
de rendre la vie très intéressante aux foules de pèlerins. Et pendant que d’un
côté, les autorités assuraient le ravitaillement des magasins pour qu’en aucun
temps, on ne soit privé de denrées alimentaires, d’un autre côté, elles avaient
recours à des mesures très énergiques, dans le but de dissuader les exploiteurs
possibles, de les amener à mettre un frein à leur trop grande avidité. Elles
tentaient de les maintenir au niveau de la nécessité ; des groupes de citoyens
volontaires attendaient les colonnes de pèlerins au débouché des grandes routes,
pour les conduire dans de bons logements. On pourvoyait à leurs besoins, toute
la durée de leur séjour à Rome. Et ce ne fut pas une mince organisation, si on
pense qu’en cette année et en ces moments, comme l’attestent les chroniqueurs
d’alors, le nombre de pèlerins s’élevait à 280,000. La plupart, venus et
retournés à pied.
Au nombre des 280,000
pèlerins, figuraient trois fugitifs animés par une motivation secondaire. Il
s’agit de Louis, Santa et Anne-Marie Giannetti qui, se faufilant à travers un
groupe d’étrangers, aux premières lueurs de l’aube, tentent d’éviter tout
soupçon parmi les Siennois. Ils apportent très peu de choses ; un baluchon et
rien en poche. Ils font une halte à Radicofani et, de là, poursuivent leur
route par Acquapendente, Bolsena, Montefiacano, Viterbe ; des jours et des
jours de marche éreintante sur les bords d’une interminable route où se meuvent
dans la poussière, le père en avant, la mère derrière, avec la fillette de 6
ans à sa charge, agrippée par la main à son vêtement. Ils se trouvèrent enfin
réunis aux portes de Rome, où ils furent mis sous la protection d’un groupe de
citoyens qui, en un tour de main, avaient résolu pour eux, comme pour les
autres pèlerins, leurs problèmes, à commencer par celui du logement, un problème
qui, à première vue, semble insoluble à quiconque arrive, inconnu et privé de
tous moyens, dans une ville immense et ignorée.
Pour Anne-Marie, le
problème des problèmes était unique, à ce moment : s’arrêter, fermer les yeux
et dormir. La petite avait atteint Rome littéralement brisée de fatigue, les
cheveux blanchis par la poussière, les souliers percés, les pieds ensanglantés.
Elle ne vit rien de la grande ville, rien de ses monuments fascinants et de ses
rues joyeuses d’un monde aimable et rieur. Elle vit enfin une petite porte
basse dans la via " delle Vergini " et un petit escalier qui, dans
l’ombre, de biais, menait là-haut. Elle trouve la force de monter ce sombre
escalier parce qu’elle avait deviné qu’au dessus, un lit l’attendait. Et quand
elle l’aperçut, le petit lit tellement désiré, elle eut à peine la force de se
jeter dessus. Et déjà, elle dormait d’un sommeil profond comme elle n’en avait
jamais eu.
Les jours et les semaines
passèrent et le logis de la " Via delle Vergini ", qui ne devait être
qu’un refuge provisoire pour les pèlerins, le temps de bénéficier des
indulgences et de repartir, devint, pour les Giannetti, leur logement
définitif. Pour prendre racine en quelque point de ce monde, il faut pouvoir se
sauver ; et pour se sauver, il n’y a qu’à travailler. Le raisonnement sonnait
plus que logique pour maman Santa. Le papa Louis qui avait quitté Sienne avec
tout l’imbroglio que nous connaissons, ne pensait pas autrement ; il croit à
l’importance du travail mais se préoccupe davantage de la chasse à la fortune
qu’on ne saisit pas toujours comme on saisit un papillon sur le coin des rues,
pas plus à Rome et encore moins dans ce pauvre quartier " des Monts "
quand on ne sait où donner de la tête à la suite des ennuis causés à Pierre,
son père, profondément déçu de son fils.
Comme le papa Louis
continue à se nourrir de chimères, il incombe à maman Santa de gagner le véritable
pain quotidien. Elle le fit avec un sens paisible de la réalité ; de l’élégante
dame qu’elle était, elle se transforme en une infatigable domestique à temps
partiel, un peu par ici, un peu par là, auprès de cette famille-ci, de cette
famille-là, afin d’y gagner une poignée de menue monnaie qu’elle apportera le
soir à la maison, assurant ainsi sa propre subsistance, celle de son mari, et
de sa fillette, au cours de la journée qui suivra.
Santa fera davantage pour
cette dernière ; en plus de lui assurer son pain quotidien, elle se souciera de
son éducation, de son instruction. Le temps venu, elle la prend par la main et
la conduit " Via Graziosa " à l’école Sainte-Agathe. Cette école
s’appelait ainsi parce qu’elle était érigée prés de la vieille église
Sainte-Agathe-des Goths, une église du quartier des " Monts ".
C’était une école très importante, florissante, renommée dans toute la cité ;
elle était le lieu d’aboutissement de plusieurs autres écoles de garçons et de
filles, détachées mais reliées à elle, dans les différents quartiers de Rome,
toutes fondées par une dame remarquable de jugement et de vertu : Lucia
Filippini, siennoise elle-même.
Cette dame avait réuni
autour d’elle un groupe de religieuses et de laïques non liées par des voeux,
leur avait infusé son enthousiasme et son engagement. Ces laïques n’étaient pas
missionnaires au sens strict ; elle les avait engagées dans la mission de
soustraire à la rue les enfants pauvres et bien d’autres, de les éduquer à une
vie honnête, de les intéresser à un métier profitable. Le menu peuple l’avait
vite surnommée " la pieuse maîtresse, la sainte institutrice " par
qui s’exerçait l’action providentielle, de Dieu.
La méthode que Lucia
Filippini appliquait dans ses écoles, en accord avec le cardinal Grégoire
Barbarigo, réussissait à doser avec une admirable sagesse le travail et la
prière, la culture et la pratique d’une vie chrétienne vécue. Les jeunes gens
et les jeunes filles, leurs études terminées, sortaient de ces écoles, avec un
bagage intéressant de connaissances et de savoir-vivre. Ils savaient lire,
écrire, compter, possédaient une solide formation spirituelle, un grand amour
pour le travail, un sens profond de leurs responsabilités, aux plans
individuel, familial, social.
À l’école-mère de
Sainte-Agathe où affluaient alors les jeunes de 7 à 14 ans de toutes les
parties du vieux quartier, Anne-Marie Giannetti excellait dans la lecture ;
elle sera, toute sa vie, une lectrice acharnée. Elle apprit, avec une facilité
exceptionnelle, la doctrine chrétienne et tout ce qui a trait à la religion. On
dira, plusieurs années après, qu’elle récitait de mémoire, à merveille, les
psaumes, en savait autant qu’un curé et pouvait être un professeur dans
l’intérêt de tous ; elle pouvait enseigner à quiconque. Elle s’initia aussi aux
travaux de la cuisine et à ceux de la maison. Elle s’ingénia à séparer la soie,
à l’enrouler en bobines ; c’était un métier prometteur, à cette époque où la
machine n’avait pas encore remplacé les mains. Les usines, en effet, n’avaient
pas encore liquidé l’artisanat domestique. Par contre, elle n’eut pas le temps
d’apprendre à écrire ; la petite vérole la frappa et retarda ses études. Mais
la variole, si elle gâta l’éclat tout simple de son visage, ne réussit pas à en
détruire la beauté ; des traits délicats et de douces lignes suffirent à la lui
conserver.
A 11 ans, la petite
Anne-Marie entra dans la basilique de Saint-Jean-de-Latran et elle y fut
confirmée. À13 ans, elle fit sa première communion dans l’église
saint-François-de-Paule, au quartier " des Monts ". Elle désirait
ardemment et depuis longtemps se nourrir au banquet sacré, mais il fallait
alors attendre au moins jusqu’à la fin de cet âge.
À 14 ans, survint
l’épisode qui devait influer sur toute sa vie : l’événement grandiose du
pèlerinage de tout Rome auprès de la dépouille mortelle de saint Benoit-Joseph
Labre.
Anne-Marie connaissait
bien le " saint ", elle avait perçu dés ses premiers contacts avec
lui toute sa grandeur spirituelle. Mais ce ne fut que devant la dépouille
vénérée, à la vue de l’humble témoignage d’amour que lui offrait sa maman
accourue sans sourciller pour nettoyer ses plaies, revêtir ses membres,
qu’intervint dans le coeur de la fillette, quelque chose de si profond, qu’elle
en a été marquée pour le reste de sa vie.
Le temps qui suivit
n’annonça pas d’éclaircie dans le petit firmament de la famille Giannetti, même
si ce brave homme, papa Louis, s’était finalement décidé à se faire serviteur,
en parole plus qu’en vérité. Tout emploi qu’il trouvait, durait peu. En somme,
serviteur à temps perdu, il avait besoin, disait-il, de liberté, pour ne pas
courir le risque de se laisser passer la fortune sous le nez, le jour où elle
serait à sa portée.
Maman Santa était
toujours hors de la maison, à s’éreinter là où elle était requise. Elle y
trouvait cependant son épanouissement, du matin au soir ; et les quelques sous
qu’elle réussissait à glaner, suffisaient pour nourrir chaque jour, de pain et
de viande, les trois personnes, y compris la fillette devenue grande.
Au jugement de Santa, il
était temps qu’Anne-Marie aussi se perfectionnât dans les travaux féminins.
Elle serait en mesure de la remplacer totalement, à la maison ou, bien sûr, de
s’engager demain auprès de quelqu’un, de l’aider, avec son salaire, à maintenir
à flot cette barque familiale démantibulée, qui prenait eau par tous les coins.
Ainsi, Santa Giannetti
confia Anne-Marie à deux vieilles dames laborieuses autant qu’estimées, qui
avaient ouvert un modeste ouvroir dans le but d’apprendre aux jeunes filles
désireuses de s’initier aux divers travaux qu’il importait alors de connaître,
et de se rendre aptes à les exécuter. De plus, elles faisaient participer leurs
élèves aux revenus de leur entreprise.
Anne-Marie y demeura
environ six ans. Le climat était absolument sain, j’oserais dire "
spirituel ". Les deux bonnes maîtresses savaient le susciter et le
maintenir. Elle apprit à faufiler, à préparer les repas, à confectionner des
corsets, des vêtements et, finalement, des chaussures.
Anne-Marie se jeta donc
corps et âme au travail, se souciant en même temps de son cheminement
spirituel, des progrès à réaliser dans la pratique des vertus. C’est au cours
de ces années, de ses allées et venues, de sa demeure à l’ouvroir, qu’elle eut
fort à faire ; belle comme elle était, il lui fallait se soustraire à des
pièges plus ou moins subtils, des pièges dont sont, par malheur et en tout
temps, exposées les jeunes filles du peuple des grandes villes, quand elles sont
ornées de grâce et d’amabilité. Anne-Marie était d’autant plus exposée que, à
ces deux dons, s’en ajoutait un troisième, d’attrait indiscutable : la suavité
de sa douce voix siennoise.
Anne-Marie quitta
l’atelier de couture, quand elle sut qu’elle devait se dévouer entièrement à la
maison, pour permettre à sa mère de respirer un peu, de se remettre des longues
fatigues qui l’accablaient, des chagrins continuels, des gênes économiques qui
avaient fini par épuiser les forces de la pauvre femme ; sans oublier
l’étiolement de son âme, l’aigreur de son caractère qui était pourtant si doux
et si serein. Après un certain temps, Anne-Marie en arrive à la conclusion
qu’elle pourrait apporter une aide encore plus grande à sa famille, si elle
s’engageait comme fille de chambre auprès d’une dame quelconque. En plus de ses
deux bras, elle offrira à ses parents un peu d’argent qui remédiera au malaise
qui se fait sentir.
Elle en parle à sa maman
qui partage sans plus ce dessein, parce que ce qui lui pèse le plus sur l’âme,
c’est la préoccupation de devoir laisser seule, durant de longues journées,
cette jeune fille bénie, sans surveillance, sans défense, devant des assauts
possibles que pouvait provoquer sa beauté. On sait que le pollen attire les
abeilles... " Mieux vaut la savoir en sécurité dans une maison fiable
" ; Santa bénit la proposition d’Anne-Marie.
En ces jours, papa Louis
était entré dans une de ses périodes de résipiscence : il s’était mis au
service, et cette fois-ci, ça semblait sérieux, d’une dame Maria Serra Marini
qui habitait au palais Maccarini, au pied du Quirinal, du côté de la Fontaine
de Trevi. Elle était une dame dont on disait beaucoup de bien, pendant que
d’autres la trouvaient distante et sévère.
Un soir, Louis piqua une
pointe à la maison et, parlant de la pluie et du beau temps, il en vint à dire
que sa patronne cherchait une femme de chambre. Aussitôt dit, aussitôt fait,
dès le lendemain matin, Anne-Marie, parée de ses plus belles toilettes. les
cheveux arrangés avec une certaine élégance, avec l’aide de sa mère, papa Louis
lui dit : " La première impression compte pour beaucoup, ma fille !
". Flanquée de son père, elle fait son entrée au palais Maccarini.
La première impression
eut certainement un effet positif. La jeune fille se comporta d’une façon telle
qu’elle gagna l’estime et l’affection, difficiles à obtenir, de Donna Maria
Serra Marini. Maman Santa crut toucher le ciel du doigt et crut qu’enfin, elle
se sentirait tranquille parce que dés lors, sa fille serait bien gardée.
Malheureusement, les
choses se présentèrent bien autrement : les pièges et les assauts se
multipliaient derrière les murs sévères du palais Maccarini, et ce, peu de
temps après son arrivée. Elle se rendit compte des périls qui la menaçaient et
opposa une résistance courageuse qui s’appuyait sur les énergies que sa foi
pouvait lui fournir. Elle en vint à se convaincre que l’unique bouclier
derrière lequel elle pouvait définitivement préserver son honnêteté, était le
mariage.
Ceci dit, elle comprit
que le Seigneur avait déjà mis sur son chemin, l’homme destiné à devenir le
père de ses enfants. Cet homme, un peu plus âgé qu’elle, mais pas vieux du
tout, c’était Dominique Taïgi qui venait tous les jours accomplir quelque
mission de la part de ses patrons, auprès de la Dame Maria Serra Marini.
Dominique lui avait manifesté une certaine sympathie qui tranchait sur les
élans trop intéressés, manifestés par beaucoup d’autres.
Les voix et le soleil
— " Anne-Marie, que
demandes-tu ?
Le Père Ferdinand de
Saint-Louis, trinitaire déchaussé, avait pris place, prés de l’autel, du côté
de l’Évangile, en étole et surplis blancs. Autour de lui, étaient réunis tous
les religieux du couvent, dans leur longue tunique blanc-crème, la croix rouge
et bleue sur la poitrine.
Sous l’architecture
bizarre de Borromini, dans la pénombre de Saint-Charles-aux-Quatre-Fontaines,
la foule se pressait, ne voulait perdre aucun détail de la belle cérémonie qui
se déroulait au début de ce splendide matin du 26 décembre 1808, fête de saint Etienne.
La demande du Père
Ferdinand résonna très claire, dans tous les coins de l’église. L’émotion de la
dame agenouillée sur le marchepied de l’autel, une émotion qui s’exprimait par
des soupirs et des sanglots, se calma comme par enchantement. Elle était d’une
rare beauté malgré ses trente-neuf printemps, le dévouement déployé auprès de
ses six enfants, la rigoureuse modestie de ses vêtements.
— " Anne-Marie, que
demandes-tu " ?
— " L’habit du
tiers-Ordre de la Très-Sainte-Trinité et la miséricorde de Dieu ". La voix
de la postulante était celle de toujours, vibrante et ferme, délicieusement
caractérisée par l’accent pur et doux de la région de Sienne.
— " As-tu la ferme
volonté de le porter avec dévotion, jusqu’à la mort " ?
" Oui, Père, avec
l’aide de Dieu ".
À ce " oui ",
le Père Ferdinand se leva et tourné vers l’autel, prononça quelques prières. Il
aspergea ensuite d’eau bénite, un scapulaire à la croix rouge et bleue qu’il
présenta à la dame pour qu’elle le baisât.
" Que le Seigneur te
dépouille du vieil homme, avec toutes ses actions, te revête de l’homme nouveau
créé dans la vraie justice, et la vraie sainteté " ajouta le Père
Ferdinand. Il lui imposa alors le scapulaire sur les épaules en disant : "
Reçois l’habit de la Très Sainte Trinité, au nom du Père, du Fils, du
Saint-Esprit ".
On considérait la
cérémonie terminée, même si à l’arrière, d’autres prières étaient récitées. Le
tout atteint son point culminant par le chant du " Veni Creator Spiritus
". La coupole de l’église Saint-Charles l’accueillit dans son élan
audacieux vers le ciel, pour l’emporter dans l’infini.
À l’époque de sa vêture,
dans cette église des trinitaires déchaussés qui occupe un angle du célèbre
carrefour romain des Quatre-Fontaines, Anne-Marie comptait dix-huit ans de
mariage.
Ses fiançailles avec
Dominique n’avaient duré que quarante jours. Et la rapidité avec laquelle
avaient été célébrées les noces, avait suscité une kyrielle de critiques et de
commérages sur le compte de la jeune fille. Mais, Anne-Marie était d’avis et
elle le sera dans l’avenir, avec ses propres filles, qu’une fois le choix fait,
compte tenu de la religion, de l’honnêteté de l’époux, il faut éviter les
longues fréquentations à la maison, se hâter, agir pour le mieux ; laisser
traîner les choses en longueur, donne, de part et d’autre, naissance à des
ennuis, et il en ressort de funestes conséquences.
De son homme, Anne-Marie
avait soupesé les qualités et les défauts. Sur un plateau de la balance, elle
avait déposé les manières rustres, la grossièreté du langage, l’entêtement
opiniâtre, le caractère querelleur et violent, la médiocrité du talent. Sur
l’autre, elle avait placé la belle apparence, la force robuste, et surtout, la
bonté d’âme qui se cachait sous cette écorce rude, les fermes convictions
religieuses de ses moeurs. La balance pencha du côté des qualités.
Dominique Taïgi, même si
à converser avec lui, on ne l’eut jamais soupçonné, était la dernière pousse, l’ultime
rameau d’un arbre généalogique d’anciennes et célèbres familles nobles. La
famille Taïgi s’était distinguée en Lombardie, avait obtenu des franchises et
des distinctions des ducs de Milan, avait fourni des personnages illustres dans
le domaine de la science, plus particulièrement. Dans le cours des siècles, les
différents rameaux s’étaient plus ou moins desséchés. Un seul survivant qui, le
18 octobre 1761, avait vu naître Dominique à Castaeggio, dans la Valtellina.
Ainsi, Dominique était
venu à Rome pour trouver la fortune mais elle ne lui avait pas souri.
Cependant, il y avait trouvé du travail et avait appris immédiatement à
s’adapter comme serviteur et commissionnaire de confiance dans la maison des
princes Chigi. Son salaire : six écus par mois et les restes de la table des
patrons qui devaient, cependant, être répartis entre les nombreux serviteurs,
parmi lesquels existait un ordre de préséance. Plusieurs devançaient le
commissionnaire ; l’ordre hiérarchique prévu par un accord tacite, était rigoureusement
observé dans tous les palais des familles patriciennes de Rome qui existaient à
l’époque. Dominique ne pouvait donc pas compter sur le meilleur des restes et
la quantité était loin d’être assurée.
Sa décision prise,
Anne-Marie demanda le consentement de ses parents. La maman Santa le lui donna
immédiatement et avec joie. Moins enthousiasmant fut le " ça-va ! "
du papa Luigi qui, sans doute, aurait espéré davantage pour sa jolie fille, et
souhaité un peu plus de réflexion. L’approbation des parrains est aussi
immédiatement accordée et la donna Maria Marina, d’un côté, le prince Chigi de
l’autre, couronnèrent leur assentiment par un cadeau princier.
Plus libéral, le prince
concéda aux deux époux l’usage d’un petit appartement dans son palais " al
Corso ", à l’angle de la place Colonna. Les deux chambrettes et la cuisine
étaient situées dans la partie réservée au service ; les fenêtres donnaient sur
la venelle du Sdrucciolo. C’était une faveur qui avait cependant, une
contrepartie. Le prince s’organisait pour avoir toujours près de lui, jour et
nuit, comme il en avait toujours été jusque là, son fidèle serviteur qui
demeurera au rang qu’il occupait depuis son entrée en service. Il l’appréciait
à un point tel, qu’il se faisait suivre par lui, lors des conclaves, quand il y
accédait à titre de maréchal.
La cérémonie des noces
fut des plus simples, à l’image des gens du peuple. Elle eut lieu le 7 janvier
1790. Dominique Taïgi, 28 ans, du diocèse de Como, et Anne-Marie Giannetti, 20
ans et sept mois, de Sienne, s’unirent en mariage, avec la bénédiction de
l’abbé Massetti, dans l’église Saint-Marcel de Rome.
Les premiers mois de
mariage furent plutôt désordonnés, sans souci du lendemain, plutôt bohèmes ;
ils ont, du moins, semblés tels, pour un bout de temps. En réalité, les choses
se passèrent ainsi : Dominique s’était enflé la tête d’orgueil, tel un paon. Cet
orgueil venait du fait qu’il avait épousé une si belle jeune fille. Il ne se
rassasiait pas de se pavaner en public, l’ayant à ses côtés. Il allait de long
en large sur le " Corso ", à telle ou telle fête, au théâtre, sur la
Place Saint-Pierre, le dimanche. Il voulait que son Anne-Marie se vête des
robes les plus élégantes que la donna Maria Serra Marina mettait de côté, même
si elles étaient presque neuves, pour les lui donner, à part celles qu’il
achetait lui-même, en tenant compte de la mode qu’adoptaient les nobles dames
qui fréquentaient le palais Chigi. Il rognait ainsi le magot d’argent que ses
années de service lui avaient permis d’accumuler. Pour atteindre son but, il
épargnait plus que tout autre, plus qu’lsaac le regrattier. Il en est venu, malgré
ses épargnes, à être sans le sou pour acquérir un anneau d’or, une paire de
boucles d’oreilles, une chaîne d’or, une chaîne de perles. Il ne pouvait
ajouter quoi que ce soit, à la chaîne d’or, à la chaîne de corail qu’Anne-Marie
reçut en cadeau, de sa patronne, à l’occasion des noces. Ces bijoux, Anne-Marie
les portait avec joie, était heureuse d’en faire l’étalage, parce que pour
Dominique Taïgi, l’élégance de sa femme comptait pour beaucoup.
D’autre part, Anne-Marie,
depuis le jour de son entrée sous le nouveau toit marital, avait considéré
Dominique comme son maître et son seigneur ; elle lui vouait une obéissance
affectueuse, une soumission aimante dont elle avait toujours fait preuve, à
l’égard de ses propres parents. Elle comblait ses désirs et allait même au delà
; ce qui ne troublait en rien, son sens rigoureux de l’honnêteté. Elle se
complaisait dans les attitudes de son mari, parce qu’elle nourrissait en
elle-même, une certaine vanité innée, une joie explosive de vivre, qui allait
dans le sens de son caractère jovial et éveillé, de son goût tout à fait
toscan, pour les choses éclatantes, les habits élégants.
Puis, avec le temps, la
durée de quelques mois, vinrent le repentir, le trouble grandissant,
l’angoisse, dans les profondeurs de l’âme. Anne-Marie était cependant certaine
de ne pas offenser directement le Seigneur par sa vie joyeuse, vaniteuse ; elle
n’en éprouvait pas tellement de regret.
Un bon dimanche, son
esprit s’agita plus que jamais et connut une inquiétude amère. On la vit tout de
même radieuse comme d’habitude, très élégante et joyeuse, sur la place
Saint-Pierre, au bras de Dominique, fier comme une colonne de Michel-Ange,
parmi la foule qui accourait pour la messe. Il arriva, touchant presque le
seuil de la grande basilique, qu’Anne-Marie frôla un religieux de vie sainte,
le Père Angelo Vérardi, des Servîtes de Marie. Comme il était seul, il marchait
lentement et avec grande réserve, les yeux rivés au sol. Mais voici que, à cet
instant, les yeux du Père Angelo se levèrent et, croisant ceux de la jeune
épouse, s’y fixèrent pendant quelques secondes.
Il entendit une voix
intérieure, mystérieuse, et il le dira lui-même, plus tard, qui le força à
regarder Anne-Marie. Ses vêtements et ses fantaisies se sont comme imprimés
dans sa mémoire. La voix lui dit : " Porte attention à cette jeune dame ;
un jour, je la déposerai entre tes mains et tu devras la conduire à moi,
intégralement. Elle se sanctifiera parce que je l’ai choisie pour en faire une
sainte ".
Au moment même, le regard
pénétrant du Père Angelo produisit chez Anne-Marie, un véritable choc. Peu de
temps après, agenouillée devant le Saint-Sacrement, à l’intérieur de la
basilique, son coeur se dégagea lentement de l’étreinte, de la commotion qui
l’avait secouée. Ses yeux versèrent des larmes et son âme s’ouvrit à
l’inspiration rapide et véhémente de changer de vie, de s’offrir entièrement au
Seigneur.
Les jours qui suivirent
rendirent toujours plus profonde sa détermination d’abandonner la vanité et les
divertissements. Comme elle voulait bien faire, sans provoquer des drames
familiaux, elle crut bon d’avoir recours à la confession, le moyen le plus
efficace pour libérer son âme du poids qui l’écrasait, et recevoir en même
temps, les conseils les plus clairs et les plus prudents, sur la façon de
répondre, comme épouse, à l’appel qu’elle venait de recevoir de la part de
Dieu. Voici qu’elle arrive, un après-midi, à la grille d’un confessionnal, dans
une église voisine de sa demeure. Elle se met à murmurer : " Voici à vos pieds,
mon Père, une pauvre pécheresse ". Elle s’entendit répondre, avec une
drôle d’amabilité : " Mais vous n’êtes pas une de mes pénitentes.
Allez-vous-en ". Elle en reçut comme un coup de massue sur la tête. La
consternation fut telle, qu’Anne-Marie ne tenta même pas de trouver une
justification à pareille attitude ; elle n’avait jamais pensé qu’on pourrait
lui réserver un accueil si glacial. Elle sortit de l’église, éperdue, la
révolte dans l’âme, se sentant abandonnée de tous, vouée à marcher presque sans
retour, dans le chemin de la perdition.
Elle se laissa attirer
encore vers la vie déréglée parce que l’avilissement est le pire ennemi de la
volonté. Mais les promenades pompeuses sur le " Corso ", les
spectacles et les fêtes, les satisfactions et les joies que lui procurait
l’admiration qu’elle suscitait partout, autour d’elle, perdirent de la saveur.
Les satisfactions devinrent de plus en plus rares, la joie, de plus en plus
terne. Les yeux de ce religieux servite rencontré sur le seuil de Saint-Pierre,
en ce dimanche, ne cessaient de la fixer.
Quelque mois après, elle
se retrouve dans le même état qu’auparavant et quoi qu’il arrive, elle reprit
le chemin du confessionnal. Cette fois-ci, elle décide de se rendre à
Saint-Marcel, la chère église où son mariage avait été bénit. Elle entra,
regarda autour et vit, prés du second confessionnal, à droite, une longue file
de gens qui attendaient. Si ce prêtre, pensa-t-elle, s’est acquis la confiance
de tant de pénitents, il ne peut être que rempli d’une grande charité pour les
pauvres pécheurs. Elle fit donc la queue derrière les autres et attendit son
tour. Quand elle vint et entendit s’ouvrir le petit carreau mû par le
confesseur, au delà de la grille, son coeur fut subitement rempli de félicité.
Une voix douce, paternelle, tranquille, avant même qu’elle ne réussit à
prononcer un mot, lui dit : " Ah ! vous êtes venue, finalement, âme chère
du ciel ! Courage, ma fille, le Seigneur vous aime et vous veut tout à lui
". Et dès ce moment, sa vie devint ce qu’elle avait rêvé. Ce confesseur
n’était autre que le Père Angelo Verardi des Servîtes de Marie.
Dominique consentit à
démobiliser la mise en scène autour de la beauté de sa femme. Anne-Marie déposa
ses bijoux dans la cassette, ses habits fins, dans l’armoire. Elle endossa les
habits simples et ordinaires du peuple. Aux festivités, au théâtre, aux
promenades sur le " Corso ", elle substitua une vie humble et
recueillie.
Les nerfs de la maman
Santa, limés par de nombreuses années de fatigue et d’amertume, provoquaient,
vraisemblablement, dans la maison Taïgi, l’habituel drame belle-mère-gendre. De
cela, nous en parlerons par la suite, comme nous nous arrêterons aussi, à
d’autres faits de la famille d’Anne-Marie. Tenons-nous en pour le moment, à une
période capitale dans la vie de notre protagoniste.
Un jour, alors que maman
Santa lisait à sa fille, un livre de méditation, elle tomba sur un passage qui
faisait allusion au jugement universel, au jugement général. Ce passage
impressionna tellement Anne-Marie qu’elle éclata en larmes d’amour et
d’horreur. Elle entendit une voix qui lui disait : " Voilà, fille et
épouse bien-aimée, ton Père qui t’a toujours suivie, te destinait à devenir une
sainte alors que tu étais encore dans le sein de ta mère. Tu n’as aimé d’autre
que moi, et je te garderai même au milieu des vanités du monde. Je ne t’ai pas
abandonnée ; je te préserverai de nombreux périls, de la mort, parce que je
t’aime beaucoup. Un jour, tu verras celui qui te parle ".
Ce fut le début d’une
longue et ineffable idylle. Elle jouira du don de célestes colloques ; Jésus,
son divin Époux, la Vierge Marie, les saints et les anges les plus chéris, lui
parleront : saint Paul, l’apôtre, saint François d’Assise, saint Philippe Néri,
saint François de Paule, sainte Françoise Romaine, sainte Jacinthe Mariscotti,
l’Archange Raphaël, les Anges Gardiens, et même les âmes du purgatoire. Ils lui
confièrent de profonds secrets, lui firent d’intimes confidences, l’éclairèrent
sur les conditions de l’église et de la société, lui révélèrent l’avenir
d’illustres personnages et le sort de tant d’âmes. Ils la consolèrent et la
guidèrent sur les sentiers du bien.
Mais retournons en
arrière. Nous sommes au printemps de 1791. Un nombre incalculable de charismes
lumineux s’accumulent subitement dans l’âme d’Anne-Marie. Les premières
communications célestes d’amour, la réconfortent et l’intimident en même temps.
" Je te destine, lui
dit un jour l’Esprit divin, au moment de la communion qu’elle reçoit désormais
chaque matin, à convertir des âmes et à consoler toutes les catégories de
personnes : prêtres, frères, moines, prélats, cardinaux, et même mon Vicaire.
" Plus elle se sentait comblée d’affection divine et guidée vers une
mission presque vertigineuse, plus elle estimait cela impossible, plus elle
avait de mépris pour elle-même ; elle n’aurait jamais cessé de s’humilier. Elle
en vint aux flagellations. A la fin, elle se frappait violemment le visage sur
les tuiles du parquet, pour réparer les élans de sa beauté et de sa vanité du
passé.
À genoux, un soir,
prostrée devant le crucifix, les épaules nues, elle s’était donné la discipline
avant que son confesseur ne lui défende ce genre de mortifications. Elle vit de
loin, devant ses yeux, une lumière resplendissante comme le soleil, même si elle
était voilée d’un léger nuage. Elle en éprouva une grande frayeur puis se
frotta les yeux, pensant qu’il s’agissait d’une hallucination ou d’un piège
diabolique. Mais le soleil ne s’éteignait pas. Elle finit par se tranquilliser
et l’observa de plus prés. Il avait l’apparence d’un globe de feu duquel se
détachaient des rayons.
Depuis ce soir-là et pour
toujours, le soleil accompagnera Anne-Marie Taïgi ; elle l’aura constamment à
la vue, devant elle, pendant 47 ans, jour et nuit, à l’intérieur comme à l’extérieur
de la maison.
Éclairés par le soleil du
firmament, nous voyons les vivants, les choses de cette terre. Ainsi, illuminée
par son soleil mystérieux, Anne-Marie verra de façon étonnante, les réalités
physiques, les problèmes moraux de ce monde, " comme on voit passer les
images dans une lanterne magique ", comme elle l’explique elle-même, dans
son piquant langage populaire. Ce soleil toujours devant ses yeux, éloigné de
sa figure " d’environ dix palmes romaines et au dessus de sa tête,
d’environ trois palmes ", lui montrera les secrets de la nature et de la
grâce, les secrets du temps et de l’éternité, source continuelle et
intarissable de connaissances merveilleuses sur la vie présente, sur la vie
future.
Si au départ, la lumière
était un peu diffuse, elle se faisait plus éclatante, plus limpide, plus
lumineuse que sept soleils réunis ensemble, selon les progrès dans la vertu,
quand, sur suggestion de son confesseur, elle demandera à Dieu, la
signification de cette vision ininterrompue, la voix lui dira : " C’est un
miroir pour que tu distingues entre le bien et le mal ".
Un jour, à Dom Raphaël
Natali, un prêtre qui fut très cher et dont nous reparlerons, Anne-Marie tenta
de lui décrire ce soleil mystérieux : en haut, là où se terminent les rayons
lumineux, je vois une couronne d’épines et deux d’entre elles, d’un côté et de
l’autre descendent très longues jusqu’à se superposer pour former une croix
avec leur pointe arquée sous le disque solaire. Au centre du disque qui est
lumineux, je vois un personnage revêtu d’un manteau majestueux, assis, la tête
tournée vers le haut ; de son front, sortent deux rayons de lumière.
Dom Raphaël s’efforça de
comprendre comme il put, la signification de ce soleil. À la fin, il crut
reconnaître dans ces symboles, " le Christ Rédempteur ". Dans le
disque brillant, il vit en effet, la divinité. Dans la couronne d’épines et la
croix sous-jacente, formée par les deux épines majeures, il vit les éléments de
la passion. Dans la figure solennelle, il vit le Christ Rédempteur. Sur la
toile de fond éblouissante, passaient de temps en temps, les visions
particulières dont Anne-Marie saisissait la signification.
Nous nous sommes encore
laissés aller à une anticipation et nous devons retourner à cette Anne-Marie
qui, avec la rapidité du temps, passait d’une grossesse à l’autre et allaitait
chacun de ses enfants sans avoir recours à des procédés qui auraient pu
suppléer. Elle avait donné naissance à Anne-Séraphique, Camille, Alexandre,
Luigi, Sophie, Louise.
Elle éprouvait alors, un
vif et pressant désir du cloître ; elle souhaitait avoir l’opportunité de vivre
dans le silence et la paix, loin des bruits, de l’agitation, du tumulte de la
vie, au coeur de la cité elle ne réussissait pas à concilier son ardent désir
de vie religieuse avec son rôle d’épouse et de mère.
Elle parle au Père
Ferdinand de Saint Louis, trinitaire déchaussé du couvent de
Saint-Charles-aux-Quatre-Fontaines qui était devenu son confesseur à la suite
du Père Angelo Verardi des Servîtes de Marie et d’autres qui l’avaient guidée
au cours des années antérieures.
" Bien, lui dit le
Père Ferdinand, si vous voulez profiter, au moins en partie, des avantages
spirituels de la vie monastique, participer aux oeuvres saintes qui s’y
accomplissent, inscrivez-vous à une milice religieuse qui vous permettra de
vivre dans le monde tout en accomplissant les devoirs qui vous sont imposés par
votre état et votre condition sociale. Écoutez-moi bien : demandez à votre mari
s’il acquiesce à votre désir de devenir tertiaire. Ainsi, vous serez une
religieuse au milieu du monde ".
Parmi les Tiers-Ordres,
Anne-Marie choisit celui des Trinitaires, non parce que son confesseur est un
Trinitaire, mais parce qu’elle nourrissait une dévotion très profonde pour les
divins mystères, pour celui de la Trinité, en particulier. Elle demanda le
consentement de son mari.
" Ma femme,
rappellera Dominique après la mort d’Anne-Marie, me demanda la permission de
devenir tertiaire déchaussée de l’Ordre de la Sainte-Trinité et je le lui
accordai avec la condition, cependant, d’être fidèle à son rôle d’épouse et de
mère de famille. Ce furent mes conditions et elle les a toujours observées avec
une obéissance prompte, avec exactitude ".
Après la cérémonie de
vêture à Saint-Charles-des-Quatre-Fontaines, Anne-Marie demeura intègre en ce
qui avait trait aux exigences de son mari ; elle ne sacrifia en rien, les
droits et les devoirs qui lui incombaient, à l’égard de son mari et de sa
famille, se conduisait, de fait, comme une religieuse. Elle aurait pu se
limiter à porter le scapulaire sous les vêtements de chaque jour, mais elle
voulut, au contraire, depuis lors, se montrer spontanément en public, avec
l’habit des Tertiaires trinitaires : la tunique de laine blanche, le scapulaire
de même étoffe avec la croix rouge et bleue sur la poitrine, la coiffe sur la
tête, un manteau de mousseline blanche qui descendait très bas, la ceinture de
cuir, avec le rosaire pendant sur le côté, les pieds nus, dans des sandales.
Cela, quand elle sortait. Dans la maison, au contraire, elle portait la robe en
usage chez les femmes du peuple, lorsqu’elles s’adonnaient à des travaux
domestiques.
Tout se déroula ainsi,
pendant plus de deux ans, jusqu’à ce qu’elle porte un septième enfant. Elle
abandonna la tunique blanche pour éviter les critiques et pour ne pas exposer
l’habit religieux à la moquerie des malveillants. Dés lors, par la suite, selon
l’usage des femmes toscanes, elle endossa une robe de toile sombre, un fichu
blanc au cou, une coiffe blanche sur la tête, et, par dessus, un manteau blanc
assez ample pour pratiquement recouvrir le tout. Dans ses dernières années de
vie, vu son grand âge, elle fit quelques retouches à la façon de se vêtir. Le
tout se réduisait à la substitution de son manteau blanc, par le port d’une
mantille noire ; au passage d’un fichu blanc, à un voile totalement noir.
Revêtue d’un habit du
peuple, Anne-Marie continua d’agir toujours, devant tout Rome, comme la Vierge
Marie le lui avait recommandé lors d’un colloque : " II est nécessaire que
chacun se persuade, connaissant ta vie, qu’il est possible de servir Dieu dans
tous les états et toutes les conditions ".
Le plus grand mérite
d’Anne-Marie, fut de demeurer au milieu du monde sans y être : " L’âme qui
veut devenir mon épouse, doit mourir à tout le créé ", lui avait laissé
entendre la voix du céleste époux.
La maison Taïgi
Vinrent les années de fer
de la République romaine, les années de la tyrannie napoléonienne. Les foules
affamées du peuple descendirent dans la rue, se rangèrent en longues files
devant les fours à pain.
Au nom de Bonaparte, le
pape Pie VII avait été capturé par des troupes de gredins et traîné en terre
d’exil. Le pape absent, la famine était entrée dans Rome. Un jour, au milieu de
la cohue des pauvres gens, un soldat, en service d’ordre, heurta brusquement
Anne-Marie Taïgi. Dominique n’y vit que du feu. Il s’élança sur le soldat, lui
arracha le fusil des mains et, s’en servant comme d’une massue, lui servit un
tel coup qu’il le laissa plus mort que vivant.
C’était Dominique dans
ses démonstrations pyrotechniques, c’était son caractère explosif. Autant il
aimait sa femme, autant il était violent à l’occasion, pour lui prouver son
affection.
Dans la famille, avec les
enfants, il avait établi la loi du coup de sifflet. C’était le signal venant de
la rue, qui annonçait son entrée à la maison ; c’était comme le déclenchement
d’un système d’alarme. Deux fois, sa fille Mariuccia, dans son empressement à
lui ouvrir la porte, dégringola dans l’escalier au risque de se casser le cou.
" Si papa ne trouvait pas tout à sa place, racontera sa fille Sophie, il
s’emportait tellement, qu’il était capable de se saisir du coin de la nappe et
d’expédier en l’air la table déjà toute servie. Le potage fumant devait être
dans les assiettes, sa chaise placée en son lieu. En somme, il exigeait l’ordre
parfait en toutes choses, et le faisait avec rigueur. Ce que je dis de la
table, je le dis aussi du vestiaire, de toutes les choses appartenant à la
famille, à la maison, y compris la bonne tenue vestimentaire des personnes
".
Pour établir son
autorité, lorsqu’un des enfants en venait à l’oublier, Dominique se servait de
la loi du sifflet, comme on se sert parfois du béton. Et si quelqu’un tentait
de l’éviter, les désagréments devenaient plus considérables ; ce qui arriva à
l’un des garçons, à Camillo ou à Alessandro. Pour se soustraire à une
quelconque raclée qui lui était due, le coupable s’enfuit par les escaliers,
dans la rue. Passant sous une fenêtre, le père lui lança, mais sans
l’atteindre, un fauteuil assez lourd, un geste qui aurait pu avoir des
conséquences graves. Mais laissons passer.
Avec un homme capable de
telles sautes de caractère, Anne-Marie vécut presqu’un demi-siècle. Que le ciel
en soit remercié, la digne épouse faisait preuve de douceur et de charité,
apaisait le caractère de cet homme qui aurait pu allumer de continuels
incendies ; c’était l’opinion d’une voisine, amie de la maison.
Le même Dominique
l’admettra, du reste, quand, quelques années après la mort d’Anne-Marie, il
dira : " Souvent, je revenais à la maison, écrasé par la fatigue et un peu
troublé, parce que celui qui demeure serviteur doit en avaler de toutes sortes,
de la part des seigneurs, plus particulièrement. Mais Anne-Marie avait tant de
bonnes manières, tant d’amabilité, qu’elle faisait en sorte que tout soit selon
mes goûts. Elle faisait passer ma mauvaise humeur et m’égayait. Quand j’avais
des difficultés, je revenais à la maison et ainsi, je me tranquillisais. Où
trouver, maintenant, des femmes comme elle ? ".
Il ne faut pas croire que
la cohabitation matrimoniale ait été un martyre pour Anne-Marie. En effet, il
n’en fut rien. Très différents de caractère, ils connurent des jours heureux.
Elle, douce, tendre, calme, avait choisi un homme extravagant, impétueux,
hérissé, rude, agité, et elle en était amoureuse ; elle l’aimera toute sa vie
de tout son coeur de femme et d’épouse, sans un ressentiment, sans le moindre
regret.
Et, l’aimant, elle lui
obéissait en tout, même si elle en éprouvait de l’amertume ; son esprit de
mortification lui a permis de répondre à ses désirs.
" Que fais-tu avec
ce verre ? tu t’amuses avec ? ", disait Dominique, quand Anne-Marie, pour
ne pas trop flatter sa soif ou sa gourmandise, se limitait à une gorgée. "
Bois-le tout, te dis-je ! ". Elle lui souriait et le buvait.
" Que fait-on, ce
soir ? Habillons-nous convenablement et sortons pour nous divertir ". Et
elle, qui mourait d’envie de demeurer éloignée de tout divertissement, même si
c’était un divertissement de famille, souriait, endossait sa tenue d’ordinaire,
et l’accompagnait par le bras, avec les enfants en arrière, au théâtre des
marionnettes.
" M’étant aperçu,
racontera Dominique par la suite, qu’elle le faisait plus pour me plaire et
m’obéir que pour son plaisir ; que c’était pour elle un sacrifice, je la
laissai en paix ".
Avec Anne-Marie,
Dominique, le terrible, devenait souvent un petit chien ; et comme les chiots,
il aimait à être caressé. Il voulait que ce fut elle qui lui lavât les mains
quand il entrait, qui lui taillât les ongles quand il en sentait le besoin,
laçât ses chaussures quand il sortait. Il hurlait pour tant d’attentions.
Et comme il lui plaisait
de l’avoir tout prés de lui et qu’elle en était consciente, elle écartait
quiconque, autour d’elle, pour demeurer ainsi avec lui, le soigner, l’assister,
le préférant à tous les êtres humains du monde.
Il n’était pas rare qu’à
son entrée dans la maison, Dominique se trouvait mêlé à beaucoup de monde, à
des gens venus demander conseil, recevoir des communications d’en haut. En un
rien de temps, Anne-Marie libérait la place, gentiment mais fermement. Elle
accompagnait à la sortie les plus humbles comme les plus illustres personnage ;
le mari avant tout, l’époux premier servi.
Un mariage heureux en
fait, plus que dans l’expression, même si dans l’entourage, on ne réussissait
pas à le croire tel. Un mariage où le succès trouva son secret dans les
manières suaves d’Anne-Marie, dans ses douces réponses, dans sa tendre
mansuétude, au cours des années. De cette façon, elle réussissait à apaiser la
colère facile de Dominique, à rendre son rude caractère toujours plus souple,
nonobstant les mille querelles qui se produisirent au détriment de toute la
famille, les afflictions habituelles, les maladies, les mortalités, les
périodes de chômage, les temps de misère, les désaccords entre parents, les
contraintes des voisins qui n’épargnèrent pas la maison Taïgi.
Maman Santa, comme nous
l’avons déjà mentionné, demeurait avec sa fille à la maison. La pauvre vieille
avait suffisamment travaillé ; il était temps qu’elle trouve un peu de repos et
de paix. Chez les Taïgi, elle trouva le repos mais n’apporta pas la paix ; ses
nerfs étaient aiguisés au milieu de tant de difficultés ; et cela, pendant de
longues années. Elle entra vite en contradiction avec son gendre et il fut
impossible d’en sortir.
Et dire que Dominique,
par son amour pour sa femme, s’ingéniait à avaler d’impossibles crapauds. Il en
vint même à ne plus contredire sa belle-mère. Quand il apportait les restes de
table des princes Chigi, il acceptait qu’Anne-Marie réserve les morceaux les
plus délicats pour sa mère. " Dieu soit loué ! ", disait-il,
observant la belle-mère qui mangeait tout avec la gourmandise bruyante des
vieux. " Pour ce soir, au moins, j’ai contenté la maman ! ". Mais dès
que le plat était vide, la paix s’évanouissait. De nouveau, avec sa douceur
inaltérable, Anne-Marie laissait entendre à son mari, qu’en conscience, elle
devait s’acquitter d’une énorme dette de reconnaissance à l’égard de sa mère.
Elle faisait aussi comprendre à cette dernière, avec une même douceur
inaltérable, qu’elle devait, en conscience, obéir à son mari, le respecter,
l’aimer d’un grand amour.
Puis, le papa Luigi
Giannetti se mit de la partie. Dame Maria Serra Marina, l’unique patronne
auprès de qui il avait accepté de servir, était morte. Le petit vieux, on ne
sait comment, avait réussi à se trouver un lit à perpétuité, à l’hôpital
Saint-Jacques ; un refuge à prix gratuit, sa vie durant. En somme, l’unique
fortune de cet obstiné chasseur de chimères, avait finalement réussi à atteindre
Rome. À son lit à perpétuité, s’ajoutait une rente viagère que la patronne lui
avait laissée. Il aurait pu vivre très bien. Toutefois, malgré la distance à
parcourir entre les palais et le logis des Taïgi, une distance de deux milles,
environ, il y passait ses journées et y battait le tambour. Lorsqu’il entrait,
c’était comme un chien dans un jeu de quilles ; il ne cessait jamais de
grogner, de se plaindre, de larmoyer à propos de tout, comme un pauvre homme.
Dominique continua
d’avaler d’autres crapauds et, par amour pour sa femme, accepta qu’elle
sacrifiât les petites épargnes qu’ils avaient réussi à mettre de côté, afin de
satisfaire papa Luigi. Rien à faire, le petit vieux, sans même dire "
merci ", se laissait toujours aller avec de nouvelles jérémiades. Et ce
furent toujours les mêmes lamentations, les mêmes impolitesses.
Louis Giannetti allait
bientôt connaître la fin de son existence bizarre ; le dernier chapitre qu’il
écrira sera saisissant. Il mourut de la lèpre.
Il ne quitta plus le lit
de Saint-Jacques. Il ne sera pas pour autant abandonné par sa fille. Le geste
que maman Santa avait posé, lors du décès de Benoit-Joseph Labre, en 1783, le
geste de laver la dépouille souillée du saint, étendue sur un grabat de la rue
" De Serpenti " avait fortement impressionné Anne-Marie. Elle soigna
son père lépreux, nettoya ses pauvres membres avec des bains chauds, le changea
de linge, lui peignit les cheveux avec autant de patience qu’avec ses enfants.
Et ce, pendant des mois, sans en retirer un seul mot de reconnaissance.
Lorsqu’elle constata que la fin était proche, elle le prépara à recevoir les
derniers sacrements. Il fut administré, et accompagné par la main de sa fille,
jusqu’au dernier soupir, vers les sentiers éternels du ciel.
Elle conduisait, quelque
temps après, vers les mêmes sentiers, la maman Santa qui demeurait toujours
avec elle. Elle fut fidèle à sa mère jusqu’au bout, fut jour et nuit à son
chevet.
Quelle amertume les
voisins et voisines ne donnèrent-il pas à Anne-Marie ! Les murmures,
commérages, calomnies, injures, ne cessaient de pleuvoir sur elle. Le
va-et-vient de personnalités de toutes sortes dans la maison des Taïgi, était
le prétexte des conjectures les plus fantaisistes, les plus malicieuses, des
accusations les plus sordides.
Un jour, une femme eut
l’audace d’insulter, de porter atteinte à la réputation d’Anne-Marie. Dominique
l’apprit et sauta comme un baril de poudre. La diffamation dénoncée, il la fit
enfermer, sans rémission.
Anne-Marie apprit qu’elle
devait exercer au suprême degré la vertu de prudence, cacher à son mari jusqu’à
la plus petite des nombreuses offenses dont elle était la cible continuelle.
Elle défendait même à ses enfants d’en faire part à leur père, dans la crainte
que Dominique ne se laisse aller à de sévères vengeances, selon son style
rustaud.
Nonobstant les charges
croissantes, comme nous le verrons, cette femme extraordinaire, face aux
événements de son époque, sut conserver un rythme serein et constant à
l’avantage des membres de sa nombreuse famille. Comme le lui avaient appris à
l’école Sainte-Agathe ses pieuses maîtresses, Anne-Marie divisa et régla la
journée de chacun des siens, en tenant compte des devoirs de la piété, des
obligations du travail.
Le réveil, le matin,
était plutôt hâtif Après la prière et la collation, les filles s’adonnaient aux
travaux ménagers qui se prolongeaient toute la journée avec la seule
interruption du dîner. Le travail des fils se faisait à l’extérieur. Le soir, à
l’heure fixée, personne ne devait manquer la récitation du rosaire suivie de
prières additionnelles qui, en vérité, étaient un peu longues. Et c’était le
souper précédé et suivi, comme au dîner, de quelques prières. Suivait la
lecture de quelques pages de la vie d’un saint, de quelques entretiens sur les
missions catholiques. On chantait ensemble, enfin, un cantique religieux. Les
enfants passaient un par un, devant les parents, demandaient la bénédiction,
baisaient la main de l’un et de l’autre, gagnaient leur lit. C’était toujours
tôt.
En plus de s’éreinter à
la maison avec ses filles, Anne-Marie en arrivait, chaque jour, à soutirer
quelques heures de son temps pour s’adonner à des oeuvres de piété, s’employer
à des travaux qui rendaient service aux autres, tout en lui assurant un petit
revenu qui contribuait, avec l’apport de Dominique, à donner de l’élan à la
caravane familiale. " Plusieurs femmes ensemble, dira celui qui la connut
bien, n’auraient pu en faire autant que ce qui fut fait par elle ". Elle
ne pactisait jamais avec la paresse, comme en témoignait une voisine. Elle
agissait de façon à ce que tout soit en place. Ce qu’un autre ne faisait pas,
elle le faisait.
Quand tous les autres
dormaient, elle enlevait sa coiffe et, chassant le sommeil de ses yeux, elle
travaillait pour les pauvres, priait, méditait, plus unie que jamais à son
époux céleste. Le silence de la nuit lui procurait un souffle de paix comme il
en existe dans le cloître.
La sobriété, oui,
toujours ; mais une alimentation adéquate ne devait manquer ni au mari, ni aux
enfants. " Ici, à Rome, dira Dominique, en bon valtelin, on mange à
crever, un jour ; on a peine à se mettre un peu de pain sous la dent, le
lendemain. Dans la façon de procéder de ma femme, tout est à l’ordre, tout
s’équilibre, tout fonctionne comme une horloge, dans la paix du ciel ".
Dominique en savait quelque chose ; il mangeait toujours pour trois.
Et pendant que les autres
mangeaient la soupe et le ragoût garni de patates ou des fritures, de l’agneau
quand il n’était rien resté du dîner, le tout agrémenté par un morceau de
fromage, un peu de salade, du vin, soit pur, soit trempé, dont chacun pouvait
se servir en allant jusqu’à l’épaisseur de deux ou trois doigts, à la fin du
repas, Anne-Marie, debout, les servait tous ; elle ne s’assoyait que lorsque
tous étaient satisfaits. Elle-même se contentait de si peu ; très souvent, d’un
reste du jour précédent.
L’économie faisait
toujours loi dans le régime familial d’Anne-Marie Taïgi. On n’allait cependant
pas jusqu’à l’avarice. S’il est vrai que dans les meilleures années, elle ne
favorisait, pour aucun motif, le caprice chez ses enfants, lequel a pour effet,
en général, de les rendre la plupart du temps insatisfaits, il est aussi vrai
qu’elle n’hésita pas à engager des domestiques, lorsqu’elle le jugeait
nécessaire. Et elle les traitait comme ses filles. Il est certain qu’elle ne
leur imposait pas de services supérieurs à ceux que, malgré cette aide,
continuaient d’effectuer ses propres filles.
" Une fois,
racontera une des domestiques de la maison Taïgi, je portais une grosse carafe
qui pouvait valoir une douzaine de " paoli ", soit 56 centimes, une
carafe cannelée et dorée qui se brisa entre mes mains. Imaginez ce qui se
serait passé dans la plupart des familles. Eh bien, Anne-Marie dit
immédiatement, qu’il n’en était rien. Elle me servit du vin en ajoutant que de
telles carafes, elle en avait eu douze et qu’elles s’étaient toutes brisées de
la même façon ".
Généreuse, et toutefois
ménagère et parcimonieuse, lorsqu’elle sera malade au lit, elle appellera la
domestique à son chevet et se fera montrer le panier et la note des dépenses.
Si quelque chose dans le panier ne lui semble pas bon ou si la note lui
apparaît trop élevée, elle ne manquera pas de faire à la jeune fille le juste
reproche, mais avec douceur et sans lui tenir rigueur.
Les années de grande
misère commencèrent en 1799, une année après que les émissaires de Napoléon
eurent proclamé la République romaine. Ce fut la faim pour tous et pour la
maison Taïgi, parce que les temps furent tristes pour les princes aussi ; le
prince Chigi avait levé le camp et s’était réfugié à Paris. De sa nouvelle
résidence, il fit savoir à Dominique qu’il n’était plus en mesure de supporter
tant de domestiques, mais que lui, son fidèle serviteur, pouvait encore
demeurer au palais, s’il le désirait. Il devrait cependant se contenter de sa
propre nourriture, se débrouiller avec les seize écus convenus pour son
salaire.
Dominique y demeure, soit
pour le pain, soit pour le fricot, soit en témoignage de fidélité à son patron.
Ainsi, dans ces sombres années, tout le poids de la famille retombe sur les
épaules d’Anne-Marie et elle ne perd pas courage ; elle joue le rôle du père et
de la mère. Elle fut contrainte, chaque jour, pendant des heures et des heures,
à demeurer au milieu de la foule misérable et exaspérée des pauvres qui
s’entassaient férocement, devant les boulangeries, rudoyée par l’impolitesse
des soldats français.
Pour le reste de la
journée et la plus grande partie de la nuit. Anne-Marie travaillait et
travaillait. Elle s’est souvenue avoir appris, étant jeune, dans cet ouvroir du
quartier " des Monts ", tenu par des anciennes et braves dames,
certains métiers importants. Elle les reprit tous. Elle s’occupa à
confectionner des chaussures avec semelles de corde de ficelle, des chemises,
des vestons et des vêtements de femmes, sans toutefois négliger sa famille. Il
faut dire, cependant, que ce qu’elle gagnait suffisait à peine pour répondre
aux exigences des siens, apaiser leur faim.
Les travaux ingénieux et
soignés qu’elle exécutait, elle les fit apprécier par les soeurs des monastères
Saints-Dominique-et-Sixte. Les soeurs la firent connaître à Maria Luisa,
ex-reine d’Etrurie et duchesse de Lucques, qui, extasiée devant les vertus
d’Anne-Marie, profondément frappée par ses dons exceptionnels, entra en
relation avec elle. Elles se lièrent d’une amitié si profonde qu’elle,
l’aristocrate, et Anne-Marie, la fille du peuple, uniront leurs efforts.
Anne-Marie reçut plusieurs petits cadeaux pour ses enfants. Elle lui fixa une
allocation mensuelle de cinq écus pour que, dans la maison Taïgi, une lampe
brûlât à perpétuité, devant l’image de la Vierge.
Cette fois, Anne-Marie
accepta l’offrande parce qu’elle lui donnait l’eau à la bouche. Mais ni avant,
ni après, elle ne demanda une aide quelconque ; elle se contentait des secours
qui lui venaient spontanément, comme envoyés par la Providence, des secours
modestes. Si les secours avaient été trop importants, si elle avait voulu en
profiter moindrement, elle serait devenue riche et jugeait bon de les refuser.
Ainsi, lorsqu’elle refusa les faveurs du cardinal Pedicini qui désirait la
recevoir avec toute sa famille dans son palais, avec l’assurance d’avantages
inimaginables qui en auraient résulté ; comme elle refusa également, la
possibilité d’établir son mari et les siens, tout prés de la même ex-reine
d’Etrurie.
C’est elle qui, au
contraire, reçut un tas de gens dans sa maison. Elle reçut d’abord sa maman et,
quelques années après, en 1835, l’entière famille de sa fille Sophia. Elle
accueillit aussi, entre autres, ce bon Dom Rafaele Natali, affligé, doyen du
collège des chapelains pontificaux, qui fut son confident sincère, tant qu’elle
vécut. Il en pénétra les secrets du coeur à un point tel que s’il n’avait pas
été l’hôte agréé chez les Taïgi, nous ignorerions aujourd’hui bien des traits
de la merveilleuse élévation de cette femme.
Au palais Chigi, au
" Corso ", naquirent tous les enfants de Maria et de Dominique. Il
est vrai que Maria-Seraphina, Louis et Louise, étaient morts rapidement, encore
bébés. Toutefois, les quatre adolescents, Camille, Alexandre, Sophie et Mariuccia,
sans compter les parents et pour plusieurs années, la grand’maman Santa,
formaient une famille un peu trop nombreuse pour ne pas se sentir comprimée
dans ces deux pièces. L’heure vint, en effet, de l’inévitable décision :
renoncer aux faveurs du prince qui avait concédé ce logis gratuitement, et
affronter de nouveaux engagements de location pour une demeure qui permettait,
pour le moins, de respirer.
Ils la trouvèrent d’abord
sur la rue " del Giardino ", au numéro 195. Mais en 1827, les Taïgi
retournèrent habiter au " Corso ", juste en face du palais Chigi,
dans une maison démolie par la suite, sise exactement sur le terrain où surgit
aujourd’hui la " Rinascente ". C’était un petit appartement très peu
éclairé, très peu aéré. Si déjà, au palais Chigi, les fenêtres d’Anne-Marie
avaient regard sur la venelle du " Sdrucciolo ", dans cette maison,
les fenêtres s’ouvrent à l’arrière, donnent sur la ruelle " Cacciabobe
".
En 1828, les Taïgi
déménagèrent de là pour affronter une période pénible de déplacements : trois
fois, en trois mois. Ils passèrent d’un appartement aux Anges-Gardiens, dans
une maison prés de l’église Saint-Nicolas " in Arcione " où
aujourd’hui débouche un tunnel sur la " via del Tritone " ; et enfin,
au palais Fiorelli, sur la " via del Burro ", face à l’église
Saint-Ignace. Mais ils durent quitter de nouveau parce que, comme je l’ai déjà
mentionné, une autre famille s’ajouta à celle des Taïgi, celle de Sophie,
devenue veuve avec cinq enfants.
La nouvelle famille
trouva logement au numéro 262 du palais " Righetti ", qui ne fait
qu’un, aujourd’hui, avec le palais " Odescalchi ", face à l’église de
Sainte-Marie " in via Lata ". C’est dans cette maison que mourra
Anne-Marie Taïgi, en 1837.
Anne-Marie allaita
elle-même tous ses enfants, après les avoir fait baptiser dans les vingt-quatre
heures qui suivirent leur naissance. Elle les fit confirmer en leur temps, même
avant la septième année, pour ceux qui étaient en danger de mort.
Elle les instruisait
tous, pratiquement seule, leur enseignait la doctrine chrétienne. Elle les
confiait à quelqu’un d’autre, le dimanche seulement ; les garçons à l’église
paroissiale, les filles aux religieuses.
Vers l’âge de douze,
treize ans, comme il était d’usage alors elle les mena, l’un après l’autre, à
la première communion, et s’appliqua à les faire grandir dans l’amour de Dieu
et du prochain. Elle accompagnait souvent ses filles dans les hôpitaux, pour
qu’elles puissent exercer leur piété envers les malades. Elle veilla avec soin,
avec grand souci, sur l’innocence de ses enfants. Elle les préserva de l’esprit
mondain, centrant son action sur une devise populaire : " L’oisiveté est
la mère de tous les vices ". Si bien que sa fille Mariuccia dira : "
nous étions toujours occupés à quelque chose ".
Anne-Marie fit donner à
tous les quatre un certain degré d’instruction. Mais comme elle n’eut pas
d’ambition pour elle-même, elle n’en nourrit pas non plus pour ses enfants.
Elle qui, par ses
relations en haut lieu, auprès de familles cossues qui auraient pu installer facilement
les garçons dans des postes lucratifs et honorifiques, au moment où ils
atteignaient l’âge de gagner leur pain à la sueur de leur front, leur choisit
des patrons qui leur convenaient ; plaça le premier dans une boutique de
barbier de la place " delle Carrete ai Monti ", et fit apprendre au
second le métier de chapelier, chez un certain Salandi, au " Monte Citorio
". Elle continua à les accompagner dans leur cheminement, à veiller sur
leur conduite morale, la préparation de leur avenir, leur initiation à
l’épargne. Quand ils se marièrent, non parce qu’elle les perdit de l’oeil, les
deux fils et leurs épouses vinrent toujours à elle pour entendre ses conseils
sereins, sur l’éducation de la famille.
Puis Camille fut frappé
par la tuberculose ; la maladie fut inexorablement rapide. Dans ces jours,
Anne-Marie était encore malade au lit. Elle se fit toutefois porter en
cabriolet à la maison de son fils. Quand la bru la vit arriver, elle exulta,
car elle était convaincue que Camille serait guéri ; la prédiction semblait sur
les lèvres de la belle-mère. Il n’en fut pas ainsi : souriante, Anne-Marie
s’approcha de son fils, le baisa et lui dit : " Allons, demeure dans la
joie ; une place au ciel est déjà préparée pour toi. Tu pars avant, mais nous
nous reverrons bientôt, en paradis ".
Mariuccia, la plus jeune,
adolescente quelque peu vaniteuse, travaillait tous les jours dans le but de se
procurer quelque vêtement élégant. Rien de mal, cela ne l’empêcha pas, par la
suite, de demeurer célibataire, de devenir une infatigable soeur de
Saint-Vincent-de-Paul.
Mais ce fut Sophie, la
pièce maîtresse d’Anne-Marie. Comme sa mère, elle étudia chez les "
Pieuses Maîtresses ", jusqu’à l’âge de quatorze ans. De quatorze à
dix-sept ans, elle fréquenta les écoles de " San Dionisio ". De là,
elle se rend travailler dans une boutique de chaussettes, dans la venelle
" Cacciabove ". C’est elle qui fut la plus près de la maman ; elle
partageait ses prières, ses sacrifices, ses vicissitudes ; elle modela son âme
sur la sienne.
Elle épousa Paolo Micali,
mantouan, de moeurs correctes et de condition modeste, à qui elle donna six
enfants. Puis ce fut la mort subite du mari. Les bras grands ouverts de la
maman Anne-Marie se fermèrent sur la fille éprouvée, sur l’épouse éplorée.
" Elle m’embrassa
avec le coeur d’une vraie mère, calma par dessus tout ma douleur, adoucit mon
épreuve en m’exhortant à la foi, à la confiance en Dieu qui avait tout prévu,
qui exprimait sa volonté ".
Et quand Anne-Marie
deviendra gravement malade, sentant sa fin prochaine, encore une fois, elle
s’adressera à sa fille chérie, pour la rassurer : " C’est ma dernière
maladie ; j’en mourrai. Mais ne crains rien parce que je penserai à tous les
tiens. Même quand je ne serai plus là, vous serez toujours consolés et
préservés ". Et il en fut ainsi.
Derrière l’histoire
Dans le silence terrorisé
de la ville, un bruit sourd de tambours. Puis, le long piétinement d’une marche
qui se déroule dans les rues désertes, le piétinement sourd d’artilleries sur
les pavés disjoints. Quelques regards furtifs au travers des volets à peine
ouverts. Un grincement de portes cochères qui se barricadent.
On en est au 2 février
1808. Les troupes du général Miollis occupent Rome et se dirigent vers le
Château Saint-Ange. Les aigles de Napoléon montent sur la construction massive,
pour pointer leurs becs vers la coupole de Saint-Pierre. Une colonne
d’artillerie rejoint le Quirinal et rabat les bouches de ses canons contre le
portail du palais papal.
C’est le début de l’acte
final, un acte qui se veut décisif, qui tend à vaincre la résistance de Pie
VII, à réduire le dernier fragment de terre italienne qui échappe encore à
l’ombre du drapeau impérial, sous le joug de l’invincible usurpateur. Toutes
les autres provinces d’Italie ont cédé depuis. Les différentes cartes de la
mosaïque politique de la péninsule se sont, en même temps, colorées de bleu,
blanc, rouge, au son de la " Marseillaise ". Seul le pape continue à
tenir ferme, repoussant avec grande dignité les brutales prétentions de
Bonaparte.
Jamais les aigles hissés
autour de l’ange du tombeau d’Hadrien, pas même les bouches des canons pointés
sur le Quirinal, n’ébranlent la fermeté de Pie VII.
Dans les jours qui
suivent, les cardinaux sont arrachés, un à un, au pontife et aux proscrits de
Rome ; leurs revenus sont confisqués. Seul, le cardinal Pacca, secrétaire
d’état, est restitué, une seconde fois, de la prison au pape. Mais Napoléon se
reprend vite de cette générosité, en disposant de tous les évêques qui lui
refusent un serment illicite, avec l’annexion totale des états Pontificaux à
l’empire français, avec cette déclaration que Rome est maintenant " ville
impériale et libre ".
Le 10 juin 1809, Pie VII
promulgue, à ce sujet, la bulle d’excommunication contre les envahisseurs de la
souveraineté pontificale. Il déclare nulle et sans valeur la volonté
tyrannique, frappe Napoléon Bonaparte d’anathème.
À Rome, la nouvelle
explose comme une bombe, plus puissante que celle de l’artillerie de
l’usurpateur. Et pendant que déjà, souffle par les rues, le premier vent
précurseur de révolte, des messagers volent rapidement vers le Danube, pour
informer l’empereur engagé au combat dans ces contrées, et lui demander des
renforts d’urgence.
" Je reçois, en ce
moment, écrit Napoléon à Joachim Murât, le 20 juin 1809, la nouvelle que le
pape nous a tous excommuniés. C’est une excommunication qu’il a portée contre
lui-même. Désormais, plus d’égards ! Le pape est un fou furieux qu’il faut
renfermer. Faites arrêter le cardinal Pacca et les autres intimes du pape
".
À peine eut-il reçu ce
message de Naples, Joachim Murât envoya des renforts au général Miollis. Fort
de ces troupes nouvelles, le général se crut de taille pour faire face à la
situation, exécuter les ordres.
Aux premières lueurs de
l’aube, le 6 juillet 1809, une bande d’énergumènes soudoyés, obéissant aux
ordres d’un général et d’un colonel français, forcent le portail du Quirinal,
font irruption dans les escaliers et les corridors, pénètrent dans les
appartements pontificaux, arrachent le pontife de son lit, le déclarent arrêté
au nom de Napoléon. Ils le traînent à l’extérieur, en terre française.
Ce n’est que la première
étape du long exil du malheureux pontife. Vieilli et malade, il est reconduit,
quelque temps après, en Italie, et relégué à Savone. Il reviendra en France, à
l’improviste, en juin 1812. Il était dès lors à bout de forces, et le voyage,
par des chemins impraticables, le conduisit au bord de la tombe. Au passage du
Mont-Ceny, les médecins le déclarent à l’article de la mort. Il reçoit le
Saint-Viatique et l’Extrême-Onction. Il pourra toutefois atteindre
Fontainebleau. Le repos et sa force d’acier lui permettent de survivre, de
porter le poids de toutes sortes de persécutions imprégnées de violence.
Entre-temps, cependant,
l’astre de Napoléon commence sa fatale parabole déclinante. Et quand "
l’invincible " est contrait de rendre la couronne qu’il s’était posée
lui-même sur la tête, de ses propres mains, quand le dominateur du monde est
forcé de fixer la proue vers les quelques kilomètres carrés de l’île d’Elbe,
Pie VII reconquit la liberté et rentra dans Rome.
Tous les habitants sont
dans la rue, ce 24 mai 1814, très émue, la foule porte la Souverain Pontife en
triomphe, tout le long du parcours, jusqu’à Saint-Pierre, au Quirinal. Parmi la
foule, incroyablement dense, une petite femme du peuple, vêtue d’un manteau
blanc, un mouchoir blanc au cou, une coiffe blanche sur la tête, une coiffe
ample qui descend très bas, jusqu’aux pieds, qui recouvre des vêtements de
toile sombre, agite les mains au passage du cortège papal, les agite
joyeusement, pleurant de bonheur. Et quand sous l’étincellement de milliers de
vêtements sacrés, elle aperçoit le vénérable Pontife, elle se prosterne sous sa
bénédiction pour se relever et crier : " Jésus-Christ est entré dans
Jérusalem ". Cette petite dame était Anne-Marie Taïgi.
A part le dernier épisode
que nous venons de citer, les événements historiques ont été relatés de façon
très sommaire, apprêtés par une école quelconque. Ces événements ont été
assaisonnés d’ingrédients aptes à en faire ressortir les diverses perspectives,
encadrés dans le vaste tableau des causes et des effets politiques, sur un fond
de situations sociales particulières, dans les limites d’intérêts économiques
spécifiques, sur les flots d’enjeux militaires, à travers de nombreux filets
d’intrigues diplomatiques.
Aucun texte ne rapporte
quoi que ce soit, au sujet de cette humble femme nommée Anne-Marie Taïgi, femme
du peuple ; l’histoire officielle la néglige, l’ignore. Pourtant, son action,
s’il nous était donné de scruter le livre secret des desseins de Dieu, nous
apparaîtrait d’une importance qui surpasse en influence et de beaucoup, les
facteurs politiques et militaires qui ont joué dans la chute de Napoléon.
Cette humble maman
romaine que le ciel avait gratifiée du don prodigieux du soleil mystique et des
voix célestes, avait, durant toutes les années où Pie VII avait souffert l’exil
et la détention, engagé chacune des ressources de son âme pour obtenir de Dieu
la libération du pontife et son triomphe sur l’usurpateur.
Ce furent des années
d’apostolat ardent, tissées d’amour et de martyre, où les prières les plus
ferventes s’allièrent aux jeûnes les plus rigoureux, aux pénitences les plus
sévères. Chaque jour, elle allait visiter les églises les plus éloignées de
Rome, s’y rendait pieds-nus, peu importe la distance à parcourir. Prostrée
devant le tabernacle, elle offrait toutes ses souffrances pour la paix et la
liberté de l’Eglise, pour le retour du vicaire du Christ à son siège romain.
Dans ces églises, elle avait connu ses entretiens les plus intimes avec le
ciel.
Un jour qu’elle demandait
à son époux céleste la signification de cette terrible permission par laquelle
Napoléon Bonaparte avait pu s’emparer, par des tueries et des ruines, d’un
continent tout entier, porter atteinte de façon barbare, à tout droit humain et
divin, l’Epoux répondit : " A cette fin, j’ai mandaté Napoléon. Il était
le ministre de mes fureurs ; il devait punir les iniquités des impies, humilier
les orgueilleux. Un impie a détruit d’autres impies ".
Bien rapidement, alors,
Anne-Marie saisit le sens profond et terrible de ces guerres déchaînées à
travers toute l’Europe, là ou des trônes étaient en train de tomber.
L’anéantissement des méchants entraînait inévitablement le sacrifice de
plusieurs innocents, la souffrance de peuples entiers, la persécution de
l’église et de son chef. Convaincue qu’elle était, Anne-Marie savait qu’un
amour intense aurait pu apaiser la justice suprême, plonger l’humanité dans
l’océan de la miséricorde divine ; elle avait offert toute sa vie en holocauste,
pour payer, elle, la pauvre petite dame du peuple, les délits des impies
orgueilleux. Par ses prières et ses larmes, par ses mortifications et ses
pénitences, par son irrésistible charité, elle voulait obtenir le pardon du
ciel pour tous ses frères et sœurs de la terre.
La voix de son céleste
époux lui fit savoir que tout son amour, toutes ses souffrances, n’avaient pas
été inutiles ; il lui précisa le jour exact où Pie VII serait ramené à Rome et
célébrerait sa messe pontificale à Saint-Pierre.
Elle annonça d’avance cet
événement, dans le détail, et, cette fois encore, les faits en donnèrent la
confirmation.
Anna-Maria, enfant, était
montée de Sienne à Rome, comme nous le savons déjà. C’était le lendemain de
l’élection de Pie VI au souverain pontificat. Elle verra depuis lors, se
succéder, sur le siège de Pierre, quatre papes : Pie VII, Léon XII, Pie VIII,
Grégoire XVI. Au delà de la personnalité de chacun, elle reconnaîtra " le
doux Christ sur la terre ". Elle en parlera toujours avec le plus
vénérable respect. Elle incitera tout le monde à la vénération du chef visible
de l’église, s’agenouillera sur son passage, comme elle le faisait devant
Jésus-Christ, présent dans le Très Saint Sacrement.
Elle eut des relations
particulières et diverses avec les différents souverains pontifes. Il s’agit de
rapports très étroits, maintenus par personne interposée, même si elle pouvait
obtenir audience à n’importe quel moment, étant donnée sa réputation de
sainteté. Grâce à ses relations avec des personnages de haute autorité de la
curie romaine, consciente comme elle l’était de la haute dignité, de la majesté
suprême des pontifes, consciente aussi de sa petitesse de femme de maison,
jamais elle ne demandera autant, se contentant de les vénérer de loin, de prier
pour eux et pour leur façon d’agir.
Pie VII avait entendu
parler d’Anne-Marie Taïgi avant même d’être envoyé en exil. Évidemment, il
avait une opinion élogieuse de cette exceptionnelle femme du peuple. En 1809,
il avait accordé une indulgence spéciale pour une prière composée par elle.
Toutefois, ce ne fut qu’après son retour à Rome, que les rapports avec elle
devinrent plus étroits.
La maison Taïgi était, en
ce temps, fréquentée par Mgr Carlo Pedicini qui était lié d’amitié avec le
pontife. Un bruit malveillant avait, cependant, frappé l’oreille du prélat ; il
était lancé contre la Taïgi, par une de ces commères habituelles du voisinage.
Le commérage fut immédiatement classé par Monseigneur ; il y voyait une très
vulgaire calomnie. Néanmoins, puisque les bavardages allaient bon train, il
dut, en conscience, se demander s’il devait, oui ou non, continuer à fréquenter
cette maison. Dans le doute, un bon jour, il s’ouvrit à Pie VII. Ce dernier,
avec un large sourire, lui dit " Continuez à y aller, Monseigneur ; la
Taïgi, je la connais bien, même si je ne l’ai jamais vue en personne. J’aurais
même le désir de la faire venir jusqu’ici ; je m’en suis abstenu pour ne pas
servir d’autres appâts aux commérages déjà nombreux. Toutefois, dites-lui
qu’elle m’écrive, de grâce ".
Après que Monseigneur
Pedicini lui en eut fait rapport, le désir du pontife sera exaucé. Elle
rédigera une lettre par obéissance et seulement par obéissance. Elle exposa au
pape, " l’état entier de son âme d’enfant ".
Ce fut une lettre qui
plut beaucoup au vénérable pontife : " Tout est vrai, tout est vrai
", répétait-il avec un joyeux étonnement. Depuis ce jour, toutes les fois
que Mgr Pedicini revenait de ses visites à Anne-Marie Taïgi, le pape voulut
qu’il lui rapportât toutes les nouvelles qu’il savait. Et chaque fois que
Monseigneur s’apprêtait à retourner chez elle, le pape lui envoyait une
bénédiction particulière, l’invitait à prier à ses intentions.
Le soir du 16 juillet
1823, le pape, alors âgé de 80 ans, tenta de se lever d’une chaise à bras,
tomba lourdement par terre et se brisa le col du fémur. Ce fut le début de sa
dernière maladie. Le grand âge fit le reste, par la suite.
Anne-Marie continua quand
même de supplier le ciel de conserver à l’église ce pape héroïque. Elle savait
déjà, par son soleil et les voix célestes, que, désormais, la fin était proche.
C’est elle qui, dans les derniers moments de la vie du pontife, demanda que lui
furent administrés d’urgence, avant qu’il ne soit trop tard, les derniers
sacrements.
A Pie VII, succéda le
cardinal Délia Genga qui prit le nom de Léon XII et voulut immédiatement à ses
côtés, comme conseiller, Mgr Vincent-Marie Strambi, évêque de Macerata, passioniste
de sainte réputation.
Mgr Strambi connaissait
bien Anne-Marie Taïgi pour en avoir été, quelques années auparavant, et pour un
certain temps, le directeur spirituel. Appelé par le pape dans le but de
l’assister de ses conseils lumineux, sur les questions les plus difficiles du
gouvernement de l’Eglise, il aura recours aux dons surnaturels, aux lumières
divines, dont était comblée Anne-Marie. Il bénéficia à maintes reprises de ses
conseils.
Il agissait ainsi, tous
les soirs, sous le sceau du secret. Il communiquait les problèmes les plus
importants à Mgr Natali pour qu’il les transmette à Anne-Marie Taïgi dont il
visitait souvent la famille. " Puis, aveuglément, dira Mgr Natali, je
recueillais les conseils d’Anne-Marie, pour en donner la réponse au Saint-Père.
Il en fut toujours ainsi, tant qu’il vécut. Les conseils de la Taïgi revêtaient
pour lui, un caractère d’une prudence et d’une sagesse telles qu’ils furent
toujours exécutés ponctuellement par le Saint-Père ".
Il n’était pas question,
pour Mgr Strambi, de faire passer ces conseils avec les siens. Nullement, en
effet ! Il spécifiait chaque fois, au pontife, que sur telle ou telle affaire
importante de l’Eglise, Anne-Marie pensait ceci ou cela. Le pape se montra
obligeant, dans sa reconnaissance envers cette femme extraordinaire du peuple.
Un jour qu’elle fut atteinte à une jambe, il envoya chez elle son chirurgien
particulier, Todini, pour lui transmettre ses nouvelles, lui offrir les soins
qui lui étaient nécessaires.
Après trois mois à peine de
règne, Léon XII fut terrassé par une violente maladie. Mgr Strambi, devant le
verdict funeste des médecins, envoya quelqu’un chez Anne-Marie pour lui
demander de prier, de prier beaucoup, pour que fut évitée à l’Eglise cette mort
prématurée. Quand Mgr Natali, porteur du message, parla à Anne-Marie Taïgi,
elle s’affairait au milieu des marmites, dans la cuisine. Elle consulta son
soleil infaillible et dit en souriant : " Non, non, il ne mourra pas. Il
lui reste encore du temps ; il a encore à se fatiguer pour l’Église. Dites
plutôt à Monseigneur qu’il se prépare lui-même, à la mort ".
Le lendemain, les
médecins laissèrent le pape à l’agonie. Néanmoins, Mgr Natali connaissant la
réponse d’Anne-Marie, entra dans la chambre à coucher de Léon XII, sur la pointe
des pieds, s’approcha à son chevet et lui dit avec grande simplicité, de ne pas
craindre ; quelqu’un, vous voyant mourant, a offert sa vie pour la vôtre.
Dès ce moment, l’état de
santé du pape s’améliora de façon inespérée et son saint évêque, son conseiller,
commença à souffrir, de façon inexplicable. De sorte que, après quelques jours,
quand Léon XII put se dire complètement rétabli, saint Vincent-Marie Strambi
expira.
Les rapports entre Léon
XII et l’humble femme du monde, ne s’interrompirent pas pour autant. Mgr Natali
fut nommé secrétaire du Maitre-Camérier de Sa Sainteté, et dans toutes ses
tâches, le vieux prêtre continua de recevoir les confidences, les conseils
d’Anne-Marie Taïgi. Il lui confiait entre autre, chaque soir, la liste des personnes
qui avaient demandé audience auprès du pape, pour le lendemain. Elle
interpellait, comme toujours, son soleil mystique, indiquait chaque fois les
noms des personnages tout à fait inconnus pour elle, qu’il pourrait
paisiblement laisser passer, pendant que d’autres, au contraire, devraient être
accueillis avec prudence ; que d’autres encore, devraient être écartés jusqu’à
ce qu’on ait des informations précises, des garanties sûres de leur pays
d’origine. " Ainsi, une tragédie conjurée fut évitée, comme en témoignera
Mgr Natali, quand arriva un secrétaire mal intentionné, que je retins à l’écart
".
Un matin, alors que
l’aube commençait à blanchir, Anne-Marie entendit la voix de son Époux céleste
; il lui ordonnait de façon impérieuse : " Lève-toi et prie pour mon
Vicaire qui est sur le point de paraître devant mon tribunal, pour la reddition
de ses comptes ".
Le pape était malade
depuis quelque temps, et on le savait. Mais, personne ne soupçonnait l’issue
mortelle. On disait, au contraire, et la chose était connue dans la maison des
Taïgi, que le malaise était mineur. Nonobstant tout cela, Anne-Marie se leva de
son lit et pria pour un passage heureux du pape, du temps à l’éternité. Le jour
suivant, Mgr Natali annonçait à la famille Taïgi, la nouvelle de la mort du
pape.
Pie VIII succéda à Léon
XII et eut, comme son prédécesseur, des contacts indirects avec Anne-Marie,
pendant les vingt mois de son pontificat. Entre-temps, d’autres eurent recours
à Anne-Marie, Mgr Pedicini, pour ne nommer que celui-là, parce qu’il était ami
de la famille Taïgi. Il avait été créé cardinal et résidait au Quirinal, à
titre de secrétaire des mémoires de Sa Sainteté.
Quand le pape Pie VIII
tomba malade, ses souffrances eurent des hauts et des bas qui tinrent en alarme
ceux qui l’entouraient. On allait des espoirs les plus grands aux prévisions
les plus déconcertantes, jusqu’au jour où le pape parut s’acheminer
définitivement vers la guérison. Ce fut un grand moment de soulagement, au
Quirinal.
Le cardinal Pedicini fit
immédiatement connaître la nouvelle à Mgr Natali pour qu’il en informe
Anne-Marie Taïgi. Mais Mgr Natali parut inexplicablement abattu ; ce qui
inquiétait le cardinal : " Qu’est-ce qu’il y a ? lui demande-t-il. Vous
a-t-elle dit quelque chose de différent " ? " Malheureusement oui,
Eminence ", répondit Mgr Natali.
Et la mort du pape fut
annoncée au monde, trois jours après, soit en février 1829.
Quelques mois avant la
mort de Pie VIII, Anne-Marie avait appris et prédit, que tel cardinal lui
succéderait sur le siège de pierre. Un jour, elle s’est rendue, avec son ami
prêtre, Raphaël Natali, à Saint-Paul-Hors-les-murs, pour visiter le
Saint-Crucifix.
En arrivant, elle
s’agenouilla sur l’unique prie-dieu qui se trouvait dans l’église. Et, comme
cela lui arrivait souvent, elle tomba en extase. Le cardinal Mauro Cappellari,
de l’Ordre des Camaldules, entra au même moment. Mgr Natali l’apercevant, poussa
du coude Anne-Marie qui se leva pour céder le prie-dieu à Son Eminence. La
femme ne s’aperçut de rien. Le cardinal fit signe à Mgr Natali de ne pas s’en
préoccuper. Il s’approcha de la balustrade et s’agenouilla. Quand Anne-Marie se
réveilla de son sommeil extatique, elle fixa son regard sur le cardinal.
Sur le chemin du retour,
c’est Mgr Natali qui, maintenant, raconte textuellement : " Je
l’interrogeai sur le regard fixé pendant quelque temps sur le cardinal. Comme
par obéissance, elle devait porter tout à ma connaissance. Elle me dit
simplement : " c’est le futur pape ".
Quelques mois
s’écoulèrent avant que le pape Pie VIII mourut. Le 14 décembre 1830, s’ouvrit
le conclave qui s’annonçait houleux. Deux autres mois et plus s’écoulèrent
avant que survienne un accord dans l’élection du nouveau pape, une élection qui
prit fin le 2 février 1831. Le nouveau pape fut bel et bien le camaldule Mauro
Cappellari. Il s’apprêtait à prendre en mains les destinées de l’Eglise, au
cours d’une période vraiment dramatique. Il choisit de s’appeler Grégoire XVI.
Ce fut l’époque où deux
sociétés secrètes déployèrent toutes leurs forces, comme s’il y avait eu
émulation entre elles, pour nuire le plus possible à l’autorité du pape,
essence même de l’église catholique.
La première et la plus
ancienne de ces sociétés, lit-on, dans une page d’histoire, était formée de
plusieurs autres sociétés subalternes, lesquelles, sous le voile des
Francs-Maçons, s’occupaient plus ou moins directement de religion, de
politique, de morale, s’attaquaient aux croyances sociales. L’autre, formait,
sous le nom de " carbonari ", la milice armée, prête à combattre
l’autorité publique à la moindre occasion. Préoccupée de morale, elle
s’employait à troubler les esprits ; des moyens matériels étaient prévus dans
le but de renverser les institutions. Dans les orgies secrètes de l’une, les
adeptes d’une certaine philosophie prononçaient des oracles et promettaient la
régénération des peuples. Les rencontres de l’autre étaient l’occasion
d’orchestrer, d’aiguiser le poignard des conjurés rassemblés, dans le but
d’assurer une action la plus efficace possible dans l’oeuvre de destruction.
En quelques années,
l’incendie de la révolution se répandit de plus en plus, dans les différentes
contrées de l’Etat romain, même si Rome en fut toujours épargnée. Il n’est pas
certain, feuilletant les pages de notre histoire ou d’autres écrits
historiques, que nous trouverions l’explication d’un fait si singulier. Il
faudrait peut-être, pour connaître toute la vérité, fouiller le grand livre des
desseins de Dieu.
Toutefois, certains
témoignages nous permettent d’entrevoir un peu de lumière à travers les
ténèbres, et cette lumière provient d’Anne-Marie Taïgi.
" Armée de l’esprit
de foi, écrivit Mgr Natali, elle n’hésita pas à s’offrir comme victime à son
Seigneur, pour la tranquillité et la paix de l’église, à ce sujet, le Seigneur
lui dit que, si elle s’offrait en satisfaction de sa divine justice, il
libérerait Rome de la turbulence et des pièges des sectaires. Elle accepta bien
volontiers la dite condition par laquelle Rome demeurerait toujours libre, de
son vivant, des embûches et des révolutions des ennemis.
Le Père Philippe, carme,
ajoute : " Elle fit tant et tant, elle pria tellement, accomplit si
fidèlement ses promesses à l’égard de son céleste époux, que dans Rome, les
plans sanguinaires et cruels des impies ne pouvaient s’enraciner ; elle en
obtenait la confirmation renouvelée et répétée. Elle ne devait pas s’épouvanter
à la vue des complots machinés dont elle était témoin. Les plans des susdits
scélérats mis au point, ils verraient tous les fils de leurs complots tranchés
d’un seul coup, comme il en a toujours été pour cette ville. Voilà pourquoi, je
dis ailleurs, jusqu’à quel point Rome est redevable à la servante de Dieu
".
Jusqu’à la fin de sa vie,
c’est un fait, si les intrigues des révolutionnaires en venaient à exploser, à
introduire la confusion dans Rome, elles étaient immédiatement et régulièrement
maîtrisées. L’histoire ne nous dit pas le pourquoi ; mais derrière l’histoire,
on trouve la calvaire d’une frêle femme du peuple qui prit sur ses faibles
épaules, les peines, les désolations, les croix. Cette humble femme s’offrit en
victime à Dieu, pour la paix de Rome. Et Dieu sauva Rome du fléau des révoltes.
L’ange de Rome
La voix sortit de dessous
un lugubre capuchon : " Voici mon ange ". C’était une voix joyeuse,
remplie d’espérance, comme elle s’était fait entendre, dans cette salle de
douleurs et de honte, tant d’autres dimanches.
La femme était étendue
sur un petit lit immonde, à l’hôpital Saint-Jacques-des-Incurables, de Rome. Le
capuchon noir en cachait la laideur du visage ; un visage complètement ravagé,
méconnaissable. Tout était rongé, défait, déchiré par la maladie. La bouche
seule se dessinait encore, si bouche il y avait. Quel trou ébréché dans lequel
on introduisait de temps en temps, quelque breuvage !
On n’osait plus, depuis
longtemps, s’approcher de Santa, la contagieuse ; elle occupait ce coin de
l’hôpital, réservé aux malades réduits à l’état le plus répugnant. Personne,
sauf une petite dame du peuple, venait à son chevet, certains dimanches,
accompagnée d’une fillette.
Chaque fois, Santa
entendait la voix de loin, et chaque fois, son coeur tressaillait dans sa poitrine,
en des battements de joie qui lui donnaient l’impression d’être en paradis.
" Voici mon ange ", disait-elle, et l’ange s’assoyait tout prés du
lit. Il lui demandait avec douceur, comment elle se portait. Et si elle avait
besoin de quelque chose, de n’importe quoi, elle le lui procurait ; elle était
là pour cela, pour l’aider de toute manière et en toute nécessité. Mais Santa,
la contagieuse, répondait toujours par un non, qu’elle n’avait maintenant plus
besoin de rien. Tout ce qu’elle désirait, elle l’avait déjà reçu au moment où
elle, son ange, avait franchi le seuil de sa chambre, pour lui livrer une
parole d’amour.
Le dimanche, Anne-Marie
Taïgi accompagnait une de ses filles, ou Sophia ou Mariuccia ; elles se
rendaient à l’hôpital de Saint-Jean-de-Latran ou à celui de la
Trinité-des-Pèlerins, ou justement à celui de Saint-Jacques-des-Incurables,
pour y exercer des oeuvres de miséricorde.
Un jour, près de Santa,
il parut que Sophia allait s’évanouir en raison de la puanteur que la malade
exhalait. Quand la mère et la fille furent à l’extérieur, cette dernière s’en
plaignit. " Ma fille, lui répondit la mère, si tu pouvais sentir l’odeur
de son âme ! Il est certain que cette dernière passera immédiatement du lit au
paradis ".
S’il est vrai que l’amour
d’une épouse, d’une mère, doit d’abord se déverser sur l’homme que la
Providence lui a donné comme compagnon de vie, et sur les créatures qui sont
nées de cette union, il est autrement vrai que son affection et sa tendresse ne
doivent s’épuiser, comme cela arrive trop souvent, entre les quatre murs de la
demeure familiale, se transformer en froideur et en égoïsme pour les gens de
l’extérieur.
Si une leçon jaillit
vraiment de la vie d’Anne-Marie Taïgi, pour toutes les épouses et pour toutes
les mères, c’est bien celle-ci : ne rien enlever, absolument rien, à la chaleur
du foyer domestique, et projeter la flamme d’amour pour ses frères et soeurs de
l’entourage, connus ou inconnus, afin qu’ils puissent être tous et toutes, de
vrais enfants de Dieu. Anne-Marie Taïgi, épouse dévote et mère très aimante, ne
manqua jamais à ses vieux parents : on garda à la maison maman Santa jusqu’à sa
mort, on soigna le vieux papa jusqu’à la dernière minute, alors qu’il était
horriblement atteint de la lèpre.
En plus du mari, des
fils, des gendres, l’amour d’Anne-Marie se répandit dans un vaste rayon ; il
atteignit les sentiers les plus profonds et les plus obscurs de la pauvre
société qui vivait alentour. Elle éprouva, plus d’une fois, L’amère saveur de
la misère. La souffrance des autres fut à chaque instant, sa propre souffrance.
Sa compassion pour les besogneux, sa peine pour les souffrants, dépassaient
toujours le sentiment naturel de pitié, de commisération, que chaque être
éprouve pour les malheureux du monde. Pour tout et pour tous, sa charité fut
patiente, tendre, douce, empressée, toujours prête ; une charité, en d’autres
termes, exercée à un degré héroïque, dans des situations souvent impossibles.
Quand, avec les troupes
d’invasion du général Miollis, une épouvantable famine s’appesantit sur Rome,
elle qui, avec son mari, ne savait pas comment nourrir leur famille y parvint
et réussit même à en secourir bien d’autres qui étaient encore plus
tourmentées. Nombreuses furent les familles qui survécurent, en ces années,
grâce à son aide, le " miracle " de leur survivance.
Quand elle n’avait plus
un sou en poche, ni de pain à offrir, à qui lui en demandait, elle laissait de
côté toute considération, et allait personnellement, frapper aux portes de ceux
qui en avaient encore. Ce qu’elle obtenait, elle le distribuait avec justice,
selon les besoins les plus pressants.
Un épisode parmi mille
autres : une fois, une femme déguenillée et tout ébouriffée, les traces de la
faim gravées dans le visage, serrant dans ses bras un entortillement de
chiffons, une petite créature se présenta à sa porte. Anne-Marie jeta un regard
aux alentours. Il n’y avait rien à manger, dans la maison. La garde-robe était
aussi demeurée vide. Que faire ? Elle enleva son propre vêtement et le fit endosser
à l’instant par cette pauvrette. Puis, elle la pria ainsi : " Je vous prie
de revenir tous les vendredis à la même heure ". Pour elle et son enfant,
il y aura bien toujours quelque chose.
Parmi les misérables,
elle préférait les enfants pauvres. Jeanne Cams, sa domestique, raconte qu’un
matin très froid d’hiver, sortant avec Anne-Marie de l’église de
Saint-Barthélemy-des-Bergamasques, " un pauvre petit garçon passa. Il
était pieds nus, déguenillé, à demi vêtu. Il tremblait de froid, dévoré par la
privation de la faim. Il était, de plus, malpropre, éclaboussé de boue, et
personne n’avait le goût de l’approcher. Le jeune bambin s’approcha
d’Anne-Marie Taïgi et sollicita une légère aumône. C’était, pour Anne, une
précieuse rencontre ; elle l’amena au foyer familial, le réchauffa, le
restaura. Toute empressée, elle lui donna ensuite des vêtements ; tant bien que
mal, elle lui fit mettre des bas, chausser une paire de chaussures qui
appartenait à son fils. Elle veilla sur lui, l’assista avec tant de charité
qu’on eut cru qu’il était le fils d’un grand seigneur. Après lui avoir enseigné
les principes de la religion, lui avoir assuré le réconfort auquel fait appel
une si pénible situation, elle lui donna une aumône en argent, selon ses
moyens, et le laissa aller au nom de Dieu ".
De ces enfants
malheureux, rencontrés dans la rue et amenés à la maison pour les nourrir et
les vêtir, l’histoire d’Anne-Marie Taïgi en est remplie. Elle continuera d’agir
ainsi, malgré le fait regrettable que le bambin qu’elle avait assisté,
rassasié, mis à neuf, ait couru droit au ghetto, vendre l’habit à peine reçu,
pour se remettre demi-nu et être de nouveau en quête d’aumônes.
La friponnerie d’un seul
petit voyou ne pouvait suffire pour figer ou geler la grande affection d’Anne-Marie
pour les enfants les plus malheureux et les plus tristes ; ils étaient les
préférés de Jésus.
Anne-Marie aima aussi les
malades ; nous le savons déjà. Une de ses pires dénigreuses tomba malade, un
jour. Il s’agissait d’une commère maligne et incurable qui avait contribué, de
façon obstinée, par ses médisances et ses insinuations malveillantes, à créer
une atmosphère de soupçons et de troubles autour de la demeure des Taïgi. Quand
Anne-Marie sut qu’elle était malade, elle oublia tout, courut à la maison de sa
persécutrice, pour lui rendre les offices de la charité, tant au plan moral que
physique, raconta sa fille Sophia. Elle lui fut toujours attentive, toujours
disponible ; dans les visites qu’elle lui faisait, elle l’exhortait à la
patience, lui apportait quelque biscuits, quelques carafes de bon vin qu’elle
réservait pour les malades, quand on lui en faisait cadeau. Elle l’exhortait à
la foi en Dieu ; elle y voyait un moyen excellent de supporter une maladie
lente et pénible. Elle l’invitait souvent à la patience, l’invitait à la
prière, à l’oraison, convaincue que le Seigneur la consolerait. De fait, la
malade guérit.
À l’amour des pauvres et
des malades, Anne-Marie ajouta l’amour des pécheurs, des gens qui souffrent de
la pire des maladies. Elle les aima à un point tel, qu’elle leur dédia la plus
grande part de ses prières les plus ardentes, ses plus dures mortifications,
ses plus exténuantes pénitences, ses pèlerinages nocturnes qui s’échelonnaient
sur une durée de quarante nuits consécutives, qui la conduisaient à la porte
des églises où elle se prosternait et demandait à Dieu la conversion des âmes
qui lui étaient chères et même de celles qu’elle ne connaissait pas, mais qui
lui avaient été recommandées.
" Combien d’hommes,
écrivit avec autorité le cardinal Pedicini, liés à de vieilles et scandaleuses
pratiques, parvinrent à une véritable contrition et bénéficièrent des
miséricordes divines, par le renoncement immédiat à leurs péchés, aux pratiques
infernales d’amitiés malhonnêtes ".
Que de souffrances
morales, que de souffrances physiques, n’a-t-elle pas appelées sur elle-même,
de la part du Seigneur qui répondait à ses désirs en chargeant ses épaules de
croix nombreuses qui procuraient le salut aux âmes en détresse, à ceux qui
étaient condamnés à l’échafaud, qu’Anne-Marie considérait être les plus
malheureux parmi les malheureux. De leur terrible sort, elle ne pouvait
s’apaiser, compte tenu des nombreux délits qu’ils avaient commis. Pour leur
conversion, elle mobilisait aussi Mgr Natali qui avait accès aux prisons,
pouvait se rendre utile aux disgraciés, jusqu’au dernier moment de leur vie.
C’est dans cette lumière
de vertus héroïques, qu’étaient attirés les très chers malheureux ; une lumière
qui venait d’en haut. Toutes les biographies qui racontent la vie d’Anne-Marie
Taïgi, soulignent son charisme prophétique. Il est certain que parmi les
multiples dons qu’elle a reçus, le don de prédiction de l’avenir a joué un
grand rôle. Ainsi, le Père éternel récompensait sa créature qui lui appartenait
totalement. Du reste, les témoignages qui se rapportent à la vie de nombreux
saints, en constituent une confirmation richement documentée. Il est certain
qu’Anne-Marie fut une de ces saintes créatures que Dieu gratifia largement de
ce don.
Quand Pie VIII était
encore pape, Anne-Marie fit une prophétie d’un caractère dramatique formidable,
qui garde aujourd’hui encore son intérêt tout à fait exceptionnel. Il s’agit
d’une prophétie qui produisit alors, chez ceux qui la recueillirent, un trouble
profond, un émoi intense qui continue, jusqu’à maintenant, à éveiller, en qui
la redécouvre parmi les vieux documents, la même commotion et un trouble
identique, parce qu’elle implique le futur de l’humanité, inséparable de
l’avenir de l’Eglise, le plaçant parmi les tourments de cette lutte de l’homme
qui tend, depuis son origine, à assurer le triomphe du bien sur le mal.
Riche en particularités,
d’une clarté des plus évidentes, elle nous est parvenue par une déposition
juridique assermentée de Monseigneur Raphaël Natalie.
Un jour de 1818, parlant
des prochains fléaux de la terre, des futurs fléaux du ciel, elle précisa
qu’ils pourraient, les uns et les autres, être atténués par les prières des
âmes pieuses. Anne-Marie prédit que des millions d’hommes sont appelés à mourir
par une main de fer, qu’un grand nombre mourront à l’occasion de guerres, de
litiges, par traîtrise, et d’autre millions, par des morts imprévues. Des
nations entières arriveraient ensuite à l’unité de l’Église catholique.
Plusieurs turcs, païens et juifs, se convertiront, en demeurant tout confus
devant les chrétiens, admirant leur ferveur et l’exactitude de leur vie. Elle
me dit plusieurs fois que le Seigneur lui fit voir dans le mystérieux soleil,
le triomphe et la joie universelle de la nouvelle Eglise, si grands et si
surprenants, qu’elle ne pouvait pas l’expliquer.
En 1922, le lendemain de
la première guerre mondiale, on publiait, selon notre jugement personnel, la
plus sérieuse biographie d’Anne-Marie, conforme en tout à l’histoire, selon la
critique qui en a été faite. L’auteur, le cardinal Salotti, rapporte largement
cette prophétie qu’évitaient de mentionner la plupart des biographes.
S’arrêtant sur la prédiction des carnages en masse, il annonce la conversion de
peuples entiers, le triomphe de l’Eglise. L’auteur ajoutait : " Si on
pense à la guerre mondiale qui s’est déchaînée en 1914, pour la première fois,
dans l’histoire, périrent simultanément, sur divers champs de bataille, des
millions et des millions d’hommes. Si on pense aux centaines de milliers tués
par trahison, dans la même période. Si on pense aux tueries de la révolution
bolchevique, en Russie, une révolution qui éclata sur les ruines de la même
guerre. Si on pense aux luttes intestines dont les haines de partis se
répandirent furieusement, souillant de sang les rues de la ville. Si on pense
aux milliers et milliers de victimes emportées par les tremblements de terre de
Sicile, de Calabre, de Marsica. Si on pense, enfin, à cette peste qui intervint
en 1919, à la fin de la guerre cruelle ; dans l’espace de quelques mois, dans
différentes parties du monde, se produisit cette hécatombe épouvantable de
millions et de millions de morts, une contagion qui ne s’était jamais vue dans
les siècles passés. " Si on pense, ajoutons-nous, énumérant seulement
quelques autres fléaux de la terre qui suivirent l’année 1922, quand le
cardinal Salotti écrivit ces lignes, il songeait aux guerres d’Afrique, à la
guerre d’Espagne, au second conflit mondial, rendu plus apocalyptique par les
génocides hitlériens, par les exterminations atomiques de Hieroshima et de
Nagasaki, au calvaire de l’Europe de l’Est, à la révolution de Chine, à la
guerre de Corée, à la guerre de l’Indo-Chine, à l’insurrection et à la
répression de la Hongrie, au martyre de plusieurs peuples coloniaux, à la
grande famine qui continue de ravager l’Inde et d’autres pays, aux massacres
d’Algérie, jusqu’aux derniers tremblements de terre. " Si on réfléchit,
dis-je, à tout cet ensemble de morts, par les guerres, les trahisons, les
tremblements de terre, les contagions, concluait le cardinal Charles Safotti,
on a l’impression d’être en présence de fléaux prédits par notre Bienheureuse
".
Personne ne nous en
voudra d’ajouter d’autres faits, d’autres événements, si on considère la grande
espérance que tout le monde met dans les conclusions du concile Vatican II,
l’espérance qu’on met aussi dans la perspective du retour à l’unité de
l’église, un retour qui apparaît lointain, qui n’est pas pour autant, une
utopie.
Pour raconter toutes les
prophéties faites et réalisées par notre protagoniste, nous aurions besoin de
beaucoup plus d’espace que celui réservé à ce travail, à cette rapide
narration. Elles eurent, en effet, pour objets, de nombreuses personnes de
haute autorité, beaucoup de gens du peuple absolument inconnus.
Un jour de 1827,
disons-nous dans le but de faire ressortir certains épisodes, Mgr Louis Lambruschini,
partant dans la direction de Paris, comme nonce apostolique à la cour de
France, fit demander à Anne-Marie Taïgi de le recommander vivement à Dieu, dans
sa mission. Anne-Marie regarda dans son soleil céleste et lui fit savoir :
" que son voyage serait heureux, son séjour à Paris, angoissant, qu’il
vivrait un long et pénible martyre de l’esprit ". Et peu de temps après,
se succédèrent un tant soit peu d’événements qui dominèrent dans la suite,
durant la révolution imprévue de juillet 1830, et le nonce dut revenir à Rome.
Un autre jour, Anne-Marie
rencontra le cardinal Mazzarini, sur la rue. Élevé depuis peu à la pourpre
sacrée, il se rendait à Saint-Pierre, dans toute la splendeur de sa dignité
nouvelle. " En ce jour, dans la pompe, murmura la voyante à celui qui
était à ses côtés, dans un mois, la tombe ". À la fin du mois, elle
assistait aux funérailles du cardinal.
Une autre fois, elle
allait visiter une femme du peuple, qui avait donné naissance à une jolie
petite créature. Elle la trouva très bien, mais appela toutefois, en aparté,
quelques personnes présentes, et leur dit : " Vite, faites-lui donner les
sacrements, la pauvre va mourir ! " Tous demeurèrent surpris et
incrédules. Mais comment ! Tout allait pour le mieux ; la mère et l’enfant
jouissaient d’une parfaite santé. Ils en parlèrent avec le confesseur et ce
dernier fit gorge chaude sur cette prophétie. Dans la suite, " on ne sait
jamais ", cette voyante les devinera toutes. On finit par lui faire
apporter les derniers sacrements. Cela arriva juste à temps ; dès qu’elle les
eut reçus, la jeune maman expira.
Mais la vie d’Anne-Marie
Taïgi fut une suite d’épisodes semblables. Nous nous limiterons à rappeler une
de ses dernières prédictions ; elle fut d’un grand intérêt pour l’histoire.
Elle en fit mention, un jour, dans la maison, alors que le dialogue avait
cessé. Elle avait trait aux désordres qui commençaient à exploser, un peu
partout, dans les Etats romains. En cette occasion, Anne-Marie Taïgi fit
remarquer que ce qui est arrivé, n’était rien en comparaison avec ce qui allait
arriver, dans quelque temps. Elle ajouta que le successeur du pontife régnant,
Grégoire XVI, aurait un pontificat plus violent, au milieu de tourments
continuels. Elle ajouta, toutefois, que le futur pape vivrait plus longtemps et
qu’à la fin, il mourrait paisiblement, à Rome, dans son lit, après un long
pontificat.
Nous devons maintenant,
nous rendre compte que, à l’époque où Anne-Marie prononça ces paroles, Grégoire
XVI occupait depuis peu, le siège de Pierre. Quelques années plus tard, en
1837, Anne-Marie Taïgi mourrait et Grégoire XVI continua à régner jusqu’en 1846.
Pie IX seul, serait appelé à lui succéder.
Tel que prédit par
Anne-Marie longtemps auparavant, le règne de Pie IX se terminera en 1878, après
31 ans, 7 mois, 23 jours d’exercice de la papauté.
Anne sera, dans la suite,
encore plus précise. Elle indique, en une autre occasion, au chanoine Raymond
Pigliacelli, que des temps difficiles s’annoncent pour l’Eglise. A la question
du prélat qui porte sur l’identité du pape qui régnera en cette période de
mésaventures, Anne répond : " Le pontife qui régnera, en sera un qui n’est
même pas cardinal. De plus, il ne demeure pas à Rome ".
Elle confirma, quelque
temps après, ses propos, à Mgr IMatali, à qui elle avait indiqué la façon de
faire face à la persécution que subirait l’église de Rome, à l’intérieur de laquelle
l’iniquité serait triomphante. Dieu exigera un pontife saint, choisi selon son
coeur, et à qui il communiquerait des lumières tout à fait spéciales ; que
celui-ci serait élu d’une manière extraordinaire, qu’il serait assisté et
protégé par Dieu, d’une façon particulière, que son nom répandu dans tout
l’univers, serait applaudi par les peuples et craint par les rois. Le Turc
lui-même le vénérera, demandera à le féliciter. Il fera des réformes. Il
instruira le peuple, recevra des secours de toutes parts. Les impies seront
écrasés et humiliés, beaucoup d’hérétiques, sous son pontificat, retourneront à
l’unité de la Sainte église Catholique Romaine. Elle souligna, de nouveau, à la
fin, que le futur pape était dans le moment, un simple prêtre et se trouvait
dans un pays assez lointain.
C’est un fait, à l’époque
où Anne-Marie annonçait à l’avance, ces événements, Dom Giovanni Mastaï
Ferretti, le futur Pie IX, était au Chili, à titre d’auditeur du délégué
pontifical, Mgr Giovanni Muzzi.
Les prédictions devinrent,
dans la suite, plus circonstanciées. Elle déclara, conversant un jour avec le
comte Broglio, secrétaire de la Légation de la Sardaigne, que " le
prochain pontife effectuerait des réformes dans le but de se décharger de tant
d’affaires temporelles de l’état ; il appellerait au pouvoir des séculiers qui
rempliraient des charges pour que lui puisse s’occuper plus longuement des
affaires spirituelles de l’Église ". Elle fit aussi savoir, par la suite,
au cardinal Racanati, que le successeur de Grégoire XVI ne devait pas se
déconcerter, qu’il aurait confiance en Dieu et recevrait assistance, qu’il
serait aidé de l’extérieur, même en argent, de ceux en qui il ne porte pas foi,
confesse le cardinal, et qu’à la fin, le pontife opérerait des miracles ".
Plusieurs années après,
l’histoire devait, d’une manière ponctuelle et avec exactitude, confirmer la
prédiction d’Anne-Marie Taïgi, sur la longueur exceptionnelle du pontificat de
Pie IX, sur les tourments qui devaient l’agiter. Il suffit de feuilleter certains
textes de l’histoire pour en trouver la documentation : rappelons l’assassinat
de Pellegrino Rossi, ministre de Pie IX, jusqu’à sa fuite à Gaète ; les orgies
sacrilèges des athées, les spoliations des églises et des couvents ; les
meurtres des prêtres et des religieux du Transtévère, la lutte anticléricale
conduite au parlement et sur la place, dans les écoles et dans la presse,
jusqu’au massacre d’une troupe de canailles qui tentèrent de s’emparer de la
dépouille mortelle du même Pontife, dans la nuit du 12 au 13 juillet 1881,
durant sa translation au Campo Verano.
Les réformes que fit Pie
IX, par la suite, pour se libérer des affaires temporelles consistaient en ceci
: céder le conseil municipal à la ville de Rome, le conseil des députés à
l’Etat. La vénération profonde que, d’un pôle du monde à l’autre, les peuples
ont voulu manifester, était de nature à consoler le pontife, à lui faire
oublier les nombreux outrages, les persécutions qui pleuvaient contre lui. Ils
lui signifiaient, en même temps, leur approbation. Les Turcs appuyaient aussi
son attitude ferme. Les rois de l’Europe firent preuve de respect mais
exprimèrent de la crainte, une crainte qu’ils ne réussissaient pas à dissimuler
; ils dépouillèrent le pape de son pouvoir, l’église, de ses biens.
L’aide matérielle qui lui
parvint de toute part, quand il fut réduit à la pauvreté, témoignait de
l’affection qu’on avait pour lui. La Belgique, à elle seule, lui fit parvenir
un montant de 285,000 francs, en l’espace de deux ans. En 1877, lors de la
célébration de son jubilé d’or sacerdotal, lui parvinrent de partout des dons
pour une valeur de 10 millions de lires. Le denier de Saint-Pierre atteint,
cette année-là, un montant supérieur à 16 millions de francs. De la sainteté et
des miracles de Pie IX, il reste la documentation rigoureuse des procès
informatifs qui ont été confiés à la Sacrée Congrégation des Rites, pour la
promotion de sa cause de béatification. Après 1878, le pontife est entré dans
l’histoire pour de longues années et il demeure des traces de son passage. Sa
prédiction tout à fait à point, ne pouvait qu’être confirmée par la suite. Une
explication ne peut être profitable que si on s’y arrête, que si on la fait
sienne. Anne-Marie Taïgi, cette humble femme du peuple, a donné la preuve que
le don extraordinaire qu’elle possédait, correspondait à de prodigieuses
lumières divines, venues d’en haut.
Le martyre de la renommée
Le fait, avant même
d’être significatif, fut pour le moins curieux. Dans l’intention de parler des
rapports spirituels qui intervinrent, durant une longue période, entre deux
êtres exceptionnels qui vécurent à Rome, à la même époque, totalement voués,
bien que dans des champs divers, à la gloire de Dieu, des rapports entre saint
Vincent Pallotti et Anne-Marie Taïgi.
Il faut poser, au
préalable, que le saint fondateur des Pallotins eut plus d’une fois recours aux
conseils et à l’aide de la protagoniste de notre histoire, la sachant
généreusement dotée du ciel, de dons très singuliers. En pratique, dans les
moments difficiles de sa splendide mission, chaque fois que le besoin d’une
intervention de la Providence divine s’imposait, devenait urgente, dom Vincenzo
Pallotti qui ne connaissait pas personnellement Anne-Marie Taïgi mais avait
rencontré une de ses amies et lui avait ouvert son âme. Il l’avait priée de
raconter ses peines à Anne-Marie et de la charger d’intercéder pour telle ou
telle grâce, en sa faveur, ou en faveur de son oeuvre.
Après chaque colloque,
déclara par la suite Vincent Pallotti, j’ai régulièrement et ponctuellement
" vérifié les effets salutaires " des prières de cette humble mère de
famille.
Mais le fait curieux est
celui-ci : Après la mort d’Anne-Marie Taïgi, le saint prêtre se rendit compte
du fait que, toutes les fois qu’il s’est accordé une entrevue avec une amie
d’Anne-Marie, il avait, en réalité, rencontré Anne-Marie elle-même. " Par
humilité et vertu ", elle disait ne pas la connaître personnellement,
cachant son identité.
Dom Vincenzo Pallotti a
cité cet épisode particulier, pour mieux souligner la modestie de cette femme
qui, parvenue à se trouver au centre de la vénération de personnages de très
haut rang, de personnages de très grande popularité, cherchait, néanmoins, par
tous les moyens, à soustraire sa personne de la pression de l’admiration.
L’estime qui l’entourait
pesait lourdement sur l’âme d’Anne-Marie Taïgi, comme nous l’indiquent très
bien les larmes qu’elle a versées, dans les heures de tranquillité qu’elle
s’assurait, en fuyant. Elle se retirait dans sa chambrette, et là, à genoux, à
travers les sanglots, elle conversait avec son époux céleste, le blâmait
presque, confidentiellement, de ne pas lui vouloir plus de bien. S’il m’aimait
de fait, disait-elle, il m’aurait fait marcher dans les traces des infortunés,
dans la voie qu’a empruntée Jésus. Dans les moments où elle était encensée par
l’exaltation, elle comparait sa vie à celle du Sauveur cruellement traîné dans
l’abjection. Elle tremblait à la pensée que toutes ces louanges n’étaient
autres que l’oeuvre trompeuse du démon pour l’infatuer, la séduire, la conduire
à la pire des chutes. Ainsi, chaque fois qu’elle sortait de sa chambrette, elle
essuyait ses larmes et portait dans son coeur le dessein le plus ardent, de
s’éclipser du milieu des adulations, de disparaître, de s’évanouir dans
l’oubli.
Mais, comment faire ?
Depuis des années, désormais, sa maison était un véritable port de mer où
arrivaient continuellement, des reines et des princes, des cardinaux et des
évêques, des ambassadeurs, des généraux, des gens nobles, des gens du peuple.
Tout cela ne pouvait malheureusement être tenu secret, dans un voisinage aussi
bavard que médisant. Se bouchant les oreilles et se fermant les yeux, elle ne
pouvait connaître le nombre de ceux qui appréciaient ses vertus. Les cardinaux
Pedicini et Barberini, Cesari et Riganti, Fesch et Cristaldi, des évêques, des
prélats, tels Piervisari et Ercolani, Guerrieri et Basilici, et bien d’autres,
la disaient sainte, en toutes lettres, et ce, avec une parfaite conviction.
Plusieurs personnages de vie sans tache, ont été proclamés bienheureux,
vénérables, serviteurs de Dieu : Vincent Strambi, Gaspard del Bufalo, Menocio,
Bernard Clausi, frère Félix de Monte Fiascona, frère Pétrone de Bologne,
Elisabeth Canori-Mora, Vincent Pallotti. Combien l’exaltèrent et la
glorifièrent en toute occasion ? Marie Louise de Bourbon et les dames de sa
cour à Lucques, les nobles Bandini et Gaétani, un groupe de prêtres, de
religieux de tous Ordres.
Elle ne manquait jamais
d’écrire à Turin, à la comtesse Dandozeno, femme du gouverneur général de la
Savoie, pour se déclarer indigne, humble femme du peuple qu’elle était,
d’accepter son invitation à la cour, pour la conjurer de ne parler d’elle à
personne, de ne pas faire allusion, même vaguement, aux grâces obtenues du
Seigneur, par ses pauvres prières. Lorsqu’elle ne pouvait faire autrement, elle
disait que le Bon Dieu s’était servi de la " plus misérable créature
", qu’elle ne voulait, d’aucune façon, être connue.
Jamais elle ne révélait
le nom des personnages illustres qui venaient la visiter ou qui l’appelaient
pour des conseils. " Si nous ne l’avions pas vue de nos yeux, dira sa
fille Sophia, ou si nous ne l’avions pas accompagnée dans plusieurs foyers,
nous n’aurions jamais rien su d’elle ".
Elle ne manquait pas de
s’humilier en toute circonstance, pour souligner qu’elle était, elle-même,
comme toutes les autres, une femme, et pas plus. Quand elle entendait parler de
quelques coquineries commises par quelqu’un, son opinion était invariablement
que " si le Seigneur ne nous protégeait pas, nous serions capables de
choses pires, encore ". Elle apportait tout de suite l’exemple de Philippe
Néri et répétait avec lui : " Seigneur, retiens-moi fortement, sinon, je
me ferai juif, aujourd’hui ". Et chaque instant lui servait pour rappeler
à tous que, " si nous tenons, c’est grâce à Dieu, totalement ".
Chaque fois que quelqu’un
la priait de le recommander au Seigneur, elle lui répondait : " L’un pour
l’autre ; vous, faites-le pour moi, et moi, faiblement, je le ferai pour vous
". Et si certains insistaient, disant qu’elle était la plus écoutée du
ciel, elle répondait : " Vous est-il déjà arrivé de dire cette chose ? Et
elle en était troublée. Je ne m’explique pas le fait que le Seigneur me laisse
sur terre, lorsque je songe à mes péchés. Ne dites plus ces hérésies parce que
Dieu seul est juste, Dieu seul est saint ".
Puis, souvent, c’était
quelqu’un que Sophia rencontrait dans la rue et lui faisait cette remarque :
" Oh ! vous êtes une jeune fille tellement chanceuse, avec une mère sainte
comme la vôtre ". Et Sophia rapportait tout cela à la maison. Anne-Marie
lui répliquait : " Ma fille, n’y prête pas attention parce que les saints
ne sont pas de ce monde. Prions Dieu pour qu’il permette que nous mourrions en
saints ".
Et chaque fois que des
personnalités de premier rang de l’église lui manifestaient ouvertement la
grande estime qu’elles lui portaient, elle ne pouvait demeurer en paix, se
répétait déconcertée ! " Je suis une pécheresse, une pauvre misérable, je
ne sais pas comment ceux-ci peuvent agir de la sorte, à mon égard ".
La renommée, les
hommages, la célébrité, en somme, l’ont suffoquée, inquiétée, pendant toute sa
vie.
Il n’y a pas de doute que
cela fut pour Anne-Marie la croix la plus pénible parmi tant d’autres qui l’accablèrent
; l’unique croix qu’elle ne réussit jamais à embrasser avec joie et amour, et
dont elle a tenté de se dégager, à maintes reprises.
Elle éprouvait une grande
répugnance pour les " hosanna " ; elle ne s’en trouvait pas digne.
Elle chercha de toutes manières, et en plus d’une occasion, à se soustraire aux
rencontres avec des admirateurs. Elle y parvint, quelquefois, avec Lord
Clifford, d’Angleterre, par exemple.
Mgr Raphaël Natali avait,
un jour, révélé à ce grand seigneur en visite, " certaines circonstances
que lui confia Anne-Marie Taïgi, circonstances, lui précisa-t-il, dont les
divers épisodes ne pouvaient être connues que par des lumières venant de Dieu
". Le lord était demeuré littéralement abasourdi de ces révélations, et
est devenu à ce point entiché à l’égard de l’humble romaine, qu’il ne pouvait
désirer autre chose que de la connaître personnellement. Il ajouta que, s’il
avait eu l’honneur de la rencontrer, il lui aurait assigné ainsi qu’à toute sa
famille, après sa mort, une substantielle pension mensuelle, avec l’adjonction
de quelque titre de noblesse ".
" J’accomplis
moi-même la mission, raconte Mgr Natali, mais elle sourit et refuse toujours
l’ostentation qui se pavane ; elle préfère la vie cachée, dans le Seigneur
". " Lord Clifford envoya chez moi, par la suite, une personne qui
désirait la rencontrer. Voyant la constance de son refus, elle ne la dérangea
pas ".
Lord Clifford ne fit pas
seulement la lumière sur son désintéressement total, pour ne pas dire son
dédain, d’ailleurs avoué par Anne-Marie elle-même, pour toute vie mondaine ; il
confirma en particulier et, une fois de plus, son détachement pour tout bien
terrestre.
J’ai déjà signalé comment
elle avait écarté l’hospitalité offerte par l’ex-souveraine d’Etrurie qui
voulait l’attirer, l’avoir, la retenir près d’elle, avec son mari et ses
enfants, à la cour de Lucques. On sait aussi, comment elle refusa pareille
invitation adressée par l’entremise du cardinal Pedicini.
Des offrandes généreuses,
elle en repoussa plusieurs ; elle aurait pu accumuler beaucoup d’honneurs et
d’argent si, seulement, elle avait dit oui. Souvent, on voulait la récompenser
par des biens matériels, pour des avantages spirituels qu’on avait reçus. Elle
demeura, jusqu’au dernier jour, ferme dans le propos explicite de préserver son
honorable pauvreté de tout attentat relié à la richesse. Elle maintint cette
détermination, y fut fidèle, même dans les années les plus sombres, quand sa
pauvreté atteignait souvent le seuil de l’affreuse misère.
On a cru qu’elle
n’agissait ainsi que par pure résignation. Certes, un autre motif s’ajoutait :
un amour vrai, chaud, passionné, pour " soeur pauvreté ", un amour
basé sur la confiance, une attitude d’abandon, entre les mains de Dieu.
Sa confiance en Dieu ne
fut jamais trompée ; la maison Taïgi ne fut jamais négligée par la Providence,
pas même dans les situations qui semblaient désespérées ; Anne-Marie l’avait
expérimenté. C’est tout dire.
Un jour, il ne restait
pas même un petit morceau de pain dans le garde-manger. Et je ne parle pas du
fricot, pour restaurer le mari et les enfants. Il ne se trouvait pas, non plus,
dans toute la maison, un petit objet qui put être échangé pour quelque chose à
se mettre sous la dent. Des sous, il était déjà étrange que quelqu’un, dans la
famille, en conservât le souvenir, depuis tant de temps qu’on n’en avait pas
vus. Tous semblaient consternés. Si l’ombre d’un trouble a envahi l’esprit
d’Anne-Marie, personne ne l’a su. En tout cas, elle ne le fit pas voir.
Elle s’enveloppa dans son
seul manteau, salua ses familiers, et, d’un pas régulier, se dirigea vers la
basilique Saint-Paul. Elle y entra, s’agenouilla au pied du crucifix, pria
longuement, avec cette ardeur qui la transformait ; elle pria jusqu’à ce
qu’elle entendit une voix, la voix bien connue de son époux céleste, qui lui
dit : " Retourne à la maison et tu trouveras la Providence ".
Obéissant alors, immédiatement, elle se releva et prit le chemin du retour.
Dans son coeur, régnait
la tranquillité, certaine, que cette fois encore, tout était résolu pour le
mieux. À peine, avait-elle, en effet, posé le pied sur le seuil de la porte,
qu’elle se vit remettre, par ses filles, une lettre du marquis Carlo Bandini.
Cette lettre venait tout juste d’arriver de Florence, lui dirent-elles. Avant
de l’ouvrir, Anne-Marie savait déjà, qu’avec le message, il y avait de l’argent
en quantité suffisante pour faire face à la crise.
Ces moments de crise
devinrent encore plus fréquents dans les derniers mois de la vie d’Anne-Marie.
Quand les maladies se succédaient, s’ajoutaient l’une à l’autre, les besoins se
multipliaient. Elle ne doutait alors pas même un instant de l’aide céleste. Et
l’aide céleste ne lui manqua jamais. En certaines circonstances dramatiques,
elle vit arriver à la maison les secours les plus inattendus, de la part de
gens éloignés qui ne l’avaient jamais connue, sinon par ouï-dire. Jusqu’à la
fin, cependant, prévalut la règle que, chaque fois que les offrandes
dépassaient les nécessités immédiates, elles se transformaient en dons qu’elle
distribuait à d’autres pauvres ou d’autres malades, également dans le besoin.
J’ai démontré,
rapidement, les multiples maladies qui frappèrent notre protagoniste, peu de
temps, avant sa mort. Si on devait compléter, à la bonne franquette, un genre
de fiche médicale, pour y enregistrer tous les maux qui accompagnèrent
l’entière période de ses dernières années, du moment où elle se consacra au
Seigneur, jusqu’au dernier soupir, nous serions embarrassés. Non seulement
parce qu’elle garda ses souffrances secrètes, le plus possible, comme elle
chercha toujours à cacher ses vertus, à dissimuler les dons prodigieux qu’elle
obtint du ciel, mais surtout, parce que, comme l’écrivait le cardinal Carlo
Salotti : " Le caractère étrange des maladies sert à démontrer que, la
Bienheureuse ayant le désir de souffrir pour les âmes, d’être crucifiée avec le
Christ, fut exaucée dans son désir du martyre ".
Elle le fut de telle
manière que " dans ses états maladifs, il parut que tous ses membres
portaient l’empreinte de la Passion divine et qu’elle sembla percevoir dans ses
sens, les effets ou l’effet des douleurs du Calvaire ".
Entreprise ardue, dès
lors, de tenter de définir la nature exacte, les symptômes précis, l’intensité
de ses souffrances, de tant de maux. Si toutefois, je veux ici tenter de les
énumérer, je risquerais de les définir par une terminologie inexacte, dans
l’intention de les faire comprendre à tous ; il s’agirait d’un tableau
approximatif des incroyables douleurs que cette femme exceptionnelle supporta,
pendant tant d’années, avec une sérénité qui ne s’est jamais démentie,
puisqu’elle les avait demandées à son divin époux, pour payer, elle, infime
créature, les nombreux méfaits de son temps.
Douleurs très fortes aux
oreilles, qui s’accompagnèrent de souffrances lancinantes, genre de névralgie
qui se répandait dans toute la tête, la contraignant à garder toujours un
bandage autour de la tête.
Des yeux, un s’était
fermé bientôt, dans l’obscurité d’une cécité presque totale. L’autre était
réduit à entrevoir à peine la lumière du jour, alors que les rayons
éblouissants du mystérieux soleil céleste l’aveuglaient continuellement, la
transperçaient si douloureusement, qu’elle aurait pu pleurer sans trêve.
Une inflammation profonde
et fétide de la muqueuse nasale, en plus de lui boucher le nez, la tourmentait
sans répit ; une senteur repoussante et nauséabonde se logeait dans son odorat.
Un asthme perpétuel nuisait terriblement à sa respiration. Ses dents lui
causaient un martyre ininterrompu.
Aucune articulation aux
membres supérieurs et aux membres inférieurs, comme à la colonne vertébrale,
devenue très douloureuse, parce que atteinte d’arthrite. Le faisceau musculaire
fut également atteint ; les pieds et les mains, surtout la main droite, "
la main qui guérissait ", disaient les gens, étaient envahis et déformés,
par les noeuds de la goutte.
Une grosse hernie
ombilicale s’était rapidement ulcérée et jamais, remède ne put soulager cette
plaie.
Tout son corps, en somme,
comme le confirme le cardinal Pedicini, fut constamment tourmenté par de
violentes douleurs. Une couronne d’épines acérées, la faisait particulièrement
souffrir, surtout le vendredi. Et, plus d’une fois, elle a dû prendre le lit.
Quand elle faisait des
conquêtes d’âmes, et ces conquêtes étaient fréquentes, elle se sentait attaquée
par de fortes maladies qui, selon l’opinion de plusieurs, auraient pu, chaque
fois, la conduire à la mort.
Tout son corps, affirme
le cardinal Pedicini, était à tel point crucifié dans chacune de ses parties,
que même le médecin, qu’on fit venir à maintes reprises, en était étonné.
Comment, aux prises avec des malaises si sérieux, pouvait-elle continuer à
vivre ?
Cette existence fut,
jusqu’au bout, ce qui semble incroyable, très active. Elle était totalement
engagée, le jour et une grande partie de la nuit, dans la gouverne habile de sa
maison, dans l’éducation patiente des enfants, des brus et de ses petits
enfants, dans l’attention affectueuse à l’égard de son mari, dans les pratiques
intenses de piété, à travers les pénitences les plus sévères, dans les
attitudes charitables envers les pauvres, dans les pieuses veilles, au chevet
des malades, dans les colloques avec les puissants et les miséreux, sans que
jamais, elle fit ostentation de ses propres souffrances.
Dans ses colloques à la
chaîne, elle se tenait grave et digne avec les illustres personnages, plaisante
et bienveillante avec les femmes du peuple qui frappaient à sa porte, seules ou
accompagnées, pour lui soumettre leurs petits problèmes quotidiens ou des
problèmes intimes. Elle ne s’inquiétait pas pour autant ; elle leur prodiguait
sa patience la plus évangélique, ses sollicitudes les plus affectueuses, même
si elle savait, par une longue expérience, qu’une fois sorties de là, ces
femmelettes l’appelleraient de nouveau, " sorcière " ou " bigote
".
Mais le calvaire
d’Anne-Marie devait connaître la souffrance la plus aiguë dans les derniers
moments de son existence. Elle le savait, depuis quelque temps, depuis un an
plus précisément ; l’époux l’avait avertie du moment précis, des circonstances
exactes de sa mort.
Le jour où avait eu lieu
cette dramatique révélation, on l’avait vue plus joyeuse que de coutume ; elle
souriait, heureuse, comme une jeune fille qui se prépare à se rendre aux noces.
L’Époux céleste avait cependant joint à cette annonce, qu’elle, servante humble
et fidèle, vivrait, comme il les a vécues, lui-même, les trois heures
d’abandon, sur la croix. Il permettrait, qu’en ces moments extrêmes de
l’agonie, elle fut abandonnée de tous. Et il en advint ainsi ; nous le verrons
bien.
Puisque j’ai parlé par
incise, de " la main qui guérissait ", je dois poser, au préalable,
qu’à Anne-Marie, furent attribués plusieurs miracles.
Lorsque se répandit la
nouvelle d’une guérison prodigieuse opérée par Anne-Marie, par le simple
toucher de sa main, l’invocation de la Très Sainte Trinité, des vagues de
commotions, jointes, par malheur, à une certaine exaltation à caractère
fanatique, se diffusèrent en plusieurs occasions, dans toute la ville de Rome
et même au delà. Il y eut des périodes où la Taïgi ne trouva pas un instant de
paix. Elle était sans trêve recherchée par des foules avides de miracles
faciles, traquée par des curieux plus ou moins aimables, traînée
continuellement, ici et là, au chevet des malades plus ou moins en danger,
pendant que l’annonce de nouvelles guérisons, vraies ou inventées,
contribuèrent à surexciter de plus en plus les gens.
Dans les situations comme
celles-ci, il est extrêmement difficile de distinguer la réalité de la
fantaisie, la vérité des inventions, la bonne de la mauvaise foi. Il
n’appartient pas au chroniqueur de démêler le tout, de censurer dans un sens
comme dans l’autre. Bien sûr, le fait demeure, d’après les témoignages les plus
dignes de foi, les documentations les plus sérieuses. Une autre preuve
indiscutable du surnaturel qui s’affirma chez Anne-Marie Taïgi : l’opinion
autorisée du cardinal Carlo Saletti, au sujet d’une série de guérisons
merveilleuses opérées par elle.
Je n’en rappellerai
qu’une seule : Anne-Marie, accompagnée d’une autre personne, faisait la visite
des sept églises. Elle fut surprise par un violent orage, une de ces averses
imprévisibles et soudaines, qui s’abattent sans merci sur Rome, au moment où on
s’y attend le moins. Elle s’arrêta à la première porte et frappa. On la fit
entrer et elle se trouva dans une salle où plusieurs personnes, en larmes,
entouraient un lit sur lequel gisait râlant, une pauvre moribonde.
Désormais, lui dit
quelqu’un, il n’y a plus rien à faire. Le médecin a quitté ; sa présence était
devenue, à ce point, inutile. On lui administrera les derniers sacrements.
Anne-Marie s’approcha
alors du grabat et plaça sa main, sur le front diaphane de la mourante, le
signa au nom de la Trinité. Puis, elle se retourna et dit de sa voix douce et
coutumière : " Ne craignez rien ; la grâce est déjà obtenue ". Au dehors,
la pluie s’était apaisée et elle poursuivit son pèlerinage de pénitence.
À peine fut-elle sortie
que la malade cessa ses râlements de l’agonie et commença à parler. Elle
demanda de la nourriture et, face à la stupeur des personnes présentes, elle se
souleva de façon à s’asseoir. Elle était parfaitement guérie.
Elle triompha des
vainqueurs
Elle mourut à l’aube du 9
juin 1837, au numéro 7 de la rue " Santi Apostoli ", dans le palais
Righetti, après trois heures d’agonie, dans un total abandon. C’était vendredi.
Elle avait 68 ans et 20 jours.
Les maladies, les
tribulations et les pénitences avaient fini par réduire Anne-Marie à un tel
état de prostration que, déjà, en octobre de l’année précédente, ne pouvant
plus se sentir, elle fut forcée de prendre le lit. Elle ne put jamais, dés lors
se relever.
Clouée à cette paillasse :
des accès d’asthme, à répétition, des douleurs arthritiques et névritiques,
parfois très intenses, des convulsions violentes, une perpétuelle effusion de
sueurs. Elle supporta ces souffrances avec beaucoup de résignation, dans le
silence, huit mois durant. Elle fit preuve d’une patience à toute épreuve ; son
calme était des plus paisibles. Maman exemplaire, elle gardait, malgré tout, le
gouvernail de la maison, continuait d’accueillir les gens puissants et
déshérités qui persistaient à recourir à elle, pour une aide ou un conseil.
Sachant que tout était
inutile pour le soulagement de ses souffrances, elle se prêtait avec docilité
et bienveillance aux soins que lui procuraient ceux qui l’entouraient. Elle
continuait de recevoir chaque jour la sainte communion, durant la messe
célébrée dans la chapelle qu’elle avait obtenu d’aménager dans son appartement.
C’était pour elle l’unique source de paix intérieure, l’unique source de
consolation pour son âme.
Le 2 juin 1837, c’était
encore un vendredi, une fièvre soudaine annonçait sa fin prochaine. Le docteur
Paglioli se souvenait de bien d’autres fièvres qui avaient assailli sa
déconcertante patiente ; il n’y attacha pas d’importance excessive : "
chose insignifiante, avait-il dit, une légère fièvre passagère ".
Anne-Marie lui avait souri doucement, comme pour le rassurer de son pronostic,
elle laissa croire qu’elle serait apaisée. Elle était prête pour le grand
voyage.
Elle s’y prépara, en
arrangeant aussitôt, pour le mieux, les affaires de famille, pour se consacrer
ensuite, aux choses d’en haut.
Le soir du dimanche 4
juin, la fièvre reprit et cette fois-ci, eIle était maligne. Après une nuit
affreuse, le matin du 5, à peine Anne-Marie avait-elle reçu la communion,
qu’elle commença à entrer dans le coma de l’agonie. Elle était, en réalité,
entrée dans le mystère d’une ineffable apparition céleste, quand à
l’improviste, son mari et ses enfants inquiets, autour de on lit, craignaient
de recueillir d’un moment à l’autre, l’instant fatal du dernier soupir. Elle se
ranima, une lumière d’incroyable béatitude dans ses pauvres yeux, demi-éteints.
" Appelez-moi immédiatement Mgr Natali ", demande-t-elle.
Le bon prêtre accourut
aussitôt et les personnes entourant le lit durent se retirer. Anne-Marie lui
confia le poids du dernier secret que, depuis lors, elle gardait pour elle
seule, dans le silence de son coeur : le secret de la date de sa mort, elle le
lui confia comme elle lui avait confié tous les autres secrets du ciel, avec un
sourire radieux.
Le jour suivant, mardi le
6 juin, la fièvre grimpa au-delà de toute mesure, et la souffrance d’Anne-Marie
atteignit des degrés élevés dans l’échelle de la douleur physique. Face à cette
situation qui menaçait d’empirer d’un moment à l’autre, le médecin voulut
tenter ce qui était encore possible, la prescription de médicaments plus
violents, plus pénibles à supporter ; la malade savait très bien que ces moyens
drastiques, comme tous les autres qui avaient été employés, s’avéraient
inutiles, parce que son état était déjà fixé dans le grand livre de Dieu.
Toutefois, pour ne pas entrer en contradiction avec le bon docteur, pour ne pas
laisser chez ses fils et ses filles, son mari, le regret de ne pas lui avoir
assuré tous les soins possibles, elle abandonna totalement son pauvre corps
crucifié par la souffrance, à la dernière torture de la science.
Le lendemain, mercredi le
7 juin, il apparut très évident à tous qu’il valait mieux lui épargner ce
martyre. Le mal, en effet, plutôt que de s’apaiser, s’aggravait inexorablement,
d’heure en heure.
La maison Taïgi tint donc
conseil et décida qu’il était opportun, ce matin-là, de lui faire apporter le
Viatique de l’église Sainte-Marie " in-via-Lata ", plutôt que de la
faire communier privément, comme d’habitude. Il en fut ainsi.
Elle passa une autre
journée et, l’après-midi du 8 juin, quelqu’un frappa à la porte avec
discrétion. Sophie alla ouvrir et elle se trouva face à face avec le cardinal
Pedicini.
Que voulait Son éminence,
de la pauvre moribonde ? Lui parler encore, si c’était possible. Anne-Marie fit
avancer une chaise, la plus belle de la maison, tout prés de son lit. Le
colloque qui suivit, dura plus d’une heure. Ce fut la dernière conversation de
cette humble femme du peuple avec un prince de l’Église.
Le soir, les souffrances
physiques s’accrurent encore, de façon indicible ; l’angoisse de la fin
atteignit le fond du calice amer. Elle se tut jusqu’à ce que lui revienne la
force d’esquisser un sourire sur son visage. De crainte que cette force
s’évanouisse, plus occupée des autres que d’elle-même, elle voulut que les
siens s’éloignent de sa chambre afin que son état ne les afflige pas.
Monseigneur Natali
s’entretint seul à seule avec elle, pour un peu de temps. " Comment
êtes-vous ? " lui demanda-t-il. " Ce sont des peines de mort ",
lui répondit-elle, à demi-voix.
" Que ta volonté
soit faite ", lui chuchota le bon prêtre. " Sur la terre comme au
ciel ", ajouta-t-elle. Et ce fut sa dernière réponse.
Monseigneur Raphaël
Natali rejoignit les autres dans la cuisine, et, ensemble, ils prirent les
dispositions nécessaires pour qu’Anne-Marie fut assistée, réconfortée par
beaucoup d’amour, beaucoup d’attention, jusqu’à son dernier soupir. Des charges
furent attribuées à chacun, à chacune. L’un alla à la maison voisine de la
" Madelena ", chez les fils de saint Camille de Lellis, des prêtres
voués au service des malades. Un autre se rendit au couvent des Carmes, pour
appeler le Père Filippi uigi, dernier confesseur d’Anne-Marie. Un troisième,
par la rue " del Corso " entra à " Santa-Maria-in-Via-Lata
", pour demander le vicaire dom Luigi Antonini.
Mais l’homme propose et
Dieu dispose. Ce dernier en avait décidé autrement. On sait qu’il voulait que
cette humble femme déjà souffrante, franchisse les étapes de la passion de
Jésus, de Gethsémani au Calvaire, l’imite aussi dans les trois dernières heures
d’abandon sur la Croix.
Les Camilliens vinrent,
de fait ; mais leurs experts jugèrent qu’elle pourrait vivre encore quelque
temps et s’en retournèrent à leur couvent, convaincus que leur présence n’était
pas indispensable pour le moment. Son confesseur ne vint pas parce que, dit-on,
les règles carmélitaines ne permettaient pas d’aller hors du couvent, durant la
nuit.
Le vicaire de
Sainte-Marie-in-Via-Lata vint, au contraire, mais croyant qu’il valait mieux
laisser la patiente tranquille, il se retira dans une autre salle pour lire son
bréviaire.
Le vieux Monseigneur
Natali qui avait veillé sans cesse, jour et nuit, les derniers temps, au chevet
de la malade, et avait dû pourvoir personnellement à tous les besoins de la
maison au moment où personne n’y pensait, parce qu’on était aux prises avec
l’angoisse, fut invité par les Taïgi à s’allonger quelque peu sur un lit, pour
s’accorder un moment de sommeil, s’il voulait pouvoir être sur pied, le
lendemain.
Les Taïgi, de leur part,
fils et filles, neveux et nièces, adoptèrent des attitudes différentes : les
uns décidèrent d’aller se reposer, les autres de veiller dans la cuisine,
obéissant à la maman qui les avait éloignés de sa chambre.
Ainsi, deux femmes
seulement demeurèrent en service, dans la chambre d’Anne-Marie. Mais les deux
femmes avaient accepté l’opinion des Pères Camilliens qui prétendaient que
cette pauvrette ne mourrait pas à l’instant ; elles la voyaient calme et
tranquille ; elles se placèrent dans un coin et se mirent à converser à voix
basse, de leurs faits et gestes, sans trop se préoccuper de la malade.
Mais voici que, "
vers les quatre heures de la nuit, racontera Monseigneur Natali, je me suis
senti fortement poussé à me lever en toute hâte, comme je le fis. Je courus à
la chambre de la malade qui était alors à l’extrémité. J’en avertis
immédiatement le vicaire et on commença aussitôt les prières de la
recommandation de l’âme. Les prières étaient à peine terminées, qu’au milieu
d’une invocation au Sang très précieux de Jésus, à l’égard duquel la moribonde
avait toujours eu une dévotion particulière, elle rendit son âme bienheureuse à
Dieu ; il était quatre heures et demie du matin, un vendredi, comme elle
l’avait prédit ".
" Ainsi, conclura
l’excellent prêtre, confident fidèle et discret d’Anne-Marie Taïgi, se
vérifiera tout ce que la servante de Dieu avait annoncé d’elle-même, plusieurs
années auparavant, relativement à sa mort. Elle me dit, en effet, les premières
années au cours desquelles j’ai pu faire sa connaissance, qu’à sa mort, elle
serait abandonnée de tous, comme le Seigneur le lui avait laissé entendre, plus
d’une fois. En d’autres occasions, elle m’assurait que je serais là, présent.
Je ne pus alors mettre en harmonie ces deux assertions contradictoires. Les
événements ayant eu lieu, j’en saisis très bien l’explication.
On dirait une règle, à
lire l’histoire des saints, celle de ceux qui suscitèrent à leur mort un
mouvement impétueux de commotion pour rassembler des foules imposantes de
citadins venant de partout, que souvent leurs funérailles se transformaient en
de réels triomphes, en apothéose irrésistible, comme si les villes où ils
vécurent et les terres qui les connurent, désiraient participer, elles aussi,
ici-bas, à l’allégresse céleste.
Anne-Marie échappa à
cette règle ; il fut écrit qu’elle devait roter son époux céleste jusque dans
l’humilité de la sépulture ; la nouvelle de sa mort traversa, en effet, le
petit portail du numéro 7 de la " via Santi Apostoli " pour atteindre
deux ou trois de ses nombreux admirateurs, un bon nombre de ses favorisés.
Les vendredi et samedi,
alors que la dépouille mortelle, revêtue des habits mi-mondains, mi-religieux,
un petit crucifix de cuivre dans ses mains croisées sur la poitrine, demeura
exposée dans la chambrette où elle expira. Peu de gens apparurent à la porte de
la maison Taïgi, pour réciter un " requiem " ou pour donner, ne
fut-ce que de façon furtive, une parole de consolation, aux familiers éprouvés
par une telle perte.
Il faut savoir, pour se
rendre compte du fait, que les autorités de Rome et des environs, les
gouvernants, avaient été amenés, en raison de la crainte, de la peur, qui se
répandaient dans la population, à prendre des mesures très sévères contre toute
menace de contagion, à suggérer à la population d’agir avec beaucoup de
précaution. On suggérait de ne pas mettre les pieds dans une maison où
quelqu’un était mort, sans qu’elle ait d’abord été désinfectée. Cela, non
seulement pour éviter toute contagion, mais aussi pour échapper à la tristesse.
Il est indispensable,
pensaient les médecins, " de se distraire avec des idées plaisantes et
indifférentes ". Ce qui importait le plus, pour fuir l’épidémie, c’était
de lui opposer la barrière d’un moral très élevé.
Si c’étaient les
dispositions du gouvernement et les suggestions de la science de l’époque, les
gens, de leur part, poussèrent la prudence jusqu’à éviter, à fuir comme
pestiférés tous ceux qui, en ces jours, vivaient quelques décès au sein même de
leur famille, quelle qu’en ait été la cause.
Cette situation explique
de façon très compréhensible la raison pour laquelle la familleTaïgi s’appliqua
à tenir cachée la mort d’Anne-Marie ; " abandonnée par ses amis, terrée
dans la misère, raconte le cardinal Pedicini, elle préférait passer quelques
jours enfermée à l’intérieur de sa modeste demeure ".
Monseigneur Natali
profita de ces deux jours pour faire prendre, dans la cire, le masque, le haut
du buste de la défunte. Le soir du samedi 10 juin, la dépouille mortelle fut
déposée dans un cercueil de bois et une fausse tombe de fer blanc, contenant un
court mémoire rédigé par le prêtre ami lui-même. À la nuit tombante, elle fut
transférée dans l’église voisine de Santa-Maria-in-Via-Lata où elle demeura
toute la journée du dimanche, gardée en cachette par quelques parents, ignorée
de plusieurs, inconnue de presque tous.
Les dispositions des
autorités exigeaient, de fait, qu’aucun cadavre ne quitte la maison avant
d’être enfermé dans une caisse et ne doive pas être exposé. " Pour cette
raison, raconte le cardinal Pedicini, non seulement on ne pouvait pas voir la
dépouille mortelle, mais le peuple ne pouvait même pas savoir qui ce fut. On ne
devait risquer aucune curiosité, ni rechercher quoi que ce soit, par crainte de
la colère, de l’épouvante, qui étaient tellement grandes, lorsqu’on rencontrait
sur son chemin, un cadavre porté à l’église. Non seulement, on ne cherchait pas
à savoir qui il était, comme la chose est arrivée, mais on cherchait tout de
suite à quitter la rue, par crainte de contacter le miasme, de quelque nature
qu’il fut, de donner la moindre prise à la peste tellement redoutée ".
Le soir de ce même
dimanche 11 juin, les premières ombres étant déjà répandues sur la ville, le
cercueil de bois, fut introduit dans un cercueil de plomb qu’un magistrat
scella soigneusement. Puis, un petit groupe de personnes, en ordre disparate,
afin de n’être pas remarquées, l’accompagna jusqu’au cimetière du Verano où par
la volonté du pontife Grégoire VI lui-même, un lieu de choix l’attendait.
En effet, la nouvelle de
la mort d’Anne-Marie Taïgi à peine connue, le cardinal Pedicini s’était
empressé d’écrire au vicaire de Sa Sainteté, le cardinal Odescalchi, une longue
lettre dans laquelle il disait, entre autres choses : " Ayant plu à Dieu
de rappeler à l’éternel repos l’âme d’Anne-Marie Taïgi, domiciliée au numéro 7
de la " via Santi Apostoli " que le soussigné Cardinal,
vice-chancelier, a eu la chance de fréquenter et de connaître, d’admirer ses
vertus autant que ses dons extraordinaires de lumières singulières, qui lui
sont venus de la part de Dieu ; des dons qui l’ont abondamment enrichie, si on
la compare à d’autres grands saints. Des centaines de preuves existent, au
sujet de l’authenticité de ces dons qu’elle mettait au service des affaires
publiques de l’Église et du monde. Tout était indiqué avec une grande
précision, bien avant que se produisent les événements qui se réalisaient
conformément à ses prédictions, aux détails qui les accompagnaient. On ne peut
attribuer qu’à Dieu les dons extraordinaires qu’elle possédait. Le cardinal qui
vous écrit, croit qu’il est de son devoir de porter le fait à la connaissance
et à la piété religieuse de votre Eminence, pour que la dépouille de cette âme
remarquable qui fut sa compagne dans l’exercice de tant de vertus, ait des
égards particuliers qui se sont pratiqués dans des cas semblables, des cas qui,
de fait, ne sont pas fréquents ".
Le cardinal Odescalchi
référa immédiatement, la chose au pape qui donna, sans tarder, l’instruction
que la dépouille d’Anne-Marie serait placée le plus prés possible de la chapelle
du cimetière, du côté de l’Évangile, près de la marche de la porte.
Dans les jours qui
suivirent, pendant que les fils faisaient installer une plaque de marbre blanc,
sur la tombe, une plaque sur laquelle, sous la croix rouge et bleue des
trinitaires, on avait inscrit : " Anne-Marie Antonia Gésualda Taïgi, née
Giannetti, à Sienne, le 20 mai 1769, décédée à Rome, le 9 juin 1837, tertiaire
déchaussée de l’Ordre de la Sainte-Trinité ". Le cardinal Pedicini apprit
que les conditions financières de la famille Taïgi étaient précaires. Toute la
maisonnée devait survivre avec quatre écus, le reste du mois, pendant que les
dettes atteignaient 200 écus : pour le médecin, les funérailles, le masque et
le buste de cire, les deux cercueils, l’acte notarié, la pierre tombale.
Le cardinal se faisait
pourvoyeur ; il envoya sur la " via Santi Apostoli ", son maître de
chambre, avec cinquante écus, " en mémoire de la disparue ". Il
envoya aussi, certaines personnes de Milan et de Turin, demeurées tout à fait inconnues.
Ces personnes faisaient parvenir des offrandes généreuses, des offrandes qui
permirent de solder les dettes.
La Providence ne manqua
jamais de veiller sur la pauvreté de la maison Taïgi. Elle veilla de façon
particulière sur Sophie qui se préoccupait, avant la mort de sa mère, de
l’avenir de ses enfants. Anne-Marie l’avait rassurée.
Dix-neuf ans après, le 31
mars 1856, le procès informatif sur la renommée des vertus et la sainteté
d’Anne-Marie eut lieu. On procéda à l’exhumation de sa dépouille pour
l’identification et la translation, à l’intérieur des murs de la cité.
" La planche qui
fermait le cercueil de bois fut enlevée et, comme il est écrit dans l’acte
légal de reconnaissance, le cadavre tout entier, recouvert de ses vêtements, se
montra à tous ".
Puisque en ce temps, le
corps d’Anne-Marie Taïgi, tertiaire déchaussée de l’Ordre des trinitaires,
était réclamé soit par les trinitaires espagnols de
Saint-Charles-aux-Quatre-Fontaines, soit par les trinitaires italiens de la
basilique Saint-Chrysogone au Transtévère, pour ne pas léser les uns et les
autres, la nuit du 11 juin 1856, elle fut ensevelie dans l’église de Santa
Maria della Pace ", dans un sépulcre fermé par un marbre, portant
l’inscription : " Ici repose la servante de Dieu, Anne-Marie Taïgi ".
Huit ans après, le pape
Pie IX l’honora du titre de vénérable. C’était, selon la règle du temps, le
premier pas sur la voie de la glorification.
Entre-temps, l’autorité
ecclésiastique reconnaissait le droit incontestable des trinitaires italiens,
parce qu’il revenait aux Italiens de conserver la dépouille mortelle de
l’Italienne Anne-Marie Taïgi. Ainsi, au cours de la nuit du 10 juillet 1865, le
corps était définitivement transférée au delà du Transtévère, dans l’antique
basilique de Saint-Chrysogone.
Finalement, le 30 mai
1920, le jour même où l’église célébrait la fête de la Sainte Trinité, l’humble
femme du peuple, femme de maison, mère de famille et tertiaire déchaussée, eut
une grandiose apothéose ; elle connut, dans sa ville d’adoption, le triomphe
des saints. Tout Rome qui, depuis quelque temps, parlait de ses miracles, parut
vouloir converger vers Saint-Pierre, pour assister à l’acte de sa
béatification.
" C’est une mère de
famille, avait déjà dit d’elle le pape Benoît XV, qui se présente, après avoir
été l’ange consolateur de ses parents, après avoir édifié ses compagnes
d’études, après avoir dépensé utilement ses années d’adolescence, en travaux et
en services propres à son état et à sa condition. Elle peut servir de modèle à
ceux qui n’ont pas encore quitté le foyer domestique. C’est une mère de famille
à qui n’a jamais souri une grande aisance ; sa jovialité calme et paisible
rendait alors inexcusables toutes ces mères qui disaient ne pouvoir atteindre
la piété, ne pouvoir s’abstenir de continuelles lamentations, à cause de leur
pauvreté et de leurs misères. Elle est une mère de famille sur qui pesait
lourdement l’assistance de ses vieux parents, le soin d’un mari pas toujours
aimable, l’éducation d’une nombreuse progéniture. Oh ! Comme elle fut
admirable, l’affabilité avec laquelle Anne-Marie répondait aux exigences des
vieux parents ; elle vainc le mal par le bien, et gagne le coeur de son mari.
Elle éduque ses enfants en leur prodiguant beaucoup d’affection, évitant de
leur infliger des sentiments de peur ou de crainte. Elle est une mère de
famille qui ordonne bien sa maison, n’abandonne pas ses devoirs envers chacun,
trouve le temps et le moyen de visiter les pauvres, les malades, de se faire
toute à tous ".
C’est la page
indubitablement la plus maigre de l’allocution de Benoît XV, parmi les
nombreuses que j’ai eu le loisir de lire, à l’exaltation d’Anne-Marie Taïgi.
C’est en même temps la page la plus efficace qu’on peut écrire pour présenter
notre protagoniste dans ses traits les plus purs, dans son aspect le plus
humain, dans sa valeur la plus authentique, dans son essence la plus vraie :
femme du peuple, épouse et mère comme le sont des millions d’autres épouses et
d’autres mères, et toutefois lumineuse, d’une lumière du paradis, non pas tant
par les dons surnaturels par lesquels le ciel a voulu la récompenser
abondamment, que par cette sainteté acquise instant par instant, avec les
minimes actions journalières, imprégnées de respect affectueux envers les
parents, d’amour compréhensif à l’égard du compagnon de sa vie, de patience
dans l’éducation des fils et des filles, des petits-enfants, de modestie dans
les occupations domestiques avec le balai et au milieu des casseroles, de
charité sans bornes pour le prochain. Oui, la sainteté, en somme, à la portée
de toutes les mères de famille. Que toutes sachent, comme Anne-Marie, se faire
toutes à tous.
Accrochons-nous à cette
essentielle présentation faite par un pape, à la chrétienté entière, et nous
goûterons les pages de Louis Veuillot, brillant écrivain français qui, exilé de
France, respira à Rome les parfums enivrants d’Anne-Marie Taïgi.
JE VEUX MAINTENANT
M’ÉLOIGNER DE QUELQUES PAS, PRENDRE CONGÉ DE LA FAÇON LA PLUS DIGNE DE CEUX QUI
AURONT CONDESCENDU À LIRE CETTE COURTE ET MODESTE BIOGRAPHIE, EN AJOUTANT
QUELQUES PAGES, QUELQUES RÉFLEXIONS QUI ME SONT PLUS PERSONNELLES.
" Elle était une
Thérèse, une contemplative, une vraie amante. Rien de tellement plaisant,
cependant, dans sa vie : un mari à servir, un homme grossier bien qu’honnête,
plusieurs enfants, mille difficultés, des maladies fréquentes, des ennemis, des
calomniateurs. Elle avait beaucoup à faire, dans la gouverne de sa maison ;
elle y faisait non seulement régner l’ordre, mais la joie sainte. La pauvreté y
habitait à demeure, mais jamais la misère n’y pénétra. Elle convertissait ses
ennemis, pardonnait à ses détracteurs. Elle savait être toute, et toujours, à
Dieu ".
" Elle avait été
belle et gracieuse. Elle n’attendit pas que cette fleur se fanât ; dés qu’elle
fut appelée, elle se rendit. Dieu l’enveloppa promptement dans l’amour, la
lumière, le désir du sacrifice, la connaissance de la douleur, la contemplation
de la vérité. Il donnera satisfaction à sa charité, quand elle lui demandera de
guérir les malades. Il y joignait la science de la religion, à la connaissance
du passé, du présent et du futur, nourrissait cette charité qu’elle ne cessait
de lui demander, dans le souci qu’elle avait de la conversion des pécheurs
".
" Les dons
intellectuels lui furent distribués comme par un miracle sans pareil. Peu de
temps, avant qu’elle fut entrée dans la vie de perfection, elle vit apparaître
un globe d’or, terne, qui devint un soleil incomparablement resplendissant,
dans lequel elle voyait toutes choses. Elle connaissait avec certitude le sort
des défunts. Son regard allait jusqu’aux extrémités du monde ; elle
reconnaissait des personnes qu’elle n’avait jamais vues, pénétrait l’âme
jusqu’au tréfond. Les choses accomplies, comme les choses futures, se
révélaient à sa vie, dans les circonstances les plus détaillées. Un simple coup
d’oeil lui suffisait. L’objet réclamé par sa pensée, se montrait et elle le
reconnaissait. Elle voyait le monde entier, comme nous apercevons la façade
d’un édifice. Les individus comme les nations, lui étaient présents. Elle
discernait les causes du mal, les remèdes qui pouvaient le guérir. "
" Par ce miracle
permanent et sans limites, la pauvre compagne de Dominique Taïgi, devenait un
théologien, un docteur, un prophète. Jusqu’à sa mort, l’humble femme put lire
dans le soleil mystérieux. "
" Les pauvres, les
grands du monde, les princes de l’église venaient lui demander conseil et
secours, la surprenaient au milieu des humbles services de sa maison, alors
que, souvent, elle était malade. Elle ne refusait jamais son dernier morceau de
pain, ni l’or plus précieux encore, de son temps. Elle n’acceptait jamais de
dons, et à plus forte raison, des louanges. Les plus puissants protecteurs ne
purent jamais la décider à faire sortir les siens de la condition dans laquelle
ils étaient nés. Une reine, réfugiée à Rome, l’invita à accepter de l’or.
Madame, lui répondit-elle, comme vous êtes naïve, je sers un Dieu qui est plus
riche que vous ".
Elle touchait les malades
et ceux-ci guérissaient par la puissance qui lui venait de la prière. D’autres,
avertis de leur mort prochaine, mouraient saintement. Elle pratiquait de
grandes austérités pour les âmes du purgatoire, et ces mêmes âmes venaient la
remercier ".
" Elle souffrait
dans son corps et dans son âme ; attirée instamment vers le ciel, par la
véhémence du désir. Elle était ramenée et clouée sur la terre par les nombreux
poids de la vie. C’était un perpétuel martyre. Mais elle savait que Dieu le
voulait ainsi. Elle savait aussi, qu’elle expiait pour les autres, que Jésus
l’associait à son sacrifice, qu’elle était victime avec lui. Les douleurs
d’amour sont d’ineffables ivresses ".
" Pie VI mourait à
Valence, Pie VII était prisonnier à Fontainebleau ; sous Grégoire XVI,
réapparaissait la révolution. On disait que le règne des papes était terminé,
que la loi du Christ et le Christ lui-même se mouraient, que la science aurait
vite relégué parmi les chimères ce prétendu Fils de Dieu, déchiré ses maximes,
injurieuses à la raison humaine ".
" Durant ce temps,
Dieu suscitait cette femme qui guérissait les malades par le seul attouchement
de sa main, les sortait de leur lit par la seule force de la prière. Dieu lui
donnait la connaissance du passé, du présent et de l’avenir. Elle affirmait le
retour de Pie VII, annonçait l’élévation de Grégoire XVI, voyait déjà Pie IX
lui succéder ".
" Elle était la
réponse de Dieu aux forts vainqueurs de la politique, des champs de bataille,
des académies ".
FIN
SOURCE : http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/Mariataigi/anna_maria_taigi.htm
Also
known as
Anna Maria Gesualda
Antonia Taigi
Anna Maria Taigi
Anne Marie Gianetti
Profile
Daughter Luigi Giannetti
and Maria Masi. Her father was
a pharmacist in Siena, Italy,
but his business went bankrupt when Anna Marie was five years old. The family
moved to Rome, Italy in
search of work, but Luigi could only find a job as a household servant.
Anne was married on 7 January 1789 to
Dominico Taigi, a butler to
the noble family of Chigi. She was married for
48 years, and mother of seven,
two of whom died very
young.
Anne Marie was always
very concerned about her dress and appearance, far more than would be expected
of a working class mother.
Life at home was not always peaceful, Dominico could be ill-tempered and
caustic, and Anne was known to have had an adulterous affair with an older man.
But one day while at prayer at
Saint Peter’s Cathedral,
she felt a sudden strong inspiration to ignore the things of this world. She
began to live a more austere life, and to listen to the Spirit. Trinitarian tertiary.
She found holy spiritual directors, gave all she could to the poor,
visited the sick,
and counselled many of the patients at
the hospital of San
Giacomo of the Incurables. She worked hard to evangelize her
own family, changing her husband’s demeanor, and they all regularly assembled
in a small personal chapel to pray together.
As the years went on and
Anne Marie devoted herself more and more to prayer,
she began to receive mystical gifts,
including prophecy and clairvoyance. She sometimes went into ecstacies,
and received heavenly and prophetic visions. Her simple presence had a powerful
effect on many, and she helped with many conversions.
Counsellor to cardinals,
royalty and three popes.
Because of her
charismatic gifts, and her lack of concern about worldly matters, Anne was
often the topic of gossip and sander, but she was the recipient of public
veneration soon after her death,
and her Cause for beatification began
in 1863.
Born
29 May 1769 at Siena, Italy as Anne
Marie Gianetti
9 June 1837 at Rome, Italy of
natural causes
body incorrupt
remains transferred
several times
interred at Saint Crisogono
church, Trastevere, Rome, Italy
4 March 1906 by Pope Saint Pius
X (decree of heroic
virtues)
30 May 1920 by Pope Benedict
XV
victims
of verbal spouse abuse
Additional
Information
Great
Wives and Mothers, by Father Hugh
Francis Blunt
Saints
of the Day, by Katherine Rabenstein
Stories
of Holy Lives, by M.F.S.
The
Holiness of the Church in the 19th Century
books
Our Sunday Visitor’s Encyclopedia of Saints
other
sites in english
Triduum in
Honor of Blessed Anne Marie Taigi
images
video
sitios
en español
Martirologio Romano, 2001 edición
fonti
in italiano
MLA
Citation
“Blessed Anne Marie
Taigi“. CatholicSaints.Info. 5 May 2022. Web. 2 May 2023. <https://catholicsaints.info/blessed-anne-marie-taigi/>
SOURCE : https://catholicsaints.info/blessed-anne-marie-taigi/
Ven. Anna Maria Gesualda
Antonia Taigi
(Maiden name Giannetti.)
Venerable Servant of God,
born at Siena, Italy,
29 May, 1769; died at Rome,
9 June, 1837. Her parents,
Luigi Giannetti and Maria Masi, kept an apothecary shop at Siena,
but lost all their fortune and were obliged to
go toRome in
search of a livelihood. Anna Maria was then five years old.
Having been educated in
all the domesticvirtues, she was married in course of time,
7 January, 1789, to Dominico Taigi, a retainer of the noble family of
Chigi, with whom she lived happily for forty-eight years. Hitherto nothing
extraordinary had happened in her life. But one day while she knelt with
her husband at the Confessio in St. Peter's she felt a
strong inspiration to renounce such little vanities of the world as
she had allowed herself. She began to pay little attention to dress and to
listen to the inner voice of grace. Soon afterwards she was received
publicly in the Third Order
of Trinitarians in the Church of S. Carlo alle Quarto Fontane, and
having found holy spiritual directors, she made rapid progress in the
way of perfection. All the money she could spare she devoted to
the poor and miserable, and though not rich she was
very charitable. Of the hospitals she
regularly visited, the preferred one was S. Giacomo of the Incurables.
Despite her love for
the poor,
she never neglected her own family.
Of her children two died young, the others grew up in piety under
the surveillance of the mother. But she never availed herself of her
connections with persons of good position
to take her children out of their humble social environment.
The whole family were
wont to assemble for prayers in
a small private chapel,
and here, later on, in a small privatechapel,
and here, later on, Mass was
celebrated by a priest who
dwelt with the family.
The great virtues of AnnaMaria were rewarded by
extraordinary gifts
of God's grace. During many years, when praying in
her chapel she
had ecstasies and
frequent visions,
in which she foresaw the future. She exercised a peculiar influence overindividuals and converted many
a sinner to God.
During her life she suffered much both corporally and spiritually, and was at
times meanly calumniated.
But after death her name soon became venerated in Rome.
Her body was several times transferred, and rests finally at
S. Crisogono in Trastevere. The process of her beatification was
begun in 1863, but has not yet been finished.
Oliger, Livarius. "Ven.
Anna Maria Gesualda Antonia Taigi." The Catholic Encyclopedia. Vol.
14. New York: Robert Appleton Company, 1912. 8 Jun. 2015 <http://www.newadvent.org/cathen/14430b.htm>.
Transcription. This
article was transcribed for New Advent by Christine J. Murray.
Ecclesiastical
approbation. Nihil Obstat. July 1, 1912. Remy Lafort, S.T.D.,
Censor. Imprimatur. +John Cardinal Farley, Archbishop of New York.
Copyright © 2021 by Kevin Knight.
Dedicated to the Immaculate Heart of Mary.
SOURCE : http://www.newadvent.org/cathen/14430b.htm
Blessed Anna Maria Taigi, Matron (AC)
Born in Siena, Italy, May
29, 1769; died 1837; beatified in 1920. Although she was the wife of a Roman
working man, Anna Maria was consulted by royalty because she could read souls.
Anna Maria Gianetti was the daughter of a druggist, who was soon impoverished
and moved his family to Rome, where he was employed as a house servant. She
left school at about 13 and learned the trade of wool-winding. Then she became
a housemaid to a noble family. In 1970, she married Domenico Taigi, the butler
of the nearby Chigi Palace, and began to live the normal life of a married
woman of the working class. It was in the discharge of these humble duties that
she attained a high degree of holiness, but not without a detour.
After her marriage she
began to dress gaily, and then fell into grave sin--adultery with an older man.
It was a momentary sin but her conscience tormented her. Worldly distractions
brought her no peace.
Shortly, she changed her
whole life. Walking through Saint Peter's Square with her husband, Padre Angelo
(a Servite Father) gave her a piercing look, which she took as a warning of
impending judgment. It is said he had a revelation that a woman would come to
him to be directed in the way of sanctity and he knew the woman was Anna Maria
when she passed him.
She fell on her knees
over Saint Peter's tomb, then sought out a confessional, but the priest sent
her away, telling her she was not one of his usual penitents. A few days later
she was led to Padre Angelo's confessional and he greeted her, "So you have
come at last! Be of good cheer, my child; God loves you and he asks for your
whole heart in return." This was the hour of her total conversion to God.
Immense joy filled her.
She put away her trinkets
and became a tertiary of the Order of the Most Blessed Trinity (with her
husband's permission). The day she was accepted, she heard Christ's voice
saying she was chosen to convert sinners and console sufferers.
In 14 years, she bore
four sons and three daughters. Three children died young. Anna Maria trusted
always in the abundance of God. She instructed her children in the Catholic
religion and tried to form them according to the divine Model. She was strict but
merciful.
She went to daily, early
morning Mass and worked far into the night. She took in sewing and washing to
provide for her household and the poor. Her house was spotless; her children,
well-tended. Rarely did she accept charity. In short, she was a model housewife
and mother.
Domenico was not a saint,
but a moderately good husband. He was ill-tempered, but after her death, said,
"It is due to her that I corrected some of my faults." He always
found his wife up and waiting for him when he returned from work, sometimes at
2:00 or 3:00 a.m. "She was glad of an excuse to spend the quiet hours in
prayer." Obedient to her husband, she honored him as the head of the
household.
Anna Maria's parents
spent their last years in her crowded home. Her father was an invalid, her
mother irritable. Domenico testified, "It almost seems that God had given
her such parents in order to try her virtue."
She was a good
story-teller, merry, easy going, and her husband praised her for her virtues.
She rarely dined, but rather served her family. She fasted on Saturday to honor
Mary, and on Wednesday for Joseph. She practiced great mortifications on
Fridays, in Lent, and on Ember fasts.
Humility and meekness
were her favorite virtues. She rejoiced in humiliation and contempt, loved
those who hated and spoke ill of her. She was oblivious to praise. Christ
revealed to her, "The humble are always patient, and the patient sanctify
themselves. Patience is the best of all penances, and he who is truly patient
possesses all earthly treasure, and will receive a heavenly crown." This
kind of patience entails a gentle forbearance and uncomplaining acceptance of
trials.
Her mystical experiences
were extraordinary: revelations, visions, rapture, and ecstasies. She had these
experiences because she was a saint and not vice versa; because she tried in
everything to act in conformity to God's will. Ecstasies often came at
inconvenient times. Once while doing housework: "O Lord, leave me in
peace! Withdraw thyself and let me get on with my work. Keep the treasures of
thy love for consecrated virgins; I am only a poor wife and mother."
She saw thoughts and
distant events in a symbolic, miniature sun, in which the hearts of others were
revealed. Three popes and innumerable royalty sought her counsel. She also
foretold many political and temporal events (Benedictines, S. Delany)
SOURCE : http://www.saintpatrickdc.org/ss/0609.shtml#feli
Anna
Maria Gesualda Antonia Taigi at San Crisogono in Rome
Beata Anna Maria Taigi San Crisogono
Sanctuaire de la Bienheureuse Anna Maria Taigi, Basilique Saint-Chrysogone, Rome
Catholic
Heroes . . . Blessed Anna Maria Taigi
June 7, 2016
By CAROLE BRESLIN
Siena, Italy — 30 miles south of Florence, the birthplace of saints such as Bernardine of Siena (born on December 8, 1380), and Catherine of Siena (born on March 25, 1347). Four hundred years later, Siena became the birthplace of another great mystic of the Church: Blessed Anna Maria Taigi.
Anna Maria entered our world on May 29, 1769. Her father, Luigi Giannetti, and her mother, Maria Masi, were poor working-class people from Tuscany. The day after her birth, they took their infant daughter to the church and baptized her with the name Anna Maria Gesualda Antonia.
When Anna Maria was six years old her family moved to Rome to find work. She stayed in Rome for the rest of her life. For two years Anna attended the school run by the Filippini Sisters, after which she worked in several non-skilled positions to help with the family finances. At this point, she performed only the basic Catholic devotions.
On January 7, 1790, Anna married Domenico, who was a porter for the chef of Prince Chigi. Although Domenico had rather good morals and dutifully practiced his faith, he also possessed a fiery temper and crude manners. His vulgar language and sudden anger caused Anna much suffering.
Being married to Domenico enabled Anna to practice much patience, humility, and
forgiveness. Quickly she learned that meekness would dissipate her husband’s
wrath much more quickly than an angry retort.
Domenico, who loved Anna, never struck her and explained during her process of
beatification how she “tamed” him. During their marriage Anna delivered seven
children, only four of whom survived to adulthood. They raised these four
children to be faithful Catholics and morally upright.
Anna enjoyed pretty dresses and socializing as most young women do. While she adhered to Church teaching, she demonstrated no unusual holiness. Nevertheless, her lifestyle began to prick her conscience.
When Anna and her husband went to the Basilica of St. Peter dressed in their best clothes, the crushing crowd knocked her into a Servite priest, Fr. Angelo. When it happened, Fr. Angelo “heard” a voice tell him, “Notice that woman, for I will one day confide her to your care and you will work for her transformation. She shall sanctify herself, for I have chosen her to become a saint.”
Finally, Anna went to Confession and hastily accused herself of being a great sinner to which the priest responded, “Go away!” Nevertheless, he did relent and he gave her absolution.
After a long period of inner turmoil, Anna again went to Confession, going to a different church, the one where she and Domenico were married. This time she entered the confessional of Fr. Angelo and together they trod the delicate path of developing the mystical spirituality of a married woman. Such direction could not be based on the great mystics of the Church such as Teresa of Avila and Catherine of Siena, since they were religious and not married. At the time of this meeting, Anna had only been married three years.
In the beginning of her journey, she faced the difficulty of learning detachment. It seemed that “he finds fault with everything.” And the priest had to restrain Anna’s desire to perform penances damaging to her health. He explained to her that her state in life as a wife and mother must be fulfilled in holiness.
The next step in her journey came when she convinced her husband to forgo the unnecessary comforts in their state of life. Anna Maria, as her husband testified, “gave up for the love of God, all the jewelry she used to wear — rings, earrings, and necklaces. . . . She wore the plainest possible clothing.” She only did this with her husband’s permission.
Shortly thereafter, Anna Maria learned from her “inner voice” — which she always took to her confessor — that the true path to God can only be achieved by humility and charity. Divisiveness, complaining, and criticizing are from the evil spirit, while peace, unity, and serenity — even in suffering — are a special grace from God.
In 1790 Anna was given a unique favor from Christ: a globe of light like the sun which became clearer the more her soul became purified. In this orb, she saw future events and could read souls and their most secret impulses. Most important, this orb revealed to her how she could move toward perfection, how other souls could be led to God, and how she could help both the Church suffering and the Church militant.
The breadth of what she saw happening in the world astounded her confessors, including Cardinal Pedicini, who knew her for over 30 years. She saw inside the remote prisons of China and the suffering confessors and nuns there.
She could see inside secret societies, back-door diplomatic maneuverings, and the languishing prisoners and slaves in the Middle East. She would witness the shipwrecks around the world and hear the cries of those dying from them.
So extensive was Anna Maria’s experience of these events that the cardinal explained during the hearings for her process of canonization: “Nor let anyone think I am exaggerating, for, on the contrary, I find myself incapable of describing the wonders of which I was for 30 years the witness.”
Even with this extraordinary gift of sight into world events — a gift that kings, queens, Popes, and saints sought to benefit from — Anna Maria remained humble. She sought no money and hoped for more isolation from such requests, only revealing and meeting with people under obedience.
Anna also suffered in body and soul, turning all to God for His glory. She warned people when they were going to die so that they could have a holy death; she offered her suffering for the Poor Souls in Purgatory and when they were released they came to thank her. Her mere touch would cure the sick.
Many wanted to shower her with wealth and gifts, but she refused them all. Nor were any in her family allowed to accept offerings. As a witness said, “She thought it good to live from day to day, like the birds. A refugee queen in Rome wished to give her money. ‘Madame,’ Anna responded, ‘how simple you are. I serve God, and He is richer than you’.”
The Lord also drew her into ecstasies whenever she received Holy Communion. Her family misunderstood these moments and even scolded her for them. It was not until after her death that Domenico understood what happened to his wife — she never explained or defended herself.
She cared for the homeless, fed the hungry, visited the sick, and gave alms to the poor — thereby inspiring many others to follow her example as her children testified. She did this until the day of her death, June 9, 1837. She received Viaticum and the Sacrament of the Sick which had been given to her by her parish priest.
Her cause was opened in 1852 and she was beatified on May 30, 1920 by Pope Benedict XV who also made her protector of mothers of families and the patroness of the Women’s Catholic Union. She is also the patron of victims of verbal and spousal abuse. Her feast is June 9.
(Carole Breslin
home-schooled her four daughters and served as treasurer of the Michigan
Catholic Home Educators for eight years. For over ten years, she was national
coordinator for the Marian Catechists, founded by Fr. John A. Hardon, SJ.)
SOURCE : https://thewandererpress.com/saints/catholic-heroes-blessed-anna-maria-taigi/
Jun 12 – Blessed Anna
Maria Taigi (1769-1837)
12 June, 2012
Summary: Blessed Anna Maria Taigi, a good
example of how an ordinary mother with little education can become a saint
and influence others by her spirituality.
Patrick Duffy tells
her story here.
Early life
Anna Maria Gesualda was born in 1769. She came from a moderately wealthy family
of apothecaries in Siena. The family business failed when she was six and they
had to move to Rome where she grew up in real poverty. Her parents had to work
as domestic servants.
Schooling and marriage
After her schooling she could recite most of the psalms by heart, but could
scarcely read or write. Her father found employment with a relative of the
prominent Chigi family and Anna fell in love with Domenico Taigi, the kitchen
porter for Prince Chigi, who used to bring food to her family from the Chigi
palace. They married – he was twenty eight, she was twenty. They had
seven children, three of whom died.
Holiness and tensions
Married life was hard enough. Domenico was a bit coarse, but when Anna’s mother
moved in, it caused untold difficulties as she proved quite interfering.
Anna Maria herself felt a call to expiate for the sins of the world by
exceptional penances. She had a vision of a dazzling globe surrounded by
a crown of thorns where she could see present and future events anywhere in the
world as well as the state of grace of individuals, living and dead. Domenico,
not having any such vision, became ill-tempered and demanding. Also Napoleon’s
invasion of Rome caused the Chigi family to leave Rome and so Domenico was
unemployed for some time.
Works of charity, prayer, and spiritual advice
Anna felt called to engage in many practical works of charity – caring for
the sick and dying in hospitals, helping battered wives and even looking after
stray cats. Many famous people – such as Napoleon’s mother Letizia Buonaparte
and the daughter of the queen of Spain Marie-Louise de Bourbon – heard of her
great powers and came seeking spiritual advice. She had become a tertiary of
the Order of the Trinity and later became the centre of a confraternity which
met every Friday for the Stations of the Cross and prayer.
Her death and beatification
Anna’s health failed and she died in 1837. The process for her beatification brought many testimonies of her holiness from nobles, cardinals and even the pope. Benedict XV beatified her in 1920 holding her as an example of how an ordinary mother can become a saint and influence others by her spirituality. Her feast is kept on the 9th June.
Bl Anna’s body still lies uncorrupt. >.
SOURCE : https://www.catholicireland.net/saintoftheday/blessed-anna-maria-taigi-17sionary/
Blessed Anna Marie Taigi
Today’s saint was unknown to me until now: Blessed
Anna Marie Taigi (1769-1837). She was known as a mystic, wife,
mother, and penitent. She was a tertiary member of the
Trinitarian order.
The beatus’ remains are
interred in the Church of Saint Crisogono, Trastevere, Rome, Italy, the
neighborhood where she lived. Until about 1920 Taigi’s body was incorrupt but
since then a wax face and hands have been in-place to cover for what nature
destines us.
Anne was married on 7
January 1789 to Dominico Taigi, a butler to the noble family of Chigi. Together
they were married for 48 years, and the parents of seven, two of whom died
very young. Marriage was a crown she bore.
Blessed Anna Marie was
fortunate to have found holy spiritual directors who directed her spiritual
life that ultimately put her on the path to real sanctity. She was a woman of
Matthew 25: gave all she could to the poor, visited the sick, and
counselled many of the patients at the hospital of San Giacomo of the
Incurables; worked hard to evangelize her own family, changing her
husband’s demeanor, and they all regularly assembled in a small personal chapel
to pray together.
Anne Marie devoted
herself to a life of prayer as a lay woman and God richly blessed her
with mystical gifts, particularly the gifts of prophecy and
reading hearts. One ought not to underestimate the power of asking the Holy
Spirit for gifts necessary to do the Father’s will: you may just get what you
ask for. It is recorded that she went into ecstacies, and received
heavenly and prophetic visions. The gift of counsel allowed her to be a
counsellor to cardinals, royalty and to three popes.
As a person in-touch with
the need for forgiveness, Blessed Anna Marie is especially important for those
who think their past sins cannot be forgiven!
The charismatic
gifts, and her lack of concern about worldly matters, Anne was often the topic
of gossip and sander, but she was the recipient of public veneration soon after
her death, and her Cause for sainthood began in 1863.
The recorded acts that
has encouraged the Church to study the life of Anna Marie has now given
us Blessed Anna Marie Taigi, a woman who had a simple presence and a
powerful effect on many –she was instrumental with many conversions. It was
Pope Benedict XV on May 30, 1920, who declared Anna Marie a blessed of the
Church. More of her life can
be read here.
SOURCE : https://communio.stblogs.org/index.php/2015/06/blessed-anna-marie-taigi/
BLESSED ANNE MARIE TAIGI
Blessed Anne Marie Taigi was born in Siena on May 29, 1769 and baptized the
following day. Because of financial difficulties, her parents, Louis Giannetti
and Mary Masi, moved to Rome when Anne Marie was six years old.
In the Eternal City, Anne Marie attended the school conducted by the Flippini
Sisters for two years. Following her schooling she worked at various
occupations, even that of a maid, to bring financial assistance to her parents.
When still a young girl, she married Dominic Taigi, a pious young man but of
difficult and rather coarse character. Disregarding these defects, Anne Marie
was more concerned with his virtue and for the forty-nine years of their
married life she conducted herself with the greatest affability and delicacy,
finding ample opportunity to exercise continually the virtues of patience and
charity.
Their marriage was characterized by the highest Christian principles.
Understanding the profound social and moral values of Christian marriage and
considering it, above all, as one of the highest missions from Heaven, Blessed
Anne Marie transformed her home into a real sanctuary in which God had the
first place. Docile to her husband in every way, she avoided anything which
might irritate him and thus disturb the family peace. Serious and hardworking,
she saw to it that nothing was lacking to her family and, in so far as one in
her impoverished circumstances could, she was generous to the poor.
She bore seven children, three of whom died in childhood. Two boys and two
girls grew to maturity and she provided them with the most accurate and
complete religious and secular education.
Having sought to correspond to grace from her childhood, she now began to live
a life of intense spirituality. She had one desire only: to love God and to
serve Him in everything; she had only one preoccupation: to avoid the least
shadow of the slightest voluntary imperfection. She was greatly devoted to the
Holy Eucharist, to the Most Holy Trinity, to the Infant Jesus, to the Sacred
Passion of Our Lord and ever had the tenderest devotion to our Lady.
God enriched her with many supernatural gifts. The most unusual of these was
the apparition of a luminous globe like a miniature sun which shone before her
eyes and in which, for forty-seven years, she could see present or future
events anywhere in the world as well as the state of grace of individuals,
living or dead.
She died on June 9, 1837, and was beatified on May 30, 1920. Her body is buried
in Rome in the Basilica of San Crisogono.
Provided Courtesy of: Eternal Word Television Network, 5817 Old Leeds Road,
Irondale, AL 35210
www.ewtn.com
SOURCE : http://www.ewtn.com/library/MARY/TAIGI.htm
Stories
of Holy Lives – Venerable Anna Maria Taigi
Article
In the world around us
there are many persons struggling with the difficulties of poverty, who are
loaded with cares and anxieties which seem to hinder them in the service of
God. There are many who cannot offer Him a pure heart which has never been
stained by sin, yet, in their grief for misspent time and neglected grace,
would gladly atone for the past by fervent, grateful love, casting themselves
upon the mercy of the Saviour; and to all such the life of Anna Maria Taigi is
full of holy lessons of contrition, of patience, of the faithful discharge of
daily duty, and of a spirit of humble, constant prayer.
It was upon the 80th of
May, 1769, that she was born in the city of Siena, and baptised at the Church
of Saint John the Baptist there.
Her father was in
business as a chemist, but when Anna Maria was about six years of age he lost
all he had through his own fault, and having no means of living in Siena, he
resolved to go to Rome, and his poverty was such that he, with his wife and
little daughter, had to journey on foot the whole way.
Wishing to give the child
a Christian education, her parents placed her in a school under the care of
some nuns, and there she prepared to make her First Communion, which took place
when she was about thirteen years old. The time had come then for her to leave
school and assist her mother. The world seemed very bright and tempting, and
she felt drawn to its pleasures, but Jesus and His Mother watched over the
young girl, and preserved her from falling into any great sin.
In 1798 Anna Maria
married Dominic Taigi, who was employed in the service of a noble family, and
although he was a man of good character, he had a disposition which was very
trying to his wife, and gave her constant opportunity for the exercise of
patience and gentleness.
But as soon as the marriage
had taken place it would seem that Anna Maria forgot the teaching of earlier
years, and gave herself up to the pleasures of the Italian people. Dress was
the first object of her desire; theatres and other places of amusement
possessed a charm which the practice of her religion did not then afford her;
serious temptations fell across her path, and she did not seek God’s grace to
resist them. Conscious of her sinfulness and worldliness, Anna Maria was not
happy. There were moments when she found distraction in pleasure which was
sufficient to silence the pleading of the Holy Spirit, but God was too merciful
to let her alone, and in His love He filled her heart with pain and remorse.
One day she was setting
off to some amusement, dressed in very gay attire, when a holy priest whom she
did not know met her in her way, and as she passed the voice of his Master
seemed to say to him, “Dost thou see that woman? Thou wilt convert her, and she
will be a saint.” The priest was much struck by this occurrence, and pondered
over the words which he had heard. But Anna Maria was as yet unconscious of
God’s purposes with regard to her, and some time had still to pass before she
loosed her hold of the vanities of the world.
At last the day came when
in her misery and remorse she resolved to begin a new life, and going into a
church, she entered a confessional, and said to the priest who sat there,
“Father, you see before you a great sinner.” It seems strange to hear that the
priest bid her leave him, saying that she was not his penitent, but thus it
was; and Anna Maria, full of confusion and discouragement, went away: however
the impulse of grace remained in her heart, and after some delay she went to
another church, desiring to be reconciled with God.
Once more she entered the
first confessional in which there happened to be a priest, but before she spoke
he exclaimed, “So you, are come at last.” It was the Religious who had once met
her gaily dressed for a scene of pleasure, to whom God had promised her
conversion, though she knew it not; and now he told her what had happened to
him, and the impression made upon her was so great that she generously gave
herself up to her Lord, confessing every sin against Him with the deepest
contrition. Thus Anna Maria Taigi found one who bestowed upon her the greatest
care, helping her to practise virtue, as well as instructing her in the way of
self-renunciation and sacrifice which God seemed calling her to pursue, and
thus the apparent harshness of the priest who had refused to listen to her
proved the means of carrying out the Divine purpose by leading her to another
who could better undertake the guidance of her soul.
Anna Maria Taigi’s
conversion was thorough, and she wished at once to give up the fine clothing
and ornaments which had been to her occasions of many temptations and sins; she
longed also to practise severe penances in expiation of her offences against
God, but in this her confessor frequently restrained her.
In reading the lives of
the favoured servants of the Almighty, we cannot fail to be struck by the
different methods by which He rules and guides them, and thus we find that Anna
Maria had only just given her heart to God when He poured out upon her
wonderful gifts and graces, which are often delayed till the later years of
some of the greatest saints. Perhaps thus her soul was more penetrated with a
sense of His great love – a love so undeserved by one who had neglected and
turned from Him too long; perhaps this was her best preparation for the
bitterness of desolation which was to follow. However, her intimate union with
God caused such raptures of love, that she frequently appeared quite out of
herself, neither seeing nor hearing any one who was present.
When Anna Maria received
Holy Communion, her love for Jesus was so ardent that some sign of it would
appear upon her face, and many persons observed her fervour, and would wait
outside the church and ask for her prayers. Others called her a hypocrite, or
said she was an enthusiast, and in different ways she attracted so much
attention that she was obliged to make her Communions sometimes in one church
and sometimes in another, until her Lord Himself made known to her that His
Will was for her to frequent her own church and make no account of those who
remarked her.
In the year 1799 the
French had come to Italy to make it into a republic, and one morning the troops
were hastily assembled in the square where the Church of Our Lady of Piety was
situated, and the noise and confusion caused all the people there to hasten home,
with the exception of Anna Maria Taigi. The sacristan came to shut up the
church, and found her motionless in prayer, giving no sign of having heard
anything; and it was not for some time that she rose up, finding with surprise
what had happened, and then passing quietly without any molestation through the
midst of the French troops.
But although God gave His
servant these favours in prayer, He soon called her to suffer for Him both
pains of body and the far worse pains of soul which followed the sweetness of
the days succeeding her conversion. Temptations to doubt her faith, temptations
to hate God- in these and other such ways was the enemy of souls permitted to
try her; but when her need was greatest our Lord always came to her help, and
taught her to drink lovingly of His own chalice.
Great privations had to
be borne in her home life also, for it seemed that God’s way was to keep her in
continual want. After a while her earnings were scarcely sufficient to give her
children bread, but in all these anxieties she betook herself to prayer, and in
a miraculous way help came from those who were often perfectly unknown to her.
Upon one occasion, when
her distress was very great, Anna Maria went to the church of Saint Paul, and
as she prayed there before a crucifix, she heard a heavenly voice say, “Go home
– you will find providence there.” Scarcely had she entered her dwelling before
a letter came containing money, from one who had never heard from her of the
state of mind she was in.
As a wife and mother this
holy woman was faithful in discharging every duty, yielding to her husband with
much humility, and by her sweetness and patience winning him to a more
Christian life than he had before pursued. She brought up her children with the
greatest care, not only teaching them what was right, but setting it before
them by her own practice, and removing from them every occasion of sin as far
as lay in her power. The morning began with prayers, after which the elder ones
were sent to work and the younger to school; in the evening she recited with
them the rosary and night prayers, and always took care to see that they
avoided evil company. On holidays of obligation she was not satisfied with
their attendance at Mass alone, but sent them also to Catechism, or to hear some
preacher, and thus she neglected nothing which was a means of grounding them in
the knowledge of their religious duties, praying always that they might each
receive grace to practise at home and abroad what they learned, and become
faithful children of Christ’s Church.
The charity of this poor
woman was extended to all who might need it. Wonderful conversions were granted
to her prayers, and while her first thought was for the souls of others, she
did not forget to aid them in temporal trials. Though so poor, she would share
what she had with those who were still poorer, and if she had nothing to give
she would then try and interest some richer person in their favour. Her visits
to the hospitals were frequent, and she would sometimes take her daughters with
her, hoping to teach them great charity for the sufferers.
Anna Maria did not escape
those calumnies and injuries which in some degree are always the portion of
those whom God loves best. One person, a neighbour, conceived a violent hatred
for her, which lasted more than eight years, during which time she accused her
both in public and private of being a hypocrite, and of leading a most wicked
life, although trying to disguise it under the appearance of piety; yet during
this long trial the servant of God only prayed for the unhappy woman, and never
lost patience or omitted showing her a kindness if ever the opportunity came.
While God thus suffered
Madame Taigi to bear trials of so many kinds from His hands, He also led her to
practise many severe mortifications by fasting, and especially in abstinence
with regard to drinking, for she frequently deprived herself of even a drop of
water for a whole week. Wednesday, Friday, and Saturday were days upon which
she always fasted, and for special reasons she would undertake special fasts
for long periods.
Such a life of fidelity,
humility, and penance drew down from heaven the choicest blessings which God
gives to souls that are very dear to Him, and she was made the instrument of
help and salvation to many. One of the noble families of Rome owed to her prayers
the restoration to health of many of their children, who had before been
constantly ailing. One day she was making the pilgrimage of the Seven Churches
with some friends, when a drenching rain compelled her to seek shelter in some
house near by. There lay a woman dying, the last Sacraments had been
administered to her, her friends knelt weeping round her bed, and Anna Maria
began to pray, making over the sick person the sign of the Cross with a small
picture of the Blessed Virgin. Presently the rain ceased, and she left the
room, to continue her pilgrimage, but before she had descended the stairs, the
watchers by the sick-bed ran to tell her that the dying woman was restored, and
had begun to speak once more.
Amidst all these graces
she showed the greatest humility, never speaking of spiritual helps which she
received excepting to her confessor, or by his desire to a few whom she
assisted in devoting themselves to the service of God; and in such cases her
words were those of a person who feels herself completely unworthy of the gifts
of her Divine Spouse.
At last, Anna Maria
became so ill and suffering that she was forced to keep her bed, and for more
than nine months she lay there, bearing acute pain with perfect sweetness and
submission, her one consolation being that she received Holy Communion daily.
In the month of June,
1887, she was seized with fever, but it passed, and no one felt any special
anxiety as to her state, yet she herself knew that death was near, and so she
began gradually to set all her household affairs in order, that she might have
nothing to occupy her but heavenly things.
Towards the last, Anna
Maria called her husband and children to her, to take leave of them, placing
them first under the special protection of the Blessed Virgin, and then of
Saint Philomena, to whom she had ever a great devotion; and after receiving the
last Sacraments her sufferings increased, and she lost the power of speech, but
it was God’s Will that she should expire almost suddenly – when those who had
watched her thought she would live some hours – upon a Friday night, as she had
herself predicted.
Anna Maria’s
extraordinary graces and virtues had not – with all her efforts – been hidden
from the world, and when she was dead, visitors came from distant parts to
kneel beside her tomb; and so many persons have given testimony of the sanctity
of this poor woman, that it is believed God will so make manifest the gifts He
bestowed upon her as to lead to her being raised to the altars of the Church.
Meanwhile, the history of her humble life is given as an example of piety and
devotion, that we who read it may seek grace to give ourselves wholly to God,
as she did, and while dwelling in the world, meeting its trials and
difficulties, struggling perhaps against its temptations, and burdened with its
cares, may, like Anna Maria Taigi, learn to find God in all things, and keep
closely united to Him.
MLA
Citation
M.F.S. “Venerable Anna
Maria Taigi”. Stories of Holy Lives. CatholicSaints.Info.
5 May 2022. Web. 2 May 2023. <https://catholicsaints.info/stories-of-holy-lives-venerable-anna-maria-taigi/>
SOURCE : https://catholicsaints.info/stories-of-holy-lives-venerable-anna-maria-taigi/
JUNE 9, 2016
Blessed Anna Maria Taigi:
Housewife, Mother and Saint
Imagine the saint who was
a renown healer and a great mystic, who conversed with Jesus and Mary, and
was supernaturally gifted by God for 47 years with a miraculous, luminous globe
that stayed with her at all times, and in which, she could see nearly all
things hidden, present, and in the future. Was this an ascetic monk, or
an angelic nun? No, this was Blessed Anna Maria Taigi, an ordinary
housewife and mother to seven children. Bl. Anna Maria Taigi lived a
saintly life as an ordinary layperson with worldly responsibilities, a spouse
and children. Bl. Anna Maria is a great reminder to us that the intimate
life of the soul with God is not meant for just the religious and the
consecrated, but for all people.
Anna Maria was born on
May 29, 1769 in Siena, Italy. She did not have wealth or worldly
means. As a young woman she married Dominic Taigi, a pious man but with a
rough temper. One day while they were at St. Peter’s Basilica in Rome,
Anna Maria was overcome with an inspiration to renounce her worldliness.
She had been given over to some vanities, such as clothing and jewelry,
but now began a new life of self-renunciation. Her strong interior
illumination showed the state of her soul with the effects of sin and its
misery before God. With that, she embarked on a life of obedience,
mortifications, submission, patience, humility and self-renunciation.
Anna Maria found many
opportunities to exercise her spiritual discipline of patience and charity
towards her husband and children. She considered marriage one of the
greatest missions from Heaven. For 49 years she submitted herself before
her husband, keeping peace with him, assuaging his temper, and providing all
things for her family. She was the quintessential housewife. She
always fulfilled first her duties as wife and as mother, managing the daily
activities of her home; cooking and cleaning, and rearing the children,
including teaching them to pray. She embraced a martyrdom of humility in
submitting herself to all those around her. This was her vocation of
extraordinary holiness in the ordinariness of marriage and motherhood.
Yet, even though Anna
Maria imposed great penances and mortifications upon herself, she never
demanded that from other people. In fact, she tried all the more to serve
those around her, especially her family, trying to make them happy and
comfortable. Despite her self-sacrifices, she showed great affability to
everyone else, including a special compassion and charity for the poor and
suffering. She sought above all else to serve God through serving her
family and others.
She also devoted herself
to the Church, especially to the Sacraments of Confession and Holy Communion,
attending Mass daily. She had a special devotion to our Blessed Mother,
and to the Holy Trinity. On December 26, 1808, she entered the Third
Order of the Most Holy Trinity as a layperson. She lived a sacramental
life in the midst of the world.
Once, she heard the
interior voice of Jesus tell her, “The greatest merit consists in being in the
midst of the world and yet holding the world under one’s feet.” Jesus
also told her, “Virtue consists above all in the mortification of one’s own
will.”
The Blessed Virgin spoke
to her as well. She told Anna Maria, “You must be devoted above all to
doing His will and submitting your own constantly to his in the state of life
to which it has pleased Him to call you; therein lies your special
vocation.” True virtue is surrendering our will for the love of God in
all things.
Jesus called Anna Maria
to self-sacrifice and redemptive suffering, to be lived out in the midst of her
marriage and motherhood. It was in her ordinary life that she progressed
in sanctity and holiness. Blessed Anna Maria Taigi died June 9, 1837,
with June 9th now her feast day. Years later, her body was exhumed
and found to be uncorrupted. On May 30, 1920, Pope Benedict XV, beatified
Anne Maria by declaring her “Blessed,” one-step from official
canonization. She is now the patron saint of housewives, mothers, and
victims of verbal and spousal abuse.
Blessed Anna Maria Taigi is a saint for the modern age. She reminds us that no matter what our state in life or vocation, layperson, single, married, children or no children, God calls us to renounce our self-love and self-will, abandoning it to the will of God, by submitting it for the good of others, and in this way, strive to be saints within the world.
Tagged as: Anna Maria Taigi, Best of Week, family, Incorrupt, italy, saints
Brian Kranick's latest
book is Burning
Bush, Burning Hearts—Exodus as a Paradigm of the Gospel. Brian is a
freelance writer focusing on all things Catholic. He has a master's degree in
Systematic Theology from Christendom College. He has spent years working
as an analyst in the Intelligence Community, and currently resides with his
wife and three children in the Pacific Northwest. He is the author of the
blog: sacramentallife.com.
SOURCE : https://catholicexchange.com/blessed-anna-maria-taigi-housewife-mother-saint/
The Holiness of the Church in the
Nineteenth Century – Venerable Anna Maria Taigi
Article
The fame of the Venerable
Anna Maria Taigi has already spread throughout the world. The opening words of
the decree introducing the process of beatification of this servant of God are
as follows:
“When God wills to show
His power and wisdom, He chooses what is weakest and most foolish in the eyes
of the world to confound its vanity, frustrate the plans of the godless, and
repulse the assaults of hell. Thus, in our days, when human pride seems to have
conspired with the powers of hell to undermine both the foundations of the
Church arid the very principles of human society, He chose for this work Anna
Maria Jesualda Taigi, who, born of poor but virtuous parents, married a
working-man and, since the care of the family lay mostly upon her shoulders,
supported it by the work of her hands. God selected her to lead souls to Him,
to serve as a victim of atonement, to be a bulwark against the assaults of His
enemies and to avert misfortune by her prayers. After he had drawn her away
from the current of the world, He united her to Himself by the bond of charity
and adorned her with miraculous gifts and with such virtues as exercised a
salutary influence upon pious persons, even in the highest stations, and also
upon the godless and made the sanctity of the servant of God to shine before
all men in the clearest light.”
That the words of the
decree are not exaggerated, a few facts from the life of the servant of God
will make fully clear. Anna Maria was born on May 29, 1769, at Siena, the
daughter of an apothecary, Luigi Giannetti. Heavy reverses of fortune had
reduced the once distinguished family almost to beggary. In 1775 Giannetti and
his wife went to Rome and obtained positions as house-servants. He placed his
daughter under the care of religious women devoted to the education of the
children of the poor. When Anna Maria was thirteen she was obliged to help in
earning the daily bread for the family. She first worked in a factory as a
silk-spooler, afterward she was chambermaid to a lady of the nobility. Anna
Maria could not altogether resist the allurements of the world, which exercise
so strong an attraction upon persons of her age and condition. She longed to
taste all the pleasures of life. She had no suspicion of the great danger she
was exposed to, and it was only the good example of her parents and her
religious training that kept her from ruin.
On 7 January 1790, she
married Dominic Taigi, a servant in the Chigi Palace. During the first year of
her marriage she still indulged in vanity and pleasure-seeking. But Anna Maria
did not find the expected peace. Grace ever knocked harder at the door of her
heart. Thoughts of God and of the hereafter continually rose more and more
vividly before her mind. She now went to a priest for the purpose of making a
general confession of her life. He barely allowed her to complete her
confession, gave her absolution and said: “Go! You do not belong among my
penitents.” This rough treatment caused the poor woman to fall into despondency
and anxiety of mind. After a time she picked up courage again and sought another
confessor. This time Providence led her to a wise director. It was the decisive
hour of her life. She called it her conversion.
She had now put her hand
to the plow, never more to look back; and till her death remained the most
pliant instrument of grace. Rich gifts of mind and heart adorned her – a clear
understanding, a deep humility, a strong and magnanimous character. To these
natural gifts was added an extraordinary measure of grace. With all these
powers Anna Maria now endeavored to reach the perfection of her state in life.
She avoided all finery in dress, all exterior show and rejoiced in appearing
poor. She seldom took part in worldly amusement and then only to please her
husband. She considered it important that others should notice her change of mind,
because she hoped thus to make amends for any scandal she might have given in
the past. In prayer she now found an indescribable consolation and in prayer
she spent all the time not employed in the performance of her duties as mother
and housewife. Frequently she deprived herself of her night’s rest to satisfy
the longing of her heart for God. There is no sanctity without mortification.
Anna Maria Taigi eagerly looked for every occasion to make a victim of herself,
though always careful to conceal it from others. Only her director and the
duties of her state could set bounds to her zeal for external penance.
She well understood that
her desire for prayer and penance should not in the least interfere with her
duties as wife and mother. Her husband was a truly religious and good-hearted
man, while at the same time somewhat narrow, eccentric, and hard. But she was
so much mistress of herself that she could always anticipate his wishes and
treat him with the greatest love and friendship. Dominic Taigi has left us a
candid declaration on this point:
“It often happened that
on my return home I found the whole house filled with people” – he speaks of
the time when his wife was already known throughout all Rome – “at once she
would leave them all alone – let them be prelates or great nobles who were
present – and come to serve me with courtesy and attention. And they realized
that her whole heart was in it when she loosened the latchets of my shoes,
although I would have prevented her. In a word, she was a consolation to me and
to everybody else. She knew how to admonish one skilfully and J. can thank her
for the amendment of certain faults which I had. She gave me her admonitions
with incomparable kindness and gentleness. . . . She was able by her wonderful
prudence to preserve a heavenly peace in the family, although we were numerous
and had very opposite characters among us, especially when my oldest son
Camillus came to live with us at first after his marriage. My daughter-in-law
had a very irascible temper and would play the mistress in everything. But the
Servant of God was most tactful in keeping every one in the proper place, and
this with so great courtesy that it can not be described in words . . . I was
often sad, discouraged, and ill-tempered on arriving at home, but she knew how
to cheer me and to restore peace by her amiability.”
Practically the whole
care of providing for the family and the management of the house devolved on
Anna Maria. It was not a small family. She had borne seven children, two of whom
God took early to Himself. In addition, she had to care for her aged parents.
In after years, persons of rank often proposed to make ample provision for her
family, but she would never accept anything for herself or hers. She desired to
remain in the condition of life in which God had placed her. She was and
remained a poor workingman’s wife, but one wholly imbued with Christian spirit
and therefore the possessor of profound contentment.
The Servant of God let
pass no opportunity of promoting the spirit of religion. In the morning she
gathered the whole family for prayer. Condition of work permitting, all in the
house heard a Mass in the course of the forenoon and frequently received the
sacraments. At night the family assembled for pious reading, to which the
mother added some instructive religious conversation, ending with the Rosary
and night-prayers. She watched over her children most carefully, especially
when they were growing out of boyhood and girlhood, encouraging them to
frequent Communion and guarding them against dangerous companions. Even when
they were about to enter the married state, she would not permit the betrothed
to converse together without supervision.
The goodness of God
brought it to pass that the extraordinary virtues of Anna Maria became known to
the world around her during her lifetime. Her little house became the chief
center of attraction in Rome. Princes of the Church, prelates, and persons of
high station in the world came and went, asking the intercession of her prayers
or seeking her advice. The Venerable Bartolomeo Menochio, Papal Sacristan; the
Venerable Vincent Strambi, and many others distinguished for their sanctity
were her intimate friends, and the Popes Pius VII, Leo XII, and Gregory XVI
showed the greatest veneration for the poor workman’s wife. Many miraculous
events, due to her intercession, are well attested. God supernaturally
enlightened her concerning the state of consciences, the designs of Providence
in the afflictions of the Church, the mysteries of faith, and so forth. All was
revealed to her in a mysterious sun which was continually suspended before her
eyes.
It was the chief purpose
of her life to aid the Church by prayer and suffering; and she was consumed
with a burning zeal for its interests. She made sacrifices, prayed, and caused
others to pray, whenever any important matter was in progress. Sinners were the
principal object of her care. She was rich in sufferings. God tried her with
dreadful desolation, sent her many illnesses, and permitted her to meet with
hatred and persecution. She herself said that it often seemed impossible to
bear the torture of the martyrdom any longer. Yet her courageous spirit of
sacrifice never wavered.
In spite of such
extraordinary graces, Anna Maria Taigi looked upon herself as the least among
the people and fit only to serve others. It touches the heart to read of her
profound humility. Truly the saints have so lofty an idea of God’s majesty that
they deem it presumption to desire to be considered anything in themselves.
May we not piously assume
that Anna Maria prayed to be permitted to die unhonored? For when she departed
this life on 9 June 1837, no attention was paid to her death. But it was not long
till her tomb became glorious. High and low revered her as a saint and at
length the Apostolic See took steps to inaugurate the canonical process of her
beatification. Its completion is near at hand.
MLA
Citation
Father Constantine Kempf,
SJ. “Venerable Anna Maria Taigi”. The Holiness of
the Church in the Nineteenth Century: Saintly Men and Women of Our Own Times, 1916. CatholicSaints.Info.
28 April 2022. Web. 2 May 2023.
<https://catholicsaints.info/the-holiness-of-the-church-in-the-nineteenth-century-venerable-anna-maria-taigi/>
Blessed Anna Maria Taigi (1769-1837) -Wife, Mother and Mystic
-Among
many other extraordinary mystical gifts, Anna Maria Taigi was often given a
remarkable sun-globe wherein she saw past, present and future happenings.
The main source for this article is the book “Wife, Mother and Mystic” by
Albert Bessieres, S.J., translated from the French by Rev Stephen Rigby, Tan
Books, 1970, availible through Tan
books here.
Early life
Blessed Anna Maria Taigi was born in Siena, Italy on May 29, 1769. Her parents, Luigi Giannetti and Maria Masi were of a poor, working class family, and Anna was of Italian and Tuscan blood. She was Baptised Anna Maria Antonia Gesualda on the day after her birth. Due to the collapse of her fathers buisness, when she was 6 years old she moved with her parents to Rome, where she remained the rest of her life .
In Rome, Anna Maria (she was nicknamed “Annette”) attended for 2 years
parochial school of the Filippini Sisters the “good Mistresses” as they were
called. Following her schooling, she worked as a household maid and several
other non-skilled occupations in an effort to help with the family finances.
Throughout her childhood and teenage years, she seemed to be of average piety
and spirituality.
At age 20, on January 7, 1790, she married Domenico Taigi, who was a poor
porter or “servant” of the chef for Prince Chigi. Domenico’s morals and piety
were very good, but he had a terrible temper. Or, as the decree for Anna’s
Beatification puts it “his [Domenico] manners were rough and uncultured and his
temperment undesirable.” His brusque and turbulent manner and quick temper
caused Anna much suffering, but it also caused her to exercise her virtue of
patience, meekeness, humility and forgiveness. She learned that a smile and
silence often appeased his wrath. He never was physically abusive to her, but
he certainly was a tyrant at times. Nevertheless, he loved her deeply, as once
can easily detect the frank and sincere testimonies that he gave during the
official process of her Beatification. As the years progressed, bore seven
children, three of whom died in childhood. The remaining two boys and two girls
grew to maturity with her ever attentive concern for both their religious and
moral upbringing, along with their secular education.
The Call of God- Her deep conversion
Describing her life as a young wife, one source states “"Chaste in morals,
attached to her wifely duties, Anna-Maria yet lived more for the world than for
God.” However, an increasing sense of spiritual disturbance began to mingle
with Anna's frivolities and worldliness. One day she went to the Basilica of
St. Peter's. There was a great throng. She was leaning on the arm of her
husband, all radiant and decked with her prettiest necklaces. They were in the
piazza, surrounded by Bernini's colonnade. The jostling of the crowd threw her
against one Father Angelo, a Servite. He had never seen the young woman before,
but he heard an interior voice say: "Notice that woman, for I wiII one day
confide her to your care and you will work for her transformation. She shall
sanctify herself, for I have chosen her to become a saint."
Eventually Anna Maria made up her mind to leave her worldliness aside and to
make a good confession, so she went to a neighboring church, seeking in confession
the solution to her unsettled conscious. She chose a confessional surrounded by
numerous penitents, but on entering it in her turn tears overcame her, and she
cries: "Father, you have at your feet a great sinner." The priest
wondered for a moment who the unknown might be, and then said brusquely:
"Go away; you are not one of my penitent." However, he consented to
hear a hasty recital. Yet discovering nothing to justify her passionate outburst,
he gave her absolution and curtly slammed back the slide, leaving the
unfortunate woman more troubled than ever.
There followed a period of discouragement. In a soul of poorer caliber the
matter might have had a tragic ending; in truth it had an ending as fortunate
as that of St. Teresa of Avila, so misunderstood and mishandled by one
confessor after another.
After having savored this humiliation, Anna returned to pray in the church of
St. Marcellus, where she had been married. Entering one of the confessionals in
trepidation, she found herself in the presence of the curate, a religious of
the Servite Order, Father Angelo Verandi. It was he who in the piazza in front
of St. Peter‘s had heard the Lords voice say to him: "Take notice of that
woman .... I am calling her to sanctity."
Now, our Lord enabled him to recognise her: "So you have come at last my
daughter," he said. "Our Lord loves you and wants you to be wholly
His" and he told her of the message he had received before at St. Peter's.
Anna had spent three years in vain worldly triflings, and now a new life was to
begin. Concerning Anna’s spiritual direction, Father Angelo needed it to
undertake a task so infinitely delicate. For Anna Taigi was neither a Carmelite
Nun nor a devout widow, but the young wife of Domenico, by whom she was to have
seven children in a dozen years. There lay her essential duty. Everything else:
penances, prayers, miracles, ecstasies, could play their part only in so far as
the obligations of her state would allow. Consequently it was no good for
Father Angelo just to re-read St. Teresa; he had to have, together with
mystical learning, a robust common sense and a profound humility to guide this
young mother and wife.
The first demand of the Master was purification: to that end God immediately
gave Anna a keen conscience of her own weaknesses and misery. St. Catherine of
Genoa describes these terrible enlightenments given by God concerning our sins
by saying:
"He finds fault with everything."
This spirit of penance, so far as the Beata was concerned, dated from the
moment of her confession at St. Marcellus, and was never to leave her. Upon
returning home, she prostrated herself before the new little altar that she had
made in her room, gave herself a pitiless scourging and beat her head severely
many times on the floor till the blood came. Father Angelo soon had to check
this thirst for penance and austerities and to remind her she was a wife and
mother and that such extraordinary penances were not her duty—her duty must lie
in the holy fulfillment of her state in life.
The ever-present difficulty was that her husband Domenico was no St. Joseph.
The first of Anna's miracles was to get him to consent to forgo all those
luxuries in which he led the way and sought her participation. Wonderful to say,
he surprisingly became resigned to the holy will of his wife.
"About a year after our marriage," he says in his official
deposition, "the Servant of God, while yet in the flower of her youth,
gave up for the love of God, all the jewelry she used to wear--rings,
ear-rings, necklaces, and so on, and took to wearing the plainest possible
clothing. She asked my permission for this, and I gave it to her with all my
heart, for I saw she was entirely given to the love of God."
This miracle of grace moves one more than the cure of incurables, of which we
are yet to recount. "I have chosen her .... I call her to sanctity."
-Such was the message of our Lord as heard by Father Angelo. God had decreed
that this woman of twenty-one years, who was suckling a new-born baby, was to
be a Saint and a great help for the Church.
Anna begins to hear an inner Voice
Not long after her fervent coming to God, our Lord pointed out the first step in her ascent to Him- The enormous value of simplicity and charity towards others:
"Remember that you must be prudent in everything. The devil, My daughter,
is a spirit of contradiction. He who is under the devil’s influence cannot rest
either day or night. My spirit, on the other hand, is a spirit of love and
peace, full of condescension for everything that is not sin. Who possesses My
peace, possesses all things: Many souls do severe penance in order to reach
this great good. None can reach the peace of my elect unless strives to become
as simple as a child and to acquire from the start true charity. Who possesses
charity, My daughter, possesses patience. Charity works with zeal and love. It
speaks evil of no one, for it fears to lose the precious pearl of My
friendship. It understands all, sees all notices all, but it covers all with Its
mantle. It excuses the faults of its neighbors, and sympathizes with his
sorrows and says to itself: 'Truly, I would be even worse, if You did not come
to rescue me.’
"You must know," said Jesus to her, "that when I speak to you I
produce in you tenderness, peace, compunction for your sins and above all,
humility. Know well, my daughter, that no matter how much he desires to love
me, if a man enter not the straight path of humility he will keep on stumbling.
Man has within himself a dust that settles round his heart; it is called
self-love ....Man is full of pride, and I have nothing to do with the proud.
Only the humble find favor in My sight. He who wishes to taste My delights must
despise the world, and expect to be despised by it in turn."
"I make My abode in humble souls that are full of simplicity. The more
lowly and uncultured they are, the more I take pleasure in them. As to these
wise and learned professors whose heads are. full of the fumes of pride, I put
them down from their seats, and you yourself shall soon learn where I send
them. Thus ends their false wisdom and self-advertisement. Oh My daughter, I
exalt those who humble themselves. They merit My Kingdom, and to these I unfold
all My secrets. Love then to meet with contempt, for love of contempt is a true
foundation of virtue.”
The Blessed Virgin Mary also became her guide and helped her to prepare for the
mission that God had called her to:
"Know well, My dear daughter, that here below you will have for every one.
good day a hundred bad ones, because you must be like My Son Jesus. You must be
devoted above all to doing His will and submitting your own constantly to His
in the state of life to which it has pleased Him to call you; therein lies
your special vocation. Later on, when people come to examine your conduct
closely, every indiVIdual must be able to convince himself that it is possible
to serve God in all states and conditions of life without the performance of
great exterior penances, provided only one fights vigorously against one's
passions and conforms oneself in all things to the holy will of God. Remember
it is far more meritorious to renounce one's own will and submit oneself
entirely to the will of God than to perform the greatest bodily
mortifications."
Anna Maria is given the
extraordinary miracle of a mystic globe-sun
Jesus told Anna Maria that by being a simple wife and mother she was to be a
sign that holiness and union with God is available to everyone. He
further stated “Jesus described her mission: "I destine you to convert
sinners, to console people of all sorts and conditions-priests, prelates, My
very Vicar himself. All who listen to your words will be granted signs and
graces at My hands .... But you will also meet with false and treacherous
people; you will be submitted to ridicule, scorn and calumny, but you will
endure it all for love of Me."
This frightened her. "My God, whom are You choosing for this task? I am a
creature unworthy to tread the earth." “I see that also," answered
the Voice. "It is I who will guide you by the hand, as a lamb is led by
the shepherd, to the altar of sacrifice."
As she was praying one day in the church of St. Andrew della Valle, before the
crucifix she heard this question from the lips of the Crucified: "What is
your wish? To follow Jesus poor and naked and stripped of all, or to follow Him
in His triumph and glory? Which do you choose?" "I embrace the Cross
of my Jesus," she answered. "I will carry it, like Him, in pain and
ignominy. I await at His Hands triumph and glory in the hereafter."
It was in 1790, the very year of her call, that the Beata was the object of a
most unique and remarkable favour.
The Decree of the Beatification thus refers to it:
"Among other gifts the most remarkable was that for a space of forty-seven
years she saw a kind of sun in whose light she descried things at hand and
things afar off foresaw future events, scrutinized the secrets of hearts and
the most hidden and most inward impulses." Suddenly, then, in her humble
home, Anna saw a little above her head, as it were a blazing sun crowned by a
circle of thorns; two long thorns clasped it round; in the centre was the
Eternal Wisdom (presumably), represented by a young woman seated in contemplation.
Films of cloud dimmed the dazzling light, but an interior voice told her that
the clouds would disappear according to the increasing measure of her
purification. In this light she was to see, until her death, not only
everything that might conduce her to perfection, but also everything that could
help win others for God and allow her to help the Church militant or suffering.
Cardinal Pedicini, who knew Anna Maria for over 30 years, and whose position in
the great Roman congregations shows a rnan little given to credulity or wild
assertions speaks at great length in his judicial depositions concerning this
prodigious gift:
"For forty-seven years, day and night, at home, at church, in the. street,
she saw in this sun, which became increasingly brilliant, all things on this
earth both physical and moral; she penetrated to the depths and rose up to
heaven, where she saw the eternal lot of the dead. She saw the most secret
thoughts of persons nearby or far off; events and personages of bygone days
....She had only to think of a thing and it presented itself in a clear and,
complete manner .... A mere glance at this mystic sun and she entered at will
into the most secret council-rooms of kings.
She saw the people who handled affairs, the places concerned, the opinions that
each one held, the sincerity or guile of the ministers; all the back-door
diplomacy of our era, and also the decrees of God for the confusion of these
mighty ones. She saw the plotting and the dark gatherings of various sects;
the members of these societies, their ranks, their ceremonies--all in the
minutest detail and in all parts of the world--all as if it were happening in
her room ....We may say that this gift was one of omniscience for it was the
knowing of all things in God so far as the intelligence is capable of such
knowledge in this life.... She saw distant sea ships being wrecked and heard
the cries of the shipwrecked; she penetrated into the prisons of China and
Arabia ... where confessors of the faith, slaves and prisoners languished in
agony .... In this way did she exercise an unbounded apostolate, won souls to
grace in every part of the globe, and prepared the way for missionaries; the
entire world was the theatre of her labours .... Nor let anyone think I am
exaggerating, for, on the contrary, I find myself incapable of describing the
wonders of which I was for thirty years the witness."
The Cardinal added that if obedience compelled the holy woman to hide nothing
from him, she took extreme pains to remain hidden herself from people whom she
benefited by means of the lights God gave her. Above all, she was most anxious
to receive no gifts from them. Princes of the Church, kings, queens, Popes and
saints came to ask this humble woman to teach and enlighten them to the secrets
of heaven. She enlightened them to the extent demanded by obedience, putting
far from her all spirit of curiosity, not even asking an explanation of those
things she failed to understand.
"A prodigy unique" in the annals of sanctity is the way the Decree of
Beatification speaks of it, and it is to be explained by the unique
circumstances in which the world and the Papacy then were. A crumbling world
threatened to involve the Church and the Papacy in its own ruin. Her mission
then was to help those who were in charge of guiding the Church through this difficult
and turbulent period. Her husband stated:
“She prayed for the Holy Father, for the Cardinals and Bishops, for the
conversion of sinners, for heretics, for all the world, for evil tongued
people…it all seemed to me a paradise”
Concerning this miraculous sun, in a book by Louis Veuillot entitled “The
Fragrance of Rome” we read:
“In the Decree that introduces the Process for Beatification of Anna Maria
Taigi it is said that she was chosen by God to draw souls to Him; to be a
victim of expiation, to avert great catastrophes, all by the power of her
prayers….to the opened floodgates of iniquity God opposed a simple woman.”
“Shortly after she had entered on the way of perfection there began to appear
to her a golden globe which became as a sun of matchless light; in this all
things were revealed to her. Past and future were to her an open book. She knew
with certainty the fate of the dead. Her gaze travelled to the ends of the
earth and discovered there people on whom she had never set eyes, reading them
to the depth of their souls. One glance sufficed; upon whatever she focused her
thoughts, it was revealed to her and her understanding. She saw the whole
world as we see the front of a building. It was the same with nations as with
individuals; she saw the cause of their distresses and the remedies that would
heal them.
"By means of this permanent and prodigious miracle, the poor wife of
Domenico Taigi became a theologian, a teacher and a prophet. The miracle lasted
forty-seven years. Until her death the humble woman was able to read this
mysterious sun as an ever-open book. Until her death she looked into it solely
for the glory of God; that is, when charity suggested or obedience demanded it.
Should things for which she had not looked or which she did not understand
appear, she refrained from seeking to know more and asking explanations.”
"The poor, the great of the world, the princes of the Church came to her
for advice or help. They found her in the midst of her household cares and
often suffering from illness. She refused neither her last crust of bread nor
the most precious moments of her time, yet she would accept neither presents
nor praise.
"Her most powerful friends could not induce her to allow them to favor her
children beyond the conditions in which they were born. When she was at the end
of her resources she told God about it, and God sent what was necessary.
"She thought it good to live from day to day, like the birds, A refugee
queen in Rome wished to give her money. 'Madame,' she kindly said, 'how simple
you are. I serve God, and He is richer than you.’
"She touched the sick, and they were cured; she warned others of their
approaching end, and they died holy deaths. She endured great austerities for
the souls in Purgatory, and the souls, once set free came to thank her .... She
suffered in body and soul. ... She realized that her role was to expiate the
sins of others, that Jesus was associating her with His sacrifice, and that she
was to be a victim in union with Him. The pains of Divine Love have an
intoxication that no words can explain. After Holy Communion there were times
when she sank down as though smitten by a prostrating stroke. To tell the
truth, her state of ecstasy was continual because her sense of the presence of
God was continual. ... All pain was sweet to her .... She went her way, her
feet all bloody; with shining eyes she followed the Royal Way.”
"Behold, then, the spectacle God raised to men's sight in Rome during that
long tempestuous period which began at the time the humble Anna Maria took to
the way of saints. Pope PlUS VI dies at Valence; Pius VII is a prisoner at
Fontainebleau; the Revolution will reappear before Gregory XVI reigns. Men are
saying that the day of the Popes is over, that Christ s law and Christ Himself
are on the wane, that science will soon have relegated this so-called Son of
God to the realm of dreams . . . . He will work no more miracles.”
"But at precisely this time God raised up this woman to cure the sick ....
He gives her knowledge of the past, present and future. She declares that Pius
VII will return to his seat in Rome. She sees even beyond the reign of Pius IX
She is God's answer to the challenge of unbelief."
Her ecstasies and her love and devotion to the Holy Eucharist
Along with receiving the extraordinary ongoing vision of the sun, Anna Maria
began to be drawn into ecstasies along with hearing the inner Voice. Most
often, she was often drawn into ecstasy while receiving Holy Communion, but
also even during the most humble tasks of washing clothes or even while eating.
Her husband and children did not understand what was happening to her once when
Anna fell into ecstasy at the table and came back to her senses he grumbled at
her saying: "How can you doze at table? You are stupefied with sleep. You
must go to bed earlier." After the death of his wife he suspected the true
nature of things: "I do really believe that my wife was favored with
heavenly gifts. As to ecstasies, I could never discern any. I remember,
however, that at night-time, as we said the Rosary, there were times when she
did not answer. At table, also, it often happened that she was absent-minded,
sometimes with a fork in her hand, sometimes without movement. I spoke to her
and she took up again what she had left off, giving me a smile."
When she thus went to sleep with her eyes towards heaven, her daughter
Mariuccia once said tearfully:
"Mamma is dead. Mamma is dead." "No! she is praying."
Sophie would say by way of correction.
"Be quiet, she's asleep," Domenico would growl. "Let her alone;
she had no sleep last night."
While reciting the daily family Rosary, ecstasy was quite common and at this
Domenico was still more shocked. "It is shameful to go to sleep like that
during prayers, when one has the whole night for sleeping" (Statement
taken during the Process and Summary).
"When I used to go to see her in the morning," says Cardinal
Pedicini, “I often found her in ecstasy, and was obliged to wait patiently till
she cane to herself. Ecstasy would again seize her in the middle of our
conversation. I would wait again. Only obedience had power to call her to
herself."
Her confessor says, "I was often the witness of her ecstasies when we used
to visit the seven basilicas in company with Cardinal Pedicini. At that time
she usually went to Communion in the chapel of the Holy Crucifix at. St.
Paul's. Immediately after Communion she entirely lost herself in transport.
Yet, as we needed to contmue the pilgrimage, I ordered her quickly in the name
of obedience to recall her mind and follow us without delay. She obeyed."
After Holy Communion, when she felt ecstasy overwhelming her, she cut matters
short and hastened back to her kitchen, but the Spirit often overcame her in
the road, so much so that she had to have a companion. The sight of a cross, of
a flower, or of a statue of Our Lady, would halt her, ravished in the love of
God. Naturally the gossipers missed nothing, and she suffered on account of
their uncharitable tongues and culmunies.
Her extraordinary Charity
One day in winter, when she came out of the Pieta church with Mgr. Natali, she
met in the street a young man who was almost naked; his eyes were. haggard; he
was crying with cold and hunger, a veritable spectre covered with filth, from
whom the passers-by drew aside as from one smitten with the plague. Anna ran to
him, took him by the hand, led him to her home, warmed him, washed him dressed
him, restored and consoled him, gave him alms, and sent him away with a
thousand expressions of regard, so that he wept and could find no word to
answer.
Another day she had reached the church of Our Lady of Consolation when. she
came upon a poor woman stretched on the road, foaming at the mouth, in a fit of
epilepsy. The passers-by shunned her with averted heads. Anna drew near, wiped
away the slaver, lifted her up and went to a neighboring shop to buy her a
cordial. Charity is contagious. The crowd stopped, a voluntary collection was
organised and given to the poor woman. Once she had restored her, Anna effaced
herself and went to the church. There an ecstasy awaited her. Like St. Martin
of old, who had just shared his cloak with a poor man of Amiens, she heard Our
Savior say to her: "Thank thee, my daughter, for the care you have given
to Me."
At the hospital of St. John, for Incurables, in the St. James quarter, there
were similar incidents. Sophie [her daughter] who accompanied her, saw her
mother going from bed to bed, distributing sweetmeats and helping the sick to
bring up phlegm. The patient she singled out was a woman whose face was eaten
away by a cancer. Her head had been covered by a veil. The moment she heard
Annette a murmur of joy came from behind her mask. Anna went to her, caressed
her, washed her, and, while rocking her like a baby, spoke to her of heaven.
"At this hospital of St. James" (it is still Sophie referring to the
same case) "there was a woman called Santa whose husband had given her a
contagious disease that ravaged her face. For that reason her head was covered
in a hood. I think, too, she was no longer able to see. Whenever she heard
Mamma’s voice, she used to cry: 'Here is my angel'. My mother would remain a
long time with her. I would call and press her to come away, for the stench was
very bad. But she would answer: 'But smell the fragrance of her soul: she will
go straight from bed to paradise.' "
Another day, when she heard that the daughter of one of her bitterest
persecutors was ill, she went to pay her a visit, and to comfort her mother. At
every visit she took some sweetmeats. In the end she made the sign of the Cross
over the daughter with her statue of Our Lady, and the sick woman recovered.
Anna Maria given the grace to obtain cures
The grace of healing was bestowed upon this humble woman, as it was formerly
upon the Apostles in an official manner. Soon after her conversion, when she
was gravely ill in her humble home, she was preparing herself for death when
our Saviour appeared to her, dressed in a great blue cloak; He took her by the
left hand and told her He took her for His spouse and granted to that hand the
gift of curing the sick. Then he said:
"You may get up. You are cured." She cried out aloud and got up.
Sometimes Anna was content with touching a sick person with this sore hand
which bore the invisible mark of her power. More often, so as to avoid
admiration, she made use of a statue of Our Lady, or St. Philomena, of a relic,
or of oil from the votive-lamp. Here are a few anecdotes: A lady of the
princely house of the Albani was dying of cancer of the womb. She appealed to
Anna's confessor, and he appealed to Anna. The Beata gave him a drop of oil
from the votive-light, saying: "Let her put the oil on the affected part
and invoke Our Lady." It was done. The following night the tumor broke
painlessly and the invalid was cured. Overwhelming gratitude followed. The
noble lady multiplied her offers of kindly offices and Anna ended by allowing
her to undertake the upkeep of the votive-lamp, the oil of which had been the
instrument of cure. The first bottle of oil was brought with demonstrations of
eternal gratitude. Anna, though still a young woman, knew enough about the
durability of gratitude among men and women. She smiled and said,
"Quietly, daughter ! You run too fast, and will grow cold. Remember,
however, that you have made a promise, and, if you fail to keep it, misfortune
will follow."
Some months later the noble lady made an excuse for no longer sending the
weekly bottle. She had to economize and was cutting out unnecessary expenses.
She had scarcely sent the message when a series of disasters occurred among her
extensive properties. A long illness completed her ruin. Anna pleaded for her,
but Our Lord declared He had a peculiar horror of ingratitude. All that she
obtained was the conversion of the poor woman.
A Princess Doria, a religious of SS. Dominic and Sixtus, was similarly
afflicted with cancer of the womb. She sent a secret message to Anna, saying:
I do not wish to show my complaint to anybody, wherefore it is your duty to cure me."
"But what," Anna replied, "do you imagine I am? I am only a poor woman and a sinner at that."
"It is useless for you to make excuses. You are what you are, but I will you to obtain my cure. I have told you; it is for you to think about it. It is your business."
So Anna therefore spoke to Our Lord, and the same evening she sent some cotton fabric soaked in oil. The following day the growth had disappeared.
The same thing happened to a religious oblate of the Child Jesus, only she had
no confidence, and had a poor opinion of Anna. Anna was not even a religious,
but a laywoman of no birth! Her confessor rebuked her. In the end, the day
before the surgeon was to operate, the religious, in desperation, made her
decision to use the cotton soaked in oil. The next day the surgeon found that
he had only to put back his instruments; the evil had vanished. The doubting
Thomas was never finished praising the sanctity of that woman, even though she
was married and the mother of a family.
And here are scenes that are the Gospel over again. Jesus had just cured the
mother-in-law of St. Peter at Caparnaum. The sick heard of it and flocked to
Him by every road, and even by way of the roof. So also Anna, with Mgr. Natali,
went to the house of a woman whose daughter was dying of the croup. The doctors
had given her up, only the mother pleaded with Anna in the tones of the
Chananite woman. Anna consoled her, saying:
"It will be nothing." She made the sign of the Cross upon the swollen
throat. The little girl was cured. The whole neighborhood was stirred. Another
mother, whose daughter was smitten with the same epidemic, asked for help. Anna
cured this one also. There was a third neighbor. Her little boy was tormented
with an abscess in the ear. With a caress of her right hand Anna cured the
child. The mother had not finished thanking her when the second mother, whose
little daughter had been cured ran up to her, bringing her little boy, smitten
with diphtheria. The child was freed from the disease by a sign of the Cross.
It is said that the series of cures continued, and I know well that smiles are
likely to be raised by such tales, but I content myself by answering with
Pascal's astonishment at his own folly: "What a fool I am! If Jesus Christ
is God, what difficulty is there in it?"
A cure that made more noise, and one of which I have already said a word, was
that of Marie-Louise de Bourbon, the dethroned Queen of Etruria. Expelled from
her State, General Miollis had placed her under house-detention in the Convent
of SS. Dominic and Sixtus, where she lived surrounded by a small court. But the
sadness that gnawed at her developed into epilepsy. She had to be shut up in
apartments covered with thick carpets, where she rolled about uttering frantic
cries. After these attacks she lay motionless and as though dead. Remedies
proved ineffective.
The Queen having heard of the cure of Princess Doria, summoned Anna, and begged
her to plead with God for her. Anna told her to have confidence in the Blessed
Virgin, and then, with her little statue of Our Lady, made the sign of the
Cross. The attacks of epilepsy fled for ever, and the Queen was able to go out
and about in Rome without hindrance. The medical world made a great to-do about
the cure of a queen such as it had not made for two broom-wielders, and that is
why Anna preferred to cure the broom-wielders. But the Queen showed a royal
gratitude towards her benefactress, made her her adviser, her sister in God
unto death, and faithfully kept alight the votive-lamp that had been so
speedily deserted by the other noble lady.
This cure was the beginning of a new series. It was Anna's confessor who
recommended a young man also smitten with epilepsy. She found the invalid in
bed, broken by a crisis of the disease. His parents stood by in distress. Anna
said, with the utmost cheerfulness: "Come on! Up you get! Quick! I can't
abide seeing people in bed. You will not die of that, at least."
The sick man threw off the bedclothes and rose, cured. His stunned parents had
not recovered from their amazement before Anna fled. The gratitude of the now
miraculously cured man lasted a good month, during which he came often to
assure Anna of his undying thanks and to offer her his services without wages.
She smiled and said : "You will very soon forget"
He forgot so soon that he was not seen again. He was speedily punished, was
smitten with a fresh complaint, did not dare to approach his benefactress, and
ended sadly. But as in the case of the votivelamp, God soon sent a faithful
servant who asked no wages; it was Luigeto Antonini, who, in spite of banter
and sarcasm, remained loyal to his benefactress until death, and made a
deposition at the Process.
We owe to the Princess of Palestrina the account of the cure of her
brother-in-law, Cardinal Barberini. "I used to love to confer with Anna. When
I could not see her I wrote to her. She prayed to God for me, and for all that
concerned me, and the result was always as she foretold. She was frank and
friendly. If my children were ill I turned to her. My brotherin-law, Mgr.
Barberini, was stricken with a fatal disease a little before his promotion to
the cardinalate, and I told the holy woman this. The terrible illness grew
worse, and yet she bade me fear nothing and not to be troubled, but to have
recourse to St. Philip Neri. She also sent a relic of the saint."
It was an un-hoped for cure, and actually from the moment the Beata began to
pray Our Lord had said to her: "The prelate's death is decreed by the
divine counsel." Yet Anna only insisted the more for this impossible cure,
and obtained it. Our Lord told her no one would attribute it to her, and in
fact it was credited to St. Philip Neri. That, however, was fresh reason for
insistence. Anna never believed in patenting her good deeds.
The Luigeto Antonini, whom I have just named, the knight and servant of the
Beata, and the agent of her miracles, deposed that he assisted at a great
number of cures. "Oftentimes I accompanied her on such errands. When she
could not go in person she sent me with a little cotton soaked in the oil of
the lamp that burned before her statue of Our Lady." And the good young
fellow was no more astonished at being the agent of cures than were the little
Indians sent on similar errands to the sick by St. Francis Xavier. He himself,
when attacked by sciatica, which tied him to his bed, or constrained him to
walk with crutches, spoke to the Beata, who cured him with a sign of the Cross.
From then onwards he could go limping but alert here and there through the town
at all times. If he caught a cold or a catarrh in going the Beata's errands, it
was enough for him to tell his "Mamma", and a sign of the Cross put
all to rights." Headaches or pains in the chest, swellings and other
miseries which he contracted in the service of the saint fled at a sign of the
Cross.
Here is a moving incident. In Anna's last illness the Abbe, worn out with going
for the doctor, the priest, her friends, fell ill of congestion. The Beata
beckoned him to come near, and tracing on his breast the sign of the Cross
said: "Go to bed. Go to sleep for half an hour and all will be well. I
have too much need of you at this moment to allow you to be ill." Half an
hour later he was cured, but Anna was in her agony.
Her death and postmortem -Blessed Anna Maria Taigi is found to be an
incorruptable
Anna Maria Taigi died 4:00am on the morning of June 9, 1837, after having
received Viaticum and the Sacrament of the sick given by the local Curate
(Parish Priest). Our Lord had promised Anna that the cholera would spare Rome
until her death. She had scarcely breathed her last when the scourge broke out
amidst scenes of indescribable panic. The death of the Beata at first passed
unnoticed, but piety recovered quickly and the body was left exposed for two
days for the veneration of the faithful in the church of Santa Maria, in Via
Lata. On the Sunday evening a devout cortege conducted it to the new cemetery,
in the Campo Verano, where, conformably to the instructions of Gregory XVI, it
was enclosed in a leaden sepulchre, with seals affixed, near the chapel. Mgr.
Natali had caused a mask of the face to be taken before the body was placed in
the coffin.
After a few days, in spite of the cholera, the procession of pilgrims began.
Ordinary folk, bishops, cardinals, elbowed one another near the humble
tombstone. Cardinal Odescalchi forthwith instructed Mgr. Natali to collect all
the documents, from which Mgr. Luquet, postulator of the cause, published the
first biography. It had an immediate success, and was translated into several
languages.
The fame of her sanctity increased day by day.
Mgr. Natali and Domenico did not know to whom to reply first. "Many
people," says the latter, "who had known her plied me with all sorts
of questions as to how she died. Some asked one question, some asked another.
Some spoke of the special gifts she had received from God; others of the graces
they had received through her intercession while she was yet alive. Everybody
spoke well of her, praised her and described her as full of merits and virtues.
As for me, I always thought highly of her and I declare that Our Lord took
this, His good servant, away from me, because I was not worthy of her."
Cardinal Pedicini, while drawing up his voluminous memoirs of her, went often
to pray at her tomb. Cardinal Micara, the Capuchin, doyen of the Sacred
College, and Prefect of the Congregation of Rites, always carried a picture of
her about his person. The Venerable Bernard Clausi, of the Minim Order of
Franciscans, who often asked for her prayers, said to all who came his way:
"If she is not in heaven, there is no room there for anybody."
The Venerable Vincent Pallotti called Anna "his secretary, his
plenipotentiary, charged with all the interests of his congregation in the
presence of the Most Holy Trinity".
The Blessed Mary Euphrasia Pelletier, foundress of the Good Shepherd Congregation, confided to her the thorny questions she had to deal with in Rome.
Mgr. Flaget, Bishop of Louisville, who was to die in the odour of sanctity, had
visited the Beata during her last illness and sang her praises throughout the
United States.
The number of miracles increased and the people deplored the fact that the body
of the Beata rested so far from Rome. By order of the cardinal-vicar it was
brought to the church of Our Lady of Peace. The coffin, sealed for eighteen
years, was re-opened, and the body was found as fresh as if it had been buried
the day before. In spite of instructions for secrecy, and although the middle
of the night was chosen as the moment of removal, a vast crowd came to acclaim
"The Saint of Rome and its Palladium".
Pope Pius IX surrounded the
servant of God with great veneration. On the eve of the battle
of Mentana, pictures representing him beside Anna-Maria praying for the
triumph of the Church, were spread far and wide. Learning that she had
expressed a wish to be buried in the church of the Trinitarians, he had the
body brought on August 18, 1865 to the basilica of San Chrysogono. Three years
later the coffin was again opened, and though the clothes of the Beata had
decayed, her body was still intact.The sisters of St. Joseph took off the poor
clothing and replaced it by new. For eight days the body was exposed for the
veneration of the faithful; the whole neighbourhood of Trastevere seemed on the
move, and troops were necessary to ensure order. The body, enclosed in a double
coffin of lead and of cypress, was near the chapel of the Blessed Sacrament in
a memorial tomb, and, later on, in the chapel to the left, under the altar
within a large glass shrine which allowed it to be seen in the habit of a
Trinitarian Tertiary. The hands were joined in front of the breast. The face,
giving an impression of infinite serenity, was covered in a light wax mask
beneath the white coif.
Meanwhile the Process took its course. After the official enquiry entrusted to
Mgr. Natali, the juridical enquiry was begun in 1852. Thirty witnesses upon
oath were heard--Cardinals, bishops, nobles, servants, two daughters of the
Beata and finally, leaning on his stick, with hunched shoulders, an old man of
ninety-two years, the man who, after God, had the most to do with making
Anna-Maria a saint-Domenico. In 1863 Pope Pius IX introduced the Cause of
Beatification; on 4th March, 1906, Pope Pius X declared the heroicity of her
virtures. On May 30, 1920, Pope Benedict XV ranked Anna-Maria Taigi, mother of
a family, amongst the Blessed. A little while later he made her the special
protectress of mothers of families and the patroness of the Women's Catholic
Union.
When her holy remains were once again examined in 1920, they were found to be
no longer incorrupt, and were at that point subject to the normal processes of
decomposition. A wax covering has been placed over the face and hands,
preserving her resemblance. The holy remains of Blessed Anna Maria Taigi lie in
state in the Chapel of the Madonna in the basilica of San Chrysogono in Rome.
Her Memorial feastday is celebrated in the Church on June 9.
~Blessed Anna Maria Taigi, pray for us!
The webmaster would like to thank Brother Stephen O. at the Sub Tuum blog for the awesome
photographs of the holy remains of Blessed Anna Maria.
SOURCE : https://www.mysticsofthechurch.com/2009/12/blessed-anna-maria-taigi-wife-mother.html
Blessed
Anna Maria Taigi, by Father Hugh Francis Blunt
God calls us all to
sanctity. It is our blessed privilege that we all are the children of God,
sharers in His abundant graces, and that no matter what our state in life, we
can aspire to be great in His kingdom. Sometimes one is apt to think that the
present circumstances of life are not conducive to sanctity. The mother of a
family, for instance, is apt to think that the care of her children is an
excuse for her coldness in the service of God. “How can I be devout, let alone
aspire to sanctity,” she asks, “when all my life is filled with the cares of
the home? Now if I were in a convent, I would have more time to give to God,
and I am sure that in such an atmosphere of sanctity my soul would grow in
holiness.” Always the same old excuse – if I were somebody else, I would be
better than I am now.
But that is only a way to
deaden the conscience. A woman – even while we know that the virgin life in
itself is a higher life – may be married, may be the mother of many children,
may be obliged to lead a life that is full of the trivialities incident to the
bringing up of those children, may find her days but “the trivial round, the
common task” of baking and cleaning and mending, may have to struggle against
poverty, and yet may so use that life that it becomes doubly dear in the sight
of God. There have been great saints who have been great mothers, toiling
mothers, ordinary mothers in the eyes of the world. From every walk of life
they come, these saints of God, so that we all, no matter what our station in
life, may take courage in doing His work. After all, the Queen of all saints
was a mother, – Mary, the Mother of God. Hers was a humble life, a humdrum life
if you will, a life of simple duty, – the handmaid of the Lord. And while there
is a vast difference between the life of the Mother of God and the life of the
mothers of men, still may the mothers of men look to her to learn from her
motherhood the way to sanctify their own.
And so that we may not be
discouraged by the sight of her great glory, God has raised up lesser glories
of motherhood in order that mothers may emulate them, knowing that what has
been possible to the saintly mothers raised to the altars of God is still
possible to the most lowly mother of today.
The story of Anna Maria
Taigi is a glorious one for this reason – it is a glorification of the simple
life, the life of a poor woman, the mother of seven children, with all the cares
which that implies, yet of one who, while neglecting none of her duties to her
family, realized that even more than to them her first duty was to God and her
own soul.
The whole of this woman’s
life is well summed up in the Decree of the Sacred Congregation of Rites
regarding her beatification and canonization. It may be taken as a sketch which
we shall try to fill in later. It reads: “He who, when He would show forth His
power and wisdom, hath been wont for the most part to use the weak and foolish
things of the world to confound the haughtiness of man, to frustrate the
designs of the impious, and bring to naught the efforts of hell, hath in this
our age, when human pride and infernal power have seemed to combine to subvert,
if it were possible, the foundations, not only of the Church, but even of civil
society itself, opposed a poor, weak woman to the floods of impiety bursting in
on every side. He hath employed for this work Anna Maria Antonia Gesualda
Taigi, born, indeed, of honest parentage, but poor, married to a common man,
hampered with the cares of a family, and fain to seek wherewith to support
herself and them by the constant labor of her hands. This woman, whom He hath
chosen for Himself to be an attracter of souls, a victim of expiation, a bulwark
against plots, a warder- off of evils by her prayers, He hath first cleansed
from the dust of this world and then hath united to Himself by the strictest
bond of charity, hath adorned with wonderful gifts, and hath replenished with
such virtues as to draw to her on all sides, not pious persons only, from every
rank of society up to the very highest, but even the impious themselves, and to
inspire all with the highest opinion of her sanctity.”
It is remarkable that the
cause of this poor woman, who died in 1837, was introduced in 1862, only
twenty- five years afterwards, at a time when her husband and some of her
children were still living, a proof at least of the reputation for sanctity she
enjoyed among her neighbors.
Her maiden name was
Giannetti. She was the only child of Luigi Giannetti, who was by profession an
apothecary in the city of Siena. He and his wife, Santa Maria Masi, were people
in good circumstances, highly respected by their friends, Giannetti being
especially noted for his absolute honesty and trustworthiness in his business.
The child was born May
29, 1769, and was baptized the next day, receiving the name of Anna Maria
Antonia Gesualda. The little girl was barely six years of age when misfortune
came upon her parents. They lost all they had of this world’s goods, and rather
than face poverty among those who knew them in their days of prosperity, they
left Siena and came to Rome, where, too, the apothecary knew there would be a
better chance for him to get employment. So poor were they that they had to
make the journey on foot, and yet we can well believe that the hand of God was
directing them in what they considered a severe trial.
Giannetti and his wife
soon found employment as domestic servants, and took a small lodging in humble
quarters. Their hearts were centered in their little daughter, who was a pretty
child of attractive manners. They gave her an excellent education, as far as
they could, sending her to the nuns to school, with whom she soon proved to be
a great favorite. But better than all else, the good nuns as well as the
parents laid in the child’s heart the deep foundations of solid piety. The
parents, before going to work, took her with them to Mass every morning, while
at home they faithfully trained her childish lips to pray and to repeat often
the names of Jesus and Mary.
Those years of childhood
were uneventful. She was simply a poor child of poor parents. She would have to
make her living in the world; and so, when she was thirteen, she was taken from
the good nuns who had taught her so many things to be of service to her in
later life, and put to live with two old women, along with other girls, where
her work was to wind silk in preparation for manufacture. She made a few cents
a week at this work, which she gave to her parents. For six years she was thus
employed, and then she got tired of it and wanted to come back home to help her
mother. She was now a young woman, grown tired – and no wonder! – of the
humdrum life of silk-weaving. She wanted, too, to see something of the world.
She loved dress, and later reproached herself that during these days she was
vain of her personal appearance. Still, withal, she remained a good, virtuous
girl, an ordinary, good Catholic girl, faithful to her religious duties, but
with no remarkable piety. Her parents succeeded in placing her as lady’s-maid
in the house where they were still employed as domestics. She was under their
protecting eyes, and yet an attractive, refined girl like Anna was not free
from danger. She realized this, knew the temptations, and as a result was more
earnest in her prayers, more ready to seek the advice of her confessor, who
counseled her to marry.
She was about twenty-one
when she was married to Domenico Taigi. He was descended from a good, even an
illustrious Milanese family, but was a poor man, a domestic servant. He was,
however, a good man, religious and of excellent character. But he was
uneducated, even a rustic boor, far inferior to his young wife in point of
breeding, and so in many cases a trial to her.
He asked for her hand.
They both prayed to ascertain the will of God, and finally, after a month, they
were united in a marriage which, with all its trials, proved particularly
happy. She was loving, faithful, industrious, and studied all his wishes. He
was proud of his beautiful young wife, and liked to show her to his friends.
She was gay and happy, attractive and vain of her beauty and her dress. But all
the while she was displeased at her own worldliness, for she felt in her heart
that God was seeking to draw her to a more devout life.
One day, when she was
praying in Saint Peter’s, the grace of God touched her. She realized her vanity
and frivolity, her passion for amusement, and determined to put it all aside.
She had not committed any serious sin, but she felt that such a frivolous life
was wrong. From the day she made her confession to the Servite priest, Father
Angelo, to whom God had led her almost miraculously, this young wife of
twenty-two entered upon the road to perfection, from the pursuit of which she
was never to swerve during the long years of her married life. She put aside
the life of pride and pleasure for the life of mortification. When she returned
home from confession, she threw herself before the crucifix and scourged
herself, and struck her head against the floor many times, exclaiming, “Satisfy
to God, impure head, for so many frivolous ornaments with which you have dared
to adorn yourself.” God rewarded this self-abasement with many graces, and in
particular with the gift of a luminous disc in which, as in a mirror, she saw
the past, present, and future, a gift which she enjoyed for the remaining
forty-seven years of her life. Shortly afterwards she was given the power of
healing with the touch of her hand, could read the secret thoughts of others,
was granted the privilege of ecstasies, and all this at the very beginning of
her conversion to a more earnest life. God thus rewarded early her love for
Him.
At once she put aside all
her ornaments of vanity, her rings, her ear-rings, necklaces, and fine clothes,
and dressed herself in the commonest and coarsest of garments. She joined the
Third Order of the Trinitarians, and wore the habit under her other clothes.
She put aside all her worldly amusements and even denied herself the simple
pleasure of visits to her friends. There was no half way about her giving
herself to God. She punished herself, used the discipline, wore a hair shirt,
and even an iron chain. She fasted rigorously, sometimes for a period of forty
days, and went for days without a drink of water, a terrible penance in a hot
climate, and especially for one who worked as hard as she. As she used to say,
“The more greedy the ass is, the more needful is it to draw the rein tight.”
She mortified her sight, too, and was as modest as a young girl. Not only did
she not criticize anybody, but she would allow no one to make in her presence
depreciating remarks about others.
“My mother,” said one of
her daughters, “scarcely slept at all. She spent most of the night in prayer,
and was up early in the morning to go to Mass, after having slept but two
hours.” In a word, she lived in God and for God. “To acquire the love of God,”
she used to say, “we must always be rowing against the current, and never cease
counteracting our own will.”
If this woman had not
been married, no doubt she would have entered the religious life. It is
useless, however, to speculate on that, for it was the will of God that she
should be a wife and mother, no doubt, in order that she might show that it is
possible to lead a holy life even in the lowliest surroundings. And this poor
woman became, says one of her biographers, “the rampart of the Holy See, the
oblation of sinners, the consolation of the afflicted, the succorer of the
poor, the guider of the learned, and the counselor of priests; she was a
theologian, a doctor, a mother in Israel, a seer of the ancient days, an
inspired prophet, a true wonder-worker.” What a panegyric for a poor,
hard-working mother of seven children! Yet it was because she was a devoted
wife and mother, faithful to the duties of her home, that God raised her to
such heights.
Her religious ardor was
never an excuse for neglect of duty. Not even her husband or her children knew
to what heights of sanctity she had reached. It was only after her death that
her instruments of self-mortification were discovered. Her penances, like her
trials, she hid in her own heart.
And she had her trials.
She was refined and sensitive; her husband was rough, coarse, and uncouth. He
was self-willed, easily angered, and would fly into a rage if contradicted. She
never argued with him or contradicted him. She was always patient, silent when
he was angry, and in such a way that he soon became ashamed of himself, fearing
that he had distressed her.
Domenico Taigi, with all
his faults, had a good heart. His wife always sought to please him, would even
set aside her devotions in order to accompany him or to do some service for
him. As he said, long after she had died, at the time of the opening of the
process of her beatification – he was then ninety-two – “I always found her as
docile and submissive as a lamb.” It was a touching tribute to a loving wife,
words that could be taken to heart by many wives of today, when we are hearing
so much about women’s rights and so little about their duties.
And this docility and
simplicity on her part are all the more remarkable when one knows that the
humble home was always crowded with persons of distinction, ecclesiastical and
lay, come to seek her advice; for by her great sanctity, her charity to the
sick and poor, her ecstasies in the churches, and her ability to give the
soundest advice, she was renowned all over Rome.
And yet, in spite of that
popularity, her first thought was for her husband. “It happened to me
frequently,” he said, “when coming home to change my clothes, that I found the
house full. Immediately she would leave everybody, whatever lord or prelate
might be there, and hasten to me with the greatest cheerfulness and pleasure,
that she might brush my things and wait upon me, even to the tying of my
shoe-strings. In short, she was my consolation, and that of all the world.”
In her he had the
greatest confidence. “I let her manage everything,” he said, “because I saw
that she acquitted herself perfectly of the task.” Yet she would never do
anything unusual without first of all consulting him. What a simple tribute are
the words of the old man of ninety-two, looking back over the past happy years.
“She was always cheerful and pleasant,”’ he said; “yet she had a host of
maladies. This, however, did not hinder her from putting her hand to work; she
looked to everything and had hands of gold. As for me, I did not give a thought
to anything. She made pantaloons for me, and overcoats. I do not well know how
to express myself. To cut the matter short, I am old; but if I were young, and
were minded to travel over the whole earth to find such a woman, it would be
impossible to meet with her. I have lost a great treasure.”
She was the mother of
seven children, four boys and three girls. Camillo, the eldest, died at the age
of forty-two; Alessandro at thirty-five; Luigi at a year and a half; and Pietro
at two years. Two of the daughters were living at the time of the process of
her beatification, one unmarried, the other a widow.
It can be easily believed
that this mother, holy as she was, took a deep interest in her children. She
nursed all of them, taught them their catechism, and instructed them how to
read and write. Morning and night, the whole family had prayers together, and
always she taught the children to thank God that they had been born in the
Catholic Church. She prepared them for Confession and Communion, and saw that
the girls frequented the sacraments once a week, and the boys two or three
times a month.
She arranged that all the
boys should learn a trade according to their station in life. She had no
foolish ideas about their becoming wealthy. The girls she sent to school. Over
them all she exercised a watchful care. She guarded their modesty even in their
own home, and kept them from bad companionship. In a word, she was a
hard-working, prudent, common-sense mother, devoted to her children. “I will
save your children,” Our Lord said to her one day, “because they are of your
blood, because they are poor, and the poor are my friends. Yes, I will save
them, although they have many faults.”
She did not hesitate to
punish the children when they needed correction. She always insisted that they
give their father strict obedience. She would allow no one to criticize others
in the presence of the children. In fact, she would not listen to remarks about
others, anyway, and especially about priests. “They are God’s ministers,” she
would say, “and therefore always worthy of our respect; at the hour of death
whom shall we need save the priest?” And this reverence for priests she
instilled into the hearts of her children.
It was a happy household,
a home simple in its furnishings – poor, even – but rich in its simple,
unaffected piety. As soon as she awoke the children in the morning, they all
would kneel about the little altar and say their morning prayers, together with
her old mother, who lived with them. And after supper all would gather and
listen to the reading of some pious book, and then before retiring there would
be family prayers, the recitation of the Rosary, and other devotions. In her
family God was the first consideration. And yet it was not a gloomy household.
There was nothing unhappy about her. She was always pleasant, always could
enjoy a good joke, and always sought to provide simple amusement for the
children, taking them on picnics and otherwise seeking to make them light-hearted.
We get a good picture of
her as manager of the home. Her husband received small wages, scarcely two
dollars a month, so one can imagine how she had to plan in order to bring up
her large family. She always stood and served the others while they sat at
meals. Difficulties came upon the family when the husband lost his position
through the removal to Paris of the family he worked for, at the time the
French army in 1798 occupied Rome. It was discouraging to Domenico, but the
wife urged him to put his trust in God; and then, to help out in the care of
the family’s support, she learned to make women’s shoes and stays and worked at
the new trade night and day. So successful was she that soon she was able not
only to support her own family, but also to feed a great number of poor people.
It was at this time that
she met the Princess Maria Luisa, afterwards Queen of Etruria, who came to her
assistance in helping the poor. It was the time of the terrible famine in Rome,
and Mrs. Taigi, delicate of health, through the long cold days would stand in
the bread-line before the baker’s so that her children should not go hungry.
Yet she was always calm and patient. She was never idle, and even when confined
to the bed with torturing illness would do the family mending.
Besides the care of the
children, she also had the care of her father and mother, who in their old days
had been obliged to give up their work. The mother was hard to get along with,
a woman with a bad temper, but her daughter was ever kind to her and tended her
devotedly to the end. So, too, with her father. In the last years of his life
he was afflicted with a horrible leprosy, but she would wash and comb him and
attend to all his wants. Added to that, her son Camillo brought his wife to
live with them, a woman who was a trial, since she wanted to be the mistress of
the house, always looking for trouble. And then, when her daughter Sofia lost
her husband, she came with her six children to live with her parents. It was a
patriarchal way of living, but it brought its trials. Yet the good mother who
was the head of the house never complained, but tried to make everybody feel at
home.
To bear such trials and
petty hardships she needed a lively faith. And surely she had that. She ever
thanked God for the gift of faith, and had the utmost reverence for everybody
and everything connected with religion. She had a special devotion to the
Blessed Trinity, and soon after her conversion, as we have seen, became a
member of the Third Order of Discalced Trinitarians, founded in 1198 for the
redemption of captives, which may be called a religious order for those who
live in the world.
And with it all there was
that same confidence in God which knows that He will help those who help
themselves and pray. “She did not,” says her husband, “wait for the basket to
come down from heaven without doing anything herself. She joined labor to
prayer in order not to tempt God by seeming to expect that He would work a
miracle for her. When she found herself in a position of real necessity, she
addressed herself to God with all the greater confidence, and the Lord helped
her so well that the maintenance of her numerous family without their ever
suffering want was a continual miracle.” And then he asks very simply, “What
could I do with my salary, if I had not the servant of God?”
It was all her simple
trust in the providence of God. They were always on the verge of poverty, but
always managed to get along. The wealthy who came to the house to consult with
her wished to make presents to her, but she would have none of that. God was
the only help she wanted. Even when her daughter Sofia brought home her six
children to increase the family burden, and began to weep and to wonder how
they would all be fed, she was reproached by her mother. “What are you thinking
about?” she asked. “You must know that God never abandons any one. You will
have what you need. Place your trust in God, and give no thought to anything
else; as for me, I will never forsake you.”
One day, when she called
to see the Princess Luisa, the latter opened a drawer full of gold, and said to
her: “Take, take, Nanna mia, what you will.” But the poor woman merely smiled
and answered: “How simple you are, madam! I serve a Master richer than you. I
trust and hope in Him; and He provides for my daily necessities.” It was not
pride that made her refuse help from others; it was just her simple trust in
God and her desire to remain always poor.
Later on, when she was
unable to work, the family was in great poverty, and, painful as the humiliation
was, the poor woman had to accept alms. She was poor in everything but the
grace of God. And how rich she was in that! She lived in the presence of God,
and endeavored to please Him in all things. This love of God made her endure
physical and mental suffering, calumnies, contempt, harshness, not merely with
resignation, but with joy. Her life was one long martyrdom gladly borne. Hers
was a soul that God loved exceedingly, and He showered His choicest blessings
upon it. Sometimes, when she was busy sweeping the floor or cooking, she would
go into an ecstasy. At times even the note of a bird would transport her, so
tenderly did she love God. Yet some of her neighbors, seeing these things, used
to say that she was possessed, or that she was a hypocrite. Even her husband
used to think, when these ecstasies came upon her, that she bad a fit of
convulsions, and would try to shake her out of them. So little even he
suspected the wonders God was working in the soul of this humble wife of his.
And through it all was
her intense hatred of sin. She told her confessor that rather than commit a
venial fault, she would mount a scaffold and endure all its shame, together
with the infliction of every conceivable torture. As her love for God, so her
love for her neighbor. Even out of her poverty she helped the poor, spending
some of her time at night working for them, taking into her house the chance
wanderer to feed and clothe, always seeing in the poor Jesus Christ Himself.
“Never send the poor away,” she would say to her family; “when you have nothing
else, give them a bit of bread.” When sent for by the sick, she always went, no
matter what the weather. And she was always being sent for. She had a special
gift for consoling the afflicted, and if she found poverty she would herself go
begging alms for the destitute ones, and even take the bread out of her own
mouth to succor them.
Hers was a charity that
extended even to the dumb animals. “These poor beasts have no paradise save in
this world,” she would say, and would even use the power she had to cure them.
It is said that she would leave her own dinner to feed a hungry cat. She saw
all animals as creatures of God. In her was renewed that love for animals so
characteristic of Saint Francis.
If there was one virtue
for which she was especially noted, it was her patience. Sometimes her
neighbors insulted her, so much so that the angered Domenico had to defend her.
But the more she was insulted, the more she rejoiced. For years she endured
bodily ills, constant sick-headaches, neuralgia, rheumatism, asthma, gout – in
fact, all the ills to which the flesh is heir. But never a murmur from her.
Despite her sufferings, she kept at her devotions. She had a special devotion
to the Infancy and Passion of Our Lord and to the Blessed Sacrament. And she
had a tender devotion to the Blessed Virgin and the poor souls in Purgatory.
Many a sinner she
converted, offering up herself in expiation, and God accepted the .sacrifice,
sending her all manner of trials, and permitting her to be sorely beset with
temptations of every kind.
It was a time of trial
for the Church, a time of persecution, and she was a victim of penance for the
sins of the world and for the evils affecting the Church.
But with her sufferings
God gave her great privileges. There is no doubt, in reading her life, that she
had the gift of prophecy, and also worked miracles of healing. “Anna Maria the
Saint,” was what the people called her, and high and low came to her, begging
her advice and her prayers.
For eight months before
her death she was confined to her bed of pain – of torture, rather – for every
member suffered as if on a rack. And with what patience!
She did not fear death.
She even announced her approaching end to her family with great cheerfulness.
Then she called Domenico, her husband, and thanked him with tenderness for all
the care he had taken of her, and all his kindness to her. Then she called her
children and gave each of them advice. “My children,” she said, “have Jesus
Christ always before you; let His Precious Blood be ever the object of your
veneration. You will have to suffer much, but sooner or later the Lord will
console you. Keep His commandments, cherish devotion to the most Holy Virgin,
who will be your mother in my place.”
She left them nothing; rather,
she left them poverty. But she did not bemoan that. She knew that God would
take care of them.
And so, in poverty and
alone, the good wife and mother died in 1837, at the age of sixty-eight. On
that occasion the following letter was written by her confessor, Father
Filippo, to the Pope’s vicar, Cardinal Odescalchi: “It is very just and proper
seasonably to reveal the works of God, for His greater glory and for the
edification of the faithful. Yesterday, Friday, the ninth of the current month
(June), passed to eternal rest the soul of Anna Maria Taigi, who lived in the
parish of Santa Maria in Via Lata. I know that the secretary of his Eminence
Cardinal Barberini, D. Raffaele Natali, who has lived with her nearly twenty
years, has addressed, in conjunction with other persons, a petition to your
Eminence, to the intent that regard should be had to the body of this holy
woman, which merits all respect. As for me, who have been her confessor for
more than thirty years, until the day before yesterday, when she received the
last sacraments, I believe myself to be bound in conscience to make known to
your Eminence that not only did she exercise the Christian virtues in an heroic
degree, but that God favored her also with special graces and extraordinary gifts,
which will excite admiration, should it please God to publish them
authentically before the whole Church, as I hope. I should have much to say on
this head. I content myself with testifying to the charity of this holy soul,
which constituted itself as a victim before God, and which obtained signal
graces for Rome. I hope that God will cause this to be recognized later. The
mortal remains, therefore, of so virtuous a soul, and one so highly esteemed by
Pius VII and Leo XII, by Monsignore Strambi, Monsignore Menacchio, and a crowd
of persons of every rank and every country who obtained extraordinary graces
through her intervention, seem to merit special regard, in accordance with the
constant practice of the Church.”
The same priest said:
“Well, a woman replenished with so many merits, virtues, and supernatural gifts
lives unknown and dies abandoned by every one; having round her bed of
suffering only a poor family whom she leaves in destitution, and recommends to
a priest, equally poor, who is to continue collecting daily alms for them. She
blesses her children, and leaves them, as her sole bequest, piety, religion,
devotion to the Virgin, to the saints, and particularly to Saint Philomena, her
patroness, whom she constituted the guardian and protectress of her poor and
numerous family. After which, recollected in God and animated by the fortitude
which resignation imparts, she drinks to the very last drop the bitter chalice
of a painful death.”
When this poor woman died
there was universal sorrow throughout the city as soon as the sad news was
learned. “The saint is dead,” was heard on all sides. High and low visited the
house where she had died, and many, in spite of the fear of cholera then
prevalent, went to pray at her tomb. Her work went on even after her death. The
sick were healed through her intercession, sinners converted, and many other
graces granted. So general was the opinion of her sanctity, that the Cardinal
Vicar commissioned Raffaele Natali to collect all the documents relative to her
life. When her biography was written shortly afterwards, seventeen thousand
copies of it were sold in Rome alone. It was translated into many languages and
spread over all the world.
For eighteen years the
body lay in the common cemetery, and then there arose a desire to remove it
into Rome. It was found incorrupt, and the clothes in perfect preservation. It
was then placed in the Church of Santa Maria della Pace. Ten years later, on
the occasion of the removal of the body to its last resting-place in the Church
of the Trinitarians, it was still incorrupt. Her tomb was ever after a shrine
at which the faithful prayed. The process of her beatification was begun in
1863, and it has not yet been finished.
So passed a poor, simple
woman; so passed a great servant of God. What an example, we say, to all, but
especially to the mothers of whom she may well be patroness! What mother ever
had a harder life, one of continual toil, continual pain? Yet she was always
rapt in God. Faithful to her husband, faithful to her children, and, above all,
faithful to God, surely the venerable Anna Maria Taigi understands the
difficulties of mothers, and will help those that pray to her.
– text taken from the
book Great
Wives and Mothers by Father Hugh Francis Blunt, 1917
SOURCE : https://catholicsaints.info/blessed-anna-maria-taigi-by-father-hugh-francis-blunt/
Triduum in Honor of Blessed Anne Marie Taigi
BLESSED ANNE MARIE TAIGI
Model and Patroness of a
Family,
a Wife, a Mother, and a
Mystic
Blessed Anne Marie Taigi was born in Siena on May 29,
1769 and baptized the following day. Because of financial
difficulties, her parents, Louis Giannetti and Mary Masi, moved to Rome when
Anne Marie was six years old.
In the Eternal City, Anne
Marie attended the school conducted by the Filippini Sisters for two years.
Following
her schooling, she worked at various occupations, even that of a maid, to bring
financial assistance to her parents.
When still a young girl, she
married Dominic Taigi, a pious young man but of difficult and rather coarse
character. Disregarding these defects, Anne Marie was
more concerned with his virtue and for the forty-nine years of there married
life she conducted herself with the greatest affability and delicacy, finding
ample opportunity to exercise continually the virtues of patience and charity.
Their marriage was characterized by the highest Christian principles.
Understanding the profound social and moral values of the Christian
marriage and considering it, above all, as one of the highest missions from
Heaven, Blessed Anne Marie transformed her home into a real sanctuary in which
God had the first place. Docile to her husband in every way, she avoided
anything which might irritate him and thus disturb the family peace.
Serious and hardworking, she saw to it that nothing was lacking to her
family and, in so far as one in her impoverished circumstances could, she was
generous to the poor.
She bore seven children, three
of whom died in childhood. Two boys and two girls
grew to maturity and she provided them with the most accurate and complete
religious and secular education.
Having sought to correspond to
grace from her childhood, she now begun to live a life of intense spirituality.
She
had one desire only: to love God and to serve Him in everything; she had only
one preoccupation: to avoid the least shadow of the slightest voluntary
imperfection. She was greatly devoted to the Holy Eucharist, to the Most
Holy Trinity, to the Infant Jesus, to the Sacred Passion of Our Lord and ever
had the tenderest devotion to Our Lady.
Anne Marie Taigi is one of the
great mystics of the last century. Yet, she achieved her
sanctification by living the ordinary life of wife and mother in a spirit of
Christian mission and compliance with God's will. Her daily attendance at Mass,
her total surrender to God, her readiness to help anyone in need, and her being
an active member of the Third Order of the most Holy Trinity were, at the same
time, the sources and the fruits of her intense spiritual life. She
entered the Third Order of the Most Holy Trinity on December 26, 1808. God
enriched her with many supernatural gifts. The most unusual of these was
the apparition of a luminous globe like a miniature sun which shone before her
eyes and in which, for forty-seven years, she could see present and future
events anywhere in the world as well as the state of grace of individuals,
living or dead.
Anne Marie Taigi died June 9, 1837. In testimony to how an ordinary
housewife and mother could become a saint and positively affect society and the
lives of those who come in contact with her. The Church declared her
“Blessed” on May 30, 1920. Her mortal remains lie in the Chapel of the
Madonna in the Basilica of San Crisogono in Rome, Italy. The Trinitarians
are actively promoting the cause of her canonization.
SOURCE : https://maryqueenofpeace.tripod.com/id489.htm
Beata Anna Maria Taigi Madre
di famiglia, terziaria trinitaria
Siena, 29 maggio 1769 -
Roma, 9 giugno 1837
Sposa esemplare e devota
della Santissima Trinità. Sono le due caratteristiche di Anna Maria Taigi, nata
Anna Maria Giannetti a Siena nel 1769 e vissuta a Roma dall'età di sei anni
alla morte, avvenuta nel 1837. Per aiutare i genitori bisognosi si dedicò a
diversi lavori. Ancor giovane si sposò con Domenico Taigi, uomo dal carattere
molto difficile. Mandò avanti la casa, dando un'educazione cristiana ai figli.
La coppia ne ebbe sette (tre morirono, però, in tenera età). E non si
dimenticava dei poveri. Tanto che un mistico fiammingo disse di lei che non
disdegnava di lasciare le visioni ultraterrene per scaldare la minestra a un
malato. Nel 1808 abbracciò l'Ordine secolare trinitario. Tra i doni miracolosi
che ebbe c'era un sole luminoso che per 47 anni le brillò davanti agli occhi.
Vi vedeva quanto accadeva nel mondo e la situazione in cui si trovavano le
anime di vivi e morti. Anna Maria è stata beatificata nel 1920 e il suo corpo
riposa in una cappella della chiesa romana di San Crisogono. (Avvenire)
Etimologia: Anna =
grazia, la benefica, dall'ebraico
Martirologio Romano: A
Roma, beata Anna Maria Taigi, madre di famiglia, che, pur maltrattata da un
marito violento, continuò a prendersi cura di lui e a provvedere all’educazione
dei suoi sette figli, senza mai trascurare la sollecitudine spirituale e materiale
per i poveri e gli ammalati.
«I sacerdoti secolari, i religiosi e le religiose votati alla vita attiva, ma anche alla vita interiore, partecipano allo stesso potere che le anime del chiostro hanno sul cuore di Dio. Ne sono esempi magnifici un padre Chevier, un don Bosco e […] la beata Anna Maria Taigi che, nelle sue funzioni di povera massaia, era un’apostola come lo era s. Benedetto Giuseppe Labre che schivava le vie battute». È uno dei passaggi della celebre opera «L’anima di ogni apostolato» (1907), dell’abate Jean-Baptiste Chautard (1858-1935), dedicati ad Anna Maria Giannetti Taigi (1769-1837), laica trinitaria e madre di sette figli, della quale ricorre oggi la festa liturgica.
La beata Taigi, che era nata a Siena ma visse la maggior parte della sua vita a Roma, da semplice madre di famiglia e domestica della famiglia Chigi, ricevette secondo quanto riportato dal celebre Abate trappista nella sua più importante opera, «livre de chevet» di decine di santi fra i quali Pio X, «singolari doni soprannaturali di sapienza, discernimento spirituale e di profezia, soprattutto sui gravi problemi religiosi e politici del tempo. A lei ricorsero vescovi, cardinali, papi e uomini di Stato per ricevere consigli».
Beatificata da Benedetto XV nel 1920, Anna Maria Taigi fu terziaria dell’Ordine della Santissima Trinità e, sotto la direzione spirituale di monsignor Raffaele Natali, allora segretario del maestro di camera di papa Pio VII (1800-1823), condusse una vita umile e di austera penitenza. Il prelato marchigiano visse ospite della beata Taigi per circa venti anni e, quindi, fu testimone oculare di numerosi fatti straordinari che ne intesserono la vita. Nell'archivio della Chiesa di San Carlo a Roma, tenuta dai Padri trinitari, sono conservati alcuni volumi che lo stesso Natali scrisse, in parte durante la permanenza in casa della Beata, in parte dopo la sua morte. Nel 2005 una studiosa appartenente al laicato trinitario, Giovanna Cossu Merendino, ha raccolto questi scritti in un ponderoso volume intitolato «Le misericordie di Dio verso le sue creature: beata Anna Maria Giannetti Taigi» (Tipografia Vaticana, Città del Vaticano 2005, pp. 572). Nell’introduzione rileva come «nel nostro tempo di crisi di valori, di divorzi, di aborti, di sperimentazioni su embrioni umani, di unioni irregolari, la figura di questa donna appare quanto mai attuale; la fedeltà, la forza con cui visse la sua non facile condizione familiare, rappresenta un esempio prezioso, un richiamo ai valori della famiglia, all’amore per le piccole cose, all’amore di Dio». Non a caso il convegno che l’Associazione San Giovanni de Matha dei laici trinitari d’Italia ha tenuto l’anno scorso a Roma, è stato proprio dedicato al tema «Le radici spirituali e culturali della crisi economica in atto». Nella sua relazione la Cossu ha rilevato che, della carità che riceveva, la beata Taigi tratteneva soltanto l’indispensabile per le necessità della famiglia, perché «il resto lo distribuisce tra chi è più povero di lei e si umilia a chiedere lei stessa l’elemosina vedendo che non sono sufficienti le sue risorse per soccorrere i bisognosi». A 20 anni Anna Maria Giannetti aveva sposato Domenico Taigi, un servitore della famiglia Chigi, dal cui matrimonio nacquero ben sette figli.
Per far sì che la figura e l'opera della Beata siano conosciute e servire
d’esempio per i laici e le madri di famiglia di oggi, la Cossu sottolinea anche
che, questa straordinaria laica vissuta nella Roma dell’Ottocento, sia «la
prima donna popolana che ha raggiunto la perfezione cristiana nella vita
matrimoniale; prima di lei molte donne hanno avuto gli onori degli altari, ma
non erano sposate, oppure erano vedove o religiose, regine o principesse. […]
il marito della Beata guadagna appena 6 paoli al mese, ma la povertà non è un
ostacolo per la loro felicità, perché non sono soli, il loro matrimonio è
composto di tre persone: c’è Gesù con loro» (Giovanna Cossu Merendino, «La
carità della Beata Anna Maria Giannetti Taigi e il suo impegno in campo
sociale», relazione al convegno «Le radici spirituali e culturali della crisi
economica in atto; la dimensione e la rilevanza sociale della nuova
evangelizzazione alla luce della lettera apostolica Evangelii Gaudium», Roma 10
- 13 ottobre 2014, pp. 1-2).
Autore: Giuseppe Brienza
Fonte: Vatican Insider
La beata Anna Maria Taigi nacque a Siena il 29 maggio 1769 e fu battezzata il giorno seguente. In seguito a dissesti finanziari i suoi genitori, Luigi Giannetti e Maria Masi, si trasferirono a Roma, quando lei aveva sei anni.
Nella città eterna venne affidata alle suore Maestre Pie Filippine, dove in due anni ricevette una completa formazione.
Per aiutare i genitori bisognosi, si dedicò a lavori diversi, anche più umili.
Ancor giovane si sposò con Domenico Taigi, uomo pio ma di un carattere difficile e grossolano. Anna Maria vi passò sopra, e badò principalmente alla virtù. Così per 49 anni, lei finissima nel tratto, ebbe l'opportunità di esercitare continuamente la pazienza e la carità.
Il matrimonio fu improntato ai più elevati principi cristiani. Conoscendone tutto il profondo valore etico-sociale, e considerandolo semplicemente come un'altissima missione ricevuta dal cielo, la Beata trasformò la sua casa in un vero santuario, dove Iddio aveva il primo posto. Docile al marito, evitava quanto poteva irritarlo e turbare la pace domestica. Sobria e laboriosa, non fece mancare mai nulla alla famiglia e, nel limite delle sue possibilità, fu larga con i poveri.
Ebbe sette figli dei quali tre morirono in tenera età: due maschi e due femmine diventarono adulti. Impartì loro un'educazione civile e religiosa accuratissima e completa.
Fin da bambina imparò a corrispondere alla grazia e cominciò a vivere una vita spirituale intensa. Aveva un solo desiderio: amare Dio e servirlo in tutto; una sola preoccupazione: evitare anche l'ombra di una qualsiasi imperfezione volontaria. Fu devotissima alla SS.ma Trinità, di Gesù Sacramento e della Passione del Signore; per la Madonna ebbe una tenerissima devozione.
Abbracciato l'Ordine Secolare Trinitario il 26 dicembre 1808, ne visse perfettamente lo spirito, e divenne serva fervida e adoratrice della SS.ma Trinità. Iddio l'arricchì di molti doni carismatici; singolare fra tutti, quello di un sole luminoso, che per 47 anni brillò davanti al suo sguardo, e nel quale vedeva quanto accadeva nel mondo e lo stato delle anime in vita e in morte.
Volò al paradiso il 9 giugno 1837; fu beatificata il 30 maggio 1920. Il suo corpo si conserva a Roma, nella Basilica di S. Crisogono nella Cappella a lei dedicata.
Autore: Carmelo Randello
SOURCE : http://www.santiebeati.it/dettaglio/33200
Sotto un sole infuocato
· Elena Buia Rutt
racconta Anna Maria Taigi, la santa del mese ·
02 giugno 2014
Nei primi versi di Mistica,
una poesia del 1963, Sylvia Plath descrive la propria condizione esistenziale
come una sorta di paralisi angosciosa: «L’aria è un mulino di uncini / domande
senza risposta». La poetessa americana, stremata dal fallimento del suo
matrimonio con il poeta inglese Ted Hughes, di lì a qualche giorno si toglierà
la vita, infilando la testa nel forno, non senza aver prima messo i vassoi
della colazione vicino ai lettini dei suoi due figli. Eppure, in questa poesia,
i versi centrali ci parlano di un’esperienza spirituale determinante, quella
del contatto con Dio: «Quando si è visto Dio, qual è il rimedio?».
Sylvia Plath ha provato
l’estasi dello slancio mistico, ma si ritrova incapace di normalizzare
quest’esperienza, reinserendola nella vita di tutti i giorni. Non riesce a dare
un senso concreto a questa sua “visione”, né tantomeno è in grado di trarne consolazione
e scopo. Nei versi finali, però, fa un passo in avanti; capisce come «il
significato cola dalle molecole», emerga cioè dalla concretezza opaca,
precaria, ma autentica della vita reale e non da un astratto moto ideale.
Una donna vissuta a Roma
circa due secoli e mezzo fa, una ex-domestica della famiglia Chigi, Anna Maria
Taigi, aveva sette bambini (di cui tre morirono in tenera età) e, venendo
continuamente rapita da estasi mistiche durante le faccende di casa, non aveva
il timore di rivolgersi direttamente al Signore, pregandolo cortesemente di
lasciarla in pace, dato che era «madre di famiglia e aveva altro da fare».
Infatti, a differenza di Sylvia Plath, Anna Maria Taigi viveva l’esperienza
dell’incontro con Dio, soprattutto nella sua faticosa, povera e laboriosissima
vita quotidiana, svolgendo appieno i suoi compiti di madre di famiglia,
arrancando per mettere insieme il pranzo con la cena, assecondando con pazienza
l’irascibile carattere del marito, prodigandosi per poveri e malati, pregando e
facendo penitenza per tutti coloro che ne avevano bisogno, fossero Papi o
popolani. Oltre ai sette figli, Anna Maria si dedicava ai sei nipoti, figli
della figlia Sofia rimasta vedova: senza contare le cure intensissime nei
riguardi dei vecchi genitori, in particolare verso il padre, malato di lebbra.
Eppure era una giovane
donna che, per bellezza e portamento, avrebbe potuto condurre una vita dedita
allo svago e alla mondanità; ma aveva scelto la via stretta della sequela del
Signore, motivo per cui chiese di essere aggregata al Terz’Ordine dei Trinitari
Scalzi.
Il significato che Plath
faticosamente intravedeva e intellettualizzava (ma che non le impedì di
togliersi la vita), Taigi lo viveva in modo diretto in una fede radicata nel
«prosaico e incompiuto» mondo quotidiano. Un significato basato su un servire
spassionato, estremo, ispirato: un significato alimentato da una carità
smisurata. Fu beatificata nel 1920, da Benedetto xv, perché «sposa esemplare,
madre premurosa e testimone dell’amore alla Santissima Trinità». Eppure Anna
Maria per quarantasette anni (dal 1790 alla morte) vide splendere, a una
distanza di circa un metro e venti e a circa venti centimetri sopra il suo
capo, un sole infuocato, circondato orizzontalmente da una corona di spine
dalla quale scendevano due lunghe spine, che si incrociavano con le punte
arcuate verso il basso. Nel centro della sfera c’era una donna seduta, con lo
sguardo levato in direzione del cielo.
In questo “sole mistico”
Anna Maria parlava con Dio, vedeva avvenimenti passati, presenti e futuri,
leggeva i segreti dei cuori.
Vi conobbe anche con
assoluta certezza la sorte dei defunti, come anche la durata e la causa delle
loro pene riparatrici in purgatorio: un’umile donna del popolo era così a
conoscenza del destino delle anime e dei più alti segreti di capi di Stato,
generali, Papi. Profetizzò molti eventi storici che poi si realizzarono come
lei aveva annunciato: tra questi, la sconfitta dell’esercito napoleonico in
Russia, la conquista dell’Algeria da parte della Francia, la liberazione degli
schiavi nelle Americhe, l’inizio, la durata, le linee teologiche e le
vicissitudini politiche del pontificato di Giovanni Mastai Ferretti, che non
era ancora cardinale quando Anna Maria morì nel 1837. Quanto a Napoleone,
conobbe non soltanto i diversi avvenimenti della sua vita, ma profetizzò anche
la morte a Sant’Elena, descrivendone i funerali, come se vi fosse presente.
Taigi, inoltre, ebbe con Pio vii parecchi colloqui: combatté con moniti,
incoraggiamenti, preghiere, digiuni, penitenze a difesa dell’indissolubile
legame tra papato e sede romana, messo seriamente in discussione dalla bufera
napoleonica in corso. Una povera donna del popolo, ispirata dall’alto, si
offriva come vittima della giustizia divina: in questo risiede quella sua
santità, fatta di vita pratica (Anna Maria non sapeva scrivere), umiltà, forza
d’animo e amore per Cristo crocifisso.
Anna Maria Taigi morì il
9 giugno 1837, a sessantotto anni. Il suo corpo, perfettamente intatto,
riposa in una cappella della chiesa di San Crisogono a Trastevere.
Nata nel 1971, laureata
in lettere e poi in filosofia, Elena Buia Rutt ha collaborato a Radio 3 e Rai
educational. Tra le sue pubblicazioni, Ti stringo la mano mentre dormi (2012), Flannery
O’Connor: il mistero e la scrittura (2010), Verso casa: viaggio nella
narrativa di Pier Vittorio Tondelli (200o). Per noi, ha scritto la storia
di santa Teresa di Lisieux (ottobre 2013).
BEATA ANNA MARIA TAIGI
L’ORDINARIETÀ DI UNA VITA
VISSUTA IN UNA CONTINUA TENSIONE VERSO IL CIELO
Del 09/06/2022
di Enrico Sigismondi
Difficile inquadrare in
un unico, statico schema la figura della Beata Anna Maria Taigi. Donna laica,
sposa, madre di ben sette figli - di cui tre morti in tenera età - terziaria
dell’ordine della Ss. Trinità. Ricolma di grazie abbondanti quali il solo Vangelo
di Nostro Signore Gesù Cristo poteva annunciare e promettere: “Una misura
buona, pigiata, scossa e traboccante vi sarà versata nel grembo”. E veramente
così fu per Anna Maria che, nata il 29 maggio 1769, a sei anni si trasferisce a
Roma dopo aver fino ad allora vissuto a Siena con il papà Luigi Giannetti e la
mamma Maria Masi.
Famiglia benestante
quella di Anna Maria. Ma la fortuna finanziaria del padre, farmacista
stravagante ed imprevidente, non dura che pochi anni. Venduto tutto per
ripagare i debiti, il trasferimento è imperativo e Anna Maria inizia presto a
conoscere il duro lavoro, la mortificazione dell’umile servizio in una fabbrica
prima e poi l’imposto silenzio delle giornate trascorse da cameriera. Inizia
presso una nobildonna dalla quale assimila la vita oziosa e gaudente. Infine a
palazzo Maccarani, dei principi Chigi. Approdata qui dopo un’istruzione
sommaria ma completa ed imbevuta di quel ricco bagaglio di fede trasmessole
dalle suore Maestre Pie Filippine, conosce l’uomo che sposerà giovanissima:
Domenico Taigi. Per compiacerlo vive per tre anni nella vanità femminile e i
divertimenti mondani. Se ne stacca definitivamente dopo una confessione guidata
dalla stessa mano provvidente del Signore..
Domenico non è un uomo
cattivo. Si può dire che sia un devoto timorato di Dio, eppure manifesta un
carattere difficile, puntuto e spigoloso che non di rado è ragione di
sofferenza per chi gli è vicino. Anna Maria conoscerà anche in questo l’umile
servizio di una sposa verso il proprio marito, attraverso la paziente
sopportazione e la benevola testimonianza di un amore coniugale ricolmo della
più alta spiritualità, ma denso di concrete e disinteressate attenzioni che
altro non sono che il palpitare del Cuore Divino del Salvatore in Lei.
Dirà proprio Domenico al
processo di beatificazione della moglie:
“Accadeva spesso che al
mio ritorno a casa la trovassi piena di gente. Immediatamente ella si congedava
da tutti, fossero anche una nobildonna o un prelato, per prendersi cura di me
con sollecitudine amorosa: ognuno poteva rendersi conto che faceva ogni cosa
con tutto il cuore, mi avrebbe perfino tolto i calzari dai piedi, se lo avessi
permesso. In breve, era per me di consolazione e di conforto in ogni cosa [...]
La serva di Dio sapeva come mettere ognuno a suo agio e lo faceva con una
grazia che non mi è possibile descrivere. Spesso tornavo a casa stanco, di
malumore e irascibile ma ella sempre sapeva addolcirmi e rallegrarmi.”
Sì. La casa di Anna Maria
è spesso piena di gente. Di ogni estrazione sociale e culturale. Il cardinal
Pedicini - suo direttore d’anima assieme a monsignor Raffaele Natali - a chi
gli chiede consiglio e istruzioni di spirito rimanda molti da Anna Maria.
Ella accoglie tutti con
soave delicatezza ed attenzione materna, senza badare a chi ha davanti, fosse
anche una regina.
Ed in effetti una regina
si presenta. Si tratta - tra le tante personalità di spicco, curiali e
nobiliari - di Maria Luisa di Borbone-Spagna, regina consorte di Etruria
investita della sua regalità sovrana assieme al marito Ludovico nientemeno che
da Napoleone Bonaparte in persona.
La regina soffre di crisi
epilettiche frequenti e violente. Va da Anna Maria. Guarisce.
La nostra beata sparge,
per conto del Salvatore tanto amato, continue grazie attorno a lei. Un giorno la
nipote con un nocciolo di prugna si ferisce un occhio gravemente. La vista
sembra ormai persa. La Beata prende un po’ di olio del lume che tiene acceso in
casa; traccia un segno di croce sull'occhio della bambina. Il giorno dopo
quest’ultima va a scuola come sempre. La guarigione è completa. Nulla sembra
che le sia mai accaduto.
Nella chiesa di San
Marcello il marito Domenico si sente male all’improvviso. Quasi sicuramente un
colpo apoplettico. Si accascia a terra. Anna Maria si raccoglie in preghiera: la
grazia è ottenuta. Il marito si riprende istantaneamente e completamente.
Si potrebbe continuare
per pagine e pagine, ore e ore di lettura, ad elencare i miracoli compiuti
dalla nostra beata. Eppure ci occorre spazio per descrivere la grazia che
accompagna Anna Maria per tutta la vita: un globo di luce indescrivibile, un
“sole mistico” come soleva chiamarlo, proprio davanti a lei. In esso vede
perfettamente tutto il passato, scruta il presente e prevede il futuro.
Diverse e dettagliate
sono le predizioni che fa di avvenimenti tutti verificatisi alla lettera.
L’elezione del cardinal Cappellari a futuro pontefice con il nome di Gregorio
XVI. L’elezione del cardinal Mastai - Ferretti al soglio pontificio come Pio IX
in conclave dai tempi record (solo quarantotto ore) quando quest’ultimo si
trovava ancora nella lontana Nunziatura del Cile.
E in questo globo di luce
vede anche le anime che si salvano o si perdono per sempre. All’avvicinarsi a
lei di un’anima in stato di grazia, la luce diventa più intensa e il profumo
della virtù si fa sensibile. Se, al contrario, si approssima un'anima
pervertita, il globo si oscura e il fetore del peccato diventa quasi
insostenibile.
Nella sua ultima malattia
nessuno si accorge che per Anna Maria è vicino il momento delle Nozze eterne.
La lasciano sola, per permetterle di riposare. Eppure Dio non la
abbandona. Giunta l’alba del 9 giugno 1837 – un venerdì – monsignor Natali ha
la premonizione esatta di quanto sta per accadere. Si reca immediatamente a
casa della povera malata e la trova nei suoi ultimi momenti. Recita le
preghiere della Chiesa per quest'ora estrema, le dà l'ultima assoluzione e la
Beata si incammina per l’eterna Dimora Celeste.
La portata della
vocazione ricevuta da quest’anima è già abbastanza evidente in queste povere
righe offerte a gloria della potente misericordia di Dio. Ma ciò che colpisce
nella biografia della Beata Anna Maria Taigi non sono le grazie straordinarie
provenienti dal Cielo. In esse non c’è merito per l’anima eletta a tale disegno
di salvezza. Ciò che penetra la nostra realtà quotidiana ancora a distanza di
quasi tre secoli, è sempre l’ordinarietà di una vita vissuta in una
continua tensione verso il Cielo. Come accade un po’ per tutti i santi.
Ancora una volta i sapienti del mondo vengono confusi nella propria boria di
presunta conoscenza, di presunta sapienza, di presunta ricchezza.
Una semplice donna, madre
e sposa; figlia ubbidiente della Chiesa e umile nell’amare la volontà di Dio,
viene rivestita di quella grazia che stordisce i grandi del mondo. E perché
mai? In virtù della piena donazione di se stessa all’amore di Dio. Quella
stessa donazione di cui siamo capaci tutti, che ciascuno di noi è in grado
fare. Sarà senz’altro una banalità, ma pare bene ribadirla se tante anime
ancora faticano a concepire la propria dignità e la propria grandezza: la
santità è per tutti. Vocazione universale delle anime che bramano fare una
scelta verso il Bene e che forse ancora non chiamano con il suo vero nome:
Gesù, “Dio salva”. Anime che invece sono continuamente cercate, amate,
ardentemente desiderate! Non importa chi si è, dove ci si trova, di quali mezzi
terreni si dispone. Se di pochi beni materiali. Di pochi beni intellettivi. Di
pochi beni spirituali. L’amore di Dio è vivo e vigile. E noi non abbiamo
bisogno di tutte queste cose per amarLo. Come non ne ebbe bisogno la beata Anna
Maria. Il nostro tutto, anche se poco o quasi nulla, consegnato a Dio con
costante generosità spalanca quell’abisso di grazie e miracoli che sono la
gloria di Dio in terra. Per noi è gloria, invece, la fedeltà di un “mio Dio ti
amo” che si rinnova in spirito ed in opere tutti i giorni. Con tutto se stessi.
SOURCE : https://www.fcim.it/sussidi-e-riflessioni/beata-anna-maria-taigi-1641
TAIGI, Anna Maria, beata
Enciclopedia Italiana (1937)
Nata in Siena il 29 maggio 1769 di povera condizione, fu condotta giovane a
Roma; ivi, a 20 anni, sposò Domenico Taigi (in realtà Taeggi), facchino di
dispensa della nobile famiglia Chigi, e con lui convisse fino alla morte,
facendolo padre di 7 figli. Trascorse la vita nella cura assidua delle facende
domestiche e della numerosa prole. Morì il 9 giugno 1839. Come terziaria
dell'ordine trinitario il suo corpo fu traslato nella basilica di San Crisogono
nel Trastevere, e quei padri ne curarono la causa di beatificazione. Come
visione caratteristica della sua vita mistica si ricorda dai biografi quella di
un sole coronato di spine, nel cui centro troneggiava la figura muliebre della
Sapienza divina.
Bibl.: T. Barbetti, Breve
compendio della vita della beata A. M. Taigi, Roma 1920.
SOURCE : https://www.treccani.it/enciclopedia/taigi-anna-maria-beata_%28Enciclopedia-Italiana%29/
Voir aussi : http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/Mariataigi/anna_maria_taigi.htm