lundi 28 septembre 2015

Sainte EUSTOCHIUM JULIA, vierge


Francisco de Zurbarán. Sainte Paule, sa fille sainte Eustochium et saint Jérôme

Sainte Eustochium

Fille de sainte Paule (+ 418)

Comme sa mère, elle se fit religieuse sous la direction de saint Jérôme et toutes deux le suivirent en Orient. Elles se succédèrent à la tête du monastère de Bethléem où l'étude et la méditation de la Bible étaient particulièrement à l'honneur.

Un internaute nous écrit: "Sainte Eustochium s'est rendue à Béthléem et s'y établit. Elle fonda, avec sa mère, sainte Paula, quatre petits monastères contemplatifs sous la houlette spirituelle de st Jérôme dans les grottes toutes contigües à celle où naquit le Sauveur."

À Bethléem, commémoraison de sainte Eustochium, vierge, qui, avec sainte Paule sa mère, se rendit de Rome auprès de la crèche du Seigneur, pour ne pas manquer des conseils de leur maître spirituel, saint Jérôme, et c’est là que, vers 419, brillante de mérites éclatants, elle s’en alla vers le Seigneur.

Martyrologe romain

SOURCE : http://nominis.cef.fr/contenus/saint/1930/Sainte-Eustochium.html

Saint JÉRÔME, Lettre XXII, à EUSTOCHIUM

Julia Eustochium, fille cadette de Paul, menait la vie religieuse dans un appartement retiré du palais de sa mère. Jérôme l’exhorte à garder la virginité, lui en indique les moyens et réfute avec véhémence les objections qu’opposent à cette méthode de vie les païens et les chrétiens tièdes.

Cette lettre que Jérôme qualifie lui-même de libellus, avait-elle un sous-titre original ? De nombreux manuscrits anciens lui attribuent un : de virginitate, de virginibus, de virginitate servanda ; ce dernier titre fait penser au texte de Rufin (Apol. II, 5 ; PL XXI, 587) : libellum quemdam de conservanda virginitate.

En dehors de l’exorde (1-2) et de l’épilogue (41), il serait vain de chercher à discerner un plan rigoureux ; l’auteur lui-même s’excuse de digressions étendues. En réalité, les thèmes traités se succèdent sans lien bien logique, souvent en vertu d’une simple imbrication verbale. Voici les principaux : vigilance (3-5) ; garde des sens (6-8) ; sobriété et mortification (8-12) ; les Vierges légères ou coupable (13-15) ; critique des mondaines (16) ; le recueillement de la cellule (17-18) ; mariage et virginité (19-24) ; contemplation dans la cellule (25-26) ; fuir l’orgueil et la singularité (27) ; critique des moines et clercs mondains (28) ; comment traiter les autres religieuses (29) ; le Songe de saint Jérôme (30) ; guerre à la cupidité (31-33) ; description du monachisme égyptien (34-36) ; la prière (37) ; la vie mortifiée des moines et des vierges (38-40) recevra sa récompense (41). 

La lettre à Eustochium date probablement du printemps 384.

Vous trouverez ci-dessous la traduction de la lettre donnée par la collection des Belles Lettres. Vous pouvez également télécharger l’édition bilingue de la lettre à Eustochium.

Lettre XXII : À Eustochium

1. « Écoute, ma fille, regarde, prête l’oreille, oublie ton peuple et la maison de ton père, car le roi convoitera ta beauté. » (Ps 44, 11-12) Au psaume 44, Dieu parle de l’âme humaine et l’invite, à l’exemple d’Abraham qui sort de son pays et de sa parenté, à abandonner les Chaldéens (qu’on traduit par : quasi-démons) pour habiter dans la région des vivants après laquelle ailleurs soupire le prophète quand il dit : « Je crois voir les biens du Seigneur dans la terre des vivants. » (Ps 26, 13) Mais il ne te suffit pas de quitter ta patrie, si tu n’oublies pas ton peuple et la maison de ton père, si, méprisant la chair, tu ne te joins aux embrassements de l’époux. « Ne regarde pas en arrière, dit-il, et ne t’arrête pas dans tout le pays voisin ; sauve-toi dans la montagne, de peur d’être prise. » (Gn 19, 17) Quand on saisi la charrue, il ne convient pas de regarder en arrière, ni de revenir du champ à la maison, ni, après avoir revêtu la tunique du Christ, de descendre du toit pour prendre un autre vêtement. Grande merveille ! un père exhorte sa fille : ’Ne te souviens pas de ton Père !’ « Vous autres, vous avez le diable pour père et vous voulez accomplir les désirs de votre père » (Jn 8, 44), est-il dit aux Juifs, et ailleurs : « Qui commet le péché vient du diable. » (1 Jn 3, 8) Engendrés d’abord d’un tel père, nous sommes noirs ; devenus pénitents, mais n’ayant pas encore gravi le faîte de la vertu, nous disons : « Je suis noire, mais belle, fille de Jérusalem ! » (Cant 1, 5). 

— Je suis sortie de la maison de mon enfance, j’ai oublié mon père, je renais dans le Christ ; quelle récompense vais-je recevoir ? Voici la suite : « et le roi convoitera ta beauté » (Ps 44, 12). Voilà donc ce grand mystère : « Pour cela l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à son épouse ; ils seront deux en une chair ? » (Gn 2, 24) non, pas comme dans ce texte : en une chair, mais en un esprit. Ton époux n’est ni arrogant ni orgueilleux : c’est une Éthiopienne qu’il prend pour épouse ! Dès que tu voudras écouter la sagesse du véritable Salomon et t’approcher de lui, il te racontera tout ce qu’il sait ; puis le roi t’introduira dans sa chambre et ta couleur changera comme par miracle ; alors te conviendra cette parole : « Quelle est celle-ci, qui monte, toute blanche ? » (Cant 8, 5).

2. Tout cela, je l’ai dit, ma dame Eustochium — car c’est dame que je dois appeler l’épouse de mon Seigneur — pour que dès le début de la lecture tu te rendes compte que, pour le moment, je ne me propose pas de chanter les louanges de la virginité ; tu connais parfaitement cet état, puisque tu l’as embrassé. Je n’énumérerai donc pas les tracas du mariage : le sein se gonfle, l’enfant vagit, la domesticité agace, le souci du ménage importune ; puis, tous ces bonheurs qu’on a imaginés, la mort, enfin, les fauche. Non, car les femmes mariées ont aussi leur rang dans l’Église, quand le mariage est honorable et le lit sans tache. Mais, puisque tu quittes Sodome, comprends que tu as à craindre le sort de la femme de Loth. Dans ce petit ouvrage, il n’y aura point de flatterie — le flatteur n’est qu’un ennemi doucereux — point de rhétorique ni de phrases pompeuses pour te situer par avance parmi les anges, exposer les béatitudes de la virginité, enfin placer le monde entier sous tes pieds.

3. De ton dessein, ce n’est pas de l’orgueil que tu dois ressentir, mais de la crainte. Tu t’avances chargée d’or : crains le voleur ! C’est un stade que cette vie pour nous autres mortels : ici nous luttons, pour être couronnés ailleurs. Nul ne chemine tranquille parmi les serpents et scorpions. Le Seigneur a dit : « Au ciel mon glaive s’est enivré » (Is 34, 5), et tu croirais avoir la paix sur une terre qui engendre des ronces et des épines, de quoi se repaît le serpent ? « Notre lutte n’est pas contre la chair et le sang, mais contre les principautés et puissances de ce monde et des ténèbres présentent, contre les esprits mauvais dans les régions célestes. » (Éph 6, 12) De gros bataillons d’ennemis nous environnent ; tout est plein d’êtres hostiles. Une chair pourtant fragile et qui bientôt deviendra cendre doit combattre seule contre plusieurs adversaires [1]. Mais à l’heure où elle se dissoudra, quand se présentera le prince de ce monde, mais sans pouvoir pour y trouver rien qui relève de lui, alors te rassurera la parole du prophète : « tu ne craindras pas les terreurs nocturnes, ni la flèche qui vole de jour, ni le danger qui rôde dans les ténèbres, ni l’attaque du démon de midi. À ton côté mille tomberont, et dix mille à ta droite, mais il n’approchera pas de toi. » (Ps 90, 5-7) Si la multitude des ennemis te trouble, si tu te prends à brûler de quelque excitation vicieuse, si ta conscience te suggère : ’Qu’allons-nous pouvoir faire ?’, Élisée répondra : « Ne crains pas, plus nombreux sont nos auxiliaires que les leurs. » (2 R 6, 15-17) Il dira dans sa prière : ’Seigneur, ouvre les yeux de ta fille, et qu’elle voie !’ Tes yeux s’ouvriront, tu verras un char de feu qui, à l’exemple d’Élie, doit t’enlever au-dessus des astres, et alors tu chanteras joyeusement : « Notre âme, telle un passereau, a été arrachée au lacet des chasseurs ; le lacet a été brisé et nous avons été délivrés ! » (Ps 123, 7)

4. Tant que ce pauvre corps fragile nous enveloppe, tant que nous « possédons ce trésor dans des vases de terre » (2 Co 4, 7), l’esprit convoite contre la chair et la chair contre l’esprit : nulle victoire n’est certaine. Notre ennemi le diable « rôde, tel un lion rugissant qui cherche une proie à dévorer [2] ». « Tu as établi les ténèbres, ô Dieu ! dit David, et la nuit s’est faite ; toutes les bêtes sauvages la parcourent, les lionceaux rugissent ; ils cherchent une proie pour se procurer la nourriture que Dieu leur ménage. » (Ps 103, 20-21) Ceux que cherche le diable, ce ne sont pas les infidèles, ceux du dehors, dont le roi d’Assyrie fait bouillir les chairs dans sa marmite [3], c’est du sein de l’Église du Christ qu’il a hâte de ravir ses victimes. Selon Habacuc, ses viandes sont de choix : il souhaite renverser Job, il dévore Judas et ensuite sollicite le pouvoir de « cribler les apôtres [4] ». Le Sauveur n’est pas venu apporter sur la terre la paix, mais le glaive. Lucifer qui se levait dès le matin est tombé ; celui qui avait été nourri dans le jardin de délices [5] mérita d’entendre : « Si tu t’envolais aussi haut que l’aigle, j’irais t’en faire tomber » (Abd 4), dit le Seigneur, car il avait dit dans son cœur : « Au-dessus des astres du ciel, je placerai mon trône, et je serai semblable au Très-Haut. » (Is 14, 13-14) Aussi Dieu adresse-t-il chaque jour ces paroles à ceux qui descendent l’échelle du songe de Jacob : « J’ai dit : vous êtes tous dieux et fils du Très-Haut. Cependant, vous mourrez comme des hommes et vous tomberez comme l’un des princes. » (Ps 81, 6-7) En effet, le diable est tombé le premier, et, lorsque Dieu se dresse dans l’assemblée des dieux et jugement publiquement les dieux, l’apôtre écrit à ceux qui cessent d’être des dieux : « Quand il y a parmi vous des dissensions et des jalousies, n’êtes-vous pas de simples hommes, ne marchez-vous pas selon l’homme [6] ? » (1 Co 3, 3)

5. Si Paul, l’Apôtre — vase de choix préparé en vue de l’évangile du Christ, à cause des aiguillons de la chair et des poussées du vice réprime son corps et le réduit en servitude, pour éviter que lui qui prêche aux autres soit, pour sa part, réprouvé [7], mais, malgré ses efforts, remarque en ses membres une autre loi qui répugne à la loi de son esprit et le subjugue sous la loi du péché — si (dis-je), après avoir souffert nudité, jeûnes, faim, prison, fouets, supplices, lorsqu’il fait retour sur lui-même, Paul en vient à s’écrier : « Malheureux homme que je suis, qui me libérera de cette mort ? » (Ro 7, 24), toi tu crois devoir être en sécurité ? Attention, je te prie ; que jamais Dieu ne dise de toi : « la vierge d’Israël est tombée ; il n’y a personne pour la relever ! » (Am 5, 2) Je vais m’exprimer avec audace : Dieu qui peut tout ne peut pas relever une vierge après sa ruine. Il peut bien la délivrer de la peine due à son péché, il ne peut pas la couronner, puisqu’elle a été déflorée. Craignons que ne s’accomplisse aussi à notre sujet cette prophétie : « même les vierges vertueuses défailliront » (Am 8, 13), car il y a aussi des vierges coupables : « Qui regarde, dit Jésus, une femme pour la convoiter, l’a déjà violée dans son cœur » (Mt 5, 28) ; donc la virginité peut se perdre aussi par la simple pensée. Ce sont là des vierges coupables — vierges charnellement, non spirituellement — vierges folles qui, n’ayant pas d’huile, sont exclues par l’époux du banquet nuptial [8].

6. Mais si ces vierges-là sont aussi des vierges — bien qu’à cause de leurs autres fautes la virginité de leurs corps ne suffise pas à les sauver —, qu’adviendra-t-il de celles qui ont prostitué les membres du Christ et changé le temple du Saint-Esprit en lupanar [9] ? Elles entendront aussitôt : « Descends, assieds-toi par terre, vierge, fille de Babylone ; assieds-toi par terre ; point de trône pour la fille des Chaldéens ! On ne t’appellera plus désormais molle et délicate. Prends la meule, mouds la farine, écarte ton voile, dénude tes jambes pour passer les torrents ; alors sera dévoilée ton ignominie et apparaîtra ton opprobre… » (Is 47, 1-3), et cela après avoir partagé les noces du Fils de Dieu, après les baisers du cousin [10] et de l’époux ! C’est pourtant celle dont jadis l’oracle prophétique chantait : « La reine est assise à ta droite dans une robe dorée, entourée de broderies. » (Ps 44, 10) Elle sera dénudée et l’on verra ses parties honteuses ; elle s’assiéra près des eaux du désert et, dans une posture indécente, elle s’abandonnera à tous les passants, qui la souilleront des pieds jusqu’au chef [11].

Il eût mieux valu subir le mariage avec un homme, cheminer dans la plaine, plutôt que d’aspirer aux sommets et de choir au fond du gouffre ! Je t’en prie, qu’elle ne devienne pas une cité courtisane, la fidèle Sion ; qu’après qu’elle aura été l’asile de la Trinité, les démons n’y dansent pas ni les sirènes, que les hérissons n’y fassent pas leur nid ! Que sa guimpe pectorale ne se délace pas, mais dès que l’instinct chatouille les sens, dès que le doux incendie de la volupté nous pénètre de son agréable chaleur, écrions-nous aussitôt : « Le Seigneur est mon auxiliaire, je ne craindrai pas ce que peut me faire la chair ! » (Ps 97, 6) Que si l’homme intérieur se met à vaciller un peu entre le vice et la vertu, tu diras  : « Pourquoi es-tu triste, ô mon âme, et pourquoi me troubles-tu ? Espère dans le Seigneur ! Oui, je le glorifierai, car il est le sauveur de ma face ; il est mon Dieu. » (Ps 41, 6-7) Je ne voudrais pas que tu laisses la mauvaise pensée progresser ; que rien ne germe en toi de Babylonien, c’est-à-dire de trouble ; pendant que l’ennemi est encore petit, tue-le ! Que la malice soit écrasée dans le germe même. Écoute parler le psalmiste : « Fille de Babylone, misérable, heureux qui t’infligera le châtiment que tu mérites ; heureux qui saisira tes petits pour les écraser contre le rocher ! » (Ps 136, 8-9) Il est impossible que les sens de l’homme ne soient pas envahis de cette chaleur des moelles [12] que chacun connaît. Mais celui-là est digne de louanges, celui-là est appelé bienheureux qui, à peine nées les mauvaises pensées, les tue et les écrase contre le rocher ; or, ce rocher, c’est le Christ.

7. Oh ! Combien de fois, moi, qui étais installé dans le désert, dans cette vaste solitude torréfiée d’un soleil ardent [13], affreux habitat offert aux moines, je me suis cru mêlé aux plaisirs de Rome ! J’étais assis, solitaire, car l’amertume m’avait envahi tout entier. Mes membres déformés se hérissaient d’un sac. Malpropre, ma peau rappelait l’aspect minable de l’épiderme d’un nègre. Chaque jour pleurer, chaque jour gémir ! Toutes les fois que, malgré mes résistances, le sommeil m’accablait soudain, mes os, presque désarticulés, se brisaient sur le sol nu. De la nourriture et de la boisson, je ne dis rien : les malades eux-mêmes n’usent que d’eau froide ; accepter un plat chaud, c’est un excès. Or, donc, moi, oui, moi-même, qui, par crainte de la géhenne, m’étais personnellement infligé une si dure prison, sans autre société que les scorpions et les bêtes sauvages, souvent je croyais assister aux danses des jeunes filles. Les jeûnes avaient pâli mon visage, mais les désirs enflammaient mon esprit, le corps restant glacé ; devant ce pauvre homme, déjà moins chair vivante que cadavre, seuls bouillonnaient les incendies des voluptés !

Privé de toute aide, je gisais donc aux pieds de Jésus, je les arrosais de mes larmes, je les essuyais de mes cheveux ; ma chair rebelle, je la domptais par une abstinence de plusieurs semaines. Je ne rougis pas de mon infortune ; bien plutôt, je déplore de n’être plus ce que j’étais alors [14]. Il m’en souvient : fréquemment, mes cris joignaient le jour à la nuit, et je ne cessais de me frapper la poitrine que quand les menaces du Maître avaient ramené le calme [15]. Ma cellule elle-même, j’en venais à la redouter, comme si elle était complice de mes pensées impures. Irrité contre moi, dur à moi-même, j’allais seul plus avant dans le désert. Une vallée profonde, une âpre montagne, des rochers abrupts étaient-ils en vue, j’y installais ma prière et l’ergastule de ma misérable chair. Le Seigneur même m’en est témoin : après avoir beaucoup pleuré et fixé mes regards au ciel, il me semblait parfois être mêlé aux cohortes des anges ; alors, plein de joie et d’allégresse, je chantais : « Après toi nous courons, à l’odeur de tes parfums ! » (Cant 1, 3).

8. Si telles sont les épreuves que supportent ceux-là même dont le corps est tout décharné et n’ont donc à soutenir que l’assaut des pensées, que peut bien éprouver une jeune fille qui vit dans les délices ? Voici son cas, d’après l’Apôtre : « Vivante, elle est morte ! » (1 Tim 5, 6) Si je suis à même de donner un conseil, si l’on fait crédit à mon expérience, voici mon premier avis, ou plutôt ma supplication : que l’épouse du Christ fuie le vin comme du poison ! Telle est, contre la jeunesse, la première arme des démons. Moindre est le choc de l’avarice, l’enflure de l’orgueil, le charme de l’ambition. Nous nous passons plus aisément d’autres vices ; dans le cas présent, l’adversaire est enfermé à l’intérieur de la place ; où que nous allions, nous portons avec nous notre ennemi. Vin et jeunesse : double fournaise de volupté. Pourquoi jeter de l’huile sur le feu ? Pourquoi à ce jeune corps ardent fournir l’aliment de ses flammes ? Paul à Timothée : « Ne bois plus désormais d’eau pure, mais use d’un peu de vin à cause de ton estomac et de tes indispositions répétées. » (1 Tim 5, 23) Vois de quels motifs dépend la permission de boire du vin : c’est à peine si la justifient les maux d’estomac et les indispositions répétées, et, pour nous empêcher de nous dorloter à l’occasion des maladies, il ordonne de n’en prendre qu’un peu. C’est un conseil de médecin plutôt que d’apôtre — bien que l’apôtre soit aussi un médecin spirituel —, dans la crainte que Timothée, vaincu par la faiblesse physique, ne puisse pas continuer ses tournées de prédication évangélique [16]. Sinon, il se serait souvenu d’avoir dit : « Le vin, en qui réside la luxure » (Éph 5, 18), et  : « Il vaut mieux pour l’homme de ne pas boire de vin, de ne pas manger de viande ! » (Ex 32, 6)

Noé a bu du vin et s’est enivré, le monde étant encore fruste [17] ; car il avait été le premier à planter la vigne et peut-être ignorait-il que le vin enivrât. Et, pour que tu comprennes complètement le mystère de l’Écriture — car la parole de Dieu est une perle qu’on peut percer de part en part —, après l’ébriété survint la nudité des cuisses : volupté jointe à l’excès de bouche. D’abord le ventre, et aussitôt le reste : « Le peuple mangea et but, puis ils se levèrent pour se livrer à la débauche. »

Loth, l’ami de Dieu, sauvé dans la montagne [18] et trouvé seul juste parmi des milliers de gens, est enivré par ses filles ; elles pensaient, il est vrai, que la race humaine avait péri, et, ce faisant, elles recherchaient plutôt les enfants que la volupté. Cependant, elles savaient bien que cet homme juste ne l’aurait pas fait, s’il n’eût été ivre. Ensuite, il ne savait plus ce qu’il faisait. (Ainsi la volonté ne saurait être incriminée, et il y a plutôt erreur que faute.) Pourtant, de ce commerce naissent Moabites et Ammonites, ennemis d’Israël, qui, jusqu’à la quatorzième génération, c’est-à-dire à jamais, ne peuvent entrer dans l’église de Dieu.

9. Élie, fuyant Jézabel, se couche, fatigué, sous un chêne ; un ange vient à lui, l’éveille « et lui dit : ’Debout ! mange !’ Il regarda, et il y avait près de sa tête un pain d’épeautre [19] et un vase d’eau. » (1 R 19, 5-6) En vérité, Dieu n’aurait-il pas pu lui envoyer du vin pur aromatisé, des plats cuits à l’huile et de la face de viande pilée ? Élisée invite à déjeuner les fils des prophètes ; c’est pendant qu’il les nourrissait de légumes sauvages qu’il entend les convives s’écrier de concert : « La mort est dans la marmite, homme de Dieu ! (2 R 4, 40)  » Sans s’indigner contre les cuisiniers — car il n’avait pas l’habitude d’une table soignée —, il y jeta de la farine pour en adoucir l’amertume, par la même vertu spirituelle dont Moïse usa pour changer Merra [20] en eau douce. Une autre fois, quand il eut amené, à leur insu, à Samarie les soldats venus pour se saisir de lui, après avoir aveuglé tout ensemble leurs yeux et leur esprit, quels mets commanda-t-il pour leur réfection ? Écoute : « Place devant eux du pain et de l’eau ! Qu’ils mangent et boivent ; puis qu’on les renvoie à leur maître ! » (2 R 6, 22) À Daniel aussi, on aurait pu dresser une table opulente avec les mets royaux ; mais c’est le repas des moissonneurs que lui porte Habacuc ; il était, je pense, fort rustique [21] ! Et on l’a appelé ’l’homme de désirs’, parce qu’il n’a ni mangé le pain du désir, ni bu le vin de la concupiscence.

10. Innombrables sont les textes parsemés dans les divines Écritures, qui condamnent la gourmandise et mettent en lumière la simplicité dans la nourriture ; mais mon but présent n’est pas de disserter du jeûne. Un traité complet exigerait un titre et un volume à part. Contentons-nous de ces quelques considérations entre mille. Tu pourras du reste te composer un recueil personnel d’après les échantillons que voici : comment, du paradis, le premier homme lui-même, pour avoir obéi à son ventre plutôt qu’à Dieu, fut expulsé vers cette vallée de larmes ; c’est par la faim que Satan, au désert, a tenté le Seigneur lui-même ; l’Apôtre s’écrire : « La nourriture est pour le ventre, et le ventre pour la nourriture, mais Dieu détruira l’un et l’autre » (1 Co 6, 13), et au sujet des luxurieux : « Leur dieu, c’est le ventre » (Phi 3, 19) ; chacun, en effet, adore ce qu’il aime. Il s’ensuit ce conseil pressant : ceux que la gloutonnerie a chassés du paradis, que la faim les y ramène !

11. Que si tu veux répondre qu’issue de noble race, toujours dans les délices, toujours dans le duvet, tu ne peux ni te passer de vin ou de plats nourrissants, ni vivre très chichement d’après cette loi que je t’expose, je te rétorquerai : « Vis donc sous ta propre loi, toi qui ne peux vivre sous celle de Dieu ! » Ce n’est pas que Dieu, créateur et maître de l’univers, trouve plaisir aux rugissements de nos intestins, au vide de l’estomac, à la brûlure des poumons. Mais c’est qu’autrement la pureté ne saurait être en sécurité. Job, cher à Dieu et d’après son propre témoignage, immaculé et simple, écoute de quoi il soupçonne le diable : « Sa force est dans les reins et sa puissance dans le nombril. » (Jb 40, 11) C’est une manière honnête de désigner par des euphémismes les parties génitales de l’homme et de la femme. Exemples : on promet qu’un personnage sorti des reins de David s’asseoira sur son trône ; soixante-quinze âmes entrèrent en Égypte, qui étaient issues de la cuisse de Jacob ; le même, après sa lutte avec Dieu [22], lorsque l’épaisseur de sa hanche se fut desséchées, cessa de procréer des enfants ; celui qui doit célébrer la fête de Pâques a l’ordre de le faire les reins ceints et mortifiés ; Dieu dit à Job : « Ceins tes reins comme un homme » (Jb 38, 3) ; Jean est ceint d’une ceinture de peau ; les apôtres ont l’ordre de ceindre leurs reins et de tenir en leurs mains les flambeaux de l’Évangile ; quant à Jérusalem, qui, couverte de sang, se trouve dans la plaine de l’erreur, il lui est dit, en Ézéchiel : « Ton nombril n’a pas été réséqué. » (Éz 16, 4) Oui, contre les hommes, toute la vertu du diable est dans leurs reins ; c’est dans leur nombril qu’est toute la force contre les femmes.

12. Veux-tu savoir s’il en est bien ainsi ? Voici des exemples. Samson, plus fort que le lion, plus dur que le rocher, qui, seul et nu, avait poursuivi mille hommes armés, mollit parmi les baisers de Dalila ; David, l’élu selon le cœur du Seigneur, avait souvent de sa sainte bouche chanté le Christ à venir ; mais, après que, se promenant sur le toit de sa maison, il eut été séduit par la nudité de Bethsabée, à l’adultère il joignit l’homicide (à ce propos, une brève remarque : aucun regard n’est absolument sûr, même quand on est chez soi). Aussi s’adresse-t-il à Dieu comme pénitent, en ces termes : « Contre toi seul j’ai péché, et j’ai fait le mal devant toi » (Ps 50, 6) ; (comme roi, en effet, il n’avait personne d’autre à craindre). Salomon, par qui la Sagesse elle-même s’est changée, Salomon, qui « a traité » de tout, « depuis le cèdre du Liban jusqu’à l’hysope qui sort de la muraille » (1 R 4, 33), s’est éloigné du Seigneur pour avoir trop aimé les femmes. Que nul ne se rassure sur la consanguinité la plus proche : Amnon, son frère, brûla d’une flamme illégitime pour Thamar, sa sœur !

13. On a regret de le dire : que de vierges tombent tous les jours, combien l’Église notre mère en perd-elle, échappées de son giron ! Sur combien d’astres l’orgueilleux ennemi n’asseoit-il pas son trône ! Que de rochers il parvient à miner, aux failles desquelles habitera le Serpent ! On peut en voir beaucoup, veuves avant que mariées, dont la misérable conscience n’est protégée que par le mensonge du vêtement : à moins que ne les trahisse le gonflement du sein ou le vagissement des enfants, elles marchent la tête haute et les pieds frétillants. D’autres dégustent d’avance les commodités de la stérilité ; elles tuent un être humain avant qu’il ne soit procréé. Plusieurs, quand elle s’aperçoivent qu’elles ont conçu dans le crime, songent aux poisons qui font avorter. Souvent elles en meurent aussi de même coup. Alors, coupables d’un triple crime, elles sont traînées aux enfers : suicidées, adultères du Christ, parricides d’un enfant non encore né.

Ce sont celles-là qui ont coutume de dire : « tout est pur pour les purs ! » (Tit 1, 1) ma conscience me suffit. C’est un cœur pur que désire Dieu, pourquoi me priver de nourritures que Dieu a créées pour qu’on en use ?’ Si elles se mettent en frais de charme et de gaieté, elles se gorgent de vin pur, puis joignant à l’ébriété le sacrilège, elles s’exclament : ’Bien sûr que non, je ne m’abstiendrai pas du sang du Christ [23] !’ Voient-elles une compagne sérieuse et un peu pâlie, elles la traitent de malheureuse, de moinesse, de manichéenne et le reste. Dans une telle méthode de vie, le jeûne devient une hérésie ! Les mêmes circulent dans la foule en se faisant remarquer. Par leurs furtives œillades, elles entraînent derrière elles un troupeau de jeunes gens. À elles s’adresse toujours l’anathème du prophète : « Tu t’es composé un visage de courtisane, tu es une impudique ! » (Jr 3, 3) La pourpre n’apparaît que sur ta robe, et en touche légère ; mais, trop lâche, leur bandeau de tête laisse retomber les cheveux ; le brodequin est assez grossier, mais sur leurs épaules voltige l’écharpe ; étroites sont les manches et moulées aux bras, mais le rythme incertain des genoux rend langoureuse la démarche. Voilà, estiment-elles, le tout de la virginité. Que ces pécores trouvent qui les louent ! Que leur profession de vierges leur soit une plus lucrative perdition ! C’est volontiers qu’à de telles femmes nous renonçons à plaire !

14. On a honte d’en parler, car c’est chose triste, hélas ! mais véritable. D’où s’est introduit dans les églises le fléau des « agapètes » ? N’est-ce pas, sans le mariage, un synonyme d’épouses ? Ou plutôt : d’où vient cette nouvelle espèce de concubines ? J’irai plus loin : d’où viennent ces courtisanes monogames ? Une seule maison, une seule chambre, souvent un seul lit les rassemble, et l’on nous qualifie de soupçonneux si nous songeons à certaines choses ? Un frère quitte sa soeur vierge, une vierge délaisse son frère qui garde le célibat ; l’un et l’autre, feignant de partager la même profession religieuse, cherchent avec des étrangers une consolation soi-disant spirituelle pour se procurer à domicile le commerce charnel ! Ces gens-là, Dieu les réprouve dans les Proverbes de Salomon, quand il dit : « Quelqu’un attache à son sein un charbon allumé et ses vêtements ne seraient pas brûlés ? Il marcherait sur des charbons ardents et ses pieds ne grilleraient pas ? » (Pr 6, 27-28)

15. Maintenant que nous avons sifflé et mis au ban de la société chrétienne ces jeunes filles qui veulent non pas être des vierges, mais le paraître, tout mon discours ne s’adressera plus désormais qu’à toi. C’est toi qui, la première dans la ville de Rome, as, parmi les nobles, inauguré la classe des Vierges.Raison de plus pour faire davantage d’efforts, de peur qu’après t’être privée des biens présents, tu ne sois privée aussi des biens à venir. Les tracas du mariage et les incertitudes d’un ménage, un exemple domestique t’en a instruite. Ta soeur Blésilla, ton aînée par l’âge, mais ta cadette dans la profession religieuse, au bout de sept mois de mariage est devenue veuve. O condition humaine vouée au malheur et ignorante de l’avenir ! Elle a donc perdu et la couronne de la virginité et la volupté du mariage. Elle observe, bien entendu, le second degré de la chasteté. Mais n’imagines-tu pas quelles croix elle supporte par moments, alors que chaque jour elle admire en sa soeur ce qu’elle a perdu, alors que, si difficile qu’il soit de se passer de la volupté jadis goûtée, elle ne saurait attendre de sa continence qu’une récompense moindre ? Qu’elle soit pourtant confiante ! Qu’elle soit joyeuse ! Le fruit cent fois multiplié ou celui qui l’est soixante fois seulement proviennent d’une même semence : la chasteté.

16. Ne va pas dans les réunions de matrones, ne visite pas les demeures des nobles ; je n’aimerais pas que tu fréquentes beaucoup un milieu que tu as méprisé pour te faire Vierge. Ces braves dames ont coutume de se vanter de ce que leurs maris sont juges ou titulaires de quelque dignité ; l’affluence des visiteuses se bouscule chez la femme de l’empereur, pourquoi ferais-tu, toi, injure à ton Époux ? Pourquoi te précipiter chez la femme d’un homme, toi qui est l’épouse de Dieu ? Sur ce chapitre, apprends un saint orgueil, sache-toi meilleure qu’elles toutes. Je souhaiterais que tu n’évites pas seulement de rencontrer celles qui sont toutes gonflées des honneurs de leur mari, qu’entourent des troupeaux d’eunuques ou qui sont vêtues d’étoffes tissées d’or ou d’argent ; fuis également celles qui ne sont veuves que par contrainte. Bien sûr, elles n’avaient pas à souhaiter la mort de leur mari, mais elles auraient dû saisir avec joie l’occasion qui leur était offerte d’observer la continence. Au contraire, si leur vêtement a changé, leur faste d’autrefois n’a pas changé. Un bataillon d’eunuques précède leur litière profonde, leurs joues sont carminées, leur peau est tendue par l’apprêt ; on dirait non pas qu’elles ont perdu leur mari, mais qu’elles en cherchent un. Leur maison est pleine d’adulateurs, pleine de convives. Des clercs mêmes, à qui devrait revenir le rôle d’un magistère redouté, viennent, baisent le front de leurs patronnes. Ils étendent la main pour bénir, croirait-on, si l’on ne savait pas que c’est pour recevoir le salaire de leur visite. Cependant, ces femmes, qui s’aperçoivent que les prêtres ont besoin de leur aide, en sont bouffies d’orgueil. Et parce qu’à la domination d’un mari qu’elles ont naguère expérimentée, elles préfèrent la liberté du veuvage, on les appelle « chastes » et « nonnes » ; or, au sortir d’un repas copieux, elles voient en rêve, leurs apôtres !

17. Tes compagnes, ce seront celles que tu vois amaigries par le jeûne et le visage pâle ; celle que leur âge et leur vie a éprouvées, celles qui, chaque jour, chantent dans leur cœur : « Où conduis-tu ton troupeau ? ou reposes-tu à midi ? » (Cant 1, 6) et qui disent amoureusement : « Je désire mourir pour être avec le Christ. » (Phil 1, 23) Sois soumise à tes parents, imite ton époux [24]. Sors rarement en public. Les martyrs, va les chercher dans ta chambre [25]. tu ne manquerais jamais de prétexte pour sortir, si tu devais sortir chaque fois que c’est nécessaire. Nourriture modérée, estomac jamais rempli. Plusieurs s’abstiennent de vin, qui s’enivrent d’une nourriture trop copieuse. Quand tu te lèves la nuit pour prier, que ce ne soit pas l’indigestion qui te fasse rote, mais l’inanition.

Lis assez souvent et étudie le plus possible. Que le sommeil te surprenne un livre à la main ; qu’en tombant, ton visage rencontre l’accueil d’une page sainte. Jeûne quotidien, repas qui évitera la plénitude. Inutile d’avoir l’estomac vide, après une abstinence de deux ou trois jours, s’il est d’un seul coup surchargé, si la satiété compense le jeûne. Aussitôt l’esprit serait engourdi par cette plénitude ; une terre trop arrosée voit germer les épines des passions. Tu sentiras parfois « l’homme extérieur » soupirer après le parfum de l’adolescence en fleur ; après le repas, dans le calme du lit, le doux cortège des désirs cherchera peut-être à t’émouvoir : saisis le bouclier de la foi où s’éteindront les flèches enflammées du diable : « Tous sont adultères, leur cœur est comme une fournaise. » (Os 7, 4) Pour toi, cheminant en compagnie du Christ et attentive à ses paroles, dis : « Notre cœur n’était-il pas ardent sur la route, tandis que Jésus nous expliquait les Écritures ? » (Lc 24, 32) Et encore : « Ta conversation est enflammée, et ton serviteur s’y complaît. » (Ps 118, 140) Il est difficile à l’âme humaine de ne pas aimer, et il faut bien que notre esprit soit attiré par certaines affections. L’amour charnel est vaincu par l’amour spirituel ; un désir est éteint par l’autre désir ; si l’un diminue, l’autre s’accroît d’autant. Bien plutôt, répète sans cesse : « Sur mon lit, pendant la nuit, j’ai cherché celui qu’a aimé mon âme ! » (Cant 3, 1) « Mortifiez, dit l’Apôtre, vos membres sur la terre. » (Col 3, 5) Aussi ajoutait-il lui-même avec confiance : « Je vis, mais ce n’est plus moi qui vis ; celui qui vit en moi, c’est le Christ. » (Ga 2, 20) Un homme qui avait mortifié ses membres et dont la conduite était symbolique n’a pas craint de dire : « Je suis devenu comme une outre gelée (Ps 118, 83)  », car toutes les humeurs de mon corps ont été comme desséchées par la cuisson. Et encore : « A force de jeûner, mes genoux ont perdu leur fermeté. » (Ps 108, 24) Ou bien : « J’ai négligé de manger mon pain ; ma voix a tant gémi que mes os collent à ma chair ! » (Ps 101, 5-6)

18. Sois la cigale des nuits [26] ! Chaque nuit lave ton lit de tes pleurs ; que tes larmes arrosent ta couche [27] ! Veille et sois comme le passereau au désert [28]. Chante par l’Esprit, chante aussi par l’entendement : « Bénis, ô mon âme, le Seigneur, et n’oublie pas tous ses bienfaits ; il pardonne toutes tes iniquités, il guérit toutes tes infirmités, il rachète ta vie de la corruption. » (Ps 102, 2-4) Qui de nous peut dire de tout cœur : « J’ai mangé de la cendre comme du pain, je mêlais mon breuvage de mes larmes ? » (Ps 101, 10) Ne faut-il pas pleurer, ne faut-il pas gémir quand de nouveau le serpent m’invite à une nourriture illicite ? quand, après m’avoir chassé du paradis de la virginité il prétend me vêtir de ces tuniques de poil de bêtes qu’Élie, pendant son retour au paradis, jeta sur la terre ? Quoi de commun entre moi et la volupté, qui périt si vite ? Qu’ai-je à faire avec ce chant des sirènes, charmant mais mortel ? Je ne veux pas être soumis à cette sentence de condamnation qui fut portée contre l’humanité : « C’est dans les souffrances et les angoisses que tu enfanteras, ô femme (cette loi n’est pas mienne), et tu te tourneras vers l’homme. » (Gn 3, 16) Qu’elle se tourne vers un mari, celle qui a épousé le Christ, mais à la fin « tu mourras de mort » (Gn 2, 17) terminera ce mariage : ma règle de vie ne considère pas le sexe. Que le mariage ait son opportunité et sa dignité, j’y consens ; pour moi, la virginité est consacrée, dans la personne de Marie et dans celle du Christ !

19. Mais, dira-t-on, ’tu oses dénigrer le mariage, qui a été béni par le Seigneur’ ? Ce n’est pas dénigrer le mariage que de lui préférer la virginité ; nul ne saurait comparer un mal avec un bien. Que les femmes mariées soient fières de prendre rang aussitôt après les vierges. « Croissez, a dit Dieu, multipliez-vous, remplissez la terre ! » Qu’il croisse et se multiplie, celui qui doit remplir la terre : ton armée à toi est aux cieux. « Croissez et multipliez-vous » ; par le mariage trouve son accomplissement la loi portée après l’expulsion du Paradis, après la nudité et les feuilles de figuier qui préludèrent à la lascivité des noces. Qu’il épouse et soit épousé celui qui mange son pain à la sueur de son visage, pour qui la terre engendre ronces et buissons et dont l’herbe est étouffée par les épines. Ma graine à moi porte fruit au centuple ; telle est sa fécondité. « Tous ne comprennent pas la parole de Dieu, mais ceux à qui en est donnée la grâce. » (Mt 19, 11) Cet autre, c’est la contrainte qui le fera eunuque, moi c’est ma volonté. « Il y a un temps pour embrasser et un temps pour que les mains s’abstiennent d’embrasser, un temps pour lancer les pierres, un temps pour les ramasser. » (Eccl 3, 5) Après que, tirés de la dureté des gentils, ont été engendrés des fils d’Abraham, on a commencé à voir rouler des pierres saintes sur cette terre ; en effet, ils traversent les tourbillons de ce monde et roulent dans le char de Dieu de toute la vitesse de ses roues. Qu’ils se cousent des tuniques, ceux qui ont perdu cette tunique sans couture qui venait d’en-haut, ceux qui trouvent du charme au vagissement des enfants : à peine ceux-ci ont-ils vu le jour qu’ils pleurent comme pour déplorer d’être nés ! Ève au Paradis était vierge : après les tuniques de peau commença le mariage. Ton pays, c’est le Paradis. Garde-toi telle que tu es née et dit « retourne, ô mon âme, à ton repos ». (Ps 114, 7) Sache que la virginité, c’est l’état de nature, le mariage n’est venu qu’après le péché ; à la naissance, elle est vierge, cette chair qui procède du mariage ; elle recouvre dans son fruit ce qu’elle avait perdu dans sa racine. « Une branche sortira de la racine de Jessé et une fleur montera de cette racine. » (Is 11, 1) La branche, c’est la Mère du Seigneur, simple, pure ; aucun germe venu du dehors n’adhéra à son corps intact ; à l’image de Dieu [29], unique fut sa fécondité. La fleur de cette branche, c’est le Christ qui dit : « Je suis la fleur des champs et le lis des vallées. » (Cant 2, 1) En un autre endroit, on le compare à une pierre qui se détache de la montagne sans qu’on y ait mis les mains ; c’est une prophétie qui signifie que vierge il naîtra d’une vierge. Les mains, en effet, signifient parfois l’œuvre de chair, comme dans ce passage : « Sa main gauche est sous ma tête et sa droite m’étreindra. » (Cant 2, 6) À la détermination de ce sens concourent les remarques suivantes : les animaux que Noé introduit par paires dans l’arche sont impurs (le nombre impair est pur) ; Moïse et Josué, fils de Navé, reçoivent l’ordre de fouler pieds nus la terre sainte ; les disciples sont dépêchés pour prêcher l’Évangile sans surcharge de chaussures ou de tuniques de cuir ; les soldats, après s’être partagé au sort les vêtements de Jésus, n’ont pas eu de souliers à emporter, car le Seigneur ne possédait pas ce qu’il avait interdit à ses serviteurs.

20. Je loue les noces, je loue le mariage, mais parce qu’ils m’engendrent des vierges. Des épines je cueille les roses, de la terre son or, de la coquille sa perle. Celui qui laboure, labourera-t-il otut le jour ? Ne jouira-t-il pas aussi du fruit de son travail ? Le mariage est plus honoré quand l’être qui en naît est plus aimé. Mère, pourquoi en voudrais-tu à ta fille ? Nourrie de ton lait, sortie de tes entrailles, elle a grandi dans ton sein, c’est toi qui l’as gardée avec une pieuse sollicitude. Et tu t’irrites parce qu’elle veut être l’épouse non d’un soldat, mais du roi même ? Elle t’a apporté un grand avantage : tu es devenue la belle-mère de Dieu [30] !

« À propos des vierges, dit l’Apôtre, je n’ai pas de commandement du Seigneur. » (1 Co 7, 25) Pourquoi ? Parce que, si lui-même a été vierge, ce n’est pas par ordre, mais par libre choix. Ne prêtons pas l’oreille à ceux qui prétendent qu’il avait pris femme, puisque, lorsqu’il disserte de la continence et conseille la chasteté perpétuelle, il allègue son propre cas : « Je voudrais que tous fussent comme moi-même » (1 Co 7, 7), et plus bas : « Je dis aux célibataires et aux veufs : il est meilleur de rester ainsi, comme moi-même » (1 Co 7, 8), et dans un autre endroit : « N’avons-nous pas la faculté de promener avec nous des épouses comme les autres apôtres ? » (1 Co 9, 5) Pourquoi n’a-t-il pas de commandement du Seigneur au sujet de la virginité ? Parce que l’offrande a plus de prix si elle est faite sans contrainte ; parce que, si la virginité eût été commandée, le mariage eût semblé éliminé. Or, c’eût été une contrainte très dure et contre nature que d’imposer par violence aux hommes la vie des anges, et de condamner en quelque sorte le plan même de la création.

21. Autre était, dans l’ancienne Loi, la conception du bonheur. « Heureux qui possède semence en Sion et famille en Jérusalem » (Is 31, 9) ; maudite était la stérile qui n’enfantait pas ; « tes fils sont comme un surgeon d’olivier autour de la table » (Ps 127, 3) ; promesse de richesses ; enfin : « Il n’y aura pas d’infirme dans tes tribus. » (Ps 104, 36) À présent, il nous est dit : ’Ne t’imagine pas être du bois sec ; tu as une demeure éternelle au ciel au lieu de fils et de filles.’ À présent les pauvres sont bénis, Lazare est préféré au riche dans sa pourpre ; à présent, qui est infirme est plus robuste. Jadis, l’univers était vide et, pour ne rien dire des sens typiques, il n’y avait qu’une seule bénédiction : les enfants. Aussi Abraham, quoique déjà vieux, s’unit-il à Cétura ; Jacob se rachète pour des mandragores ; la belle Rachel, figure de l’Église, se plaint que sa matrice est fermée. Mais, peu à peu, la moisson grandissant, est envoyé le moissonneur. Élie est vierge, Élisée est vierge ; sont vierges aussi beaucoup de fils des prophètes. Il est dit à Jérémie : « Mais toi, ne prends pas femme » (Jr 16, 2) : sanctifié dans le sein de sa mère, et la captivité étant d’ailleurs proche, il lui est défendu de prendre femme. En d’autres termes, l’Apôtre dit la même chose : « Je pense donc que voici ce qui est bon, à cause de l’imminence de la détresse : il est bon à l’homme d’être ainsi. » (1 Co 7, 26) Quelle est cette détresse qui annulera les joies du mariage ? « Le temps est abrégé, il reste que ceux qui ont des épouses soient comme ceux qui n’en ont pas. » (1 Co 7, 29) Nabuchodonosor est tout près, « le lion s’est élancé de sa couche » (Jr 4, 7), à quoi bon me marier pour le service du plus orgueilleux des rois ? Pourquoi des enfants, que devra pleurer le prophète : « La langue du nourrisson s’attache à sa gorge, tant il a soif ; les petits ont demandé du pain et il n’y avait personne pour leur en rompre ? » (Lam 4, 4) 

Nous l’avons dit tout à l’heure : ce privilège de la continence ne se trouvait que parmi les hommes ; Ève enfantait continuellement dans la douleur. Mais depuis qu’une vierge a conçu dans son sein et nous a enfanté un fils, « dont le principat est marqué sur l’épaule » (Is 9, 6), Dieu fort, père du siècle à venir, cette malédiction a été annulée. La mort vint par Ève, la vie par Marie. Aussi le don de la virginité s’est-il plus libéralement répandu sur les femmes, parce qu’il a commencé par une femme. Dès que le Fils de Dieu est venu sur la terre, il se constitua une nouvelle famille, en sorte que Celui que des anges adoraient au ciel eût aussi des anges sur la terre.

Alors, Judith la chaste coupa la tête d’Holopherne [31] ; alors, Aman, dont le nom veut dire « iniquité », fut brûlé par le feu qu’il avait allumé [32] ; alors, Jacques et Jean, abandonnant père, filets et barque, suivirent le Sauveur, abandonnant du même coup l’amour de la famille, les liens du siècle et les soucis domestiques. Alors, on entendit pour la première fois : « Qui veut venir après moi, se renie soi-même, porte sa croix et me suive » (Mt 16, 24) ; or, nul soldat ne marche au combat avec son épouse ; au disciple qui veut assister aux funérailles de son père, la permission est refusée. « Les renards ont leurs tanières, les oiseaux du ciel leurs nids ; mais le Fils de l’Homme n’a pas où reposer sa tête » (Mt 8, 20) — ceci pour que tu ne t’attristes pas si ta cellule est trop exiguë. « Qui est sans épouse n’est soucieux que des affaires du Seigneur et de la manière de plaire à Dieu ; mais qui a une épouse est soucieux des affaires de ce monde et de la manière de plaire à son épouse. » (1 Co 7, 32-33) Divers sont les destins de la femme mariée et de la vierge ; celle qui n’est pas mariée pense aux choses du Seigneur : être sainte de corps et d’esprit ; au contraire, celle qui est mariée pense aux choses du monde : comment plaire à son mari [33].

22. Les graves incommodités du mariage, les nombreux soucis dont il est entravé, je les ai décrits, me semble-t-il, sommairement dans le livre que je viens de faire paraître contre Helvidius sur la perpétuelle virginité de la bienheureuse Marie. Il serait trop long de me répéter ici ; on pourra, si l’on veut, puiser à cette modeste source [34]. Je dirai seulement ceci, pour éviter l’apparence d’une omission totale : l’Apôtre nous ordonne de prier sans cesse, d’autre part celui qui accomplit le devoir conjugal ne peut pas prier pendant ce temps ; dès lors, ou nous prions toujours, mais nous restons vierges, ou nous cessons de prier pour obéir aux lois du mariage. « Que si, dit-il, une vierge se marie, elle ne pèche pas ; mais les gens mariés éprouveront la tribulation de la chair. » (1 Co 7, 28) Dans la préface de ce petit livre, j’ai prévenu le lecteur que je parlerais très peu ou même pas du tout des souffrances du mariage ; je renouvelle ici cet avis. Mais si tu veux savoir de combien de tracas la vierge est libérée, tandis que l’épouse y est astreinte, lis le livre de Tertullien à un ami philosophe et ses autres traités sur la virginité, ou encore le remarquable volume du bienheureux Cyprien, les compositions en vers et en prose du pape Damase sur ce sujet et les récents opuscules de notre Ambroise [35] dédiés à sa soeur. Il s’y épanche en une langue magnifique ; cet éloge de la virginité est parfait : invention, disposition, expression.

23. Pour nous, nous suivons une autre route. Il ne s’agit pas de louer la virginité, mais de l’observer. Il ne suffit pas de savoir ce qui est le bien, mais de garder plus soigneusement ce bien que nous avons déjà choisi. Cela est affaire de jugement, et ceci d’effort ; cela est le partage d’un grand nombre, cedi de très peu. « Qui persévérera, dit le Seigneur, jusqu’à la fin, celui-là sera sauvé » (Mt 10, 22), et encore : « beaucoup d’appelés, mais peu d’élus » (Mt 20, 16). Je t’en supplie donc, devant Dieu, le Christ Jésus et ses anges élus : ces vases du temple, que seuls les prêtres pouvaient regarder licitement, ne les produis pas facilement en public, que nul profane ne porte ses regards sur le sanctuaire de Dieu. Ozias toucha l’Arche ; il n’en avait pas le droit, aussi fut-il frappé de mort subite. Mais nul vase d’or et d’argent n’est aussi cher à Dieu que le temps d’un corps virginal. Autrefois, ce n’était qu’une ombre ; maintenant, c’est la réalité.Pour ta part, il est vrai, tu parles avec simplicité, et ta gentillesse ne sait pas regarder hautainement les inconnus eux-mêmes ; mais des yeux impudiques ont une autre façon de regarder ; ils ne savent pas considérer la beauté de l’âme, mais bien celle des corps. C’est le trésor de Dieu qu’Ézéchias montre aux Assyriens, mais chez les Assyriens cette vue excita la convoitise. Après des guerres répétées et la ruine de la Judée, ce qu’on captura, en premier lieu, ce furent les vases du Seigneur ; on les emporta à l’étranger. Finalement, parmi les ripailles et les troupeaux de concubines (car le vice triomphe à souiller ce qui est noble), Balthasar boit dans les coupes sacrées !

24. Ne prête pas l’oreille aux mauvaises conversations. Souvent ceux qui tiennent des propos inconvenants cherchent à éprouver la fermeté d’une conscience. Si, toi qui es une vierge, tu écoutes volontiers ce qu’on dit, si tu te détends à n’importe quelle plaisanterie, ils loueront chacune de tes affirmations et souscriront à toutes tes négations. Ils t’appelleront spirituelle, sainte, sans malice. ’Voilà une vraie servante du Christ’, diront-ils ; ’elle est toute simple. Ce n’est pas comme cette mégère affreuse, vulgaire, rébarbative, et qui, pour ces motifs, peut-être, n’a pas été capable de trouver un mari’ ! Un fâcheux instinct naturel nous y porte : trop volontiers, nous sympathisons avec nos flatteurs. Nous avons beau protester que nous ne méritons pas ces louanges, une chaude rougeur a beau colorer nos joues, malgré tout, au fond de nous-même, notre âme est heureuse d’être louée. L’épouse du Christ est comme l’arche du Testament ; toi, de même, n’accueille aucune pensée venue du dehors. Au-dessus de ce propitiatoire, comme au-dessus des chérubins, veut trôner le Seigneur (Cf. He 9, 5). Il envoie ses disciples, comme il fit à propos de l’ânon, pour te délier des soucis du siècle, pour que, délaissant pailles et briques d’Égypte, tu suives Moïse dans le désert et entres dans la Terre promise. Qu’il ne se trouve personne pour t’empêcher, ni ta mère, ni ta soeur, ni une parente ou un frère ; le Seigneur te tient pour son amie. S’ils veulent t’empêcher, qu’ils craignent les fléaux de Pharaon, qui, ayant refusé de laisser partir le peuple de Dieu pour l’adorer, a souffert ce que relate l’Écriture.

Jésus, entré dans le temple, expulsa tout ce qui n’était pas du temple. Dieu, en effet, est jaloux, il n’admet pas que, de la maison de son Père, on fasse une caverne de brigands. Du reste, là où l’on compte l’argent, là où sont les cages des colombes, là aussi est mise à mort la simplicité ; quand, dans un cœur virginal, bouillonne le souci des affaires du siècle, aussitôt le voile du temple se déchire ; l’époux se lève irrité et s’écrie : « On vous laissera votre maison déserte ! » (Mt 23, 38) Lis l’Évangile, vois comme Marie, assise aux pieds du Seigneur, est préférée à Marthe l’empressée — et pourtant Marthe remplissait avec soin le devoir de l’hospitalité en préparant un repas au Seigneur et à ses disciples. « Marthe, dit-il, Marthe, tu es soucieuse et troublée à l’excès ! on n’a pas besoin de grand’chose, peut-être d’une seule. Marie a choisi la meilleure part, elle ne lui sera pas enlevée. » (Lc 10, 41-42) Sois Marie, toi aussi ; au repas préfère la doctrine. Que tes soeurs s’affairent pour chercher comme recevoir le Christ, toi, rejette une fois pour toutes le fardeau du siècle, reste assise aux pieds du Seigneur et dis : ’J’ai trouvé celui que cherchait mon âme, je le tiens et ne le lâcherai pas.’ Et puisse-t-il répondre : « unique est ma colombe, ma parfaite, elle est l’unique de sa mère, l’élue de sa génitrice » (Cant 6, 8), c’est-à-dire de la Jérusalem céleste.

25. Que toujours te garde le secret de ta chambre, que toujours à l’intérieur l’Époux y joue avec toi. Tu pries, c’est parler à l’Époux ; tu lis, c’est lui qui te parle. Puis, quand le sommeil t’aura accablée, il viendra derrière la cloison, passera sa main par le guichet et touchera ton corps. Alors tu te lèveras, frissonnante, et tu diras : « Je suis blessée d’amour » (Cant 5, 8) ; puis tu l’entendras encore : « C’est un jardin clos, ma soeur et mon épouse, un jardin clos, une source scellée. » (Cant 4, 12)

Garde-toi de sortir pour aller dans la maison [36], ne cherche pas à voir les filles d’un pays étranger [37], puisque les patriarches sont tes frères et que tu as la joie qu’Israël soit ton père. Dina sort, elle est violée ! Je ne veux pas que tu cherches ton époux à travers les places [38], ni que tu fasses le tour des coins de la cité. Tu auras beau dire : « Je me lèverai, je circulerai dans la cité, au forum et sur les places ; j’y chercherai celui qu’aime mon âme » (Cant 3, 2), et questionner : « Celui qu’aime mon âme, ne l’avez-vous pas vu ? » (Cant 3, 3) Nul ne daignera te répondre. Ce n’est pas sur les places qu’on peut trouver l’Époux (« il est, au contraire, étroit et resserré le chemin qui conduit à la Vie » (Mt 7, 14), et voici la suite : « Je l’ai cherché sans le trouver, je l’ai appelé et il ne m’a pas répondu. » (Cant 5, 6) Plaise au ciel qu’il n’y ait rien de pire que de ne pas l’avoir trouvé ! Blessée, dénudée, gémissante, tu feras ce récit : « Ils m’ont trouvée, les gardes qui circulent en ville, ils m’ont frappée, ils m’ont blessée, ils m’ont enlevé ma robe légère d’été ! » (Cant 5, 7)

Si tels sont les traitements qu’endure, parce qu’elle est sortie, celle qui avait dit : « Je dors, mais mon cœur veille » (Cant 5, 2) et « mon cousin est pour moi comme un bouquet de myrrhe, il demeurera au milieu de mes seins » (Cant 1, 13), qu’adviendra-t-il de nous, qui ne sommes encore que des adolescentes, et qui, lorsque l’épouse entre avec l’époux, demeurons dehors [39] ? Il est jaloux, Jésus, il ne veut pas que d’autres voient son visage. Tu allégueras excuses et prétextes : ’J’ai baissé mon voile pour cacher mon visage, je t’ai cherché, je t’ai dit : « Enseigne-moi, ô l’aimé de mon âme, où tu fais paître, où tu te reposes à midi, afin que je n’erre pas comme si j’étais couverte [40], parmi les troupeaux de tes amis »’ (Cant 1, 7) ; il s’indignera, s’emportera et dira : « Si tu ne te connais pas, ô belle entre les femmes, sors sur les traces des troupeaux, et fais paître tes boucs parmi les tentes des bergers ! » (Cant 1,8) c’est-à-dire : ’sois belle, qu’entre toutes les femmes ta beauté soit aimée de l’époux ; si tu ne te connais pas, si tu ne gardes pas [41] très strictement ton cœur, si tu ne fuis pas les yeux des jeunes gens, tu sortiras de ma couche et tu feras paître les boucs, qui prendront place à ma gauche [42] !’

26. C’est pourquoi, ô mon Eustochie, ma fille, ma maîtresse, ma coservante, ma soeur — divers sont les titres que valent l’âge, la vertu, la religion, l’affection — écoute les paroles d’Isaïe : « Ô mon peuple, entre dans tes chambres ; ferme ta porte, cache-toi un petit instant, jusqu’à ce qu’ait passé la colère du Seigneur ! » (Is 26, 20) Que vaquent dehors les vierges folles [43] ! Toi, sois à l’intérieur avec l’Époux. Si, en effet, tu fermes ta porte, si, selon le précepte de l’Évangile, tu pries ton père dans le secret [44], il viendra frapper et dira : « Voici que je me tiens devant la porte et que je frappe ; si quelqu’un m’ouvre, j’entrerai, je dînerai avec lui et lui avec moi » (Ap 3, 20) ; aussitôt tu répondras avec empressement : « C’est la voix de mon cousin qui frappe : ouvre-moi, ma soeur, ma proche, ma colombe, ma parfaite. » (Cant 5, 2) Et tu n’auras pas à dire : « J’ai dépouillé ma tunique, comment la remettre ? J’ai lavé mes pieds, comment les salir ? » (Cant 5, 3) Lève-toi tout de suite et ouvre, de peur que, si tu tardais, il ne passe son chemin. Après quoi tu te plaindrais par ces mots : « J’ai ouvert à mon cousin, mais mon cousin était passé. » (Cant 5, 6) Qu’est-il besoin que les portes de ton cœur soient fermées à l’époux ? Ouvertes au Christ, qu’elles soient fermées au diable, selon ce texte : « Si l’esprit de celui qui détient le pouvoir monte sur toi, ne lui fais pas de place ! » (Ecc 10, 4) Daniel [45], dans son cénacle — car il ne pouvait pas rester en bas — tint ses fenêtres ouvertes dans la direction de Jérusalem : toi aussi tiens tes fenêtres ouvertes, mais du côté où la lumière peut entrer, où tu peux voir la cité de Dieu. N’ouvre pas ces fenêtres, dont il est dit : « La mort est entrée par vos fenêtres ! » (Jr 9, 21)

27. Évite aussi avec beaucoup de soin ce travers : ne te laisse pas prendre à l’ardeur de la vaine gloire. « Comment, dit Jésus, pouvez-vous croire, si vous recevez la gloire de la part des hommes ? » (Jn 5, 44) Vois donc quel défaut ce peut être, puisque celui qui y succombe ne peut avoir la foi ! Disons, au contraire, nous autres  : « Oui, tu es ma gloire » (Ps 3, 4), et « qui se glorifie, qu’il se glorifie dans le Seigneur » (1 Co 1, 31), et « si je cherchais encore à plaire aux hommes, je ne serais pas serviteur du Christ » (Ga 1, 10) ; « je n’ai garde de me glorifier, sinon dans la croix de mon Seigneur Jésus-Christ, par qui le monde est crucifié pour moi, et moi pour le monde » (Ga 6, 14) ; et encore : « en toi nous serons loués toute la journée » (Ps 93, 9) ; « dans le Seigneur sera louée mon âme » (Ps 33, 3).

Quand tu fais l’aumône [46], que Dieu soit seul à le voir. Quand tu jeûnes, que soit gai ton visage [47]. Ton vêtement : ni trop net, ni trop malpropre ; qu’aucune originalité ne le fasse remarquer, en sorte que les passants que tu croises ne s’arrêtent pas pour te montrer au doigt [48]. Un frère est mort [49], tu auras à accompagner le cadavre d’une soeur, attention ! ne le fais pas trop souvent, tu finirais par mourir toi-même. Ne cherche pas à paraître trop pieuse, ni plus effacée qu’il n’est nécessaire. Ne cherche pas la gloire en ayant l’air de la fuir. Plusieurs évitent qu’il y ait des témoins de leur pauvreté, de leur bienfaisance ou de leur jeûne, mais ils désirent plaire, justement parce qu’ils méprisent de plaire. O merveille ! on prétend éviter la louange, pendant qu’on la recherche. Aux autres troubles de l’âme humaine : la joie, le chagrin, l’espoir, la crainte, je trouve pas mal d’hommes qui savent échapper. Mais, de ce défaut-là, très peu sont exempts [50] ; or, celui-là est parfait qui, tel un beau corps, n’est entaché que de peu de verrues.

Je n’ai pas à t’avertir de ne pas te glorifier de ta fortune, ou de ne pas te vanter de ta noblesse, ou de ne pas te préférer à autrui ; je sais ton humilité, je sais que tu peux dire de tout cœur : « Seigneur, mon cœur ne s’est pas exalté et mes yeux ne se sont pas orgueilleusement levés » (Ps 130, 1) ; je sais que, chez toi et chez ta mère, l’orgueil, qui causa la chute du diable, n’existe absolument pas. Aussi me suis-je dispensé d’écrire là-dessus. Il est tout à fait idiot d’enseigner à quelqu’un ce que sait parfaitement le prétendu disciple. Mais il ne faudrait pas que ce devînt pour toi un sujet de jactance d’avoir méprisé la jactance du siècle, ou qu’une pensée inexprimée et subreptice ne te porte, toi qui as renoncé à plaire en robes tissées d’or, à chercher à plaire en haillons, soit, quand tu te joins à un groupe de frères ou de soeurs en t’asseyant sur un escabeau bas, en te proclamant indigne, en baissant à dessein la voix comme une femme épuisée par les jeûnes, ou, pour feindre la démarche d’une personne qui va défaillir, en t’appuyant sur l’épaule d’une voisine. Il y a en certaines qui « défigurent leur visage [51] pour bien faire voir aux autres qu’elles pratiquent le jeûne. 

Aperçoivent-elles quelqu’un ? Aussitôt elles gémissent, abaissent les paupières, se couvrent la figure ; c’est tout juste si elles libèrent un œil pour regarder. La robe est grossière, la ceinture de vil tissu, les mains et les pieds sales ; mais l’estomac, lui, parce qu’on ne peut le voir, étouffe de mangeaille ; c’est pour elles que l’on chante tous les jours ce psaume : « Dieu a dissipé les os des hommes qui se complaisent en eux-mêmes » (Ps 52, 6). D’autres adoptent une tenue masculine, changent leur vêtement, honteuses d’être des femmes, ce qu’elles sont de naissance, coupent leur chevelure et, sans pudeur, dressent un visage d’eunuque. Il en est qui, vêtues de cilices et de capuchons truqués, comme si elles retombaient en enfance, imitent les hiboux et les chouettes.

28. Je ne voudrais pas avoir l’air de ne discourir que des femmes. Aussi bien, fuis ces hommes que l’on peut voir nattés : chevelure de femme, en dépit de l’Apôtre [52], barbe de bouc, manteau noir, pieds nus comme pour souffrir du froid : tout cela, c’est manifestations du démon. Tel autrefois Antimus, tel naguère Sofronius : Rome s’en lamentait ! Ils pénètrent dans les demeures des nobles, ils séduisent des femmelettes « chargées de péchés, ils feignent d’étudier toujours sans jamais parvenir à la science de la vérité » (2 Tim 3, 6-7) ; ils simulent l’austérité ; leurs jeûnes semblent longs, ils les prolongent en s’alimentant la nuit, en cachette. J’ai honte de dire le reste, de peur de paraître invectiver plutôt qu’avertir. Il y en a d’autres — je parle des hommes de mon ordre [53] — qui ambitionnent le sacerdoce et le diaconat pour voir plus librement les femmes. Ils n’ont souci que de leurs vêtements, de leurs parfums ; que leur pied ne dans pas dans un soulier avachi ; leurs cheveux bouclés portent l’empreinte du fer à friser, leurs doigts scintillent de bagues et, de peur que la chaussée trop humide ne leur mouille la plante des pieds, ils y impriment juste le bout des orteils ! Tu croirais voir des fiancés plutôt que des clercs.

Il en est qui consacrent tous leurs soins, et leur vie tout entière, à connaître le nom des matrones, leur adresse et leurs habitudes. Je n’en décrirai qu’un, le premier en cet art, brièvement et sommairement, afin que, connaissant le maître, tu reconnaisses plus aisément les disciples. En même temps que le soleil, en toute hâte, il se lève. Ses visites ? Il en a réglé l’ordre. Il a étudié les trajets les plus courts. C’est tout juste s’il ne pénètre pas dans leur chambre même, tandis qu’elles dorment encore, ce vieillard importun. Remarque-t-il un coussin, une étoffe élégante, ou n’importe quel meuble de l’appartement, il le loue, l’admire, le palpe ; il se plaint de n’en point posséder de pareil et obtient l’objet moins qu’il ne l’extorque, car chacune redoute d’offenser le courrier de la Ville. Il n’aime pas la chasteté, il déteste les jeûnes. Il expertise les mets en les flairant, aussi le surnomme-t-on vulgairement le chapon gras, ou γέρων ποππύζων [54]. Sa bouche est grossière, impudente, toujours armée pour l’insulte. Tourne-toi où tu voudras, il est le premier en face de toi. Entend-on quelque nouvelle, c’est lui qui l’a inventée, ou qui l’amplifie et la diffuse. Ses chevaux qu’il change selon les heures sont si brillants et si fougueux qu’on le croirait frère du roi de Thrace [55].

29. Bien divers sont les pièges par quoi nous combat un ennemi rusé. Le serpent était le plus intelligent de tous les animaux qu’avait créés le Seigneur Dieu sur la terre. D’où ce mot de l’Apôtre : « nous n’ignorons pas ses astuces » (2 Co 2, 11). Ni la malpropreté affichée, ni les recherches de la coquetterie ne conviennent aux chrétiens. Si tu ne comprends pas ou si tu hésites sur un passage des Écritures, interroge quelqu’un que recommande sa vie, que son âge met à l’abri du reproche, que ne disqualifie pas la réputation, enfin qui puisse dire : « je vous ai fiancée à un seul homme, vierge chaste à présenter au Christ » (2 Co 11, 2). S’il n’y a personne qui soit capable d’expliquer, mieux vaut ignorer, pour rester en sûreté, que risquer pour apprendre. Souviens-t-en ! c’est au milieu des pièges que tu marches ; pour beaucoup de vétéranes de la virginité, cette couronne de la chasteté que nul ne mettait en doute leur a échappé des mains au seuil même de la mort !

Si quelques servantes sont associées à ton ascèse, ne sois pas hautaine à leur égard, ni orgueilleuse parce que tu es leur maîtresse. Vous appartenez au même Époux, ensemble vous chantez le Christ, ensemble vous recevez son Corps, pourquoi votre table serait-elle différente ? Qu’on amène de nouvelles compagnes ! Que les vierges mettent leur honneur à en attirer d’autres ! Si tu en sens une faiblir dans sa foi, prends-la en charge, console-la, caresse-la, que sa persévérance dans la chasteté soit ton gain personnel. Si quelqu’une dissimule, mais cherche à fuir la servitude de la continence, lis-lui carrément les mots de l’Apôtre : « Mieux vaut se marier que d’être consumée de désirs » (1 Co 7, 9). Mais ces vierges ou veuves oisives, curieuses, qui font le tour des palais des matrones, dont le front ne sait plus rougir et qui dépassent en impudence les parasites des comédies, chasse-les comme des pestes : « Les moeurs vertueuses sont corrompues par les conversations coupables » (1 Co 15, 33). Elles n’ont qu’un souci : le ventre et ses environs ! Ces femmes-là ont coutume de prodiguer les conseils : ’ma petite chienne, jouis de ta fortune, et vis tant que tu es en vie’, ou bien : ’C’est pour tes enfants que tu la gardes ?’ Ivrognes, lascives, par leurs insinuations malfaisantes de toute nature, elles amolliraient même des âmes de fer pour les porter au plaisir et, « quand elles ont péché par luxure bien que chrétiennes, elles veulent se marier et encourent la damnation parce qu’elles ont violé leur premier engagement » (1 Tim 5, 11-12).

Ne te complais pas à être réputée très diserte ou à savoir tourner agréablement les vers d’amusants madrigaux. N’imite pas la prononciation mignarde et invertébrée des dames ; tantôt parce qu’elle serrent les dents, tantôt parce que leurs lèvres sont trop peu fermes, elles gouvernent leur langue balbutiante de façon à n’émettre que la moitié des mots ; elles estiment grossier tout ce qui vient à terme [56] ; tant leur plaît l’adultère, même s’il ne s’agit que de la langue ! « Oui, quelle communauté y a-t-il entre la lumière et les ténèbres, quel accord entre le Christ et Bélial ? » (2 Co 6, 14-15) Que fait Horace avec le psautier ? et Virgile avec l’Évangile, et Cicéron avec l’Apôtre ? N’est-il pas scandalisé, le frère, s’il te voit prendre un repas dans un temple d’idoles ? Sans doute « tout est pur aux purs (Tt 1, 15)  », « il ne faut rien repousser de ce que l’on peut recevoir en rendant grâces » (Tt 4, 4), cependant nous ne devons pas boire en même temps la coupe du Christ et la coupe des démons. Je vais te raconter ma malheureuse histoire.

30. Il y a bien longtemps ! maison, père et mère, soeur, parenté et, ce qui est plus difficile, habitude de la bonne chère, pour le Royaume des cieux je m’étais sevré [57] de tout cela ; j’allais à Jérusalem militer pour le Christ. Mais de la bibliothèque qu’à Rome je m’étais composée avec beaucoup de soin et de peine, je n’avais pas pu me passer. Malheureux que j’étais ! avant de lire Cicéron, je me livrais au jeûne. Je veillais souvent des nuits entières, je versais des larmes, que le souvenir de mes péchés d’autrefois arrachait du fond de mes entrailles. Après quoi, je prenais en mains mon Plaute ! Si, rentrant en moi-même, je me mettais à lire un prophète, ce langage inculte me faisait horreur. Mes yeux aveuglés m’empêchaient de voir la lumière. Or, ce n’étaient pas mes yeux que j’incriminais, mais le soleil ! Le Serpent ancien se jouait ainsi de moi.

Vers le milieu du carême, jusqu’au plus profond de mon être s’insinue la fièvre. Elle envahit mon corps épuisé, ne lui laisse aucun repos et — détail à peine croyable —, mes pauvres membres en sont tellement dévorés, que je ne tenais plus guère que par mes os. Cependant, on préparait mes obsèques, car la vie, le souffle, la chaleur — tout mon corps étant déjà refroidi — ne palpitaient plus que dans un coin encore tiède de ma poitrine. Tout d’un coup, j’ai un ravissement spirituel. Voici le tribunal du Juge ; on m’y traîne ! La lumière ambiante était si éblouissante que, du sol où je gisais, je n’osais pas lever les yeux en haut. On me demande ma condition : « Je suis chrétien », ai-je répondu. Mais celui qui siégeait : ’Tu mens’, dit-il ; ’c’est cicéronien que tu es, non pas chrétien’ ; « où est ton trésor, là est ton cœur » (Mt 6, 21).

Aussitôt je deviens muet. Parmi les coups — car il avait ordonné qu’on me flagellât — ma conscience me torturait davantage encore de sa brûlure ; je me redisais ce verset : « Mais, dans l’enfer, qui te louera ? » (Ps 6, 6) Je me suis mis cependant à crier et à me lamenter en répétant : « Pitié pour moi, Seigneur, pitié pour moi ! » (Ps 16, 2) Cet appel retentissait parmi les coups de fouet. Enfin, prosternés aux genoux du président, les assistants suppliaient de faire grâce à ma jeunesse, de permettre à mes erreurs de faire pénitence ; je subirais par la suite le supplice mérité, si jamais je revenais à la lecture des lettres païennes. Quant à moi, coincé dans une situation aussi critique, j’étais disposé à promettre encore davantage. Aussi me suis-je mis à jurer, à prendre son nom à témoin : ’Seigneur, disais-je, si jamais je possède des ouvrages profanes, ou si j’en lis, c’est comme si je te reniais [58] !’ Après que j’eus prononcé ce serment, on me relâcha ; me voici revenu sur terre. À la surprise générale, j’ouvre les yeux. Ils étaient tellement trempés de larmes qu’ils attestaient ma douleur aux plus sceptiques. Ce n’était pas du sommeil, ni de ces songes vains qui nous illusionnent souvent. Témoin le tribunal devant lequel je gisais ; témoin le jugement, si redoutable ! — puissé-je ne jamais subir pareille question ! — j’avais les épaules tuméfiées, et j’ai senti les plaies au réveil. Depuis, j’ai lu les livres divins avec plus de soin que je n’avais lu jadis les ouvrages des mortels [59].

31. La cupidité aussi, c’est un défaut que tu dois éviter. Bien sûr tu ne désireras pas ce qui n’est pas à toi ; cela, les lois de l’État elles-mêmes le punissent. Mais ce qui est tien — qui, en réalité, est à autrui — tu ne dois pas le garder. « Si vous n’avez pas été fidèles, dit Dieu, pour ce qui ne vous appartient pas, ce qui est à vous qui vous le donnera ? » (Lc 16, 12) Ne sont pas à nous les lingots d’argent et d’or. Notre bien est spirituel ; il en est dit ailleurs : « rachat de l’homme, sa propre richesse. » (Pr 13, 8) « Nul ne peut servir deux maîtres, ou il haïra l’un et aimera l’autre, ou il supportera l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez pas servir Dieu et Mammon, c’est-à-dire la richesse » (Mt 6, 24). Dans la langue païenne des Syriens, la richesse s’appelle, en effet, Mammona. Penser à la subsistance ? épines de la foi, racine d’avarice, souci des païens. Mais, diras-tu, je suis une jeune fille d’éducation raffinée qui ne peut travailler de ses mains. Si j’arrive à la vieillesse, si je tombe malade, qui aura compassion de moi ? Écoute Jésus qui s’adresse aux apôtres : « Ne réfléchissez pas dans votre cœur sur ce que vous aurez à manger, ou pour votre corps de quoi vous serez habillés. L’âme n’est-elle pas plus que la nourriture et le corps plus que le vêtement ? Regardez les oiseaux du ciel, ils ne sèment ni ne moissonnent ni n’engrangent ; or, votre père céleste les nourrit » (Mt 6, 25-26). Si le vêtement vient à te manquer, on te proposera l’exemple des lis ; si tu as faim, tu entendras proclamer bienheureux les pauvres et les affamés. Si quelque souffrance t’afflige, lis donc : « c’est pourquoi je me complais dans mes infirmités » (2 Co 12, 10), et encore : « on m’a donné l’aiguillon de ma chair, l’ange de Satan, pour me souffleter » (2 Co 12, 7), afin que j’évite l’orgueil. Réjouis-toi dans tous les jugements de Dieu, car « les filles de Juda ont exulté dans tous tes jugements, Seigneur » (Ps 96, 8). Que ta bouche ne cesse de proférer ce mot : « Nu je suis sorti du sein de ma mère, nu j’y reviendrai » (Jb 1, 21), et : « Nous n’avons rien apporté en ce monde, nous n’en pouvons pas davantage rien emporter » (1 Tim 6, 7).

32. Mais on voit actuellement beaucoup de femmes dont les armoires sont bourrées de vêtements, qui change de tunique tous les jours et pourtant ne peuvent vaincre les mites. Or, celle qui est plus pieuse n’use qu’un seul vêtement à la fois et, les coffres pleins [60], elle fait durer ses loques. On teint le parchemin de couleur pourpre, on trace les lettres avec de l’or liquide, on revêt de gemmes les livres [61], mais tout nu, devant leurs portes [62], le Christ est en train de mourir ! Tendent-elles la main pour faire l’aumône, la trompette sonne ; convoquent-elles à l’agape, on loue un crieur. J’ai vu récemment — je tais les noms, pour que l’on ne croie pas à une satire — une très noble parmi les matrones romaines, dans la basilique saint Pierre, précédée d’eunuques, distribuant une pièce à chaque pauvre, de sa propre main, pour paraître plus pieuse. Cependant — facile manœuvre pour les habitués — une vieille chargée d’ans et de haillons [63] court se replacer plus haut dans la file, afin de recevoir une seconde pièce. Arrivée à sa hauteur, c’est un coup de poing que la dame lui donne au lieu d’un denier, et la coupable d’un si grand forfait est tout en sang !

« La racine de tous les maux, c’est l’avarice » (1 Tim 6, 10), aussi l’apôtre l’appelle-t-il : « service des idoles. » « Cherche d’abord le royaume de Dieu et tout cela te sera apporté [64]. » Le Seigneur ne fera pas mourir de faim la vie du juste : « j’ai été plus jeune, me voici vieux ; je n’ai pas vu le juste abandonné ni sa progéniture chercher son pain » (Ps 36, 25). Élie est nourri par le ministère des corbeaux ; la veuve de Sarepta, qui se préparait à mourir la nuit même avec ses enfants, nourrit le prophète, bien qu’elle eût faim ; la cruche est miraculeusement remplie, celui qui venait pour être nourri nourrit lui-même son hôtesse. L’apôtre Pierre dit [65] : « De l’argent et de l’or, je n’en ai point. Mais ce que j’ai, je te le donne : au nom du Seigneur Jésus-Christ, lève-toi et marche ! » (Ac 3, 6) Mais à présent beaucoup disent aux pauvres, non par des mots qu’ils taisent, mais par leurs actes : ’la foi et la miséricorde, je n’en ai pas ; mais ce que j’ai, or et argent, je ne t’en donne pas.’ Donc, quand nous avons le vivre et le vêtement [66], nous devons nous en contenter. Écoute ce que Jacob demande en son oraison : « Si le Seigneur est avec moi et me garde dans ce chemin par lequel je fais route, et s’il me donne du pain à manger et un vêtement pour me couvrir » (Gn 28, 20). Il ne demandait que le nécessaire. Vingt ans après, riche propriétaire, plus riche encore comme père [67], il retourne à la terre de Chanaan. Les Écritures nous fournissent une infinité d’exemples pour nous enseigner qu’il faut fuir l’avarice.

33. Je n’en fais pour le moment qu’une digression ; si le Christ y consent, je réserve ce sujet pour un ouvrage à part ; pourtant je vais rapporter un fait qui a eu lieu voici peu d’années en Nitrie [68]. Un frère, plutôt économe qu’avare, mais qui oubliait que le Maître avait été vendu trente deniers, laissa en mourant cent sous d’or qu’il avait gagnés à tisser du lin. Les moines réunissent un conseil (sache qu’en ce même endroit il en vit à peu près cinq mille en cellules séparées) : que fallait-il faire de ces pièces ? Les uns disaient : qu’on les distribue aux pauvres, d’autres : qu’on les donne à l’église ; plusieurs : qu’on les rende à sa famille. Mais Macaire, Pambo, Isidore et les autres, qu’on appelle Pères — l’Esprit Saint parlant en eux — décidèrent qu’on les enfouît avec leur propriétaire : « Que ton argent, disaient-ils, t’accompagne pour la perdition ! » (Ac 8, 20) Qu’on ne croie pas à un acte de cruauté : une si grande terreur envahit tous les moines par toute l’Égypte, que laisser à sa mort un seul sou y passe pour criminel.

34. Nous venons de mentionner les moines ; comme je sais que tu te plais à entendre parler des choses saintes, prête-moi un peu l’oreille. Il y a en Égypte trois sortes de moines. Les cénobites, ils les nomment dans la langue du pays ’sauhes", nous pourrions les appeler ’ceux qui vivent en commun’, les anachorètes, qui habitent seuls, parmi les déserts ; ils tirent leur nom de ce qu’ils se sont écartés loin des hommes ; une troisième sorte qu’ils appellent ’remnuoth’, cette espèce est détestable et l’on n’en fait pas cas ; mais, dans notre province, elle est seule ou du moins prépondérante. Ils habitent ensemble à deux ou trois ou guère davantage, vivent à leur guise et indépendants ; du fruit de leur travail ils mettent en commun une partie, afin d’avoir une table commune. Le plus souvent, c’est dans les villes ou les bourgs qu’ils habitent ; comme si c’était leur métier qui fût saint, et non leur vie, de tout ce qu’ils vendent, ils majorent le prix. Entre eux les disputes sont fréquentes, car, gagnant eux-mêmes la nourriture dont ils vivent, ils n’acceptent aucune subordination. À la vérité, ils ont coutume de rivaliser de jeûnes : de la matière d’un secret ils font un bulletin de victoire [69]. Chez ces gens-là, tout est affecté : manches larges, chaussures mal ajustées, vêtement trop grossier, fréquents soupirs — mais visite des vierges, dénigrement du clergé ; puis, quand vient un jour de fête, ils s’empiffrent jusqu’au vomissement.

35. Puisque nous avons exterminé ceux-là comme des pestes, venons-en à ceux qui forment des communautés assez nombreuses ; on les appelle cénobites, avons-nous dit. Leur pacte primordial, c’est d’obéir aux Anciens et d’exécuter tous leurs ordres. Ils sont répartis en décuries et centuries, de façon que neuf hommes soient présidés par un dixième, et que, d’autre part, un centième ait sous lui dix chefs. Ils demeurent séparés, mais les cellules sont contiguës. Jusqu’à la neuvième heure, c’est comme un jour férié : nul ne va chez un autre, sauf ces dizeniers dont nous avons parlé, afin de consoler par leurs entretiens ceux dont les idées seraient troublées.

Mais, après l’heure de none, c’est le mouvement de la vie commune. Les psaumes résonnent. On lit les Écritures selon la tradition. Les oraisons achevées, tous s’assoient ; au milieu d’eux, celui qu’ils nomment le Père commence une conférence. Tandis qu’il parle, il se fait un tel silence que nul n’ose en regarder un autre, nul n’ose même cracher. Pas d’autre louange à l’orateur que les larmes des auditeurs. Silencieux sont les pleurs qui roulent sur le visage ; la douleur ne s’échappe jamais en sanglots. Mais quand le Père entame des prédications sur le règne du Christ, le bonheur futur ou la gloire à venir, on peut les voir tous, contenant leurs soupirs et les yeux levés au ciel, dire en eux-mêmes : « Qui me donnera les plumes de la colombe, pour que je puisse voler et m’y reposer ? » (Ps 54, 7)

Ensuite, l’assemblée se disperse. Chaque décurie avec son père particulier se dirige vers les tables, où chacun à son tour sert une semaine. Aucun bruit pendant le repas ; nul ne parle en mangeant. On vit de pain, de légumes et d’herbes potagères assaisonnées de sel et d’huile. Pour le vin, on n’en donne qu’aux vieillards. À ceux-ci, ainsi qu’aux tout jeunes gens, on sert souvent un déjeuner ; pour les uns, c’est afin de sustenter leur vie fatiguée, pour les autres, afin qu’elle ne soit pas brisée dès son début. Ensuite, ils se lèvent tous ensemble, récitent l’hymne et retournent à leurs enclos. Là chacun peut converser avec ses amis jusqu’au soir : ’Avez-vous, dit-on, un tel et un tel, quelle grâce en sa personne, quel silence, quelle retenue dans la démarche ?’ Aperçoivent-ils un malade, ils le consolent, un fervent dans l’amour de Dieu, ils s’exhortent ensemble au zèle. La nuit, comme, en dehors des oraisons publiques, chacun veille sur son lit, ils font le tour des cellules, collent leur oreille à la paroi et enquêtent avec soin sur ce qui se fait. S’ils dépistent un paresseux, ils ne le blâment pas sur le champ, mais dissimulant ce qu’ils savent, ils vont le visiter plus souvent et, s’y mettant les premiers, ils le provoquent à la prière plutôt qu’ils ne l’y contraignent.

L’ouvrage de la journée est déterminé. On le rend au doyen qui le porte à l’économe ; celui-ci, tous les mois, rend compte au Père général, non sans une grande crainte. C’est lui aussi qui goûte les mets quand ils sont préparés.Et, comme nul n’a permission de dire : « je n’ai pas de tunique, de manteau ou de paillasse de sparterie », c’est lui encore qui arrange toutes choses pour que nul n’ait à demander, nul n’ait à manquer. Si l’un d’eux tombe malade, on le transfère dans une salle fort spacieuse. Là les vieillards s’emploient si bien à le dorloter qu’il n’a lieu de souhaiter ni les agréments des villes, ni même l’affection d’une mère. Tous les dimanches, ils ne s’emploient qu’aux prières et aux lectures ; c’est ce qu’ils font d’ailleurs en tout temps quand ils ont achevé leurs modestes travaux. Chaque jour on étudie un passage de l’Écriture. Le jeûne est le même toute l’année, sauf en carême qui le seul temps où l’on permette une vie encore plus austère. À la Pentecôte, le dîner se change en déjeuner ; on satisfait ainsi la tradition ecclésiastique [70] et l’on évite de charger l’estomac d’un double repas. C’est ainsi que Philon, l’imitateur du langage de Platon, et Josèphe [71], le Tite-Live des Grecs, dans sa deuxième histoire de la captivité des Juifs, décrivent les Esséniens.

36. Je m’aperçois que, dans un écrit sur les Vierges, j’ai bavardé sur les moines de façon presque superflue. Aussi en viens-je à la troisième sorte qu’on appelle les anachorètes, et qui, sortant des communautés, vont au désert sans rien emporter que du pain et du sel. L’initiation de ce genre de vie, c’est Paul ; Antoine l’a illustré ; pour remonter plus haut, le chef de file fut Jean-Baptiste. C’est aussi un homme de cette sorte qu’a décrit le prophète Jérémie par ces mots : « Il est bon à l’homme de porter le joug dès la jeunesse ; il s’assiéra tout seul et se taira, car il a pris sur lui le joug ; il offrira sa joue à qui le frappe, il sera rassasié d’opprobres, aussi le Seigneur ne rejettera-t-il pas pour l’éternité » (Lm 3, 27-30). Le travail de ces héros, leur manière de vivre dans la chair, non selon la chair, je te l’expliquerai, si tu veux, à un autre moment. À présent, je vais revenir à mon propos, car c’est en dissertant sur l’avarice que j’en étais venu aux moines. En te proposant leurs exemples, ce n’est pas seulement, te dirai-je, l’or, l’argent et les autres richesses, mais la terre et le ciel même que tu devras mépriser ; alors, unie au Christ, tu chanteras : « Ma part, c’est le Seigneur ! » (Ps 72, 26)

37. Autres remarques. L’Apôtre, il est vrai, nous ordonne de prier toujours ; pour les saints, d’ailleurs, le sommeil même est aussi une prière. Pourtant, nous devons avoir des heures de prière bien distinctes. De la sorte, si nous étions absorbés par quelque travail, l’horaire lui-même nous avertirait d’accomplir le devoir : l’heure de tierce, de sexte, de none, l’aube aussi et le soir ; nul n’ignore cette pratique. Et tu ne prendras de repas qui ne soit précédé d’une prière, tu ne quitteras pas la table sans avoir rendu grâces au Créateur. Chaque nuit, tu te lèveras deux ou trois fois pour ruminer les textes de l’Écriture que nous savons par cœur. Si nous sortons de notre demeure, armons-nous de prière ; revenons-nous de la place publique : prière d’abord, avant de nous asseoir ; que notre pauvre corps ne prenne pas son repos, avant que notre âme n’ait goûté sa nourriture. En toute action, en toute démarche, que notre main trace le signe de la croix. Ne dis du mal de personne, ne suscite pas de scandale devant le fils de ta mère. « Toi, qui es-tu donc pour juger le serviteur d’un autre ? Cela concerne son maître, qu’il se tienne debout ou qu’il tombe. Mais il se tiendra debout, car Dieu est assez puissant pour le soutenir » (Ro 14, 4). Si tu jeûnes deux jours, ne t’estime pas meilleure que celui qui ne jeûne pas.Tu jeûnes, mais tu te fâches ; lui mange, mais peut-être pratique la douceur. La fatigue de ton esprit et la fringale de ton estomac, c’est en querellant que tu les digères ; lui se nourrit avec modération, mais rend grâces à Dieu. Aussi Isaïe s’exclame-t-il tous les jours : « Ce n’est pas un tel jeûne que j’ai choisi, dit le Seigneur » (Is 58, 5). Et encore : « À l’époque de vos jeûnes se rencontrent vos exigences ; tous ceux qui dépendent de vous, vous les piquez de votre aiguillon ; c’est au milieu des procès et des litiges que vous jeûnez ; de vos poings vous frappez le petit ; à quoi bon jeûner en mon honneur ? » (Is 68, 3-4) De quelle qualité peut bien être le jeûne de cet homme, si sa colère, je ne dis pas seulement dure jusqu’à la nuit, mais persiste après une lunaison tout entière ? Quand tu médites sur toi-même, ne fonde pas ta gloire sur la chute d’autrui, mais sur la valeur même de ton acte.

38. Ne te propose pas comme exemples celles qui, adonnées aux soucis charnels, calculent les revenus de leurs propriétés et les dépenses quotidiennes de leur maison. Les onze apôtres, en effet, n’ont pas été abattus par la trahison de Judas ; quand Phygèle et Alexandre ont fait naufrage, les autres n’ont pas arrêté la course de leur foi. Ne dis pas : ’Telle ou telle jouit de sa fortune ; tous l’honorent ; les frères et les soeurs se réunissent chez elle ; aurait-elle pour autant cessé d’être vierge ? Car « ce n’est pas comme voit l’homme, que Dieu verra, l’homme voit le visage, Dieu voit le cœur » (1 S 16, 7). Ensuite : si elle est vierge de corps, est-elle vierge en esprit ? Je l’ignore. Or, voici comment l’Apôtre défini la vierge : « Qu’elle soit sainte et de corps et d’esprit. » (1 Co 7, 34). Et, après tout, qu’elle garde pour soi sa propre gloire ; qu’elle l’emporte sur la décision de Paul, qu’elle mène, s’il lui plaît, une vie de jouissance et de plaisirs ! Pour nous, suivons les exemples des meilleurs. Propose-toi celui de la bienheureuse Marie, dont la pureté fut telle qu’elle mérita d’être la mère du Seigneur. Comme l’ange Gabriel était descendu jusqu’à elle sous l’aspect d’un homme disant : « Salut, pleine de grâce, le Seigneur est avec toi » (Lc 1, 28), dans son effroi elle ne put lui répondre ; jamais, en effet, un homme ne l’avait saluée. Ensuite, elle écoute le message et prend la parole ; elle avait eu peur d’un homme, elle converse sans crainte avec un ange.

Toi aussi, tu peux être la mère du Seigneur ! « Prends-toi une grande tablette, neuve, traces-y des caractères avec un style d’homme qui rapidement emporterait un butin » (Is 8, 1), et quand tu te seras approchée de la prophétesse, que tu auras conçu dans tes entrailles et enfanté un fils, dis : « De par ta crainte, Seigneur, nous avons conçu, souffert, enfanté ; l’esprit de ton salut, nous l’avons accompli sur terre » (Is 26, 18). Alors ton fils te répondra : « Voici ma mère et mes frères. » (Mt 12, 49) Chose admirable ! Celui que tout à l’heure tu décrivais, dans la générosité de tes sentiments, celui que d’un cœur nouveau et d’un style ailé tu avais dessiné, après avoir pris du butin aux ennemis, mis à nu Principautés et Puissances et les avoir cloués à la croix, une fois conçu il grandit ; devenu adulte il te reçoit pour épouse des mains de sa mère. Grand labeur, certes, mais grande récompense d’être ce que sont les martyrs, ce que sont les apôtres, ce qu’est le Christ. Tout cela n’est utile au salut qui c’est fait dans l’Église, si dans cette unique maison nous célébrons la Pâque, si nous entrons dans l’arche avec Noé [72], si, tandis qu’on détruit Jéricho, Raab la justifiée [73] nous abrite. Mais les vierges que l’on dit exister dans diverses sectes hérétiques ou chez le très impur Manès, il faut les réputer courtisanes, et non pas vierges. Si, en effet, c’est le diable qui est l’auteur de leur corps [74], comment pourraient-elles honorer la figurine modelée par leur ennemi ? Mais, sachant que le nom de vierge est glorieux, sous leur toison de brebis ce sont des loups qui se cachent. C’est le Christ que caricature l’Antéchrist ; leur vie honteuse, elles la travestissent sous l’honneur d’un nom usurpé. Réjouis-toi, ma soeur ; réjouis-toi, ma fille ; réjouis-toi, ma vierge ; ce que d’autres simulent, toi, c’est en toute vérité que tu as commencé de l’être.

39. Toutes ces considérations paraîtront sévères à qui n’aime pas le Christ. Mais celui qui tient pour excréments toute la pompe du siècle, qui estime vain tout ce qui est sous le soleil, afin de gagner le Christ [75], celui qui est mort avec son Seigneur, ressuscité avec lui, qui a crucifié sa chair avec ses vices et convoitises [76], celui-là s’écriera en toute liberté : « Qui nous séparera de la charité du Christ ? la tribulation ? l’angoisse ? la persécution ? la faim ? la nudité ? le péril ? le glaive ? » (Ro 8, 35) Et encore : « Mais je suis sûr que ni mort, ni vie, ni ange, ni principauté, ni présent, ni futur, ni force, ni sommet, ni abîme, ni aucune autre créature ne pourra nous sevrer de la charité de Dieu, qui est dans le Christ Jésus Notre-Seigneur » (Ro 8, 38-39).

Fils de Dieu, pour notre salut il est devenu fils d’homme. Dix mois, dans un sein, il attend de naître, il supporte les ennuis [77], est éjecté tout sanglant ; enveloppé de langes, il sourit aux caresses, et lui, dont la main pourrait contenir le monde, il est emprisonné dans l’étroitesse d’une crèche. Et j’en passe ! Jusqu’à sa trentième année, obscur, il se contente de la pauvreté de ses parents ; on le frappe, et il se tait ; on le crucifie, et il prie pour ceux qui le crucifient. « Que rendrai-je dès lors au Seigneur, pour tous les bienfaits dont il m’a comblé ? Je prendrai le calice du salut et j’invoquerai le nom du Seigneur » (Ps 115, 3-4) ; « précieuse en présence du Seigneur est la mort de ses saints » (Ps 115, 6). Il n’y a d’autre rétribution méritoire que de compenser le sang par le sang ; rédimés par le sang du Christ, nous succombons volontiers pour notre Rédempteur. Quel saint a jamais été couronné sans combat ? Abel le juste est tué [78]. Abraham risque de perdre sa femme [79]… ; mais je ne veux pas développer ce thème en un volume démesuré ; cherche toi-même ; tu le trouveras sans peine : chacun a souffert à sa manière. Seul Salomon a vécu dans les délices [80] ; de là probablement sa chute. « Car celui qu’aime le Seigneur, il le réprimande ; il châtie tous les enfants qu’il agrée » (He 12, 6). N’est-il pas préférable de combattre pendant une courte période, de porter le pieu, les armes, les provisions, de se fatiguer sous la cuirasse pour, ensuite, se réjouir comme vainqueur, plutôt que, pour n’avoir pas su pâtir une heure, de subir une éternelle servitude ?

40. Rien n’est dur à qui aime ; à qui désire, nul effort n’est difficile. Vois tout ce que supporte Jacob pour Rachel, à lui promise pour épouse. « Jacob servit, dit l’Écriture, sept années pour Rachel. Elles lui parurent comme peu de jours, parce qu’il l’aimait » (Gn 29, 20). Aussi lui-même évoque-t-il plus tard ses souvenirs : « le jour me brûlait la chaleur, et la nuit la gelée » (Gn 31, 40). Aimons nous aussi le Christ, recherchons toujours ses embrassements, et tout le difficile nous semblera facile. Nous estimerons court tout ce qui est long ; blessés par son javelot d’amour [81], nous dirons au fil des heures : « Hélas ! comme mon exil se prolonge ! Les souffrances de ce monde sont sans proportion avec la gloire future qui se révélera en nous, car la tribulation crée la patience, la patience crée la probation, et la probation l’espérance ; or l’espérance ne déçoit pas » (Ps 119, 5). Quand ce que tu supportes te semble pesant, lis la Deuxième aux Corinthiens de Paul : « À travers mille souffrances, en prison très souvent, battu sans mesure, fréquemment exposé à la mort — des Juifs, j’ai reçu cinq fois quarante coup moins un, trois fois j’ai été battu de verges, une fois lapidé, trois fois j’ai fait naufrage, nuit et jour j’ai été au fond de la mer ; j’ai très souvent voyagé : périls des cours d’eau, périls des voleurs, périls du fait de ma race, périls du fait des païens, périls en ville, périls au désert, périls en mer, périls de par les faux frères ; parmi les souffrances, les misères, les veilles nombreuses, la faim et la soif, les jeûnes fréquents, le froid et la nudité. » (2 Co 11, 23-27) Qui de nous peut revendiquer pour soi une part, même minime, du catalogue de ces hauts faits ? Aussi pouvait-il dire plus tard en toute confiance : « J’ai achevé ma course, j’ai gardé ma foi. Il me reste à attendre la couronne de justice, que me décernera le Seigneur » (2 Tim 4, 7-8). La nourriture est-elle trop fade, nous voilà tristes et nous croyons rendre service à Dieu [82] ; si notre vin est un peu trop mouillé d’eau, on brise la coupe, on renverse la table, les coups retentissent ; une eau trop tiède est punie par le sang [83]. « Le royaume des cieux souffre violence et les violents le ravissent » (Mt 11, 12) Si tu ne te fais pas violence, tu n’emporteras pas le royaume des cieux ; si tu ne heurtes la porte jusqu’à l’importunité, tu ne recevras pas le pain mystérieux. Et n’est-ce pas un état de violence, quand la chair ambitionne d’être ce qu’est Dieu, et de monter au sommet d’où furent précipités les anges, pour juger elle-même les anges ?

41. Quitte un instant, je te prie, le monde corporel ; offre à tes yeux le tableau de la récompense que méritera la souffrance d’aujourd’hui, cette récompense que « ni l’œil de l’homme n’a vue, ni l’oreille entendue, et qui n’est pas montée jusqu’au cœur de l’homme » (1 Co 2, 9). Quel beau jour ce sera, quand Marie, la mère du Seigneur, s’avancera vers toi escortée des chœurs virginaux, quand [un autre Marie [84]], après le passage de la mer Rouge et la submersion de Pharaon avec son armée, s’accompagnant du tympanon, préludera aux répons de la foule : « Chantons le Seigneur ; il est glorieux et magnifique ; le cheval et le cavalier, il les a jetés dans la mer ! » (Ex 15, 1) Alors, Thècle [85], joyeuse, volera pour t’embrasser. Alors l’Époux lui-même s’avancera et dira : « Lève-toi, viens, mon amie, ma toute belle, ma colombe, car l’hiver a passé, la pluie s’en est allée ! » (Cant 2, 10-11) Alors, les anges émerveillés s’écrieront : « Qui est celle-ci, qui a l’aspect de l’aurore, belle comme la lune, élue comme le soleil ? À ta vue, les filles du roi te loueront ; reines et concubines t’exalteront [86] » (Cant 6, 9).

Puis s’avancera aussi un autre chœur de chasteté : Sara viendra avec les femmes mariées, Anne, fille de Phanuel [87], avec les veuves. Comme en des troupeaux différents, celui de la chair et celui de l’esprit, elles te serviront de mères. Celle-là se réjouira, parce qu’elle a enfanté, celle-ci exultera, parce qu’elle a enseigné. Alors vraiment le Seigneur montera sur l’ânesse et fera son entrée dans la céleste Jérusalem ; alors les enfants dont parle le Sauveur en Isaïe : « Me voici, avec les enfants que m’a donnés le Seigneur » (Is 8, 18), brandissant les palmes de la victoire, chanteront à l’unisson : « Hosanna dans les hauteurs, béni celui qui vient au nom du Seigneur ; hosanna dans les hauteurs ! » (Mt 21, 9) Alors les cent quarante-quatre mille élus [88], en présence du trône et des vieillards, tiendront leurs cithares ; ils chanteront le cantique nouveau — or, nul ne peut savoir ce cantique, si ce n’est le nombre prédestiné : « Les voici, ceux qui ne se sont pas souillés avec les femmes, car ils sont restés vierges » (Ap 14, 4) ; les voici ceux qui suivent l’Agneau partout où il va !

Chaque fois que t’alléchera la vaine pompe du siècle, chaque fois que dans le monde tu remarqueras quelque objet fastueux, émigre en esprit au Paradis. Comme d’être ici-bas ce que tu seras là-haut. Alors tu entendras la voix de ton Époux : « Place-moi comme un sceau sur ton cœur, comme un sceau sur ton bras » (Cant 8, 6). Pareillement fortifiée par tes actes et par tes pensées, tu t’écrieras : « Les grandes eaux ne sauraient éteindre l’amour, ni les torrents les submerger ! » (Cant 8, 7).

Source :

Saint Jérôme, Lettres, t. 1, Les Belles Lettres, Paris 1949, p. 110-160, avec l’aimable autorisation de publication pour un an de Mme Laure de Chantal, responsable d’édition.

[1] C’est-à-dire : les instincts physiques suffisent, dans beaucoup de cas, à faire succomber les ascètes, sans même l’intervention du démon.

[2] D’après 1 P 5, 8.

[3] D’après Am 4, 2.

[4] D’après Lc 22, 31.

[5] C’est-à-dire Adam.

[6] Selon le «  vieil homme  » que symbolise Adam pécheur, et non selon «  l’homme nouveau  » qui est le Christ.

[7] Allusion 1 Co 9, 27.

[8] Allusion à la parabole célèbre de Mt 25, 1-12.

[9] Cette doctrine est très fréquemment exposée dans le Nouveau Testament, p. ex. 1 Co 6, 15.

[10] Cousin a ici le sens d’amant.

[11] Cette comparaison réaliste n’est pas de l’invention de saint Jérôme  ; elle se rencontre fréquemment dans les écrits des prophètes (par exemple Éz 16).

[12] Cf. Énéide 8, 389.

[13] Cf. Salluste, Jugurtha 19, 6.

[14] C’est-à-dire : de n’être plus aussi fervent qu’au début de ma profession monacale.

[15] Allusion au miracle de la tempête apaisée, Lc 8, 24. Les «  menaces  » du Maître ne s’adressaient pas au saint moine, mais aux éléments déchaînés et aux démons qu’ils représentent.

[16] Timothée fut l’un des compagnons habituels de saint Paul dans ses missions. Il était chétif et timide, malgré son énergie. Cf. Spicq, Les épîtres pastorales, 1947, p. xxxv.

[17] C’est-à-dire : peu civilisé, inexpérimenté.

[18] Où il s’était établi pour fuir le cataclysme de Sodome, Gn 19, 30-38. Les descendants des filles de Loth étaient réprouvés en raison de leur origine.

[19] Céréale apparentée au blé, mais de qualité inférieure.

[20] Le point d’eau appelé Mara, dont Moïse adoucit miraculeusement les eaux saumâtres (d’après Ex 15, 25).

[21] D’après Dn 14, 32. Daniel, déjà dans la fosse aux liions, est nourri par Habacuc, qui lui apporte le frugal repas de ses ouvriers.

[22] D’après Gn 32, 25.

[23] C’est-à-dire : je ne me priverai pas pour cela de communier  ; l’usage romain de cette époque était que les fidèles pussent communier chez eux tous les jours, s’ils le désiraient.

[24] Comme Jésus à Nazareth (voir Lc 2, 59).

[25] Au lieu d’aller visiter les diverses catacombes où ils sont vénérés. Cette époque est précisément celle où s’épanouit davantage à Rome le culte des martyrs. Le pape Damase aménage leurs cryptes et les orne d’inscriptions versifiées, plus remarquables, à vrai dire, par la beauté des caractères que par celle du style.

[26] La cigale est un insecte très répandu dans les pays chauds. Le mâle émet de jour sans arrêt des sons stridents et monotones, que les anciens — surtout les Grecs — jugeaient exquis et mélodieux. En qualifiant Eustochium de ’cigale des nuits’, Jérôme entend lui signifier, non seulement que son oraison doit être continuelle, mais qu’elle se poursuivra avec efficacité pendant le recueillement et le silence de la nuit. On sait que l’Église catholique a conservé cette tradition, et que les Nocturnes du bréviaire doivent, en principe, être chantés ou récités la nuit.

[27] D’après Ps 6, 7.

[28] D’après Ps 101, 8.

[29] C’est-à-dire qu’elle fut fécondée sans le concours d’un homme, de même que Dieu engendra son Fils sans le concours d’une mère.

[30] Cette expression a été fort critiquée par Rufin. Toxotius, frère d’Eustochie, et sa femme Laeta, vouèrent à la virginité, dès sa naissance, leur fille Paula.

[31] Cf. Judith 13, 14-21.

[32] Il s’agit d’un feu métaphorique. En réalité, Assuérus condamna Aman à la pendaison pour avoir excité le roi contre les Juifs.

[33] Cf. 1 Co 7, 34.

[34] Cf. Horace, Sat. I, 1, 56.

[35] L’évêque de Milan est ici qualifié de ’notre’, soit parce qu’il a écrit en latin et non en grec, soit parce qu’il fréquentait le cercle des amis de Paula et de Jérôme (à supposer que Marcellina de la lettre 45, 7, soit bien la propre soeur d’Ambroise à qui il dédie son traité sur la virginité). Saint Ambroise avait participé, aux côtés du pape Damase, au concile romain de 382. Plus tard, Jérôme formulera à son endroit des réserves sévères, au moment de la controverse origéniste.

[36] Le palais de Paula, où Eustochie habitait une chambre retirée. La vigilance n’était pas superflue. Poussée par son mari Hymatius, la propre tante d’Eustochie, Prétextata, s’empara un jour par force de sa personne, accommoda sa chevelure et ses vêtements au goût de la mode et prétendit faire rentrer dans le circuit mondain cette jeune fille de dix-sept à dix-huit ans. Pour les vertus monacales, le palais de Paul était un abri moins sûr que ne fut plus tard le couvent de Bethléem.

[37] Gn 34.

[38] En sortant de sa chambre, même pour se rendre dans le palais de sa mère, Eustochie rencontrerait des femmes ou des jeunes filles de l’aristocratie, les unes encore païennes, les autres purement mondaines, d’une religion moins élevée et moins exigeante, étrangère à son unique préoccupation, qui est de chercher Dieu. D’autre part, Dieu est ’jaloux’, comme en témoignent maints passages des Écritures. De même qu’il abhorrait toute trace de polythéisme, de même Jésus ne veut pas d’un cœur partagé.

[39] Allusion aux vierges folles, d’après Mt 25, 12.

[40] C’est-à-dire : comme une courtisane.

[41] Cf. Pr 4, 23.

[42] C’est-à-dire : seront réprouvés  ; d’après Mt 25, 33.

[43] Cf. Mt 25, 10-12.

[44] Cf. Mt 6, 6.

[45] Cf. Dn 6, 10.

[46] Cf. Mt 6, 2-4.

[47] Cf. Mt 6, 16-18.

[48] Cf. Horace, Carmina, l. IV, iii, 22.

[49] Il s’agit ici d’un chrétien, d’une chrétienne quelconque, non pas d’un membre de la famille d’Eustochie.

[50] Cf. Horace, Sat., l. I, vi, 65-67.

[51] Mt 6, 16.

[52] Cf. 1 Co 9, 14.

[53] C’est-à-dire : moines comme moi-même.

[54] Expression que l’on peut traduire par : vieux soiffard.

[55] Diomède, roi des Bistoniens, qui passait pour nourrir ses chevaux avec la chair des prisonniers, et fut vaincu par Hercule. Claudien emploie aussi cette métaphore.

[56] Ou bien : tout ce qui est naturel.

[57] Littéralement : ’châtré’  ; allusion à Mt 19, 12.

[58] Rufin, devenu son ennemi, reprochera à Jérôme d’avoir cependant enfreint ce serment en faveur des écoliers qu’il instruisait à Bethléem. Il répondra : le fait est ancien, «  les prophètes interdisent de croire aux rêves  », enfin il est souvent victime d’affreux cauchemars  ! «  veut-on le tuer pour cela  ?  » Voir aussi : Virgile. Énéide. vi, 568.

[59] Sur la réalité de ce songe fameux, voir de Labriolle, Miscellanea Geronimiana, 217-239  ; Collombet, Histoire de saint Jérôme, t. 1, p. 122-143, et surtout Cavallera, t. ii, p. 76-78. Ces deux derniers auteurs soulignent avec raison le curieux parallèle que présente le songe de Tutuslymeni, rapporté par saint Augustin au sermon 308.

[60] Mais qu’elle s’apprête à vider pour vêtir les pauvres.

[61] Sans doute les évangéliaires et autres livres liturgiques.

[62] Allusion à la parabole du mauvais riche, Lc 10, 20.

[63] D’après Térence, Eun. 236.

[64] D’après Mt 6, 33.

[65] Au paralytique qui mendiait à la porte du Temple (Ac 3, 6).

[66] D’après 1 Tim 6, 8.

[67] C’est-à-dire : père de nombreux enfants.

[68] L’un des plus fameux déserts d’Égypte, au sud-ouest d’Alexandrie.

[69] Selon l’Évangile (Mt 6, 16-18), le jeûne devrait être tenu secret par ceux qui le pratiquent  ; ces moines en font un match dont ils publient les résultats.

[70] Qui défend de jeûner pendant le temps pascal.

[71] Cf. de Bello Iudaico II, 8, 2-13, cité par Jérôme lui-même dans Adu. Iouin. II, 14. Mais, remarque Courcelle (Les lettres grecques, p. 73), Josèphe ne dit rien de semblable dans le passage allégué. Jérôme plagierait un passage de Porphyre qu’il a lu trop rapidement.

[72] Cf. Gn 6, 8.

[73] Cf. Jos 6, 17.25.

[74] Selon les Manichéens, le corps est mauvais et principe de tout mal.

[75] Cf. Phi 3, 8  ; 2 Tim 2, 11  ; Col 3, 1.

[76] Cf. Ga 5, 24.

[77] De la parturition.

[78] Cf. Gn 4, 8.

[79] Cf. Gn 12, 1-20, et 20, 2-18.

[80] Cf. 1 R 11, 1-10.

[81] «  Blessés par son javelot d’amour.  » Cette expression est la réplique des mots du Cant 4, 9.

[82] En la mangeant tout de même  ; comme si ce sacrifice était avantageux à Dieu.

[83] C’est-à-dire : qu’on fouette jusqu’au sang l’esclave maladroite ou qu’on la pique cruellement avec une aiguille, comme faisaient les matrones irritées.

[84] La soeur de Moïse, assimilée ici par homonymie à la mère de Notre Seigneur.

[85] Célèbre vierge martyre du premier siècle.

[86] D’après Cant 6, 8.

[87] Cf. Lc 2, 36.

[88] D’après Ap 14, 1-3.

SOURCE : http://www.patristique.org/Jerome-lettre-XXII-a-Eustochium.html

Juan de Valdés Leal  (1622–1690). Santa Eustoquio, 1656, 207 x 154, Barnard Castle, Bowes Museum


Saint Eustochium

Memorial

28 September

Profile

Daughter of Saint Paula of Rome and Roman senator Toxotius. Sister of Saint Blaesilla. Spiritual student of Saint Jerome in 382. Made a personal vow of perpetual virginity. Spoke Latin and Greek, and could read Hebrew. Travelled with Paula and Jerome to the Holy Land where she helped with the Vulgate Bible translation, working as Jerome‘s housekeeper, reading and writing for him when his eyesight began to fail. When Paula died in 404, Eustochium took over the spiritual direction of three women‘s communities formerly guided by her mother.

Born

c.369 at RomeItaly

Died

c.419 at Bethlehem of natural causes

Canonized

Pre-Congregation

Additional Information

Book of Saints, by the Monks of Ramsgate

Catholic Encyclopedia

Letter to Eustochium, by Saint Jerome

Lives of the Saints, by Father Alban Butler

New Catholic Dictionary

Saints of the Day, by Katherine Rabenstein

books

Our Sunday Visitor’s Encyclopedia of Saints

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“Saint Eustochium“. CatholicSaints.Info. 12 November 2021. Web. 28 September 2023. <https://catholicsaints.info/saint-eustochium/>

SOURCE : https://catholicsaints.info/saint-eustochium/

St. Eustochium Julia

Virgin, born at Rome c. 368; died at Bethlehem, 28 September, 419 or 420. She was the third of four daughters of the Roman Senator Toxotius and his wife St. Paula, the former belonging to the noble Julian race, the latter tracing her ancestry through the Spipios and the Gracchi (Jerome, Ep. cxviii). After the death of her husband (c. 380) Paula and her daughter Eustochium lived in Rome as austere a life as the Fathers of the desert. When St. Jerome came to Rome from Palestine in 382, they put themselves under his spiritual guidance. Hymettius, an uncle of Eustochium, and his wife Praetextata tried to persuade the youthful Eustochium to give up her austere life and enjoy the pleasures of the world, but all their attempts were futile. About the year 384 she made a vow of perpetual virginity, on which occasion St. Jerome addressed to her his celebrated letter "De custodia virginitatie" (Ep. xxii in P.L., XXII, 394-425). A year later St. Jerome returned to Palestine and soon after was followed to the Orient by Paula and Eustochium. In 386 they accompanied St. Jerome on his journey to Egypt, where they visited the hermits of the Nitrian Desert in order to study and afterwards imitate their mode of life. In the fall of the same year they returned to Palestine and settled permanently at Bethlehem. Paula and Eustochium at once began to erect four monasteries and a hospice near the spot where Christ was born. While the erection of the monasteries was in process (386-9) they lived in a small building in the neighbourhood. One of the monasteries was occupied by monks and put under the direction of St. Jerome. The three other monasteries were taken by Paula and Eustochium and the numerous virgins that flocked around them. The three nunneries, which were under the supervision of Paula, had only one oratory, where all the nuns met several times daily for prayer and the chanting of psalms. St. Jerome testifies (Ep. 308) that Eustochium and Paula performed the most menial services. Much of their time they spent in the study of Holy Scripture under the direction of St. Jerome.

Eustochium spoke Latin and Greek with equal ease and was able to read the Holy Scripture in the Hebrew text. Many of St. Jerome's Biblical commentaries owe their existence to her influence and to her he dedicated his commentaries on the prophets Isaias and Ezechiel. The letters which St. Jerome wrote for her instruction and spiritual advancement are, according to his own testimony (Illustrious Men 135), very numerous. After the death of Paula in 404, Eustochium assumed the direction of the nunneries. Her task was a difficult one on account of the impoverished condition of the temporal affairs which was brought about by the lavish almsgiving of Paula. St. Jerome was of great assistance to her by his encouragement and prudent advice. In 417 a great misfortune overtook the monasteries at Bethlehem. A crowd of ruffians attacked and pillaged them, destroyed one of them by fire, besides killing and maltreating some of the inmates. The wicked deed was probably instigated by John, the Patriarch of Jerusalem, and the Pelagians against whom St. Jerome had written some sharp polemics. Both St. Jerome and St. Eustochium informed Pope Innocent I by letter of the occurrence, who severely reproved the patriarch for having permitted the outrage. Eustochium died shortly after and was succeeded in the supervision of the nunneries by her niece, the younger Paula. The Church celebrates her feast on 28 September.

Ott, Michael. "St. Eustochium Julia." The Catholic Encyclopedia. Vol. 5. New York: Robert Appleton Company, 1909. 28 Sept. 2015 <http://www.newadvent.org/cathen/05629a.htm>.

Transcription. This article was transcribed for New Advent by Marcia L. Bellafiore.

Ecclesiastical approbation. Nihil Obstat. May 1, 1909. Remy Lafort, Censor. Imprimatur. +John M. Farley, Archbishop of New York.

Copyright © 2021 by Kevin Knight. Dedicated to the Immaculate Heart of Mary.

SOURCE : http://www.newadvent.org/cathen/05629a.htm

September 28

St. Eustochium, Virgin

THIS holy virgin, whose memory is rendered illustrious by the pen of St. Jerom, was daughter of St. Paula, whose admirable life, after her entire conversion to God, this saint faithfully copied. St. Paula, upon the death of her husband Toxotius, retrenched all splendour and magnificence in her household, and devoted herself wholly to God in a life of simplicity, poverty, mortification, and assiduous prayer. Eustochium entered into all the pious views of her mother, and rejoiced to consecrate all the hours which so many mispend in vain amusements, to the exercises of charity and religion, and to see the poor relieved with what other ladies throw away to maintain their idleness, luxury, and pride, converting the blessings of God into their most grievous misfortunes, and the means of salvation and virtue into their most heavy condemnation. Eustochium often visited, and received instructions from St. Marcella, the first of her sex in Rome who embraced an ascetic or retired austere life, for the more perfect exercise of virtue.

St. Jerom left Rome in 385, and Eustochium bore her mother company in all her journies through Syria, Egypt, and Palestine, and settled with her in her monastery at Bethlehem. After the death of St. Paula in 404, Eustochium was chosen abbess in her room. Having St. Jerom for her master, she was learned above her sex, and was well skilled in the Hebrew language. St. Jerom dedicated to her his Comments on Ezechiel and Isaias, and translated the rule of St. Pachomius into Latin, for the use of her nuns. A troop of Pelagian heretics burnt down her monastery in 416, and committed many outrages; of which St. Eustochium, and her niece, the younger Paula, informed by letter Pope Innocent I., who wrote in strong terms to John, bishop of Jerusalem, charging him to put a stop to such violences, adding that otherwise he should be obliged to have recourse to other means to see justice done to those who were injured. St. Eustochium was called to receive the reward which God bestows on the wise virgins about the year 419. Her body was interred near that of her mother, St. Paula. See St. Jerom, l. de Virgin, et ep. 22, 26, 27.

Knowing the infinite importance of a good guide in a spiritual life, our devout virgin, about the year 382, put herself under the direction of St. Jerom, and made a solemn vow of virginity. To commend her resolution, and to instruct her in the obligations of that state, he composed his treatise On Virginity, otherwise called his letter to Eustochium on that subject, towards the latter end of the pontificate of Damasus, about the year 383. In this treatise, having spoken of the excellency of the state of virginity, and of the difficulty of preserving, and the danger of losing the great treasure of purity, he lays down precepts which a virgin is to observe in order to keep herself pure. The first thing he prescribes, is sincere humility, and a great fear of losing this virtue. The second, is constant watchfulness over the heart and senses against all dangers, rejecting the very first suggestions of evil thoughts, killing the enemy before he gains strength, and crushing the least seeds of temptation. The third, is extraordinary temperance in eating and drinking. He forbids her dainty fare, effeminacy, pleasures, and superfluous ornaments. He enjoins her to forbear ever drinking any pure wine, which he calls a poison in youth, and throwing oil upon a flame. He would not have fasts carried to excess, and rather commends such as are moderate, but constant; and he enjoins that a person always rise from his meals with an appetite. He recommends solitude, and all Christian virtues, and gives a charge to the virgin, that she never visit those ladies whose dress and discourse have any tincture of the spirit of the world; and adds: “Go very seldom abroad, not even to honour the martyrs: honour them in your chamber.” St. Jerom gives Eustochium useful documents concerning the exercise of assiduous prayer, and puts her in mind (besides the hours of Morning, Evening, Tierce, Sext, and None, which all know to be consecrated to public prayer) that she ought to rise twice or thrice in the night to pray, and never to omit this duty before and after meals, before going abroad, and after coming in, and on all occasions; and that at every action she ought to make the sign of the cross. This venerable author relates, that when Eustochium was a child, her mother accustomed her to wear only plain ordinary clothes; but that one day her aunt Prætextata put on her rich apparel, and had her hair gracefully curled, according to the custom of young ladies of her quality: that in the night following Prætextata seemed to see in her sleep a terrible angel, who, with a threatening voice, reproached her for attempting to lay sacrilegious hands on a virgin consecrated to Christ, and to instil vanity into one who was consecrated his spouse

Rev. Alban Butler (1711–73).  Volume IX: September. The Lives of the Saints.  1866.

SOURCE : http://www.bartleby.com/210/9/283.html

Eustochium V (RM)

September 28

People clamour for stories about the irascible Saint Jerome, and Saint Eustochium's story converges with his.

St. Jerome was obviously well-loved by the matrons of Rome, though he did have a biting tongue. His counsel to St. Eustochium: "Set before your eyes the blessed Virgin Mary, whose purity was such that she earned the reward of being the mother of the Lord."

Saint Paula's life was such a powerful witness that she inspired her own daughter Eustochium, who was born in Rome c. 368, to sainthood. Eustochium was single for the Lord-- she consecrated herself to a life of virginity, having learned austerity from her widowed mother and St. Marcella.

The home of the widow Saint Marcella became a sort of monastery/school for the ladies, who devoted themselves to intense, scientific study of the Scriptures on their own. These patrician women of the capital city--SS Paula, Eustochium, Blaesilla, Marcella and her ward Principia, Marcellina (sister of St. Ambrose), Fabiola, Asella, and Lea (all saints)--encouraged one another to strive for Christian perfection. Living just prior to the fall of Rome, they did not wait until disaster forced the ascetic life upon them; they saw that luxury is out of place in a Christian.

When young, sarcastic Jerome arrived in Rome in 382, Marcella prevailed upon him to teach their group Hebrew and exegesis. And he did. Eustochium was given spiritual guidance and scriptural instruction by St. Jerome between 382-385 during his stay in Rome. Eustochium's sister St. Blaesilla threw herself so vehemently into the ascetic life that she died in 384. Paula was almost crazy with grief, but Jerome rebuked her and promised to glorify Blaesilla by writing about her. The group was very close urging each other on to sanctity. In fact, St. Paulina (Eustochium's other sister) married one of Jerome's school friends. When Paulina's children were stillborn and she died young, her husband became a monk.

When Jerome left Rome, St. Paula and her daughter Eustochium followed and joined St. Jerome at Antioch, Egypt, and Bethlehem.

Paula's fortune was added to what money Jerome possessed to found a monastery near Bethlehem. Jerome lived in a cave nearby 'to make sure (said Paula) that if Mary and Joseph came again to Bethlehem, there would be somewhere for them to stay.'

Three communities of women were founded close by St. Jerome's monastery, and Paula took charge of one of them. Eustochium took care of every material need, including the cooking. But Jerome relied on her for much more. He was busy translating the Bible into Latin. When his eyes began to fail, he would have been obliged to abandon the work, had not Eustochium and her mother been there to help him. He reckoned that they were better able to judge the value of his work than most men, and dedicated some of his writings to them.

When Paula died in 404, Eustochium (said Jerome) wished she could have been buried with her. But instead she took over the community abbey. She died in 418 or 419.

Eustochium's life is also documented by the many surviving letters and scriptural commentaries of St. Jerome, which are directed to Paula and Eustochium. Eustochium in her youth was the addressee of one of Jerome's most famous letter (Ep. 22)--a lengthy treatise on virginity. (In his letters to the women St. Jerome demonstrated true humanity and fatherly care.)

(Note: Since the universal Church celebrates St. Wenceslas, the martyr-king of Bohemia, on September 28 (died 929), St. Eustochium's feast is only celebrated locally.) 

SOURCE : http://www.saintpatrickdc.org/ss/0928.shtml

Eustochium

Biography: 

Julia Eustochium was the third daughter born to Paula and Toxotius. Her mother had adopted an ascetic life after the death of her husband and Eustochium, still quite young and a virgin, joined her in it. Jerome speaks of her having been trained in Marcella's cell, ep.127, and calls her a "paragon of virgins." Despite the attempts of her paternal (and pagan) uncle and aunt to draw her into the life of a rich aristocrat, she chose to remain a virgin and dedicated herself to a religious life, when she was 14 or 15. Jerome encouraged her in that choice and wrote her a treatise on preserving virginity (ep.22). (1)

Eustochium was trained in Latin and Greek and learned Hebrew, like her mother, to study the bible and work with Jerome on his translations. She accompanied her mother Paula to the Holy Land following Jerome in 385 and once they had settled in Bethlehem after visiting many holy sites, she lived there for the rest of her life. As Jerome had commented about them to another virgin in their circle, Asella, when he left Rome, Paula and Eustochium, "whether the world likes it or not, belong to me in Christ," ep.45. Paula died in 404, but Eustochium stayed, running their convent, by now home to fifty women, and working with Jerome until she died. Her niece, the younger Paula, joined her aunt perhaps in 410 and she remained with Jerome until his death. Jerome wrote many of his translations from Hebrew and commentaries on books of the old and new testament for Paula and her daughter, and after Paula died he continued to write for Eustochium.

Jerome sent greetings from the two younger women to Augustine in 416: "Your holy and venerable daughters, Eustochium and Paula, are progressing in a manner worthy of their own rank and your encouragement, and they send special greetings to your blessedness" (ep.134). When followers of Pelagius violently attacked the Latin monasteries at Bethlehem in 416, Pope Innocent I wrote to John of Jerusalem at the behest of the two women: "the most noble virgins of great clemency, Paula and Eustochium, deplored the plundering, slaughter, arson, and every outrage perpetrated against the places of your church by the devil," PL 20 c.601. They and Jerome had to leave their monasteries for a short while, but were able to return.

Jerome wrote to his friend Pammachius after the death in 395 of his wife Paulina, Eustochium's sister, (ep.66) praising the women of the family: Eustochium harvests the flowers of virginity, Paula rubs the laborious threshing-floor of widowhood, Paulina preserves the chaste bed of matrimony (66.2), and Pammachius joined them, making a "quadriga," a team of four horses from one house, which Jerome connects with the cardinal virtues, Pammachius with prudence, Paula with justice, the virgin with fortitude and the wife with temperance (66.3). Jerome divides the family group of five into the two who have died, Paulina and Blesilla, and the three who will fly together to Christ, Paula, and Eustochium, with Pammachius between them (66.15). But Jerome adds even if you did all I said, you would be conquered by Paula and Eustochium, if not in deed then in sex (66.13).

Only three letters from Jerome to Eustochium are to be found in his collected letters, the one on virginity, ep.22, a thank-you note for gifts she had sent, ep.31, and a eulogy of her dead mother, Paula, ep.108. Jerome says, in De viris illustribus, ch.135, that he wrote to Paula and Eustochium every day while they were in Bethlehem. Those letters are not extant, but the prologues attached to the works and sometimes to the individual parts of the works he did for them are, and they constitute a fair-sized body of correspondence. Only one letter from Eustochium and her mother is extant, the one inviting Marcella to visit them in the Holy Land, which may be primarily the work of Paula (though, of course, it has also been attributed to Jerome). (2)

After Eustochium died, Jerome described his enormous sense of loss to his friends: to Riparius, "the sudden dormition/death of the venerable holy virgin of Christ Eustochium saddened me greatly and utterly changed the state of our life, since we cannot do many things we want to and the weakness of old age conquers the mind's ardor," ep.151; to Donatus, "the dormition of the holy and venerable lady Eustochium has violently saddened us, who as you know gave up her spirit in that ardor of confession and preferred to leave her home and familiar things and endure honorable exile rather than be stained by intercourse with heretics," ep.154. (3)

Biographical notes: 

(1) Jerome mentions this letter in the list he gives of his works in Liber de viris illustribus, ch.135, PL23, c.758, "ad Eustochium de virginitate servanda." (2) J.N.D. Kelly says the letter was "written in the name of Paula and her daughter but manifestly by Jerome himself," though he gives no reason for the judgment, Jerome, His Life, Writings, and Controversies (New York: Harper and Row, 1975), 141. Since Marcella knew all of them so well, it is hard to imagine why they would have bothered with such a subterfuge. (3) Sancti Eusebii Hieronymi Epistulae, ed. Isidorus Hilberg, 3 v. (New York: Johnson, 1970, repr.1910-18), ep.151.2: nos sanctae [ac] venerabilis virginis Christi Eustochiae repentina dormitio admodum contristavit et paene conversationis nostrae mutavit statum, dum quoque, quae volumus, multa non possumus et mentis ardorem superat inbecillitas senectutis; ep.154.2: Sanctae et venerabilis domnae Eustochiae nos vehementer dormitio contristavit, quam in ipso confessionis ardore sciatis spiritum reddidisse, libentiusque habuit et rem familiarem et domum suum dimittere et honorata exilia sustinere quam hereticorum conmunione maculari.

SOURCE : http://epistolae.ccnmtl.columbia.edu/woman/33.html

Saint Jerome: Letter 23: to Eustochium

1. “Hear, O daughter, and consider, and incline thine ear; forget also thine own people and thy father’s house, and the king shall desire thy beauty.” In this forty-fourth psalm God speaks to the human soul that, following the example of Abraham, it should go out from its own land and from its kindred, and should leave the Chaldeans, that is the demons, and should dwell in the country of the living, for which elsewhere the prophet sighs: “I think to see the good things of the Lord in the land of the living.” But it is not enough for you to go out from your own land unless you forget your people and your father’s house; unless you scorn the flesh and cling to the bridegroom in a close embrace. “Look not behind thee,” he says, “neither stay thou in all the plain; escape to the mountain lest thou be consumed.” He who has grasped the plough must not look behind him or return home from the field, or having Christ’s garment, descend from the roof to fetch other raiment. Truly a marvellous thing, a father charges his daughter not to remember her father. “Ye are of your father the devil, and the lusts of your father it is your will to do.” So it was said to the Jews. And in another place, “He that committeth sin is of the devil.” Born, in the first instance, of such parentage we are naturally black, and even when we have repented, so long as we have not scaled the heights of virtue, we may still say: “I am black but comely, O ye daughters of Jerusalem.” But you will say to me, “I have left the home of my childhood; I have forgotten my father, I am born anew in Christ. What reward do I receive for this?” The context shows – “The king shall desire thy beauty.” This, then, is the great mystery. “For this cause shall a man leave his father and his mother and shall be joined unto his wife, and they two shall be” not as is there said, “of one flesh,” but “of one spirit.” Your bridegroom is not haughty or disdainful; He has “married an Ethiopian woman.” When once you desire the wisdom of the true Solomon and come to Him, He will avow all His knowledge to you; He will lead you into His chamber with His royal hand; He will miraculously change your complexion so that it shall be said of you, “Who is this that goeth up and hath been made white?”

2. I write to you thus, Lady Eustochium (I am bound to call my Lord’s bride “lady”), to show yon by my opening words that my object is not to praise the virginity which you follow, and of which you have proved the value, or yet to recount the drawbacks of marriage, such as pregnancy, the crying of infants, the torture caused by a rival, the cares of household management, and all those fancied blessings which death at last cuts short. Not that married women are as such outside the pale; they have their own place, the marriage that is honorable and the bed undefiled. My purpose is to show you that you are fleeing from Sodom and should take warning by Lot’s wife. There is no flattery, I can tell you, in these pages. A flatterer’s words are fair, but for all that he is an enemy. You need expect no rhetorical flourishes setting you among the angels, and while they extol virginity as blessed, putting the world at your feet.

3. I would have you draw from your monastic vow not pride but fear. You walk laden with gold; you must keep out of the robber’s way. To us men this life is a race-course we contend here, we are crowned elsewhere. No man can lay aside fear while serpents and scorpions beset his path. The Lord says: “My sword hath drunk its fill in heaven,” and do you expect to find peace on the earth? No, the earth yields only thorns and thistles, and its dust is food for the serpent. “For our wrestling is not against flesh and blood, but against the principalities, against the powers, against the world-rulers of this darkness, against the spiritual hosts of wickedness in the heavenly places.” We are hemmed in by hosts of foes, our enemies are upon every side. The weak flesh will soon be ashes: one against many, it fights against tremendous odds. Not till it has been dissolved, not till the Prince of this world has come and found no sin therein, not till then may you safely listen to the prophet’s words: “Thou shall not be afraid for the terror by night nor for the arrow that flieth by day; nor for the trouble which haunteth thee in darkness; nor for the demon and his attacks at noonday. A thousand shall fall at thy side and ten thousand at thy right hand; but it shall not come nigh thee.” When the hosts of the enemy distress you, when your frame is fevered and your passions roused, when you say in your heart, “What shall I do?” Elisha’s words shall give you your answer, “Fear not, for they that be with us are more than they that be with them.” He shall pray,” Lord, open the eyes of thine handmaid that she may see.” And then when your eyes have been opened you shall see a fiery chariot like Elijah’s waiting to carry you to heaven, and shall joyfully sing: “Our soul is escaped as a bird out of the snare of the fowlers: the snare is broken and we are escaped.”

4. So long as we are held down by this frail body, so long as we have our treasure in earthen vessels; so long as the flesh lusteth against the spirit and the spirit against the flesh, there can be no sure victory. “Our adversary the devil goeth about as a roaring lion seeking whom he may devour.” “Thou makest darkness,” David says, “and it is night: wherein all the beasts of the forest do creep forth. The young lions roar after their prey and seek their meat from God.” The devil looks not for unbelievers, for those who are without, whose flesh the Assyrian king roasted in the furnace. It is the church of Christ that he “makes haste to spoil.” According to Habakkuk, “His food is of the choicest.” A Job is the victim of his machinations, and after devouring Judas he seeks power to sift the [other] apostles. The Saviour came not to send peace upon the earth but a sword. Lucifer fell, Lucifer who used to rise at dawn; and be who was bred up in a paradise of delight had the well-earned sentence passed upon him, “Though thou exalt thyself as the eagle, and though thou set thy nest among the stars, thence will I bring thee down, saith the Lord.” For he had said in his heart, “I will exalt my throne above the stars of God,” and “I will be like the Most High.” Wherefore God says every day to the angels, as they descend the ladder that Jacob saw in his dream, “I have said ye are Gods and all of you are children of the Most High. But ye shall die like men and fall like one of the princes.” The devil fell first, and since “God standeth in the congregation of the Gods and judgeth among the Gods,” the apostle writes to those who are ceasing to be Gods–” Whereas there is among you envying and strife, are ye not carnal and walk as men?”

5. If, then, the apostle, who was a chosen vessel separated unto the gospel of Christ, by reason of the pricks of the flesh and the allurements of vice keeps under his body and brings it into subjection, lest when he has preached to others he may himself be a castaway; and yet, for all that, sees another law in his members warring against the law of his mind, and bringing him into captivity to the law of sin; if after nakedness, fasting. hunger, imprisonment, scourging and other torments, he turns back to himself and cries “Oh, wretched man that I am, who shall deliver me from the body of this death?” do you fancy that you ought to lay aside apprehension? See to it that God say not some day of you: “The virgin of Israel is fallen and there is none to raise her up.” I will say it boldly, though God can do all things He cannot raise up a virgin when once she has fallen. He may indeed relieve one who is defiled from the penalty of her sin, but He will not give her a crown. Let us fear lest in us also the prophecy be fulfilled, “Good virgins shall faint.” Notice that it is good virgins who are spoken of, for there are bad ones as well. “Whosoever looketh on a woman,” the Lord says, “to lust after her hath committed adultery with her already in his heart.” So that virginity may be lost even by a thought. Such are evil virgins, virgins in the flesh, not in the spirit; foolish virgins, who, having no oil, are shut out by the Bridegroom.

6. But if even real virgins, when they have other failings, are not saved by their physical virginity, what shall become of those who have prostituted the members of Christ, and have changed the temple of the Holy Ghost into a brothel? Straightway shall they hear the words: “Come down and sit in the dust, O virgin daughter of Babylon, sit on the ground; there is no throne, O daughter of the Chaldaeans: for thou shalt no more be called tender and delicate. Take the mill-stone and grind meal; uncover thy locks, make bare the legs, pass over the rivers; thy nakedness shall be uncovered, yea, thy shame shall be seen.” And shall she come to this after the bridal-chamber of God the Son, after the kisses of Him who is to her both kinsman and spouse? Yes, she of whom the prophetic utterance once sang, “Upon thy right hand did stand the queen in a vesture of gold wrought about with divers col ours,” shall be made naked, and her skirts shall be discovered upon her face. She shall sit by the waters of loneliness, her pitcher laid aside; and shall open her feet to every one that passeth by, and shall be polluted to the crown of her head. Better had it been for her to have submitted to the yoke of marriage, to have walked in level places, than thus, aspiring to loftier heights, to fall into the deep of hell. I pray you, let not Zion the faithful city become a harlot: let It not be that where the Trinity has been entertained, there demons shall dance and owls make their nests, and jackals build. Let us not loose the belt that binds the breast. When lust tickles the sense mad the soft fire of sensual pleasure sheds over us its pleasing glow, let us immediately break forth and cry: “The Lord is on my side: I will not fear what the flesh can do unto me.” When the inner man shows signs for a time of wavering between vice and virtue, say: “Why art thou cast down, O my soul, and why art thou disquieted within me? Hope thou in God, for I shall yet praise Him who is the health of my countenance and my God.” You must never let suggestions of evil grow on you, or a babel of disorder win strength in your breast. Slay the enemy while he is small; and, that you may not have a crop of tares, nip the evil in the bud. Bear in mind the warning words of the Psalmist: “Hapless daughter of Babylon, happy shall he be that rewardeth thee as thou hast served us. Happy shall he be that taketh and dasheth thy little ones against the stones.” Because natural heat inevitably kindles in a man sensual passion, he is praised and accounted happy who, when foul suggestions arise in his mind, gives them no quarter, but dashes them instantly against the rock. “Now the Rock is Christ.”

7. How often, when I was living in the desert, in the vast solitude which gives to hermits a savage dwelling-place, parched by a burning sun, how often did I fancy myself among the pleasures of Rome! I used to sit alone because I was filled with bitterness. Sackcloth disfigured my unshapely limbs and my skin from long neglect had become as black as an Ethiopian’s. Tears and groans were every day my portion; and if drowsiness chanced to overcome my struggles against it, my bare bones, which hardly held together, clashed against the ground. Of my food and drink I say nothing: for, even in sickness, the solitaries have nothing but cold water, and to eat one’s food cooked is looked upon as self-indulgence. Now, although in my fear of hell I had consigned myself to this prison, where I had no companions but scorpions and wild beasts, I often found myself amid bevies of girls. My face was pale and my frame chilled with fasting; yet my mind was burning with desire, and the fires of lust kept bubbling up before me when my flesh was as good as dead. Helpless, I cast myself at the feet of Jesus, I watered them with my tears, I wiped them with my hair: and then I subdued my rebellious body with weeks of abstinence. I do not blush to avow my abject misery; rather I lament that I am not now what once I was. I remember how I often cried aloud all night till the break of day and ceased not from beating my breast till tranquillity returned at the chiding of the Lord. I used to dread my very cell as though it knew my thoughts; and, stern and angry with myself, I used to make my way alone into the desert. Wherever I saw hollow valleys, craggy mountains, steep cliffs, there I made my oratory, there the house of correction for my unhappy flesh. There, also–the Lord Himself is my witness–when I had shed copious tears and had strained my eyes towards heaven, I sometimes felt myself among angelic hosts, and for joy and gladness sang: “because of the savour of thy good ointments we will run after thee.”

8. Now, if such are the temptations of men who, since their bodies are emaciated with fasting, have only evil thoughts to fear, how must it fare with a girl whose surroundings are those of luxury and ease? Surely, to use the apostle’s words, “She is dead while she liveth.” Therefore, if experience gives me a right to advise, or clothes my words with credit, I would begin by urging you and warning you as Christ’s spouse to avoid wine as you would avoid poison. For wine is the first weapon used by demons against the young. Greed does not shake, nor pride puff up, nor ambition infatuate so much as this. Other vices we easily escape, but this enemy is shut up within us, and wherever we go we carry him with us. Wine and youth between them kindle the fire of sensual pleasure. Why do we throw oil on the flame–why do we add fresh fuel to a miserable body which is already ablaze. Paul, it is true, says to Timothy “drink no longer water, but use a little wine for thy stomach’s sake, and for thine often infirmities.” But notice the reasons for which the permission is given, to cure an aching stomach and a frequent infirmity. And lest we should indulge ourselves too much on the score of our ailments, he commands that but little shall be taken; advising rather as a physician than as an apostle (though, indeed, an apostle is a spiritual physician). He evidently feared that Timothy might succumb to weakness, and might prove unequal to the constant moving to and fro involved in preaching the Gospel. Besides, he remembered that he had spoken of “wine wherein is excess,” and had said, “it is good neither to eat flesh nor to drink wine.” Noah drank wine and became intoxicated; but living as he did in the rude age after the flood, when the vine was first planted, perhaps he did not know its power of inebriation. And to let you see the hidden meaning of Scripture in all its fulness (for the word of God is a pearl and may be pierced on every side) after his drunkenness came the uncovering of his body; self-indulgence culminated in lust. First the belly is crammed; then the other members are roused. Similarly, at a later period, “The people sat down to eat and to drink and rose up to play.” Lot also, God’s friend, whom He saved upon the mountain, who was the only one found righteous out of so many thousands, was intoxicated by his daughters. And, although they may have acted as they did more from a desire of offspring than from love of sinful pleasure–for the human race seemed in danger of extinction–yet they were well aware that the righteous man would not abet their design unless intoxicated. In fact he did not know what he was doing, and his sin was not wilful. Still his error was a grave one, for it made him the father of Moab and Ammon, Israel’s enemies, of whom it is said: “Even to the fourteenth generation they shall not enter into the congregation of the Lord forever.”

9. When Elijah, in his flight from Jezebel, lay weary and desolate beneath the oak, there came an angel who raised him up and said, “Arise and eat.” And he looked, and behold there was a cake and a cruse of water at his head. Had God willed it, might He not have sent His prophet spiced wines and dainty dishes and flesh basted into tenderness? When Elisha invited the sons of the prophets to dinner, he only gave them field-herbs to eat; and when all cried out with one voice: “There is death in the pot,” the man of God did not storm at the cooks (for he was not used to very sumptuous fare), but caused meal to be brought, and casting it in, sweetened the bitter mess with spiritual strength as Moses had once sweetened the waters of Mara. Again, when men were sent to arrest the prophet, and were smitten with physical and mental blindness, that he might bring them without their own knowledge to Samaria, notice the food with which Elisha ordered them to be refreshed. “Set bread and water,” he said, “before them, that they may eat and drink and go to their master.” And Daniel, who might have had rich food from the king’s table, preferred the mower’s breakfast, brought to him by Habakkuk, which must have been but country fare. He was called “a man of desires,” because he would not eat the bread of desire or drink the wine of concupiscence.

10. There are, in the Scriptures, countless divine answers condemning gluttony and approving simple food. But as fasting is not my present theme and an adequate discussion of it would require a treatise to itself, these few observations must suffice of the many which the subject suggests. By them you will understand why the first man, obeying his belly and not God, was cast down from paradise into this vale of tears; and why Satan used hunger to tempt the Lord Himself in the wilderness; and why the apostle cries: “Meats for the belly and the belly for meats, but God shall destroy both it and them;” and why he speaks of the self-indulgent as men “whose God is their belly.” For men invariably worship what they like best. Care must be taken, therefore, that abstinence may bring back to Paradise those whom satiety once drove out.

11. You will tell me, perhaps, that, high-born as you are, reared in luxury and used to lie softly, you cannot do without wine and dainties, and would find a stricter rule of life unendurable. If so, I can only say: “Live, then, by your own rule, since God’s rule is too hard for you.” Not that the Creator and Lord of all takes pleasure in a rumbling and empty stomach, or in fevered lungs; but that these are indispensable as means to the preservation of chastity. Job was dear to God, perfect and upright before Him; yet hear what he says of the devil: “His strength is in the loins, and his force is in the navel.”

The terms are chosen for decency’s sake, but the reproductive organs of the two sexes are meant. Thus, the descendant of David, who, according to the promise is to sit upon his throne, is said to come from his loins. And the seventy-five souls descended from Jacob who entered Egypt are said to come out of his thigh. So, also, when his thigh shrank after the Lord had wrestled with him, he ceased to beget children. The Israelites, again, are told to celebrate the passover with loins girded and mortified. God says to Job: “Gird up thy loins as a man.” John wears a leathern girdle. The apostles must gird their loins to carry the lamps of the Gospel. When Ezekiel tells us how Jerusalem is found in the plain of wandering, covered with blood, he uses the words: “Thy navel has not been cut.” In his assaults on men, therefore, the devil’s strength is in the loins; in his attacks on women his force is in the navel.

12. Do you wish for proof of my assertions? Take examples. Sampson was braver than a lion and tougher than a rock; alone and unprotected he pursued a thousand armed men; and yet, in Delilah’s embrace, his resolution melted away. David was a man after God’s own heart, and his lips had often sung of the Holy One, the future Christ; and yet as he walked upon his housetop he was fascinated by Bathsheba’s nudity, and added murder to adultery. Notice here how, even in his own house, a man cannot use his eyes without danger. Then repenting, he says to the Lord: “Against thee, thee only, have I sinned and done this evil in Thy sight.” Being a king he feared no one else. So, too, with Solomon. Wisdom used him to sing her praise, and he treated of all plants “from the cedar tree that is in Lebanon even unto the hyssop that springeth out of the wall;” and yet he went back from God because he was a lover of women. And, as if to show that near relationship is no safeguard, Amnon burned with illicit passion for his sister Tamar.

13. I cannot bring myself to speak of the many virgins who daily fall and are lost to the bosom of the church, their mother: stars over which the proud foe sets up his throne, and rocks hollowed by the serpent that he may dwell in their fissures. You may see many women widows before wedded, who try to conceal their miserable fall by a lying garb. Unless they are betrayed by swelling wombs or by the crying of their infants, they walk abroad with tripping feet and heads in the air. Some go so fat as to take potions, that they may insure barrenness, and thus murder human beings almost before their conception. Some, when they find themselves with child through their sin, use drugs to procure abortion, and when (as often happens) they die with their offspring, they enter the lower world laden with the guilt not only of adultery against Christ but also of suicide and child murder. Yet it is these who say: “‘Unto the pure all things are pure;’ my conscience is sufficient guide for me. A pure heart is what God looks for. Why should I abstain from meats which God has created to be received with thanksgiving?” And when they wish to appear agreeable and entertaining they first drench themselves with wine, and then joining the grossest profanity to intoxication, they say “Far be it from me to abstain from the blood of Christ.” And when they see another pale or sad they call her “wretch” or “manichaean;” quite logically, indeed, for on their principles fasting involves heresy. When they go out they do their best to attract notice, and with nods and winks encourage troops of young fellows to follow them. Of each and all of these the prophet’s words are true: “Thou hast a whore’s forehead; thou refusest to be ashamed.” Their robes have but a narrow purple stripe, it is true; and their head-dress is somewhat loose, so as to leave the hair free. From their shoulders flutters the lilac mantle which they call “maforte;” they have their feet in cheap slippers and their arms tucked up tight-fitting sleeves. Add to these marks of their profession an easy gait, and you have all the virginity that they possess. Such may have eulogizers of their own, and may fetch a higher price in the market of perdition, merely because they are called virgins. But to such virgins as these I prefer to be displeasing.

14. I blush to speak of it, it is so shocking; yet though sad, it is true. How comes this plague of the agapetae to be in the church? Whence come these unwedded wives, these novel concubines, these harlots, so I will call them, though they cling to a single partner? One house holds them and one chamber. They often occupy the same bed, and yet they call us suspicious if we fancy anything amiss. A brother leaves his virgin sister; a virgin, slighting her unmarried brother, seeks a brother in a stranger. Both alike profess to have but one object, to find spiritual consolation from those not of their kin; but their real aim is to indulge in sexual intercourse. It is on such that Solomon in the book of proverbs heaps his scorn. “Can a man take fire in his bosom,” he says, “and his clothes not be burned? Can one go upon hot coals and his feet not be burned?”

15. We cast out, then, and banish from our sight those who only wish to seem and not to be virgins. Henceforward I may bring all my speech to bear upon you who, as it is your lot to be the first virgin of noble birth in Rome, have to labor the more diligently not to lose good things to come, as well as those that are present. You have at least learned from a case in your own family the troubles of wedded life and the uncertainties of marriage. Your sister, Blaesilla, before you in age but behind you in declining the vow of virginity, has become a widow but seven months after she has taken a husband. Hapless plight of us mortals who know not what is before us! She has lost, at once, the crown of virginity and the pleasures of wedlock. And, although, as a widow, the second degree of chastity is hers, still can you not imagine the continual crosses which she has to bear, daily seeing in her sister what she has lost herself; and, while she finds it hard to go without the pleasures of wedlock, having a less reward for her present continence? Still she, too, may take heart and rejoice. The fruit which is an hundredfold and that which is sixtyfold both spring from one seed, and that seed is chastity.

16. Do not court the company of married ladies or visit the houses of the high-born. Do not look too often on the life which you despised to become a virgin. Women of the world, you know, plume themselves because their husbands are on the bench or in other high positions. And the wife of the emperor always has an eager throng of visitors at her door. Why do you, then, wrong your husband? Why do you, God’s bride, hasten to visit the wife of a mere man? Learn in this respect a holy pride; know that you are better than they. And not only must you avoid intercourse with those who are puffed up by their husbands’ honors, who are hedged in with troops of eunuchs, and who wear robes inwrought with threads of gold. You must also shun those who are widows from necessity and not from choice. Not that they ought to have desired the death of their husbands; but that they have not welcomed the opportunity of continence when it has come. As it is, they only change their garb; their old self-seeking remains unchanged. To see them in their capacious litters, with red cloaks and plump bodies, a row of eunuchs walking in front of them, you would fancy them not to have lost husbands but to be seeking them. Their houses are filled with flatterers and with guests. The very clergy, who ought to inspire them with respect by their teaching and authority, kiss these ladies on the forehead, and putting forth their hands (so that, if you knew no better you might suppose them in the act of blessing), take wages for their visits. They, meanwhile, seeing that priests cannot do without them, are lifted up into pride; and as, having had experience of both, they prefer the license of widowhood to the restraints of marriage, they call themselves chaste livers and nuns. After an immoderate supper they retire to rest to dream of the apostles.

17. Let your companions be women pale and thin with fasting, and approved by their years and conduct; such as daily sing in their hearts: “Tell me where thou feedest thy flock, where thou makest it to rest at noon,” and say, with true earnestness, have a desire to depart and to be with Christ.” Be subject to your parents, imitating the example of your spouse. Rarely go abroad, and if you wish to seek, the aid of the martyrs seek it in your own chamber. For you will never need a pretext for going out if you always go out when there is need. Take food in moderation, and never overload your stomach. For many women, while temperate as regards wine, are intemperate in the use of food. When you rise at night to pray, let your breath be that of an empty and not that of an overfull stomach. Read often, learn all that you can. Let sleep overcome you, the roll still in your hands; when your head falls, let it be on the sacred page. Let your fasts be of daily occurrence and your refreshment such as avoids satiety. It is idle to carry an empty stomach if, in two or three days’ time, the fast is to be made up for by repletion. When cloyed the mind immediately grows sluggish, and when the ground is watered it puts forth the thorns of lust. If ever you feel the outward man sighing for the flower of youth, and if, as you lie on your couch after a meal, you are excited by the alluring train of sensual desires; then seize the shield of faith, for it alone can quench the fiery darts of the devil. “They are all adulterers,” says the prophet; “they have made ready their heart like an oven.” But do you keep close to the footsteps of Christ, and, intent upon His words, say: “Did not our heart burn within us by the way while Jesus opened to us the Scriptures?” and again: “Thy word is tried to the uttermost, and thy servant loveth it.” It is hard for the human soul to avoid loving something, and our mind must of necessity give way to affection of one kind or another. The love of the flesh is overcome by the love of the spirit. Desire is quenched by desire. What is taken from the one increases the other. Therefore, as you lie on your couch, say again and again: “By night have I sought Him whom my soul loveth.” “Mortify, therefore,” says the apostle, “your members which are upon the earth.” Because he himself did so, he could afterwards say with confidence: “I live, yet not I, but Christ, liveth in me.” He who mortifies his members, and feels that he is walking in a vain show, is not afraid to say: “I am become like a bottle in the frost. Whatever there was in me of the moisture of lust has been dried out of me.” And again: “My knees are weak through fasting; I forget to eat my bread. By reason of the voice of my groaning my bones cleave to my skin.”

18. Be like the grasshopper and make night musical. Nightly wash your bed and water your couch with your tears. Watch and be like the sparrow alone upon the housetop. Sing with the spirit, but sing with the understanding also. And let your song be that of the psalmist: “Bless the Lord, O my soul; and forget not all his benefits; who forgiveth all thine iniquities; who healeth all thy diseases; who redeemeth thy life from destruction.” Can we, any of us, honestly make his words our own: “I have eaten ashes like bread and mingled my drink with weeping?” Yet, should we not weep and groan when the serpent invites us, as he invited our first parents, to eat forbidden fruit, and when after expelling us from the paradise of virginity he desires to clothe us with mantles of skins such as that which Elijah, on his return to paradise, left behind him on earth? Say to yourself: “What have I to do with the pleasures of sense that so soon come to an end? What have I to do with the song of the sirens so sweet and so fatal to those who hear it?” I would not have you subject to that sentence whereby condemnation has been passed upon mankind. When God says to Eve, “In pain and in sorrow thou shalt bring forth children,” say to yourself, “That is a law for a married woman, not for me.” And when He continues, “Thy desire shall be to thy husband,” say again: “Let her desire be to her husband who has not Christ for her spouse.” And when, last of all, He says, “Thou shalt surely die,” once more, say, “Marriage indeed must end in death; but the life on which i have resolved is independent of sex. Let those who are wives keep the place and the time that properly belong to them. For me, virginity is consecrated in the persons of Mary and of Christ.”

19. Some one may say, “Do you dare detract from wedlock, which is a state blessed by God?” I do not detract from wedlock when I set virginity before it. No one compares a bad thing with a good. Wedded women may congratulate themselves that they come next to virgins. “Be fruitful,” God says, “and multiply, and replenish the earth.” He who desires to replenish the earth may increase and multiply if he will. But the train to which you belong is not on earth, but in heaven. The command to increase and multiply first finds fulfilment after the expulsion from paradise, after the nakedness and the fig-leaves which speak of sexual passion. Let them marry and be given in marriage who eat their bread in the sweat of their brow; whose land brings forth to them thorns and thistles, and whose crops are choked with briars. My seed produces fruit a hundredfold. “All men cannot receive God’s saying, but they to whom it is given.”

Some people may be eunuchs from necessity; I am one of free will. “There is a time to embrace and a time to refrain from embracing. There is a time to cast away stones, and a time to gather stones together.” Now that out of the hard stones of the Gentiles God has raised up children unto Abraham, they begin to be “holy stones rolling upon the earth.” They pass through the whirlwinds of the world, and roll on in God’s chariot on rapid wheels. Let those stitch coats to themselves who have lost the coat woven from the top throughout; who delight in the cries of infants which, as soon as they see the light, lament that they are born. In paradise Eve was a virgin, and it was only after the coats of skins that she began her married life. Now paradise is your home too. Keep therefore your birthright and say: “Return unto thy rest, O my soul.” To show that virginity is natural while wedlock only follows guilt, what is born of wedlock is virgin flesh, and it gives back in fruit what in root it has lost. “There shall come forth a rod out of the stem of Jesse, and a flower shall grow out of his roots.” The rod is the mother of the Lord–simple, pure, unsullied; drawing no germ of life from without but fruitful in singleness like God Himself. The flower of the rod is Christ, who says of Himself: “I am the rose of Sharon and the lily of the valleys.” In another place He is foretold to be “a stone cut out of the mountain without hands,” a figure by which the prophet signifies that He is to be born a virgin of a virgin. For the hands are here a figure of wedlock as in the passage: “His left hand is under my head and his right hand doth embrace me.” It agrees, also, with this interpretation that the unclean animals are led into Noah’s ark in pairs, while of the clean an uneven number is taken. Similarly, when Moses and Joshua were bidden to remove their shoes because the ground on which they stood was holy, the command had a mystical meaning. So, too, when the disciples were appointed to preach the gospel they were told to take with them neither shoe nor shoe-latchet; and when the soldiers came to cast lots for the garments of Jesus they found no boots that they could take away. For the Lord could not Himself possess what He had forbidden to His servants.

20. I praise wedlock, I praise marriage, but it is because they give me virgins. I gather the rose from the thorns, the gold from the earth, the pearl from the shell. “Doth the plowman plow all day to sow?” Shall he not also enjoy the fruit of his labor? Wedlock is the more honored, the more what is born of it is loved. Why, mother, do you grudge your daughter her virginity? She has been reared on your milk, she has come from your womb, she has grown up in your bosom. Your watchful affection has kept her a virgin. Are you angry with her because she chooses to be a king’s wife and not a soldier’s? She has conferred on you a high privilege; you are now the mother-in-law of God. “Concerning virgins,” says the apostle, “I have no commandment of the Lord.” Why was this? Because his own virginity was due, not to a command, but to his free choice. For they are not to be heard who feign him to have had a wife; for, when he is discussing continence and commending perpetual chastity, he uses the words, “I would that all men were even as I myself.” And farther on, “I say, therefore, to the unmarried and widows, it is good for them if they abide even as I.” And in another place, “have we not power to lead about wives even as the rest of the apostles?” Why then has he no commandment from the Lord concerning virginity? Because what is freely offered is worth more than what is extorted by force, and to command virginity would have been to abrogate wedlock. It would have been a hard enactment to compel opposition to nature and to extort from men the angelic life; and not only so, it would have been to condemn what is a divine ordinance.

21. The old law had a different ideal of blessedness, for therein it is said: “Blessed is he who hath seed in Zion and a family in Jerusalem:” and “Cursed is the barren who beareth not:” and “Thy children shall be like olive-plants round about thy table.” Riches too are promised to the faithful and we are told that “there was not one feeble person among their tribes.” But now even to eunuchs it is said, “Say not, behold I am a dry tree,” for instead of sons and daughters you have a place forever in heaven. Now the poor are blessed, now Lazarus is set before Dives in his purple. Now he who is weak is counted strong. But in those days the world was still unpeopled: accordingly, to pass over instances of childlessness meant only to serve as types, those only were considered happy who could boast of children. It was for this reason that Abraham in his old age married Keturah; that Leah hired Jacob with her son’s mandrakes, and that fair Rachel–a type of the church–complained of the closing of her womb. But gradually the crop grew up and then the reaper was sent forth with his sickle. Elijah lived a virgin life, so also did Elisha and many of the sons of the prophets. To Jeremiah the command came: “Thou shall not take thee a wife.” He had been sanctified in his mother’s womb, and now he was forbidden to take a wife because the captivity was near. The apostle gives the same counsel in different words. “I think, therefore, that this is good by reason of the present distress, namely that it is good for a man to be as he is.” What is this distress which does away with the joys of wedlock? The apostle tells us, in a later verse: “The time is short: it remaineth that those who have wives be as though they had none.” Nebuchadnezzar is hard at hand. The lion is bestirring himself from his lair. What good will marriage be to me if it is to end in slavery to the haughtiest of kings? What good will little ones be to me if their lot is to be that which the prophet sadly describes: “The tongue of the sucking child cleaveth to the roof of his mouth for thirst; the young children ask for bread and no man breaketh it unto them”? In those days, as I have said, the virtue of continence was found only in men: Eve still continued to travail with children. But now that a virgin has conceived in the womb and has borne to us a child of which the prophet says that “Government shall be upon his shoulder, and his name shall be called the mighty God, the everlasting Father,” now the chain of the curse is broken. Death came through Eve, but life has come through Mary. And thus the gift of virginity has been bestowed most richly upon women, seeing that it has had its beginning from a woman. As soon as the Son of God set foot upon the earth, He formed for Himself a new household there; that, as He was adored by angels in heaven, angels might serve Him also on earth. Then chaste Judith once more cut off the head of Holofernes. Then Haman – whose name means iniquity – was once more burned in fire of his own kindling. Then James and John forsook father and net and ship and followed the Saviour: neither kinship nor the world’s ties, nor the care of their home could hold them back. Then were the words heard: “Whosoever will come after me, let him deny himself and take up his cross and follow me.” For no soldier goes with a wife to battle. Even when a disciple would have buried his father, the Lord forbade him, and said: “Foxes have holes and the birds of the air have nests, but the Son of Man hath not where to lay His head.” So you must not complain if you have but scanty house-room. In the same strain, the apostle writes: “He that is unmarried careth for the things that belong to the Lord, how he may please the Lord but he that is married careth for the things that are of the world how he may please his wife. There is difference also between a wife and a virgin. The unmarried woman careth for the things of the Lord that she may be holy both in body and in spirit. But she that is married careth for the things of the world how she may please her husband.”

22. How great inconveniences are involved in wedlock and how many anxieties encompass it I have, I think, described shortly in my treatise–published against Helvidius – on the perpetual virginity of the blessed Mary. It would be tedious to go over the same ground now; and any one who pleases may draw from that fountain. But lest I should seem wholly to have passed over the matter, I will just say now that the apostle bids us pray without ceasing, and that he who in the married state renders his wife her due cannot so pray. Either we pray always and are virgins, or we cease to pray that we may fulfil the claims of marriage. Still he says: “If a virgin marry she hath not sinned. Nevertheless such shall have trouble in the flesh.” At the outset I promised that I should say little or nothing of the embarrassments of wedlock, and now I give you notice to the same effect. If you want to know from how many vexations a virgin is free and by how many a wife is lettered you should read Tertullian “to a philosophic friend,” and his other treatises on virginity, the blessed Cyprian’s noble volume, the writings of Pope Damasus in prose and verse, and the treatises recently written for his sister by our own Ambrose. In these he has poured forth his soul with such a flood of eloquence that he has sought out, set forth, and put in order all that bears on the praise of virgins.

23. We must proceed by a different path, for our purpose is not the praise of virginity but its preservation. To know that it is a good thing is not enough: when we have chosen it we must guard it with jealous care. The first only requires judgment, and we share it with many; the second calls for toil, and few compete with us in it. “He that shall endure unto the end,” the Lord says, “the same shall be saved,” and “many are called but few are chosen.” Therefore I conjure you before God and Jesus Christ and His elect angels to guard that which you have received, not readily exposing to the public gaze the vessels of the Lord’s temple (which only the priests are by right allowed to see), that no profane person may look upon God’s sanctuary. Uzzah, when he touched the ark which it was not lawful to touch, was struck down suddenly by death. And assuredly no gold or silver vessel was ever so dear to God as is the temple of a virgin’s body. The shadow went before, but now the reality is come. You indeed may speak in all simplicity, and from motives of amiability may treat with courtesy the veriest strangers, but unchaste eyes see nothing aright. They fail to appreciate the beauty of the soul, and only value that of the body. Hezekiah showed God’s treasure to the Assyrians, who ought never to have seen what they were sure to covet. The consequence was that Judaea was torn by continual wars, and that the very first things carried away to Babylon were these vessels of the Lord. We find Belshazzar at his feast and among his concubines (vice always glories in defiling what is noble) drinking out of these sacred cups.

24. Never incline your ear to words of mischief. For men often say an improper word to make trial of a virgin’s steadfastness, to see if she hears it with pleasure, and if she is ready to unbend at every silly jest. Such persons applaud whatever you affirm and deny whatever you deny; they speak of you as not only holy but accomplished, and say that in you there is no guile. “Behold,” say they, “a true hand-maid of Christ; behold entire singleness of heart. How different from that rough, unsightly, countrified fright, who most likely never married because she could never find a husband.” Our natural weakness induces us readily to listen to such flatterers; but, though we may blush and reply that such praise is more than our due, the soul within us rejoices to hear itself praised.

Like the ark of the covenant Christ’s spouse should be overlaid with gold within and without; she should be the guardian of the law of the Lord. Just as the ark contained nothing but the tables of the covenant, so in you there should be no thought of anything that is outside. For it pleases the Lord to sit in your mind as He once sat on the mercy-seat and the cherubims. As He sent His disciples to loose Him the foal of an ass that he might ride on it, so He sends them to release you from the cares of the world, that leaving the bricks and straw of Egypt, you may follow Him, the true Moses, through the wilderness and may enter the land of promise. Let no one dare to forbid you, neither mother nor sister nor kinswoman nor brother: “The Lord hath need of you.” Should they seek to hinder you, let them fear the scourges that fell on Pharaoh, who, because he would not let God’s people go that they might serve Him, suffered the plagues described in Scripture. Jesus entering into the temple cast out those things which belonged not to the temple. For God is jealous and will not allow the father’s house to be made a den of robbers. Where money is counted, where doves are sold, where simplicity is stifled where, that is, a virgin’s breast glows with cares of this world; straightway the veil of the temple is rent, the bridegroom rises in anger, he says: “Your house is left unto you desolate.” Read the gospel and see how Mary sitting at the feet of the Lord is set before the zealous Martha. In her anxiety to be hospitable Martha was preparing a meal for the Lord and His disciples; yet Jesus said to her: “Martha, Martha, thou art careful and troubled about many things. But few things are needful or one. And Mary hath chosen that good part which shall not be taken away from her.” Be then like Mary; prefer the food of the soul to that of the body. Leave it to your sisters to run to and fro and to seek how they may filly welcome Christ. But do you, having once for all cast away the burden of the world, sit at the Lord’s feet and say: “I have found him whom my soul loveth; I will hold him, I will not let him go.” And He will answer: “My dove, my undefiled is but one; she is the only one of her mother, she is the choice one of her that bare her.” Now the mother of whom this is said is the heavenly Jerusalem.

25. Ever let the privacy of your chamber guard you; ever let the Bridegroom sport with you within. Do you pray? You speak to the Bridegroom. Do you read? He speaks to you. When sleep overtakes you He will come behind and put His hand through the hole of the door, and your heart shall be moved for Him; and you will awake and rise up and say: “I am sick of love.” Then He will reply: “A garden inclosed is my sister, my spouse; a spring shut up, a fountain sealed.”

Go not from home nor visit the daughters of a strange land, though you have patriarchs for brothers and Israel for a father. Dinah went out and was seduced. Do not seek the Bridegroom in the streets; do not go round the comers of the city. For though you may say: “I will rise now and go about the city: in the streets and in the broad ways I will seek Him whom my soul loveth,” and though you may ask the watchmen: “Saw ye Him whom my soul loveth?” no one will deign to answer you. The Bridegroom cannot be found in the streets: “Strait and narrow is the way which leadeth unto life.” So the Song goes on: “I sought him but I could not find him: I called him but he gave me no answer.” And would that failure to find Him were all. You will be wounded and stripped, you will lament and say: “The watchmen that went about the city found me: they smote me, they wounded me, they took away my veil from me.” Now if one who could say: “I sleep but my heart waketh,” and “A bundle of myrrh is my well beloved unto me; he shall lie all night betwixt my breasts”; if one who could speak thus suffered so much because she went abroad, what shall become of us who are but young girls; of us who, when the bride goes in with the Bridegroom, still remain without? Jesus is jealous. He does not choose that your face should be seen of others. You may excuse yourself and say: “I have drawn close my veil, I have covered my face and I have sought Thee there and have said: ‘Tell me, O Thou whom my soul loveth, where Thou feedest Thy flock, where Thou makest it to rest at noon. For why should I be as one that is veiled beside the flocks of Thy companions?'” Yet in spite of your excuses He will be wroth, He will swell with anger and say: “If thou know not thyself, O thou fairest among women, go thy way forth by the footsteps of the flock and feed thy goats beside the shepherd’s tents.” You may be fair, and of all faces yours may be the dearest to the Bridegroom; yet, unless you know yourself, and keep your heart with all diligence, unless also you avoid the eyes of the young men, you will be turned out of My bride-chamber to feed the goats, which shall be set on the left hand.

26. These things being so, my Eustochium, daughter, lady, fellow-servant, sister–these names refer the first to your age, the second to your rank, the third to your religious vocation, the last to the place which you hold in my affection–hear the words of Isaiah: “Come, my people, enter thou into thy chambers, and shut thy doors about thee hide thyself as it were for a little moment, until the indignation” of the Lord “be overpast.” Let foolish virgins stray abroad, but for your part stay at home with the Bridegroom; for if you shut your door, and, according to the precept of the Gospel, pray to your Father in secret, He will come and knock, saying: “Behold, I stand at the door and knock; if any man … open the door, I will come in to him, and will sup with him, and he with me.” Then straightway you will eagerly reply: “It is the voice of my beloved that knocketh, saying, Open to me, my sister, my love, my dove, my undefiled.” It is impossible that you should refuse, and say: “I have put off my coat how shall I put it on? I have washed my feet; how shall I defile them?” Arise forthwith and open. Otherwise while you linger He may pass on and yon may have mournfully to say: “I opened to my beloved, but my beloved was gone.” Why need the doors of your heart be closed to the Bridegroom? Let them be open to Christ but closed to the devil according to the saying: “If the spirit of him who hath power rise up against thee, leave not thy place.” Daniel, in that upper story to which he withdrew when he could no longer continue below, had his windows open toward Jerusalem. Do you too keep your windows open, but only on the side where light may enter and whence you may see the eye of the Lord. Open not those other windows of which the prophet says: “Death is come up into our windows.”

27. You must also be careful to avoid the snare of a passion for vainglory. “How,” Jesus says, “can ye believe which receive glory one from another?” What an evil that must be the victim of which cannot believe! Let us rather say: “Thou art my glorying,” and “He that glorieth, let him glory in the Lord,” and “If I yet pleased men I should not be the servant of Christ,” and “Far be it from me to glory save in the cross of our Lord Jesus Christ, through whom the world hath been crucified unto me and I unto the world ;” and once more: “In God we boast all the day long; my soul shall make her boast in the Lord.” When you do alms, let God alone see you. When you fast, be of a cheerful countenance. Let your dress be neither too neat nor too slovenly; neither let it be so remarkable as to draw the attention of passers-by, and to make men point their fingers at you. Is a brother dead? Has the body of a sister to be carried to its burial? Take care lest in too often performing such offices you die yourself. Do not wish to seem very devout nor more humble than need be, lest you seek glory by shunning it. For many, who screen from all men’s sight their poverty, charity, and fasting, desire to excite admiration by their very disdain of it, and strangely seek for praise while they profess to keep out of its way. From the other disturbing influences which make men rejoice, despond, hope, and fear I find many free; but this is a defect which few are without, and he is best whose character, like a fair skin, is disfigured by the fewest blemishes. I do not think it necessary to warn you against boasting of your riches, or against priding yourself on your birth, or against setting yourself up as superior to others. I know your humility; I know that you can say with sincerity: “Lord, my heart is not haughty nor mine eyes lofty;” I know that in your breast as in that of your mother the pride through which the devil fell has no place. It would be time wasted to write to you about it; for there is no greater folly than to leach a pupil what he knows already. But now that you have despised the boastfulness of the world, do not let the fact inspire you with new boastfulness. Harbor not the secret thought that having ceased to court attention in garments of gold you may begin to do so in mean attire. And when you come into a room full of brothers and sisters, do not sit in too low a place or plead that you are unworthy of a footstool. Do not deliberately lower your voice as though worn out with fasting; nor, leaning on the shoulder of another, mimic the tottering gait of one who is faint. Some women, it is true, disfigure their faces, that they may appear unto men to fast. As soon as they catch sight of any one they groan, they look down; they cover up their faces, all but one eye, which they keep free to see with. Their dress is sombre, their girdles are of sackcloth, their hands and feet are dirty; only their stomachs–which cannot be seen–are hot with food. Of these the psalm is sung daily: “The Lord will scatter the bones of them that please themselves.” Others change their garb and assume the mien of men, being ashamed of being what they were born to be–women. They cut off their hair and are not ashamed to look like eunuchs. Some clothe themselves in goat’s hair, and, putting on hoods, think to become children again by making themselves look like so many owls.

28. But I will not speak only of women. Avoid men, also, when you see them loaded. with chains and wearing their hair long like women, contrary to the apostle’s precept, not to speak of beards like those of goats, black cloaks, and bare feet braving the cold. All these things are tokens of the devil. Such an one Rome groaned over some time back in Antimus; and Sophronius is a still more recent instance. Such persons, when they have once gained admission to the houses of the high-born, and have deceived “silly women laden with sins, ever learning and never able to come to the knowledge of the truth,” feign a sad mien and pretend to make long fasts while at night they feast in secret. Shame forbids me to say more, for my language might appear more like invective than admonition. There are others–I speak of those of my own order–who seek the presbyterate and the diaconate simply that they may be able to see women with less restraint. Such men think of nothing but their dress; they use perfumes freely, and see that there are no creases in their leather shoes. Their curling hair shows traces of the tongs; their fingers glisten with rings; they walk on tiptoe across a damp road, not to splash their feet. When you see men acting in this way, think of them rather as bridegrooms than as clergymen. Certain persons have devoted the whole of their energies and life to the single object of knowing the names, houses, and characters of married ladies. I will here briefly describe the head of the profession, that from the master’s likeness you may recognize the disciples. He rises and goes forth with the sun; he has the order of his visits duly arranged; he takes the shortest road; and, troublesome old man that he is, forces his way almost into the bedchambers of ladies yet asleep. If he sees a pillow that takes his fancy or an elegant table-cover–or indeed any article of household furniture–he praises it, looks admiringly at it, takes it into his hand, and, complaining that he has nothing of the kind, begs or rather extorts it from the owner. All the women, in fact, fear to cross the news-carrier of the town. Chastity and fasting are alike distasteful to him. What he likes is a savory breakfast–say off a plump young crane such as is commonly called a cheeper. In speech he is rude and forward, and is always ready to bandy reproaches. Wherever you turn he is the first man that you see before you. Whatever news is noised abroad he is either the originator of the rumor or its magnifier. He changes his horses every hour; and they are so sleek and spirited that you would take him for a brother of the Thracian king.

29. Many are the stratagems which the wily enemy employs against us. “The serpent,” we are told, “was more subtile than any beast of the field which the Lord God had made.” And the apostle says: “We are not ignorant of his devices.” Neither an affected shabbiness nor a stylish smartness becomes a Christian. If there is anything of which you are ignorant, if you have any doubt about Scripture, ask one whose life commends him, whose age puts him above suspicion, whose reputation does not belie him; one who may be able to say: “I have espoused you to one husband that I may present you as a chaste virgin to Christ.” Or if there should be none such able to explain, it is better to avoid danger at the price of ignorance than to court it for the sake of learning. Remember that you walk in the midst of snares, and that many veteran virgins, of a chastity never called in question, have, on the very threshold of death, let their crowns fall from their hands.

If any of your handmaids share your vocation, do not lift up yourself against them or pride yourself because you are their mistress. You have all chosen one Bridegroom you all sing the same psalms; together you receive the Body of Christ. Why then should your thoughts be different? You must try to win others, and that you may attract the more readily you must treat the virgins in your train with the greatest respect. If you find one of them weak in the faith, be attentive to her, comfort her, caress her, and make her chastity your treasure. But if a girl pretends to have a vocation simply because she desires to escape from service, read aloud to her the words of the apostle: “It is better to marry than to burn.”

Idle persons and busybodies, whether virgins or widows; such as go from house to house calling on married women and displaying an unblushing effrontery greater than that of a stage parasite, cast from you as you would the plague. For “evil communications corrupt good manners,” and women like these care for nothing but their lowest appetites. They will often urge you, saying, “My dear creature, make the best of your advantages, and live while life is yours,” and “Surely you are not laying up money for your children.” Given to wine and wantonness, they instill all manner of mischief into people’s minds, and induce even the most austere to indulge in enervating pleasures. And “when they have begun to wax wanton against Christ they will marry, having condemnation because they have rejected their first faith.”

Do not seek to appear over-eloquent, nor trifle with verse, nor make yourself gay with lyric songs. And do not, out of affectation, follow the sickly taste of married ladies who, now pressing their teeth together, now keeping their lips wide apart, speak with a lisp, and purposely clip their words, because they fancy that to pronounce them naturally is a mark of country breeding. Accordingly they find pleasure in what I may call an adultery of the tongue. For “what communion hath light with darkness? And what concord hath Christ with Belial?” How can Horace go with the psalter, Virgil with the gospels, Cicero with the apostle? Is not a brother made to stumble if he sees you sitting at meat in an idol’s temple? Although “unto the pure all things are, pure,” and “nothing is to be refused if it be received with thanksgiving,” still we ought not to drink the cup of Christ, and, at the same time, the cup of devils. Let me relate to you the story of my own miserable experience.

30. Many years ago, when for the kingdom of heaven’s sake I had cut myself off from home, parents, sister, relations, and–harder still–from the dainty food to which I had been accustomed; and when I was on my way to Jerusalem to wage my warfare, I still could not bring myself to forego the library which I had formed for myself at Rome with great care and toil. And so, miserable man that I was, I would fast only that I might afterwards read Cicero. After many nights spent in vigil, after floods of tears called from my inmost heart, after the recollection of my past sins, I would once more take up Plautus. And when at times I returned to my right mind, and began to read the prophets, their style seemed rude and repellent. I failed to see the light with my blinded eyes; but I attributed the fault not to them, but to the sun. While the old serpent was thus making me his plaything, about the middle of Lent a deep-seated fever fell upon my weakened body, and while it destroyed my rest completely–the story seems hardly credible–it so wasted my unhappy frame that scarcely anything was left of me but skin and bone. Meantime preparations for my funeral went on; my body grew gradually colder, and the warmth of life lingered only in my throbbing breast. Suddenly I was caught up in the spirit and dragged before the judgment seat of the Judge; and here the light was so bright, and those who stood around were so radiant, that I cast myself upon the ground and did not dare to look up. Asked who and what I was I replied: “I am a Christian.” But He who presided said: “Thou liest, thou art a follower of Cicero and not of Christ. For ‘where thy treasure is, there will thy heart be also.'” Instantly I became dumb, and amid the strokes of the lash–for He had ordered me to be scourged–I was tortured more severely still by the fire of conscience, considering with myself that verse, “In the grave who shall give thee thanks?” Yet for all that I began to cry and to bewail myself, saying: “Have mercy upon me, O Lord: have mercy upon me.” Amid the sound of the scourges this cry still made itself heard. At last the bystanders, failing down before the knees of Him who presided, prayed that He would have pity on my youth, and that He would give me space to repent of my error. He might still, they urged, inflict torture on me, should I ever again read the works of the Gentiles. Under the stress of that awful moment I should have been ready to make even still larger promises than these. Accordingly I made oath and called upon His name, saying: “Lord, if ever again I possess worldly books, or if ever again I read such, I have denied Thee.” Dismissed, then, on taking this oath, I returned to the upper world, and, to the surprise of all, I opened upon them eyes so drenched with tears that my distress served to convince even the incredulous. And that this was no sleep nor idle dream, such as those by which we are often mocked, I call to witness the tribunal before which I lay, and the terrible judgment which I feared. May it never, hereafter, be my lot to fall under such an inquisition! I profess that my shoulders were black and blue, that I felt the bruises long after I awoke from my sleep, and that thenceforth I read the books of God with a zeal greater than I had previously given to the books of men.

31. You must also avoid the sin of covetousness, and this not merely by refusing to seize upon what belongs to others, for that is punished by the laws of the state, but also by not keeping your own property, which has now become no longer yours. “If have not been faithful,” the Lord says, “in that which is another man’s, who shall give you that which is your own?” “That which is another man’s” is a quantity of gold or of silver, while “that which is our own” is the spiritual heritage of which it is elsewhere said: “The ransom of a man’s life is his riches.” “No man can serve two masters, for either he will hate the one and love the other; or else he will hold to the one and despise the other. Ye cannot serve God and Mammon.” Riches, that is; for in the heathen tongue of the Syrians riches are called mammon. The “thorns” which choke our faith are the taking thought for our life. Care for the things which the Gentiles seek after is the root of covetousness.

But you will say: “I am a girl delicately reared, and I cannot labor with my hands. Suppose that I live to old age and then fall sick, who will take pity on me?” Hear Jesus speaking to the apostles: “Take no thought what ye shall eat; nor yet for your body what ye shall put on. Is not the life more than meat, and the body than raiment? Behold the fowls of the air: for they sow not, neither do they reap nor gather into barns; yet your heavenly Father feedeth them.” Should clothing fail you, set the lilies before your eyes. Should hunger seize you, think of the words in which the poor and hungry are blessed. Should pain afflict you, read “Therefore I take pleasure in infirmities,” and “There was given to me a thorn in the flesh, the messenger of Satan to buffet me, lest I should be exalted above measure.” Rejoice in all God’s judgments; for does not the psalmist say: “The daughters of Judah rejoiced because of thy judgments, O Lord”? Let the words be ever on your lips: “Naked came I out of my mother’s womb, and naked shall I return thither;” and “We brought nothing into this world, and it is certain we can carry nothing out.”

32. To-day you may see women cramming their wardrobes with dresses, changing their gowns from day to day, and for all that unable to vanquish the moths. Now and then one more scrupulous wears out a single dress; yet, while she appears in rags, her boxes are full. Parchments are dyed purple, gold is melted into lettering, manuscripts are decked with jewels, while Christ lies at the door naked and dying. When they hold out a hand to the needy they sound a trumpet; when they invite to a love-feast they engage a crier. I lately saw the noblest lady in Rome–I suppress her name, for I am no satirist–with a band of eunuchs before her in the basilica of the blessed Peter. She was giving money to the poor, a coin apiece; and this with her own hand, that she might be accounted more religious. Hereupon a by no means uncommon incident occurred. An old woman, “full of years and rags,” ran forward to get a second coin, but when her turn came she received not a penny but a blow hard enough to draw blood from her guilty veins.

“The love of money is the root of all evil,” and the apostle speaks of covetousness as being idolatry.

“Seek ye first the kingdom of God and all these things shall be added unto you.”

The Lord will never allow a righteous soul to perish of hunger.

“I have been young,” the psalmist says, “and now am old, yet have I not seen the righteous forsaken nor his seed begging bread.” Elijah is fed by ministering ravens. The widow of Zarephath, who with her sons expected to die the same night, went without food herself that she might feed the prophet. He who had come to be fed then turned feeder, for, by a miracle, he filled the empty barrel. The apostle Peter says: “Silver and gold have I none, but such as I have give I thee. In the name of Jesus Christ rise up and walk.” But now many, while they do not say it in words, by their deeds declare: “Faith and pity have I none; but such as I have, silver and gold, these I will not give thee.” “Having food and raiment let us be therewith content.” Hear the prayer of Jacob: “If God will be with me and will keep me in this way that I go, and will give me bread to eat and raiment to put on, then shall the Lord be my God.” He prayed only for things necessary; yet, twenty years afterwards, he returned to the land of Canaan rich in substance. and richer still in children. Numberless are the instances in Scripture which teach men to “Beware of covetousness.”

33. As I have been led to touch to the subject–it shall have a treatise to itself if Christ permit–I will relate what took place not very many years ago at Nitria. A brother, more thrifty than covetous, and ignorant that the Lord had been sold for thirty pieces of silver, left behind him at his death a hundred pieces of money which he had earned by weaving linen. As there were about five thousand monks in the neighborhood, living in as many separate cells, a council was held as to what should be done. Some said that the coins should be distributed among the poor; others that they should be given to the church, while others were for sending them hack to the relatives of the deceased. However, Macarius, Pambo, Isidore and the rest of those called fathers, speaking by the Spirit, decided that they should be interred with their owner, with the words: “Thy money perish with thee.” Nor was this too harsh a decision; for so great fear has fallen upon all throughout Egypt, that it is now a crime to leave after one a single shilling.

34. As I have mentioned the monks, and know that you like to hear about holy things, lend an ear to me for a few moments. There are in Egypt three classes of monks. First, there are the coenobites, called in their Gentile language Sauses, or, as we should say, men living in a community. Secondly, there are the anchorites, who live in the desert, each man by himself, and are so called because they have withdrawn from human society. Thirdly, there is the class called Remoboth, a very inferior and little regarded type, peculiar to my own province, or, at least, originating there. These live together in twos and threes, but seldom in larger numbers, and are bound by no rule; but do exactly as they choose. A portion of their earnings they contribute to a common fund, out of which food is provided for all. In most cases they reside in cities and strongholds; and, as though it were their workmanship which is holy, and not their life, all that they sell is extremely dear. They often quarrel because they are unwilling, while supplying their own food, to be subordinate to others. It is true that they compete with each other in fasting; they make what should be a private concern an occasion for a triumph. In everything they study effect: their sleeves are loose, their boots bulge, their garb is of the coarsest. They are always sighing, or visiting virgins, or sneering at the clergy; yet when a holiday comes, they make themselves sick–they eat so much.

35. Having then rid ourselves of these as of so many plagues, let us come to that more numerous class who live together, and who are, as we have said, called Coenobites. Among these the first principle of union is to obey superiors and to do whatever they command. They are divided into bodies of ten and of a hundred, so that each tenth man has authority over nine others, while the hundredth has ten of these officers under him. They live apart from each other, in separate cells. According to their rule, no monk may visit another before the ninth hour; except the deans above mentioned, whose office is to comfort, with soothing words, those whose thoughts disquiet them. After the ninth hour they meet together to sing psalms and read the Scriptures according to usage. Then when the prayers have ended and all have sat down, one called the father stands up among them and begins to expound the portion of the day. While he is speaking the silence is profound; no man ventures to look at his neighbor or to clear his throat. The speaker’s praise is in the weeping of his hearers. Silent tears roll down their cheeks, but not a sob escapes from their lips. Yet when he begins to speak of Christ’s kingdom, and of future bliss, and of the glory which is to come, every one may be noticed saying to himself, with a gentle sigh and uplifted eyes: “Oh, that I had wings like a dove! For then would I fly away and be at rest.” After this the meeting breaks up and each company of ten goes with its father to its own table. This they take in turns to serve each for a week at a time. No noise is made over the food; no one talks while eating. Bread, pulse and greens form their fare, and the only seasoning that they use is salt. Wine is given only to the old, who with the children often have a special meal prepared for them to repair the ravages of age and to save the young from premature decay. When the meal is over they all rise together, and, after singing a hymn, return to their dwellings. There each one talks till evening with his comrade thus: “Have you noticed so-and-so? What grace he has How silent he is! How soberly he walks!” If any one is weak they comfort him; or if he is fervent in love to God, they encourage him to fresh earnestness. And because at night, besides the public prayers, each man keeps vigil in his own chamber, they go round all the cells one by one, and putting their ears to the doors, carefully ascertain what their occupants are doing. If they find a monk slothful, they do not scold him; but, dissembling what they know, they visit him more frequently, and at first exhort rather than compel him to pray more. Each day has its allotted task, and this being given in to the dean, is by him brought to the steward. This latter, once a month, gives a scrupulous account to their common father. He also tastes the dishes when they are cooked, and, as no one is allowed to say, “I am without a tunic or a cloak or a couch of rushes,” he so arranges that no one need ask for or go without what he wants. In case a monk falls ill, he is moved to a more spacious chamber, and there so attentively nursed by the old men, that he misses neither the luxury of cities nor a mother’s kindness. Every Lord’s day they spend their whole time in prayer and reading; indeed, when they have finished their tasks, these are their usual occupations. Every day they learn by heart a portion of Scripture. They keep the same fasts all the year round, but in Lent they are allowed to live more strictly. After Whitsuntide they exchange their evening meal for a midday one; both to satisfy the tradition of the church and to avoid overloading their stomachs with a double supply of food.

A similar description is given of the Essenes by Philo, Plato’s imitator; also by Josephus, the Greek Livy, in his narrative of the Jewish captivity.

36. As my present subject is virgins, I have said rather too much about monks. I will pass on, therefore, to the third class, called anchorites, who go from the monasteries into the deserts, with nothing but bread and salt. Paul introduced this way of life; Antony made it famous, and–to go farther back still–John the Baptist set the first example of it. The prophet Jeremiah describes one such in the words: “It is good for a man that he bear the yoke in his youth. He sitteth alone and keepeth silence, because he hath borne it upon him. He giveth his cheek to him that smiteth him, he is filled full with reproach. For the Lord will not east off forever.” The struggle of the anchorites and their life–in the flesh, yet not of the flesh–I will, if you wish, explain to you at some other time. I must now return to the subject of covetousness, which I left to speak of the monks. With them before your eyes you will despise, not only gold and silver in general, but earth itself and heaven. United to Christ, you will sing, “The Lord is my portion.”

37. Farther, although the apostle bids us to “pray without ceasing,” and although to the saints their very sleep is a supplication, we ought to have fixed hours of prayer, that if we are detained by work, the time may remind us of our duty. Prayers, as every one knows, ought to be said at the third, sixth and ninth hours, at dawn and at evening. No meal should be begun without prayer, land before leaving table thanks should be returned to the Creator. We should rise two or three times in the night, and go over the parts of Scripture which we know by heart. When we leave the roof which shelters us, prayer should be our armor; and when we return from the street we should pray before we sit down, and not give the frail body rest until the soul is fed. In every act we do, in every step we take, let our hand trace the Lord’s cross. Speak against nobody, and do not slander your mother’s son. “Who art thou that judgest the servant of another? To his own lord he standeth or falleth; yea, he shall be made to stand, for the Lord hath power to make him stand.” If you have fasted two or three days, do not think yourself better than others who do not fast. You fast and are angry; another eats and wears a smiling face. You work off your irritation and hunger in quarrels. He uses food in moderation and gives God thanks. Daily Isaiah cries: “Is it such a fast that I have chosen, saith the Lord?” and again: “In the day of your fast ye find your own pleasure, and oppress all your laborers. Behold ye fast for strife and contention, and to smite with the fist of wickedness. How fast ye unto me?” What kind of fast can his be whose wrath is such that not only does the night go down upon it, but that even the moon’s changes leave it unchanged?

38. Look to yourself and glory in your own success and not in others’ failure. Some women care for the flesh and reckon up their income and daily expenditure: such are no fit models for you. Judas was a traitor, but the eleven apostles did not waver. Phygellus and Alexander made shipwreck; but the rest continued to run the race of faith. Say not: “So-and-so enjoys her own property, she is honored of men, her brothers and sisters come to see her. Has she then ceased to be a virgin?” In the first place, it is doubtful if she is a virgin. For “the Lord seeth not as man seeth; for man looketh upon the outward appearance, but the Lord looketh on the heart.” Again, she may be a virgin in body and not in spirit. According to the apostle, a true virgin is “holy both in body and in spirit.” Lastly, let her glory in her own way. Let her override Paul’s opinion and live in the enjoyment of her good things But you and I must follow better examples.

Set before you the blessed Mary, whose surpassing purity made her meet to be the mother of the Lord. When the angel Gabriel came down to her, in the form of a man, and said: “Hail, thou that art highly favored; the Lord is with thee,” she was terror-stricken and unable to reply, for she had never been saluted by a man before. But, on learning who he was, she spoke, and one who had been afraid of a man conversed fearlessly with an angel. Now you, too, may be the Lord’s mother. “Take thee a great roll and write in it with a man’s pen Maher-shalal-hash-baz.” And when you have gone to the prophetess, and have conceived in the womb, and have brought forth a son, say: “Lord, we have been with child by thy fear, we have been in pain, we have brought forth the spirit of thy salvation, which we have wrought upon the earth.” Then shall your Son reply: “Behold my mother and my brethren.” And He whose name you have so recently inscribed upon the table of your heart, and have written with a pen upon its renewed surface – He, after He has recovered the spoil from the enemy, and has spoiled principalities and powers, nailing them to His cross – having been miraculously conceived, grows up to manhood; and, as He becomes older, regards you no longer as His mother, but as His bride. To be as the martyrs, or as the apostles, or as Christ, involves a hard struggle, but brings with it a great reward.

All such efforts are only of use when they are made within the church’s pale; we must celebrate the passover in the one house, we must enter the ark with Noah, we must take refuge from the fall of Jericho with the justified harlot, Rahab. Such virgins as there are said to be among the heretics and among the followers of the infamous Manes must be considered, not virgins, but prostitutes. For if–as they allege–the devil is the author of the body, how can they honor that which is fashioned by their foe? No; it is because they know that the name virgin brings glory with it, that they go about as wolves in sheep’s clothing. As antichrist pretends to be Christ, such virgins assume an honorable name, that they may the better cloak a discreditable life. Rejoice, my sister; rejoice, my daughter; rejoice, my virgin; for you have resolved to be, in reality, that which others insincerely feign.

39. The things that I have here set forth will seem hard to her who loves not Christ. But one who has come to regard all the splendor of the world as off-scourings, and to hold all things under the sun as vain, that he may win Christ; one who has died with his Lord and risen again, and has crucified the flesh with its affections and lusts; he will boldly cry out: “Who shall separate us from the love of Christ? Shall tribulation, or distress, or persecution, or famine, or nakedness, or peril, or sword?” and again: “I am persuaded that neither death nor life, nor angels, nor principalities nor powers, nor things present, nor things to come, nor height, nor depth, nor any other creature shall be able to separate us from the love of God which is in Christ Jesus, our Lord.”

For our salvation the Son of God is made the Son of Man. Nine months He awaits His birth in the womb, undergoes the most revolting conditions, and comes forth covered with blood, to be swathed in rags and covered with caresses. He who shuts up the world in His fist is contained in the narrow l limits of a manger. I say nothing of the thirty years during which he lives in obscurity, satisfied with the poverty of his parents. When He is scourged He holds His peace; when He is crucified, He prays for His crucifiers. “What shall I render unto the Lord for all His benefits towards me? I will take the cup of salvation and call upon the name of the Lord. Precious in the sight of the Lord is the death of His saints.” The only fitting return that we can make to Him is to give blood for blood; and, as we are redeemed by the blood of Christ, gladly to lay down our lives for our Redeemer. What saint has ever won his crown without first contending for it? Righteous Abel is murdered. Abraham is in danger of losing his wife. And, as I must not enlarge my book unduly, seek for yourself: you will find that all holy men have suffered adversity. Solomon alone lived in luxury and perhaps it was for this reason that he fell. For “whom the Lord loveth, He chasteneth, and scourgeth every son whom He receiveth.” Which is best – for a short time to do battle, to carry stakes for the palisades, to bear arms, to faint under heavy bucklers, that ever afterwards we may rejoice as victors? or to become slaves forever, just because we cannot endure for a single hour?

40. Love finds nothing hard; no task is difficult to the eager. Think of all that Jacob bore for Rachel, the wife who had been promised to him. “Jacob,” the Scripture says, “served seven years for Rachel. And they seemed unto him but a few days for the love he had to her.” Afterwards he himself tells us what he had to undergo. “In the day the drought consumed me and the frost by night.” So we must love Christ and always seek His embraces. Then everything difficult will seem easy; all things long we shall account short; and smitten with His arrows, we shall say every moment: “Woe is me that I have prolonged my pilgrimage.” For “the sufferings of this present time are not worthy to be compared with the glory which shall be revealed in us.” For “tribulation worketh patience, and patience experience, and experience hope; and hope maketh not ashamed.” When your lot seems hard to bear read Paul’s second epistle to the Corinthians: “In labors more abundant; in stripes above measure; in prisons more frequent; in deaths oft. Of the Jews five times received I forty stripes save one; thrice was I beaten with rods; once was I stoned; thrice I suffered shipwreck; a night and a day I have been in the deep; in journeyings often, in perils of waters, in perils of robbers, in perils by mine own countrymen, in perils by the heathen, in perils in the city, in perils in the wilderness, in perils in the sea, in perils among false brethren, in weariness and painfulness, in watchings often, in hunger and thirst, in fastings often, in cold and nakedness.” Which of us can claim the veriest fraction of the virtues here enumerated? Yet it was these which afterwards made him bold to say: “I have finished my course, I have kept the faith. Henceforth there is laid up for me a crown of righteousness which the Lord, the righteous Judge, shall give me at that day.”

But we, if our food is less appetizing than usual, get sullen, and fancy that we do God a favor by drinking watered wine. And if the water brought to us is a trifle too warm, we break the cup and overturn the table and scourge the servant in fault until blood comes. “The kingdom of heaven suffereth violence and the violent take it by force.” Still, unless you use force you will never seize the kingdom of heaven. Unless you knock importunately you will never receive the sacramental bread. Is it not truly violence, think you, when the flesh desires to be as God and ascends to the place whence angels have fallen to judge angels?

41. Emerge, I pray you, for a while from your prison-house, and paint before your eyes the reward of your present toil, a reward which “eye hath not seen, nor ear heard, neither hath it entered into the heart of man.” What will be the glory of that day when Mary, the mother of the Lord, shall come to meet you, accompanied by her virgin choirs! When, the Red Sea past and Pharaoh drowned with his host, Miriam, Aaron’s sister, her timbrel in her hand, shall chant to the answering women: “Sing ye unto the Lord, for he hath triumphed gloriously; the horse and his rider hath he thrown into the sea.” Then shall Thecla fly with joy to embrace you. Then shall your Spouse himself come forward and say: “Rise up, my love, my fair one, and come away, for lo! the winter is past, the rain is over and gone.” Then shall the angels say with wonder: “Who is she that looketh forth as the morning, fair as the moon, clear as the sun?” “The daughters shall see you and bless you; yea, the queens shall proclaim and the concubines shall praise you.” And, after these, yet another company of chaste women will meet you. Sarah will come with the wedded; Anna, the I daughter of Phanuel, with the widows. In the one band you will find your natural mother and in the other your spiritual. The one will rejoice in having borne, the other will exult in having taught you. Then truly will the Lord ride upon his ass, and thus enter the heavenly Jerusalem. Then the little ones (of whom, in Isaiah, the Saviour says: “Behold, I and the children whom the Lord hath given me”) shall lift up palms of victory and shall sing with one voice: “Hosanna in the highest, blessed is he that cometh in the name of the Lord, hosanna in the highest.” Then shall the “hundred and forty and four thousand “hold their harps before the throne and before the elders and shall sing the new song. And no man shall have power to learn that song save those for whom it is appointed. “These are they which were not defiled with women; for they are virgins. These are they which follow the Lamb whithersoever he goeth.” As often as this life’s idle show tries to charm you; as often as you see in the world some vain pomp, transport yourself in mind to Paradise, essay to be now what you will be hereafter, and you will hear your Spouse say: “Set me as a sunshade in thine heart and as a seal upon thine arm.” And then, strengthened in body as well as in mind, you, too, will cry aloud and say: “Many waters cannot quench love, neither can the floods drown it.”

SOURCE : https://catholicsaints.info/saint-jerome-letter-23-to-eustochium/

Santa Eustochio Vergine

28 settembre

† 419

Appartenente all'aristocrazia romana. Con sua madre, divenne figlia spirituale di San Girolamo. Quando costui partì per la Terra Santa, esse lo seguirono. A Gerusalemme si dedicò al lavoro di scrivano per San Girolamo, aiutandolo nella traduzione della Vulgata.

Martirologio Romano: A Betlemme di Giuda, commemorazione di santa Eustochio, vergine, che, insieme a sua madre santa Paola, partì da Roma per raggiungere il presepe del Signore e non privarsi del consiglio del suo maestro san Girolamo e in questa terra passò al Signore rifulgendo di meriti insigni.

Santa EUSTOCHIO, figlia di santa Paola romana

Eustochio nacque a Roma non prima del 367, terzogenita del senatore Tossozio e della matrona Paola, appartenenti ambedue all'alta aristocrazia romana. Dopo un periodo giovanile dedito alla mondanità, alla morte del padre, avvenuta nel 379, seguì la madre nell'aggregarsi al cenacolo di Marcella sull'Aventino. Quando, negli anni 382-85, san Girolamo soggiornò a Roma, ella gli fu affezionata discepola, frequentando assiduamente le conferenze sulla Sacra Scrittura che il santo dottore teneva a un gruppo di signore romane nella casa di Marcella. Per lei, alunna esemplare, egli scrisse l'Epistola XXII, che può definirsi il più diffuso trattato sulla verginità. In occasione della festa dei santi Apostoli Pietro e Paolo del 384, Eustochio gli mandò un biglietto e alcuni doni simbolici, cioè un paniere di ciliegie, alcune armille e alcune colombe. Girolamo le rispose con una lettera molto arguta.

Quando Paola decise di fissare la sua dimora in Palestina per non rimanere priva della direzione di san Girolamo, Eustochio si unì a lei. Nell’autunno del 385, madre e figlia si imbarcarono a Porto Romano e sbarcarono a Seleucia, porto di Antiochia di Siria, capitale della regione, accolte dal vescovo Paolino. Qui era Girolamo ad attendere le pellegrine. Il gruppo bordeggiò lungo la costa della Siria e, quindi, della Palestina, toccando Tolemaide, Cesarea, Diospoli, Joppe, salendo per Nicopoli a Gerusalemme e recandosi poi a Betlemme. Continuò le devote esplorazioni spingendosi nella Galilea e quindi in Egitto; in Egitto volle vedere anche la Nitria. Girolamo, profondo conoscitore della Sacra Scrittura, sapeva illustrare ogni luogo da dotto. Nel 386 la carovana ripartì per la Palestina; a Betlemme Paola costruì due monasteri, uno per le religiose presso la grotta e l’altro per i monaci, a debita distanza.

Qui Eustochio dedicò molto tempo allo studio della Sacra Scrittura, divenendo una brava ebraista come Paola; tutte e due, poi, sapevano stimolare Girolamo al lavoro biblico. Egli dedicò loro la traduzione del Libro dei Re; le diciotto prefazioni dei libri di Isaia e le quattordici prefazioni di Ezechiele sono dedicate a Eustochio. Ella era la disccpola prediletta, perché vergine.

Quando Paola nel 402-403 si ammalò di una malattia che doveva portarla alla morte, Eustochio compì verso di lei tutti i doveri dell’amor filiale. Morta la madre, Eustochio prese la cura e il governo del monastero da lei fondato, camminando sulla scia luminosa degli esempi e degli ideali della genitrice. Qui continuò a stimolare Girolamo a continuare i lavori biblici, che aveva intrapreso per le insistenze della madre. Per lei Girolamo tradusse la regola di san Pacomio, verso il 404. Morì nel 419, ma non si conosce il giorno del suo transito, per cui i martirologi lo mettono al 20 o 28 settembre, al 20 febbraio, al 2 marzo e al 2 novembre. Tre brevi lettere di Girolamo ci dicono la sua desolazione: «la morte improvvisa della santa e venerabile vergine di Cristo mi ha sconvolto ed ha cambiato il mio genere di vita».

Eustochio non ha avuto alcun culto nell’antichità: è entrata nei martirologi piuttosto recentemente, e in pochi. Il Martirologio Romano la ricorda al 28 settembre. È raffigurata assieme alla madre santa Paola come pellegrina ai Luoghi Santi.

Autore: Filippo Caraffa

SOURCE : https://www.santiebeati.it/dettaglio/72330

Den hellige Eustochium av Betlehem (~367-~419)

Minnedag: 28. september

Den hellige Eustochium Julia ble født rundt 367 i Roma. Hun var av gammel adelsslekt og var den tredje av de fire døtrene av den hellige Paula (347-404) og hennes mann Julius Toxotius. Hennes søstre var den hellige Blesilla, Rufina og Paulina, som giftet seg med den hellige senatoren Pammachius, men døde i 397 etter å ha satt et dødfødt barn til verden. I tillegg hadde de fire søstrene en bror, Julius Toxotius den yngre. T.S.M. Mommaerts og D.H. Kelley hevder at Eustochium Julias far var Julius Toxotius den yngre, og at hans mor var Laeta, datter av Publius Ceionius Caecina Albinus av slekten Ceionii Volusiani, en hedning og prest (The Anicii of Gaul and Rome, in Fifth-century Gaul: a Crisis of Identity? redigert av John Drinkwater og Hugh Elton, Cambridge University Press 1992, s 120-21).

Julia var rundt tolv år gammel da hennes far døde i 379. Etter en periode med dyp sorg opplevde Paula, som selv bare var 32 år gammel, en religiøs omvendelse. Hun sluttet seg til en asketisk krets i Roma under ledelse av den hellige Marcella, og deres veileder var den hellige Hieronymus etter at han kom til Roma i 382. Eustochium ble fromt oppdratt av Paula og venninnen Marcella.

Blesilla var Hieronymus’ yndlingsprotesjé, men da hun døde i 383, bare tyve år gammel, ble hans interesse konsentrert om Paulas tredje datter, Eustochium. Han formet henne fra tidlig alder til en slags lærd jomfruelighet, en oppdragelse som inkluderte timer i hebraisk og formaninger til kyskhet «så presise og detaljerte at de ville fått en legionær til å rødme». Slektninger var imidlertid bekymret over at den askesen som han foreskrev for Eustochium var for streng. Hun var bare fjorten eller femten år gammel da Hieronymus kom til byen, og en onkel og tante av Eustochium, Hymettius og Praetextata, prøvde å overtale hennes til å gi opp sitt asketiske liv og delta i noen av livets ordinære fornøyelser.

Men de lyktes ikke, og rundt 384 avla hun løfte om evig jomfruelighet. Hun var den første unge romerske adelskvinnen som gjorde dette, og for å markere anledningen skrev Hieronymus til henne i 384 sitt berømte brev «Om å beholde jomfrueligheten» (De custodia virginitatis). Men med sine avsnitt med satire og sin nådeløse kritikk av visse konsekrerte jomfruer og prester, var brevet opplagt ment for et bredere publikum. Et annet og mer rent personlig brev, datert 29. juni 384, er bevart. Der gir Hieronymus henne en skarp reprimande for å ha sendt ham noen kirsebær, duer og andre gjenstander, som han åpenbart betraktet som trivielle.

Eustochium ser ikke ut til å ha blitt permanent nedslått over dette. Hennes opplæring hadde blitt betrodd til Marcella, som hjalp Paula gjennom hennes sorg og utøvde en sterk innflytelse både på henne og datteren. I 385 forlot en skuffet Hieronymus Roma etter å ha blitt forbigått ved pavevalget. Da Paula sammen med en rekke andre kvinner som aspirerte til det religiøse liv, bestemte seg for å reise etter ham, valgte Eustochium å bli med moren til Palestina. I mai 386 reiste Paula, Eustochium og andre av hans disipler etter Hieronymus, som nå hadde flyttet til Antiokia, og deretter dro de på pilegrimsreise til Det hellige Land og til Egypt for å møte munkene og eremittene der. Hieronymus viste seg som en stimulerende reiseleder og holdt lærde forelesninger om alle de stedene de besøkte.

Senere i 386 slo de seg ned i Betlehem. Paula og Eustochium var nå fornøyd med å bo i en knøttliten hytte i stedet for sin romslige romerske villa. Paula tok nå ledelsen for gruppen, og for hennes formue kjøpte de noen hus, hvor Paula under Hieronymus’ ledelse grunnla tre store kvinneklostre og han et mindre mannskloster hvor de kunne leve et ordensliv i fred. Alle var likt og ganske enkelt kledd for å vise at de alle var like i Guds øyne. Men midt i askesen holdt de fast ved de romerske sosiale forskjellene: I et av kvinneklostrene ble søstrene delt i tre grader etter sosial klasse, og de møttes bare til tidebønnene og gudstjenestene. Eustochium hadde ansvaret for alle praktiske oppgaver, inkludert matlaging. Paula ga bort så mye penger til velgjørenhet at mot slutten av livet hadde hun og ledsagerne en svært anstrengt økonomi.

Det ble åpnet et gjestehus for reisende og en gratis skole hvor Hieronymus lærte barn fra området gresk og latin. Selv bodde han i en grotte nær Fødselsgrotten. Paula sa at det var for å være sikker på at hvis Maria og Josef igjen kom til Betlehem, ville det finnes et sted hvor de kunne bo. Både Paula og Eustochium lærte seg hebraisk og gresk. Hieronymus’ disipler hjalp ham med hans arbeid med å oversette Bibelen til latin. Men da synet begynte å svikte, ville han ha vært nødt til å gi opp arbeidet om ikke Eustochium og hennes mor hadde vært der og hjulpet ham. Han anså at de var bedre skikket til å vurdere verdien av hans arbeid enn de fleste menn, og han dediserte noen av hans skrifter til dem. På deres anmodning skrev han kommentarer til den hellige apostelen Paulus’ brev til galaterne, efeserne, Titus og Filemon. Han dedikerte sine kommentarer til profetene Jesaja og Esekiel til Eustochium.

I 403 ble Paula syk, og Eustochium delte sin tid mellom å stelle for moren og å be for henne i fødselsgrotten. Da moren til slutt døde den 26. januar 404, var smerten ved atskillelsen og tapet svært hard for Eustochium. Hieronymus forteller at hun var som et spedbarn som blir tatt fra barnepiken og at hun ønsket at hun kunne ha blitt gravlagt sammen med moren. Men hun overlevde sorgen og tok ledelsen for kvinnekommuniteten i Betlehem. Hun måtte ta seg av den store gjelden moren etterlot seg. Situasjonen ble reddet delvis på grunn av den oppmuntring hun fikk fra Hieronymus, delvis på grunn av sitt eget stille mot og delvis med midler fra Hennes niese Paula, som hadde kommet fra Roma for å slutte seg til kommuniteten.

Eustochium var leder for kommuniteten da den i 416 ble plyndret og klostrene brent ned av en mobb. Hieronymus, Eustochium og Paula skrev for å advare den hellige pave Innocent I (401-17), og han sendte på sin side en reprimande til biskopen av Jerusalem fordi han ikke klarte å sørge for bedre sikkerhet. Men Eustochium kom seg aldri helt etter dette sjokket, og hun døde rundt 419 i Betlehem og ble etterfulgt som leder for kvinneklostrene av sin niese, Paula den yngre. Hieronymus skrev at hennes død «har voldt meg fryktelige bekymringer og nesten forandret min levemåte, for alderdommen tar på meg». Ifølge Eustochiums legendariske vita døde hun den 28. september 420, to dager før Hieronymus. Hun ble gravlagt i samme grav som sin mor, nær fødselsgrotten. Graven er fortsatt der, men den er nå tom.

Eustochium er hovedsakelig kjent gjennom Hieronymus’ brev. Det lengste av dem var adressert til henne da hun var rundt seksten år. Det er en informativ avhandling om det jomfruelige liv, og er et berømt dokument i de monastiske idealenes historie. Hieronymus skriver et annet sted at hun var en kvinne av stor ånd i en liten kropp, og tilskriver skrivingen av mange av hans bibelkommentarer hennes oppmuntring.

Det var ingen tidlig kult for Eustochium, og hennes navn opptrer i bare noen få martyrologier. Det ble en fornyet interesse for henne på 1500-tallet da den hellige Angela Merici grunnla ursulinnenes kongregasjon. Paula og Eustochium er avbildet på veggene i oratoriet i ursulinnenes kloster i Roma. Hennes minnedag i Martyrologium Romanum er dødsdagen 28. september. Hun fremstilles som jomfru eller nonne med lilje, som eneboerske eller i samtale med Hieronymus.

Kilder: Attwater/John, Attwater/Cumming, Bentley, Butler (IX), Benedictines, Delaney, Bunson, Gorys, KIR, CSO, Patron Saints SQPN, Infocatho, Bautz, santiebeati.it, en.wikipedia.org, zeno.org - Kompilasjon og oversettelse: p. Per Einar Odden

Opprettet: 4. juli 1999

SOURCE : http://www.katolsk.no/biografier/historisk/eustochi

Voir aussi : http://www.christianiconography.info/eustochium.html