Bienheureux Nicolas Roland
Prêtre (✝ 1678)
"A Reims, il s'installe dans une
maison, rue du Barbâtre, et partage son toit avec un groupe de jeunes clercs
afin de les former au sacerdoce. Il remplit ses fonctions de théologal:
prédication et enseignement, mais il veut élargir son champ d'action: aller
vers les gens pour toucher les cœurs plutôt que de contenter les esprits. Il se
fait prédicateur du peuple et répond aux demandes de ses confrères en
parcourant une bonne partie du diocèse... Il se découvre ainsi une éloquence
apostolique; parler simple pour parler à tous."
Source: diocèse de Reims.
Un internaute nous précise qu'il est mort à l'âge de 35 ans.
A lire: P. Bernard Pitaud, Nicolas Roland et les sœurs de l'Enfant-Jésus - L'école française à Reims au 17ème siècle, Paris, Éd. du Cerf, coll. « Épiphanie », 2001.
À Reims, en 1678, le bienheureux Nicolas Roland, prêtre. Préoccupé de la formation chrétienne des enfants, il créa des écoles pour les enfants pauvres qui étaient alors exclus de toute formation, et fonda la Congrégation des Sœurs du Saint Enfant Jésus.
Martyrologe romain
Crypte où repose
Nicolas Roland, 48 rue du Barbâtre à Reims.
Photographie de G.Garitan
Bienheureux
Nicolas Roland
Nicolas ROLAND est né à Reims, le 8 décembre
1642. Il est le fils de Jean-Baptiste ROLAND, commissaire aux guerres, naguère
commerçant en draps, et de Nicole BEUVELET. Il naît à l’époque de la Fronde.
Vers l’âge de huit ans, il entre au collège des Jésuites. Ses années d’études
le conduisent à se préparer à ce que Dieu attend de lui. Il est très vite
attiré par le sacerdoce. En 1653, alors qu’il assistait à une ordination dans
l’abbaye de Saint Pierre les Dames, il se sent soudainement poussé
intérieurement à demander la tonsure. Ainsi éclate la spontanéité de son âme.
Ses
études terminées, il voyage à travers la France, parcourt les provinces, mène
une vie mondaine. Mais à la suite d’une mésaventure, il décide de renoncer à
tout voyage, se dirige vers Paris pour y suivre une retraite et perçoit l’appel
à être prêtre. Il entreprend alors des études de philosophie et de théologie.
II fréquente une communauté de jeunes, passionnés par Jésus-Christ autour du
Père Bagot. À l’Assomption 1665, Nicolas ROLAND, jeune diacre de 22 ans, est
nommé chanoine théologal, en la cathédrale de Reims, en raison de ses talents
d’orateur.
Mais,
dans une France ruinée par la Fronde et par les guerres royales, Nicolas ROLAND
est bouleversé par la misère des plus pauvres. Le sort des enfants le
préoccupe. Il prend alors en charge un groupe d’orphelins aidé de deux
religieuses que le Père Barré de Rouen lui a envoyées.
C’est
une nouvelle étape pour Nicolas ROLAND ; en continuant la formation des
prêtres, il va consacrer le reste de sa vie a soulager les enfants pauvres, a
les éduquer et a leur annoncer Jésus-Christ. Ouvrir des écoles ne lui suffit
pas, il sent l’urgence de fonder une communauté d’apôtres consacrées, qu’il
enverra deux par deux à travers les villes et les campagnes à la rencontre des
jeunes et des familles : ce sera l’ébauche du travail pastoral et
paroissial qui se poursuivra après sa mort.
Sa
maison des orphelins devient la maison du Saint Enfant-Jésus en décembre 1670.
Malgré les problèmes matériels et administratifs, Nicolas ROLAND ouvre
plusieurs écoles gratuites dans différents quartiers.
Il
repart alors pour Paris afin de se replonger dans le climat de sa formation, en
particulier dans les communautés de Saint Nicolas du Chardonnet et de Saint
Sulpice. De là, II se rend à Rouen auprès du Père Barré et de Monsieur de la
Haye, curé de Saint Amand qui marqueront d’une façon décisive sa vocation
apostolique. Il y reste six mois vivant dans la pénitence et la pauvreté.
De
retour à Reims, il s’installe dans une maison, rue du Barbâtre, et partage son
toit avec un groupe de jeunes clercs afin de les former au sacerdoce. Il
remplit ses fonctions de théologal : prédication et enseignement, mais il
veut élargir son champ d’action : aller vers les gens pour toucher les
coeurs plutôt que de contenter les esprits. Il se fait prédicateur du peuple et
répond aux demandes de ses confrères en parcourant une bonne partie du diocèse
… Il se découvre ainsi une éloquence apostolique ; parler simple pour
parler à tous.
Encouragé
par son ami, Monsieur de Renty. il part en pèlerinage au Carmel de Beaune pour
se vouer d’une façon toute particulière au mystère de l’Incarnation du Fils de
Dieu, spécialement en son Enfance. Pour obtenir les lettres patentes, Nicolas
ROLAND passe alors tout l’hiver 1678 à Paris. Il rentre à Reims en avril pour
assister à l’ordination de son jeune ami et disciple St Jean-Baptiste de la
Salle à qui il a communiqué sa flamme.
Mais
le 19 avril, Nicolas ROLAND tombe gravement malade. Il confie alors à St
Jean-Baptiste de la Salle, la mission de mener à bien la reconnaissance de la
communauté de l’Enfant- Jésus, mais également de soutenir moralement les soeurs
qui s’engagent de plus en plus nombreuses.
Nicolas
ROLAND meurt le 27 avril 1678.
Éléments de Bibliographie :
* P. Bernard Pitaud : Nicolas
Roland et les soeurs de l’Enfant-Jésus – L’école française à Reims au 17ème
siècle – Paris, Éd. du Cerf, coll. « Épiphanie », 2001.
UN SAINT, UNE VIE
Bienheureux Nicolas
Roland, recevoir et donner
· LECOEUR
Xavier,
·
Reims en 1642, au
sein d'une famille bourgeoise aisée. Son père, ancien commerçant en draps,
occupait le poste envié de fonctionnaire royal. Le jeune Nicolas fit de solides
études au collège des Jésuites de la ville, avant de s'offrir – grâce à
l'argent familial – un voyage de plusieurs mois, dans plusieurs pays,
destiné à parfaire sa culture et à développer ses relations.
À 18 ans cependant, il se détourna de la carrière de
négociant que l'on envisageait pour lui et s'orienta vers le sacerdoce. Au
terme de trois années de philosophie et de théologie à Paris, il revint en 1663
à Reims où, grâce à l'influence de sa famille, les portes du chapitre de la
cathédrale s'ouvrirent à lui. Le jeune chanoine Roland, ordonné diacre puis
prêtre, devint l'un des conseillers attitrés de l'archevêque et fut même nommé
« théologal »: à ce titre, il prêchait chaque dimanche dans la
cathédrale et donnait des conférences plusieurs fois par semaine aux membres du
clergé.
Mais Nicolas Roland, homme entier et passionné, avait les
yeux bien ouverts sur le monde qui l'entourait: il fut profondément touché par
la misère croissante des plus pauvres. Le fils de famille qui avait tant reçu
se sentit alors appelé à donner à son tour, convaincu que « Dieu ne sépare pas la charité qu'Il veut
que nous ayons pour Lui de celle qu'Il nous demande d'avoir pour nos
frères ».
Ses sermons brillants et enflammés enthousiasmaient la
haute société rémoise. Mais qui s'occupait de l'instruction chrétienne du
peuple et, notamment, des jeunes livrés à eux-mêmes? Cette question l'amena à
repartir pour Paris, puis à aller à Rouen où il fut impressionné par l'œuvre
réalisée par le futur bienheureux Nicolas Barré: ce religieux de l'ordre des
Minimes avait ouvert, dans la ville de Corneille, plusieurs « écoles
chrétiennes et charitables » destinées aux enfants des rues.
De retour à Reims en 1670, Nicolas Roland chercha à faire
de même. Il reprit, à ses propres frais, un orphelinat qu'il transforma en
maison d'éducation pour fillettes. Il fut aidé en cela par le P. Barré qui
eut la générosité de lui envoyer deux de ses meilleures enseignantes: Françoise
Duval et Anne Le Cœur. Rejointes par des jeunes filles rémoises, elles
formèrent le noyau de la future congrégation des Sœurs du Saint-Enfant-Jésus.
Malgré les oppositions, Nicolas Roland parvint à ouvrir
plusieurs écoles gratuites à Reims. Toutefois, épuisé par son travail
apostolique, il mourut le 27 avril 1678, âgé de seulement 35 ans. Le
projet et l'esprit de cet homme « saisi
par l'Amour de Dieu »,manifesté dans le mystère de l'Incarnation,
perdurèrent tout de même grâce à sa congrégation bien sûr, mais aussi grâce à
un jeune Rémois dont il fut le confesseur, l'ami et le précurseur: saint
Jean-Baptiste de La Salle, le fondateur des Frères des Écoles chrétiennes.
> Aller à sa rencontre: * Un livre. Nicolas Roland
et les Sœurs de l'Enfant-Jésus, par Bernard Pitaud (Cerf, 2001). * Un site.
Celui de la Congrégation – https://soeurssaintenfantjesus.wordpress.com
CHRONOLOGIE
DE SA VIE
1642
8 décembre,
naissance, à Reims, de Nicolas Roland, fondateur de la Communauté du Saint
Enfant-Jésus de Reims. Il fut le directeur spirituel de saint Jean-Baptiste de
la Salle.
15 décembre, mort à
Marle de Nicolas Beuvelet, grand-père de Nicolas Roland.
1643
31 mars, Léonor
d’Étampes, nouvel archevêque, entre à Reims.
14 mai, mort de Louis
XIII.
23 juillet, baptême à
Saint-Symphorien — première cathédrale de Reims — de Nicolas Roland. C’était le
jour de la fête de la translation de saint Nicaise, évêque martyr de Reims.
1644
Mathieu Beuvelet,
oncle et parrain de Nicolas Roland, entre dans la Communauté de
Saint-Nicolas-du-Chardonnet.
1645
En 1645, les
Jésuites, malgré les échecs qu’ils avaient éprouvés, auparavant, tentèrent
alors quelques acquisitions pour fonder un nouvel établissement. Leurs projets
échouèrent, malgré l’intervention du duc d’Enghein auprès du Conseil de Ville.
1648
Âgée d’à peine 5 ans,
Nicolas Roland apprend à lire en 4 mois, grâce à sa tante, Madame la
Conseillère.
1649
Philippe Roland, oncle
de Nicolas, devient chanoine de la cathédrale. Il le restera jusqu’à sa mort
(1630-1667).
1650
Grande épidémie à
Reims.
Mathieu Beuvelet est
ordonné prêtre à Saint-Nicolas-du-Chardonnet.
1651
30 avril, naissance,
à Reims, de Jean-Baptiste de la Salle († 1719 à Rouen). Béatifie le 19 février
1888 et Canonisé le 24 mai 1900 par Léon XIII.
Mort de l’archevêque
de Reims, Léonor d’Étampes de Valençay.
Henri de Savoye et de
Nemours, qui fut nommée en 1651, abdiqua en 1657 sans avoir pris possession de
son archevêché.
1652
Mathieu Beuvelet,
oncle et parrain de Nicolas Roland, fait un voyage à Reims, il essaie de fonder
une Communauté de prêtres comme celle de Saint-Nicolas-du-Chardonnet.
1653
A l’âge de 11 ans,
Nicolas Roland reçoit la tonsure des mains de Monseigneur Henri de Maupas du
Thour, évêque du Puy, ancien abbé de l’abbaye de Saint-Denis de Reims.
1654
7 juin, sacre de
Louis XIV à Reims par Simon le Gras, évêque de Soissons. L’évêché de Reims était
alors vacant.
Lors de la venue de
Louis XIV pour son sacre à Reims, Nicolas Roland, alors âgé de 11 ans, joua
dans une pièce de théâtre spécialement écrite pour l’occasion de la venue du
souverain. Il s’y fit remarquer par son sang froid.
1655
Mathieu Beuvelet,
oncle et parrain de Nicolas Roland, vient à Reims pour la dernière fois. Ce fut
à cette occasion qu’eut lieu l’extase lors de la célébration de la sainte
Messe.
1656
15 février, mort de
Mathieu Beuvelet, oncle de Nicolas Roland et compagnon du Père Adrien Bourdoise
à Saint-Nicolas-du-Chardonnet, pour la Congrégation duquel il a écrit des “Méditations”
pour la formation des prêtres.
Jean Roland, oncle de
Nicolas, reçoit la 28e prébende du chapitre cathédral. Il fut chantre et
trésorier de l’Église de Reims et même vicaire général de Monseigneur Charles
Maurice Le Tellier (1640-1703).
1657
Le Cardinal
Barberini, neveu du Pape Urbain VIII est nommé archevêque de Reims. Il ne prit
possession de son diocèse qu’en 1667.
1660
Contre l’avis de son
père, Nicolas Roland participe à un bal, où il court un danger. Repenti, il ne
participera jamais à aucun autre.
Nicolas Roland fait
ses études à Paris. Il a alors 17 ans.
Le 26 août, lors de
l’entrée à Paris de l’Infante Marie-Thérèse, Nicolas prie devant le
Saint-Sacrement, alors que son père, ses frères et sœurs regardent passer le
cortège royal.
1661
Nicolas Roland
protégé par la sainte Vierge, lors d’un voyage en mer.
1663
Nicolas Roland
termine, à Paris, ses études de théologie et conquiert le bonnet de docteur.
1664
18 mars, ouverture à
Reims de la première maison des orphelins, par Madame Varlet.
1665
12 août, Nicolas
Roland entre au Chapitre Métropolitain de Reims.
Nicolas Roland
commence à prêcher. Il n’a que 22 ans.
Nouveau voyage à
Paris. Il fréquente Saint-Sulpice, Saint-Nicolas-du-Chardonnet et Saint-Lazare.
1667
3 mars, un Édit royal
règle les formalités nécessaires à l’installation des communautés religieuses.
17 mars,
Jean-Baptiste de La Salle reçoit les ordres mineurs.
1668
Nicolas Roland se
rend en pèlerinage au Carmel de Beaune, sur la tombe de sœur Marguerite du
Saint-Sacrement, avant de fonder la Communauté du Saint Enfant Jésus à Reims.
Épidémie de peste à
Reims. A cette occasion, Monseigneur Barberini, archevêque de Reims, ordonne
des processions de la châsse de Saint Rémi à travers la ville. Nicolas Roland y
participe activement, car il était parmi les huit chanoines désignés pour
porter la lourde châsse.
1669
Nicolas Dallier,
lieutenant des habitants de Reims (1669-1674).
Il négocia avec
Monseigneur Charles Maurice Le Tellier, alors coadjuteur du cardinal Barberini,
un certain nombre de closes concernant les relations des gens de la
Ville et l’évêché.
Ce fut aussi à ce
Lieutenant que Nicolas Roland du recourir pour la fondation de la Communauté du
Saint Enfant-Jésus.
1670
Nicolas Roland prêche
le Carême à Rouen. Avant d’aller à Rouen, il avait changé sa façon de prêcher.
Il avait éliminé de son discours toute recherche de grandiloquence.
22 décembre, Nicolas
Roland achète une maison rue du Barbâtre pour sa fondation (en face de la
maison actuelle : à l’enseigne Saint-Martin.).
27 décembre, arrivée
des deux premières Sœurs de la Communauté : Françoise Duval et Anne Le Cœur.
Elles étaient envoyées par le Père Barré.
1671
11 janvier,
célébration de la première Messe chez les Sœurs, en présence de Nicolas
Dallier, lieutenant des habitants de Monsieur Bachelier, ancien Lieutenant.
3 août, le Cardinal
Barberini, archevêque de Reims, meurt en Italie, à Nemi, près de Rome.
Charles-Maurice Le
Tellier devient archevêque de Reims.
1672
2 juin, Jean-Baptiste
de La Salle est ordonné sous-diacre à Cambrai par Monseigneur Ladislas Jonnart,
évêque de cette ville.
1673
Mort de Jean-Baptiste
Roland, père de Nicolas Roland. (1611-1673).
1674
4 août, Nicolas
Roland fait poser la première pierre d’une véritable chapelle pour sa
Communauté naissante.
1675
4 juillet, rencontre,
à l’archevêché de Reims, de Nicolas Roland et de Nicolas Dallier, lieutenant
des habitants.
16 juillet,
bénédiction de la chapelle de la Communauté du Saint Enfant Jésus de Reims.
1676
Nicolas Roland
participe activement aux missions de Sommepy et de Fismes, données par les
prêtres de Saint-Lazare.
Nicolas Roland fait
le voyage de Rouen, pour y prêcher le Carême et pour rencontrer le Père Barré.
Sa maison devient le
premier Séminaire de Reims.
21 mars,
Jean-Baptiste de La Salle reçoit le diaconat, dans la chapelle de l’archevêché
de Paris des mains de François Batailler, capucin, évêque de Béthléem.
Louis Tronsson
devient supérieur général du Séminaire de Saint-Sulpice, en remplacement de M.
de Bretonvilliers.
1677
Novembre, Nicolas
Roland part pour Paris afin d’obtenir les Lettres Patents pour sa fondation. Il
logea chez les Carmes déchaussés.
1678
Jeudi 7 avril,
Nicolas Roland rentre à Reims, sans avoir obtenu les Lettres Patentes.
Nicolas Roland fait
le projet de se retirer à Caen, dans la Maison de Monsieur de Bernières. Ce
projet ne se réalisera pas, car le 21 avril, il meurt, à Reims, entouré de son
successeur, le Père Guillaume Rogier et de son fils spirituel, saint Jean
Baptiste de la Salle. (1642-1678).
9 avril,
Jean-Baptiste de La Salle est ordonné prêtre par l’archevêque de Reims, Charles
Maurice Le Tellier.
Épidémie de fièvres
pourpreuses, à Reims. Maladie contagieuse.
19 avril, le Conseil
de la Ville de Reims décide d’attendre la décision du Roi, avant de permettre à
Nicolas Roland de fonder sa Communauté.
19 avril, Nicolas
Roland est atteint par la maladie des fièvres pourpreuses.
23 avril, Nicolas
Roland fait son testament.
27 avril, mort du
bienheureux Nicolas Roland (1642-1678).
29 avril, obsèques
solennelles du bienheureux. Il fut inhumé dans la chapelle de la Communauté, au
pied du tabernacle.
9 mai, Lettres de
Cachet, signées par Louis XIV, autorisant la fondation de la Communauté du
Saint Enfant-Jésus de Reims.
24 mai, Monseigneur
Le Tellier remet au Conseil de Ville la lettre royale qui autorise la fondation
de la Communauté.
11 août,
procès-verbal de l’établissement officiel de la Communauté du saint
Enfant-Jésus.
1679
17 février,
enregistrement des Lettres Patentes données par le roi. La Communauté du Saint
Enfant-Jésus a désormais une existence légale.
Mois de mars, arrivée
à Reims de Adrien Nyel, pour fonder, avec Jean-Baptiste de La Salle la première
école de garçons.
15 avril, saint
Jean-Baptiste de la Salle ouvre sa première école.
1681
Jean-Baptiste Amé,
lieutenant des habitants de Reims (1681-1683).
Il était le
beau-frère de Nicolas Roland. † 6 novembre 1703.
1683
12 novembre,
Monseigneur Le Tellier signe les premières Constitutions de la Communauté du
Saint Enfant-Jésus de Reims.
1684
8 février, huit Sœurs
prononcent leurs vœux dans la nouvelle Communauté du Saint Enfant-Jésus de
Reims.
Mort de Nicole
Beuvelet, mère de Nicolas Roland (1617-1684).
● ● ●
1939
Le Cardinal Suhard
signe le décret d’ouverture du procès en vue de la béatification de Nicolas
Roland.
1941
Constitution d’une
commission historique et d’un tribunal diocésain.
1978
20 novembre, le frère
Morelli, des Frères des Écoles Chrétiennes, est nommé Postulateur de la cause.
1980
24 avril, après un
procès de non-culte favorable, la clôture du procès diocésain est ratifiée par
Monseigneur Ménager.
2 mai, envoi du
dossier à Rome.
1982
26 mars décret
d’approbation des écrits de Nicolas Roland.
1986
Publication de
la “Position super virtutibus”.
1987
3 mars, session des
consulteurs historiques.
1988
25 mars, le décret
d’approbation est promulgué.
1992
21 décembre, le Pape
signe le décret reconnaissant la pratique héroïque des vertus, tant théologales
que cardinales.
1993
27 avril, la
Commission médicale pontificale accepte le miracle proposé pour la cause.
24 juin, la
Commission des théologiens donne son accord.
19 octobre la
Commission plénière des Cardinaux entérine la décision des théologiens.
1994
16 octobre,
béatification de Nicolas Roland, à Rome, par le Pape Jean-Paul II.
MÉMOIRES
sur la Vie de Monsieur Nicolas
Roland, prêtre,
Chanoine Théologal de l’Église de Reims,
et Fondateur de la Communauté du Saint-Enfant-Jésus,
CHAPITRE I
Sa naissance,
l’origine de ses parents,
et ses premières années
Sa naissance,
l’origine de ses parents,
et ses premières années
Monsieur
Nicolas Roland, naquit à Reims, le deux décembre 1642,[2] de Monsieur Jean-Baptiste
Roland, Commissaire ordinaire des guerres, et de Dame Nicole Beuvelet, native
de Marle, en Picardie, tous deux fort craignants Dieu et assistant
soigneusement au Service divin aussi bien qu’aux Prédications, y conduisant
leurs enfants et domestiques ; ils avaient une inclination particulière à faire
l’aumône, assistant les pauvres dans les temps de cherté, de pain, d’habits,
couvertures, et tout autre besoin; leur faisant apprendre des métiers pour
gagner leur vie.
Aussitôt
qu’il fut né, Monsieur son père envoya à Marle, pour en donner avis à Monsieur
Beuvelet, son aïeul, et le prier de venir le tenir sur les Saints fonds de
baptême ; mais la mort qui le prévint l’en empêcha, et ce fut son fils,
Monsieur Beuvelet, avocat au Parlement, et depuis fait prêtre à Paris, à
Saint-Nicolas-du-Chardonnet, où il est mort en réputation d’une haute piété. Il
le tint avec Mademoiselle Barbe Beuvelet, sa sœur, femme de Monsieur
Tourtebatte, Conseiller au Parlement de Laon : on lui donna au baptême le nom
de Nicolas, comme son aïeul maternel, qui était un homme d’une piété très
connue. Sa bourse, ses greniers aussi bien que son cœur, étaient ouverts aux
pauvres, et son inclination pour eux était si grande que, pour les secourir, il
allait les chercher tous les dimanches au sortir du Service Divin, où il
assistait régulièrement. Outre ses charités quotidiennes, il faisait l’aumône
trois fois la semaine, disant que cela n’appauvrissait pas. En temps de cherté,
il faisait travailler sans nécessité les pauvres gens, à dessein de leur faire
gagner leur vie, et éviter l’oisiveté. Il n’inspirait que la charité, la
douceur et la patience à ses enfants ; aussi, leur donna-t-il l’exemple jusqu’à
la mort ; car il eut une grande maladie, l’espace de six mois, qu’il supporta avec
la plus grande patience. L’amour qu’il avait pour les pauvres, fit que trois
jours avant sa mort, il voulut encore les voir passer devant sa chambre, leur
faisant faire une distribution de pain, de vin et de viande ; se recommandant à
leurs prières. Il mourut après avoir souffert avec un grand abandon à la
volonté de Dieu ; il lui avait demandé de faire lui-même son purgatoire en ce
monde. Il disait avec consolation qu’il l’avait obtenu par les cuisantes
douleurs qu’il souffrait. Il reçut très souvent le Saint-Sacrement, qu’il
faisait apporter, ce qu’il faisait à genoux, nonobstant ses extrêmes douleurs.
Le
premier soin des pieux parents de Monsieur Roland, après son baptême, fut de le
donner à une pieuse et vertueuse nourrice, dont la dévotion était d’aller tous
les jours au tombeau de saint Rémi, et à l’église de Sainte Nourrice, pour leur
offrir son nourrisson. Elle eut grand soin, aussitôt qu’il commença à parler,
de lui faire prononcer le saint Nom de Jésus et de Marie, et de lui apprendre
ses prières et ses devoirs envers Dieu.
On a remarqué qu’il correspondait aux soins de cette vertueuse
nourrice, avec l’inclination qu’il avait sucée avec le lait.
De
retour à la maison paternelle, le jeune enfant eut toutes les qualités qui
rendent aimable à cet âge, jointes à celles qui donnent les plus heureuses
espérances pour l’avenir : il annonça de grands talents par la rapidité de ses
premiers succès ; il apprit à lire en quatre mois, quoi qu’il ne fut âgé que de
cinq ans ; il avait la mémoire belle et heureuse ; il récitait des vers en
compagnie, avec une facilité et une grâce qui le faisait admirer.
Ses
plus agréables divertissements, dans cet âge tendre, étaient ce qu’un bon
chrétien doit savoir. Il secondait si parfaitement les desseins de ses parents
à l’élever en la crainte de Dieu, que de ces petits commencements, on pouvait
juger que le Ciel le destinait à de grandes entreprises. Sa manière d’agir et
de parler lui gagnait tous les cœurs, et sa docilité le rendait susceptible de
tout bien. Il était avantagé de la nature, beau et bien fait de sa personne ;
son abord affable, civil et obligeant ; sa conversation était agréable. Il
parlait de Dieu avec plaisir et aimait à en entendre parler : il était plein de
joie lorsqu’il trouvait quelqu’un qui aimait à en entendre parler.
Il
commença à étudier extrêmement jeune. On a rapporté de lui, qu’étant aux
petites écoles, il importunait ses parents pour avoir la liberté d’aller en
classe; lesquels ne le voulaient pas à cause de sa grande jeunesse. Il les
importuna tant, qu’ils lui accordèrent. Il y fut avec une robe et, quoique les
écoliers se moquassent de lui, il ne se rebuta pas ; il s’appliqua avec plaisir
à l’étude ; il y fit en peu de temps de grands progrès, ce qui fit voir dès
lors que le don de science lui était communiqué.
Dès ce
temps, ses mœurs étaient réglées : il vivait dans la maison dans la plus grande
douceur avec les domestiques ; et parmi ses compagnons de classe, il n’a jamais
eu aucun démêlé avec qui que ce soit ; il se retirait facilement de la compagnie
de ceux dont on lui faisait connaître les mauvaises inclinations. Il arriva
cependant qu’un de ses compagnons de classe lui conseilla de prendre de
l’argent à sa mère ; la mère s’en étant aperçu, lui demanda si ce n’était pas
lui qui l’avait pris. Il changea bientôt de couleur, et en tremblant, il dit
qu’il avait pris cinquante sols et qu’il avait été les cacher dans les fossés
de la ville : (Ceci fait voir son enfance) que c’était un de ses compagnons qui
lui avait appris à les prendre. Ce coup lui servit d’avertissement, dont il fit
son profit.
Il
était franc et ouvert ; haïssait la dissimulation et le mensonge. Éloigné
des crieries, emportements et contestations indiscrètes, il défendait
paisiblement la vérité ; n’employait jamais le jurement ; en détestait jusqu’à
l’apparence. Il ne pouvait souffrir de paroles qui soient contre la pudeur, et
tous ceux qui l’ont connu depuis sa plus tendre enfance, jusqu’à sa mort, ont
rapporté de lui, que jamais on ne lui a entendu dire une parole contre cette vertu.
Ses paroles l’auraient justifié contre d’injustes soupçons qu’on aurait pu
former contre lui, et ceux qui l’ont conversé, rendent témoignage que personne
n’était plus retenu en ses discours et en sa conduite.
Il
était inconsolable quand il avait déplu en quelque chose à ses parents ou à ses
maîtres i il ne fallait lui dire qu'une parole un peu sèche ou lui montrer un
air plus grave pour l'attrister ; on pouvait le corriger par un regard,
quoi qu’il ne fut nullement d'un naturel timide.
Ses
progrès dans la piété devinrent sensibles à mesure qu'il croissait en âge, il
n'omit aucun des moyens propres à la nourrir, il se plaisait à la prière et à
la lecture de la vie des Saints ; il pratiquait des pénitences et des
mortifications pour les imiter, se privant quelquefois de son repas pour en
faire part aux pauvres ; il endurait le froid, il couchait sur la
dure ; une de ses Tantes l'a trouvé une fois couché dessous une table sur
laquelle il y avait un tapis qui le cachait ; elle lui demanda ce qu’il
faisait là, il répondit qu'il prétendait y passer la nuit, il la pria de n'en
rien dire et de le laisser ; comme c’était en hiver et qu'il n'avait encore que
huit à neuf ans, elle lui dit, c’est donc pour vous faire mourir, il faut vous
retirer ; mais pourquoi ma Tante. Saint François n'en est pas mort pour y avoir
couché presque toute sa vie : n'ayant pas égard à sa dévotion, elle le fit
aller coucher dans son lit. Les domestiques lui dirent qu'ils s'étaient déjà
aperçus qu'il ne restait pas dans le lit, qu'ils l'avaient trouvé nombre de
fois dans la ruelle du lit couché sur le plancher, y priant Dieu. On lui
défendit de se lever davantage, et on mit un jeune homme qui était son parent
pour coucher dans sa chambre et l'observer.
Étant
âgé de dix ans, M. Beuvelet son oncle, maternel et son parrain, homme d’une
très haute piété qui est mort en odeur de sainteté en un Séminaire de Paris
(Saint-Nicolas-du-Chardonnet) lui mettant la main sur la tête dit : Voilà
un enfant qui sera un grand Serviteur de Dieu et qui servira son Église.
Ce
cher oncle et parrain désira l'avoir pour l’avancer dans les études à
Paris ; mais il en fut empêché par une maladie qui lui survint, et qui
l'obligea de le laisser chez M. son Père ; après qu’il fut guéri, on le
mit en pension chez les Pères Jésuites où il profita avec succès, se faisant
toujours paraître des plus éclatants du Collège ; il paraissait avec la
plus grande liberté dans toutes les Tragédies ; ce qui parut
particulièrement devant la Cour, lorsque le Roi vint se faire sacrer à Reims ;
car jouant sa pièce, comme on se prit à rire, il s’arrêta pour en donner le
loisir, puis après que le bruit fut passé, il reprit le fil de son discours
avec tranquillité comme s'il n'eut pas été interrompu. Ce qui le fit admirer de
toute l'assemblée.
Pendant
ses études il ne perdait point de temps dans les compagnies, tant il lui était
cher, le donnant tout à ses petites dévotions et à ses livres : fuyant les
divertissements des enfants de son âge ; il était ennemi de la médisance,
parmi ses compagnons il ne souffrait pas qu’on parlât mal de qui que cc soit,
s'il arrivait à quelques-uns de le faire, aussitôt la rougeur lui montait au
visage et prenait la défense des absents.
Dieu
qui avait prévenu ce Jeune Enfant, comme parle l'Écriture, des bénédictions de
sa miséricorde, lui avait donné un esprit étendu et pénétrant, une mémoire
belle et heureuse, un cœur grand, généreux, capable de grands desseins, que les
contradictions et toutes les difficultés ne rebutaient pas ; Dieu le
menait comme par la main sans qu'il se sut. Un jour se trouvant à
Saint-Pierre-les-Dames, où Monsieur l'Évêque du Puy [3] y donnait les
Ordres, le Siège Archiépiscopal de Reims étant vacant : ce jeune écolier
se sentit si fort porté à demander la tonsure (quoiqu'il n'eut pour lors que
dix à onze ans), qu'il courut en grande hâte, prendre une soutane et un
surplis, prenant un cierge chez un marchand qu'il rencontra, et retournant à
Saint-Pierre, il arriva que la Cérémonie était faite, Monsieur l'Évêque avait
déjà quitté ses habits de cérémonie ; le jeune enfant fendant la presse
parvint malgré le rebut des officiers, jusqu'à Monsieur l'Évêque, qui s'était
retourné et voyant que set enfant lui demandait la tonsure de si bonne grâce,
qu'il ne put lui refuser ; il reprit ses babils de Cérémonie et le
tonsura.
La
vivacité qui ne l'a jamais quitté pendant sa vie, et qui n'a cessé d'être pour
lui la matière de bien des combats, et l'occasion de bien des victoires, comme
on le verra dans la suite, se développa dans sa plus tendre enfance ; il était
d'un naturel fier, bouillant et colère, il travailla dès lors à se modérer par
la docilité et par le respect qu'il avait pour ses parents et ses maîtres
desquels il était très aimé, et pour qui il avait de son côté l'attachement le
plus tendre.
CHAPITRE
2
De la vie que
M. Roland a menée
dans le siècle
De la vie que
M. Roland a menée
dans le siècle
Quoique
M. Roland eut été enclin au bien dès sa jeunesse, et que ses parents eurent
grand soin de le former et pousser dans les sciences, ce ne fut toutefois que
dans le dessein de l'engager dans le monde ; il quitta les études et
commença comme il le dit lui-même, sa vie mondaine ; son bel esprit, ses
grâces naturelles, son humeur gaie le rendait aimable à ses parents et à ceux
de sa condition, et l'engageait à suivre le train du monde honnêtement ;
il se trouvait fréquemment dans les assemblées, dans les bals, desquels
néanmoins il est toujours sorti avec honneur selon les personnes du monde. Ce
que toutefois il a regretté tous les jours de sa vie, comme un temps perdu, et
mal employé, où il avait disait-il couru risque de se perdre plusieurs fois, si
ce n'eut été une grande et infinie miséricorde de Dieu qui, par sa bonté m'a
préservé de tomber dans les désordres de l'impureté qui perd ordinairement la
jeunesse.
Dans
la dix-septième année de M. Roland, il lui arriva une petite disgrâce à
l'occasion d'un bal où il avait été contre la défense de M. son Père ;
cette disgrâce fut pour lui un coup de grâce : car cela lui fit
reconnaître son égarement et la vanité du monde.
M. son
Père ayant toujours dessein de l'engager dans le monde, après cette disgrâce
apaisée fut pour lui plein de bonté, et lui donna nue somme d'argent avec
liberté de voir les raretés dans les pays éloignés, comme il est ordinaire aux
enfants de famille, pour lui faire suivre ensuite ce qu'on appelle le beau
monde, mais la grâce se servit de cette liberté pour lui changer tout à fait le
cœur : car ayant vu plusieurs pays et s'étant avancé dans les lettres et
dans le négoce, selon les intentions de M. son Père, il alla aussi sur mer, où
il fit rencontre d'un Capitaine de Vaisseau, qui voulut l'engager au mal ce
qu'il reconnut par ses paroles, il lui répondit qu'il avait ordre de son père
de retourner ; voyant qu'il ne pouvait s'en défendre, il eut recours à la
Sainte Vierge qui le protégea miraculeusement : car le vaisseau s'arrêta soudain,
sans que la force des matelots le puisse faire marcher par le commandement de
leur maître ; le vaisseau étant approché d'un autre, il se jeta dedans
pour gagner terre. Ce qu’il connut être une protection particulière de la
Sainte Vierge, pour laquelle il a eu une dévotion tendre et reconnaissante tous
les jours de sa vie.
Étant
échappé de cette occasion dangereuse et périlleuse, il retourna à Paris, et
contre toute l'espérance de sa famille, il prit la résolution de se consacrer
au service de Dieu dans la Compagnie de Jésus et commença dès lors à fréquenter
des personnes de piété et s'adonna tout de bon à réformer ses mœurs.
CHAPITRE
III
M. Roland
quitte le monde et reprend
ses études
M. Roland
quitte le monde et reprend
ses études
Dans
le séjour qu'il fit à Paris, il commença sa conversion sincère à Dieu par une
retraite spirituelle qu'il fit dans une maison réformée, après laquelle le
dessein de se faire Jésuite, n'ayant pas réussi, parce que la Providence en
avait d'autres sur lui, comme on le verra dans la suite ; il se dépouilla
des habits du siècle, quitta le pourpoint de brocard, prit la soutane et revint
à Reims, bien résolu de se donner tout à Dieu, ce qui étonna grandement ses
parents et toutes les personnes de sa connaissance ; mais particulièrement
une jeune demoiselle qu'il avait aimée sous l'espérance du mariage, laquelle
dans cet étonnement, joint à quelques autres petites disgrâces, se donna aussi
à Dieu à son tour, et à son exemple, et a vécu depuis en réputation de piété.
Peu de
jours après l'arrivée de M. Roland chez M. son père, il retourna à Paris pour y
étudier en Philosophie, il se retira dans un quartier de Paris assez détourné
chez un menuisier pour y vivre d'une manière pauvre et inconnue au monde ; il
se revêtit de vieux habits noirs, à l'insu de M. son Père, pour paraître un
pauvre écolier parmi ses compagnons de classe : commençant dès ce temps-là
à pratiquer la Sainte pauvreté qu'il a aimée toute sa vie.
Mais
comme la grâce agissait fortement et noblement dans son cœur, il crut devoir
changer cette première demeure en celle d'une Communauté de la rue
Saint-Dominique ; où vivaient alors de bons Ecclésiastiques et
laïques ; il y fit un séjour de trois années, donnant des exemples
continuels des vertus les plus héroïques, dans cet intervalle, il conçut le
désir d'accompagner les premiers ouvriers qui ont été à Siam ; mais la
Providence, en ayant ordonné autrement, il prit le bonnet de Docteur dans une
Université du Royaume, en un âge où à peine les autres sont en état non de
prêcher, mais d’être des auditeurs raisonnables de la Sainte Parole.
Il
prêcha à l'âge de vingt deux ans dans la Cathédrale, avec un applaudissement
général. Dans ses premiers sermons il avait les ornements du langage, il était
semblable en cela à saint Pierre Chrysologue qui a été Évêque de Ravenne et qui
est reconnu pour un Père de l'Église et a bien été un prédicateur fleuri, et
d'ailleurs étant jeune, il avait besoin de réputation pour faire les grands
biens que Dieu a fait paraître dans toutes ses démarches.
CHAPITRE
4
Monsieur
Roland se dispose à la prêtrise
M.
Roland s'était rempli depuis son retour à Dieu de l'esprit de M. Beuvelet son
oncle et son parrain : qui a éclaté dans toute la France, et dans
Saint-Nicolas-du-Chardonnet. Pour se disposer à la prêtrise, il fit une
retraite de tente jours, durant laquelle il se pénétra de la dignité du sacré
caractère de Prêtre dont il allait être bientôt revêtu, et se traça un plan de
vie qu'il gardât jusqu'à la mort. Il s’y remplit des sentiments d'humilité,
d'abnégation de lui-même et de mort à tout ce qui est du monde, sentiments
qu'il a toujours gardés depuis ; car ayant reçu la prêtrise, il ne voulut
pas célébrer sa première Messe haute, ni y souffrir d'assemblée de famille,
pour éviter, disait-il, toute complaisance et dissipation, il invita seulement
M. son père et Mme sa mère, et la célébra secrètement, pénétré
de respect, de foi et d'amour. Il s'était disposé à cette grande action par la
fuite du monde, en s'enfermant dans un Monastère des plus austères. Peu de
jours après qu'il fut Prêtre, il obtint de ses parents la liberté de se retirer
dans une maison à part, pour répondre. plus aisément aux desseins de Dieu sur
lui. Mais avant de se mettre tout à fait à son particulier, il fit un voyage à
Paris, pour puiser dans les Séminaires de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, de
Saint-Sulpice, de la Communauté de Saint-Lazare, aussi bien que dans les
Sociétés des personnes de piété, desquelles il recherchait la conversation avec
diligence ; (et ces personnes ont dit, et pendant sa vie et depuis sa
mort, que dans les entretiens qu'il avait eus avec elles, il les avait
embaumées de l'odeur de ses vertus) pour prendre les maximes les plus pures du
sacerdoce, lesquelles il a conservées depuis. Mais son esprit n’était point
encore satisfait, il rechercha encore d'autres moyens de son avancement ;
ce qui lui fit faire un voyage à Rouen, y étant attiré par l'odeur de sainteté
d'un Curé de cette ville nommé M. de Saint-Amand, chez lequel il demeura six
mois pour apprendre la vertu qui lui coûta chère ; car il en revint si
infirme et si desséché qu'il fallut le mettre au lit à son retour.
Un
disciple de M. Roland a rapporté que le dessein qu'il avait eu en faisant ce
voyage, était de puiser le fondement des vertus apostoliques qui étaient en M.
le Curé de Saint-Amand, qu'il fut traité fort durement par ce saint Curé, par
un ordre de la divine Providence, comme il le dit un jour à un de ses
Confrères, (ce bon Curé me reçut avec refus, lorsque je le priai de me donner quelque
petite place en son logis, pour y faire une Retraite, ainsi qu'il l'accordait à
tout autre. Je n'ai pas de place pour vous mettre, M., me, dit-il, à moins que
vous ne preniez ma chambre, quelque instance, que vous me puissiez faire :
hé ! Monsieur, lui répartis-je, quelque place que ce fut, je m'en
accommoderai : mais non de votre chambre : il y a ici un dessous
d’escalier, si vous le voulez prendre. Je le pris au mot, et ne pris point
d'autre place tant que je fus avec lui cette fois). Ce fut sous la conduite de
ce bon Curé, que M. Roland fit de grands progrès dans la vertu de pauvreté et
du dénouement, car il parut inconnu et comme un pauvre Ecclésiastique, comme il
avait déjà paru pauvre étudiant lorsqu'il se fut retiré chez un pauvre Artisan
à Paris pour y vivre inconnu au monde. Les maximes qu'il avait puisé de ce bon
Curé sont celles-ci :
Que
dans les contradictions, il fallait dire, tant pis, tant mieux ; tant pis pour
la nature ; tant mieux pour l'âme.
Que
l'abstraction de toutes choses surpasse toutes pratiques.
Ne se
plaindre jamais ; car qui se plaint pèche.
Ne
s'excuser jamais lorsqu'on nous accuse.
Plutôt
devoir que thésauriser.
Ne
parler jamais du boire, ni du manger.
Ne
contester jamais avec personne.
Aimer
mieux accepter les pertes que faire l'aumône.
Aller
contre ses inclinations en toutes choses.
Ne
s'enquérir d'aucune nouvelle.
Ne
trouver à redire à rien.
Connaître
et suivre les mouvements de l'Esprit de Dieu.
Ne se
laisser jamais obscurcir l'âme par la moindre attache.
Plus
pratiquer la vertu que d'en parler.
S'attacher
fortement à sa fin qui est Dieu et faiblement aux moyens qui sont les
créatures.
Qu'un
serviteur mal adroit est un trésor.
Ne se
faire servir que dans les choses qu'on ne peut faire.
Aller
à la destruction de tout amour propre.
S'examiner
tous les jours sur quatre choses : 1° sur la conformité à la volonté de
Dieu, 2° sur l'amour du prochain, 3° sur la mortification, 4° sur la vertu
particulière.
Peu de
paroles d'un homme uni à Dieu, sont plus que plusieurs dites par amour propre.
Un
serviteur de Dieu détestait trois choses : 1° le mot de tien ou de mien,
2° celui de faveur, 3° celui de mérite.
CHAPITRE
5
Monsieur
Roland fait de sa maison
un petit séminaire
Monsieur
Roland fait de sa maison
un petit séminaire
M.
Roland étant de retour à Reims, les occasions d'exercer son zèle ne tardèrent
pas à se présenter, bientôt la vaste carrière s'ouvrit devant lui, mais dans la
multitude de ses bonnes œuvres, il eut soif d'établir l'ordre qui devait y
régner ; il fit toujours passer ce qui est de devoir et de justice avant
ce qui est de charité et surérogation.
Comme
Chanoine, il était tenu d'assister à l'office divin ; il donna l’exemple
d'une assiduité scrupuleuse, il assistait exactement à toutes les heures, et ne
manquait jamais d'y chanter, la tendre piété dont il était pénétré, rendait
cette occupation chère à son cœur, l'esprit de foi l'animait, il y voyait la
fonction des Anges, il la remplissait avec autant d'empressement que de
respect. Comme Théologal, il avait à prêcher chaque Dimanche de l'année, il ne
manqua aucun des jours marqués à s'acquitter par lui-même de ce devoir. On
admirait dès lors dans M. Roland, le saint Prêtre, le fervent chanoine, le
digne ouvrier tic la vigne du Seigneur ; on pouvait en effet le regarder
comme l'homme de Dieu pour la ville de Reims ; il était à la tête de
toutes les bonnes œuvres.
Pour
répandre l'esprit Ecclésiastique dont il était lui-même rempli il fit de sa
maison un petit Séminaire où l'on vit plusieurs enfants de famille et autres
entrer en Communauté pour y vivre d'une manière cléricale ; et par les
Conférences qu'il y faisait formait des sujets propres à servir l'Église. Ceux
qui pour des raisons de santé et de famille, ne pouvaient se rendre à la
Communauté, y avaient entrée libre et journalière pour les exercices
Ecclésiastiques et spirituels ; il leur donnait d'excellentes leçons pour
les former à l'oraison, à laquelle ils vaquaient avec lui pendant une
demi-heure. Il leur faisait ensuite une Conférence sur la Sainte Écriture, ce
qui produisait son fruit avec le temps,
Le
dessein de M. Roland dans ces exercices, était de faire de ses disciples des
Missionnaires, ou de bons Curés pour le ministère des autels. Il avait un
attrait particulier : ce qu'il a fait voir dés lors qu'il prit la
soutane ; car dès qu'il apprenait qu'il y avait quelque Mission il s'y
joignait afin d'y travailler et contribuer à la dépense. On ne pourrait dire
combien il se forma sous sa direction de Prêtres zélés pour les Catéchismes et
pour toutes les parties du gouvernement spirituel des paroisses, Tous ceux qui
ont demeuré chez lui ont répandu dans les endroits où la Providence les a
appelés, l'odeur de leurs vertus et sainteté, et on voit encore aujourd'hui
dans la Ville, une quantité de bons Prêtres qui ont été formés par sa main; qui
ne se sont point démenti des principes qu'il leur a donnés depuis quinze ans
qu’il est décédé, et tous avouent qu'ils lui ont une très grande obligation
ayant tiré de lui l'estime de leur ministère ; ce qui est cause aussi du regret
de plusieurs autres qui ont laissé l'occasion de le pratiquer dans leur
jeunesse. Il fit même son possible pour transférer sa petite Communauté dans
une Paroisse de la Ville, pour qu'elle fut plus utile, mais la mort prévint ce
dessin et Notre Seigneur se contenta de sa volonté.
On
vivait dans ce petit Séminaire qu'il dressait chez lui avec une grande
édification sous sa conduite ; aussi n'épargnait-il ni santé, ni biens, il
aurait voulu donner sa vie pour leur perfection, son zèle ne lui donnait aucun
repos, il entendait les confessions générales de ces jeunes hommes, leur
faisait des entretiens spirituels. Il avait dressé des pratiques journalières
pour vivre dans sa petite Communauté. On y vivait dans la plus grande
austérité, y pratiquant beaucoup de macérations, et avec une sobriété si
extraordinaire, dit un de ses disciples, qu’en l'espace d'un an que j'y ai
demeuré, je n'ai jamais entendu personne se plaindre du boire ou du manger, ni
en faire un seul mot d'entretien. On y servait ordinairement quelques fruits
pour le dessert, mais on n'y touchait pas par esprit de mortification.
Quoiqu'on
n'y parlait pas sans nécessité, et même à voix basse hors le temps des
récréations, on y tenait trois fois le silence la semaine ; on y faisait
aussi les coulpes, ou on s'accusait de ses fautes ; on avait aussi chacun
en particulier un admoniteur pour l'avertir des manquements qu'il avait
remarqués en soi, et dans tous ces exercices, M. Roland était le premier à
donner l'exemple.
Son
zèle pour le salut des âmes ne demeura pas satisfait, en dressant ces jeunes
hommes à la vertu, il faisait et procurait des Conférences Ecclésiastiques afin
d'exhorter les Prêtres à s'acquitter de leur ministère. où plusieurs personnes
de qualité et de mérite se trouvaient ; ce qui se faisait tous les Mardis.
Un jour Messieurs les Évêques de Châlons et d'Évreux s'y trouvèrent, et ils
furent dans l'étonnement de voir qu'un jeune Prêtre put avoir des conceptions
si fortes, un zèle si ardent, et une onction si extraordinaire dans ses
paroles. Ils dirent à sa louange que cet homme de Dieu ne laissait aucun doute
qu'il ne fut rempli des vérités qu'il enseignait, que l’esprit de Dieu parlait
par sa bouche.
M.
Roland a eu une grande partie de l'esprit de saint Charles qu'il a renouvelé
dans le Diocèse de Reims, en inspirant l'esprit Ecclésiastique à tous ceux qui
vivaient dans sa petite Communauté, n'y ayant point encore fie séminaire dans
la ville de Reims.
CHAPITRE
6
Ses
prédications, ses missions
M.
Roland joignait à une piété solide et éclairée un zèle ardent, laborieux et
infatigable. Sa fonction de Théologal lui donna occasion de le satisfaire, et
de mettre en usage au profit des âmes le grand talent de la parole que le Ciel
lui avait confié.
Un
zèle si ardent ne se bornait pas aux fonctions Théologales qui lui fournissait
cependant une vaste matière ; il se répandait de tous côtés ; et
partout où on l'appelait sa parole était efficace, ainsi que son exemple. Les
fruits de cette divine semence germaient avec abondance où il allait la jeter
et l'arroser de ses travaux ; ses paroles étaient persuasives, son style était
apostolique et populaire, ce qui faisait qu'il profitait à tous ; il
appuyait les vérités qu'il avançait sur l’Écriture Sainte et les Pères, ce qui
était cause que les libertins se trouvaient sans répartie, lorsqu'il les
reprenait de leurs vices ; il n'épargnait aucune condition, et on eut dit
à l'entendre prêcher qu'il eut voulu expirer sur la place, afin de convaincre
chacun des devoirs de son état, et quoiqu'il fut d'une complexion très faible
et déjà épuisée par ses austérités, son zèle ne laissait rien à dire sur les
matières qu'il entreprenait. Ce qui rendait ses paroles si énergiques, c’est
qu’il puisait à la source des sciences par la communication qu'il avait avec
Dieu ; car il ne se mettait à l'étude qu'avec des dispositions dignes de
Dieu : d'autant qu'il s'était fait un directoire de ses intentions, dont
il se servait, par lequel il renonçait avant que d'étudier, à toute éloquence
humaine, et recherche des créatures et de soi-même ; avec protestations de
n'apprendre les divines Écritures que pour la gloire de Dieu et le salut des
âmes ; et puis commençant par la prière, à la fin de laquelle il faisait une
prière plus fervente encore, suivie d'une lecture dans le livre de l'Imitation
de Jésus-Christ, qui était la nourriture ordinaire de son âme.
Ce qui
le facilitait encore dans ses prédications était son heureuse mémoire ; car
souvent n'ayant pu trouver du temps pour ses sermons, il ne lui fallait qu’une
demi heure pour le dresser. Il arriva un jour chez un de ses amis fort las et
fatigué d'un voyage long et pénible pour la saison, il le pria de prêcher comme
faisaient ordinairement les personnes qui connaissaient son mérite, et pour les
grands fruits qu'il faisait partout où il passait. Il arriva le samedi soi, il
lui accorda de prêcher le lendemain, parce qu'il ne refusait rien de ce qui
regardait la gloire de Dieu, et disposa son sermon. On ne sait par quelle
occasion il apprit le besoin du peuple avant de monter en chaire ; il y monta
cependant dans la résolution de prêcher ce qu'il avait disposé ; mais se
mettant à genoux, pour faire son invocation, à ce qu'il a dit lui-même, il fut
poussé intérieurement de changer son sujet ; et tout son discours. Il y réussit
très heureusement avec l'admiration des personnes savantes, et au grand profit
de tout le peuple : ce qui parut même à l'extérieur, car on vit un
changement merveilleux dans cette paroisse, sur la réforme des mœurs et des
vices qui y régnaient auparavant.
On
voit par ce qui vient d'être dit, que M. Roland n'enfouissait pas le talent
qu'il avait reçu du Seigneur, et qu'il ne bornait pas son zèle à paraître dans
le Chœur, et dans une des stalles de la Cathédrale. Partout où il voyait du
bien à faire, il y courait, il se prêtait à toutes les bonnes œuvres ; il a
demeuré avec les premiers Évêques de France qui ont été dans la Chine, M.
Béril, Messieurs de Liopolis et de Méthélopolie ; il déplorait son malheur de
ne pouvoir aller aux Missions étrangères, disant qu'il ne méritait pas l'honneur
du martyre.
Il
s'unissait à tous les gens de bien indifféremment, soit séculiers ou Réguliers,
lesquels il connaissait particulièrement dans toutes les Villes du Royaume. et
cette union le tenait dans une confusion continuelle que son humilité lui
suggérait, croyant de ne rien faire pour Dieu en comparaison d'eux. Il ne se
faisait aucune Mission qu'il ne voulut y contribuer de sa personne ou de ses
moyens, ce qu'il fit voir quand il alla à Sommepy en Champagne avec les Pères
de l'Oratoire, où il travailla pendant un mois entier ; on le voyait dans
de semblables occasions se consumer par l'ardeur de son zèle. Son talent pour
les Conférences spirituelles était extraordinaire, elles faisaient une
impression admirable sur les cœurs de tous ceux qui y assistaient.
Après
la mission de Sommepy M. Roland engagea Messieurs les Missionnaires à demeurer
pour une Mission à Fismes. En attendant qu'il eut obtenu la permission des
Supérieurs, dans l'intervalle du temps il partit de Sommepy en poste et vint à
Fismes témoigner à M. Martin qui en était Curé depuis peu de temps et qui était
un de ses disciples, ayant demeuré près de quatre ans dans sa petite
Communauté, le dessein qu'il avait eu de l'aider à mettre sa paroisse en bon
état. Voici ce que dit le disciple de son maître dans cette Mission.
« Le
zèle de M. Roland pour l'avancement de la gloire de Dieu, était si ardent et si
infatigable, que je peux dire qu'il s'en trouve peu de semblable, que ni les
fatigues, ni les persécutions, ni les respects humains, ni les mauvais
jugements, ni l'incertitude du succès ne faisait aucune impression sur son
esprit lorsqu'il croyait que Dieu demandait de lui qu'il entreprit quelque
chose pour sa gloire. Sans m'avoir écrit ni parlé du désir qu'il avait qu'il se
fit une Mission dans ma paroisse, il vint en diligence m'avertir qu'il croyait
que Dieu demandait cela de lui et de moi ; et sur ce que je lui représentais
que n'étant pas encore bien accommodé, il me serait difficile de bien recevoir
Messieurs les Missionnaires et d'en faire la dépense, il me dit de ne me point
mettre en peine, que ces Messieurs y contribueraient, et que la dépense ne me
serait pas si fort à charge que je le croyais ; et comme je lui dis qu'il me
pressait bien l'épée dans les reins, que cette affaire me paraissait un peu précipitée,
il me dit qu'il craignait fort que je ne fusse déjà déchu de ma grâce ; et
que le peu de zèle qu'il m'avait cru auparavant commençait à s'éteindre,
puisque je résistais aux desseins que Dieu avait sur ma paroisse ; je lui dis
en riant : faites-moi au moins la grâce d'entrer et de vous rafraîchir, et
nous conviendrons ensemble des moyens de donner une heureuse suite à une si
louable entreprise. Il attacha son cheval à la porte du dehors, et me dit d'un
air fort sérieux et dédaigneux, qu'il protestait n'entrer jamais chez moi, ni
d'y boire, ni manger, si je ne consentais à cette Mission, et qu'il s'en
retournerait avec la même vitesse qu'il était venu, sans rien prendre, en
secouant la poussière de ses pieds contre ma maison, puisque je refusais de recevoir
dans mon champ les ouvriers de la moisson. Cela m'obligea à me rendre à ses
justes désirs, et je crois que cette Mission suivie de celle de Sommepy, dans
lesquelles il se fatigua considérablement, ont abrégé ses jours ; car outre les
prédications qu'il faisait, il était des dix et douze heures au confessionnal
et en faisant la clôture de la Mission, il parla avec tant de feu et de force
contre la rechute dans le péché, et de la persévérance dans la grâce que sa
voix s'éteignit entièrement. »
Étant
de retour à Reims, accablé des fatigues que lui avaient causées ces deux
Missions, il résolut de faire encore un voyage à Beaune, à dessein de se
dévouer d'une manière toute particulière aux mystères de l'Enfance du Sauveur,
et en fit dans cette Ville un vœu exprès sur le tombeau de la Vénérable Sœur
Marguerite surnommée du Très Saint Sacrement, à laquelle il portait une grande
vénération ; ce qui fut d'une grande édification pour tout le couvent et
d'une particulière consolation pour les Religieuses qui le conversèrent,
principalement la Supérieure qui en parle avec estime, comme d'un homme rempli
de l'esprit de Dieu ; elle lui donna une figure de Jésus Enfant que la
Vénérable Sœur Marguerite honorait dans ses stations.
CIIAPITRE
7
Son attrait
pour l’éducation de la jeunesse
Quoiqu'il
soit vrai que la gloire de Dieu et le salut des âmes soient la fin de tous les
Ouvriers Évangéliques, il n'est pas moins vrai, que presque tous sont inspirés
d'y travailler d'une certaine manière, et qu'ils se sentent déterminés par
attrait à certaines bonnes œuvres. L'attrait de M. Roland était l'instruction
de la jeunesse.
Dès la
vingt-septième année de son âge considérant que le peuple et les grandes
personnes profitent peu des meilleurs sermons, et que le défaut d'éducation et
d'Instruction de la Jeunesse, a toujours été et est encore la source des plus
grands dérèglements, il résolut de remédier à ce mal en travaillant de tout son
pouvoir, à établir des écoles gratuites pour l'Instruction des petites filles :
ce dessein formé il fit un voyage à Rouen, pour y prêcher le Carême ; mais la
prédication n'était qu'un saint prétexte, son principal dessein était de voir
et de converser avec des gens de piété ; il les vit et les édifia comme il en
fut édifié : il vit plus particulièrement M. de Saint-Amand chez lequel il
avait passé six mois après sa prêtrise, dans la pratique de toutes les vertus
les plus austères ; il y vit aussi le Père Barré de l'ordre des Minimes, lequel
avait commencé des écoles d'instruction gratuites pour les jeunes garçons et
les jeunes filles dans la ville de Rouen, avec le succès qu'on a vu depuis dans
presque toutes les Provinces du Royaume.
M.
Roland contracta une étroite et sainte amitié avec le Père Barré et renouvela
l'estime et la vénération qu'il avait toujours eue; pour la vertu de M. de
Saint-Amand, l'un et l'autre reconnurent l'esprit qui animait M. Roland et
l'aidèrent de leurs conseils à exécuter la pieuse résolution qu'il avait formée
d'établir des écoles gratuites dans la Ville de Reims.
Mais
en prêchant, conversant et faisant plusieurs entretiens spirituels, M. Roland y
contracta de grandes incommodités, de sorte qu'à son retour à Reims, les
médecins lui ordonnèrent de prendre le lait pour se rétablir, mais en voulant
guérir son corps ils affligèrent son âme, en lui défendant de célébrer la
Sainte Messe ; cependant il sembla acquiescer à leur ordonnance. Il invita M.
Rogier, son ami intime, de venir passer quelque temps avec lui à une maison de
campagne, pour lui dire la Messe tous les jours, ce qu'il fit avec plaisir,
mais M. Roland se levait dès les trois heures du matin, pour offrir à Dieu le
Saint Sacrifice, trompant ainsi innocemment les médecins et ses parents.
Ce fut
en ce temps là même de ses infirmités, que méditant et se rappelant le dessein
qu'il avait eu en allant prêcher à Rouen, et sentant que son zèle pour
l'instruction de la Jeunesse croissait de plus en plus il crut que Dieu
demandait cette œuvre de lui ; car disait-il souvent Dieu demandera un compte
terrible à toutes les personnes qui devaient et pouvaient instruire les âmes,
et leur refusaient ce secours ; car disait-il encore, les âmes que nous aurons
laisser tomber dans le péché faute d'instruction demanderont vengeance au
tribunal de la Justice Divine. Ce fut donc dans ce pieux sentiment qu'il forma
de nouveau le dessein généreux d'établir une Communauté, où on travailla aux écoles
gratuites ; et Dieu qui le lui avait inspiré, le soutint par sa Providence,
laquelle parut manifestement : car les Messieurs de la Ville lui ayant refusé
l'administration des petits orphelins, dans la crainte qu'ils avaient de
quelque établissement, lui offrirent l'administration spirituelle des dits
enfants, ce que M. Roland reçut avec plaisir, comme on le verra dans le
chapitre suivant.
CHAPITRE
8
L’établissement
des écoles gratuites
Le
zèle de M. Roland fit qu’il considéra l’administration des Orphelins que les
Messieurs de la Ville venaient de lui confier, comme un ordre de la divine
Providence, et comme un moyen d'exécuter le dessein que la même Providence lui
avait inspiré. Ce fut en cette occasion qu'il fit paraître la grandeur de son
âme, et la générosité de son esprit, en ce que nous allons dire, aussi bien que
son abandon aux soins de la même Providence, et qu’il fit paraître son
dégagement pour les biens temporels.
Il
commença donc à prendre le soin de cette maison où il y avait plus de quarante
personnes à nourrir, et où il n'y avait pas un sols pour y faire la dépense ;
d'autant que la personne qui les gouvernait auparavant sous le bon plaisir des
dits Messieurs, leur portait les aumônes et les quêtes qu’on leur faisait
journellement. Les dits Messieurs payaient l'intérêt de cet argent qui leur
était porté, et ne voulaient cependant prendre aucun soin de la dite maison.
M.
Roland s'en voyant chargé; ne se contenta pas de pourvoir au spirituel, il
pourvut à tout, fournissant tout ce qui était nécessaire. Il trouva ces pauvres
enfants tous nus et comme des squelettes, faute de nourriture ; leur
pauvreté était si grande qu'ils manquaient du pur nécessaire ; ils étaient
si infectes et si abandonnés, qu'on ne pouvait les voir sans horreur dans l'infection
et la fange où ils étaient : leur habitation était, dit un disciple de M.
Roland, plutôt une étable qu’un hôpital, j'en peux parler, continue-t-il, non
pour l’avoir ouï dire, mais pour l'avoir vu de mes propres yeux, puisque cet
homme de Dieu me fit la grâce de vouloir bien me charger du soin temporel de
cette maison, me fournissant à ce sujet tout ce qui était de besoin. Il pensa
d’abord à les fournir d'habits, de linge et à les bien nourrir. Ne regardant
ces pauvres enfants que par l'œil de la foi, il ne voyait que Jésus-Christ en
eux ; et se souvenant qu'il avait été assez pauvre dans cette étable, il
fallait le mettre plis décemment ; il fit faire des bois de lits pour
coucher ces enfants, car auparavant il y avait de grandes couchettes, où ils étaient
six ou huit ensemble, sans comparaison comme des bêtes, tant l'ordre y était
mal gardé, et je suis témoin que le tout se faisait de ses libéralités, et il
me donnait de sa bourse de quoi fournir à tous les besoins de ces enfants.
Si les
dits enfants étaient bien nourris et alimentés par les soins de M. Roland, il
prenait et faisait prendre encore un soin particulier de leur éducation, ce
qu'on n'avait pas fait avant qu'il s'en fut chargé : car avant c'était
chose déplorable pour la corruption de leurs mœurs et l'ignorance, ils ne
savaient ce que c'était de la connaissance de Dieu et du salut ; on se
contentait de leur donner à manger tellement quellement, ce que M. Roland fit
cesser, ayant changé les dites personnes en d'autres dans lesquelles il remarquait
de la piété, afin que la maison changeât de face, comme il arriva en peu de
temps
Mais
comme son dessein ne se terminait pas à la seule charité pour le soin des
Orphelins et que cela ne lui servait que de prétexte, pour l'établissement des
Écoles, il ne se donna point de repos qu'il n'exécutât cette pieuse entreprise,
pour laquelle il fit plusieurs voyages à Paris et à Rouen, afin de voir par
lui-même le grand bien que faisaient les Filles de la Providence que le Père
Barré Minime avait établi dans ces deux grandes villes avec succès : il lui
demanda de ses filles qui avaient déjà l'expérience de l'emploi auquel il
désirait les employer. Le Père Barré accéda à sa demande et lui donna la
supérieure de sa maison de Rouen avec deux autres Maîtresses que M. Roland fit
conduire à Reims, et les logeât dans la Maison des Orphelins ; sous prétexte de
leur rendre service, quelque temps après il obtint de M. l'Écolâtre
l'approbation pour établir quelques écoles dans la maison des dits Enfants, où
on recevait toutes les petites filles et même les grandes qui se présentaient
pour apprendre à lire et y être instruites des vérités du salut. Ce nouvel
exercice commença bientôt à éclater dans la Ville, et donna aussi commencement
aux contradictions qui s'élevèrent et s'accrurent depuis, comme on le verra
dans le chapitre des vertus que ce saint homme a pratiquées. Il commença donc
ainsi l'établissement des Écoles gratuites et fit pour cela de grandes dépenses
pour accommoder cette nouvelle maison, où il n'y avait que les Orphelins avec
quelques personnes pour pourvoir à leurs besoins ; lesquelles il mit dehors
avec des récompenses sortables à leurs travaux, et la maison commença à
s'accommoder avec vigilance ; où il y recevait des sujets à proportion que les
classes s'augmentaient. Tout ce qu'on avait besoin, on le prenait chez lui, et
on ne faisait presque qu'un ménage ; car toutes les provisions étaient pour ses
filles à qui il avait donné une entière liberté d'aller prendre chez lui pour
elles et pour les Orphelins tout ce qu'elles avaient besoin : il se faisait
aussi un grand plaisir de leur donner et fournir de tout, comme les avares s'en
font un d'amasser de l'argent : toutes ces délices étaient pour le bien de
cette maison, non seulement il n'y épargnait ni soin, ni argent, mais il y
procurait encore tous les secours spirituels ; ses jours et ses nuits étaient
employés à cette œuvre, et tous ses soins ne furent pas sans fruit : car cette
maison jeta un tel éclat en peu de temps, que le diable et le monde se déclarèrent
ouvertement ses ennemis : mais M. Roland n'en fut que plus encouragé à
poursuivre son entreprise, car disait-il, c'est une marque que cette œuvre est
de Dieu puisque les puissances de l'enfer s'intéressent à l'empêcher. On voyait
déjà dès ce temps le bien que cet Institut ferait dans la suite, car dans ces
écoles nouvellement établies, on y rencontrait des filles de tout âge, et même
des femmes qui déploraient leur vie passée ; durant laquelle elles avaient été
dans une grande ignorance des choses nécessaires au salut.
Les
Sœurs de cette Communauté faisaient aussi un très grand progrès sous la
conduite de ce Saint Instituteur qui y répandait sa doctrine et son zèle avec
tant d'onction, qu'elles auraient volontiers donné leur vie à sa persuasion,
tant elles se sentaient animées du zèle de la gloire de Dieu et du salut de la
jeunesse qui leur était confiée.
La
bonne odeur que répandait la conduite de ces premières filles de M. Roland en
attira bientôt d'autres, le nombre s'augmenta en peu d'années, ce qui fit qu'on
multipliât les Écoles en différents quartiers de la Ville et même de la
campagne : toutes les personnes qui pratiquaient le Saint Fondateur; se
faisaient un plaisir à son exemple de participer à ce bien.
Ses
vues dans ce nouvel Institut, étaient de former des maîtresses d’écoles pour
instruire gratuitement ; pour en former aussi qui puissent instruire dans les
campagnes sous la conduite des bons Curés ; d'y prendre encore des personnes de
piété en retraite, qui est un bien considérable ; il voulait aussi que les
petits Orphelins y fussent bien élevés, d'autant, disait-il que c'est l'origine
de la Maison, et qui nous représentent Jésus-Christ en l'état de son Enfance ;
et c'est à cette fin qu'il a donné pour titre à cette Maison, la Communauté du
Saint-Enfant-Jésus. Tous ces pieux desseins firent qu'il n'épargna rien pour y
donner de bons principes pour le Règlement de cet Établissement et pour former
les dites Filles à une perfection qui réponde à la sainteté de l'état que
demande une vie apostolique, ainsi que l'ont rapporté celles qui ont vu
commencer l'Établissement ; dans les maximes qu'elles ont reçues de M.
Roland, lesquelles maximes seront dans ce manuscrit pour l'utilité des Sœurs
aussi bien qu’une partie des vertus qu'il a jugé leur être les plus nécessaires
pour se sanctifier dans cette Communauté.
Les
dites Filles ont expérimenté sa charité, son zèle et sa douceur paternelle,
tout le temps qu'il a vécu, elles ont été témoin de ses rares vertus, de la
pénétration de son esprit, surtout de la grande édification qu'il leur a donnée
par son extrême pauvreté et sa grande mortification ; aussi
suivaient-elles son exemple autant que la faiblesse de la nature leur
permettait ; elles vivaient et étaient accommodées très chrétiennement, et le
bon Fondateur se trouvait souvent obligé à veiller à leurs besoins, tant elles
se négligeaient elles-mêmes pour ne s'attacher qu'à leurs devoirs ; ce qui a
duré plusieurs années, comme le rapportent ceux qui ont conversé ces saintes
Filles.
Je ne
dois pas oublier, dit un Disciple de M. Roland, de vous dire que ce saint homme
ne se contentait pas de rendre ses services et de se dépouiller de tout ce
qu'il pouvait posséder, jusques là même que dès qu'il pouvait toucher quelque
argent de ses parents ou d'ailleurs, on voyait en lui un saint empressement de
l'envoyer en cette maison, sans le laisser coucher chez lui, ce qui marquait
son grand détachement ; et un jour M. son père lui en ayant apporté, à
peine fut-il à la porte qu'il appela son garçon et lui dit : Déchargez-moi de
cet argent et le portez à ces pauvres enfants ; ce qui fait voir le désir
qu'il avait de l'avancement de cette maison. Il ne négligeait aucun moyen pour
le procurer et engager sa famille pour répondre du temporel, se servant pour
cela de sollicitations engageantes.
CHAPITRE
9
Suite de
l’établissement de la Communauté
et de conduite qu’il y a gardée
Suite de
l’établissement de la Communauté
et de conduite qu’il y a gardée
M.
Roland ne se contenta pas d'avoir établi la Communauté du Saint-Enfant-Jésus,
et d’y fournir tout ce qui est nécessaire, tant pour l'ornement et décoration
de la Chapelle qu'il a fait bâtir à ses propres dépens, comme de tous les
ameublements qui étaient nécessaires aux Sœurs et aux Orphelins dans cette
nouvelle maison qu'il avait achetée de ses propres deniers, comme il est dit au
chapitre précédent.
Il
voulut pourvoir aussi à leur conduite spirituelle, par lui-même et par
d'autres, afin que cet Institut puisse être solidement établi, et qu'il fut
utile au public ; c'est pourquoi qu'il n'y épargna rien et fut infatigable à
solliciter sa consommation par de longs et pénibles voyages dans lesquels il
essuya de très grandes peines et rebuts.
Il ne
connaissait point de personnes qu'il crut être à Dieu, qu'il ne les employa à
son dessein, leur demandant et suivant leurs avis et conseils en tout ce
qu'elles pouvaient pour le bien de cette Maison ; car c'était son propre
d'aller toujours par l'avis des autres, et de se communiquer dans le bien qu'il
voulait entreprendre, ne fût-ce qu'à un simple Clerc, pourvu qu'il fut un bon
serviteur de Dieu ; comme aussi de gagner de saints Prêtres pour l'aider à
dresser la conduite de ses Filles par des entretiens, Conférences et
exhortations générales et particulières, il était plein de joie, lorsqu'il
trouvait un quelqu'un qui se prêtait pour l'aider en cette bonne œuvre.
Voici
les principales vues qu'il avait sur cette Communauté :
1°
Qu'on y vive en grande perfection ; car disait-il, une poignée de gens qui vont
à la perfection de la belle manière, de quelque condition qu'elles soient,
rendent plus de gloire à Dieu qu'une Ville, même qu'une Province ne saurait lui
en rendre ;
2° Que
l'unique but de cette Maison soit de demeurer en habit séculier et non
cloîtrée, pour être libre d'aller enseigner dans tous les quartiers de la Ville
et même dans les Campagnes où elles pourront être envoyées par les Supérieurs.
3° Que
l'unique emploi des Sœurs soit de travailler au salut des aines, par le travail
des Écoles et des instructions, autant que le sexe en est capable ;
4° Que
l'esprit de pauvreté, d'humilité, de zèle et de dépendance y soit gardé dans la
rigueur ; que les Sœurs s'éloignent soigneusement de toute communication et de
tout commerce avec les créatures ;
5° Que
les personnes qui veulent se sacrifier entièrement pour servir Dieu dans le
prochain y soient reçues de quelque condition qu'elles soient sans en exiger de
dote, pourvu qu'elles aient les qualités nécessaires.
Il ne faisait
dans cette Maison aucune distinction des personnes. Il ne voulait pas non plus
qu'on fit distinction de celles qui avaient apporté du bien, et de celles qui
n'en avaient pas apporté ; il voulait que l'on veillât avec plus de soin
sur celles que leur vertu portait à se négliger elles-mêmes.
Il
estimait que c'était un sujet d'exclusion dans une fille lorsqu'elle
recherchait ses intérêts : qu'elle épargnait ses forces, et qu'elle était
adonnée à des communications et attachée à sa famille.
Il
demandait un grand dénouement et fuite de toute curiosité et propriété.
La
grande maxime sur cette Communauté était que toutes sortes d'esprits n'y
étaient pas propres ; car disait-il, il faut une vie au-dessus du commun, pour
exercer avec édification les fonctions de leur emploi, il faut une grande mort
à elles-mêmes ; il faut une grande simplicité et candeur pour obéir an dedans,
après qu'on a commandé au dehors. Il faut une grande humilité pour dominer dans
les classes sans se perdre par les vains applaudissements des créatures.
Il
voulait qu'avec les exercices de l'école, on joignit le travail des mains qui
ne devait consister que pour le besoin de l'usage de la maison, afin d'éviter
l'extinction des instructions, et d'y introduire des manufactures.
Plusieurs
personnes de mérite, qu'il se faisait un plaisir de consulter pendant sa vie,
ont assuré que les maximes sus dites étaient ses sentiments sur la Maison, pour
lui avoir oui dire plusieurs fois et s'en sont entretenu dans les rencontres,
où l'on parlait de son souvenir.
Il
avait une grande attention à tout ce qui pouvait mortifier les inclinations des
Sœurs, et ne permettait pas qu'on leur passât rien pour les faire entrer dans
l'esprit de mort à elles-mêmes et de mortification de leurs sens.
Une de
ses maximes encore était qu'il valait mieux couper un lien que de vouloir le
dénouer ; il voulait dire par là qu'il fallait rompre tout d'un coup les
attaches qu'on avait aux créatures plutôt que de tant marchander. Une autre
était : tout ou rien ; il ne pouvait souffrir le partage que tant de gens
veulent faire avec Dieu et la créature ; il disait souvent qu'une personne
qui se donnait à Dieu sans réserve, avançait plus en trois mois, qu'une autre
en dix ans.
Il
avait tant d'attrait et de désir que les Sœurs s'acquittassent bien de l'école
que lui-même l'allait apprendre dans toutes les Villes où il passait lorsqu'il
apprenait qu'il y en avait d'établies par de bonnes méthodes, il faisait venir
des Maîtresses expérimentées pour les dresser dans cette maison, le tout à ses
frais et dépens, et dans ces occasions, sa longanimité et sa charité étaient si
grandes, que quelques grossières que fussent ces filles, cela ne le rebutait
pas.
Pour
réussir à l'entreprise qu'il faisait de n'introduire, dans cette Communauté,
que des personnes déterminées à correspondre au dessein que Dieu lui avait
inspiré ; il examinait lui-même le caractère et l'esprit des filles ; il les
éprouvait en toutes choses, principalement dans l'abnégation et la mort à toute
recherche d'elle-même.
Il
leur dressait des Règlements de fois à autres, selon les difficultés qui
pouvaient se présenter dans ce nouvel Établissement, il leur donnait
journellement des avis de vive voix, dont nous donnerons l'abrégé ci-après,
avec quelques chapitres des vertus les plus nécessaires aux Sœurs de cette
Communauté que l'on a trouvé écrites de sa propre main, et qui sont très utiles
pour toutes sortes de personnes consacrées au service de Dieu dans des cloîtres
ou maisons régulières.
Une
des raisons que M. Roland eut d'établir plutôt l'école des filles que celle des
garçons qu'il avait cependant envie d'établir dans la suite, ce fut, disait-il,
que les mères, les filles aînées des familles et les servantes sont pour
l'ordinaire plus chargées de l'éducation des enfants que les pères : ce qui
l'engageait à exhorter les Sœurs à ne pas s'épargner pour instruire ces grandes
personnes de leurs devoirs envers les enfants qui sont commis à leurs soins.
CHAPITRE
10
Le dernier
voyage que M. Roland fit à Paris,
de ce qu’il y souffrit et des sentiments
qu’il eut sur les approches de la mort
Le dernier
voyage que M. Roland fit à Paris,
de ce qu’il y souffrit et des sentiments
qu’il eut sur les approches de la mort
Après
que ce grand Serviteur de Dieu eut passé plusieurs années dans la pratique de
toutes les vertus chrétiennes et ecclésiastiques, et qu'il eut essuyé beaucoup
de peines, d'opprobres et de contradictions des créatures, sans que cela l'ait
jamais fait désister d'un instant de ses pieuses entreprises ; sa confiance et
son abandon à Dieu était si parfait que les plus grands obstacles n'ont jamais
put lui faire concevoir aucune défiance du succès de ce qu'il avait entrepris
pour sa gloire et le salut des âmes, étant certain que Dieu prend plaisir à
faire mieux paraître sa puissance et la force de sa grâce, lorsqu'il y a plus
d'opposition de la part des hommes.
Après
plusieurs voyages à dessein d'établir les écoles gratuites, il en fit encore un
à Paris sur l'espérance que M. l'Archevêque lui avait donnée, lorsqu'il permit
qu'on bénisse la Chapelle de la Communauté ; il partit donc de Reims dans
une saison fort incommode, peu avant les Avents, et n'en revint que la Semaine
Sainte, passant cette hiver dans d'extrêmes peines et incommodités pour les
rebuts qu'il avait eu des créatures et les épreuves de Dieu qui redoublèrent
aussi en lui, comme nous allons voir. Toutes ces épreuves ne l’abattirent pas,
il s'occupa tout ce temps à solliciter la consommation de son Établissement
avec plus d'ardeur que jamais, passant une grande partie du temps en attendant
dans l'antichambre du dit Seigneur qui passait et repassait souvent devant lui
sans lui rien dire, comme étant occupé à de plus grandes affaires, mais bien
plus par un ordre de la Providence, pour achever de purifier son Serviteur, qui
le voulait bientôt retirer de ce monde ; il passait le temps qui lui restait
d'après ses sollicitations en retraite dans le Couvent des Révérends Pères
Carmes déchaussés, en gémissements, en larmes en prières continuelles ; et
par je ne sais quelle rencontre, une personne de grand mérite qui était son
ami, le voyant si atténué et bouffi par l’abondance des humeurs causées par le
grand froid et ses grandes abstinences, lui prédit que dans peu de temps il
partirait de ce monde.
M.
Roland prit cet avis comme venant du ciel, et se disposa à la mort par un
nouvel esprit de pénitence, et par une retraite dont le premier motif fut d'y
considérer et méditer ces paroles : La mort est proche. Il fit en six semaines
trois fois sa confession générale, ainsi que l'a assuré le Révérend Père César,
très digne Religieux du Couvent des Carmes déchaussés, qui était son confesseur
dans les séjours qu'il faisait à Paris, lors de ses voyages. Voici ce qu'il dit
de son Saint pénitent : J'entendis la Confession de cet humble pénitent avec
une sensible consolation, après l'avoir refusé plusieurs fois, dans la
certitude qu'il n'en avait aucun besoin ; car je ne trouvais point d'homme plus
pur dans tous ceux que je conversais depuis longtemps dans tous les différents
pays où je me suis trouvé ; mais quoique sa vertu m'avait toujours apparu
depuis que j'eus de sa connaissance ; je peux assurer que dans ce temps il
était tout autre qu'il n'avait encore été ; car quand il aurait été le plus
grand scélérat de la terre, on n'aurait pu remarquer en lui plus de
componction. Aussi était-il à ses yeux comme le plus abominable des hommes, et
indigne de la vie ; il ne pouvait trouver des termes assez durs pour
s'exprimer. Quand il eut achevé sa Confession générale recommencée par trois
fois, non par scrupule, mais par un instinct visible de la grâce, il pensa
retourner à Reims.
Son
départ de Paris fut sans succès de son voyage, et se voyant sur le point de
mourir, comme en effet il s'y était disposé, il me dit en partant qu'il sentait
bien que Dieu voulait le retirer de cette vie comme un homme qui ne faisait
qu'empêcher son œuvre. (Jusqu'ici ce sont les paroles de ce bon Père qui en
parlait avec l'estime d'un Saint, et dit qu'il espérait que cette Communauté
aurait en M. Roland un puissant protecteur auprès. de Dieu pour son
Établissement.) Ce qui s'est trouvé véritable, comme on le verra dans le chapitre
suivant.
CHAPITRE
11
Comme M.
Roland tomba malade à son retour de Paris,
ainsi qu'il en avait ressenti les approches
par ses longues infirmités, et des sentiments
dans lesquels il est mort
Comme M.
Roland tomba malade à son retour de Paris,
ainsi qu'il en avait ressenti les approches
par ses longues infirmités, et des sentiments
dans lesquels il est mort
M.
Roland étant de retour de ce voyage, il donna des preuves plus visibles de ses
rares vertus qu'il n'avait encore fait : car il parut en lui un si grand
changement qu'on le prenait pour un autre lui-même par son humilité, charité,
patience, douceur, et son détachement du monde ; il ne parlait plus de cette
vie que comme d'un bannissement. Nous sommes, disait-il, mais avec une onction
qui pénétrait le cœur, nous sommes des exilés de notre patrie, il faut se
disposer pour y retourner ; que faisons-nous, sinon de nous éloigner (le notre
centre qui est Dieu (ce sont ses propres termes). Son humilité le faisait
cacher à ses propres yeux ; néanmoins il ne pouvait retenir le feu que Dieu
même allumait en lui, ce qui lui faisait dire simplement ses sentiments sur
l'état de l'autre vie. Quand irons-nous à cette autre vie, où on jouit de
l'unique beauté, bonté et amour, quel bannissement de vivre ici-bas ; Ce n'est
pas que dans ce temps, il ne fut dans de grandes épreuves, comme nous allons
voir, mais c'étaient les approches de la mort qu'il ressentait en lui, ainsi
que la pierre qui approche de son centre redouble ses mouvements, ainsi cette
âme désirait d'être unie à Dieu, Ses incommodités s'augmentant tous les jours,
on le vit depuis le Jeudi-Saint qu'il revint à Reims jusqu'au deuxième mardi
d'après Pâques qu'il tombât tout à fait malade de la maladie dont il est mort,
ayant passé tout ce temps dans l'exercice d'une très grande charité, tant les
jours que les nuits, auprès des Sœurs très dangereusement malades de fièvres
pourpreuses, sans que personne l'en put retirer. On craignait le danger pour
lui atténué et fatigué qu'il était. Cette crainte de la part de ses amis, ne
fut pas sans fondement, car il tomba malade de la même maladie la nuit du mardi
au mercredi de la seconde semaine d'après Pâques.
Cette
annonce de sa mort prochaine ne le surprit pas, il l'avait présente, l'ayant
choisie pour le sujet de sa retraite qu'il avait faite un mois auparavant.
Durant cette maladie qui ne dura que neuf jours, il donna encore l'exemple des
plus grandes vertus, comme on va le voir dans le rapport qu'en a fait M. Guyart
son disciple et son intime ami, qui en a été témoin, l'ayant gardé lui-même
tout le temps de la maladie.
« M.
Roland se sentant frappé de cette maladie il me dit (c'est M. Guyart qui parle)
qu'il n'en échapperait point, ce qui l'obligea à se munir des Sacrements,
chercher un digne successeur et faire son testament, malgré les médecins qui
l'assuraient de sa guérison ; et quand en ce temps, il faisait des propositions
de se donner à Dieu plus parfaitement, de se retirer dans l’ermitage de Caen où
était mort M. Bernier, il retournait aussitôt à lui-même, disant que ses
projets étaient vains puisqu'il devait bientôt mourir ; il avait une parfaite
connaissance et une docilité à l'épreuve dans cette maladie ; il ne se plaignait
point du tout au milieu de ses plus grandes peines, il ne demandait et ne
refusait rien ; il m'a avoué qu'il souffrait comme une âme entièrement
abandonnée, ne voyant qu'un Dieu en colère, que le jugement dernier, qu'une
éternité embrasée, qu'un monceau de péchés ; il m'a dit que l'homme ne pouvait
point porter plus de peine, ni d'accablement, que son état était une agonie, et
qu'il ne trouvait de la consolation que dans le jardin des Olives.
Lorsqu'on
lui apporta le Saint Viatique et l'Extrême-onction il fit une exhortation si
forte et si touchante qu'il tirât les larmes des yeux de Messieurs les
Chanoines qui accompagnaient le Saint-Sacrement ; il la finit par ces paroles :
Voici, mes Frères, que je vais bientôt entrer dans le grand jour de l'éternité,
là je connaîtrai mes terribles obligations et mes infidélités, je tremble quand
j'y pense, priez le Seigneur qu'il me fasse miséricorde, et en particulier du
scandale que je vous ai donné par mon infidélité et mon peu d'assiduité à
l'Office divin. Il se regardait comme le plus grand pécheur du monde, et
croyait qu'il ne faisait rien que d'attirer la colère de Dieu, et regardait
toute la vie qu'il avait menée comme une abomination. Ce fut dans ce sentiment
qu'il priât la Supérieure de sa Communauté de filles, de demander pardon à
genoux pour lui à chaque sœur en particulier, et à toutes en général de la
mauvaise conduite, disait-il, en versant des larmes de componction; qu'il avait
tenue sur chacune d'elles, et du peu d'avancement dans la voie de la perfection
qu'elles avaient fait sous sa direction. Quant au général, il croyait et disait
que sa mauvaise vie seule empêchait la consommation de cet Établissement,
sentiment qu'il gardait depuis longtemps, lui ayant entendu dire depuis
longtemps et plusieurs fois, que c'était la Maison de Dieu, et qu'il en
prendrait soin lorsque je ne m'en mêlerai plus, s'appuyant sur ce qu'une
personne de mérite lui avait dit : Monsieur et cher Ami, tout ce que vous
désirez pour la Maison de l'Enfant-Jésus s'accomplira bientôt, prenez bon
courage, mais vous n'en verrez pas la consommation. Ce qui lui fit croire par
un bas sentiment de lui-même qu'il était seul celui qui mettait obstacle à
l'œuvre de Dieu. »
Quoique
cet homme de Dieu fut si bien pénétré des biens de l'autre vie, et qu'il lui
sembla déjà en ressentir des Avant goûts, ce n'était que par un sentiment de la
pureté et de la force de sa foi, de l'esprit de mort à lui-même et à toutes les
créatures ; car il fut durant cinq jours de sa maladie dans de si furieux
assauts contre l'ennemi du salut, que les personnes qui l'ont vu, ainsi que
moi, en avaient jusqu'au frémissement de voir qu'un si Saint homme qui avait
vécu dans une si grande vertu, fut traité de la sorte. Dieu l'a permis pour
achever de purifier son Serviteur de ce qui pouvait y avoir encore de nature en
lui ; car durant ces cinq jours qu'il passa dans ces peines si terribles, tout
son désir était de mourir en vrai chrétien : on l'entendait souvent
répéter ces paroles d'un ton enflammé :
Seigneur,
mon Dieu, faites-moi la grâce d'être du nombre des Élus.
Dans
tout ce temps d'épreuve et de combat. on ne l'a pas vu tomber dans aucune
impatience ni découragement, au contraire animé de confiance, il chantait et se
faisait chanter des cantiques sur le désir de voir Dieu et de l'aimer sans
partage. Cet assaut se passa très peu avant que d'expirer. Dieu le permettant
ainsi, pour que celui qui l'avait servi depuis le temps de sa conversion
jusqu'à ce moment, le passa sans aucune consolation ni de lui, ni de ses
créatures : car on peut dire avec assurance, comme tous ceux qui l'ont connu,
que cet homme de Dieu n'a jamais eu que des croix, des peines, des travaux et
des opprobres en toutes ses entreprises. Ce qui donna lieu de croire qu'il est
d'autant plus élevé dans le Ciel.
Enfin
ce qu'on a remarqué et qui fait espérer que cela est, ce sont ses mérites et
les venus qu'il a pratiquées. Plusieurs personnes ont assuré après sa mort que
bien des choses leur étaient arrivées, comme ce bon Serviteur de Dieu leur
avait prédit pendant sa vie ; et d'autres ont aussi assuré avoir reçu de
grandes grâces et secours de Dieu, de s'être adressées à lui après sa mort dans
leurs peines et afflictions, ce qui se peut croire pieusement, d'autant que ce
sont toutes personnes de piété et de mérite.
Le père
César, très digne Religieux du Couvent des Carmes déchaussés à Paris, qui avait
entendu la confession générale qu'il fit durant sa retraite pour se préparer à
la mort, dit à plusieurs de ses amis, que la Communauté du Saint-Enfant-Jésus,
aurait en M. Roland, un puissant protecteur auprès de Dieu pour son
Établissement : ce qui s'est trouvé véritable. Car dès le moment que
Monseigneur l'Archevêque eut appris sa mort, il prit lui-même la Communauté
comme sienne, et dit qu'il la soutiendrait toujours ce qu'on a cru être un
effet de la protection de Dieu sur cette Maison provenant du mérite de son
Serviteur.
Monseigneur
l'Archevêque accorda peu de temps après, que le Saint Sacrement fut posé dans
la Chapelle, qu'il avait permis de bénir du vivant du pieux Fondateur, il a
confirmé et approuvé tout ce qu'il avait fait de son vivant dans cette Maison ;
il y a fait plusieurs fois les Ordres pour marquer l'estime qu'il faisait de
cette Communauté. Il fit faire ensuite par le ministère de M. de la Salle,
disciple et ami du défunt qui, au lit de la mort, l'avait chargé du soin de sa
Communauté et de l'exécution de son testament, tous les traités avec les Corps
de la Ville pour sa consommation.
Il est
à remarquer que, quoique son Éminence eut fait à M. Roland plusieurs refus sur
cet Établissement, ce n'était que par un secret de la divine Providence, car il
l'aimait et l'estimait ; il a avoué que c'était un grand serviteur de Dieu,
qu'il ne l'avait fait souffrir que pour modérer l'ardeur de son zèle, il
faisait fond sur ses lumières, ainsi qu'on l'a remarqué en la personne d'un de
ses disciples qui étant interdit pour quelque fait qu'on lui avait imposé, non
seulement M. l'Archevêque lui rendit ses pouvoirs, mais encore sur le
témoignage de M. Roland, il lui donna une Cure et un Doyenné des plus
considérables de son Diocèse.
La
Ville ayant donné son consentement pour la bonne œuvre qu'avait fait M. Roland
pour l'instruction dans les écoles du lieu de sa naissance, M. l'Archevêque
donna son agrément pour cette œuvre qui l'intéressait plus que personne et se
hâtât d'obtenir les Lettres-Patentes.
L'affaire
fut assurée dès qu'elle fut entre ses mains. Son crédit à la cour ne le rendait
pas timide à demander une grâce de cette nature, dans un temps où les plus
grandes lui étaient prodiguées, et où elles le prévenaient sans lui donner la
peine de les attendre. Un prélat moins puissant eût pu échouer dans cette
rencontre, où pour y réussir il eut été obligé de compter tous ses pas et de
mesurer toutes ses démarches ; mais le frère d'un Ministre tout puissant auprès
du Prince, n'avait pas besoin de ces timides précautions ; il suffisait que le
frère de M. de Louvois partit désirer une chose, pour qu'on allât au-devant de
ses demandes.
Jamais
Monseigneur l'Archevêque de Reims ne fit mieux valoir pour le bien de son
Diocèse l'autorité qu'il avait en Cour et la faveur dont le Prince l'honorait
que dans cette occasion. Les Lettres-Patentes obtenues de Louis XIV aussitôt
que demandées, et ensuite enregistrées au Parlement, aux frais de Monseigneur
Le Tellier, furent remises entre les mains de M. de la Salle digne successeur
de M. Roland dans la Communauté.
Monseigneur
l'Archevêque fit plus encore en accordant sa protection à une: œuvre qu'il
regardait comme la sienne après le décès de M. Roland ; il voulut y contribuer
par ses libéralités, et fournir de ses biens à l'établissement d'une Maison,
qu'on peut appeler, à juste titre, un Séminaire de Maîtresses d'écoles. Par sa
protection, par sa faveur, par ses largesses, elle fut très bien cimentée, et
elle parvint en peu de temps à un état florissant et très utile au public.
Ainsi, si cette Communauté doit son origine à M. Roland, elle doit ses progrès
aux soins laborieux de M. de la Salle et sa stabilité à M. Le Tellier.
Heureuses celles qui composent cette Communauté, si elles conservent toujours
l'esprit de leur Saint Fondateur, et si elles ne déchoient jamais de leur
première ferveur.
Je
dirai encore un mot sur les opprobres que ce Saint homme a soufferts, qui ne se
sont point terminés avec sa vie, qui a finir le vingt sept Avril, mil six cent
soixante dix huit, âgé de Trente cinq ans cinq mois.
M.
Roland ayant marqué dans son testament que son désir était qu'après sa mort on
le revêtit de ses habits de Prêtre et qu'on l'enterrât avec, on exécuta son
désir, on le coucha sur un lit de parade, à la vénération des personnes de
piété. Des libertins qui l'avaient haï pendant sa vie, parce qu'il les
reprenait vivement de leurs vices scandaleux, lui tirèrent par une fenêtre de
la Chambre où il était exposé des coups d'arquebuse. Ce qui fait connaître que
M. Roland était destiné aux souffrances.
Tout
ce qui est écrit dans ce mémoire, a été reconnu, recueilli et déclaré de
plusieurs personnes de probité, qui ont demeuré avec lui dans son petit
Séminaire, qui l'ont conversé et pratiqué dans toutes les circonstances, et
dans ses voyages et maladies. De sorte que si on veut se donner la peine encore
aujourd'hui de s'informer de tous les chapitres sus dits, on verra qu'il n'y a
rien qui ne soit véritable, et ceux qui ont connu M. Roland ont dit que ce ne
sont que de petits fragments de ses mœurs, auprès de ce qu'il était.
[1] Cette copie des “Mémoires sur la
vie de Monsieur Nicolas Roland” a été faite d’après le Manuscrit 3 A. Il
contient la première “Vie” écrite du Bienheureux. L’auteur de celle-ci en est
resté inconnu, ainsi que la date de sa composition. Même les manuscrits
anciens, disparus pendant les guerres, n’ont rien révélé à ce sujet.
On peut penser que
ces “Mémoires” furent rédigées peu après les “Lettres à la louange”, car ces
témoignages collectés en 1693 en ont fourni la matière.
[2] Il y a ici une erreur. Nicolas
Roland est né, non pas le 2 décembre, mais le 8 décembre 1642, comme il ressort
du registre des baptêmes de la Paroisse Saint-Symphorien de Reims où il fut
baptisé le 23 juillet 1643.
[3] Mgr Henri de Maupas.
SOURCE : https://nominis.cef.fr/contenus/saint/10148/Bienheureux-Nicolas-Roland.html
BL. NICOLAS ROLAND was born in Reims, France, in 1642. At a tender age
his parents instilled in him a love for God and the poor, and entrusted him to
the Jesuits for his education.
He excelled in his studies and his family connections assured him a successful business career, but at the age of 18 he decided to study for the priesthood. He was given a well-endowed canonry before being ordained a deacon and was highly regarded as a preacher, but realized that his elegant style reached few of the faithful. He decided to establish free schools for the Christian education of girls.
After receiving priestly ordination, he went to Rouen where he received spiritual direction from the curate of Saint-Amand and lived in complete poverty. He also met Fr Nicolas Barre, an exemplary Minim, who had collected a group of men and women who worked in free schools located in several neighbourhoods of the city. He returned to Reims with the intention of starting similar projects there.
A poorly maintained orphanage was entrusted to him and he gradually transformed it into a real school. Young girls, frequently of unknown parentage, were welcomed into a warm atmosphere and educated. Fr Barre sent him two teachers from charitable schools in Rouen, who were accustomed to living in community and wanted to consecrate themselves totally to God. Thus began an intense religious life connected with apostolic activity. The Sisters of the Infant Jesus were founded in Reims. Their name suggests that the spirit of childhood is the quickest and simplest way to find God and to open one's heart to others.
Some mean-spirited critics rebuked the sisters, maintaining that teaching Christian doctrine was reserved to priests. But Archbishop Le Tellier of Reims was convinced by the founder's arguments and so their work was extended to four sectors of the city.
Fr Roland next thought of boys, but for this task he turned to his disciple, John Baptist de la Salle. The seed would later sprout, but first the sower had to die. In fact, the future founder of the Brothers of the Christian Schools did not feel particularly attracted by this kind of apostolate and it took providential events to convince him of its necessity.
On his deathbed, Fr Roland asked his friend to see that the Sisters of the Infant Jesus were officially approved and entrusted the community to him. He died of fatigue and overwork on 27 April 1678 at the age of 35.
Blessed Nicolas Roland
Profile
Raised in a pious family. Educated by Jesuits. Canon of Rheims, France while still a seminarian. Priest. Noted preacher. Assigned as parish priest in Rouen, France. Returned to Rheims with the plan to start schools for poor girls; he took a run-down orphanage and turned it into a
successful school for orphaned and abandoned girls. Founder of the Soeurs de l’Enfant-Jésus(Sisters of the Infant Jesus) whose first members
were teachers at his school; they received formal approval on 9 May 1678. He and the Sisters expanded
the work and founded more schools around the city. Friend and
mentor of Saint John Baptist la Salle who continued
Nicolas’ work by supervising the Sisters, and later
founding schools for boys.
Born
- 8 December 1642 in Rheims, Marne, France
- 27 April 1678 in Rheims, Marne, France of natural causes
- interred
in the crypt of the Sisters of the Child Jesus in Rheims
- 21 December 1992 by Pope John Paul II (decree of heroic
virtue)
He excelled in his studies and his family connections assured him a successful business career, but at the age of 18 he decided to study for the priesthood. He was given a well-endowed canonry before being ordained a deacon and was highly regarded as a preacher, but realized that his elegant style reached few of the faithful. He decided to establish free schools for the Christian education of girls.
After receiving priestly ordination, he went to Rouen where he received spiritual direction from the curate of Saint-Amand and lived in complete poverty. He also met Fr Nicolas Barre, an exemplary Minim, who had collected a group of men and women who worked in free schools located in several neighbourhoods of the city. He returned to Reims with the intention of starting similar projects there.
A poorly maintained orphanage was entrusted to him and he gradually transformed it into a real school. Young girls, frequently of unknown parentage, were welcomed into a warm atmosphere and educated. Fr Barre sent him two teachers from charitable schools in Rouen, who were accustomed to living in community and wanted to consecrate themselves totally to God. Thus began an intense religious life connected with apostolic activity. The Sisters of the Infant Jesus were founded in Reims. Their name suggests that the spirit of childhood is the quickest and simplest way to find God and to open one's heart to others.
Some mean-spirited critics rebuked the sisters, maintaining that teaching Christian doctrine was reserved to priests. But Archbishop Le Tellier of Reims was convinced by the founder's arguments and so their work was extended to four sectors of the city.
Fr Roland next thought of boys, but for this task he turned to his disciple, John Baptist de la Salle. The seed would later sprout, but first the sower had to die. In fact, the future founder of the Brothers of the Christian Schools did not feel particularly attracted by this kind of apostolate and it took providential events to convince him of its necessity.
On his deathbed, Fr Roland asked his friend to see that the Sisters of the Infant Jesus were officially approved and entrusted the community to him. He died of fatigue and overwork on 27 April 1678 at the age of 35.
On 9
May 1678, Fr de la Salle and Archbishop Le Tellier received the king's approval
for the community and the sisters took their first vows in 1684.
Beato Nicola Roland Fondatore
Reims, Francia, 8 dicembre 1642 – 27
aprile 1678
Il
beato francese Nicola Roland, sacerdote, preoccupato per la scarsa formazione
cristiana della gioventù, istituì scuole per la gioventù femminile, allora
esclusa da ogni tipo di istruzione, e fondò anche la Congregazione delle Suore
del Santo Bambino Gesù. Giovanni Paolo II lo beatificò il 16 ottobre 1994.
Martirologio
Romano: A Reims in Francia, beato Nicola Roland, sacerdote, che, impegnato
nella formazione cristiana dei fanciulli, aprì scuole per le ragazze povere,
allora escluse da ogni forma di istruzione, e fondò la Congregazione delle
Suore del Santo Fanciullo Gesù.
È il terzo componente di
quel fantastico trio di fondatori educatori, che con le loro opere,
illuminarono insieme ad altri santi, la Francia nel Seicento, e ad essere
elevato agli onori degli altari; essi sono s. Giovanni Battista de La Salle
(1651-1719), fondatore dei “Fratelli delle Scuole Cristiane”, il beato Nicolas
Barré (1621-1686), fondatore delle “Maestre di Carità”, poi Suore di Gesù
Bambino e il beato Nicola Roland, fondatore delle Suore del Santo Bambino Gesù
di Reims, di cui parliamo.
Il beato Nicola Roland nacque a Reims in Francia, l’8 dicembre 1642,
primogenito del commerciante Jean Baptiste Roland e di Nicole Beuvelet, in
famiglia vi era anche la piccola Adrienne, unica rimasta dei cinque figli del
primo matrimonio del padre, vedovo di Maria Favart.
Nicola fu affidato ad una nutrice molto religiosa; dotato di grande
intelligenza intorno ai cinque anni imparò a leggere; nel 1650 ad otto anni,
prese a frequentare le ‘petites écoles’, poi nel 1658 compì gli studi nel
Collegio dei Gesuiti di Reims.
Di aspetto gradevole, non tardò ad inserirsi nella vita mondana della
borghesia, partecipando con piacere ad intrattenimenti e distrazioni; dopo una
presunta delusione amorosa, prese a viaggiare in giro per la Francia, per fare
esperienze di lavoro.
Al termine di quel periodo d’incertezza sul suo futuro, decise di votarsi alla
vita ecclesiastica, pertanto nel 1660 si trasferì a Parigi, prendendo alloggio
presso un artigiano in una zona popolare, per poter frequentare i due anni di
filosofia necessari per essere ammessi al biennio di teologia.
A Parigi frequentò gli ambienti più fervorosi, entrando in contatto con
Associazioni cattoliche operanti anche nel sociale, gli Amici di padre Bagot, i
fondatori della Società delle Missioni Estere, praticò i Seminari di Bons-
Enfant di s. Vincenzo de’ Paoli (1581-1660); di S. Sulpizio di Jean-Jacques
Olier, servo di Dio (1608-1657) e di S. Nicola del Chardonnet; terminò gli
studi con il dottorato in teologia.
Ricevuto il diaconato, rivestito dell’abito ecclesiastico, il 3 marzo 1665 fu
nominato canonico teologo, cioè predicatore nella cattedrale di Reims, senza
lasciare i contatti con Parigi dove tornò spesso.
Non esistono documenti che attestino la data della sua ordinazione sacerdotale,
che non poté comunque essere prima del dicembre 1627, secondo le norme del
Concilio di Trento che prescrivevano minimo 25 anni.
La frequentazione degli Istituti parigini dei Lazzaristi, Sulpiziani, Missioni
Estere, fece crescere in lui la conoscenza di realtà ed iniziative sempre
nuove, al cui centro era la popolazione più reietta e l’infanzia abbandonata,
bisognosa di attività caritative, assistenza, educazione.
Dopo la parentesi della peste che colpì Reims nell’estate 1668, padre Nicola
Roland proseguì nella sua impegnata attività di predicatore in cattedrale,
organizzò conferenze per il clero, si dedicò alle missioni nelle campagne,
spostandosi perlopiù a piedi, affrontando fatiche, disagi e pericoli.
Fu direttore spirituale di laici di ogni condizione sociale e di persone
consacrate, fra le quali s. Giovanni Battista de La Salle; nel 1670 predicò la
Quaresima a Rouen e ciò ebbe grande importanza nella sua vita, qui incontrò il
curato di Saint-Amand, Antoine de La Haye, uomo di grandi virtù; il contatto
con lui lo portò a penetrare maggiormente nella vita spirituale e gli fece
scoprire l’importanza del ruolo della scuola nella propagazione della fede
cattolica.
A Rouen incontrò anche il beato Nicolas Barré e il gruppo di uomini e donne
dediti alle scuole gratuite; fu un’esperienza decisiva e padre Roland disse:
“Sono risoluto a lavorare per fondare scuole gratuite per l’istruzione delle
ragazze”.
Ritornato a Reims, già impegnato nell’assistenza agli infermi dell’Hôtel-Dieu e
dal 1670 anche di un orfanotrofio, prese a considerare e concretizzare l’idea
di una comunità simile a quella di Rouen.
Chiese ed ottenne da padre Barré l’invio di due suore da Rouen, per dirigere
l’orfanotrofio da lui ampliato in un nuovo grande edificio e per istituire
scuole popolari nei vari quartieri di Reims.
Il 27 dicembre 1670, arrivarono suor Francoise Duval e suor Anne Le Coeur, che
misero praticamente le radici per una nuova piccola Congregazione; padre Roland
celebrò l’8 gennaio 1671 una prima Messa nel nuovo orfanotrofio dedicato al
“Saint-Enfant Jesus” (Santo Bambino Gesù) e in seguito furono aperte alcune
classi per l’istruzione delle bambine.
Nel 1672 incontrò s. Giovanni Battista de La Salle, futuro fondatore dei
“Fratelli delle Scuole Cristiane”, il quale voleva convincerlo senza riuscirci,
a rinunciare al canonicato per prendere la guida di una parrocchia.
Intanto le suore crescevano di numero e padre Roland si recò a Parigi per
espletare le pratiche, affinché il gruppo fosse l’inizio di una nuova
Congregazione, dedita all’istruzione dell’infanzia sulla scia di quella di
Rouen; rientrò a Reims il Giovedì Santo 7 aprile 1678; il 19 aprile cadde
gravemente ammalato, tanto che il 23 alla presenza dei notai, stese il suo
minuzioso testamento, i cui esecutori dovevano essere il diacono Nicolas Rogier
ed il canonico Giovanni Battista de La Salle.
A quest’ultimo, Roland chiese di essere il successore delle sue opere e
completare l’organizzazione della Congregazione delle Suore del Santo Bambino
Gesù, che egli aveva fondato a Reims nella linea di quella di Rouen, ma con una
caratterizzazione particolare, come è detto nei suoi scritti, soprattutto negli
“Avis aux régulières”.
La Salle, benché non si sentisse attirato da questa forma di apostolato,
accettò la richiesta del suo amico Roland fatta sul letto di morte;
dell’orfanotrofio aveva detto: “È opera di Dio; se ne prenderà cura quando io
non me ne potrò più occupare”.
Dopo aver ricevuto gli ultimi Sacramenti, circondato dai canonici venuti ad
assisterlo, Nicola Roland spirò serenamente il 27 aprile 1678 a nemmeno 36
anni, fu sepolto nella cripta della cappella delle Suore del Santo Bambino Gesù
a Reims.
Giovanni Battista de La Salle, si mise subito al lavoro e già il 9 maggio 1678
ottenne l’approvazione regale e le costituzioni, preparate sommariamente da
padre Roland, furono approvate il 12 novembre 1683 e le Suore, l’8 febbraio
1684 poterono pronunciare per la prima volta i voti.
Inoltre s. Giovanni Battista de La Salle, che aveva compreso le intuizioni
profonde di Nicola Roland, volle creare anche per i bambini l’equivalente delle
maestre di scuola delle fanciulle; fondò così i “Fratelli delle Scuole
Cristiane”.
In questo contesto, Nicola Roland appare come uno dei precursori principali
dell’apostolato del XVII secolo, nel campo dell’insegnamento elementare e della
catechesi; stranamente però il suo nome è restato poco conosciuto fino ai
nostri giorni, la sua prima ‘Vita’ di A. Hammesse è apparsa solo nel 1888; ma
da allora l’interesse nei suoi confronti non è venuto mai meno.
Anche la sua causa di beatificazione, introdotta nel 1942, ha sofferto di
intralci procedurali e lungo silenzio.
È stato proclamato Beato il 16 ottobre 1994 a Roma da papa Giovanni Paolo II;
la sua festa liturgica è il 27 aprile.
Autore: Antonio Borrelli
SOURCE :
http://www.santiebeati.it/dettaglio/92547
Première Conférence faite par le sieur Théologal à la Communauté du Saint Enfant-Jésus, sur ces paroles :“soyez parfaits, comme votre Père Céleste est parfait”. Archives
Communauté du Saint Enfant-Jésus : http://voiemystique.free.fr/nicolas_roland_conference.htm
Recueil des Lettres
écrites par la main de Monsieur Nicolas Roland, Théologal, à plusieurs de ses
pénitentes. Archives, Communauté
du Saint Enfant-Jésus. Manuscrit 5 A : http://voiemystique.free.fr/nicolas_roland_lettres_1.htm
Avis donnés par feu Monsieur Nicolas Roland, Théologal de Reims, pour la
conduite des personnes régulières. Archives, Communauté du Saint Enfant-Jésus :
http://voiemystique.free.fr/nicolas_roland_avis.htm
Petit traité des vertus les plus nécessaires aux sœurs, qu’on a trouvé écrit de la main de M. le Théologal, où il exprime ses sentiments sur la Communauté. Archives. Communauté du Saint Enfant-Jésus de Reims : http://voiemystique.free.fr/nicolas_roland_traite.htm
Première Conférence faite par le sieur Théologal à la Communauté du Saint Enfant-Jésus, sur ces paroles :“soyez parfaits, comme votre Père Céleste est parfait”. Archives
Communauté du Saint Enfant-Jésus : http://voiemystique.free.fr/nicolas_roland_conference.htm