samedi 27 avril 2019

Bienheureux NICOLAS ROLAND, prêtre et fondateur

Bienheureux Nicolas Roland

Prêtre ( 1678)

"A Reims, il s'installe dans une maison, rue du Barbâtre, et partage son toit avec un groupe de jeunes clercs afin de les former au sacerdoce. Il remplit ses fonctions de théologal: prédication et enseignement, mais il veut élargir son champ d'action: aller vers les gens pour toucher les cœurs plutôt que de contenter les esprits. Il se fait prédicateur du peuple et répond aux demandes de ses confrères en parcourant une bonne partie du diocèse... Il se découvre ainsi une éloquence apostolique; parler simple pour parler à tous."

Source: diocèse de Reims.

Un internaute nous précise qu'il est mort à l'âge de 35 ans.

A lire: P. Bernard Pitaud, Nicolas Roland et les sœurs de l'Enfant-Jésus - L'école française à Reims au 17ème siècle, Paris, Éd. du Cerf, coll. « Épiphanie », 2001.

À Reims, en 1678, le bienheureux Nicolas Roland, prêtre. Préoccupé de la formation chrétienne des enfants, il créa des écoles pour les enfants pauvres qui étaient alors exclus de toute formation, et fonda la Congrégation des Sœurs du Saint Enfant Jésus.
Martyrologe romain



Crypte où repose Nicolas Roland, 48 rue du Barbâtre à Reims. 
Photographie de G.Garitan


Bienheureux Nicolas Roland

Nicolas ROLAND est né à Reims, le 8 décembre 1642. Il est le fils de Jean-Baptiste ROLAND, commissaire aux guerres, naguère commerçant en draps, et de Nicole BEUVELET. Il naît à l’époque de la Fronde. Vers l’âge de huit ans, il entre au collège des Jésuites. Ses années d’études le conduisent à se préparer à ce que Dieu attend de lui. Il est très vite attiré par le sacerdoce. En 1653, alors qu’il assistait à une ordination dans l’abbaye de Saint Pierre les Dames, il se sent soudainement poussé intérieurement à demander la tonsure. Ainsi éclate la spontanéité de son âme.
Ses études terminées, il voyage à travers la France, parcourt les provinces, mène une vie mondaine. Mais à la suite d’une mésaventure, il décide de renoncer à tout voyage, se dirige vers Paris pour y suivre une retraite et perçoit l’appel à être prêtre. Il entreprend alors des études de philosophie et de théologie. II fréquente une communauté de jeunes, passionnés par Jésus-Christ autour du Père Bagot. À l’Assomption 1665, Nicolas ROLAND, jeune diacre de 22 ans, est nommé chanoine théologal, en la cathédrale de Reims, en raison de ses talents d’orateur.
Mais, dans une France ruinée par la Fronde et par les guerres royales, Nicolas ROLAND est bouleversé par la misère des plus pauvres. Le sort des enfants le préoccupe. Il prend alors en charge un groupe d’orphelins aidé de deux religieuses que le Père Barré de Rouen lui a envoyées.
C’est une nouvelle étape pour Nicolas ROLAND ; en continuant la formation des prêtres, il va consacrer le reste de sa vie a soulager les enfants pauvres, a les éduquer et a leur annoncer Jésus-Christ. Ouvrir des écoles ne lui suffit pas, il sent l’urgence de fonder une communauté d’apôtres consacrées, qu’il enverra deux par deux à travers les villes et les campagnes à la rencontre des jeunes et des familles : ce sera l’ébauche du travail pastoral et paroissial qui se poursuivra après sa mort.
Sa maison des orphelins devient la maison du Saint Enfant-Jésus en décembre 1670. Malgré les problèmes matériels et administratifs, Nicolas ROLAND ouvre plusieurs écoles gratuites dans différents quartiers.
Il repart alors pour Paris afin de se replonger dans le climat de sa formation, en particulier dans les communautés de Saint Nicolas du Chardonnet et de Saint Sulpice. De là, II se rend à Rouen auprès du Père Barré et de Monsieur de la Haye, curé de Saint Amand qui marqueront d’une façon décisive sa vocation apostolique. Il y reste six mois vivant dans la pénitence et la pauvreté.
De retour à Reims, il s’installe dans une maison, rue du Barbâtre, et partage son toit avec un groupe de jeunes clercs afin de les former au sacerdoce. Il remplit ses fonctions de théologal : prédication et enseignement, mais il veut élargir son champ d’action : aller vers les gens pour toucher les coeurs plutôt que de contenter les esprits. Il se fait prédicateur du peuple et répond aux demandes de ses confrères en parcourant une bonne partie du diocèse … Il se découvre ainsi une éloquence apostolique ; parler simple pour parler à tous.
Encouragé par son ami, Monsieur de Renty. il part en pèlerinage au Carmel de Beaune pour se vouer d’une façon toute particulière au mystère de l’Incarnation du Fils de Dieu, spécialement en son Enfance. Pour obtenir les lettres patentes, Nicolas ROLAND passe alors tout l’hiver 1678 à Paris. Il rentre à Reims en avril pour assister à l’ordination de son jeune ami et disciple St Jean-Baptiste de la Salle à qui il a communiqué sa flamme.
Mais le 19 avril, Nicolas ROLAND tombe gravement malade. Il confie alors à St Jean-Baptiste de la Salle, la mission de mener à bien la reconnaissance de la communauté de l’Enfant- Jésus, mais également de soutenir moralement les soeurs qui s’engagent de plus en plus nombreuses.
Nicolas ROLAND meurt le 27 avril 1678.
Éléments de Bibliographie : 
P. Bernard Pitaud : Nicolas Roland et les soeurs de l’Enfant-Jésus – L’école française à Reims au 17ème siècle – Paris, Éd. du Cerf, coll. « Épiphanie », 2001.


UN SAINT, UNE VIE 

Bienheureux Nicolas Roland, recevoir et donner

·       LECOEUR Xavier

·      
Reims en 1642, au sein d'une famille bourgeoise aisée. Son père, ancien commerçant en draps, occupait le poste envié de fonctionnaire royal. Le jeune Nicolas fit de solides études au collège des Jésuites de la ville, avant de s'offrir – grâce à l'argent familial – un voyage de plusieurs mois, dans plusieurs pays, destiné à parfaire sa culture et à développer ses relations.
À 18 ans cependant, il se détourna de la carrière de négociant que l'on envisageait pour lui et s'orienta vers le sacerdoce. Au terme de trois années de philosophie et de théologie à Paris, il revint en 1663 à Reims où, grâce à l'influence de sa famille, les portes du chapitre de la cathédrale s'ouvrirent à lui. Le jeune chanoine Roland, ordonné diacre puis prêtre, devint l'un des conseillers attitrés de l'archevêque et fut même nommé « théologal »: à ce titre, il prêchait chaque dimanche dans la cathédrale et donnait des conférences plusieurs fois par semaine aux membres du clergé.
Mais Nicolas Roland, homme entier et passionné, avait les yeux bien ouverts sur le monde qui l'entourait: il fut profondément touché par la misère croissante des plus pauvres. Le fils de famille qui avait tant reçu se sentit alors appelé à donner à son tour, convaincu que « Dieu ne sépare pas la charité qu'Il veut que nous ayons pour Lui de celle qu'Il nous demande d'avoir pour nos frères ».
Ses sermons brillants et enflammés enthousiasmaient la haute société rémoise. Mais qui s'occupait de l'instruction chrétienne du peuple et, notamment, des jeunes livrés à eux-mêmes? Cette question l'amena à repartir pour Paris, puis à aller à Rouen où il fut impressionné par l'œuvre réalisée par le futur bienheureux Nicolas Barré: ce religieux de l'ordre des Minimes avait ouvert, dans la ville de Corneille, plusieurs « écoles chrétiennes et charitables » destinées aux enfants des rues.
De retour à Reims en 1670, Nicolas Roland chercha à faire de même. Il reprit, à ses propres frais, un orphelinat qu'il transforma en maison d'éducation pour fillettes. Il fut aidé en cela par le P. Barré qui eut la générosité de lui envoyer deux de ses meilleures enseignantes: Françoise Duval et Anne Le Cœur. Rejointes par des jeunes filles rémoises, elles formèrent le noyau de la future congrégation des Sœurs du Saint-Enfant-Jésus.
Malgré les oppositions, Nicolas Roland parvint à ouvrir plusieurs écoles gratuites à Reims. Toutefois, épuisé par son travail apostolique, il mourut le 27 avril 1678, âgé de seulement 35 ans. Le projet et l'esprit de cet homme « saisi par l'Amour de Dieu »,manifesté dans le mystère de l'Incarnation, perdurèrent tout de même grâce à sa congrégation bien sûr, mais aussi grâce à un jeune Rémois dont il fut le confesseur, l'ami et le précurseur: saint Jean-Baptiste de La Salle, le fondateur des Frères des Écoles chrétiennes.
> Aller à sa rencontre: * Un livre. Nicolas Roland et les Sœurs de l'Enfant-Jésus, par Bernard Pitaud (Cerf, 2001). * Un site. Celui de la Congrégation – https://soeurssaintenfantjesus.wordpress.com
CHRONOLOGIE DE SA VIE
1642
8 décembre, naissance, à Reims, de Nicolas Roland, fondateur de la Communauté du Saint Enfant-Jésus de Reims. Il fut le directeur spirituel de saint Jean-Baptiste de la Salle.
15 décembre, mort à Marle de Nicolas Beuvelet, grand-père de Nicolas Roland.
1643
31 mars, Léonor d’Étampes, nouvel archevêque, entre à Reims.
14 mai, mort de Louis XIII.
23 juillet, baptême à Saint-Symphorien — première cathédrale de Reims — de Nicolas Roland. C’était le jour de la fête de la translation de saint Nicaise, évêque martyr de Reims.
1644
Mathieu Beuvelet, oncle et parrain de Nicolas Roland, entre dans la Communauté de Saint-Nicolas-du-Chardonnet.
1645
En 1645, les Jésuites, malgré les échecs qu’ils avaient éprouvés, auparavant, tentèrent alors quelques acquisitions pour fonder un nouvel établissement. Leurs projets échouèrent, malgré l’intervention du duc d’Enghein auprès du Conseil de Ville.
1648
Âgée d’à peine 5 ans, Nicolas Roland apprend à lire en 4 mois, grâce à sa tante, Madame la Conseillère.
1649
Philippe Roland, oncle de Nicolas, devient chanoine de la cathédrale. Il le restera jusqu’à sa mort (1630-1667).
1650
Grande épidémie à Reims.
Mathieu Beuvelet est ordonné prêtre à Saint-Nicolas-du-Chardonnet.
1651
30 avril, naissance, à Reims, de Jean-Baptiste de la Salle († 1719 à Rouen). Béatifie le 19 février 1888 et Canonisé le 24 mai 1900 par Léon XIII.
Mort de l’archevêque de Reims, Léonor d’Étampes de Valençay.
Henri de Savoye et de Nemours, qui fut nommée en 1651, abdiqua en 1657 sans avoir pris possession de son archevêché.
1652
Mathieu Beuvelet, oncle et parrain de Nicolas Roland, fait un voyage à Reims, il essaie de fonder une Communauté de prêtres comme celle de Saint-Nicolas-du-Chardonnet.
1653
A l’âge de 11 ans, Nicolas Roland reçoit la tonsure des mains de Monseigneur Henri de Maupas du Thour, évêque du Puy, ancien abbé de l’abbaye de Saint-Denis de Reims.
1654
7 juin, sacre de Louis XIV à Reims par Simon le Gras, évêque de Soissons. L’évêché de Reims était alors vacant.
Lors de la venue de Louis XIV pour son sacre à Reims, Nicolas Roland, alors âgé de 11 ans, joua dans une pièce de théâtre spécialement écrite pour l’occasion de la venue du souverain. Il s’y fit remarquer par son sang froid.
1655
Mathieu Beuvelet, oncle et parrain de Nicolas Roland, vient à Reims pour la dernière fois. Ce fut à cette occasion qu’eut lieu l’extase lors de la célébration de la sainte Messe.
1656
15 février, mort de Mathieu Beuvelet, oncle de Nicolas Roland et compagnon du Père Adrien Bourdoise à Saint-Nicolas-du-Chardonnet, pour la Congrégation duquel il a écrit des “Méditations” pour la formation des prêtres.
Jean Roland, oncle de Nicolas, reçoit la 28e prébende du chapitre cathédral. Il fut chantre et trésorier de l’Église de Reims et même vicaire général de Monseigneur Charles Maurice Le Tellier (1640-1703).
1657
Le Cardinal Barberini, neveu du Pape Urbain VIII est nommé archevêque de Reims. Il ne prit possession de son diocèse qu’en 1667.
1660
Contre l’avis de son père, Nicolas Roland participe à un bal, où il court un danger. Repenti, il ne participera jamais à aucun autre.
Nicolas Roland fait ses études à Paris. Il a alors 17 ans.
Le 26 août, lors de l’entrée à Paris de l’Infante Marie-Thérèse, Nicolas prie devant le Saint-Sacrement, alors que son père, ses frères et sœurs regardent passer le cortège royal.
1661
Nicolas Roland protégé par la sainte Vierge, lors d’un voyage en mer.
1663
Nicolas Roland termine, à Paris, ses études de théologie et conquiert le bonnet de docteur.
1664
18 mars, ouverture à Reims de la première maison des orphelins, par Madame Varlet.
1665
12 août, Nicolas Roland entre au Chapitre Métropolitain de Reims.
Nicolas Roland commence à prêcher. Il n’a que 22 ans.
Nouveau voyage à Paris. Il fréquente Saint-Sulpice, Saint-Nicolas-du-Chardonnet et Saint-Lazare.
1667
3 mars, un Édit royal règle les formalités nécessaires à l’installation des communautés religieuses.
17 mars, Jean-Baptiste de La Salle reçoit les ordres mineurs.
1668
Nicolas Roland se rend en pèlerinage au Carmel de Beaune, sur la tombe de sœur Marguerite du Saint-Sacrement, avant de fonder la Communauté du Saint Enfant Jésus à Reims.
Épidémie de peste à Reims. A cette occasion, Monseigneur Barberini, archevêque de Reims, ordonne des processions de la châsse de Saint Rémi à travers la ville. Nicolas Roland y participe activement, car il était parmi les huit chanoines désignés pour porter la lourde châsse.
1669
Nicolas Dallier, lieutenant des habitants de Reims (1669-1674).
Il négocia avec Monseigneur Charles Maurice Le Tellier, alors coadjuteur du cardinal Barberini, un certain nombre de closes concernant les relations des gens de la Ville et l’évêché.
Ce fut aussi à ce Lieutenant que Nicolas Roland du recourir pour la fondation de la Communauté du Saint Enfant-Jésus.
1670
Nicolas Roland prêche le Carême à Rouen. Avant d’aller à Rouen, il avait changé sa façon de prêcher. Il avait éliminé de son discours toute recherche de grandiloquence.
22 décembre, Nicolas Roland achète une maison rue du Barbâtre pour sa fondation (en face de la maison actuelle : à l’enseigne Saint-Martin.).
27 décembre, arrivée des deux premières Sœurs de la Communauté : Françoise Duval et Anne Le Cœur. Elles étaient envoyées par le Père Barré.
1671
11 janvier, célébration de la première Messe chez les Sœurs, en présence de Nicolas Dallier, lieutenant des habitants de Monsieur Bachelier, ancien Lieutenant.
3 août, le Cardinal Barberini, archevêque de Reims, meurt en Italie, à Nemi, près de Rome.
Charles-Maurice Le Tellier devient archevêque de Reims.
1672
2 juin, Jean-Baptiste de La Salle est ordonné sous-diacre à Cambrai par Monseigneur Ladislas Jonnart, évêque de cette ville.
1673
Mort de Jean-Baptiste Roland, père de Nicolas Roland. (1611-1673).
1674
4 août, Nicolas Roland fait poser la première pierre d’une véritable chapelle pour sa Communauté naissante.
1675
4 juillet, rencontre, à l’archevêché de Reims, de Nicolas Roland et de Nicolas Dallier, lieutenant des habitants.
16 juillet, bénédiction de la chapelle de la Communauté du Saint Enfant Jésus de Reims.
1676
Nicolas Roland participe activement aux missions de Sommepy et de Fismes, données par les prêtres de Saint-Lazare.
Nicolas Roland fait le voyage de Rouen, pour y prêcher le Carême et pour rencontrer le Père Barré.
Sa maison devient le premier Séminaire de Reims.
21 mars, Jean-Baptiste de La Salle reçoit le diaconat, dans la chapelle de l’archevêché de Paris des mains de François Batailler, capucin, évêque de Béthléem.
Louis Tronsson devient supérieur général du Séminaire de Saint-Sulpice, en remplacement de M. de Bretonvilliers.
1677
Novembre, Nicolas Roland part pour Paris afin d’obtenir les Lettres Patents pour sa fondation. Il logea chez les Carmes déchaussés.
1678
Jeudi 7 avril, Nicolas Roland rentre à Reims, sans avoir obtenu les Lettres Patentes.
Nicolas Roland fait le projet de se retirer à Caen, dans la Maison de Monsieur de Bernières. Ce projet ne se réalisera pas, car le 21 avril, il meurt, à Reims, entouré de son successeur, le Père Guillaume Rogier et de son fils spirituel, saint Jean Baptiste de la Salle. (1642-1678).
9 avril, Jean-Baptiste de La Salle est ordonné prêtre par l’archevêque de Reims, Charles Maurice Le Tellier.
Épidémie de fièvres pourpreuses, à Reims. Maladie contagieuse.
19 avril, le Conseil de la Ville de Reims décide d’attendre la décision du Roi, avant de permettre à Nicolas Roland de fonder sa Communauté.
19 avril, Nicolas Roland est atteint par la maladie des fièvres pourpreuses.
23 avril, Nicolas Roland fait son testament.
27 avril, mort du bienheureux Nicolas Roland (1642-1678).
29 avril, obsèques solennelles du bienheureux. Il fut inhumé dans la chapelle de la Communauté, au pied du tabernacle.
9 mai, Lettres de Cachet, signées par Louis XIV, autorisant la fondation de la Communauté du Saint Enfant-Jésus de Reims.
24 mai, Monseigneur Le Tellier remet au Conseil de Ville la lettre royale qui autorise la fondation de la Communauté.
11 août, procès-verbal de l’établissement officiel de la Communauté du saint Enfant-Jésus.
1679
17 février, enregistrement des Lettres Patentes données par le roi. La Communauté du Saint Enfant-Jésus a désormais une existence légale.
Mois de mars, arrivée à Reims de Adrien Nyel, pour fonder, avec Jean-Baptiste de La Salle la première école de garçons.
15 avril, saint Jean-Baptiste de la Salle ouvre sa première école.
1681
Jean-Baptiste Amé, lieutenant des habitants de Reims (1681-1683).
Il était le beau-frère de Nicolas Roland. † 6 novembre 1703.
1683
12 novembre, Monseigneur Le Tellier signe les premières Constitutions de la Communauté du Saint Enfant-Jésus de Reims.
1684
8 février, huit Sœurs prononcent leurs vœux dans la nouvelle Communauté du Saint Enfant-Jésus de Reims.
Mort de Nicole Beuvelet, mère de Nicolas Roland (1617-1684).
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1939
Le Cardinal Suhard signe le décret d’ouverture du procès en vue de la béatification de Nicolas Roland.
1941
Constitution d’une commission historique et d’un tribunal diocésain.
1978
20 novembre, le frère Morelli, des Frères des Écoles Chrétiennes, est nommé Postulateur de la cause.
1980
24 avril, après un procès de non-culte favorable, la clôture du procès diocésain est ratifiée par Monseigneur Ménager.
2 mai, envoi du dossier à Rome.
1982
26 mars décret d’approbation des écrits de Nicolas Roland.
1986
Publication de la “Position super virtutibus”.
1987
3 mars, session des consulteurs historiques.
1988
25 mars, le décret d’approbation est promulgué.
1992
21 décembre, le Pape signe le décret reconnaissant la pratique héroïque des vertus, tant théologales que cardinales.
1993
27 avril, la Commission médicale pontificale accepte le miracle proposé pour la cause.
24 juin, la Commission des théologiens donne son accord.
19 octobre la Commission plénière des Cardinaux entérine la décision des théologiens.
1994
16 octobre, béatification de Nicolas Roland, à Rome, par le Pape Jean-Paul II.



MÉMOIRES

sur la Vie de Monsieur Nicolas Roland, prêtre,
Chanoine Théologal de l’Église de Reims,
et Fondateur de la Communauté du Saint-Enfant-Jésus,
décédé le 27 avril 1678, âgé de 35 ans et 5 mois [1]


CHAPITRE I

Sa naissance, l’origine de ses parents,
et ses premières années

Monsieur Nicolas Roland, naquit à Reims, le deux décembre 1642,[2] de Monsieur Jean-Baptiste Roland, Commissaire ordinaire des guerres, et de Dame Nicole Beuvelet, native de Marle, en Picardie, tous deux fort craignants Dieu et assistant soigneusement au Service divin aussi bien qu’aux Prédications, y conduisant leurs enfants et domestiques ; ils avaient une inclination particulière à faire l’aumône, assistant les pauvres dans les temps de cherté, de pain, d’habits, couvertures, et tout autre besoin; leur faisant apprendre des métiers pour gagner leur vie.
Aussitôt qu’il fut né, Monsieur son père envoya à Marle, pour en donner avis à Monsieur Beuvelet, son aïeul, et le prier de venir le tenir sur les Saints fonds de baptême ; mais la mort qui le prévint l’en empêcha, et ce fut son fils, Monsieur Beuvelet, avocat au Parlement, et depuis fait prêtre à Paris, à Saint-Nicolas-du-Chardonnet, où il est mort en réputation d’une haute piété. Il le tint avec Mademoiselle Barbe Beuvelet, sa sœur, femme de Monsieur Tourtebatte, Conseiller au Parlement de Laon : on lui donna au baptême le nom de Nicolas, comme son aïeul maternel, qui était un homme d’une piété très connue. Sa bourse, ses greniers aussi bien que son cœur, étaient ouverts aux pauvres, et son inclination pour eux était si grande que, pour les secourir, il allait les chercher tous les dimanches au sortir du Service Divin, où il assistait régulièrement. Outre ses charités quotidiennes, il faisait l’aumône trois fois la semaine, disant que cela n’appauvrissait pas. En temps de cherté, il faisait travailler sans nécessité les pauvres gens, à dessein de leur faire gagner leur vie, et éviter l’oisiveté. Il n’inspirait que la charité, la douceur et la patience à ses enfants ; aussi, leur donna-t-il l’exemple jusqu’à la mort ; car il eut une grande maladie, l’espace de six mois, qu’il supporta avec la plus grande patience. L’amour qu’il avait pour les pauvres, fit que trois jours avant sa mort, il voulut encore les voir passer devant sa chambre, leur faisant faire une distribution de pain, de vin et de viande ; se recommandant à leurs prières. Il mourut après avoir souffert avec un grand abandon à la volonté de Dieu ; il lui avait demandé de faire lui-même son purgatoire en ce monde. Il disait avec consolation qu’il l’avait obtenu par les cuisantes douleurs qu’il souffrait. Il reçut très souvent le Saint-Sacrement, qu’il faisait apporter, ce qu’il faisait à genoux, nonobstant ses extrêmes douleurs.
Le premier soin des pieux parents de Monsieur Roland, après son baptême, fut de le donner à une pieuse et vertueuse nourrice, dont la dévotion était d’aller tous les jours au tombeau de saint Rémi, et à l’église de Sainte Nourrice, pour leur offrir son nourrisson. Elle eut grand soin, aussitôt qu’il commença à parler, de lui faire prononcer le saint Nom de Jésus et de Marie, et de lui apprendre ses prières et ses devoirs envers Dieu.
On a remarqué qu’il correspondait aux soins de cette vertueuse nourrice, avec l’inclination qu’il avait sucée avec le lait.
De retour à la maison paternelle, le jeune enfant eut toutes les qualités qui rendent aimable à cet âge, jointes à celles qui donnent les plus heureuses espérances pour l’avenir : il annonça de grands talents par la rapidité de ses premiers succès ; il apprit à lire en quatre mois, quoi qu’il ne fut âgé que de cinq ans ; il avait la mémoire belle et heureuse ; il récitait des vers en compagnie, avec une facilité et une grâce qui le faisait admirer.
Ses plus agréables divertissements, dans cet âge tendre, étaient ce qu’un bon chrétien doit savoir. Il secondait si parfaitement les desseins de ses parents à l’élever en la crainte de Dieu, que de ces petits commencements, on pouvait juger que le Ciel le destinait à de grandes entreprises. Sa manière d’agir et de parler lui gagnait tous les cœurs, et sa docilité le rendait susceptible de tout bien. Il était avantagé de la nature, beau et bien fait de sa personne ; son abord affable, civil et obligeant ; sa conversation était agréable. Il parlait de Dieu avec plaisir et aimait à en entendre parler : il était plein de joie lorsqu’il trouvait quelqu’un qui aimait à en entendre parler.
Il commença à étudier extrêmement jeune. On a rapporté de lui, qu’étant aux petites écoles, il importunait ses parents pour avoir la liberté d’aller en classe; lesquels ne le voulaient pas à cause de sa grande jeunesse. Il les importuna tant, qu’ils lui accordèrent. Il y fut avec une robe et, quoique les écoliers se moquassent de lui, il ne se rebuta pas ; il s’appliqua avec plaisir à l’étude ; il y fit en peu de temps de grands progrès, ce qui fit voir dès lors que le don de science lui était communiqué.
Dès ce temps, ses mœurs étaient réglées : il vivait dans la maison dans la plus grande douceur avec les domestiques ; et parmi ses compagnons de classe, il n’a jamais eu aucun démêlé avec qui que ce soit ; il se retirait facilement de la compagnie de ceux dont on lui faisait connaître les mauvaises inclinations. Il arriva cependant qu’un de ses compagnons de classe lui conseilla de prendre de l’argent à sa mère ; la mère s’en étant aperçu, lui demanda si ce n’était pas lui qui l’avait pris. Il changea bientôt de couleur, et en tremblant, il dit qu’il avait pris cinquante sols et qu’il avait été les cacher dans les fossés de la ville : (Ceci fait voir son enfance) que c’était un de ses compagnons qui lui avait appris à les prendre. Ce coup lui servit d’avertissement, dont il fit son profit.
Il était franc et ouvert ; haïssait la dissimulation et le mensonge. Éloigné des crieries, emportements et contestations indiscrètes, il défendait paisiblement la vérité ; n’employait jamais le jurement ; en détestait jusqu’à l’apparence. Il ne pouvait souffrir de paroles qui soient contre la pudeur, et tous ceux qui l’ont connu depuis sa plus tendre enfance, jusqu’à sa mort, ont rapporté de lui, que jamais on ne lui a entendu dire une parole contre cette vertu. Ses paroles l’auraient justifié contre d’injustes soupçons qu’on aurait pu former contre lui, et ceux qui l’ont conversé, rendent témoignage que personne n’était plus retenu en ses discours et en sa conduite.
Il était inconsolable quand il avait déplu en quelque chose à ses parents ou à ses maîtres i il ne fallait lui dire qu'une parole un peu sèche ou lui montrer un air plus grave pour l'attrister ; on pouvait le corriger par un regard, quoi qu’il ne fut nullement d'un naturel timide.
Ses progrès dans la piété devinrent sensibles à mesure qu'il croissait en âge, il n'omit aucun des moyens propres à la nourrir, il se plaisait à la prière et à la lecture de la vie des Saints ; il pratiquait des pénitences et des mortifications pour les imiter, se privant quelquefois de son repas pour en faire part aux pauvres ; il endurait le froid, il couchait sur la dure ; une de ses Tantes l'a trouvé une fois couché dessous une table sur laquelle il y avait un tapis qui le cachait ; elle lui demanda ce qu’il faisait là, il répondit qu'il prétendait y passer la nuit, il la pria de n'en rien dire et de le laisser ; comme c’était en hiver et qu'il n'avait encore que huit à neuf ans, elle lui dit, c’est donc pour vous faire mourir, il faut vous retirer ; mais pourquoi ma Tante. Saint François n'en est pas mort pour y avoir couché presque toute sa vie : n'ayant pas égard à sa dévotion, elle le fit aller coucher dans son lit. Les domestiques lui dirent qu'ils s'étaient déjà aperçus qu'il ne restait pas dans le lit, qu'ils l'avaient trouvé nombre de fois dans la ruelle du lit couché sur le plancher, y priant Dieu. On lui défendit de se lever davantage, et on mit un jeune homme qui était son parent pour coucher dans sa chambre et l'observer.
Étant âgé de dix ans, M. Beuvelet son oncle, maternel et son parrain, homme d’une très haute piété qui est mort en odeur de sainteté en un Séminaire de Paris (Saint-Nicolas-du-Chardonnet) lui mettant la main sur la tête dit : Voilà un enfant qui sera un grand Serviteur de Dieu et qui servira son Église.
Ce cher oncle et parrain désira l'avoir pour l’avancer dans les études à Paris ; mais il en fut empêché par une maladie qui lui survint, et qui l'obligea de le laisser chez M. son Père ; après qu’il fut guéri, on le mit en pension chez les Pères Jésuites où il profita avec succès, se faisant toujours paraître des plus éclatants du Collège ; il paraissait avec la plus grande liberté dans toutes les Tragédies ; ce qui parut particulièrement devant la Cour, lorsque le Roi vint se faire sacrer à Reims ; car jouant sa pièce, comme on se prit à rire, il s’arrêta pour en donner le loisir, puis après que le bruit fut passé, il reprit le fil de son discours avec tranquillité comme s'il n'eut pas été interrompu. Ce qui le fit admirer de toute l'assemblée.
Pendant ses études il ne perdait point de temps dans les compagnies, tant il lui était cher, le donnant tout à ses petites dévotions et à ses livres : fuyant les divertissements des enfants de son âge ; il était ennemi de la médisance, parmi ses compagnons il ne souffrait pas qu’on parlât mal de qui que cc soit, s'il arrivait à quelques-uns de le faire, aussitôt la rougeur lui montait au visage et prenait la défense des absents.
Dieu qui avait prévenu ce Jeune Enfant, comme parle l'Écriture, des bénédictions de sa miséricorde, lui avait donné un esprit étendu et pénétrant, une mémoire belle et heureuse, un cœur grand, généreux, capable de grands desseins, que les contradictions et toutes les difficultés ne rebutaient pas ; Dieu le menait comme par la main sans qu'il se sut. Un jour se trouvant à Saint-Pierre-les-Dames, où Monsieur l'Évêque du Puy [3] y donnait les Ordres, le Siège Archiépiscopal de Reims étant vacant : ce jeune écolier se sentit si fort porté à demander la tonsure (quoiqu'il n'eut pour lors que dix à onze ans), qu'il courut en grande hâte, prendre une soutane et un surplis, prenant un cierge chez un marchand qu'il rencontra, et retournant à Saint-Pierre, il arriva que la Cérémonie était faite, Monsieur l'Évêque avait déjà quitté ses habits de cérémonie ; le jeune enfant fendant la presse parvint malgré le rebut des officiers, jusqu'à Monsieur l'Évêque, qui s'était retourné et voyant que set enfant lui demandait la tonsure de si bonne grâce, qu'il ne put lui refuser ; il reprit ses babils de Cérémonie et le tonsura.
La vivacité qui ne l'a jamais quitté pendant sa vie, et qui n'a cessé d'être pour lui la matière de bien des combats, et l'occasion de bien des victoires, comme on le verra dans la suite, se développa dans sa plus tendre enfance ; il était d'un naturel fier, bouillant et colère, il travailla dès lors à se modérer par la docilité et par le respect qu'il avait pour ses parents et ses maîtres desquels il était très aimé, et pour qui il avait de son côté l'attachement le plus tendre.

CHAPITRE 2

De la vie que M. Roland a menée
dans le siècle

Quoique M. Roland eut été enclin au bien dès sa jeunesse, et que ses parents eurent grand soin de le former et pousser dans les sciences, ce ne fut toutefois que dans le dessein de l'engager dans le monde ; il quitta les études et commença comme il le dit lui-même, sa vie mondaine ; son bel esprit, ses grâces naturelles, son humeur gaie le rendait aimable à ses parents et à ceux de sa condition, et l'engageait à suivre le train du monde honnêtement ; il se trouvait fréquemment dans les assemblées, dans les bals, desquels néanmoins il est toujours sorti avec honneur selon les personnes du monde. Ce que toutefois il a regretté tous les jours de sa vie, comme un temps perdu, et mal employé, où il avait disait-il couru risque de se perdre plusieurs fois, si ce n'eut été une grande et infinie miséricorde de Dieu qui, par sa bonté m'a préservé de tomber dans les désordres de l'impureté qui perd ordinairement la jeunesse.
Dans la dix-septième année de M. Roland, il lui arriva une petite disgrâce à l'occasion d'un bal où il avait été contre la défense de M. son Père ; cette disgrâce fut pour lui un coup de grâce : car cela lui fit reconnaître son égarement et la vanité du monde.
M. son Père ayant toujours dessein de l'engager dans le monde, après cette disgrâce apaisée fut pour lui plein de bonté, et lui donna nue somme d'argent avec liberté de voir les raretés dans les pays éloignés, comme il est ordinaire aux enfants de famille, pour lui faire suivre ensuite ce qu'on appelle le beau monde, mais la grâce se servit de cette liberté pour lui changer tout à fait le cœur : car ayant vu plusieurs pays et s'étant avancé dans les lettres et dans le négoce, selon les intentions de M. son Père, il alla aussi sur mer, où il fit rencontre d'un Capitaine de Vaisseau, qui voulut l'engager au mal ce qu'il reconnut par ses paroles, il lui répondit qu'il avait ordre de son père de retourner ; voyant qu'il ne pouvait s'en défendre, il eut recours à la Sainte Vierge qui le protégea miraculeusement : car le vaisseau s'arrêta soudain, sans que la force des matelots le puisse faire marcher par le commandement de leur maître ; le vaisseau étant approché d'un autre, il se jeta dedans pour gagner terre. Ce qu’il connut être une protection particulière de la Sainte Vierge, pour laquelle il a eu une dévotion tendre et reconnaissante tous les jours de sa vie.
Étant échappé de cette occasion dangereuse et périlleuse, il retourna à Paris, et contre toute l'espérance de sa famille, il prit la résolution de se consacrer au service de Dieu dans la Compagnie de Jésus et commença dès lors à fréquenter des personnes de piété et s'adonna tout de bon à réformer ses mœurs.

CHAPITRE III

M. Roland quitte le monde et reprend
ses études

Dans le séjour qu'il fit à Paris, il commença sa conversion sincère à Dieu par une retraite spirituelle qu'il fit dans une maison réformée, après laquelle le dessein de se faire Jésuite, n'ayant pas réussi, parce que la Providence en avait d'autres sur lui, comme on le verra dans la suite ; il se dépouilla des habits du siècle, quitta le pourpoint de brocard, prit la soutane et revint à Reims, bien résolu de se donner tout à Dieu, ce qui étonna grandement ses parents et toutes les personnes de sa connaissance ; mais particulièrement une jeune demoiselle qu'il avait aimée sous l'espérance du mariage, laquelle dans cet étonnement, joint à quelques autres petites disgrâces, se donna aussi à Dieu à son tour, et à son exemple, et a vécu depuis en réputation de piété.
Peu de jours après l'arrivée de M. Roland chez M. son père, il retourna à Paris pour y étudier en Philosophie, il se retira dans un quartier de Paris assez détourné chez un menuisier pour y vivre d'une manière pauvre et inconnue au monde ; il se revêtit de vieux habits noirs, à l'insu de M. son Père, pour paraître un pauvre écolier parmi ses compagnons de classe : commençant dès ce temps-là à pratiquer la Sainte pauvreté qu'il a aimée toute sa vie.
Mais comme la grâce agissait fortement et noblement dans son cœur, il crut devoir changer cette première demeure en celle d'une Communauté de la rue Saint-Dominique ; où vivaient alors de bons Ecclésiastiques et laïques ; il y fit un séjour de trois années, donnant des exemples continuels des vertus les plus héroïques, dans cet intervalle, il conçut le désir d'accompagner les premiers ouvriers qui ont été à Siam ; mais la Providence, en ayant ordonné autrement, il prit le bonnet de Docteur dans une Université du Royaume, en un âge où à peine les autres sont en état non de prêcher, mais d’être des auditeurs raisonnables de la Sainte Parole.
Il prêcha à l'âge de vingt deux ans dans la Cathédrale, avec un applaudissement général. Dans ses premiers sermons il avait les ornements du langage, il était semblable en cela à saint Pierre Chrysologue qui a été Évêque de Ravenne et qui est reconnu pour un Père de l'Église et a bien été un prédicateur fleuri, et d'ailleurs étant jeune, il avait besoin de réputation pour faire les grands biens que Dieu a fait paraître dans toutes ses démarches.

CHAPITRE 4

Monsieur Roland se dispose à la prêtrise

M. Roland s'était rempli depuis son retour à Dieu de l'esprit de M. Beuvelet son oncle et son parrain : qui a éclaté dans toute la France, et dans Saint-Nicolas-du-Chardonnet. Pour se disposer à la prêtrise, il fit une retraite de tente jours, durant laquelle il se pénétra de la dignité du sacré caractère de Prêtre dont il allait être bientôt revêtu, et se traça un plan de vie qu'il gardât jusqu'à la mort. Il s’y remplit des sentiments d'humilité, d'abnégation de lui-même et de mort à tout ce qui est du monde, sentiments qu'il a toujours gardés depuis ; car ayant reçu la prêtrise, il ne voulut pas célébrer sa première Messe haute, ni y souffrir d'assemblée de famille, pour éviter, disait-il, toute complaisance et dissipation, il invita seulement M. son père et Mme sa mère, et la célébra secrètement, pénétré de respect, de foi et d'amour. Il s'était disposé à cette grande action par la fuite du monde, en s'enfermant dans un Monastère des plus austères. Peu de jours après qu'il fut Prêtre, il obtint de ses parents la liberté de se retirer dans une maison à part, pour répondre. plus aisément aux desseins de Dieu sur lui. Mais avant de se mettre tout à fait à son particulier, il fit un voyage à Paris, pour puiser dans les Séminaires de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, de Saint-Sulpice, de la Communauté de Saint-Lazare, aussi bien que dans les Sociétés des personnes de piété, desquelles il recherchait la conversation avec diligence ; (et ces personnes ont dit, et pendant sa vie et depuis sa mort, que dans les entretiens qu'il avait eus avec elles, il les avait embaumées de l'odeur de ses vertus) pour prendre les maximes les plus pures du sacerdoce, lesquelles il a conservées depuis. Mais son esprit n’était point encore satisfait, il rechercha encore d'autres moyens de son avancement ; ce qui lui fit faire un voyage à Rouen, y étant attiré par l'odeur de sainteté d'un Curé de cette ville nommé M. de Saint-Amand, chez lequel il demeura six mois pour apprendre la vertu qui lui coûta chère ; car il en revint si infirme et si desséché qu'il fallut le mettre au lit à son retour.
Un disciple de M. Roland a rapporté que le dessein qu'il avait eu en faisant ce voyage, était de puiser le fondement des vertus apostoliques qui étaient en M. le Curé de Saint-Amand, qu'il fut traité fort durement par ce saint Curé, par un ordre de la divine Providence, comme il le dit un jour à un de ses Confrères, (ce bon Curé me reçut avec refus, lorsque je le priai de me donner quelque petite place en son logis, pour y faire une Retraite, ainsi qu'il l'accordait à tout autre. Je n'ai pas de place pour vous mettre, M., me, dit-il, à moins que vous ne preniez ma chambre, quelque instance, que vous me puissiez faire : hé ! Monsieur, lui répartis-je, quelque place que ce fut, je m'en accommoderai : mais non de votre chambre : il y a ici un dessous d’escalier, si vous le voulez prendre. Je le pris au mot, et ne pris point d'autre place tant que je fus avec lui cette fois). Ce fut sous la conduite de ce bon Curé, que M. Roland fit de grands progrès dans la vertu de pauvreté et du dénouement, car il parut inconnu et comme un pauvre Ecclésiastique, comme il avait déjà paru pauvre étudiant lorsqu'il se fut retiré chez un pauvre Artisan à Paris pour y vivre inconnu au monde. Les maximes qu'il avait puisé de ce bon Curé sont celles-ci :
Que dans les contradictions, il fallait dire, tant pis, tant mieux ; tant pis pour la nature ; tant mieux pour l'âme.
Que l'abstraction de toutes choses surpasse toutes pratiques.
Ne se plaindre jamais ; car qui se plaint pèche.
Ne s'excuser jamais lorsqu'on nous accuse.
Plutôt devoir que thésauriser.
Ne parler jamais du boire, ni du manger.
Ne contester jamais avec personne.
Aimer mieux accepter les pertes que faire l'aumône.
Aller contre ses inclinations en toutes choses.
Ne s'enquérir d'aucune nouvelle.
Ne trouver à redire à rien.
Connaître et suivre les mouvements de l'Esprit de Dieu.
Ne se laisser jamais obscurcir l'âme par la moindre attache.
Plus pratiquer la vertu que d'en parler.
S'attacher fortement à sa fin qui est Dieu et faiblement aux moyens qui sont les créatures.
Qu'un serviteur mal adroit est un trésor.
Ne se faire servir que dans les choses qu'on ne peut faire.
Aller à la destruction de tout amour propre.
S'examiner tous les jours sur quatre choses : 1° sur la conformité à la volonté de Dieu, 2° sur l'amour du prochain, 3° sur la mortification, 4° sur la vertu particulière.
Peu de paroles d'un homme uni à Dieu, sont plus que plusieurs dites par amour propre.
Un serviteur de Dieu détestait trois choses : 1° le mot de tien ou de mien, 2° celui de faveur, 3° celui de mérite.

CHAPITRE 5

Monsieur Roland fait de sa maison
un petit séminaire

M. Roland étant de retour à Reims, les occasions d'exercer son zèle ne tardèrent pas à se présenter, bientôt la vaste carrière s'ouvrit devant lui, mais dans la multitude de ses bonnes œuvres, il eut soif d'établir l'ordre qui devait y régner ; il fit toujours passer ce qui est de devoir et de justice avant ce qui est de charité et surérogation.
Comme Chanoine, il était tenu d'assister à l'office divin ; il donna l’exemple d'une assiduité scrupuleuse, il assistait exactement à toutes les heures, et ne manquait jamais d'y chanter, la tendre piété dont il était pénétré, rendait cette occupation chère à son cœur, l'esprit de foi l'animait, il y voyait la fonction des Anges, il la remplissait avec autant d'empressement que de respect. Comme Théologal, il avait à prêcher chaque Dimanche de l'année, il ne manqua aucun des jours marqués à s'acquitter par lui-même de ce devoir. On admirait dès lors dans M. Roland, le saint Prêtre, le fervent chanoine, le digne ouvrier tic la vigne du Seigneur ; on pouvait en effet le regarder comme l'homme de Dieu pour la ville de Reims ; il était à la tête de toutes les bonnes œuvres.
Pour répandre l'esprit Ecclésiastique dont il était lui-même rempli il fit de sa maison un petit Séminaire où l'on vit plusieurs enfants de famille et autres entrer en Communauté pour y vivre d'une manière cléricale ; et par les Conférences qu'il y faisait formait des sujets propres à servir l'Église. Ceux qui pour des raisons de santé et de famille, ne pouvaient se rendre à la Communauté, y avaient entrée libre et journalière pour les exercices Ecclésiastiques et spirituels ; il leur donnait d'excellentes leçons pour les former à l'oraison, à laquelle ils vaquaient avec lui pendant une demi-heure. Il leur faisait ensuite une Conférence sur la Sainte Écriture, ce qui produisait son fruit avec le temps,
Le dessein de M. Roland dans ces exercices, était de faire de ses disciples des Missionnaires, ou de bons Curés pour le ministère des autels. Il avait un attrait particulier : ce qu'il a fait voir dés lors qu'il prit la soutane ; car dès qu'il apprenait qu'il y avait quelque Mission il s'y joignait afin d'y travailler et contribuer à la dépense. On ne pourrait dire combien il se forma sous sa direction de Prêtres zélés pour les Catéchismes et pour toutes les parties du gouvernement spirituel des paroisses, Tous ceux qui ont demeuré chez lui ont répandu dans les endroits où la Providence les a appelés, l'odeur de leurs vertus et sainteté, et on voit encore aujourd'hui dans la Ville, une quantité de bons Prêtres qui ont été formés par sa main; qui ne se sont point démenti des principes qu'il leur a donnés depuis quinze ans qu’il est décédé, et tous avouent qu'ils lui ont une très grande obligation ayant tiré de lui l'estime de leur ministère ; ce qui est cause aussi du regret de plusieurs autres qui ont laissé l'occasion de le pratiquer dans leur jeunesse. Il fit même son possible pour transférer sa petite Communauté dans une Paroisse de la Ville, pour qu'elle fut plus utile, mais la mort prévint ce dessin et Notre Seigneur se contenta de sa volonté.
On vivait dans ce petit Séminaire qu'il dressait chez lui avec une grande édification sous sa conduite ; aussi n'épargnait-il ni santé, ni biens, il aurait voulu donner sa vie pour leur perfection, son zèle ne lui donnait aucun repos, il entendait les confessions générales de ces jeunes hommes, leur faisait des entretiens spirituels. Il avait dressé des pratiques journalières pour vivre dans sa petite Communauté. On y vivait dans la plus grande austérité, y pratiquant beaucoup de macérations, et avec une sobriété si extraordinaire, dit un de ses disciples, qu’en l'espace d'un an que j'y ai demeuré, je n'ai jamais entendu personne se plaindre du boire ou du manger, ni en faire un seul mot d'entretien. On y servait ordinairement quelques fruits pour le dessert, mais on n'y touchait pas par esprit de mortification.
Quoiqu'on n'y parlait pas sans nécessité, et même à voix basse hors le temps des récréations, on y tenait trois fois le silence la semaine ; on y faisait aussi les coulpes, ou on s'accusait de ses fautes ; on avait aussi chacun en particulier un admoniteur pour l'avertir des manquements qu'il avait remarqués en soi, et dans tous ces exercices, M. Roland était le premier à donner l'exemple.
Son zèle pour le salut des âmes ne demeura pas satisfait, en dressant ces jeunes hommes à la vertu, il faisait et procurait des Conférences Ecclésiastiques afin d'exhorter les Prêtres à s'acquitter de leur ministère. où plusieurs personnes de qualité et de mérite se trouvaient ; ce qui se faisait tous les Mardis. Un jour Messieurs les Évêques de Châlons et d'Évreux s'y trouvèrent, et ils furent dans l'étonnement de voir qu'un jeune Prêtre put avoir des conceptions si fortes, un zèle si ardent, et une onction si extraordinaire dans ses paroles. Ils dirent à sa louange que cet homme de Dieu ne laissait aucun doute qu'il ne fut rempli des vérités qu'il enseignait, que l’esprit de Dieu parlait par sa bouche.
M. Roland a eu une grande partie de l'esprit de saint Charles qu'il a renouvelé dans le Diocèse de Reims, en inspirant l'esprit Ecclésiastique à tous ceux qui vivaient dans sa petite Communauté, n'y ayant point encore fie séminaire dans la ville de Reims.

CHAPITRE 6

Ses prédications, ses missions

M. Roland joignait à une piété solide et éclairée un zèle ardent, laborieux et infatigable. Sa fonction de Théologal lui donna occasion de le satisfaire, et de mettre en usage au profit des âmes le grand talent de la parole que le Ciel lui avait confié.
Un zèle si ardent ne se bornait pas aux fonctions Théologales qui lui fournissait cependant une vaste matière ; il se répandait de tous côtés ; et partout où on l'appelait sa parole était efficace, ainsi que son exemple. Les fruits de cette divine semence germaient avec abondance où il allait la jeter et l'arroser de ses travaux ; ses paroles étaient persuasives, son style était apostolique et populaire, ce qui faisait qu'il profitait à tous ; il appuyait les vérités qu'il avançait sur l’Écriture Sainte et les Pères, ce qui était cause que les libertins se trouvaient sans répartie, lorsqu'il les reprenait de leurs vices ; il n'épargnait aucune condition, et on eut dit à l'entendre prêcher qu'il eut voulu expirer sur la place, afin de convaincre chacun des devoirs de son état, et quoiqu'il fut d'une complexion très faible et déjà épuisée par ses austérités, son zèle ne laissait rien à dire sur les matières qu'il entreprenait. Ce qui rendait ses paroles si énergiques, c’est qu’il puisait à la source des sciences par la communication qu'il avait avec Dieu ; car il ne se mettait à l'étude qu'avec des dispositions dignes de Dieu : d'autant qu'il s'était fait un directoire de ses intentions, dont il se servait, par lequel il renonçait avant que d'étudier, à toute éloquence humaine, et recherche des créatures et de soi-même ; avec protestations de n'apprendre les divines Écritures que pour la gloire de Dieu et le salut des âmes ; et puis commençant par la prière, à la fin de laquelle il faisait une prière plus fervente encore, suivie d'une lecture dans le livre de l'Imitation de Jésus-Christ, qui était la nourriture ordinaire de son âme.
Ce qui le facilitait encore dans ses prédications était son heureuse mémoire ; car souvent n'ayant pu trouver du temps pour ses sermons, il ne lui fallait qu’une demi heure pour le dresser. Il arriva un jour chez un de ses amis fort las et fatigué d'un voyage long et pénible pour la saison, il le pria de prêcher comme faisaient ordinairement les personnes qui connaissaient son mérite, et pour les grands fruits qu'il faisait partout où il passait. Il arriva le samedi soi, il lui accorda de prêcher le lendemain, parce qu'il ne refusait rien de ce qui regardait la gloire de Dieu, et disposa son sermon. On ne sait par quelle occasion il apprit le besoin du peuple avant de monter en chaire ; il y monta cependant dans la résolution de prêcher ce qu'il avait disposé ; mais se mettant à genoux, pour faire son invocation, à ce qu'il a dit lui-même, il fut poussé intérieurement de changer son sujet ; et tout son discours. Il y réussit très heureusement avec l'admiration des personnes savantes, et au grand profit de tout le peuple : ce qui parut même à l'extérieur, car on vit un changement merveilleux dans cette paroisse, sur la réforme des mœurs et des vices qui y régnaient auparavant.
On voit par ce qui vient d'être dit, que M. Roland n'enfouissait pas le talent qu'il avait reçu du Seigneur, et qu'il ne bornait pas son zèle à paraître dans le Chœur, et dans une des stalles de la Cathédrale. Partout où il voyait du bien à faire, il y courait, il se prêtait à toutes les bonnes œuvres ; il a demeuré avec les premiers Évêques de France qui ont été dans la Chine, M. Béril, Messieurs de Liopolis et de Méthélopolie ; il déplorait son malheur de ne pouvoir aller aux Missions étrangères, disant qu'il ne méritait pas l'honneur du martyre.
Il s'unissait à tous les gens de bien indifféremment, soit séculiers ou Réguliers, lesquels il connaissait particulièrement dans toutes les Villes du Royaume. et cette union le tenait dans une confusion continuelle que son humilité lui suggérait, croyant de ne rien faire pour Dieu en comparaison d'eux. Il ne se faisait aucune Mission qu'il ne voulut y contribuer de sa personne ou de ses moyens, ce qu'il fit voir quand il alla à Sommepy en Champagne avec les Pères de l'Oratoire, où il travailla pendant un mois entier ; on le voyait dans de semblables occasions se consumer par l'ardeur de son zèle. Son talent pour les Conférences spirituelles était extraordinaire, elles faisaient une impression admirable sur les cœurs de tous ceux qui y assistaient.
Après la mission de Sommepy M. Roland engagea Messieurs les Missionnaires à demeurer pour une Mission à Fismes. En attendant qu'il eut obtenu la permission des Supérieurs, dans l'intervalle du temps il partit de Sommepy en poste et vint à Fismes témoigner à M. Martin qui en était Curé depuis peu de temps et qui était un de ses disciples, ayant demeuré près de quatre ans dans sa petite Communauté, le dessein qu'il avait eu de l'aider à mettre sa paroisse en bon état. Voici ce que dit le disciple de son maître dans cette Mission.
« Le zèle de M. Roland pour l'avancement de la gloire de Dieu, était si ardent et si infatigable, que je peux dire qu'il s'en trouve peu de semblable, que ni les fatigues, ni les persécutions, ni les respects humains, ni les mauvais jugements, ni l'incertitude du succès ne faisait aucune impression sur son esprit lorsqu'il croyait que Dieu demandait de lui qu'il entreprit quelque chose pour sa gloire. Sans m'avoir écrit ni parlé du désir qu'il avait qu'il se fit une Mission dans ma paroisse, il vint en diligence m'avertir qu'il croyait que Dieu demandait cela de lui et de moi ; et sur ce que je lui représentais que n'étant pas encore bien accommodé, il me serait difficile de bien recevoir Messieurs les Missionnaires et d'en faire la dépense, il me dit de ne me point mettre en peine, que ces Messieurs y contribueraient, et que la dépense ne me serait pas si fort à charge que je le croyais ; et comme je lui dis qu'il me pressait bien l'épée dans les reins, que cette affaire me paraissait un peu précipitée, il me dit qu'il craignait fort que je ne fusse déjà déchu de ma grâce ; et que le peu de zèle qu'il m'avait cru auparavant commençait à s'éteindre, puisque je résistais aux desseins que Dieu avait sur ma paroisse ; je lui dis en riant : faites-moi au moins la grâce d'entrer et de vous rafraîchir, et nous conviendrons ensemble des moyens de donner une heureuse suite à une si louable entreprise. Il attacha son cheval à la porte du dehors, et me dit d'un air fort sérieux et dédaigneux, qu'il protestait n'entrer jamais chez moi, ni d'y boire, ni manger, si je ne consentais à cette Mission, et qu'il s'en retournerait avec la même vitesse qu'il était venu, sans rien prendre, en secouant la poussière de ses pieds contre ma maison, puisque je refusais de recevoir dans mon champ les ouvriers de la moisson. Cela m'obligea à me rendre à ses justes désirs, et je crois que cette Mission suivie de celle de Sommepy, dans lesquelles il se fatigua considérablement, ont abrégé ses jours ; car outre les prédications qu'il faisait, il était des dix et douze heures au confessionnal et en faisant la clôture de la Mission, il parla avec tant de feu et de force contre la rechute dans le péché, et de la persévérance dans la grâce que sa voix s'éteignit entièrement. »
Étant de retour à Reims, accablé des fatigues que lui avaient causées ces deux Missions, il résolut de faire encore un voyage à Beaune, à dessein de se dévouer d'une manière toute particulière aux mystères de l'Enfance du Sauveur, et en fit dans cette Ville un vœu exprès sur le tombeau de la Vénérable Sœur Marguerite surnommée du Très Saint Sacrement, à laquelle il portait une grande vénération ; ce qui fut d'une grande édification pour tout le couvent et d'une particulière consolation pour les Religieuses qui le conversèrent, principalement la Supérieure qui en parle avec estime, comme d'un homme rempli de l'esprit de Dieu ; elle lui donna une figure de Jésus Enfant que la Vénérable Sœur Marguerite honorait dans ses stations.

CIIAPITRE 7

Son attrait pour l’éducation de la jeunesse

Quoiqu'il soit vrai que la gloire de Dieu et le salut des âmes soient la fin de tous les Ouvriers Évangéliques, il n'est pas moins vrai, que presque tous sont inspirés d'y travailler d'une certaine manière, et qu'ils se sentent déterminés par attrait à certaines bonnes œuvres. L'attrait de M. Roland était l'instruction de la jeunesse.
Dès la vingt-septième année de son âge considérant que le peuple et les grandes personnes profitent peu des meilleurs sermons, et que le défaut d'éducation et d'Instruction de la Jeunesse, a toujours été et est encore la source des plus grands dérèglements, il résolut de remédier à ce mal en travaillant de tout son pouvoir, à établir des écoles gratuites pour l'Instruction des petites filles : ce dessein formé il fit un voyage à Rouen, pour y prêcher le Carême ; mais la prédication n'était qu'un saint prétexte, son principal dessein était de voir et de converser avec des gens de piété ; il les vit et les édifia comme il en fut édifié : il vit plus particulièrement M. de Saint-Amand chez lequel il avait passé six mois après sa prêtrise, dans la pratique de toutes les vertus les plus austères ; il y vit aussi le Père Barré de l'ordre des Minimes, lequel avait commencé des écoles d'instruction gratuites pour les jeunes garçons et les jeunes filles dans la ville de Rouen, avec le succès qu'on a vu depuis dans presque toutes les Provinces du Royaume.
M. Roland contracta une étroite et sainte amitié avec le Père Barré et renouvela l'estime et la vénération qu'il avait toujours eue; pour la vertu de M. de Saint-Amand, l'un et l'autre reconnurent l'esprit qui animait M. Roland et l'aidèrent de leurs conseils à exécuter la pieuse résolution qu'il avait formée d'établir des écoles gratuites dans la Ville de Reims.
Mais en prêchant, conversant et faisant plusieurs entretiens spirituels, M. Roland y contracta de grandes incommodités, de sorte qu'à son retour à Reims, les médecins lui ordonnèrent de prendre le lait pour se rétablir, mais en voulant guérir son corps ils affligèrent son âme, en lui défendant de célébrer la Sainte Messe ; cependant il sembla acquiescer à leur ordonnance. Il invita M. Rogier, son ami intime, de venir passer quelque temps avec lui à une maison de campagne, pour lui dire la Messe tous les jours, ce qu'il fit avec plaisir, mais M. Roland se levait dès les trois heures du matin, pour offrir à Dieu le Saint Sacrifice, trompant ainsi innocemment les médecins et ses parents.
Ce fut en ce temps là même de ses infirmités, que méditant et se rappelant le dessein qu'il avait eu en allant prêcher à Rouen, et sentant que son zèle pour l'instruction de la Jeunesse croissait de plus en plus il crut que Dieu demandait cette œuvre de lui ; car disait-il souvent Dieu demandera un compte terrible à toutes les personnes qui devaient et pouvaient instruire les âmes, et leur refusaient ce secours ; car disait-il encore, les âmes que nous aurons laisser tomber dans le péché faute d'instruction demanderont vengeance au tribunal de la Justice Divine. Ce fut donc dans ce pieux sentiment qu'il forma de nouveau le dessein généreux d'établir une Communauté, où on travailla aux écoles gratuites ; et Dieu qui le lui avait inspiré, le soutint par sa Providence, laquelle parut manifestement : car les Messieurs de la Ville lui ayant refusé l'administration des petits orphelins, dans la crainte qu'ils avaient de quelque établissement, lui offrirent l'administration spirituelle des dits enfants, ce que M. Roland reçut avec plaisir, comme on le verra dans le chapitre suivant.

CHAPITRE 8

L’établissement des écoles gratuites

Le zèle de M. Roland fit qu’il considéra l’administration des Orphelins que les Messieurs de la Ville venaient de lui confier, comme un ordre de la divine Providence, et comme un moyen d'exécuter le dessein que la même Providence lui avait inspiré. Ce fut en cette occasion qu'il fit paraître la grandeur de son âme, et la générosité de son esprit, en ce que nous allons dire, aussi bien que son abandon aux soins de la même Providence, et qu’il fit paraître son dégagement pour les biens temporels.
Il commença donc à prendre le soin de cette maison où il y avait plus de quarante personnes à nourrir, et où il n'y avait pas un sols pour y faire la dépense ; d'autant que la personne qui les gouvernait auparavant sous le bon plaisir des dits Messieurs, leur portait les aumônes et les quêtes qu’on leur faisait journellement. Les dits Messieurs payaient l'intérêt de cet argent qui leur était porté, et ne voulaient cependant prendre aucun soin de la dite maison.
M. Roland s'en voyant chargé; ne se contenta pas de pourvoir au spirituel, il pourvut à tout, fournissant tout ce qui était nécessaire. Il trouva ces pauvres enfants tous nus et comme des squelettes, faute de nourriture ; leur pauvreté était si grande qu'ils manquaient du pur nécessaire ; ils étaient si infectes et si abandonnés, qu'on ne pouvait les voir sans horreur dans l'infection et la fange où ils étaient : leur habitation était, dit un disciple de M. Roland, plutôt une étable qu’un hôpital, j'en peux parler, continue-t-il, non pour l’avoir ouï dire, mais pour l'avoir vu de mes propres yeux, puisque cet homme de Dieu me fit la grâce de vouloir bien me charger du soin temporel de cette maison, me fournissant à ce sujet tout ce qui était de besoin. Il pensa d’abord à les fournir d'habits, de linge et à les bien nourrir. Ne regardant ces pauvres enfants que par l'œil de la foi, il ne voyait que Jésus-Christ en eux ; et se souvenant qu'il avait été assez pauvre dans cette étable, il fallait le mettre plis décemment ; il fit faire des bois de lits pour coucher ces enfants, car auparavant il y avait de grandes couchettes, où ils étaient six ou huit ensemble, sans comparaison comme des bêtes, tant l'ordre y était mal gardé, et je suis témoin que le tout se faisait de ses libéralités, et il me donnait de sa bourse de quoi fournir à tous les besoins de ces enfants.
Si les dits enfants étaient bien nourris et alimentés par les soins de M. Roland, il prenait et faisait prendre encore un soin particulier de leur éducation, ce qu'on n'avait pas fait avant qu'il s'en fut chargé : car avant c'était chose déplorable pour la corruption de leurs mœurs et l'ignorance, ils ne savaient ce que c'était de la connaissance de Dieu et du salut ; on se contentait de leur donner à manger tellement quellement, ce que M. Roland fit cesser, ayant changé les dites personnes en d'autres dans lesquelles il remarquait de la piété, afin que la maison changeât de face, comme il arriva en peu de temps
Mais comme son dessein ne se terminait pas à la seule charité pour le soin des Orphelins et que cela ne lui servait que de prétexte, pour l'établissement des Écoles, il ne se donna point de repos qu'il n'exécutât cette pieuse entreprise, pour laquelle il fit plusieurs voyages à Paris et à Rouen, afin de voir par lui-même le grand bien que faisaient les Filles de la Providence que le Père Barré Minime avait établi dans ces deux grandes villes avec succès : il lui demanda de ses filles qui avaient déjà l'expérience de l'emploi auquel il désirait les employer. Le Père Barré accéda à sa demande et lui donna la supérieure de sa maison de Rouen avec deux autres Maîtresses que M. Roland fit conduire à Reims, et les logeât dans la Maison des Orphelins ; sous prétexte de leur rendre service, quelque temps après il obtint de M. l'Écolâtre l'approbation pour établir quelques écoles dans la maison des dits Enfants, où on recevait toutes les petites filles et même les grandes qui se présentaient pour apprendre à lire et y être instruites des vérités du salut. Ce nouvel exercice commença bientôt à éclater dans la Ville, et donna aussi commencement aux contradictions qui s'élevèrent et s'accrurent depuis, comme on le verra dans le chapitre des vertus que ce saint homme a pratiquées. Il commença donc ainsi l'établissement des Écoles gratuites et fit pour cela de grandes dépenses pour accommoder cette nouvelle maison, où il n'y avait que les Orphelins avec quelques personnes pour pourvoir à leurs besoins ; lesquelles il mit dehors avec des récompenses sortables à leurs travaux, et la maison commença à s'accommoder avec vigilance ; où il y recevait des sujets à proportion que les classes s'augmentaient. Tout ce qu'on avait besoin, on le prenait chez lui, et on ne faisait presque qu'un ménage ; car toutes les provisions étaient pour ses filles à qui il avait donné une entière liberté d'aller prendre chez lui pour elles et pour les Orphelins tout ce qu'elles avaient besoin : il se faisait aussi un grand plaisir de leur donner et fournir de tout, comme les avares s'en font un d'amasser de l'argent : toutes ces délices étaient pour le bien de cette maison, non seulement il n'y épargnait ni soin, ni argent, mais il y procurait encore tous les secours spirituels ; ses jours et ses nuits étaient employés à cette œuvre, et tous ses soins ne furent pas sans fruit : car cette maison jeta un tel éclat en peu de temps, que le diable et le monde se déclarèrent ouvertement ses ennemis : mais M. Roland n'en fut que plus encouragé à poursuivre son entreprise, car disait-il, c'est une marque que cette œuvre est de Dieu puisque les puissances de l'enfer s'intéressent à l'empêcher. On voyait déjà dès ce temps le bien que cet Institut ferait dans la suite, car dans ces écoles nouvellement établies, on y rencontrait des filles de tout âge, et même des femmes qui déploraient leur vie passée ; durant laquelle elles avaient été dans une grande ignorance des choses nécessaires au salut.
Les Sœurs de cette Communauté faisaient aussi un très grand progrès sous la conduite de ce Saint Instituteur qui y répandait sa doctrine et son zèle avec tant d'onction, qu'elles auraient volontiers donné leur vie à sa persuasion, tant elles se sentaient animées du zèle de la gloire de Dieu et du salut de la jeunesse qui leur était confiée.
La bonne odeur que répandait la conduite de ces premières filles de M. Roland en attira bientôt d'autres, le nombre s'augmenta en peu d'années, ce qui fit qu'on multipliât les Écoles en différents quartiers de la Ville et même de la campagne : toutes les personnes qui pratiquaient le Saint Fondateur; se faisaient un plaisir à son exemple de participer à ce bien.
Ses vues dans ce nouvel Institut, étaient de former des maîtresses d’écoles pour instruire gratuitement ; pour en former aussi qui puissent instruire dans les campagnes sous la conduite des bons Curés ; d'y prendre encore des personnes de piété en retraite, qui est un bien considérable ; il voulait aussi que les petits Orphelins y fussent bien élevés, d'autant, disait-il que c'est l'origine de la Maison, et qui nous représentent Jésus-Christ en l'état de son Enfance ; et c'est à cette fin qu'il a donné pour titre à cette Maison, la Communauté du Saint-Enfant-Jésus. Tous ces pieux desseins firent qu'il n'épargna rien pour y donner de bons principes pour le Règlement de cet Établissement et pour former les dites Filles à une perfection qui réponde à la sainteté de l'état que demande une vie apostolique, ainsi que l'ont rapporté celles qui ont vu commencer l'Établissement ; dans les maximes qu'elles ont reçues de M. Roland, lesquelles maximes seront dans ce manuscrit pour l'utilité des Sœurs aussi bien qu’une partie des vertus qu'il a jugé leur être les plus nécessaires pour se sanctifier dans cette Communauté.
Les dites Filles ont expérimenté sa charité, son zèle et sa douceur paternelle, tout le temps qu'il a vécu, elles ont été témoin de ses rares vertus, de la pénétration de son esprit, surtout de la grande édification qu'il leur a donnée par son extrême pauvreté et sa grande mortification ; aussi suivaient-elles son exemple autant que la faiblesse de la nature leur permettait ; elles vivaient et étaient accommodées très chrétiennement, et le bon Fondateur se trouvait souvent obligé à veiller à leurs besoins, tant elles se négligeaient elles-mêmes pour ne s'attacher qu'à leurs devoirs ; ce qui a duré plusieurs années, comme le rapportent ceux qui ont conversé ces saintes Filles.
Je ne dois pas oublier, dit un Disciple de M. Roland, de vous dire que ce saint homme ne se contentait pas de rendre ses services et de se dépouiller de tout ce qu'il pouvait posséder, jusques là même que dès qu'il pouvait toucher quelque argent de ses parents ou d'ailleurs, on voyait en lui un saint empressement de l'envoyer en cette maison, sans le laisser coucher chez lui, ce qui marquait son grand détachement ; et un jour M. son père lui en ayant apporté, à peine fut-il à la porte qu'il appela son garçon et lui dit : Déchargez-moi de cet argent et le portez à ces pauvres enfants ; ce qui fait voir le désir qu'il avait de l'avancement de cette maison. Il ne négligeait aucun moyen pour le procurer et engager sa famille pour répondre du temporel, se servant pour cela de sollicitations engageantes.

CHAPITRE 9

Suite de l’établissement de la Communauté
et de conduite qu’il y a gardée

M. Roland ne se contenta pas d'avoir établi la Communauté du Saint-Enfant-Jésus, et d’y fournir tout ce qui est nécessaire, tant pour l'ornement et décoration de la Chapelle qu'il a fait bâtir à ses propres dépens, comme de tous les ameublements qui étaient nécessaires aux Sœurs et aux Orphelins dans cette nouvelle maison qu'il avait achetée de ses propres deniers, comme il est dit au chapitre précédent.
Il voulut pourvoir aussi à leur conduite spirituelle, par lui-même et par d'autres, afin que cet Institut puisse être solidement établi, et qu'il fut utile au public ; c'est pourquoi qu'il n'y épargna rien et fut infatigable à solliciter sa consommation par de longs et pénibles voyages dans lesquels il essuya de très grandes peines et rebuts.
Il ne connaissait point de personnes qu'il crut être à Dieu, qu'il ne les employa à son dessein, leur demandant et suivant leurs avis et conseils en tout ce qu'elles pouvaient pour le bien de cette Maison ; car c'était son propre d'aller toujours par l'avis des autres, et de se communiquer dans le bien qu'il voulait entreprendre, ne fût-ce qu'à un simple Clerc, pourvu qu'il fut un bon serviteur de Dieu ; comme aussi de gagner de saints Prêtres pour l'aider à dresser la conduite de ses Filles par des entretiens, Conférences et exhortations générales et particulières, il était plein de joie, lorsqu'il trouvait un quelqu'un qui se prêtait pour l'aider en cette bonne œuvre.
Voici les principales vues qu'il avait sur cette Communauté :
1° Qu'on y vive en grande perfection ; car disait-il, une poignée de gens qui vont à la perfection de la belle manière, de quelque condition qu'elles soient, rendent plus de gloire à Dieu qu'une Ville, même qu'une Province ne saurait lui en rendre ;
2° Que l'unique but de cette Maison soit de demeurer en habit séculier et non cloîtrée, pour être libre d'aller enseigner dans tous les quartiers de la Ville et même dans les Campagnes où elles pourront être envoyées par les Supérieurs.
3° Que l'unique emploi des Sœurs soit de travailler au salut des aines, par le travail des Écoles et des instructions, autant que le sexe en est capable ;
4° Que l'esprit de pauvreté, d'humilité, de zèle et de dépendance y soit gardé dans la rigueur ; que les Sœurs s'éloignent soigneusement de toute communication et de tout commerce avec les créatures ;
5° Que les personnes qui veulent se sacrifier entièrement pour servir Dieu dans le prochain y soient reçues de quelque condition qu'elles soient sans en exiger de dote, pourvu qu'elles aient les qualités nécessaires.
Il ne faisait dans cette Maison aucune distinction des personnes. Il ne voulait pas non plus qu'on fit distinction de celles qui avaient apporté du bien, et de celles qui n'en avaient pas apporté ; il voulait que l'on veillât avec plus de soin sur celles que leur vertu portait à se négliger elles-mêmes.
Il estimait que c'était un sujet d'exclusion dans une fille lorsqu'elle recherchait ses intérêts : qu'elle épargnait ses forces, et qu'elle était adonnée à des communications et attachée à sa famille.
Il demandait un grand dénouement et fuite de toute curiosité et propriété.
La grande maxime sur cette Communauté était que toutes sortes d'esprits n'y étaient pas propres ; car disait-il, il faut une vie au-dessus du commun, pour exercer avec édification les fonctions de leur emploi, il faut une grande mort à elles-mêmes ; il faut une grande simplicité et candeur pour obéir an dedans, après qu'on a commandé au dehors. Il faut une grande humilité pour dominer dans les classes sans se perdre par les vains applaudissements des créatures.
Il voulait qu'avec les exercices de l'école, on joignit le travail des mains qui ne devait consister que pour le besoin de l'usage de la maison, afin d'éviter l'extinction des instructions, et d'y introduire des manufactures.
Plusieurs personnes de mérite, qu'il se faisait un plaisir de consulter pendant sa vie, ont assuré que les maximes sus dites étaient ses sentiments sur la Maison, pour lui avoir oui dire plusieurs fois et s'en sont entretenu dans les rencontres, où l'on parlait de son souvenir.
Il avait une grande attention à tout ce qui pouvait mortifier les inclinations des Sœurs, et ne permettait pas qu'on leur passât rien pour les faire entrer dans l'esprit de mort à elles-mêmes et de mortification de leurs sens.
Une de ses maximes encore était qu'il valait mieux couper un lien que de vouloir le dénouer ; il voulait dire par là qu'il fallait rompre tout d'un coup les attaches qu'on avait aux créatures plutôt que de tant marchander. Une autre était : tout ou rien ; il ne pouvait souffrir le partage que tant de gens veulent faire avec Dieu et la créature ; il disait souvent qu'une personne qui se donnait à Dieu sans réserve, avançait plus en trois mois, qu'une autre en dix ans.
Il avait tant d'attrait et de désir que les Sœurs s'acquittassent bien de l'école que lui-même l'allait apprendre dans toutes les Villes où il passait lorsqu'il apprenait qu'il y en avait d'établies par de bonnes méthodes, il faisait venir des Maîtresses expérimentées pour les dresser dans cette maison, le tout à ses frais et dépens, et dans ces occasions, sa longanimité et sa charité étaient si grandes, que quelques grossières que fussent ces filles, cela ne le rebutait pas.
Pour réussir à l'entreprise qu'il faisait de n'introduire, dans cette Communauté, que des personnes déterminées à correspondre au dessein que Dieu lui avait inspiré ; il examinait lui-même le caractère et l'esprit des filles ; il les éprouvait en toutes choses, principalement dans l'abnégation et la mort à toute recherche d'elle-même.
Il leur dressait des Règlements de fois à autres, selon les difficultés qui pouvaient se présenter dans ce nouvel Établissement, il leur donnait journellement des avis de vive voix, dont nous donnerons l'abrégé ci-après, avec quelques chapitres des vertus les plus nécessaires aux Sœurs de cette Communauté que l'on a trouvé écrites de sa propre main, et qui sont très utiles pour toutes sortes de personnes consacrées au service de Dieu dans des cloîtres ou maisons régulières.
Une des raisons que M. Roland eut d'établir plutôt l'école des filles que celle des garçons qu'il avait cependant envie d'établir dans la suite, ce fut, disait-il, que les mères, les filles aînées des familles et les servantes sont pour l'ordinaire plus chargées de l'éducation des enfants que les pères : ce qui l'engageait à exhorter les Sœurs à ne pas s'épargner pour instruire ces grandes personnes de leurs devoirs envers les enfants qui sont commis à leurs soins.

CHAPITRE 10

Le dernier voyage que M. Roland fit à Paris,
de ce qu’il y souffrit et des sentiments
qu’il eut sur les approches de la mort

Après que ce grand Serviteur de Dieu eut passé plusieurs années dans la pratique de toutes les vertus chrétiennes et ecclésiastiques, et qu'il eut essuyé beaucoup de peines, d'opprobres et de contradictions des créatures, sans que cela l'ait jamais fait désister d'un instant de ses pieuses entreprises ; sa confiance et son abandon à Dieu était si parfait que les plus grands obstacles n'ont jamais put lui faire concevoir aucune défiance du succès de ce qu'il avait entrepris pour sa gloire et le salut des âmes, étant certain que Dieu prend plaisir à faire mieux paraître sa puissance et la force de sa grâce, lorsqu'il y a plus d'opposition de la part des hommes.
Après plusieurs voyages à dessein d'établir les écoles gratuites, il en fit encore un à Paris sur l'espérance que M. l'Archevêque lui avait donnée, lorsqu'il permit qu'on bénisse la Chapelle de la Communauté ; il partit donc de Reims dans une saison fort incommode, peu avant les Avents, et n'en revint que la Semaine Sainte, passant cette hiver dans d'extrêmes peines et incommodités pour les rebuts qu'il avait eu des créatures et les épreuves de Dieu qui redoublèrent aussi en lui, comme nous allons voir. Toutes ces épreuves ne l’abattirent pas, il s'occupa tout ce temps à solliciter la consommation de son Établissement avec plus d'ardeur que jamais, passant une grande partie du temps en attendant dans l'antichambre du dit Seigneur qui passait et repassait souvent devant lui sans lui rien dire, comme étant occupé à de plus grandes affaires, mais bien plus par un ordre de la Providence, pour achever de purifier son Serviteur, qui le voulait bientôt retirer de ce monde ; il passait le temps qui lui restait d'après ses sollicitations en retraite dans le Couvent des Révérends Pères Carmes déchaussés, en gémissements, en larmes en prières continuelles ; et par je ne sais quelle rencontre, une personne de grand mérite qui était son ami, le voyant si atténué et bouffi par l’abondance des humeurs causées par le grand froid et ses grandes abstinences, lui prédit que dans peu de temps il partirait de ce monde.
M. Roland prit cet avis comme venant du ciel, et se disposa à la mort par un nouvel esprit de pénitence, et par une retraite dont le premier motif fut d'y considérer et méditer ces paroles : La mort est proche. Il fit en six semaines trois fois sa confession générale, ainsi que l'a assuré le Révérend Père César, très digne Religieux du Couvent des Carmes déchaussés, qui était son confesseur dans les séjours qu'il faisait à Paris, lors de ses voyages. Voici ce qu'il dit de son Saint pénitent : J'entendis la Confession de cet humble pénitent avec une sensible consolation, après l'avoir refusé plusieurs fois, dans la certitude qu'il n'en avait aucun besoin ; car je ne trouvais point d'homme plus pur dans tous ceux que je conversais depuis longtemps dans tous les différents pays où je me suis trouvé ; mais quoique sa vertu m'avait toujours apparu depuis que j'eus de sa connaissance ; je peux assurer que dans ce temps il était tout autre qu'il n'avait encore été ; car quand il aurait été le plus grand scélérat de la terre, on n'aurait pu remarquer en lui plus de componction. Aussi était-il à ses yeux comme le plus abominable des hommes, et indigne de la vie ; il ne pouvait trouver des termes assez durs pour s'exprimer. Quand il eut achevé sa Confession générale recommencée par trois fois, non par scrupule, mais par un instinct visible de la grâce, il pensa retourner à Reims.
Son départ de Paris fut sans succès de son voyage, et se voyant sur le point de mourir, comme en effet il s'y était disposé, il me dit en partant qu'il sentait bien que Dieu voulait le retirer de cette vie comme un homme qui ne faisait qu'empêcher son œuvre. (Jusqu'ici ce sont les paroles de ce bon Père qui en parlait avec l'estime d'un Saint, et dit qu'il espérait que cette Communauté aurait en M. Roland un puissant protecteur auprès. de Dieu pour son Établissement.) Ce qui s'est trouvé véritable, comme on le verra dans le chapitre suivant.

CHAPITRE 11

Comme M. Roland tomba malade à son retour de Paris,
ainsi qu'il en avait ressenti les approches
par ses longues infirmités, et des sentiments
dans lesquels il est mort

M. Roland étant de retour de ce voyage, il donna des preuves plus visibles de ses rares vertus qu'il n'avait encore fait : car il parut en lui un si grand changement qu'on le prenait pour un autre lui-même par son humilité, charité, patience, douceur, et son détachement du monde ; il ne parlait plus de cette vie que comme d'un bannissement. Nous sommes, disait-il, mais avec une onction qui pénétrait le cœur, nous sommes des exilés de notre patrie, il faut se disposer pour y retourner ; que faisons-nous, sinon de nous éloigner (le notre centre qui est Dieu (ce sont ses propres termes). Son humilité le faisait cacher à ses propres yeux ; néanmoins il ne pouvait retenir le feu que Dieu même allumait en lui, ce qui lui faisait dire simplement ses sentiments sur l'état de l'autre vie. Quand irons-nous à cette autre vie, où on jouit de l'unique beauté, bonté et amour, quel bannissement de vivre ici-bas ; Ce n'est pas que dans ce temps, il ne fut dans de grandes épreuves, comme nous allons voir, mais c'étaient les approches de la mort qu'il ressentait en lui, ainsi que la pierre qui approche de son centre redouble ses mouvements, ainsi cette âme désirait d'être unie à Dieu, Ses incommodités s'augmentant tous les jours, on le vit depuis le Jeudi-Saint qu'il revint à Reims jusqu'au deuxième mardi d'après Pâques qu'il tombât tout à fait malade de la maladie dont il est mort, ayant passé tout ce temps dans l'exercice d'une très grande charité, tant les jours que les nuits, auprès des Sœurs très dangereusement malades de fièvres pourpreuses, sans que personne l'en put retirer. On craignait le danger pour lui atténué et fatigué qu'il était. Cette crainte de la part de ses amis, ne fut pas sans fondement, car il tomba malade de la même maladie la nuit du mardi au mercredi de la seconde semaine d'après Pâques.
Cette annonce de sa mort prochaine ne le surprit pas, il l'avait présente, l'ayant choisie pour le sujet de sa retraite qu'il avait faite un mois auparavant. Durant cette maladie qui ne dura que neuf jours, il donna encore l'exemple des plus grandes vertus, comme on va le voir dans le rapport qu'en a fait M. Guyart son disciple et son intime ami, qui en a été témoin, l'ayant gardé lui-même tout le temps de la maladie.
« M. Roland se sentant frappé de cette maladie il me dit (c'est M. Guyart qui parle) qu'il n'en échapperait point, ce qui l'obligea à se munir des Sacrements, chercher un digne successeur et faire son testament, malgré les médecins qui l'assuraient de sa guérison ; et quand en ce temps, il faisait des propositions de se donner à Dieu plus parfaitement, de se retirer dans l’ermitage de Caen où était mort M. Bernier, il retournait aussitôt à lui-même, disant que ses projets étaient vains puisqu'il devait bientôt mourir ; il avait une parfaite connaissance et une docilité à l'épreuve dans cette maladie ; il ne se plaignait point du tout au milieu de ses plus grandes peines, il ne demandait et ne refusait rien ; il m'a avoué qu'il souffrait comme une âme entièrement abandonnée, ne voyant qu'un Dieu en colère, que le jugement dernier, qu'une éternité embrasée, qu'un monceau de péchés ; il m'a dit que l'homme ne pouvait point porter plus de peine, ni d'accablement, que son état était une agonie, et qu'il ne trouvait de la consolation que dans le jardin des Olives.
Lorsqu'on lui apporta le Saint Viatique et l'Extrême-onction il fit une exhortation si forte et si touchante qu'il tirât les larmes des yeux de Messieurs les Chanoines qui accompagnaient le Saint-Sacrement ; il la finit par ces paroles : Voici, mes Frères, que je vais bientôt entrer dans le grand jour de l'éternité, là je connaîtrai mes terribles obligations et mes infidélités, je tremble quand j'y pense, priez le Seigneur qu'il me fasse miséricorde, et en particulier du scandale que je vous ai donné par mon infidélité et mon peu d'assiduité à l'Office divin. Il se regardait comme le plus grand pécheur du monde, et croyait qu'il ne faisait rien que d'attirer la colère de Dieu, et regardait toute la vie qu'il avait menée comme une abomination. Ce fut dans ce sentiment qu'il priât la Supérieure de sa Communauté de filles, de demander pardon à genoux pour lui à chaque sœur en particulier, et à toutes en général de la mauvaise conduite, disait-il, en versant des larmes de componction; qu'il avait tenue sur chacune d'elles, et du peu d'avancement dans la voie de la perfection qu'elles avaient fait sous sa direction. Quant au général, il croyait et disait que sa mauvaise vie seule empêchait la consommation de cet Établissement, sentiment qu'il gardait depuis longtemps, lui ayant entendu dire depuis longtemps et plusieurs fois, que c'était la Maison de Dieu, et qu'il en prendrait soin lorsque je ne m'en mêlerai plus, s'appuyant sur ce qu'une personne de mérite lui avait dit : Monsieur et cher Ami, tout ce que vous désirez pour la Maison de l'Enfant-Jésus s'accomplira bientôt, prenez bon courage, mais vous n'en verrez pas la consommation. Ce qui lui fit croire par un bas sentiment de lui-même qu'il était seul celui qui mettait obstacle à l'œuvre de Dieu. »
Quoique cet homme de Dieu fut si bien pénétré des biens de l'autre vie, et qu'il lui sembla déjà en ressentir des Avant goûts, ce n'était que par un sentiment de la pureté et de la force de sa foi, de l'esprit de mort à lui-même et à toutes les créatures ; car il fut durant cinq jours de sa maladie dans de si furieux assauts contre l'ennemi du salut, que les personnes qui l'ont vu, ainsi que moi, en avaient jusqu'au frémissement de voir qu'un si Saint homme qui avait vécu dans une si grande vertu, fut traité de la sorte. Dieu l'a permis pour achever de purifier son Serviteur de ce qui pouvait y avoir encore de nature en lui ; car durant ces cinq jours qu'il passa dans ces peines si terribles, tout son désir était de mourir en vrai chrétien : on l'entendait souvent répéter ces paroles d'un ton enflammé :
Seigneur, mon Dieu, faites-moi la grâce d'être du nombre des Élus.
Dans tout ce temps d'épreuve et de combat. on ne l'a pas vu tomber dans aucune impatience ni découragement, au contraire animé de confiance, il chantait et se faisait chanter des cantiques sur le désir de voir Dieu et de l'aimer sans partage. Cet assaut se passa très peu avant que d'expirer. Dieu le permettant ainsi, pour que celui qui l'avait servi depuis le temps de sa conversion jusqu'à ce moment, le passa sans aucune consolation ni de lui, ni de ses créatures : car on peut dire avec assurance, comme tous ceux qui l'ont connu, que cet homme de Dieu n'a jamais eu que des croix, des peines, des travaux et des opprobres en toutes ses entreprises. Ce qui donna lieu de croire qu'il est d'autant plus élevé dans le Ciel.
Enfin ce qu'on a remarqué et qui fait espérer que cela est, ce sont ses mérites et les venus qu'il a pratiquées. Plusieurs personnes ont assuré après sa mort que bien des choses leur étaient arrivées, comme ce bon Serviteur de Dieu leur avait prédit pendant sa vie ; et d'autres ont aussi assuré avoir reçu de grandes grâces et secours de Dieu, de s'être adressées à lui après sa mort dans leurs peines et afflictions, ce qui se peut croire pieusement, d'autant que ce sont toutes personnes de piété et de mérite.
Le père César, très digne Religieux du Couvent des Carmes déchaussés à Paris, qui avait entendu la confession générale qu'il fit durant sa retraite pour se préparer à la mort, dit à plusieurs de ses amis, que la Communauté du Saint-Enfant-Jésus, aurait en M. Roland, un puissant protecteur auprès de Dieu pour son Établissement : ce qui s'est trouvé véritable. Car dès le moment que Monseigneur l'Archevêque eut appris sa mort, il prit lui-même la Communauté comme sienne, et dit qu'il la soutiendrait toujours ce qu'on a cru être un effet de la protection de Dieu sur cette Maison provenant du mérite de son Serviteur.
Monseigneur l'Archevêque accorda peu de temps après, que le Saint Sacrement fut posé dans la Chapelle, qu'il avait permis de bénir du vivant du pieux Fondateur, il a confirmé et approuvé tout ce qu'il avait fait de son vivant dans cette Maison ; il y a fait plusieurs fois les Ordres pour marquer l'estime qu'il faisait de cette Communauté. Il fit faire ensuite par le ministère de M. de la Salle, disciple et ami du défunt qui, au lit de la mort, l'avait chargé du soin de sa Communauté et de l'exécution de son testament, tous les traités avec les Corps de la Ville pour sa consommation.
Il est à remarquer que, quoique son Éminence eut fait à M. Roland plusieurs refus sur cet Établissement, ce n'était que par un secret de la divine Providence, car il l'aimait et l'estimait ; il a avoué que c'était un grand serviteur de Dieu, qu'il ne l'avait fait souffrir que pour modérer l'ardeur de son zèle, il faisait fond sur ses lumières, ainsi qu'on l'a remarqué en la personne d'un de ses disciples qui étant interdit pour quelque fait qu'on lui avait imposé, non seulement M. l'Archevêque lui rendit ses pouvoirs, mais encore sur le témoignage de M. Roland, il lui donna une Cure et un Doyenné des plus considérables de son Diocèse.
La Ville ayant donné son consentement pour la bonne œuvre qu'avait fait M. Roland pour l'instruction dans les écoles du lieu de sa naissance, M. l'Archevêque donna son agrément pour cette œuvre qui l'intéressait plus que personne et se hâtât d'obtenir les Lettres-Patentes.
L'affaire fut assurée dès qu'elle fut entre ses mains. Son crédit à la cour ne le rendait pas timide à demander une grâce de cette nature, dans un temps où les plus grandes lui étaient prodiguées, et où elles le prévenaient sans lui donner la peine de les attendre. Un prélat moins puissant eût pu échouer dans cette rencontre, où pour y réussir il eut été obligé de compter tous ses pas et de mesurer toutes ses démarches ; mais le frère d'un Ministre tout puissant auprès du Prince, n'avait pas besoin de ces timides précautions ; il suffisait que le frère de M. de Louvois partit désirer une chose, pour qu'on allât au-devant de ses demandes.
Jamais Monseigneur l'Archevêque de Reims ne fit mieux valoir pour le bien de son Diocèse l'autorité qu'il avait en Cour et la faveur dont le Prince l'honorait que dans cette occasion. Les Lettres-Patentes obtenues de Louis XIV aussitôt que demandées, et ensuite enregistrées au Parlement, aux frais de Monseigneur Le Tellier, furent remises entre les mains de M. de la Salle digne successeur de M. Roland dans la Communauté.
Monseigneur l'Archevêque fit plus encore en accordant sa protection à une: œuvre qu'il regardait comme la sienne après le décès de M. Roland ; il voulut y contribuer par ses libéralités, et fournir de ses biens à l'établissement d'une Maison, qu'on peut appeler, à juste titre, un Séminaire de Maîtresses d'écoles. Par sa protection, par sa faveur, par ses largesses, elle fut très bien cimentée, et elle parvint en peu de temps à un état florissant et très utile au public. Ainsi, si cette Communauté doit son origine à M. Roland, elle doit ses progrès aux soins laborieux de M. de la Salle et sa stabilité à M. Le Tellier. Heureuses celles qui composent cette Communauté, si elles conservent toujours l'esprit de leur Saint Fondateur, et si elles ne déchoient jamais de leur première ferveur.
Je dirai encore un mot sur les opprobres que ce Saint homme a soufferts, qui ne se sont point terminés avec sa vie, qui a finir le vingt sept Avril, mil six cent soixante dix huit, âgé de Trente cinq ans cinq mois.
M. Roland ayant marqué dans son testament que son désir était qu'après sa mort on le revêtit de ses habits de Prêtre et qu'on l'enterrât avec, on exécuta son désir, on le coucha sur un lit de parade, à la vénération des personnes de piété. Des libertins qui l'avaient haï pendant sa vie, parce qu'il les reprenait vivement de leurs vices scandaleux, lui tirèrent par une fenêtre de la Chambre où il était exposé des coups d'arquebuse. Ce qui fait connaître que M. Roland était destiné aux souffrances.
Tout ce qui est écrit dans ce mémoire, a été reconnu, recueilli et déclaré de plusieurs personnes de probité, qui ont demeuré avec lui dans son petit Séminaire, qui l'ont conversé et pratiqué dans toutes les circonstances, et dans ses voyages et maladies. De sorte que si on veut se donner la peine encore aujourd'hui de s'informer de tous les chapitres sus dits, on verra qu'il n'y a rien qui ne soit véritable, et ceux qui ont connu M. Roland ont dit que ce ne sont que de petits fragments de ses mœurs, auprès de ce qu'il était.

[1] Cette copie des “Mémoires sur la vie de Monsieur Nicolas Roland” a été faite d’après le Manuscrit 3 A. Il contient la première “Vie” écrite du Bienheureux. L’auteur de celle-ci en est resté inconnu, ainsi que la date de sa composition. Même les manuscrits anciens, disparus pendant les guerres, n’ont rien révélé à ce sujet.
On peut penser que ces “Mémoires” furent rédigées peu après les “Lettres à la louange”, car ces témoignages collectés en 1693 en ont fourni la matière.

[2] Il y a ici une erreur. Nicolas Roland est né, non pas le 2 décembre, mais le 8 décembre 1642, comme il ressort du registre des baptêmes de la Paroisse Saint-Symphorien de Reims où il fut baptisé le 23 juillet 1643.

[3] Mgr Henri de Maupas.

SOURCE : https://nominis.cef.fr/contenus/saint/10148/Bienheureux-Nicolas-Roland.html

Blessed Nicolas Roland


Profile

Raised in a pious family. Educated by JesuitsCanon of RheimsFrance while still a seminarianPriest. Noted preacher. Assigned as parish priest in RouenFrance. Returned to Rheims with the plan to start schools for poor girls; he took a run-down orphanage and turned it into a successful school for orphaned and abandoned girls. Founder of the Soeurs de l’Enfant-Jésus(Sisters of the Infant Jesus) whose first members were teachers at his school; they received formal approval on 9 May 1678. He and the Sisters expanded the work and founded more schools around the city. Friend and mentor of Saint John Baptist la Salle who continued Nicolas’ work by supervising the Sisters, and later founding schools for boys.

Born

BL. NICOLAS ROLAND was born in Reims, France, in 1642. At a tender age his parents instilled in him a love for God and the poor, and entrusted him to the Jesuits for his education.

He excelled in his studies and his family connections assured him a successful business career, but at the age of 18 he decided to study for the priesthood. He was given a well-endowed canonry before being ordained a deacon and was highly regarded as a preacher, but realized that his elegant style reached few of the faithful. He decided to establish free schools for the Christian education of girls.

After receiving priestly ordination, he went to Rouen where he received spiritual direction from the curate of Saint-Amand and lived in complete poverty. He also met Fr Nicolas Barre, an exemplary Minim, who had collected a group of men and women who worked in free schools located in several neighbourhoods of the city. He returned to Reims with the intention of starting similar projects there.

A poorly maintained orphanage was entrusted to him and he gradually transformed it into a real school. Young girls, frequently of unknown parentage, were welcomed into a warm atmosphere and educated. Fr Barre sent him two teachers from charitable schools in Rouen, who were accustomed to living in community and wanted to consecrate themselves totally to God. Thus began an intense religious life connected with apostolic activity. The Sisters of the Infant Jesus were founded in Reims. Their name suggests that the spirit of childhood is the quickest and simplest way to find God and to open one's heart to others.

Some mean-spirited critics rebuked the sisters, maintaining that teaching Christian doctrine was reserved to priests. But Archbishop Le Tellier of Reims was convinced by the founder's arguments and so their work was extended to four sectors of the city.

Fr Roland next thought of boys, but for this task he turned to his disciple, John Baptist de la Salle. The seed would later sprout, but first the sower had to die. In fact, the future founder of the Brothers of the Christian Schools did not feel particularly attracted by this kind of apostolate and it took providential events to convince him of its necessity.

On his deathbed, Fr Roland asked his friend to see that the Sisters of the Infant Jesus were officially approved and entrusted the community to him. He died of fatigue and overwork on 27 April 1678 at the age of 35.

On 9 May 1678, Fr de la Salle and Archbishop Le Tellier received the king's approval for the community and the sisters took their first vows in 1684.




Beato Nicola Roland Fondatore


Reims, Francia, 8 dicembre 1642 – 27 aprile 1678

Il beato francese Nicola Roland, sacerdote, preoccupato per la scarsa formazione cristiana della gioventù, istituì scuole per la gioventù femminile, allora esclusa da ogni tipo di istruzione, e fondò anche la Congregazione delle Suore del Santo Bambino Gesù. Giovanni Paolo II lo beatificò il 16 ottobre 1994.

Martirologio Romano: A Reims in Francia, beato Nicola Roland, sacerdote, che, impegnato nella formazione cristiana dei fanciulli, aprì scuole per le ragazze povere, allora escluse da ogni forma di istruzione, e fondò la Congregazione delle Suore del Santo Fanciullo Gesù. 

È il terzo componente di quel fantastico trio di fondatori educatori, che con le loro opere, illuminarono insieme ad altri santi, la Francia nel Seicento, e ad essere elevato agli onori degli altari; essi sono s. Giovanni Battista de La Salle (1651-1719), fondatore dei “Fratelli delle Scuole Cristiane”, il beato Nicolas Barré (1621-1686), fondatore delle “Maestre di Carità”, poi Suore di Gesù Bambino e il beato Nicola Roland, fondatore delle Suore del Santo Bambino Gesù di Reims, di cui parliamo.


Il beato Nicola Roland nacque a Reims in Francia, l’8 dicembre 1642, primogenito del commerciante Jean Baptiste Roland e di Nicole Beuvelet, in famiglia vi era anche la piccola Adrienne, unica rimasta dei cinque figli del primo matrimonio del padre, vedovo di Maria Favart.

Nicola fu affidato ad una nutrice molto religiosa; dotato di grande intelligenza intorno ai cinque anni imparò a leggere; nel 1650 ad otto anni, prese a frequentare le ‘petites écoles’, poi nel 1658 compì gli studi nel Collegio dei Gesuiti di Reims.

Di aspetto gradevole, non tardò ad inserirsi nella vita mondana della borghesia, partecipando con piacere ad intrattenimenti e distrazioni; dopo una presunta delusione amorosa, prese a viaggiare in giro per la Francia, per fare esperienze di lavoro.

Al termine di quel periodo d’incertezza sul suo futuro, decise di votarsi alla vita ecclesiastica, pertanto nel 1660 si trasferì a Parigi, prendendo alloggio presso un artigiano in una zona popolare, per poter frequentare i due anni di filosofia necessari per essere ammessi al biennio di teologia.

A Parigi frequentò gli ambienti più fervorosi, entrando in contatto con Associazioni cattoliche operanti anche nel sociale, gli Amici di padre Bagot, i fondatori della Società delle Missioni Estere, praticò i Seminari di Bons- Enfant di s. Vincenzo de’ Paoli (1581-1660); di S. Sulpizio di Jean-Jacques Olier, servo di Dio (1608-1657) e di S. Nicola del Chardonnet; terminò gli studi con il dottorato in teologia.

Ricevuto il diaconato, rivestito dell’abito ecclesiastico, il 3 marzo 1665 fu nominato canonico teologo, cioè predicatore nella cattedrale di Reims, senza lasciare i contatti con Parigi dove tornò spesso.

Non esistono documenti che attestino la data della sua ordinazione sacerdotale, che non poté comunque essere prima del dicembre 1627, secondo le norme del Concilio di Trento che prescrivevano minimo 25 anni.

La frequentazione degli Istituti parigini dei Lazzaristi, Sulpiziani, Missioni Estere, fece crescere in lui la conoscenza di realtà ed iniziative sempre nuove, al cui centro era la popolazione più reietta e l’infanzia abbandonata, bisognosa di attività caritative, assistenza, educazione.

Dopo la parentesi della peste che colpì Reims nell’estate 1668, padre Nicola Roland proseguì nella sua impegnata attività di predicatore in cattedrale, organizzò conferenze per il clero, si dedicò alle missioni nelle campagne, spostandosi perlopiù a piedi, affrontando fatiche, disagi e pericoli.

Fu direttore spirituale di laici di ogni condizione sociale e di persone consacrate, fra le quali s. Giovanni Battista de La Salle; nel 1670 predicò la Quaresima a Rouen e ciò ebbe grande importanza nella sua vita, qui incontrò il curato di Saint-Amand, Antoine de La Haye, uomo di grandi virtù; il contatto con lui lo portò a penetrare maggiormente nella vita spirituale e gli fece scoprire l’importanza del ruolo della scuola nella propagazione della fede cattolica.

A Rouen incontrò anche il beato Nicolas Barré e il gruppo di uomini e donne dediti alle scuole gratuite; fu un’esperienza decisiva e padre Roland disse: “Sono risoluto a lavorare per fondare scuole gratuite per l’istruzione delle ragazze”.

Ritornato a Reims, già impegnato nell’assistenza agli infermi dell’Hôtel-Dieu e dal 1670 anche di un orfanotrofio, prese a considerare e concretizzare l’idea di una comunità simile a quella di Rouen.

Chiese ed ottenne da padre Barré l’invio di due suore da Rouen, per dirigere l’orfanotrofio da lui ampliato in un nuovo grande edificio e per istituire scuole popolari nei vari quartieri di Reims.

Il 27 dicembre 1670, arrivarono suor Francoise Duval e suor Anne Le Coeur, che misero praticamente le radici per una nuova piccola Congregazione; padre Roland celebrò l’8 gennaio 1671 una prima Messa nel nuovo orfanotrofio dedicato al “Saint-Enfant Jesus” (Santo Bambino Gesù) e in seguito furono aperte alcune classi per l’istruzione delle bambine.

Nel 1672 incontrò s. Giovanni Battista de La Salle, futuro fondatore dei “Fratelli delle Scuole Cristiane”, il quale voleva convincerlo senza riuscirci, a rinunciare al canonicato per prendere la guida di una parrocchia.

Intanto le suore crescevano di numero e padre Roland si recò a Parigi per espletare le pratiche, affinché il gruppo fosse l’inizio di una nuova Congregazione, dedita all’istruzione dell’infanzia sulla scia di quella di Rouen; rientrò a Reims il Giovedì Santo 7 aprile 1678; il 19 aprile cadde gravemente ammalato, tanto che il 23 alla presenza dei notai, stese il suo minuzioso testamento, i cui esecutori dovevano essere il diacono Nicolas Rogier ed il canonico Giovanni Battista de La Salle.

A quest’ultimo, Roland chiese di essere il successore delle sue opere e completare l’organizzazione della Congregazione delle Suore del Santo Bambino Gesù, che egli aveva fondato a Reims nella linea di quella di Rouen, ma con una caratterizzazione particolare, come è detto nei suoi scritti, soprattutto negli “Avis aux régulières”.

La Salle, benché non si sentisse attirato da questa forma di apostolato, accettò la richiesta del suo amico Roland fatta sul letto di morte; dell’orfanotrofio aveva detto: “È opera di Dio; se ne prenderà cura quando io non me ne potrò più occupare”.

Dopo aver ricevuto gli ultimi Sacramenti, circondato dai canonici venuti ad assisterlo, Nicola Roland spirò serenamente il 27 aprile 1678 a nemmeno 36 anni, fu sepolto nella cripta della cappella delle Suore del Santo Bambino Gesù a Reims.

Giovanni Battista de La Salle, si mise subito al lavoro e già il 9 maggio 1678 ottenne l’approvazione regale e le costituzioni, preparate sommariamente da padre Roland, furono approvate il 12 novembre 1683 e le Suore, l’8 febbraio 1684 poterono pronunciare per la prima volta i voti.

Inoltre s. Giovanni Battista de La Salle, che aveva compreso le intuizioni profonde di Nicola Roland, volle creare anche per i bambini l’equivalente delle maestre di scuola delle fanciulle; fondò così i “Fratelli delle Scuole Cristiane”.

In questo contesto, Nicola Roland appare come uno dei precursori principali dell’apostolato del XVII secolo, nel campo dell’insegnamento elementare e della catechesi; stranamente però il suo nome è restato poco conosciuto fino ai nostri giorni, la sua prima ‘Vita’ di A. Hammesse è apparsa solo nel 1888; ma da allora l’interesse nei suoi confronti non è venuto mai meno.

Anche la sua causa di beatificazione, introdotta nel 1942, ha sofferto di intralci procedurali e lungo silenzio.

È stato proclamato Beato il 16 ottobre 1994 a Roma da papa Giovanni Paolo II; la sua festa liturgica è il 27 aprile.



Autore: Antonio Borrelli


SOURCE : http://www.santiebeati.it/dettaglio/92547

Recueil des Lettres écrites par la main de Monsieur Nicolas Roland, Théologal, à plusieurs de ses pénitentes. Archives, Communauté du Saint Enfant-Jésus. Manuscrit 5 A : http://voiemystique.free.fr/nicolas_roland_lettres_1.htm
Avis donnés par feu Monsieur Nicolas Roland, Théologal de Reims, pour la conduite des personnes régulières. Archives, Communauté du Saint Enfant-Jésus : http://voiemystique.free.fr/nicolas_roland_avis.htm
Petit traité des vertus les plus nécessaires aux sœurs, qu’on a trouvé écrit de la main de M. le Théologal, où il exprime ses sentiments sur la Communauté. Archives. Communauté du Saint Enfant-Jésus de Reims : http://voiemystique.free.fr/nicolas_roland_traite.htm

Première Conférence faite par le sieur Théologal à la Communauté du Saint Enfant-Jésus, sur ces paroles :soyez parfaits, comme votre Père Céleste est parfait”. Archives
Communauté du Saint Enfant-Jésus :
http://voiemystique.free.fr/nicolas_roland_conference.htm