samedi 9 juin 2012

Bienheureuse ANNA MARIA TAIGI, mère de famille, tertiaire déchaussée de l’Ordre de la Sainte-Trinité et mystique


Bienheureuse Anne-Marie Taïgi

Née à Sienne (Toscane) en 1769. Son père, pharmacien, va s'installer à Rome où la famille ne tarde pas à sombrer dans la pauvreté. A douze ans, celle qu'on appelle « Nanette » travaille dans un ouvroir. A dix-huit ans, elle s'engage comme femme de chambre. A vingt-et-un ans elle épouse Dominique Taïgi, domestique au palais Chigi. Ils eurent sept enfants. Elle dut accueillir en plus ses parents à la maison. « Avec les six écus que je gagnais par mois, disait son mari, nous serions morts de faim mais grâce aux prières de ma femme, nous ne manquâmes jamais de quoi que ce soit; c'est pourquoi je la laissai prier tant qu'elle voulait et ne m'inquiétai plus de rien. » Douce, affectueuse, ordonnée et toujours joyeuse, Nanette dut supporter les violences de son mari et le tempérament ombrageux de son père qui maudissait la vie. Elle éleva bien ses enfants qui témoignèrent avoir eu une enfance heureuse. Derrière ce quotidien difficile, elle fut gratifiée de phénomènes mystiques, ayant toujours en vue la couronne d'épines qui la faisait souffrir sans cesse, mais jouissant de la connaissance claire des personnes qui avaient besoin à tout instant de sa prière. Elle mourut à Rome le 9 juin 1837. Son corps repose dans l'église Saint-Chrisogone, au Trastevere.

SOURCE : http://www.paroisse-saint-aygulf.fr/index.php/prieres-et-liturgie/saints-par-mois/icalrepeat.detail/2015/06/09/291/-/bienheureuse-anne-marie-taigi

Bienheureuse Anne-Marie Taïgi

Mère de Famille (+ 1837)

Née à Sienne d'un père ruiné, qui s'installe à Rome, elle est contrainte de se louer comme domestique et elle épouse Dominique Taïgi, domestique au palais Chigi. C'est un brave homme mais bourru et très coléreux. Anne Marie garde une patience inaltérable avec lui comme avec ses parents, aigris et grincheux, qu'elle soigne. Elle ne fait rien sans la permission de son époux mais, de son côté, celui-ci accepte aussi l'aventure spirituelle de son épouse et ne s'oppose pas à la grâce de Dieu. Anne-Marie et lui mettront au monde sept enfants mais auront le chagrin d'en perdre trois en bas âge. Mère attentive à l'éducation de ses enfants, femme d'intérieur dont le logement modeste est toujours propre, elle fait la cuisine, coud les vêtements de toute la maisonnée, tient les comptes. Rien ne distingue sa vie de celle des mères de famille qui l'entourent, sinon une certaine humeur enjouée et toujours sereine: " Elle parlait de Dieu, dira son époux, sans devenir ennuyeuse comme le sont beaucoup de dévotes." Et pourtant sa vie est un torrent de grâces mystiques: extases, visions, prescience. Dieu fait irruption qu'elle soit dans sa cuisine ou en pleine lessive. Avec familiarité, elle lui demande : "Laissez-moi, Seigneur, je suis mère de famille." Et cela déborde vers l'extérieur: guérisons, prophéties, lecture dans les cœurs. On vient de loin la consulter. Grand-mère, elle continuera à veiller sur sa famille avec gaieté, malgré la maladie et de terribles crises de doutes.

À Rome, en 1837, la bienheureuse Anne-Marie Taigi, mère de famille. Soumise aux violences de son mari, elle demeura attentive à prendre soin de lui et de l'éducation de ses sept enfants, sans rien omettre de son assistance spirituelle et matérielle aux pauvres et aux malades.

Martyrologe romain

SOURCE : https://nominis.cef.fr/contenus/saint/1294/Bienheureuse-Anne-Marie-Taigi.html


Anne Marie Taïgi, The life of the Venerable Anna Maria Taigi, the Roman matron by Thompson, Edward Healy, 1813-1891 Publication date 1874


Bienheureuse ANNA-MARIA TAÏGI

Épouse et mère, Tertiaire trinitaire

(1769-1837)

Née à Sienne, Anna-Maria Gianetti suivit son père à Rome où des revers de fortune l'avait contraint d'aller se fixer. La petite passa à peine deux ans à l'école où elle n'apprit qu'à lire. Ses parents faisaient retomber leur amertume sur leur fillette, mais l'angélique pauvrette redoublait de douceur envers eux.

Anna-Maria entra très tôt en service afin d'aider ses parents. Elle grandissait, pieuse, travailleuse et coquette, prenant plaisir à se parer. Domenico, qui travaillait au jour le jour au palais Chigi, homme honnête, rude et prompt à la colère, offrit de l'épouser; Anna-Maria accepta sa proposition de mariage.

Dans les premiers temps de son ménage, elle conserva ses habitudes mondaines, aimant à fréquenter le théâtre des marionnettes et à porter des colliers de verroterie. Après trois ans de cette vie ainsi partagée entre l'amour de Dieu et l'amour du monde, Anna-Maria se confessa au Père Angelo de l'Ordre des Servites, se convertit totalement et, avec l'assentiment de son mari, elle se fit recevoir dans le Tiers-Ordre des Trinitaires. Domenico ne demandait qu'une chose: que la maison soit bien tenue et paisible!

Or, les parents d'Anna-Maria vinrent partager la vie du jeune foyer. Depuis leur arrivée, les scènes de criailleries qu'elle apaise de son mieux se répètent tous les jours, car sa mère acariâtre cherche sans cesse querelle à son gendre qui s'emporte facilement. Atténuant les heurts le mieux possible, elle s'empresse auprès de son époux trop vif qui jette le dîner par terre avec la table quand un plat lui déplaît. Après la mort de sa mère, son père vit aux dépens de sa fille et multiplie disputes sur disputes. Lorsque la lèpre l'atteint, la bienheureuse Anna-Maria le soigne tendrement et l'aide à mourir chrétiennement.

Pour leurs sept enfants, la maison risquait de devenir un enfer, mais la bienheureuse demeurait si surnaturellement douce, que Domenico affirmera que c'était un vrai paradis chez lui, et que l'ordre et la propreté régnaient partout dans son pauvre gîte. Anna-Maria se levait de grand matin pour se rendre à l'église, et communiait tous les jours. Lorsqu'un membre de la famille était malade, pour ne donner à personne l'occasion de se plaindre et de murmurer, elle se privait de la messe et de la communion. Pour suppléer à cette privation involontaire, elle se recueillait pendant les moments libres de la journée.

La bienheureuse Anna-Maria Taïgi tenait ses enfants toujours occupés. Après le souper, la famille récitait le rosaire et lisait une courte vie du Saint du jour, puis les enfants se mettaient au lit après avoir reçu la bénédiction. Le dimanche, ils visitaient les malades à l'hôpital. Sa tendresse maternelle ne l'empêchait pas d'appliquer fermement les sanctions méritées, telles la verge ou le jeûne. Ses enfants profitèrent avantageusement de cette éducation si équilibrée et devinrent vite l'honneur de leur vertueuse mère et le modèle de leurs camarades.

Sa délicatesse envers les humbles était exquise. Elle nourrissait sa servante mieux qu'elle-même; à une qui cassait la vaisselle par maladresse, elle disait gentiment: «Il faut bien faire gagner la vie aux fabricants de faïence.»

Lors de sa réception comme membre du Tiers-Ordre de la Sainte Trinité, la bienheureuse s'était offerte comme victime expiatrice pour les péchés du monde. En retour de cette généreuse offrande, Dieu lui accorda la vision permanente d'un globe ou soleil lumineux dans lequel elle lisait les besoins des âmes, l'état des pécheurs et les périls de l'Église.

Ce phénomène extraordinaire dura quarante-sept-ans. Surprise au milieu de ses occupations domestiques par les ravissements et les extases, Anna-Maria s'efforçait vainement de s'y soustraire. Grâce à elle, les malades avertis de leur fin prochaine mouraient saintement. Comme le sort des défunts lui était révélé, sa compassion pour eux lui inspirait de multiplier ses pénitences afin de libérer au plus tôt ces pauvres âmes qui venaient la remercier de leur délivrance.

Bien que la bienheureuse Anna-Maria Taïgi souhaitait ardemment rester ignorée de tous, une foule de visiteurs composée de pauvres, de princes, de prêtres, d'évêques, du pape même, accourait pour demander conseil à sa sagesse inspirée. Simple et humble, elle répondait tout bonnement en se dérobant aux louanges, refusant toujours le plus petit cadeau.

Or, celle qui répandait ainsi la sérénité et la lumière autour d'elle, fut privée de consolation spirituelle pendant vingt ans, et éprouvait le sentiment très net d'être reléguée en enfer. Pendant sept mois, les angoisses et les ténèbres de son âme s'étant accrues, Anna-Maria Taïgi expérimenta une véritable agonie, n'en continuant pas moins à diriger sa maison comme si de rien n'était.

Malgré ses doigts devenus si douloureux, elle cousait beaucoup afin d'assurer le pain quotidien de la maisonnée. La femme du gouverneur de Savoie qui avait obtenu tant de grâces par les prières de la servante de Dieu, voulut lui donner une forte somme d'argent, mais la bienheureuse la refusa catégoriquement.

Le Lundi-Saint, dans une extase, Anna-Maria apprit qu'elle mourrait le Vendredi-Saint. Après avoir béni tous les siens, et les avoir remercié, elle rendit l'âme dans un cri de bonheur et de délivrance. Il semble que Dieu ait voulu montrer dans la personne de cette admirable bienheureuse, la possibilité d'allier des vertus éminentes et des dons surnaturels exceptionnels à la fidélité aux devoirs les plus humbles et les plus matériels de la vie commune. Le pape Benoît XV béatifia Anna-Maria Taïgi, le 30 mai 1920.

Tiré de Marteau de Langle de Cary, 1959, tome II, p. 338-342 F.E.C. Edition 1932, pp. 201 - Résumé O. D. M.

SOURCE : http://magnificat.ca/cal/fr/saints/bse_anna-maria_taigi.html

ANNA MARIA TAÏGI

La sainte aux sept enfants

Traduit du livre italien TAIGI, la santa con sette figli (Città nuova editrice, 1964). P. Marcel LITALIEN, o.ss.t. Montréal, 1984

TABLE DES MATIÈRES

Ils étaient trois de Sienne

Les voix et le soleil

La maison Taïgi

Derrière l’histoire

L’ange de Rome

Le martyre de la renommée

Elle triompha des vainqueurs

Ils étaient trois de Sienne

" Le saint est mort ! " La nouvelle explose dès les premières heures de la nuit, par des bandes de jeunes garçons de la rue des " Serpenti " ; elle s’infiltre dans toutes les petites rues, à travers les ruelles du quartier " des Monts ", arrive dans les buvettes, grimpe sur tous les balcons, déborde d’une place à l’autre, jusqu’aux confins de la périphérie de Rome. Puis, de la périphérie au centre, en un rien de temps, ce fut un fourmillement de nobles, de pauvres, d’artisans, de prêtres, de soldats, de commerçants, qui affluent vers le quartier " des Monts " rejoignent la foule accourue de partout, à travers la ville, à travers le quartier. On circule toute la nuit, sur la rue des " Serpenti " ; on y circule le jour et la nuit qui suivirent, jusqu’à ce que la dépouille mortelle de Benoit-Joseph Labre, la dépouille du saint, soit transportée dans l’église de Sainte-Marie-des-Monts, pour l’ensevelissement. Un cortège funèbre des plus imposants, suivra la dépouille ; les Romains n’en ont jamais vu de semblable, si ce n’est celui auquel ils avaient pris part lors de la sépulture de saint Philippe Néri.

Benoit-Joseph Labre était, depuis longtemps, une personnage familier et apprécié des romains, de ceux surtout qui habitaient ce vieux quartier alors le plus populeux et le plus pauvre de la ville. Pas un homme, pas une femme, pas un enfant qui ne le connut pas, aux Monts, pour l’avoir vu presque tous les jours, encore jeune cependant, courbé sous la souffrance et par les privations, maigre comme un ermite et vêtu de haillons, se traîner dans les venelles, se hâter vers cette église qui conserverait sa dépouille.

Benoit-Joseph Labre était né, 35 ans auparavant, dans un petit village de campagne perdu dans on ne sait quelle contrée de la France. Rapidement, il avait voué sa vie à la pénitence et aux pèlerinages dé-ci, dé-là, dans les routes interminables de France, de Suisse, d’Espagne, d’Allemagne. Il s’adonna à cette pratique, jusqu’à l’épuisement de ses forces ; se traînant les pieds, il s’est oriente vers l’Italie, a traversé le pays par bien des chemins peu connus, et il a fini par atteindre Rome où, depuis lors, il avait passé ses journées à prier dans l’une ou l’autre des nombreuses églises, dans celle de Sainte-Marie-des-Monts qu’il affectionnait de façon particulière. Il avait passé ses nuits sous l’escalier d’une mansarde, sous les murs du Quirinal ou un arc quelconque du Colisée.

C’est précisément, en sortant de l’église de Sainte-Marie-des-Monts que, le 16 avril 1783, Benoit-Joseph Labre s’affaisse mourant, sur les marches de pierre de la façade de cette église. Quelqu’un accourt immédiatement, quelqu’un s’offre à le transporter dans sa maison, à le déposer sur une paillasse, rue des Serpents. Mais le saint agonisait dans un état irrémédiable et il mourut à 8 heures du soir. La nouvelle se répandit dans la rue, par la fenêtre, et les bambins cessèrent alors leur vacarme habituel du soir, pour se faire les hérauts de la nouvelle sensationnelle qui s’est vite répandue dans les quartiers, dans presque toute la ville : " Le saint est mort ! le saint est mort ! "

Dans l’intervalle, on s’affairait à préparer le grand pèlerinage qu’occasionnerait l’inhumation du pénitent. Il se trouva quelqu’un pour dire que ce pauvre devait être nettoyé, revêtu et bien disposé, comme la piété l’exige en pareille circonstance. On suggéra le nom de Santa Giannetti, une pauvre mais brave domestique, habituée à ce genre d’actes de charité. Elle habitait à quelques pas de là, dans la rue " delle Vergini ". Il s’agissait de la faire demander.

Ils y allèrent ; et elle vint, accompagnée d’une jeune fille admirable, sa fille Anne Marie, âgée de quatorze ans, aux vêtements délicats et élégants pour autant. A l’observer de plus près, on remarquait sur son visage, les séquelles, caractéristiques de la variole.

Anne-Marie se tenait à l’écart, pour permettre à sa mère d’accomplir sa tâche. La maman enleva pieusement les haillons de ce corps consumé par les maladies et les mortifications, le lava avec l’aide de l’abbé Marchesi, lui mit des vêtements propres et le revêtit de la bure de la Compagnie de Notre-Dame-des-Neiges, avec lequel il fut ensuite enseveli.

Santa Giannetti et sa fille Anne-Marie n’étaient pas originaires de Rome ; comme Joseph-Benoit, elles venaient de l’extérieur, mais pas d’aussi loin que le saint pénitent français. Les deux cents kilomètres de chemin à parcourir pour en arriver à ce vieux quartier bruyant et misérable, elles les avaient tous, l’un après l’autre, parcourus à pied.

Elles venaient de Sienne où elles avaient habité une maison beaucoup plus accueillante que celle qui les hébergeait, rue " delle Vergini ". Leur existence était aussi beaucoup moins misérable, si on en juge par les contraintes de la vie qui était la leur, à ce moment-là.

À Sienne, le vieux Pierre Giannetti en était venu à se pourvoir d’une pharmacie de premier ordre. Il dut y investir des heures, des années de travail, des années d’épargne, pour en arriver, à la fin, à mettre la main sur une boutique parmi les plus belles de Sienne et de toute la Toscane. Des clients affluaient de partout, quand les médecins, dans les cas les plus compliqués, prescrivaient des potions et des liniments spéciaux qui dépassaient les prescriptions banales de la pharmacopée d’usage commun.

Louis Giannetti, le fils du pharmacien et pharmacien lui-même, hérita, à la mort de son père, d’un nom honorable, d’une fortune des plus enviables. Malheureusement, il n’avait pas comme son père, le tempérament discipliné, le sens de l’épargne, l’aptitude à ne pas compter les heures de travail. Dans l’espace de quelques années, il accumula des dettes qui finirent par lui rendre la vie impossible ; il en vint à la faillite.

Avec son peu de jugement, sa bonhomie extravagante, sa naïve prodigalité, le pire malheur lui arriva, celui d’entraîner dans la misère sa propre existence, celle de sa femme Santa, siennoise comme lui, son unique fillette qui lui était née six mois plus tôt, le 20 mai 1769, dans la belle maison de la rue " San Martine ", et avait été baptisée dés le lendemain, dans l’église paroissiale Saint-Jean-Baptiste, avec les noms : Anne-Marie, Antonia, Gesualda.

Cette même année 1769 qui avait vu naître Anne-Marie, avait aussi vu naître à Ajaccio, dans l’île de Corse, le " protagoniste exceptionnel de l’histoire ", celui qui déciderait, d’une façon tragique, de la vie et de la mort de la moitié de l’Europe. Les chroniqueurs de l’époque qui ne possédaient pas les vertus des prophètes, ne pouvaient prévoir ni annoncer les événements futurs, sur un ton apocalyptique.

Anne-Marie et Napoléon, nés la même année, sont des êtres humains, des créatures bien distinctes, aux destinées totalement différentes. Les desseins impénétrables de Dieu les feront se rencontrer dans le même sillon de l’histoire. Appelés à se rapprocher, l’un de l’autre, ils firent la preuve d’attitudes opposées à l’égard du pontife romain.

Elle avait grandi comme un ange, la fillette de Louis et de Santa Giannetti. Qui la voyait circuler dans les rues de Sienne, la petite-main dans la main délicate de sa maman, ne pouvait que s’arrêter pour l’admirer. " On la dirait fille d’un prince, non celle du pharmacien désaxé " disaient des gens émerveillés de la douceur, de la beauté des traits de son visage.

Anne-Marie n’était pas splendide que par les traits de son visage ; depuis sa tendre enfance, sa maman alimentait en elle la flamme la plus pure de l’amour de Dieu, l’enrichissait intérieurement, en modelant son caractère, en lui inculquant le sens du devoir, de la responsabilité, en l’amenant à agir sérieusement, sans porter atteinte à sa joie, à la vivacité débordante dont elle a toujours fait preuve.

Puis, vint la déchéance économique, la famine à la maison, le découragement de papa Louis au dehors, face à la torture de ne pouvoir se soustraire à la chasse de trop de créanciers qui le harcelaient sans relâche, ne lui donnaient pas le temps et les moyens de se mettre lui-même en chasse, comme il l’aurait voulu, contre ses nombreux débiteurs. En somme, en peu de mois, le sol de Sienne brûla à un point tel, sous les pieds des Giannetti, qu’il ne leur restait qu’une alternative, celle de fuir.

Mais une fuite lointaine, sous d’autres cieux, parmi des gens inconnus, pouvait-elle faire oublier le souvenir amer de la tranquille aisance perdue ? Quitter pour Florence, Livourne, Pise, Lucques, Arezzo, était trop proche ; il fallait aller plus loin, encore plus loin : à Rome !

En 1775, de longues colonnes de pèlerins venant du nord de la péninsule et de toutes les parties de la vieille Europe empruntaient les routes de Toscane et se déplaçaient vers Rome. Le pape Pie VI avait inauguré son pontificat solennellement, en ouvrant la porte sainte de la basilique Saint-Pierre ; l’avantage de gagner les indulgences de l’Année Sainte était offert.

Le conclave avait duré cinq mois, des mois éternellement longs qui témoignaient des incertitudes dramatiques de cette douloureuse époque. À la fin, à l’annonce que le cardinal Braschi était élu pape, le peuple romain avait donné libre cours à une joie irrésistible ; elle débordait jour et nuit, en festivités d’une ardeur irrépressible.

" Vive le pape Braschi, vive Pie VI ". Toutes les rues de Rome faisaient des souhaits à l’homme extraordinaire que chacun, du prince au simple palefrenier, connaissait, estimait, aimait, parce qu’il était doux autant qu’énergique, rempli de sollicitude autant que de dignité.

Peu de temps après l’inauguration de l’Année Sainte, le peuple romain, de l’intérieur, s’efforçait de rendre la vie très intéressante aux foules de pèlerins. Et pendant que d’un côté, les autorités assuraient le ravitaillement des magasins pour qu’en aucun temps, on ne soit privé de denrées alimentaires, d’un autre côté, elles avaient recours à des mesures très énergiques, dans le but de dissuader les exploiteurs possibles, de les amener à mettre un frein à leur trop grande avidité. Elles tentaient de les maintenir au niveau de la nécessité ; des groupes de citoyens volontaires attendaient les colonnes de pèlerins au débouché des grandes routes, pour les conduire dans de bons logements. On pourvoyait à leurs besoins, toute la durée de leur séjour à Rome. Et ce ne fut pas une mince organisation, si on pense qu’en cette année et en ces moments, comme l’attestent les chroniqueurs d’alors, le nombre de pèlerins s’élevait à 280,000. La plupart, venus et retournés à pied.

Au nombre des 280,000 pèlerins, figuraient trois fugitifs animés par une motivation secondaire. Il s’agit de Louis, Santa et Anne-Marie Giannetti qui, se faufilant à travers un groupe d’étrangers, aux premières lueurs de l’aube, tentent d’éviter tout soupçon parmi les Siennois. Ils apportent très peu de choses ; un baluchon et rien en poche. Ils font une halte à Radicofani et, de là, poursuivent leur route par Acquapendente, Bolsena, Montefiacano, Viterbe ; des jours et des jours de marche éreintante sur les bords d’une interminable route où se meuvent dans la poussière, le père en avant, la mère derrière, avec la fillette de 6 ans à sa charge, agrippée par la main à son vêtement. Ils se trouvèrent enfin réunis aux portes de Rome, où ils furent mis sous la protection d’un groupe de citoyens qui, en un tour de main, avaient résolu pour eux, comme pour les autres pèlerins, leurs problèmes, à commencer par celui du logement, un problème qui, à première vue, semble insoluble à quiconque arrive, inconnu et privé de tous moyens, dans une ville immense et ignorée.

Pour Anne-Marie, le problème des problèmes était unique, à ce moment : s’arrêter, fermer les yeux et dormir. La petite avait atteint Rome littéralement brisée de fatigue, les cheveux blanchis par la poussière, les souliers percés, les pieds ensanglantés. Elle ne vit rien de la grande ville, rien de ses monuments fascinants et de ses rues joyeuses d’un monde aimable et rieur. Elle vit enfin une petite porte basse dans la via " delle Vergini " et un petit escalier qui, dans l’ombre, de biais, menait là-haut. Elle trouve la force de monter ce sombre escalier parce qu’elle avait deviné qu’au dessus, un lit l’attendait. Et quand elle l’aperçut, le petit lit tellement désiré, elle eut à peine la force de se jeter dessus. Et déjà, elle dormait d’un sommeil profond comme elle n’en avait jamais eu.

Les jours et les semaines passèrent et le logis de la " Via delle Vergini ", qui ne devait être qu’un refuge provisoire pour les pèlerins, le temps de bénéficier des indulgences et de repartir, devint, pour les Giannetti, leur logement définitif. Pour prendre racine en quelque point de ce monde, il faut pouvoir se sauver ; et pour se sauver, il n’y a qu’à travailler. Le raisonnement sonnait plus que logique pour maman Santa. Le papa Louis qui avait quitté Sienne avec tout l’imbroglio que nous connaissons, ne pensait pas autrement ; il croit à l’importance du travail mais se préoccupe davantage de la chasse à la fortune qu’on ne saisit pas toujours comme on saisit un papillon sur le coin des rues, pas plus à Rome et encore moins dans ce pauvre quartier " des Monts " quand on ne sait où donner de la tête à la suite des ennuis causés à Pierre, son père, profondément déçu de son fils.

Comme le papa Louis continue à se nourrir de chimères, il incombe à maman Santa de gagner le véritable pain quotidien. Elle le fit avec un sens paisible de la réalité ; de l’élégante dame qu’elle était, elle se transforme en une infatigable domestique à temps partiel, un peu par ici, un peu par là, auprès de cette famille-ci, de cette famille-là, afin d’y gagner une poignée de menue monnaie qu’elle apportera le soir à la maison, assurant ainsi sa propre subsistance, celle de son mari, et de sa fillette, au cours de la journée qui suivra.

Santa fera davantage pour cette dernière ; en plus de lui assurer son pain quotidien, elle se souciera de son éducation, de son instruction. Le temps venu, elle la prend par la main et la conduit " Via Graziosa " à l’école Sainte-Agathe. Cette école s’appelait ainsi parce qu’elle était érigée prés de la vieille église Sainte-Agathe-des Goths, une église du quartier des " Monts ". C’était une école très importante, florissante, renommée dans toute la cité ; elle était le lieu d’aboutissement de plusieurs autres écoles de garçons et de filles, détachées mais reliées à elle, dans les différents quartiers de Rome, toutes fondées par une dame remarquable de jugement et de vertu : Lucia Filippini, siennoise elle-même.

Cette dame avait réuni autour d’elle un groupe de religieuses et de laïques non liées par des voeux, leur avait infusé son enthousiasme et son engagement. Ces laïques n’étaient pas missionnaires au sens strict ; elle les avait engagées dans la mission de soustraire à la rue les enfants pauvres et bien d’autres, de les éduquer à une vie honnête, de les intéresser à un métier profitable. Le menu peuple l’avait vite surnommée " la pieuse maîtresse, la sainte institutrice " par qui s’exerçait l’action providentielle, de Dieu.

La méthode que Lucia Filippini appliquait dans ses écoles, en accord avec le cardinal Grégoire Barbarigo, réussissait à doser avec une admirable sagesse le travail et la prière, la culture et la pratique d’une vie chrétienne vécue. Les jeunes gens et les jeunes filles, leurs études terminées, sortaient de ces écoles, avec un bagage intéressant de connaissances et de savoir-vivre. Ils savaient lire, écrire, compter, possédaient une solide formation spirituelle, un grand amour pour le travail, un sens profond de leurs responsabilités, aux plans individuel, familial, social.

À l’école-mère de Sainte-Agathe où affluaient alors les jeunes de 7 à 14 ans de toutes les parties du vieux quartier, Anne-Marie Giannetti excellait dans la lecture ; elle sera, toute sa vie, une lectrice acharnée. Elle apprit, avec une facilité exceptionnelle, la doctrine chrétienne et tout ce qui a trait à la religion. On dira, plusieurs années après, qu’elle récitait de mémoire, à merveille, les psaumes, en savait autant qu’un curé et pouvait être un professeur dans l’intérêt de tous ; elle pouvait enseigner à quiconque. Elle s’initia aussi aux travaux de la cuisine et à ceux de la maison. Elle s’ingénia à séparer la soie, à l’enrouler en bobines ; c’était un métier prometteur, à cette époque où la machine n’avait pas encore remplacé les mains. Les usines, en effet, n’avaient pas encore liquidé l’artisanat domestique. Par contre, elle n’eut pas le temps d’apprendre à écrire ; la petite vérole la frappa et retarda ses études. Mais la variole, si elle gâta l’éclat tout simple de son visage, ne réussit pas à en détruire la beauté ; des traits délicats et de douces lignes suffirent à la lui conserver.

A 11 ans, la petite Anne-Marie entra dans la basilique de Saint-Jean-de-Latran et elle y fut confirmée. À13 ans, elle fit sa première communion dans l’église saint-François-de-Paule, au quartier " des Monts ". Elle désirait ardemment et depuis longtemps se nourrir au banquet sacré, mais il fallait alors attendre au moins jusqu’à la fin de cet âge.

À 14 ans, survint l’épisode qui devait influer sur toute sa vie : l’événement grandiose du pèlerinage de tout Rome auprès de la dépouille mortelle de saint Benoit-Joseph Labre.

Anne-Marie connaissait bien le " saint ", elle avait perçu dés ses premiers contacts avec lui toute sa grandeur spirituelle. Mais ce ne fut que devant la dépouille vénérée, à la vue de l’humble témoignage d’amour que lui offrait sa maman accourue sans sourciller pour nettoyer ses plaies, revêtir ses membres, qu’intervint dans le coeur de la fillette, quelque chose de si profond, qu’elle en a été marquée pour le reste de sa vie.

Le temps qui suivit n’annonça pas d’éclaircie dans le petit firmament de la famille Giannetti, même si ce brave homme, papa Louis, s’était finalement décidé à se faire serviteur, en parole plus qu’en vérité. Tout emploi qu’il trouvait, durait peu. En somme, serviteur à temps perdu, il avait besoin, disait-il, de liberté, pour ne pas courir le risque de se laisser passer la fortune sous le nez, le jour où elle serait à sa portée.

Maman Santa était toujours hors de la maison, à s’éreinter là où elle était requise. Elle y trouvait cependant son épanouissement, du matin au soir ; et les quelques sous qu’elle réussissait à glaner, suffisaient pour nourrir chaque jour, de pain et de viande, les trois personnes, y compris la fillette devenue grande.

Au jugement de Santa, il était temps qu’Anne-Marie aussi se perfectionnât dans les travaux féminins. Elle serait en mesure de la remplacer totalement, à la maison ou, bien sûr, de s’engager demain auprès de quelqu’un, de l’aider, avec son salaire, à maintenir à flot cette barque familiale démantibulée, qui prenait eau par tous les coins.

Ainsi, Santa Giannetti confia Anne-Marie à deux vieilles dames laborieuses autant qu’estimées, qui avaient ouvert un modeste ouvroir dans le but d’apprendre aux jeunes filles désireuses de s’initier aux divers travaux qu’il importait alors de connaître, et de se rendre aptes à les exécuter. De plus, elles faisaient participer leurs élèves aux revenus de leur entreprise.

Anne-Marie y demeura environ six ans. Le climat était absolument sain, j’oserais dire " spirituel ". Les deux bonnes maîtresses savaient le susciter et le maintenir. Elle apprit à faufiler, à préparer les repas, à confectionner des corsets, des vêtements et, finalement, des chaussures.

Anne-Marie se jeta donc corps et âme au travail, se souciant en même temps de son cheminement spirituel, des progrès à réaliser dans la pratique des vertus. C’est au cours de ces années, de ses allées et venues, de sa demeure à l’ouvroir, qu’elle eut fort à faire ; belle comme elle était, il lui fallait se soustraire à des pièges plus ou moins subtils, des pièges dont sont, par malheur et en tout temps, exposées les jeunes filles du peuple des grandes villes, quand elles sont ornées de grâce et d’amabilité. Anne-Marie était d’autant plus exposée que, à ces deux dons, s’en ajoutait un troisième, d’attrait indiscutable : la suavité de sa douce voix siennoise.

Anne-Marie quitta l’atelier de couture, quand elle sut qu’elle devait se dévouer entièrement à la maison, pour permettre à sa mère de respirer un peu, de se remettre des longues fatigues qui l’accablaient, des chagrins continuels, des gênes économiques qui avaient fini par épuiser les forces de la pauvre femme ; sans oublier l’étiolement de son âme, l’aigreur de son caractère qui était pourtant si doux et si serein. Après un certain temps, Anne-Marie en arrive à la conclusion qu’elle pourrait apporter une aide encore plus grande à sa famille, si elle s’engageait comme fille de chambre auprès d’une dame quelconque. En plus de ses deux bras, elle offrira à ses parents un peu d’argent qui remédiera au malaise qui se fait sentir.

Elle en parle à sa maman qui partage sans plus ce dessein, parce que ce qui lui pèse le plus sur l’âme, c’est la préoccupation de devoir laisser seule, durant de longues journées, cette jeune fille bénie, sans surveillance, sans défense, devant des assauts possibles que pouvait provoquer sa beauté. On sait que le pollen attire les abeilles... " Mieux vaut la savoir en sécurité dans une maison fiable " ; Santa bénit la proposition d’Anne-Marie.

En ces jours, papa Louis était entré dans une de ses périodes de résipiscence : il s’était mis au service, et cette fois-ci, ça semblait sérieux, d’une dame Maria Serra Marini qui habitait au palais Maccarini, au pied du Quirinal, du côté de la Fontaine de Trevi. Elle était une dame dont on disait beaucoup de bien, pendant que d’autres la trouvaient distante et sévère.

Un soir, Louis piqua une pointe à la maison et, parlant de la pluie et du beau temps, il en vint à dire que sa patronne cherchait une femme de chambre. Aussitôt dit, aussitôt fait, dès le lendemain matin, Anne-Marie, parée de ses plus belles toilettes. les cheveux arrangés avec une certaine élégance, avec l’aide de sa mère, papa Louis lui dit : " La première impression compte pour beaucoup, ma fille ! ". Flanquée de son père, elle fait son entrée au palais Maccarini.

La première impression eut certainement un effet positif. La jeune fille se comporta d’une façon telle qu’elle gagna l’estime et l’affection, difficiles à obtenir, de Donna Maria Serra Marini. Maman Santa crut toucher le ciel du doigt et crut qu’enfin, elle se sentirait tranquille parce que dés lors, sa fille serait bien gardée.

Malheureusement, les choses se présentèrent bien autrement : les pièges et les assauts se multipliaient derrière les murs sévères du palais Maccarini, et ce, peu de temps après son arrivée. Elle se rendit compte des périls qui la menaçaient et opposa une résistance courageuse qui s’appuyait sur les énergies que sa foi pouvait lui fournir. Elle en vint à se convaincre que l’unique bouclier derrière lequel elle pouvait définitivement préserver son honnêteté, était le mariage.

Ceci dit, elle comprit que le Seigneur avait déjà mis sur son chemin, l’homme destiné à devenir le père de ses enfants. Cet homme, un peu plus âgé qu’elle, mais pas vieux du tout, c’était Dominique Taïgi qui venait tous les jours accomplir quelque mission de la part de ses patrons, auprès de la Dame Maria Serra Marini. Dominique lui avait manifesté une certaine sympathie qui tranchait sur les élans trop intéressés, manifestés par beaucoup d’autres.

Les voix et le soleil

— " Anne-Marie, que demandes-tu ?

Le Père Ferdinand de Saint-Louis, trinitaire déchaussé, avait pris place, prés de l’autel, du côté de l’Évangile, en étole et surplis blancs. Autour de lui, étaient réunis tous les religieux du couvent, dans leur longue tunique blanc-crème, la croix rouge et bleue sur la poitrine.

Sous l’architecture bizarre de Borromini, dans la pénombre de Saint-Charles-aux-Quatre-Fontaines, la foule se pressait, ne voulait perdre aucun détail de la belle cérémonie qui se déroulait au début de ce splendide matin du 26 décembre 1808, fête de saint Etienne.

La demande du Père Ferdinand résonna très claire, dans tous les coins de l’église. L’émotion de la dame agenouillée sur le marchepied de l’autel, une émotion qui s’exprimait par des soupirs et des sanglots, se calma comme par enchantement. Elle était d’une rare beauté malgré ses trente-neuf printemps, le dévouement déployé auprès de ses six enfants, la rigoureuse modestie de ses vêtements.

— " Anne-Marie, que demandes-tu " ?

— " L’habit du tiers-Ordre de la Très-Sainte-Trinité et la miséricorde de Dieu ". La voix de la postulante était celle de toujours, vibrante et ferme, délicieusement caractérisée par l’accent pur et doux de la région de Sienne.

— " As-tu la ferme volonté de le porter avec dévotion, jusqu’à la mort " ?

" Oui, Père, avec l’aide de Dieu ".

À ce " oui ", le Père Ferdinand se leva et tourné vers l’autel, prononça quelques prières. Il aspergea ensuite d’eau bénite, un scapulaire à la croix rouge et bleue qu’il présenta à la dame pour qu’elle le baisât.

" Que le Seigneur te dépouille du vieil homme, avec toutes ses actions, te revête de l’homme nouveau créé dans la vraie justice, et la vraie sainteté " ajouta le Père Ferdinand. Il lui imposa alors le scapulaire sur les épaules en disant : " Reçois l’habit de la Très Sainte Trinité, au nom du Père, du Fils, du Saint-Esprit ".

On considérait la cérémonie terminée, même si à l’arrière, d’autres prières étaient récitées. Le tout atteint son point culminant par le chant du " Veni Creator Spiritus ". La coupole de l’église Saint-Charles l’accueillit dans son élan audacieux vers le ciel, pour l’emporter dans l’infini.

À l’époque de sa vêture, dans cette église des trinitaires déchaussés qui occupe un angle du célèbre carrefour romain des Quatre-Fontaines, Anne-Marie comptait dix-huit ans de mariage.

Ses fiançailles avec Dominique n’avaient duré que quarante jours. Et la rapidité avec laquelle avaient été célébrées les noces, avait suscité une kyrielle de critiques et de commérages sur le compte de la jeune fille. Mais, Anne-Marie était d’avis et elle le sera dans l’avenir, avec ses propres filles, qu’une fois le choix fait, compte tenu de la religion, de l’honnêteté de l’époux, il faut éviter les longues fréquentations à la maison, se hâter, agir pour le mieux ; laisser traîner les choses en longueur, donne, de part et d’autre, naissance à des ennuis, et il en ressort de funestes conséquences.

De son homme, Anne-Marie avait soupesé les qualités et les défauts. Sur un plateau de la balance, elle avait déposé les manières rustres, la grossièreté du langage, l’entêtement opiniâtre, le caractère querelleur et violent, la médiocrité du talent. Sur l’autre, elle avait placé la belle apparence, la force robuste, et surtout, la bonté d’âme qui se cachait sous cette écorce rude, les fermes convictions religieuses de ses moeurs. La balance pencha du côté des qualités.

Dominique Taïgi, même si à converser avec lui, on ne l’eut jamais soupçonné, était la dernière pousse, l’ultime rameau d’un arbre généalogique d’anciennes et célèbres familles nobles. La famille Taïgi s’était distinguée en Lombardie, avait obtenu des franchises et des distinctions des ducs de Milan, avait fourni des personnages illustres dans le domaine de la science, plus particulièrement. Dans le cours des siècles, les différents rameaux s’étaient plus ou moins desséchés. Un seul survivant qui, le 18 octobre 1761, avait vu naître Dominique à Castaeggio, dans la Valtellina.

Ainsi, Dominique était venu à Rome pour trouver la fortune mais elle ne lui avait pas souri. Cependant, il y avait trouvé du travail et avait appris immédiatement à s’adapter comme serviteur et commissionnaire de confiance dans la maison des princes Chigi. Son salaire : six écus par mois et les restes de la table des patrons qui devaient, cependant, être répartis entre les nombreux serviteurs, parmi lesquels existait un ordre de préséance. Plusieurs devançaient le commissionnaire ; l’ordre hiérarchique prévu par un accord tacite, était rigoureusement observé dans tous les palais des familles patriciennes de Rome qui existaient à l’époque. Dominique ne pouvait donc pas compter sur le meilleur des restes et la quantité était loin d’être assurée.

Sa décision prise, Anne-Marie demanda le consentement de ses parents. La maman Santa le lui donna immédiatement et avec joie. Moins enthousiasmant fut le " ça-va ! " du papa Luigi qui, sans doute, aurait espéré davantage pour sa jolie fille, et souhaité un peu plus de réflexion. L’approbation des parrains est aussi immédiatement accordée et la donna Maria Marina, d’un côté, le prince Chigi de l’autre, couronnèrent leur assentiment par un cadeau princier.

Plus libéral, le prince concéda aux deux époux l’usage d’un petit appartement dans son palais " al Corso ", à l’angle de la place Colonna. Les deux chambrettes et la cuisine étaient situées dans la partie réservée au service ; les fenêtres donnaient sur la venelle du Sdrucciolo. C’était une faveur qui avait cependant, une contrepartie. Le prince s’organisait pour avoir toujours près de lui, jour et nuit, comme il en avait toujours été jusque là, son fidèle serviteur qui demeurera au rang qu’il occupait depuis son entrée en service. Il l’appréciait à un point tel, qu’il se faisait suivre par lui, lors des conclaves, quand il y accédait à titre de maréchal.

La cérémonie des noces fut des plus simples, à l’image des gens du peuple. Elle eut lieu le 7 janvier 1790. Dominique Taïgi, 28 ans, du diocèse de Como, et Anne-Marie Giannetti, 20 ans et sept mois, de Sienne, s’unirent en mariage, avec la bénédiction de l’abbé Massetti, dans l’église Saint-Marcel de Rome.

Les premiers mois de mariage furent plutôt désordonnés, sans souci du lendemain, plutôt bohèmes ; ils ont, du moins, semblés tels, pour un bout de temps. En réalité, les choses se passèrent ainsi : Dominique s’était enflé la tête d’orgueil, tel un paon. Cet orgueil venait du fait qu’il avait épousé une si belle jeune fille. Il ne se rassasiait pas de se pavaner en public, l’ayant à ses côtés. Il allait de long en large sur le " Corso ", à telle ou telle fête, au théâtre, sur la Place Saint-Pierre, le dimanche. Il voulait que son Anne-Marie se vête des robes les plus élégantes que la donna Maria Serra Marina mettait de côté, même si elles étaient presque neuves, pour les lui donner, à part celles qu’il achetait lui-même, en tenant compte de la mode qu’adoptaient les nobles dames qui fréquentaient le palais Chigi. Il rognait ainsi le magot d’argent que ses années de service lui avaient permis d’accumuler. Pour atteindre son but, il épargnait plus que tout autre, plus qu’lsaac le regrattier. Il en est venu, malgré ses épargnes, à être sans le sou pour acquérir un anneau d’or, une paire de boucles d’oreilles, une chaîne d’or, une chaîne de perles. Il ne pouvait ajouter quoi que ce soit, à la chaîne d’or, à la chaîne de corail qu’Anne-Marie reçut en cadeau, de sa patronne, à l’occasion des noces. Ces bijoux, Anne-Marie les portait avec joie, était heureuse d’en faire l’étalage, parce que pour Dominique Taïgi, l’élégance de sa femme comptait pour beaucoup.

D’autre part, Anne-Marie, depuis le jour de son entrée sous le nouveau toit marital, avait considéré Dominique comme son maître et son seigneur ; elle lui vouait une obéissance affectueuse, une soumission aimante dont elle avait toujours fait preuve, à l’égard de ses propres parents. Elle comblait ses désirs et allait même au delà ; ce qui ne troublait en rien, son sens rigoureux de l’honnêteté. Elle se complaisait dans les attitudes de son mari, parce qu’elle nourrissait en elle-même, une certaine vanité innée, une joie explosive de vivre, qui allait dans le sens de son caractère jovial et éveillé, de son goût tout à fait toscan, pour les choses éclatantes, les habits élégants.

Puis, avec le temps, la durée de quelques mois, vinrent le repentir, le trouble grandissant, l’angoisse, dans les profondeurs de l’âme. Anne-Marie était cependant certaine de ne pas offenser directement le Seigneur par sa vie joyeuse, vaniteuse ; elle n’en éprouvait pas tellement de regret.

Un bon dimanche, son esprit s’agita plus que jamais et connut une inquiétude amère. On la vit tout de même radieuse comme d’habitude, très élégante et joyeuse, sur la place Saint-Pierre, au bras de Dominique, fier comme une colonne de Michel-Ange, parmi la foule qui accourait pour la messe. Il arriva, touchant presque le seuil de la grande basilique, qu’Anne-Marie frôla un religieux de vie sainte, le Père Angelo Vérardi, des Servîtes de Marie. Comme il était seul, il marchait lentement et avec grande réserve, les yeux rivés au sol. Mais voici que, à cet instant, les yeux du Père Angelo se levèrent et, croisant ceux de la jeune épouse, s’y fixèrent pendant quelques secondes.

Il entendit une voix intérieure, mystérieuse, et il le dira lui-même, plus tard, qui le força à regarder Anne-Marie. Ses vêtements et ses fantaisies se sont comme imprimés dans sa mémoire. La voix lui dit : " Porte attention à cette jeune dame ; un jour, je la déposerai entre tes mains et tu devras la conduire à moi, intégralement. Elle se sanctifiera parce que je l’ai choisie pour en faire une sainte ".

Au moment même, le regard pénétrant du Père Angelo produisit chez Anne-Marie, un véritable choc. Peu de temps après, agenouillée devant le Saint-Sacrement, à l’intérieur de la basilique, son coeur se dégagea lentement de l’étreinte, de la commotion qui l’avait secouée. Ses yeux versèrent des larmes et son âme s’ouvrit à l’inspiration rapide et véhémente de changer de vie, de s’offrir entièrement au Seigneur.

Les jours qui suivirent rendirent toujours plus profonde sa détermination d’abandonner la vanité et les divertissements. Comme elle voulait bien faire, sans provoquer des drames familiaux, elle crut bon d’avoir recours à la confession, le moyen le plus efficace pour libérer son âme du poids qui l’écrasait, et recevoir en même temps, les conseils les plus clairs et les plus prudents, sur la façon de répondre, comme épouse, à l’appel qu’elle venait de recevoir de la part de Dieu. Voici qu’elle arrive, un après-midi, à la grille d’un confessionnal, dans une église voisine de sa demeure. Elle se met à murmurer : " Voici à vos pieds, mon Père, une pauvre pécheresse ". Elle s’entendit répondre, avec une drôle d’amabilité : " Mais vous n’êtes pas une de mes pénitentes. Allez-vous-en ". Elle en reçut comme un coup de massue sur la tête. La consternation fut telle, qu’Anne-Marie ne tenta même pas de trouver une justification à pareille attitude ; elle n’avait jamais pensé qu’on pourrait lui réserver un accueil si glacial. Elle sortit de l’église, éperdue, la révolte dans l’âme, se sentant abandonnée de tous, vouée à marcher presque sans retour, dans le chemin de la perdition.

Elle se laissa attirer encore vers la vie déréglée parce que l’avilissement est le pire ennemi de la volonté. Mais les promenades pompeuses sur le " Corso ", les spectacles et les fêtes, les satisfactions et les joies que lui procurait l’admiration qu’elle suscitait partout, autour d’elle, perdirent de la saveur. Les satisfactions devinrent de plus en plus rares, la joie, de plus en plus terne. Les yeux de ce religieux servite rencontré sur le seuil de Saint-Pierre, en ce dimanche, ne cessaient de la fixer.

Quelque mois après, elle se retrouve dans le même état qu’auparavant et quoi qu’il arrive, elle reprit le chemin du confessionnal. Cette fois-ci, elle décide de se rendre à Saint-Marcel, la chère église où son mariage avait été bénit. Elle entra, regarda autour et vit, prés du second confessionnal, à droite, une longue file de gens qui attendaient. Si ce prêtre, pensa-t-elle, s’est acquis la confiance de tant de pénitents, il ne peut être que rempli d’une grande charité pour les pauvres pécheurs. Elle fit donc la queue derrière les autres et attendit son tour. Quand elle vint et entendit s’ouvrir le petit carreau mû par le confesseur, au delà de la grille, son coeur fut subitement rempli de félicité. Une voix douce, paternelle, tranquille, avant même qu’elle ne réussit à prononcer un mot, lui dit : " Ah ! vous êtes venue, finalement, âme chère du ciel ! Courage, ma fille, le Seigneur vous aime et vous veut tout à lui ". Et dès ce moment, sa vie devint ce qu’elle avait rêvé. Ce confesseur n’était autre que le Père Angelo Verardi des Servîtes de Marie.

Dominique consentit à démobiliser la mise en scène autour de la beauté de sa femme. Anne-Marie déposa ses bijoux dans la cassette, ses habits fins, dans l’armoire. Elle endossa les habits simples et ordinaires du peuple. Aux festivités, au théâtre, aux promenades sur le " Corso ", elle substitua une vie humble et recueillie.

Les nerfs de la maman Santa, limés par de nombreuses années de fatigue et d’amertume, provoquaient, vraisemblablement, dans la maison Taïgi, l’habituel drame belle-mère-gendre. De cela, nous en parlerons par la suite, comme nous nous arrêterons aussi, à d’autres faits de la famille d’Anne-Marie. Tenons-nous en pour le moment, à une période capitale dans la vie de notre protagoniste.

Un jour, alors que maman Santa lisait à sa fille, un livre de méditation, elle tomba sur un passage qui faisait allusion au jugement universel, au jugement général. Ce passage impressionna tellement Anne-Marie qu’elle éclata en larmes d’amour et d’horreur. Elle entendit une voix qui lui disait : " Voilà, fille et épouse bien-aimée, ton Père qui t’a toujours suivie, te destinait à devenir une sainte alors que tu étais encore dans le sein de ta mère. Tu n’as aimé d’autre que moi, et je te garderai même au milieu des vanités du monde. Je ne t’ai pas abandonnée ; je te préserverai de nombreux périls, de la mort, parce que je t’aime beaucoup. Un jour, tu verras celui qui te parle ".

Ce fut le début d’une longue et ineffable idylle. Elle jouira du don de célestes colloques ; Jésus, son divin Époux, la Vierge Marie, les saints et les anges les plus chéris, lui parleront : saint Paul, l’apôtre, saint François d’Assise, saint Philippe Néri, saint François de Paule, sainte Françoise Romaine, sainte Jacinthe Mariscotti, l’Archange Raphaël, les Anges Gardiens, et même les âmes du purgatoire. Ils lui confièrent de profonds secrets, lui firent d’intimes confidences, l’éclairèrent sur les conditions de l’église et de la société, lui révélèrent l’avenir d’illustres personnages et le sort de tant d’âmes. Ils la consolèrent et la guidèrent sur les sentiers du bien.

Mais retournons en arrière. Nous sommes au printemps de 1791. Un nombre incalculable de charismes lumineux s’accumulent subitement dans l’âme d’Anne-Marie. Les premières communications célestes d’amour, la réconfortent et l’intimident en même temps.

" Je te destine, lui dit un jour l’Esprit divin, au moment de la communion qu’elle reçoit désormais chaque matin, à convertir des âmes et à consoler toutes les catégories de personnes : prêtres, frères, moines, prélats, cardinaux, et même mon Vicaire. " Plus elle se sentait comblée d’affection divine et guidée vers une mission presque vertigineuse, plus elle estimait cela impossible, plus elle avait de mépris pour elle-même ; elle n’aurait jamais cessé de s’humilier. Elle en vint aux flagellations. A la fin, elle se frappait violemment le visage sur les tuiles du parquet, pour réparer les élans de sa beauté et de sa vanité du passé.

À genoux, un soir, prostrée devant le crucifix, les épaules nues, elle s’était donné la discipline avant que son confesseur ne lui défende ce genre de mortifications. Elle vit de loin, devant ses yeux, une lumière resplendissante comme le soleil, même si elle était voilée d’un léger nuage. Elle en éprouva une grande frayeur puis se frotta les yeux, pensant qu’il s’agissait d’une hallucination ou d’un piège diabolique. Mais le soleil ne s’éteignait pas. Elle finit par se tranquilliser et l’observa de plus prés. Il avait l’apparence d’un globe de feu duquel se détachaient des rayons.

Depuis ce soir-là et pour toujours, le soleil accompagnera Anne-Marie Taïgi ; elle l’aura constamment à la vue, devant elle, pendant 47 ans, jour et nuit, à l’intérieur comme à l’extérieur de la maison.

Éclairés par le soleil du firmament, nous voyons les vivants, les choses de cette terre. Ainsi, illuminée par son soleil mystérieux, Anne-Marie verra de façon étonnante, les réalités physiques, les problèmes moraux de ce monde, " comme on voit passer les images dans une lanterne magique ", comme elle l’explique elle-même, dans son piquant langage populaire. Ce soleil toujours devant ses yeux, éloigné de sa figure " d’environ dix palmes romaines et au dessus de sa tête, d’environ trois palmes ", lui montrera les secrets de la nature et de la grâce, les secrets du temps et de l’éternité, source continuelle et intarissable de connaissances merveilleuses sur la vie présente, sur la vie future.

Si au départ, la lumière était un peu diffuse, elle se faisait plus éclatante, plus limpide, plus lumineuse que sept soleils réunis ensemble, selon les progrès dans la vertu, quand, sur suggestion de son confesseur, elle demandera à Dieu, la signification de cette vision ininterrompue, la voix lui dira : " C’est un miroir pour que tu distingues entre le bien et le mal ".

Un jour, à Dom Raphaël Natali, un prêtre qui fut très cher et dont nous reparlerons, Anne-Marie tenta de lui décrire ce soleil mystérieux : en haut, là où se terminent les rayons lumineux, je vois une couronne d’épines et deux d’entre elles, d’un côté et de l’autre descendent très longues jusqu’à se superposer pour former une croix avec leur pointe arquée sous le disque solaire. Au centre du disque qui est lumineux, je vois un personnage revêtu d’un manteau majestueux, assis, la tête tournée vers le haut ; de son front, sortent deux rayons de lumière.

Dom Raphaël s’efforça de comprendre comme il put, la signification de ce soleil. À la fin, il crut reconnaître dans ces symboles, " le Christ Rédempteur ". Dans le disque brillant, il vit en effet, la divinité. Dans la couronne d’épines et la croix sous-jacente, formée par les deux épines majeures, il vit les éléments de la passion. Dans la figure solennelle, il vit le Christ Rédempteur. Sur la toile de fond éblouissante, passaient de temps en temps, les visions particulières dont Anne-Marie saisissait la signification.

Nous nous sommes encore laissés aller à une anticipation et nous devons retourner à cette Anne-Marie qui, avec la rapidité du temps, passait d’une grossesse à l’autre et allaitait chacun de ses enfants sans avoir recours à des procédés qui auraient pu suppléer. Elle avait donné naissance à Anne-Séraphique, Camille, Alexandre, Luigi, Sophie, Louise.

Elle éprouvait alors, un vif et pressant désir du cloître ; elle souhaitait avoir l’opportunité de vivre dans le silence et la paix, loin des bruits, de l’agitation, du tumulte de la vie, au coeur de la cité elle ne réussissait pas à concilier son ardent désir de vie religieuse avec son rôle d’épouse et de mère.

Elle parle au Père Ferdinand de Saint Louis, trinitaire déchaussé du couvent de Saint-Charles-aux-Quatre-Fontaines qui était devenu son confesseur à la suite du Père Angelo Verardi des Servîtes de Marie et d’autres qui l’avaient guidée au cours des années antérieures.

" Bien, lui dit le Père Ferdinand, si vous voulez profiter, au moins en partie, des avantages spirituels de la vie monastique, participer aux oeuvres saintes qui s’y accomplissent, inscrivez-vous à une milice religieuse qui vous permettra de vivre dans le monde tout en accomplissant les devoirs qui vous sont imposés par votre état et votre condition sociale. Écoutez-moi bien : demandez à votre mari s’il acquiesce à votre désir de devenir tertiaire. Ainsi, vous serez une religieuse au milieu du monde ".

Parmi les Tiers-Ordres, Anne-Marie choisit celui des Trinitaires, non parce que son confesseur est un Trinitaire, mais parce qu’elle nourrissait une dévotion très profonde pour les divins mystères, pour celui de la Trinité, en particulier. Elle demanda le consentement de son mari.

" Ma femme, rappellera Dominique après la mort d’Anne-Marie, me demanda la permission de devenir tertiaire déchaussée de l’Ordre de la Sainte-Trinité et je le lui accordai avec la condition, cependant, d’être fidèle à son rôle d’épouse et de mère de famille. Ce furent mes conditions et elle les a toujours observées avec une obéissance prompte, avec exactitude ".

Après la cérémonie de vêture à Saint-Charles-des-Quatre-Fontaines, Anne-Marie demeura intègre en ce qui avait trait aux exigences de son mari ; elle ne sacrifia en rien, les droits et les devoirs qui lui incombaient, à l’égard de son mari et de sa famille, se conduisait, de fait, comme une religieuse. Elle aurait pu se limiter à porter le scapulaire sous les vêtements de chaque jour, mais elle voulut, au contraire, depuis lors, se montrer spontanément en public, avec l’habit des Tertiaires trinitaires : la tunique de laine blanche, le scapulaire de même étoffe avec la croix rouge et bleue sur la poitrine, la coiffe sur la tête, un manteau de mousseline blanche qui descendait très bas, la ceinture de cuir, avec le rosaire pendant sur le côté, les pieds nus, dans des sandales. Cela, quand elle sortait. Dans la maison, au contraire, elle portait la robe en usage chez les femmes du peuple, lorsqu’elles s’adonnaient à des travaux domestiques.

Tout se déroula ainsi, pendant plus de deux ans, jusqu’à ce qu’elle porte un septième enfant. Elle abandonna la tunique blanche pour éviter les critiques et pour ne pas exposer l’habit religieux à la moquerie des malveillants. Dés lors, par la suite, selon l’usage des femmes toscanes, elle endossa une robe de toile sombre, un fichu blanc au cou, une coiffe blanche sur la tête, et, par dessus, un manteau blanc assez ample pour pratiquement recouvrir le tout. Dans ses dernières années de vie, vu son grand âge, elle fit quelques retouches à la façon de se vêtir. Le tout se réduisait à la substitution de son manteau blanc, par le port d’une mantille noire ; au passage d’un fichu blanc, à un voile totalement noir.

Revêtue d’un habit du peuple, Anne-Marie continua d’agir toujours, devant tout Rome, comme la Vierge Marie le lui avait recommandé lors d’un colloque : " II est nécessaire que chacun se persuade, connaissant ta vie, qu’il est possible de servir Dieu dans tous les états et toutes les conditions ".

Le plus grand mérite d’Anne-Marie, fut de demeurer au milieu du monde sans y être : " L’âme qui veut devenir mon épouse, doit mourir à tout le créé ", lui avait laissé entendre la voix du céleste époux.

La maison Taïgi

Vinrent les années de fer de la République romaine, les années de la tyrannie napoléonienne. Les foules affamées du peuple descendirent dans la rue, se rangèrent en longues files devant les fours à pain.

Au nom de Bonaparte, le pape Pie VII avait été capturé par des troupes de gredins et traîné en terre d’exil. Le pape absent, la famine était entrée dans Rome. Un jour, au milieu de la cohue des pauvres gens, un soldat, en service d’ordre, heurta brusquement Anne-Marie Taïgi. Dominique n’y vit que du feu. Il s’élança sur le soldat, lui arracha le fusil des mains et, s’en servant comme d’une massue, lui servit un tel coup qu’il le laissa plus mort que vivant.

C’était Dominique dans ses démonstrations pyrotechniques, c’était son caractère explosif. Autant il aimait sa femme, autant il était violent à l’occasion, pour lui prouver son affection.

Dans la famille, avec les enfants, il avait établi la loi du coup de sifflet. C’était le signal venant de la rue, qui annonçait son entrée à la maison ; c’était comme le déclenchement d’un système d’alarme. Deux fois, sa fille Mariuccia, dans son empressement à lui ouvrir la porte, dégringola dans l’escalier au risque de se casser le cou. " Si papa ne trouvait pas tout à sa place, racontera sa fille Sophie, il s’emportait tellement, qu’il était capable de se saisir du coin de la nappe et d’expédier en l’air la table déjà toute servie. Le potage fumant devait être dans les assiettes, sa chaise placée en son lieu. En somme, il exigeait l’ordre parfait en toutes choses, et le faisait avec rigueur. Ce que je dis de la table, je le dis aussi du vestiaire, de toutes les choses appartenant à la famille, à la maison, y compris la bonne tenue vestimentaire des personnes ".

Pour établir son autorité, lorsqu’un des enfants en venait à l’oublier, Dominique se servait de la loi du sifflet, comme on se sert parfois du béton. Et si quelqu’un tentait de l’éviter, les désagréments devenaient plus considérables ; ce qui arriva à l’un des garçons, à Camillo ou à Alessandro. Pour se soustraire à une quelconque raclée qui lui était due, le coupable s’enfuit par les escaliers, dans la rue. Passant sous une fenêtre, le père lui lança, mais sans l’atteindre, un fauteuil assez lourd, un geste qui aurait pu avoir des conséquences graves. Mais laissons passer.

Avec un homme capable de telles sautes de caractère, Anne-Marie vécut presqu’un demi-siècle. Que le ciel en soit remercié, la digne épouse faisait preuve de douceur et de charité, apaisait le caractère de cet homme qui aurait pu allumer de continuels incendies ; c’était l’opinion d’une voisine, amie de la maison.

Le même Dominique l’admettra, du reste, quand, quelques années après la mort d’Anne-Marie, il dira : " Souvent, je revenais à la maison, écrasé par la fatigue et un peu troublé, parce que celui qui demeure serviteur doit en avaler de toutes sortes, de la part des seigneurs, plus particulièrement. Mais Anne-Marie avait tant de bonnes manières, tant d’amabilité, qu’elle faisait en sorte que tout soit selon mes goûts. Elle faisait passer ma mauvaise humeur et m’égayait. Quand j’avais des difficultés, je revenais à la maison et ainsi, je me tranquillisais. Où trouver, maintenant, des femmes comme elle ? ".

Il ne faut pas croire que la cohabitation matrimoniale ait été un martyre pour Anne-Marie. En effet, il n’en fut rien. Très différents de caractère, ils connurent des jours heureux. Elle, douce, tendre, calme, avait choisi un homme extravagant, impétueux, hérissé, rude, agité, et elle en était amoureuse ; elle l’aimera toute sa vie de tout son coeur de femme et d’épouse, sans un ressentiment, sans le moindre regret.

Et, l’aimant, elle lui obéissait en tout, même si elle en éprouvait de l’amertume ; son esprit de mortification lui a permis de répondre à ses désirs.

" Que fais-tu avec ce verre ? tu t’amuses avec ? ", disait Dominique, quand Anne-Marie, pour ne pas trop flatter sa soif ou sa gourmandise, se limitait à une gorgée. " Bois-le tout, te dis-je ! ". Elle lui souriait et le buvait.

" Que fait-on, ce soir ? Habillons-nous convenablement et sortons pour nous divertir ". Et elle, qui mourait d’envie de demeurer éloignée de tout divertissement, même si c’était un divertissement de famille, souriait, endossait sa tenue d’ordinaire, et l’accompagnait par le bras, avec les enfants en arrière, au théâtre des marionnettes.

" M’étant aperçu, racontera Dominique par la suite, qu’elle le faisait plus pour me plaire et m’obéir que pour son plaisir ; que c’était pour elle un sacrifice, je la laissai en paix ".

Avec Anne-Marie, Dominique, le terrible, devenait souvent un petit chien ; et comme les chiots, il aimait à être caressé. Il voulait que ce fut elle qui lui lavât les mains quand il entrait, qui lui taillât les ongles quand il en sentait le besoin, laçât ses chaussures quand il sortait. Il hurlait pour tant d’attentions.

Et comme il lui plaisait de l’avoir tout prés de lui et qu’elle en était consciente, elle écartait quiconque, autour d’elle, pour demeurer ainsi avec lui, le soigner, l’assister, le préférant à tous les êtres humains du monde.

Il n’était pas rare qu’à son entrée dans la maison, Dominique se trouvait mêlé à beaucoup de monde, à des gens venus demander conseil, recevoir des communications d’en haut. En un rien de temps, Anne-Marie libérait la place, gentiment mais fermement. Elle accompagnait à la sortie les plus humbles comme les plus illustres personnage ; le mari avant tout, l’époux premier servi.

Un mariage heureux en fait, plus que dans l’expression, même si dans l’entourage, on ne réussissait pas à le croire tel. Un mariage où le succès trouva son secret dans les manières suaves d’Anne-Marie, dans ses douces réponses, dans sa tendre mansuétude, au cours des années. De cette façon, elle réussissait à apaiser la colère facile de Dominique, à rendre son rude caractère toujours plus souple, nonobstant les mille querelles qui se produisirent au détriment de toute la famille, les afflictions habituelles, les maladies, les mortalités, les périodes de chômage, les temps de misère, les désaccords entre parents, les contraintes des voisins qui n’épargnèrent pas la maison Taïgi.

Maman Santa, comme nous l’avons déjà mentionné, demeurait avec sa fille à la maison. La pauvre vieille avait suffisamment travaillé ; il était temps qu’elle trouve un peu de repos et de paix. Chez les Taïgi, elle trouva le repos mais n’apporta pas la paix ; ses nerfs étaient aiguisés au milieu de tant de difficultés ; et cela, pendant de longues années. Elle entra vite en contradiction avec son gendre et il fut impossible d’en sortir.

Et dire que Dominique, par son amour pour sa femme, s’ingéniait à avaler d’impossibles crapauds. Il en vint même à ne plus contredire sa belle-mère. Quand il apportait les restes de table des princes Chigi, il acceptait qu’Anne-Marie réserve les morceaux les plus délicats pour sa mère. " Dieu soit loué ! ", disait-il, observant la belle-mère qui mangeait tout avec la gourmandise bruyante des vieux. " Pour ce soir, au moins, j’ai contenté la maman ! ". Mais dès que le plat était vide, la paix s’évanouissait. De nouveau, avec sa douceur inaltérable, Anne-Marie laissait entendre à son mari, qu’en conscience, elle devait s’acquitter d’une énorme dette de reconnaissance à l’égard de sa mère. Elle faisait aussi comprendre à cette dernière, avec une même douceur inaltérable, qu’elle devait, en conscience, obéir à son mari, le respecter, l’aimer d’un grand amour.

Puis, le papa Luigi Giannetti se mit de la partie. Dame Maria Serra Marina, l’unique patronne auprès de qui il avait accepté de servir, était morte. Le petit vieux, on ne sait comment, avait réussi à se trouver un lit à perpétuité, à l’hôpital Saint-Jacques ; un refuge à prix gratuit, sa vie durant. En somme, l’unique fortune de cet obstiné chasseur de chimères, avait finalement réussi à atteindre Rome. À son lit à perpétuité, s’ajoutait une rente viagère que la patronne lui avait laissée. Il aurait pu vivre très bien. Toutefois, malgré la distance à parcourir entre les palais et le logis des Taïgi, une distance de deux milles, environ, il y passait ses journées et y battait le tambour. Lorsqu’il entrait, c’était comme un chien dans un jeu de quilles ; il ne cessait jamais de grogner, de se plaindre, de larmoyer à propos de tout, comme un pauvre homme.

Dominique continua d’avaler d’autres crapauds et, par amour pour sa femme, accepta qu’elle sacrifiât les petites épargnes qu’ils avaient réussi à mettre de côté, afin de satisfaire papa Luigi. Rien à faire, le petit vieux, sans même dire " merci ", se laissait toujours aller avec de nouvelles jérémiades. Et ce furent toujours les mêmes lamentations, les mêmes impolitesses.

Louis Giannetti allait bientôt connaître la fin de son existence bizarre ; le dernier chapitre qu’il écrira sera saisissant. Il mourut de la lèpre.

Il ne quitta plus le lit de Saint-Jacques. Il ne sera pas pour autant abandonné par sa fille. Le geste que maman Santa avait posé, lors du décès de Benoit-Joseph Labre, en 1783, le geste de laver la dépouille souillée du saint, étendue sur un grabat de la rue " De Serpenti " avait fortement impressionné Anne-Marie. Elle soigna son père lépreux, nettoya ses pauvres membres avec des bains chauds, le changea de linge, lui peignit les cheveux avec autant de patience qu’avec ses enfants. Et ce, pendant des mois, sans en retirer un seul mot de reconnaissance. Lorsqu’elle constata que la fin était proche, elle le prépara à recevoir les derniers sacrements. Il fut administré, et accompagné par la main de sa fille, jusqu’au dernier soupir, vers les sentiers éternels du ciel.

Elle conduisait, quelque temps après, vers les mêmes sentiers, la maman Santa qui demeurait toujours avec elle. Elle fut fidèle à sa mère jusqu’au bout, fut jour et nuit à son chevet.

Quelle amertume les voisins et voisines ne donnèrent-il pas à Anne-Marie ! Les murmures, commérages, calomnies, injures, ne cessaient de pleuvoir sur elle. Le va-et-vient de personnalités de toutes sortes dans la maison des Taïgi, était le prétexte des conjectures les plus fantaisistes, les plus malicieuses, des accusations les plus sordides.

Un jour, une femme eut l’audace d’insulter, de porter atteinte à la réputation d’Anne-Marie. Dominique l’apprit et sauta comme un baril de poudre. La diffamation dénoncée, il la fit enfermer, sans rémission.

Anne-Marie apprit qu’elle devait exercer au suprême degré la vertu de prudence, cacher à son mari jusqu’à la plus petite des nombreuses offenses dont elle était la cible continuelle. Elle défendait même à ses enfants d’en faire part à leur père, dans la crainte que Dominique ne se laisse aller à de sévères vengeances, selon son style rustaud.

Nonobstant les charges croissantes, comme nous le verrons, cette femme extraordinaire, face aux événements de son époque, sut conserver un rythme serein et constant à l’avantage des membres de sa nombreuse famille. Comme le lui avaient appris à l’école Sainte-Agathe ses pieuses maîtresses, Anne-Marie divisa et régla la journée de chacun des siens, en tenant compte des devoirs de la piété, des obligations du travail.

Le réveil, le matin, était plutôt hâtif Après la prière et la collation, les filles s’adonnaient aux travaux ménagers qui se prolongeaient toute la journée avec la seule interruption du dîner. Le travail des fils se faisait à l’extérieur. Le soir, à l’heure fixée, personne ne devait manquer la récitation du rosaire suivie de prières additionnelles qui, en vérité, étaient un peu longues. Et c’était le souper précédé et suivi, comme au dîner, de quelques prières. Suivait la lecture de quelques pages de la vie d’un saint, de quelques entretiens sur les missions catholiques. On chantait ensemble, enfin, un cantique religieux. Les enfants passaient un par un, devant les parents, demandaient la bénédiction, baisaient la main de l’un et de l’autre, gagnaient leur lit. C’était toujours tôt.

En plus de s’éreinter à la maison avec ses filles, Anne-Marie en arrivait, chaque jour, à soutirer quelques heures de son temps pour s’adonner à des oeuvres de piété, s’employer à des travaux qui rendaient service aux autres, tout en lui assurant un petit revenu qui contribuait, avec l’apport de Dominique, à donner de l’élan à la caravane familiale. " Plusieurs femmes ensemble, dira celui qui la connut bien, n’auraient pu en faire autant que ce qui fut fait par elle ". Elle ne pactisait jamais avec la paresse, comme en témoignait une voisine. Elle agissait de façon à ce que tout soit en place. Ce qu’un autre ne faisait pas, elle le faisait.

Quand tous les autres dormaient, elle enlevait sa coiffe et, chassant le sommeil de ses yeux, elle travaillait pour les pauvres, priait, méditait, plus unie que jamais à son époux céleste. Le silence de la nuit lui procurait un souffle de paix comme il en existe dans le cloître.

La sobriété, oui, toujours ; mais une alimentation adéquate ne devait manquer ni au mari, ni aux enfants. " Ici, à Rome, dira Dominique, en bon valtelin, on mange à crever, un jour ; on a peine à se mettre un peu de pain sous la dent, le lendemain. Dans la façon de procéder de ma femme, tout est à l’ordre, tout s’équilibre, tout fonctionne comme une horloge, dans la paix du ciel ". Dominique en savait quelque chose ; il mangeait toujours pour trois.

Et pendant que les autres mangeaient la soupe et le ragoût garni de patates ou des fritures, de l’agneau quand il n’était rien resté du dîner, le tout agrémenté par un morceau de fromage, un peu de salade, du vin, soit pur, soit trempé, dont chacun pouvait se servir en allant jusqu’à l’épaisseur de deux ou trois doigts, à la fin du repas, Anne-Marie, debout, les servait tous ; elle ne s’assoyait que lorsque tous étaient satisfaits. Elle-même se contentait de si peu ; très souvent, d’un reste du jour précédent.

L’économie faisait toujours loi dans le régime familial d’Anne-Marie Taïgi. On n’allait cependant pas jusqu’à l’avarice. S’il est vrai que dans les meilleures années, elle ne favorisait, pour aucun motif, le caprice chez ses enfants, lequel a pour effet, en général, de les rendre la plupart du temps insatisfaits, il est aussi vrai qu’elle n’hésita pas à engager des domestiques, lorsqu’elle le jugeait nécessaire. Et elle les traitait comme ses filles. Il est certain qu’elle ne leur imposait pas de services supérieurs à ceux que, malgré cette aide, continuaient d’effectuer ses propres filles.

" Une fois, racontera une des domestiques de la maison Taïgi, je portais une grosse carafe qui pouvait valoir une douzaine de " paoli ", soit 56 centimes, une carafe cannelée et dorée qui se brisa entre mes mains. Imaginez ce qui se serait passé dans la plupart des familles. Eh bien, Anne-Marie dit immédiatement, qu’il n’en était rien. Elle me servit du vin en ajoutant que de telles carafes, elle en avait eu douze et qu’elles s’étaient toutes brisées de la même façon ".

Généreuse, et toutefois ménagère et parcimonieuse, lorsqu’elle sera malade au lit, elle appellera la domestique à son chevet et se fera montrer le panier et la note des dépenses. Si quelque chose dans le panier ne lui semble pas bon ou si la note lui apparaît trop élevée, elle ne manquera pas de faire à la jeune fille le juste reproche, mais avec douceur et sans lui tenir rigueur.

Les années de grande misère commencèrent en 1799, une année après que les émissaires de Napoléon eurent proclamé la République romaine. Ce fut la faim pour tous et pour la maison Taïgi, parce que les temps furent tristes pour les princes aussi ; le prince Chigi avait levé le camp et s’était réfugié à Paris. De sa nouvelle résidence, il fit savoir à Dominique qu’il n’était plus en mesure de supporter tant de domestiques, mais que lui, son fidèle serviteur, pouvait encore demeurer au palais, s’il le désirait. Il devrait cependant se contenter de sa propre nourriture, se débrouiller avec les seize écus convenus pour son salaire.

Dominique y demeure, soit pour le pain, soit pour le fricot, soit en témoignage de fidélité à son patron. Ainsi, dans ces sombres années, tout le poids de la famille retombe sur les épaules d’Anne-Marie et elle ne perd pas courage ; elle joue le rôle du père et de la mère. Elle fut contrainte, chaque jour, pendant des heures et des heures, à demeurer au milieu de la foule misérable et exaspérée des pauvres qui s’entassaient férocement, devant les boulangeries, rudoyée par l’impolitesse des soldats français.

Pour le reste de la journée et la plus grande partie de la nuit. Anne-Marie travaillait et travaillait. Elle s’est souvenue avoir appris, étant jeune, dans cet ouvroir du quartier " des Monts ", tenu par des anciennes et braves dames, certains métiers importants. Elle les reprit tous. Elle s’occupa à confectionner des chaussures avec semelles de corde de ficelle, des chemises, des vestons et des vêtements de femmes, sans toutefois négliger sa famille. Il faut dire, cependant, que ce qu’elle gagnait suffisait à peine pour répondre aux exigences des siens, apaiser leur faim.

Les travaux ingénieux et soignés qu’elle exécutait, elle les fit apprécier par les soeurs des monastères Saints-Dominique-et-Sixte. Les soeurs la firent connaître à Maria Luisa, ex-reine d’Etrurie et duchesse de Lucques, qui, extasiée devant les vertus d’Anne-Marie, profondément frappée par ses dons exceptionnels, entra en relation avec elle. Elles se lièrent d’une amitié si profonde qu’elle, l’aristocrate, et Anne-Marie, la fille du peuple, uniront leurs efforts. Anne-Marie reçut plusieurs petits cadeaux pour ses enfants. Elle lui fixa une allocation mensuelle de cinq écus pour que, dans la maison Taïgi, une lampe brûlât à perpétuité, devant l’image de la Vierge.

Cette fois, Anne-Marie accepta l’offrande parce qu’elle lui donnait l’eau à la bouche. Mais ni avant, ni après, elle ne demanda une aide quelconque ; elle se contentait des secours qui lui venaient spontanément, comme envoyés par la Providence, des secours modestes. Si les secours avaient été trop importants, si elle avait voulu en profiter moindrement, elle serait devenue riche et jugeait bon de les refuser. Ainsi, lorsqu’elle refusa les faveurs du cardinal Pedicini qui désirait la recevoir avec toute sa famille dans son palais, avec l’assurance d’avantages inimaginables qui en auraient résulté ; comme elle refusa également, la possibilité d’établir son mari et les siens, tout prés de la même ex-reine d’Etrurie.

C’est elle qui, au contraire, reçut un tas de gens dans sa maison. Elle reçut d’abord sa maman et, quelques années après, en 1835, l’entière famille de sa fille Sophia. Elle accueillit aussi, entre autres, ce bon Dom Rafaele Natali, affligé, doyen du collège des chapelains pontificaux, qui fut son confident sincère, tant qu’elle vécut. Il en pénétra les secrets du coeur à un point tel que s’il n’avait pas été l’hôte agréé chez les Taïgi, nous ignorerions aujourd’hui bien des traits de la merveilleuse élévation de cette femme.

Au palais Chigi, au " Corso ", naquirent tous les enfants de Maria et de Dominique. Il est vrai que Maria-Seraphina, Louis et Louise, étaient morts rapidement, encore bébés. Toutefois, les quatre adolescents, Camille, Alexandre, Sophie et Mariuccia, sans compter les parents et pour plusieurs années, la grand’maman Santa, formaient une famille un peu trop nombreuse pour ne pas se sentir comprimée dans ces deux pièces. L’heure vint, en effet, de l’inévitable décision : renoncer aux faveurs du prince qui avait concédé ce logis gratuitement, et affronter de nouveaux engagements de location pour une demeure qui permettait, pour le moins, de respirer.

Ils la trouvèrent d’abord sur la rue " del Giardino ", au numéro 195. Mais en 1827, les Taïgi retournèrent habiter au " Corso ", juste en face du palais Chigi, dans une maison démolie par la suite, sise exactement sur le terrain où surgit aujourd’hui la " Rinascente ". C’était un petit appartement très peu éclairé, très peu aéré. Si déjà, au palais Chigi, les fenêtres d’Anne-Marie avaient regard sur la venelle du " Sdrucciolo ", dans cette maison, les fenêtres s’ouvrent à l’arrière, donnent sur la ruelle " Cacciabobe ".

En 1828, les Taïgi déménagèrent de là pour affronter une période pénible de déplacements : trois fois, en trois mois. Ils passèrent d’un appartement aux Anges-Gardiens, dans une maison prés de l’église Saint-Nicolas " in Arcione " où aujourd’hui débouche un tunnel sur la " via del Tritone " ; et enfin, au palais Fiorelli, sur la " via del Burro ", face à l’église Saint-Ignace. Mais ils durent quitter de nouveau parce que, comme je l’ai déjà mentionné, une autre famille s’ajouta à celle des Taïgi, celle de Sophie, devenue veuve avec cinq enfants.

La nouvelle famille trouva logement au numéro 262 du palais " Righetti ", qui ne fait qu’un, aujourd’hui, avec le palais " Odescalchi ", face à l’église de Sainte-Marie " in via Lata ". C’est dans cette maison que mourra Anne-Marie Taïgi, en 1837.

Anne-Marie allaita elle-même tous ses enfants, après les avoir fait baptiser dans les vingt-quatre heures qui suivirent leur naissance. Elle les fit confirmer en leur temps, même avant la septième année, pour ceux qui étaient en danger de mort.

Elle les instruisait tous, pratiquement seule, leur enseignait la doctrine chrétienne. Elle les confiait à quelqu’un d’autre, le dimanche seulement ; les garçons à l’église paroissiale, les filles aux religieuses.

Vers l’âge de douze, treize ans, comme il était d’usage alors elle les mena, l’un après l’autre, à la première communion, et s’appliqua à les faire grandir dans l’amour de Dieu et du prochain. Elle accompagnait souvent ses filles dans les hôpitaux, pour qu’elles puissent exercer leur piété envers les malades. Elle veilla avec soin, avec grand souci, sur l’innocence de ses enfants. Elle les préserva de l’esprit mondain, centrant son action sur une devise populaire : " L’oisiveté est la mère de tous les vices ". Si bien que sa fille Mariuccia dira : " nous étions toujours occupés à quelque chose ".

Anne-Marie fit donner à tous les quatre un certain degré d’instruction. Mais comme elle n’eut pas d’ambition pour elle-même, elle n’en nourrit pas non plus pour ses enfants.

Elle qui, par ses relations en haut lieu, auprès de familles cossues qui auraient pu installer facilement les garçons dans des postes lucratifs et honorifiques, au moment où ils atteignaient l’âge de gagner leur pain à la sueur de leur front, leur choisit des patrons qui leur convenaient ; plaça le premier dans une boutique de barbier de la place " delle Carrete ai Monti ", et fit apprendre au second le métier de chapelier, chez un certain Salandi, au " Monte Citorio ". Elle continua à les accompagner dans leur cheminement, à veiller sur leur conduite morale, la préparation de leur avenir, leur initiation à l’épargne. Quand ils se marièrent, non parce qu’elle les perdit de l’oeil, les deux fils et leurs épouses vinrent toujours à elle pour entendre ses conseils sereins, sur l’éducation de la famille.

Puis Camille fut frappé par la tuberculose ; la maladie fut inexorablement rapide. Dans ces jours, Anne-Marie était encore malade au lit. Elle se fit toutefois porter en cabriolet à la maison de son fils. Quand la bru la vit arriver, elle exulta, car elle était convaincue que Camille serait guéri ; la prédiction semblait sur les lèvres de la belle-mère. Il n’en fut pas ainsi : souriante, Anne-Marie s’approcha de son fils, le baisa et lui dit : " Allons, demeure dans la joie ; une place au ciel est déjà préparée pour toi. Tu pars avant, mais nous nous reverrons bientôt, en paradis ".

Mariuccia, la plus jeune, adolescente quelque peu vaniteuse, travaillait tous les jours dans le but de se procurer quelque vêtement élégant. Rien de mal, cela ne l’empêcha pas, par la suite, de demeurer célibataire, de devenir une infatigable soeur de Saint-Vincent-de-Paul.

Mais ce fut Sophie, la pièce maîtresse d’Anne-Marie. Comme sa mère, elle étudia chez les " Pieuses Maîtresses ", jusqu’à l’âge de quatorze ans. De quatorze à dix-sept ans, elle fréquenta les écoles de " San Dionisio ". De là, elle se rend travailler dans une boutique de chaussettes, dans la venelle " Cacciabove ". C’est elle qui fut la plus près de la maman ; elle partageait ses prières, ses sacrifices, ses vicissitudes ; elle modela son âme sur la sienne.

Elle épousa Paolo Micali, mantouan, de moeurs correctes et de condition modeste, à qui elle donna six enfants. Puis ce fut la mort subite du mari. Les bras grands ouverts de la maman Anne-Marie se fermèrent sur la fille éprouvée, sur l’épouse éplorée.

" Elle m’embrassa avec le coeur d’une vraie mère, calma par dessus tout ma douleur, adoucit mon épreuve en m’exhortant à la foi, à la confiance en Dieu qui avait tout prévu, qui exprimait sa volonté ".

Et quand Anne-Marie deviendra gravement malade, sentant sa fin prochaine, encore une fois, elle s’adressera à sa fille chérie, pour la rassurer : " C’est ma dernière maladie ; j’en mourrai. Mais ne crains rien parce que je penserai à tous les tiens. Même quand je ne serai plus là, vous serez toujours consolés et préservés ". Et il en fut ainsi.

Derrière l’histoire

Dans le silence terrorisé de la ville, un bruit sourd de tambours. Puis, le long piétinement d’une marche qui se déroule dans les rues désertes, le piétinement sourd d’artilleries sur les pavés disjoints. Quelques regards furtifs au travers des volets à peine ouverts. Un grincement de portes cochères qui se barricadent.

On en est au 2 février 1808. Les troupes du général Miollis occupent Rome et se dirigent vers le Château Saint-Ange. Les aigles de Napoléon montent sur la construction massive, pour pointer leurs becs vers la coupole de Saint-Pierre. Une colonne d’artillerie rejoint le Quirinal et rabat les bouches de ses canons contre le portail du palais papal.

C’est le début de l’acte final, un acte qui se veut décisif, qui tend à vaincre la résistance de Pie VII, à réduire le dernier fragment de terre italienne qui échappe encore à l’ombre du drapeau impérial, sous le joug de l’invincible usurpateur. Toutes les autres provinces d’Italie ont cédé depuis. Les différentes cartes de la mosaïque politique de la péninsule se sont, en même temps, colorées de bleu, blanc, rouge, au son de la " Marseillaise ". Seul le pape continue à tenir ferme, repoussant avec grande dignité les brutales prétentions de Bonaparte.

Jamais les aigles hissés autour de l’ange du tombeau d’Hadrien, pas même les bouches des canons pointés sur le Quirinal, n’ébranlent la fermeté de Pie VII.

Dans les jours qui suivent, les cardinaux sont arrachés, un à un, au pontife et aux proscrits de Rome ; leurs revenus sont confisqués. Seul, le cardinal Pacca, secrétaire d’état, est restitué, une seconde fois, de la prison au pape. Mais Napoléon se reprend vite de cette générosité, en disposant de tous les évêques qui lui refusent un serment illicite, avec l’annexion totale des états Pontificaux à l’empire français, avec cette déclaration que Rome est maintenant " ville impériale et libre ".

Le 10 juin 1809, Pie VII promulgue, à ce sujet, la bulle d’excommunication contre les envahisseurs de la souveraineté pontificale. Il déclare nulle et sans valeur la volonté tyrannique, frappe Napoléon Bonaparte d’anathème.

À Rome, la nouvelle explose comme une bombe, plus puissante que celle de l’artillerie de l’usurpateur. Et pendant que déjà, souffle par les rues, le premier vent précurseur de révolte, des messagers volent rapidement vers le Danube, pour informer l’empereur engagé au combat dans ces contrées, et lui demander des renforts d’urgence.

" Je reçois, en ce moment, écrit Napoléon à Joachim Murât, le 20 juin 1809, la nouvelle que le pape nous a tous excommuniés. C’est une excommunication qu’il a portée contre lui-même. Désormais, plus d’égards ! Le pape est un fou furieux qu’il faut renfermer. Faites arrêter le cardinal Pacca et les autres intimes du pape ".

À peine eut-il reçu ce message de Naples, Joachim Murât envoya des renforts au général Miollis. Fort de ces troupes nouvelles, le général se crut de taille pour faire face à la situation, exécuter les ordres.

Aux premières lueurs de l’aube, le 6 juillet 1809, une bande d’énergumènes soudoyés, obéissant aux ordres d’un général et d’un colonel français, forcent le portail du Quirinal, font irruption dans les escaliers et les corridors, pénètrent dans les appartements pontificaux, arrachent le pontife de son lit, le déclarent arrêté au nom de Napoléon. Ils le traînent à l’extérieur, en terre française.

Ce n’est que la première étape du long exil du malheureux pontife. Vieilli et malade, il est reconduit, quelque temps après, en Italie, et relégué à Savone. Il reviendra en France, à l’improviste, en juin 1812. Il était dès lors à bout de forces, et le voyage, par des chemins impraticables, le conduisit au bord de la tombe. Au passage du Mont-Ceny, les médecins le déclarent à l’article de la mort. Il reçoit le Saint-Viatique et l’Extrême-Onction. Il pourra toutefois atteindre Fontainebleau. Le repos et sa force d’acier lui permettent de survivre, de porter le poids de toutes sortes de persécutions imprégnées de violence.

Entre-temps, cependant, l’astre de Napoléon commence sa fatale parabole déclinante. Et quand " l’invincible " est contrait de rendre la couronne qu’il s’était posée lui-même sur la tête, de ses propres mains, quand le dominateur du monde est forcé de fixer la proue vers les quelques kilomètres carrés de l’île d’Elbe, Pie VII reconquit la liberté et rentra dans Rome.

Tous les habitants sont dans la rue, ce 24 mai 1814, très émue, la foule porte la Souverain Pontife en triomphe, tout le long du parcours, jusqu’à Saint-Pierre, au Quirinal. Parmi la foule, incroyablement dense, une petite femme du peuple, vêtue d’un manteau blanc, un mouchoir blanc au cou, une coiffe blanche sur la tête, une coiffe ample qui descend très bas, jusqu’aux pieds, qui recouvre des vêtements de toile sombre, agite les mains au passage du cortège papal, les agite joyeusement, pleurant de bonheur. Et quand sous l’étincellement de milliers de vêtements sacrés, elle aperçoit le vénérable Pontife, elle se prosterne sous sa bénédiction pour se relever et crier : " Jésus-Christ est entré dans Jérusalem ". Cette petite dame était Anne-Marie Taïgi.

A part le dernier épisode que nous venons de citer, les événements historiques ont été relatés de façon très sommaire, apprêtés par une école quelconque. Ces événements ont été assaisonnés d’ingrédients aptes à en faire ressortir les diverses perspectives, encadrés dans le vaste tableau des causes et des effets politiques, sur un fond de situations sociales particulières, dans les limites d’intérêts économiques spécifiques, sur les flots d’enjeux militaires, à travers de nombreux filets d’intrigues diplomatiques.

Aucun texte ne rapporte quoi que ce soit, au sujet de cette humble femme nommée Anne-Marie Taïgi, femme du peuple ; l’histoire officielle la néglige, l’ignore. Pourtant, son action, s’il nous était donné de scruter le livre secret des desseins de Dieu, nous apparaîtrait d’une importance qui surpasse en influence et de beaucoup, les facteurs politiques et militaires qui ont joué dans la chute de Napoléon.

Cette humble maman romaine que le ciel avait gratifiée du don prodigieux du soleil mystique et des voix célestes, avait, durant toutes les années où Pie VII avait souffert l’exil et la détention, engagé chacune des ressources de son âme pour obtenir de Dieu la libération du pontife et son triomphe sur l’usurpateur.

Ce furent des années d’apostolat ardent, tissées d’amour et de martyre, où les prières les plus ferventes s’allièrent aux jeûnes les plus rigoureux, aux pénitences les plus sévères. Chaque jour, elle allait visiter les églises les plus éloignées de Rome, s’y rendait pieds-nus, peu importe la distance à parcourir. Prostrée devant le tabernacle, elle offrait toutes ses souffrances pour la paix et la liberté de l’Eglise, pour le retour du vicaire du Christ à son siège romain. Dans ces églises, elle avait connu ses entretiens les plus intimes avec le ciel.

Un jour qu’elle demandait à son époux céleste la signification de cette terrible permission par laquelle Napoléon Bonaparte avait pu s’emparer, par des tueries et des ruines, d’un continent tout entier, porter atteinte de façon barbare, à tout droit humain et divin, l’Epoux répondit : " A cette fin, j’ai mandaté Napoléon. Il était le ministre de mes fureurs ; il devait punir les iniquités des impies, humilier les orgueilleux. Un impie a détruit d’autres impies ".

Bien rapidement, alors, Anne-Marie saisit le sens profond et terrible de ces guerres déchaînées à travers toute l’Europe, là ou des trônes étaient en train de tomber. L’anéantissement des méchants entraînait inévitablement le sacrifice de plusieurs innocents, la souffrance de peuples entiers, la persécution de l’église et de son chef. Convaincue qu’elle était, Anne-Marie savait qu’un amour intense aurait pu apaiser la justice suprême, plonger l’humanité dans l’océan de la miséricorde divine ; elle avait offert toute sa vie en holocauste, pour payer, elle, la pauvre petite dame du peuple, les délits des impies orgueilleux. Par ses prières et ses larmes, par ses mortifications et ses pénitences, par son irrésistible charité, elle voulait obtenir le pardon du ciel pour tous ses frères et sœurs de la terre.

La voix de son céleste époux lui fit savoir que tout son amour, toutes ses souffrances, n’avaient pas été inutiles ; il lui précisa le jour exact où Pie VII serait ramené à Rome et célébrerait sa messe pontificale à Saint-Pierre.

Elle annonça d’avance cet événement, dans le détail, et, cette fois encore, les faits en donnèrent la confirmation.

Anna-Maria, enfant, était montée de Sienne à Rome, comme nous le savons déjà. C’était le lendemain de l’élection de Pie VI au souverain pontificat. Elle verra depuis lors, se succéder, sur le siège de Pierre, quatre papes : Pie VII, Léon XII, Pie VIII, Grégoire XVI. Au delà de la personnalité de chacun, elle reconnaîtra " le doux Christ sur la terre ". Elle en parlera toujours avec le plus vénérable respect. Elle incitera tout le monde à la vénération du chef visible de l’église, s’agenouillera sur son passage, comme elle le faisait devant Jésus-Christ, présent dans le Très Saint Sacrement.

Elle eut des relations particulières et diverses avec les différents souverains pontifes. Il s’agit de rapports très étroits, maintenus par personne interposée, même si elle pouvait obtenir audience à n’importe quel moment, étant donnée sa réputation de sainteté. Grâce à ses relations avec des personnages de haute autorité de la curie romaine, consciente comme elle l’était de la haute dignité, de la majesté suprême des pontifes, consciente aussi de sa petitesse de femme de maison, jamais elle ne demandera autant, se contentant de les vénérer de loin, de prier pour eux et pour leur façon d’agir.

Pie VII avait entendu parler d’Anne-Marie Taïgi avant même d’être envoyé en exil. Évidemment, il avait une opinion élogieuse de cette exceptionnelle femme du peuple. En 1809, il avait accordé une indulgence spéciale pour une prière composée par elle. Toutefois, ce ne fut qu’après son retour à Rome, que les rapports avec elle devinrent plus étroits.

La maison Taïgi était, en ce temps, fréquentée par Mgr Carlo Pedicini qui était lié d’amitié avec le pontife. Un bruit malveillant avait, cependant, frappé l’oreille du prélat ; il était lancé contre la Taïgi, par une de ces commères habituelles du voisinage. Le commérage fut immédiatement classé par Monseigneur ; il y voyait une très vulgaire calomnie. Néanmoins, puisque les bavardages allaient bon train, il dut, en conscience, se demander s’il devait, oui ou non, continuer à fréquenter cette maison. Dans le doute, un bon jour, il s’ouvrit à Pie VII. Ce dernier, avec un large sourire, lui dit " Continuez à y aller, Monseigneur ; la Taïgi, je la connais bien, même si je ne l’ai jamais vue en personne. J’aurais même le désir de la faire venir jusqu’ici ; je m’en suis abstenu pour ne pas servir d’autres appâts aux commérages déjà nombreux. Toutefois, dites-lui qu’elle m’écrive, de grâce ".

Après que Monseigneur Pedicini lui en eut fait rapport, le désir du pontife sera exaucé. Elle rédigera une lettre par obéissance et seulement par obéissance. Elle exposa au pape, " l’état entier de son âme d’enfant ".

Ce fut une lettre qui plut beaucoup au vénérable pontife : " Tout est vrai, tout est vrai ", répétait-il avec un joyeux étonnement. Depuis ce jour, toutes les fois que Mgr Pedicini revenait de ses visites à Anne-Marie Taïgi, le pape voulut qu’il lui rapportât toutes les nouvelles qu’il savait. Et chaque fois que Monseigneur s’apprêtait à retourner chez elle, le pape lui envoyait une bénédiction particulière, l’invitait à prier à ses intentions.

Le soir du 16 juillet 1823, le pape, alors âgé de 80 ans, tenta de se lever d’une chaise à bras, tomba lourdement par terre et se brisa le col du fémur. Ce fut le début de sa dernière maladie. Le grand âge fit le reste, par la suite.

Anne-Marie continua quand même de supplier le ciel de conserver à l’église ce pape héroïque. Elle savait déjà, par son soleil et les voix célestes, que, désormais, la fin était proche. C’est elle qui, dans les derniers moments de la vie du pontife, demanda que lui furent administrés d’urgence, avant qu’il ne soit trop tard, les derniers sacrements.

A Pie VII, succéda le cardinal Délia Genga qui prit le nom de Léon XII et voulut immédiatement à ses côtés, comme conseiller, Mgr Vincent-Marie Strambi, évêque de Macerata, passioniste de sainte réputation.

Mgr Strambi connaissait bien Anne-Marie Taïgi pour en avoir été, quelques années auparavant, et pour un certain temps, le directeur spirituel. Appelé par le pape dans le but de l’assister de ses conseils lumineux, sur les questions les plus difficiles du gouvernement de l’Eglise, il aura recours aux dons surnaturels, aux lumières divines, dont était comblée Anne-Marie. Il bénéficia à maintes reprises de ses conseils.

Il agissait ainsi, tous les soirs, sous le sceau du secret. Il communiquait les problèmes les plus importants à Mgr Natali pour qu’il les transmette à Anne-Marie Taïgi dont il visitait souvent la famille. " Puis, aveuglément, dira Mgr Natali, je recueillais les conseils d’Anne-Marie, pour en donner la réponse au Saint-Père. Il en fut toujours ainsi, tant qu’il vécut. Les conseils de la Taïgi revêtaient pour lui, un caractère d’une prudence et d’une sagesse telles qu’ils furent toujours exécutés ponctuellement par le Saint-Père ".

Il n’était pas question, pour Mgr Strambi, de faire passer ces conseils avec les siens. Nullement, en effet ! Il spécifiait chaque fois, au pontife, que sur telle ou telle affaire importante de l’Eglise, Anne-Marie pensait ceci ou cela. Le pape se montra obligeant, dans sa reconnaissance envers cette femme extraordinaire du peuple. Un jour qu’elle fut atteinte à une jambe, il envoya chez elle son chirurgien particulier, Todini, pour lui transmettre ses nouvelles, lui offrir les soins qui lui étaient nécessaires.

Après trois mois à peine de règne, Léon XII fut terrassé par une violente maladie. Mgr Strambi, devant le verdict funeste des médecins, envoya quelqu’un chez Anne-Marie pour lui demander de prier, de prier beaucoup, pour que fut évitée à l’Eglise cette mort prématurée. Quand Mgr Natali, porteur du message, parla à Anne-Marie Taïgi, elle s’affairait au milieu des marmites, dans la cuisine. Elle consulta son soleil infaillible et dit en souriant : " Non, non, il ne mourra pas. Il lui reste encore du temps ; il a encore à se fatiguer pour l’Église. Dites plutôt à Monseigneur qu’il se prépare lui-même, à la mort ".

Le lendemain, les médecins laissèrent le pape à l’agonie. Néanmoins, Mgr Natali connaissant la réponse d’Anne-Marie, entra dans la chambre à coucher de Léon XII, sur la pointe des pieds, s’approcha à son chevet et lui dit avec grande simplicité, de ne pas craindre ; quelqu’un, vous voyant mourant, a offert sa vie pour la vôtre.

Dès ce moment, l’état de santé du pape s’améliora de façon inespérée et son saint évêque, son conseiller, commença à souffrir, de façon inexplicable. De sorte que, après quelques jours, quand Léon XII put se dire complètement rétabli, saint Vincent-Marie Strambi expira.

Les rapports entre Léon XII et l’humble femme du monde, ne s’interrompirent pas pour autant. Mgr Natali fut nommé secrétaire du Maitre-Camérier de Sa Sainteté, et dans toutes ses tâches, le vieux prêtre continua de recevoir les confidences, les conseils d’Anne-Marie Taïgi. Il lui confiait entre autre, chaque soir, la liste des personnes qui avaient demandé audience auprès du pape, pour le lendemain. Elle interpellait, comme toujours, son soleil mystique, indiquait chaque fois les noms des personnages tout à fait inconnus pour elle, qu’il pourrait paisiblement laisser passer, pendant que d’autres, au contraire, devraient être accueillis avec prudence ; que d’autres encore, devraient être écartés jusqu’à ce qu’on ait des informations précises, des garanties sûres de leur pays d’origine. " Ainsi, une tragédie conjurée fut évitée, comme en témoignera Mgr Natali, quand arriva un secrétaire mal intentionné, que je retins à l’écart ".

Un matin, alors que l’aube commençait à blanchir, Anne-Marie entendit la voix de son Époux céleste ; il lui ordonnait de façon impérieuse : " Lève-toi et prie pour mon Vicaire qui est sur le point de paraître devant mon tribunal, pour la reddition de ses comptes ".

Le pape était malade depuis quelque temps, et on le savait. Mais, personne ne soupçonnait l’issue mortelle. On disait, au contraire, et la chose était connue dans la maison des Taïgi, que le malaise était mineur. Nonobstant tout cela, Anne-Marie se leva de son lit et pria pour un passage heureux du pape, du temps à l’éternité. Le jour suivant, Mgr Natali annonçait à la famille Taïgi, la nouvelle de la mort du pape.

Pie VIII succéda à Léon XII et eut, comme son prédécesseur, des contacts indirects avec Anne-Marie, pendant les vingt mois de son pontificat. Entre-temps, d’autres eurent recours à Anne-Marie, Mgr Pedicini, pour ne nommer que celui-là, parce qu’il était ami de la famille Taïgi. Il avait été créé cardinal et résidait au Quirinal, à titre de secrétaire des mémoires de Sa Sainteté.

Quand le pape Pie VIII tomba malade, ses souffrances eurent des hauts et des bas qui tinrent en alarme ceux qui l’entouraient. On allait des espoirs les plus grands aux prévisions les plus déconcertantes, jusqu’au jour où le pape parut s’acheminer définitivement vers la guérison. Ce fut un grand moment de soulagement, au Quirinal.

Le cardinal Pedicini fit immédiatement connaître la nouvelle à Mgr Natali pour qu’il en informe Anne-Marie Taïgi. Mais Mgr Natali parut inexplicablement abattu ; ce qui inquiétait le cardinal : " Qu’est-ce qu’il y a ? lui demande-t-il. Vous a-t-elle dit quelque chose de différent " ? " Malheureusement oui, Eminence ", répondit Mgr Natali.

Et la mort du pape fut annoncée au monde, trois jours après, soit en février 1829.

Quelques mois avant la mort de Pie VIII, Anne-Marie avait appris et prédit, que tel cardinal lui succéderait sur le siège de pierre. Un jour, elle s’est rendue, avec son ami prêtre, Raphaël Natali, à Saint-Paul-Hors-les-murs, pour visiter le Saint-Crucifix.

En arrivant, elle s’agenouilla sur l’unique prie-dieu qui se trouvait dans l’église. Et, comme cela lui arrivait souvent, elle tomba en extase. Le cardinal Mauro Cappellari, de l’Ordre des Camaldules, entra au même moment. Mgr Natali l’apercevant, poussa du coude Anne-Marie qui se leva pour céder le prie-dieu à Son Eminence. La femme ne s’aperçut de rien. Le cardinal fit signe à Mgr Natali de ne pas s’en préoccuper. Il s’approcha de la balustrade et s’agenouilla. Quand Anne-Marie se réveilla de son sommeil extatique, elle fixa son regard sur le cardinal.

Sur le chemin du retour, c’est Mgr Natali qui, maintenant, raconte textuellement : " Je l’interrogeai sur le regard fixé pendant quelque temps sur le cardinal. Comme par obéissance, elle devait porter tout à ma connaissance. Elle me dit simplement : " c’est le futur pape ".

Quelques mois s’écoulèrent avant que le pape Pie VIII mourut. Le 14 décembre 1830, s’ouvrit le conclave qui s’annonçait houleux. Deux autres mois et plus s’écoulèrent avant que survienne un accord dans l’élection du nouveau pape, une élection qui prit fin le 2 février 1831. Le nouveau pape fut bel et bien le camaldule Mauro Cappellari. Il s’apprêtait à prendre en mains les destinées de l’Eglise, au cours d’une période vraiment dramatique. Il choisit de s’appeler Grégoire XVI.

Ce fut l’époque où deux sociétés secrètes déployèrent toutes leurs forces, comme s’il y avait eu émulation entre elles, pour nuire le plus possible à l’autorité du pape, essence même de l’église catholique.

La première et la plus ancienne de ces sociétés, lit-on, dans une page d’histoire, était formée de plusieurs autres sociétés subalternes, lesquelles, sous le voile des Francs-Maçons, s’occupaient plus ou moins directement de religion, de politique, de morale, s’attaquaient aux croyances sociales. L’autre, formait, sous le nom de " carbonari ", la milice armée, prête à combattre l’autorité publique à la moindre occasion. Préoccupée de morale, elle s’employait à troubler les esprits ; des moyens matériels étaient prévus dans le but de renverser les institutions. Dans les orgies secrètes de l’une, les adeptes d’une certaine philosophie prononçaient des oracles et promettaient la régénération des peuples. Les rencontres de l’autre étaient l’occasion d’orchestrer, d’aiguiser le poignard des conjurés rassemblés, dans le but d’assurer une action la plus efficace possible dans l’oeuvre de destruction.

En quelques années, l’incendie de la révolution se répandit de plus en plus, dans les différentes contrées de l’Etat romain, même si Rome en fut toujours épargnée. Il n’est pas certain, feuilletant les pages de notre histoire ou d’autres écrits historiques, que nous trouverions l’explication d’un fait si singulier. Il faudrait peut-être, pour connaître toute la vérité, fouiller le grand livre des desseins de Dieu.

Toutefois, certains témoignages nous permettent d’entrevoir un peu de lumière à travers les ténèbres, et cette lumière provient d’Anne-Marie Taïgi.

" Armée de l’esprit de foi, écrivit Mgr Natali, elle n’hésita pas à s’offrir comme victime à son Seigneur, pour la tranquillité et la paix de l’église, à ce sujet, le Seigneur lui dit que, si elle s’offrait en satisfaction de sa divine justice, il libérerait Rome de la turbulence et des pièges des sectaires. Elle accepta bien volontiers la dite condition par laquelle Rome demeurerait toujours libre, de son vivant, des embûches et des révolutions des ennemis.

Le Père Philippe, carme, ajoute : " Elle fit tant et tant, elle pria tellement, accomplit si fidèlement ses promesses à l’égard de son céleste époux, que dans Rome, les plans sanguinaires et cruels des impies ne pouvaient s’enraciner ; elle en obtenait la confirmation renouvelée et répétée. Elle ne devait pas s’épouvanter à la vue des complots machinés dont elle était témoin. Les plans des susdits scélérats mis au point, ils verraient tous les fils de leurs complots tranchés d’un seul coup, comme il en a toujours été pour cette ville. Voilà pourquoi, je dis ailleurs, jusqu’à quel point Rome est redevable à la servante de Dieu ".

Jusqu’à la fin de sa vie, c’est un fait, si les intrigues des révolutionnaires en venaient à exploser, à introduire la confusion dans Rome, elles étaient immédiatement et régulièrement maîtrisées. L’histoire ne nous dit pas le pourquoi ; mais derrière l’histoire, on trouve la calvaire d’une frêle femme du peuple qui prit sur ses faibles épaules, les peines, les désolations, les croix. Cette humble femme s’offrit en victime à Dieu, pour la paix de Rome. Et Dieu sauva Rome du fléau des révoltes.

L’ange de Rome

La voix sortit de dessous un lugubre capuchon : " Voici mon ange ". C’était une voix joyeuse, remplie d’espérance, comme elle s’était fait entendre, dans cette salle de douleurs et de honte, tant d’autres dimanches.

La femme était étendue sur un petit lit immonde, à l’hôpital Saint-Jacques-des-Incurables, de Rome. Le capuchon noir en cachait la laideur du visage ; un visage complètement ravagé, méconnaissable. Tout était rongé, défait, déchiré par la maladie. La bouche seule se dessinait encore, si bouche il y avait. Quel trou ébréché dans lequel on introduisait de temps en temps, quelque breuvage !

On n’osait plus, depuis longtemps, s’approcher de Santa, la contagieuse ; elle occupait ce coin de l’hôpital, réservé aux malades réduits à l’état le plus répugnant. Personne, sauf une petite dame du peuple, venait à son chevet, certains dimanches, accompagnée d’une fillette.

Chaque fois, Santa entendait la voix de loin, et chaque fois, son coeur tressaillait dans sa poitrine, en des battements de joie qui lui donnaient l’impression d’être en paradis. " Voici mon ange ", disait-elle, et l’ange s’assoyait tout prés du lit. Il lui demandait avec douceur, comment elle se portait. Et si elle avait besoin de quelque chose, de n’importe quoi, elle le lui procurait ; elle était là pour cela, pour l’aider de toute manière et en toute nécessité. Mais Santa, la contagieuse, répondait toujours par un non, qu’elle n’avait maintenant plus besoin de rien. Tout ce qu’elle désirait, elle l’avait déjà reçu au moment où elle, son ange, avait franchi le seuil de sa chambre, pour lui livrer une parole d’amour.

Le dimanche, Anne-Marie Taïgi accompagnait une de ses filles, ou Sophia ou Mariuccia ; elles se rendaient à l’hôpital de Saint-Jean-de-Latran ou à celui de la Trinité-des-Pèlerins, ou justement à celui de Saint-Jacques-des-Incurables, pour y exercer des oeuvres de miséricorde.

Un jour, près de Santa, il parut que Sophia allait s’évanouir en raison de la puanteur que la malade exhalait. Quand la mère et la fille furent à l’extérieur, cette dernière s’en plaignit. " Ma fille, lui répondit la mère, si tu pouvais sentir l’odeur de son âme ! Il est certain que cette dernière passera immédiatement du lit au paradis ".

S’il est vrai que l’amour d’une épouse, d’une mère, doit d’abord se déverser sur l’homme que la Providence lui a donné comme compagnon de vie, et sur les créatures qui sont nées de cette union, il est autrement vrai que son affection et sa tendresse ne doivent s’épuiser, comme cela arrive trop souvent, entre les quatre murs de la demeure familiale, se transformer en froideur et en égoïsme pour les gens de l’extérieur.

Si une leçon jaillit vraiment de la vie d’Anne-Marie Taïgi, pour toutes les épouses et pour toutes les mères, c’est bien celle-ci : ne rien enlever, absolument rien, à la chaleur du foyer domestique, et projeter la flamme d’amour pour ses frères et soeurs de l’entourage, connus ou inconnus, afin qu’ils puissent être tous et toutes, de vrais enfants de Dieu. Anne-Marie Taïgi, épouse dévote et mère très aimante, ne manqua jamais à ses vieux parents : on garda à la maison maman Santa jusqu’à sa mort, on soigna le vieux papa jusqu’à la dernière minute, alors qu’il était horriblement atteint de la lèpre.

En plus du mari, des fils, des gendres, l’amour d’Anne-Marie se répandit dans un vaste rayon ; il atteignit les sentiers les plus profonds et les plus obscurs de la pauvre société qui vivait alentour. Elle éprouva, plus d’une fois, L’amère saveur de la misère. La souffrance des autres fut à chaque instant, sa propre souffrance. Sa compassion pour les besogneux, sa peine pour les souffrants, dépassaient toujours le sentiment naturel de pitié, de commisération, que chaque être éprouve pour les malheureux du monde. Pour tout et pour tous, sa charité fut patiente, tendre, douce, empressée, toujours prête ; une charité, en d’autres termes, exercée à un degré héroïque, dans des situations souvent impossibles.

Quand, avec les troupes d’invasion du général Miollis, une épouvantable famine s’appesantit sur Rome, elle qui, avec son mari, ne savait pas comment nourrir leur famille y parvint et réussit même à en secourir bien d’autres qui étaient encore plus tourmentées. Nombreuses furent les familles qui survécurent, en ces années, grâce à son aide, le " miracle " de leur survivance.

Quand elle n’avait plus un sou en poche, ni de pain à offrir, à qui lui en demandait, elle laissait de côté toute considération, et allait personnellement, frapper aux portes de ceux qui en avaient encore. Ce qu’elle obtenait, elle le distribuait avec justice, selon les besoins les plus pressants.

Un épisode parmi mille autres : une fois, une femme déguenillée et tout ébouriffée, les traces de la faim gravées dans le visage, serrant dans ses bras un entortillement de chiffons, une petite créature se présenta à sa porte. Anne-Marie jeta un regard aux alentours. Il n’y avait rien à manger, dans la maison. La garde-robe était aussi demeurée vide. Que faire ? Elle enleva son propre vêtement et le fit endosser à l’instant par cette pauvrette. Puis, elle la pria ainsi : " Je vous prie de revenir tous les vendredis à la même heure ". Pour elle et son enfant, il y aura bien toujours quelque chose.

Parmi les misérables, elle préférait les enfants pauvres. Jeanne Cams, sa domestique, raconte qu’un matin très froid d’hiver, sortant avec Anne-Marie de l’église de Saint-Barthélemy-des-Bergamasques, " un pauvre petit garçon passa. Il était pieds nus, déguenillé, à demi vêtu. Il tremblait de froid, dévoré par la privation de la faim. Il était, de plus, malpropre, éclaboussé de boue, et personne n’avait le goût de l’approcher. Le jeune bambin s’approcha d’Anne-Marie Taïgi et sollicita une légère aumône. C’était, pour Anne, une précieuse rencontre ; elle l’amena au foyer familial, le réchauffa, le restaura. Toute empressée, elle lui donna ensuite des vêtements ; tant bien que mal, elle lui fit mettre des bas, chausser une paire de chaussures qui appartenait à son fils. Elle veilla sur lui, l’assista avec tant de charité qu’on eut cru qu’il était le fils d’un grand seigneur. Après lui avoir enseigné les principes de la religion, lui avoir assuré le réconfort auquel fait appel une si pénible situation, elle lui donna une aumône en argent, selon ses moyens, et le laissa aller au nom de Dieu ".

De ces enfants malheureux, rencontrés dans la rue et amenés à la maison pour les nourrir et les vêtir, l’histoire d’Anne-Marie Taïgi en est remplie. Elle continuera d’agir ainsi, malgré le fait regrettable que le bambin qu’elle avait assisté, rassasié, mis à neuf, ait couru droit au ghetto, vendre l’habit à peine reçu, pour se remettre demi-nu et être de nouveau en quête d’aumônes.

La friponnerie d’un seul petit voyou ne pouvait suffire pour figer ou geler la grande affection d’Anne-Marie pour les enfants les plus malheureux et les plus tristes ; ils étaient les préférés de Jésus.

Anne-Marie aima aussi les malades ; nous le savons déjà. Une de ses pires dénigreuses tomba malade, un jour. Il s’agissait d’une commère maligne et incurable qui avait contribué, de façon obstinée, par ses médisances et ses insinuations malveillantes, à créer une atmosphère de soupçons et de troubles autour de la demeure des Taïgi. Quand Anne-Marie sut qu’elle était malade, elle oublia tout, courut à la maison de sa persécutrice, pour lui rendre les offices de la charité, tant au plan moral que physique, raconta sa fille Sophia. Elle lui fut toujours attentive, toujours disponible ; dans les visites qu’elle lui faisait, elle l’exhortait à la patience, lui apportait quelque biscuits, quelques carafes de bon vin qu’elle réservait pour les malades, quand on lui en faisait cadeau. Elle l’exhortait à la foi en Dieu ; elle y voyait un moyen excellent de supporter une maladie lente et pénible. Elle l’invitait souvent à la patience, l’invitait à la prière, à l’oraison, convaincue que le Seigneur la consolerait. De fait, la malade guérit.

À l’amour des pauvres et des malades, Anne-Marie ajouta l’amour des pécheurs, des gens qui souffrent de la pire des maladies. Elle les aima à un point tel, qu’elle leur dédia la plus grande part de ses prières les plus ardentes, ses plus dures mortifications, ses plus exténuantes pénitences, ses pèlerinages nocturnes qui s’échelonnaient sur une durée de quarante nuits consécutives, qui la conduisaient à la porte des églises où elle se prosternait et demandait à Dieu la conversion des âmes qui lui étaient chères et même de celles qu’elle ne connaissait pas, mais qui lui avaient été recommandées.

" Combien d’hommes, écrivit avec autorité le cardinal Pedicini, liés à de vieilles et scandaleuses pratiques, parvinrent à une véritable contrition et bénéficièrent des miséricordes divines, par le renoncement immédiat à leurs péchés, aux pratiques infernales d’amitiés malhonnêtes ".

Que de souffrances morales, que de souffrances physiques, n’a-t-elle pas appelées sur elle-même, de la part du Seigneur qui répondait à ses désirs en chargeant ses épaules de croix nombreuses qui procuraient le salut aux âmes en détresse, à ceux qui étaient condamnés à l’échafaud, qu’Anne-Marie considérait être les plus malheureux parmi les malheureux. De leur terrible sort, elle ne pouvait s’apaiser, compte tenu des nombreux délits qu’ils avaient commis. Pour leur conversion, elle mobilisait aussi Mgr Natali qui avait accès aux prisons, pouvait se rendre utile aux disgraciés, jusqu’au dernier moment de leur vie.

C’est dans cette lumière de vertus héroïques, qu’étaient attirés les très chers malheureux ; une lumière qui venait d’en haut. Toutes les biographies qui racontent la vie d’Anne-Marie Taïgi, soulignent son charisme prophétique. Il est certain que parmi les multiples dons qu’elle a reçus, le don de prédiction de l’avenir a joué un grand rôle. Ainsi, le Père éternel récompensait sa créature qui lui appartenait totalement. Du reste, les témoignages qui se rapportent à la vie de nombreux saints, en constituent une confirmation richement documentée. Il est certain qu’Anne-Marie fut une de ces saintes créatures que Dieu gratifia largement de ce don.

Quand Pie VIII était encore pape, Anne-Marie fit une prophétie d’un caractère dramatique formidable, qui garde aujourd’hui encore son intérêt tout à fait exceptionnel. Il s’agit d’une prophétie qui produisit alors, chez ceux qui la recueillirent, un trouble profond, un émoi intense qui continue, jusqu’à maintenant, à éveiller, en qui la redécouvre parmi les vieux documents, la même commotion et un trouble identique, parce qu’elle implique le futur de l’humanité, inséparable de l’avenir de l’Eglise, le plaçant parmi les tourments de cette lutte de l’homme qui tend, depuis son origine, à assurer le triomphe du bien sur le mal.

Riche en particularités, d’une clarté des plus évidentes, elle nous est parvenue par une déposition juridique assermentée de Monseigneur Raphaël Natalie.

Un jour de 1818, parlant des prochains fléaux de la terre, des futurs fléaux du ciel, elle précisa qu’ils pourraient, les uns et les autres, être atténués par les prières des âmes pieuses. Anne-Marie prédit que des millions d’hommes sont appelés à mourir par une main de fer, qu’un grand nombre mourront à l’occasion de guerres, de litiges, par traîtrise, et d’autre millions, par des morts imprévues. Des nations entières arriveraient ensuite à l’unité de l’Église catholique. Plusieurs turcs, païens et juifs, se convertiront, en demeurant tout confus devant les chrétiens, admirant leur ferveur et l’exactitude de leur vie. Elle me dit plusieurs fois que le Seigneur lui fit voir dans le mystérieux soleil, le triomphe et la joie universelle de la nouvelle Eglise, si grands et si surprenants, qu’elle ne pouvait pas l’expliquer.

En 1922, le lendemain de la première guerre mondiale, on publiait, selon notre jugement personnel, la plus sérieuse biographie d’Anne-Marie, conforme en tout à l’histoire, selon la critique qui en a été faite. L’auteur, le cardinal Salotti, rapporte largement cette prophétie qu’évitaient de mentionner la plupart des biographes. S’arrêtant sur la prédiction des carnages en masse, il annonce la conversion de peuples entiers, le triomphe de l’Eglise. L’auteur ajoutait : " Si on pense à la guerre mondiale qui s’est déchaînée en 1914, pour la première fois, dans l’histoire, périrent simultanément, sur divers champs de bataille, des millions et des millions d’hommes. Si on pense aux centaines de milliers tués par trahison, dans la même période. Si on pense aux tueries de la révolution bolchevique, en Russie, une révolution qui éclata sur les ruines de la même guerre. Si on pense aux luttes intestines dont les haines de partis se répandirent furieusement, souillant de sang les rues de la ville. Si on pense aux milliers et milliers de victimes emportées par les tremblements de terre de Sicile, de Calabre, de Marsica. Si on pense, enfin, à cette peste qui intervint en 1919, à la fin de la guerre cruelle ; dans l’espace de quelques mois, dans différentes parties du monde, se produisit cette hécatombe épouvantable de millions et de millions de morts, une contagion qui ne s’était jamais vue dans les siècles passés. " Si on pense, ajoutons-nous, énumérant seulement quelques autres fléaux de la terre qui suivirent l’année 1922, quand le cardinal Salotti écrivit ces lignes, il songeait aux guerres d’Afrique, à la guerre d’Espagne, au second conflit mondial, rendu plus apocalyptique par les génocides hitlériens, par les exterminations atomiques de Hieroshima et de Nagasaki, au calvaire de l’Europe de l’Est, à la révolution de Chine, à la guerre de Corée, à la guerre de l’Indo-Chine, à l’insurrection et à la répression de la Hongrie, au martyre de plusieurs peuples coloniaux, à la grande famine qui continue de ravager l’Inde et d’autres pays, aux massacres d’Algérie, jusqu’aux derniers tremblements de terre. " Si on réfléchit, dis-je, à tout cet ensemble de morts, par les guerres, les trahisons, les tremblements de terre, les contagions, concluait le cardinal Charles Safotti, on a l’impression d’être en présence de fléaux prédits par notre Bienheureuse ".

Personne ne nous en voudra d’ajouter d’autres faits, d’autres événements, si on considère la grande espérance que tout le monde met dans les conclusions du concile Vatican II, l’espérance qu’on met aussi dans la perspective du retour à l’unité de l’église, un retour qui apparaît lointain, qui n’est pas pour autant, une utopie.

Pour raconter toutes les prophéties faites et réalisées par notre protagoniste, nous aurions besoin de beaucoup plus d’espace que celui réservé à ce travail, à cette rapide narration. Elles eurent, en effet, pour objets, de nombreuses personnes de haute autorité, beaucoup de gens du peuple absolument inconnus.

Un jour de 1827, disons-nous dans le but de faire ressortir certains épisodes, Mgr Louis Lambruschini, partant dans la direction de Paris, comme nonce apostolique à la cour de France, fit demander à Anne-Marie Taïgi de le recommander vivement à Dieu, dans sa mission. Anne-Marie regarda dans son soleil céleste et lui fit savoir : " que son voyage serait heureux, son séjour à Paris, angoissant, qu’il vivrait un long et pénible martyre de l’esprit ". Et peu de temps après, se succédèrent un tant soit peu d’événements qui dominèrent dans la suite, durant la révolution imprévue de juillet 1830, et le nonce dut revenir à Rome.

Un autre jour, Anne-Marie rencontra le cardinal Mazzarini, sur la rue. Élevé depuis peu à la pourpre sacrée, il se rendait à Saint-Pierre, dans toute la splendeur de sa dignité nouvelle. " En ce jour, dans la pompe, murmura la voyante à celui qui était à ses côtés, dans un mois, la tombe ". À la fin du mois, elle assistait aux funérailles du cardinal.

Une autre fois, elle allait visiter une femme du peuple, qui avait donné naissance à une jolie petite créature. Elle la trouva très bien, mais appela toutefois, en aparté, quelques personnes présentes, et leur dit : " Vite, faites-lui donner les sacrements, la pauvre va mourir ! " Tous demeurèrent surpris et incrédules. Mais comment ! Tout allait pour le mieux ; la mère et l’enfant jouissaient d’une parfaite santé. Ils en parlèrent avec le confesseur et ce dernier fit gorge chaude sur cette prophétie. Dans la suite, " on ne sait jamais ", cette voyante les devinera toutes. On finit par lui faire apporter les derniers sacrements. Cela arriva juste à temps ; dès qu’elle les eut reçus, la jeune maman expira.

Mais la vie d’Anne-Marie Taïgi fut une suite d’épisodes semblables. Nous nous limiterons à rappeler une de ses dernières prédictions ; elle fut d’un grand intérêt pour l’histoire. Elle en fit mention, un jour, dans la maison, alors que le dialogue avait cessé. Elle avait trait aux désordres qui commençaient à exploser, un peu partout, dans les Etats romains. En cette occasion, Anne-Marie Taïgi fit remarquer que ce qui est arrivé, n’était rien en comparaison avec ce qui allait arriver, dans quelque temps. Elle ajouta que le successeur du pontife régnant, Grégoire XVI, aurait un pontificat plus violent, au milieu de tourments continuels. Elle ajouta, toutefois, que le futur pape vivrait plus longtemps et qu’à la fin, il mourrait paisiblement, à Rome, dans son lit, après un long pontificat.

Nous devons maintenant, nous rendre compte que, à l’époque où Anne-Marie prononça ces paroles, Grégoire XVI occupait depuis peu, le siège de Pierre. Quelques années plus tard, en 1837, Anne-Marie Taïgi mourrait et Grégoire XVI continua à régner jusqu’en 1846. Pie IX seul, serait appelé à lui succéder.

Tel que prédit par Anne-Marie longtemps auparavant, le règne de Pie IX se terminera en 1878, après 31 ans, 7 mois, 23 jours d’exercice de la papauté.

Anne sera, dans la suite, encore plus précise. Elle indique, en une autre occasion, au chanoine Raymond Pigliacelli, que des temps difficiles s’annoncent pour l’Eglise. A la question du prélat qui porte sur l’identité du pape qui régnera en cette période de mésaventures, Anne répond : " Le pontife qui régnera, en sera un qui n’est même pas cardinal. De plus, il ne demeure pas à Rome ".

Elle confirma, quelque temps après, ses propos, à Mgr IMatali, à qui elle avait indiqué la façon de faire face à la persécution que subirait l’église de Rome, à l’intérieur de laquelle l’iniquité serait triomphante. Dieu exigera un pontife saint, choisi selon son coeur, et à qui il communiquerait des lumières tout à fait spéciales ; que celui-ci serait élu d’une manière extraordinaire, qu’il serait assisté et protégé par Dieu, d’une façon particulière, que son nom répandu dans tout l’univers, serait applaudi par les peuples et craint par les rois. Le Turc lui-même le vénérera, demandera à le féliciter. Il fera des réformes. Il instruira le peuple, recevra des secours de toutes parts. Les impies seront écrasés et humiliés, beaucoup d’hérétiques, sous son pontificat, retourneront à l’unité de la Sainte église Catholique Romaine. Elle souligna, de nouveau, à la fin, que le futur pape était dans le moment, un simple prêtre et se trouvait dans un pays assez lointain.

C’est un fait, à l’époque où Anne-Marie annonçait à l’avance, ces événements, Dom Giovanni Mastaï Ferretti, le futur Pie IX, était au Chili, à titre d’auditeur du délégué pontifical, Mgr Giovanni Muzzi.

Les prédictions devinrent, dans la suite, plus circonstanciées. Elle déclara, conversant un jour avec le comte Broglio, secrétaire de la Légation de la Sardaigne, que " le prochain pontife effectuerait des réformes dans le but de se décharger de tant d’affaires temporelles de l’état ; il appellerait au pouvoir des séculiers qui rempliraient des charges pour que lui puisse s’occuper plus longuement des affaires spirituelles de l’Église ". Elle fit aussi savoir, par la suite, au cardinal Racanati, que le successeur de Grégoire XVI ne devait pas se déconcerter, qu’il aurait confiance en Dieu et recevrait assistance, qu’il serait aidé de l’extérieur, même en argent, de ceux en qui il ne porte pas foi, confesse le cardinal, et qu’à la fin, le pontife opérerait des miracles ".

Plusieurs années après, l’histoire devait, d’une manière ponctuelle et avec exactitude, confirmer la prédiction d’Anne-Marie Taïgi, sur la longueur exceptionnelle du pontificat de Pie IX, sur les tourments qui devaient l’agiter. Il suffit de feuilleter certains textes de l’histoire pour en trouver la documentation : rappelons l’assassinat de Pellegrino Rossi, ministre de Pie IX, jusqu’à sa fuite à Gaète ; les orgies sacrilèges des athées, les spoliations des églises et des couvents ; les meurtres des prêtres et des religieux du Transtévère, la lutte anticléricale conduite au parlement et sur la place, dans les écoles et dans la presse, jusqu’au massacre d’une troupe de canailles qui tentèrent de s’emparer de la dépouille mortelle du même Pontife, dans la nuit du 12 au 13 juillet 1881, durant sa translation au Campo Verano.

Les réformes que fit Pie IX, par la suite, pour se libérer des affaires temporelles consistaient en ceci : céder le conseil municipal à la ville de Rome, le conseil des députés à l’Etat. La vénération profonde que, d’un pôle du monde à l’autre, les peuples ont voulu manifester, était de nature à consoler le pontife, à lui faire oublier les nombreux outrages, les persécutions qui pleuvaient contre lui. Ils lui signifiaient, en même temps, leur approbation. Les Turcs appuyaient aussi son attitude ferme. Les rois de l’Europe firent preuve de respect mais exprimèrent de la crainte, une crainte qu’ils ne réussissaient pas à dissimuler ; ils dépouillèrent le pape de son pouvoir, l’église, de ses biens.

L’aide matérielle qui lui parvint de toute part, quand il fut réduit à la pauvreté, témoignait de l’affection qu’on avait pour lui. La Belgique, à elle seule, lui fit parvenir un montant de 285,000 francs, en l’espace de deux ans. En 1877, lors de la célébration de son jubilé d’or sacerdotal, lui parvinrent de partout des dons pour une valeur de 10 millions de lires. Le denier de Saint-Pierre atteint, cette année-là, un montant supérieur à 16 millions de francs. De la sainteté et des miracles de Pie IX, il reste la documentation rigoureuse des procès informatifs qui ont été confiés à la Sacrée Congrégation des Rites, pour la promotion de sa cause de béatification. Après 1878, le pontife est entré dans l’histoire pour de longues années et il demeure des traces de son passage. Sa prédiction tout à fait à point, ne pouvait qu’être confirmée par la suite. Une explication ne peut être profitable que si on s’y arrête, que si on la fait sienne. Anne-Marie Taïgi, cette humble femme du peuple, a donné la preuve que le don extraordinaire qu’elle possédait, correspondait à de prodigieuses lumières divines, venues d’en haut.

Le martyre de la renommée

Le fait, avant même d’être significatif, fut pour le moins curieux. Dans l’intention de parler des rapports spirituels qui intervinrent, durant une longue période, entre deux êtres exceptionnels qui vécurent à Rome, à la même époque, totalement voués, bien que dans des champs divers, à la gloire de Dieu, des rapports entre saint Vincent Pallotti et Anne-Marie Taïgi.

Il faut poser, au préalable, que le saint fondateur des Pallotins eut plus d’une fois recours aux conseils et à l’aide de la protagoniste de notre histoire, la sachant généreusement dotée du ciel, de dons très singuliers. En pratique, dans les moments difficiles de sa splendide mission, chaque fois que le besoin d’une intervention de la Providence divine s’imposait, devenait urgente, dom Vincenzo Pallotti qui ne connaissait pas personnellement Anne-Marie Taïgi mais avait rencontré une de ses amies et lui avait ouvert son âme. Il l’avait priée de raconter ses peines à Anne-Marie et de la charger d’intercéder pour telle ou telle grâce, en sa faveur, ou en faveur de son oeuvre.

Après chaque colloque, déclara par la suite Vincent Pallotti, j’ai régulièrement et ponctuellement " vérifié les effets salutaires " des prières de cette humble mère de famille.

Mais le fait curieux est celui-ci : Après la mort d’Anne-Marie Taïgi, le saint prêtre se rendit compte du fait que, toutes les fois qu’il s’est accordé une entrevue avec une amie d’Anne-Marie, il avait, en réalité, rencontré Anne-Marie elle-même. " Par humilité et vertu ", elle disait ne pas la connaître personnellement, cachant son identité.

Dom Vincenzo Pallotti a cité cet épisode particulier, pour mieux souligner la modestie de cette femme qui, parvenue à se trouver au centre de la vénération de personnages de très haut rang, de personnages de très grande popularité, cherchait, néanmoins, par tous les moyens, à soustraire sa personne de la pression de l’admiration.

L’estime qui l’entourait pesait lourdement sur l’âme d’Anne-Marie Taïgi, comme nous l’indiquent très bien les larmes qu’elle a versées, dans les heures de tranquillité qu’elle s’assurait, en fuyant. Elle se retirait dans sa chambrette, et là, à genoux, à travers les sanglots, elle conversait avec son époux céleste, le blâmait presque, confidentiellement, de ne pas lui vouloir plus de bien. S’il m’aimait de fait, disait-elle, il m’aurait fait marcher dans les traces des infortunés, dans la voie qu’a empruntée Jésus. Dans les moments où elle était encensée par l’exaltation, elle comparait sa vie à celle du Sauveur cruellement traîné dans l’abjection. Elle tremblait à la pensée que toutes ces louanges n’étaient autres que l’oeuvre trompeuse du démon pour l’infatuer, la séduire, la conduire à la pire des chutes. Ainsi, chaque fois qu’elle sortait de sa chambrette, elle essuyait ses larmes et portait dans son coeur le dessein le plus ardent, de s’éclipser du milieu des adulations, de disparaître, de s’évanouir dans l’oubli.

Mais, comment faire ? Depuis des années, désormais, sa maison était un véritable port de mer où arrivaient continuellement, des reines et des princes, des cardinaux et des évêques, des ambassadeurs, des généraux, des gens nobles, des gens du peuple. Tout cela ne pouvait malheureusement être tenu secret, dans un voisinage aussi bavard que médisant. Se bouchant les oreilles et se fermant les yeux, elle ne pouvait connaître le nombre de ceux qui appréciaient ses vertus. Les cardinaux Pedicini et Barberini, Cesari et Riganti, Fesch et Cristaldi, des évêques, des prélats, tels Piervisari et Ercolani, Guerrieri et Basilici, et bien d’autres, la disaient sainte, en toutes lettres, et ce, avec une parfaite conviction. Plusieurs personnages de vie sans tache, ont été proclamés bienheureux, vénérables, serviteurs de Dieu : Vincent Strambi, Gaspard del Bufalo, Menocio, Bernard Clausi, frère Félix de Monte Fiascona, frère Pétrone de Bologne, Elisabeth Canori-Mora, Vincent Pallotti. Combien l’exaltèrent et la glorifièrent en toute occasion ? Marie Louise de Bourbon et les dames de sa cour à Lucques, les nobles Bandini et Gaétani, un groupe de prêtres, de religieux de tous Ordres.

Elle ne manquait jamais d’écrire à Turin, à la comtesse Dandozeno, femme du gouverneur général de la Savoie, pour se déclarer indigne, humble femme du peuple qu’elle était, d’accepter son invitation à la cour, pour la conjurer de ne parler d’elle à personne, de ne pas faire allusion, même vaguement, aux grâces obtenues du Seigneur, par ses pauvres prières. Lorsqu’elle ne pouvait faire autrement, elle disait que le Bon Dieu s’était servi de la " plus misérable créature ", qu’elle ne voulait, d’aucune façon, être connue.

Jamais elle ne révélait le nom des personnages illustres qui venaient la visiter ou qui l’appelaient pour des conseils. " Si nous ne l’avions pas vue de nos yeux, dira sa fille Sophia, ou si nous ne l’avions pas accompagnée dans plusieurs foyers, nous n’aurions jamais rien su d’elle ".

Elle ne manquait pas de s’humilier en toute circonstance, pour souligner qu’elle était, elle-même, comme toutes les autres, une femme, et pas plus. Quand elle entendait parler de quelques coquineries commises par quelqu’un, son opinion était invariablement que " si le Seigneur ne nous protégeait pas, nous serions capables de choses pires, encore ". Elle apportait tout de suite l’exemple de Philippe Néri et répétait avec lui : " Seigneur, retiens-moi fortement, sinon, je me ferai juif, aujourd’hui ". Et chaque instant lui servait pour rappeler à tous que, " si nous tenons, c’est grâce à Dieu, totalement ".

Chaque fois que quelqu’un la priait de le recommander au Seigneur, elle lui répondait : " L’un pour l’autre ; vous, faites-le pour moi, et moi, faiblement, je le ferai pour vous ". Et si certains insistaient, disant qu’elle était la plus écoutée du ciel, elle répondait : " Vous est-il déjà arrivé de dire cette chose ? Et elle en était troublée. Je ne m’explique pas le fait que le Seigneur me laisse sur terre, lorsque je songe à mes péchés. Ne dites plus ces hérésies parce que Dieu seul est juste, Dieu seul est saint ".

Puis, souvent, c’était quelqu’un que Sophia rencontrait dans la rue et lui faisait cette remarque : " Oh ! vous êtes une jeune fille tellement chanceuse, avec une mère sainte comme la vôtre ". Et Sophia rapportait tout cela à la maison. Anne-Marie lui répliquait : " Ma fille, n’y prête pas attention parce que les saints ne sont pas de ce monde. Prions Dieu pour qu’il permette que nous mourrions en saints ".

Et chaque fois que des personnalités de premier rang de l’église lui manifestaient ouvertement la grande estime qu’elles lui portaient, elle ne pouvait demeurer en paix, se répétait déconcertée ! " Je suis une pécheresse, une pauvre misérable, je ne sais pas comment ceux-ci peuvent agir de la sorte, à mon égard ".

La renommée, les hommages, la célébrité, en somme, l’ont suffoquée, inquiétée, pendant toute sa vie.

Il n’y a pas de doute que cela fut pour Anne-Marie la croix la plus pénible parmi tant d’autres qui l’accablèrent ; l’unique croix qu’elle ne réussit jamais à embrasser avec joie et amour, et dont elle a tenté de se dégager, à maintes reprises.

Elle éprouvait une grande répugnance pour les " hosanna " ; elle ne s’en trouvait pas digne. Elle chercha de toutes manières, et en plus d’une occasion, à se soustraire aux rencontres avec des admirateurs. Elle y parvint, quelquefois, avec Lord Clifford, d’Angleterre, par exemple.

Mgr Raphaël Natali avait, un jour, révélé à ce grand seigneur en visite, " certaines circonstances que lui confia Anne-Marie Taïgi, circonstances, lui précisa-t-il, dont les divers épisodes ne pouvaient être connues que par des lumières venant de Dieu ". Le lord était demeuré littéralement abasourdi de ces révélations, et est devenu à ce point entiché à l’égard de l’humble romaine, qu’il ne pouvait désirer autre chose que de la connaître personnellement. Il ajouta que, s’il avait eu l’honneur de la rencontrer, il lui aurait assigné ainsi qu’à toute sa famille, après sa mort, une substantielle pension mensuelle, avec l’adjonction de quelque titre de noblesse ".

" J’accomplis moi-même la mission, raconte Mgr Natali, mais elle sourit et refuse toujours l’ostentation qui se pavane ; elle préfère la vie cachée, dans le Seigneur ". " Lord Clifford envoya chez moi, par la suite, une personne qui désirait la rencontrer. Voyant la constance de son refus, elle ne la dérangea pas ".

Lord Clifford ne fit pas seulement la lumière sur son désintéressement total, pour ne pas dire son dédain, d’ailleurs avoué par Anne-Marie elle-même, pour toute vie mondaine ; il confirma en particulier et, une fois de plus, son détachement pour tout bien terrestre.

J’ai déjà signalé comment elle avait écarté l’hospitalité offerte par l’ex-souveraine d’Etrurie qui voulait l’attirer, l’avoir, la retenir près d’elle, avec son mari et ses enfants, à la cour de Lucques. On sait aussi, comment elle refusa pareille invitation adressée par l’entremise du cardinal Pedicini.

Des offrandes généreuses, elle en repoussa plusieurs ; elle aurait pu accumuler beaucoup d’honneurs et d’argent si, seulement, elle avait dit oui. Souvent, on voulait la récompenser par des biens matériels, pour des avantages spirituels qu’on avait reçus. Elle demeura, jusqu’au dernier jour, ferme dans le propos explicite de préserver son honorable pauvreté de tout attentat relié à la richesse. Elle maintint cette détermination, y fut fidèle, même dans les années les plus sombres, quand sa pauvreté atteignait souvent le seuil de l’affreuse misère.

On a cru qu’elle n’agissait ainsi que par pure résignation. Certes, un autre motif s’ajoutait : un amour vrai, chaud, passionné, pour " soeur pauvreté ", un amour basé sur la confiance, une attitude d’abandon, entre les mains de Dieu.

Sa confiance en Dieu ne fut jamais trompée ; la maison Taïgi ne fut jamais négligée par la Providence, pas même dans les situations qui semblaient désespérées ; Anne-Marie l’avait expérimenté. C’est tout dire.

Un jour, il ne restait pas même un petit morceau de pain dans le garde-manger. Et je ne parle pas du fricot, pour restaurer le mari et les enfants. Il ne se trouvait pas, non plus, dans toute la maison, un petit objet qui put être échangé pour quelque chose à se mettre sous la dent. Des sous, il était déjà étrange que quelqu’un, dans la famille, en conservât le souvenir, depuis tant de temps qu’on n’en avait pas vus. Tous semblaient consternés. Si l’ombre d’un trouble a envahi l’esprit d’Anne-Marie, personne ne l’a su. En tout cas, elle ne le fit pas voir.

Elle s’enveloppa dans son seul manteau, salua ses familiers, et, d’un pas régulier, se dirigea vers la basilique Saint-Paul. Elle y entra, s’agenouilla au pied du crucifix, pria longuement, avec cette ardeur qui la transformait ; elle pria jusqu’à ce qu’elle entendit une voix, la voix bien connue de son époux céleste, qui lui dit : " Retourne à la maison et tu trouveras la Providence ". Obéissant alors, immédiatement, elle se releva et prit le chemin du retour.

Dans son coeur, régnait la tranquillité, certaine, que cette fois encore, tout était résolu pour le mieux. À peine, avait-elle, en effet, posé le pied sur le seuil de la porte, qu’elle se vit remettre, par ses filles, une lettre du marquis Carlo Bandini. Cette lettre venait tout juste d’arriver de Florence, lui dirent-elles. Avant de l’ouvrir, Anne-Marie savait déjà, qu’avec le message, il y avait de l’argent en quantité suffisante pour faire face à la crise.

Ces moments de crise devinrent encore plus fréquents dans les derniers mois de la vie d’Anne-Marie. Quand les maladies se succédaient, s’ajoutaient l’une à l’autre, les besoins se multipliaient. Elle ne doutait alors pas même un instant de l’aide céleste. Et l’aide céleste ne lui manqua jamais. En certaines circonstances dramatiques, elle vit arriver à la maison les secours les plus inattendus, de la part de gens éloignés qui ne l’avaient jamais connue, sinon par ouï-dire. Jusqu’à la fin, cependant, prévalut la règle que, chaque fois que les offrandes dépassaient les nécessités immédiates, elles se transformaient en dons qu’elle distribuait à d’autres pauvres ou d’autres malades, également dans le besoin.

J’ai démontré, rapidement, les multiples maladies qui frappèrent notre protagoniste, peu de temps, avant sa mort. Si on devait compléter, à la bonne franquette, un genre de fiche médicale, pour y enregistrer tous les maux qui accompagnèrent l’entière période de ses dernières années, du moment où elle se consacra au Seigneur, jusqu’au dernier soupir, nous serions embarrassés. Non seulement parce qu’elle garda ses souffrances secrètes, le plus possible, comme elle chercha toujours à cacher ses vertus, à dissimuler les dons prodigieux qu’elle obtint du ciel, mais surtout, parce que, comme l’écrivait le cardinal Carlo Salotti : " Le caractère étrange des maladies sert à démontrer que, la Bienheureuse ayant le désir de souffrir pour les âmes, d’être crucifiée avec le Christ, fut exaucée dans son désir du martyre ".

Elle le fut de telle manière que " dans ses états maladifs, il parut que tous ses membres portaient l’empreinte de la Passion divine et qu’elle sembla percevoir dans ses sens, les effets ou l’effet des douleurs du Calvaire ".

Entreprise ardue, dès lors, de tenter de définir la nature exacte, les symptômes précis, l’intensité de ses souffrances, de tant de maux. Si toutefois, je veux ici tenter de les énumérer, je risquerais de les définir par une terminologie inexacte, dans l’intention de les faire comprendre à tous ; il s’agirait d’un tableau approximatif des incroyables douleurs que cette femme exceptionnelle supporta, pendant tant d’années, avec une sérénité qui ne s’est jamais démentie, puisqu’elle les avait demandées à son divin époux, pour payer, elle, infime créature, les nombreux méfaits de son temps.

Douleurs très fortes aux oreilles, qui s’accompagnèrent de souffrances lancinantes, genre de névralgie qui se répandait dans toute la tête, la contraignant à garder toujours un bandage autour de la tête.

Des yeux, un s’était fermé bientôt, dans l’obscurité d’une cécité presque totale. L’autre était réduit à entrevoir à peine la lumière du jour, alors que les rayons éblouissants du mystérieux soleil céleste l’aveuglaient continuellement, la transperçaient si douloureusement, qu’elle aurait pu pleurer sans trêve.

Une inflammation profonde et fétide de la muqueuse nasale, en plus de lui boucher le nez, la tourmentait sans répit ; une senteur repoussante et nauséabonde se logeait dans son odorat. Un asthme perpétuel nuisait terriblement à sa respiration. Ses dents lui causaient un martyre ininterrompu.

Aucune articulation aux membres supérieurs et aux membres inférieurs, comme à la colonne vertébrale, devenue très douloureuse, parce que atteinte d’arthrite. Le faisceau musculaire fut également atteint ; les pieds et les mains, surtout la main droite, " la main qui guérissait ", disaient les gens, étaient envahis et déformés, par les noeuds de la goutte.

Une grosse hernie ombilicale s’était rapidement ulcérée et jamais, remède ne put soulager cette plaie.

Tout son corps, en somme, comme le confirme le cardinal Pedicini, fut constamment tourmenté par de violentes douleurs. Une couronne d’épines acérées, la faisait particulièrement souffrir, surtout le vendredi. Et, plus d’une fois, elle a dû prendre le lit.

Quand elle faisait des conquêtes d’âmes, et ces conquêtes étaient fréquentes, elle se sentait attaquée par de fortes maladies qui, selon l’opinion de plusieurs, auraient pu, chaque fois, la conduire à la mort.

Tout son corps, affirme le cardinal Pedicini, était à tel point crucifié dans chacune de ses parties, que même le médecin, qu’on fit venir à maintes reprises, en était étonné. Comment, aux prises avec des malaises si sérieux, pouvait-elle continuer à vivre ?

Cette existence fut, jusqu’au bout, ce qui semble incroyable, très active. Elle était totalement engagée, le jour et une grande partie de la nuit, dans la gouverne habile de sa maison, dans l’éducation patiente des enfants, des brus et de ses petits enfants, dans l’attention affectueuse à l’égard de son mari, dans les pratiques intenses de piété, à travers les pénitences les plus sévères, dans les attitudes charitables envers les pauvres, dans les pieuses veilles, au chevet des malades, dans les colloques avec les puissants et les miséreux, sans que jamais, elle fit ostentation de ses propres souffrances.

Dans ses colloques à la chaîne, elle se tenait grave et digne avec les illustres personnages, plaisante et bienveillante avec les femmes du peuple qui frappaient à sa porte, seules ou accompagnées, pour lui soumettre leurs petits problèmes quotidiens ou des problèmes intimes. Elle ne s’inquiétait pas pour autant ; elle leur prodiguait sa patience la plus évangélique, ses sollicitudes les plus affectueuses, même si elle savait, par une longue expérience, qu’une fois sorties de là, ces femmelettes l’appelleraient de nouveau, " sorcière " ou " bigote ".

Mais le calvaire d’Anne-Marie devait connaître la souffrance la plus aiguë dans les derniers moments de son existence. Elle le savait, depuis quelque temps, depuis un an plus précisément ; l’époux l’avait avertie du moment précis, des circonstances exactes de sa mort.

Le jour où avait eu lieu cette dramatique révélation, on l’avait vue plus joyeuse que de coutume ; elle souriait, heureuse, comme une jeune fille qui se prépare à se rendre aux noces. L’Époux céleste avait cependant joint à cette annonce, qu’elle, servante humble et fidèle, vivrait, comme il les a vécues, lui-même, les trois heures d’abandon, sur la croix. Il permettrait, qu’en ces moments extrêmes de l’agonie, elle fut abandonnée de tous. Et il en advint ainsi ; nous le verrons bien.

Puisque j’ai parlé par incise, de " la main qui guérissait ", je dois poser, au préalable, qu’à Anne-Marie, furent attribués plusieurs miracles.

Lorsque se répandit la nouvelle d’une guérison prodigieuse opérée par Anne-Marie, par le simple toucher de sa main, l’invocation de la Très Sainte Trinité, des vagues de commotions, jointes, par malheur, à une certaine exaltation à caractère fanatique, se diffusèrent en plusieurs occasions, dans toute la ville de Rome et même au delà. Il y eut des périodes où la Taïgi ne trouva pas un instant de paix. Elle était sans trêve recherchée par des foules avides de miracles faciles, traquée par des curieux plus ou moins aimables, traînée continuellement, ici et là, au chevet des malades plus ou moins en danger, pendant que l’annonce de nouvelles guérisons, vraies ou inventées, contribuèrent à surexciter de plus en plus les gens.

Dans les situations comme celles-ci, il est extrêmement difficile de distinguer la réalité de la fantaisie, la vérité des inventions, la bonne de la mauvaise foi. Il n’appartient pas au chroniqueur de démêler le tout, de censurer dans un sens comme dans l’autre. Bien sûr, le fait demeure, d’après les témoignages les plus dignes de foi, les documentations les plus sérieuses. Une autre preuve indiscutable du surnaturel qui s’affirma chez Anne-Marie Taïgi : l’opinion autorisée du cardinal Carlo Saletti, au sujet d’une série de guérisons merveilleuses opérées par elle.

Je n’en rappellerai qu’une seule : Anne-Marie, accompagnée d’une autre personne, faisait la visite des sept églises. Elle fut surprise par un violent orage, une de ces averses imprévisibles et soudaines, qui s’abattent sans merci sur Rome, au moment où on s’y attend le moins. Elle s’arrêta à la première porte et frappa. On la fit entrer et elle se trouva dans une salle où plusieurs personnes, en larmes, entouraient un lit sur lequel gisait râlant, une pauvre moribonde.

Désormais, lui dit quelqu’un, il n’y a plus rien à faire. Le médecin a quitté ; sa présence était devenue, à ce point, inutile. On lui administrera les derniers sacrements.

Anne-Marie s’approcha alors du grabat et plaça sa main, sur le front diaphane de la mourante, le signa au nom de la Trinité. Puis, elle se retourna et dit de sa voix douce et coutumière : " Ne craignez rien ; la grâce est déjà obtenue ". Au dehors, la pluie s’était apaisée et elle poursuivit son pèlerinage de pénitence.

À peine fut-elle sortie que la malade cessa ses râlements de l’agonie et commença à parler. Elle demanda de la nourriture et, face à la stupeur des personnes présentes, elle se souleva de façon à s’asseoir. Elle était parfaitement guérie.

Elle triompha des vainqueurs

Elle mourut à l’aube du 9 juin 1837, au numéro 7 de la rue " Santi Apostoli ", dans le palais Righetti, après trois heures d’agonie, dans un total abandon. C’était vendredi. Elle avait 68 ans et 20 jours.

Les maladies, les tribulations et les pénitences avaient fini par réduire Anne-Marie à un tel état de prostration que, déjà, en octobre de l’année précédente, ne pouvant plus se sentir, elle fut forcée de prendre le lit. Elle ne put jamais, dés lors se relever.

Clouée à cette paillasse : des accès d’asthme, à répétition, des douleurs arthritiques et névritiques, parfois très intenses, des convulsions violentes, une perpétuelle effusion de sueurs. Elle supporta ces souffrances avec beaucoup de résignation, dans le silence, huit mois durant. Elle fit preuve d’une patience à toute épreuve ; son calme était des plus paisibles. Maman exemplaire, elle gardait, malgré tout, le gouvernail de la maison, continuait d’accueillir les gens puissants et déshérités qui persistaient à recourir à elle, pour une aide ou un conseil.

Sachant que tout était inutile pour le soulagement de ses souffrances, elle se prêtait avec docilité et bienveillance aux soins que lui procuraient ceux qui l’entouraient. Elle continuait de recevoir chaque jour la sainte communion, durant la messe célébrée dans la chapelle qu’elle avait obtenu d’aménager dans son appartement. C’était pour elle l’unique source de paix intérieure, l’unique source de consolation pour son âme.

Le 2 juin 1837, c’était encore un vendredi, une fièvre soudaine annonçait sa fin prochaine. Le docteur Paglioli se souvenait de bien d’autres fièvres qui avaient assailli sa déconcertante patiente ; il n’y attacha pas d’importance excessive : " chose insignifiante, avait-il dit, une légère fièvre passagère ". Anne-Marie lui avait souri doucement, comme pour le rassurer de son pronostic, elle laissa croire qu’elle serait apaisée. Elle était prête pour le grand voyage.

Elle s’y prépara, en arrangeant aussitôt, pour le mieux, les affaires de famille, pour se consacrer ensuite, aux choses d’en haut.

Le soir du dimanche 4 juin, la fièvre reprit et cette fois-ci, eIle était maligne. Après une nuit affreuse, le matin du 5, à peine Anne-Marie avait-elle reçu la communion, qu’elle commença à entrer dans le coma de l’agonie. Elle était, en réalité, entrée dans le mystère d’une ineffable apparition céleste, quand à l’improviste, son mari et ses enfants inquiets, autour de on lit, craignaient de recueillir d’un moment à l’autre, l’instant fatal du dernier soupir. Elle se ranima, une lumière d’incroyable béatitude dans ses pauvres yeux, demi-éteints. " Appelez-moi immédiatement Mgr Natali ", demande-t-elle.

Le bon prêtre accourut aussitôt et les personnes entourant le lit durent se retirer. Anne-Marie lui confia le poids du dernier secret que, depuis lors, elle gardait pour elle seule, dans le silence de son coeur : le secret de la date de sa mort, elle le lui confia comme elle lui avait confié tous les autres secrets du ciel, avec un sourire radieux.

Le jour suivant, mardi le 6 juin, la fièvre grimpa au-delà de toute mesure, et la souffrance d’Anne-Marie atteignit des degrés élevés dans l’échelle de la douleur physique. Face à cette situation qui menaçait d’empirer d’un moment à l’autre, le médecin voulut tenter ce qui était encore possible, la prescription de médicaments plus violents, plus pénibles à supporter ; la malade savait très bien que ces moyens drastiques, comme tous les autres qui avaient été employés, s’avéraient inutiles, parce que son état était déjà fixé dans le grand livre de Dieu. Toutefois, pour ne pas entrer en contradiction avec le bon docteur, pour ne pas laisser chez ses fils et ses filles, son mari, le regret de ne pas lui avoir assuré tous les soins possibles, elle abandonna totalement son pauvre corps crucifié par la souffrance, à la dernière torture de la science.

Le lendemain, mercredi le 7 juin, il apparut très évident à tous qu’il valait mieux lui épargner ce martyre. Le mal, en effet, plutôt que de s’apaiser, s’aggravait inexorablement, d’heure en heure.

La maison Taïgi tint donc conseil et décida qu’il était opportun, ce matin-là, de lui faire apporter le Viatique de l’église Sainte-Marie " in-via-Lata ", plutôt que de la faire communier privément, comme d’habitude. Il en fut ainsi.

Elle passa une autre journée et, l’après-midi du 8 juin, quelqu’un frappa à la porte avec discrétion. Sophie alla ouvrir et elle se trouva face à face avec le cardinal Pedicini.

Que voulait Son éminence, de la pauvre moribonde ? Lui parler encore, si c’était possible. Anne-Marie fit avancer une chaise, la plus belle de la maison, tout prés de son lit. Le colloque qui suivit, dura plus d’une heure. Ce fut la dernière conversation de cette humble femme du peuple avec un prince de l’Église.

Le soir, les souffrances physiques s’accrurent encore, de façon indicible ; l’angoisse de la fin atteignit le fond du calice amer. Elle se tut jusqu’à ce que lui revienne la force d’esquisser un sourire sur son visage. De crainte que cette force s’évanouisse, plus occupée des autres que d’elle-même, elle voulut que les siens s’éloignent de sa chambre afin que son état ne les afflige pas.

Monseigneur Natali s’entretint seul à seule avec elle, pour un peu de temps. " Comment êtes-vous ? " lui demanda-t-il. " Ce sont des peines de mort ", lui répondit-elle, à demi-voix.

" Que ta volonté soit faite ", lui chuchota le bon prêtre. " Sur la terre comme au ciel ", ajouta-t-elle. Et ce fut sa dernière réponse.

Monseigneur Raphaël Natali rejoignit les autres dans la cuisine, et, ensemble, ils prirent les dispositions nécessaires pour qu’Anne-Marie fut assistée, réconfortée par beaucoup d’amour, beaucoup d’attention, jusqu’à son dernier soupir. Des charges furent attribuées à chacun, à chacune. L’un alla à la maison voisine de la " Madelena ", chez les fils de saint Camille de Lellis, des prêtres voués au service des malades. Un autre se rendit au couvent des Carmes, pour appeler le Père Filippi uigi, dernier confesseur d’Anne-Marie. Un troisième, par la rue " del Corso " entra à " Santa-Maria-in-Via-Lata ", pour demander le vicaire dom Luigi Antonini.

Mais l’homme propose et Dieu dispose. Ce dernier en avait décidé autrement. On sait qu’il voulait que cette humble femme déjà souffrante, franchisse les étapes de la passion de Jésus, de Gethsémani au Calvaire, l’imite aussi dans les trois dernières heures d’abandon sur la Croix.

Les Camilliens vinrent, de fait ; mais leurs experts jugèrent qu’elle pourrait vivre encore quelque temps et s’en retournèrent à leur couvent, convaincus que leur présence n’était pas indispensable pour le moment. Son confesseur ne vint pas parce que, dit-on, les règles carmélitaines ne permettaient pas d’aller hors du couvent, durant la nuit.

Le vicaire de Sainte-Marie-in-Via-Lata vint, au contraire, mais croyant qu’il valait mieux laisser la patiente tranquille, il se retira dans une autre salle pour lire son bréviaire.

Le vieux Monseigneur Natali qui avait veillé sans cesse, jour et nuit, les derniers temps, au chevet de la malade, et avait dû pourvoir personnellement à tous les besoins de la maison au moment où personne n’y pensait, parce qu’on était aux prises avec l’angoisse, fut invité par les Taïgi à s’allonger quelque peu sur un lit, pour s’accorder un moment de sommeil, s’il voulait pouvoir être sur pied, le lendemain.

Les Taïgi, de leur part, fils et filles, neveux et nièces, adoptèrent des attitudes différentes : les uns décidèrent d’aller se reposer, les autres de veiller dans la cuisine, obéissant à la maman qui les avait éloignés de sa chambre.

Ainsi, deux femmes seulement demeurèrent en service, dans la chambre d’Anne-Marie. Mais les deux femmes avaient accepté l’opinion des Pères Camilliens qui prétendaient que cette pauvrette ne mourrait pas à l’instant ; elles la voyaient calme et tranquille ; elles se placèrent dans un coin et se mirent à converser à voix basse, de leurs faits et gestes, sans trop se préoccuper de la malade.

Mais voici que, " vers les quatre heures de la nuit, racontera Monseigneur Natali, je me suis senti fortement poussé à me lever en toute hâte, comme je le fis. Je courus à la chambre de la malade qui était alors à l’extrémité. J’en avertis immédiatement le vicaire et on commença aussitôt les prières de la recommandation de l’âme. Les prières étaient à peine terminées, qu’au milieu d’une invocation au Sang très précieux de Jésus, à l’égard duquel la moribonde avait toujours eu une dévotion particulière, elle rendit son âme bienheureuse à Dieu ; il était quatre heures et demie du matin, un vendredi, comme elle l’avait prédit ".

" Ainsi, conclura l’excellent prêtre, confident fidèle et discret d’Anne-Marie Taïgi, se vérifiera tout ce que la servante de Dieu avait annoncé d’elle-même, plusieurs années auparavant, relativement à sa mort. Elle me dit, en effet, les premières années au cours desquelles j’ai pu faire sa connaissance, qu’à sa mort, elle serait abandonnée de tous, comme le Seigneur le lui avait laissé entendre, plus d’une fois. En d’autres occasions, elle m’assurait que je serais là, présent. Je ne pus alors mettre en harmonie ces deux assertions contradictoires. Les événements ayant eu lieu, j’en saisis très bien l’explication.

On dirait une règle, à lire l’histoire des saints, celle de ceux qui suscitèrent à leur mort un mouvement impétueux de commotion pour rassembler des foules imposantes de citadins venant de partout, que souvent leurs funérailles se transformaient en de réels triomphes, en apothéose irrésistible, comme si les villes où ils vécurent et les terres qui les connurent, désiraient participer, elles aussi, ici-bas, à l’allégresse céleste.

Anne-Marie échappa à cette règle ; il fut écrit qu’elle devait roter son époux céleste jusque dans l’humilité de la sépulture ; la nouvelle de sa mort traversa, en effet, le petit portail du numéro 7 de la " via Santi Apostoli " pour atteindre deux ou trois de ses nombreux admirateurs, un bon nombre de ses favorisés.

Les vendredi et samedi, alors que la dépouille mortelle, revêtue des habits mi-mondains, mi-religieux, un petit crucifix de cuivre dans ses mains croisées sur la poitrine, demeura exposée dans la chambrette où elle expira. Peu de gens apparurent à la porte de la maison Taïgi, pour réciter un " requiem " ou pour donner, ne fut-ce que de façon furtive, une parole de consolation, aux familiers éprouvés par une telle perte.

Il faut savoir, pour se rendre compte du fait, que les autorités de Rome et des environs, les gouvernants, avaient été amenés, en raison de la crainte, de la peur, qui se répandaient dans la population, à prendre des mesures très sévères contre toute menace de contagion, à suggérer à la population d’agir avec beaucoup de précaution. On suggérait de ne pas mettre les pieds dans une maison où quelqu’un était mort, sans qu’elle ait d’abord été désinfectée. Cela, non seulement pour éviter toute contagion, mais aussi pour échapper à la tristesse.

Il est indispensable, pensaient les médecins, " de se distraire avec des idées plaisantes et indifférentes ". Ce qui importait le plus, pour fuir l’épidémie, c’était de lui opposer la barrière d’un moral très élevé.

Si c’étaient les dispositions du gouvernement et les suggestions de la science de l’époque, les gens, de leur part, poussèrent la prudence jusqu’à éviter, à fuir comme pestiférés tous ceux qui, en ces jours, vivaient quelques décès au sein même de leur famille, quelle qu’en ait été la cause.

Cette situation explique de façon très compréhensible la raison pour laquelle la familleTaïgi s’appliqua à tenir cachée la mort d’Anne-Marie ; " abandonnée par ses amis, terrée dans la misère, raconte le cardinal Pedicini, elle préférait passer quelques jours enfermée à l’intérieur de sa modeste demeure ".

Monseigneur Natali profita de ces deux jours pour faire prendre, dans la cire, le masque, le haut du buste de la défunte. Le soir du samedi 10 juin, la dépouille mortelle fut déposée dans un cercueil de bois et une fausse tombe de fer blanc, contenant un court mémoire rédigé par le prêtre ami lui-même. À la nuit tombante, elle fut transférée dans l’église voisine de Santa-Maria-in-Via-Lata où elle demeura toute la journée du dimanche, gardée en cachette par quelques parents, ignorée de plusieurs, inconnue de presque tous.

Les dispositions des autorités exigeaient, de fait, qu’aucun cadavre ne quitte la maison avant d’être enfermé dans une caisse et ne doive pas être exposé. " Pour cette raison, raconte le cardinal Pedicini, non seulement on ne pouvait pas voir la dépouille mortelle, mais le peuple ne pouvait même pas savoir qui ce fut. On ne devait risquer aucune curiosité, ni rechercher quoi que ce soit, par crainte de la colère, de l’épouvante, qui étaient tellement grandes, lorsqu’on rencontrait sur son chemin, un cadavre porté à l’église. Non seulement, on ne cherchait pas à savoir qui il était, comme la chose est arrivée, mais on cherchait tout de suite à quitter la rue, par crainte de contacter le miasme, de quelque nature qu’il fut, de donner la moindre prise à la peste tellement redoutée ".

Le soir de ce même dimanche 11 juin, les premières ombres étant déjà répandues sur la ville, le cercueil de bois, fut introduit dans un cercueil de plomb qu’un magistrat scella soigneusement. Puis, un petit groupe de personnes, en ordre disparate, afin de n’être pas remarquées, l’accompagna jusqu’au cimetière du Verano où par la volonté du pontife Grégoire VI lui-même, un lieu de choix l’attendait.

En effet, la nouvelle de la mort d’Anne-Marie Taïgi à peine connue, le cardinal Pedicini s’était empressé d’écrire au vicaire de Sa Sainteté, le cardinal Odescalchi, une longue lettre dans laquelle il disait, entre autres choses : " Ayant plu à Dieu de rappeler à l’éternel repos l’âme d’Anne-Marie Taïgi, domiciliée au numéro 7 de la " via Santi Apostoli " que le soussigné Cardinal, vice-chancelier, a eu la chance de fréquenter et de connaître, d’admirer ses vertus autant que ses dons extraordinaires de lumières singulières, qui lui sont venus de la part de Dieu ; des dons qui l’ont abondamment enrichie, si on la compare à d’autres grands saints. Des centaines de preuves existent, au sujet de l’authenticité de ces dons qu’elle mettait au service des affaires publiques de l’Église et du monde. Tout était indiqué avec une grande précision, bien avant que se produisent les événements qui se réalisaient conformément à ses prédictions, aux détails qui les accompagnaient. On ne peut attribuer qu’à Dieu les dons extraordinaires qu’elle possédait. Le cardinal qui vous écrit, croit qu’il est de son devoir de porter le fait à la connaissance et à la piété religieuse de votre Eminence, pour que la dépouille de cette âme remarquable qui fut sa compagne dans l’exercice de tant de vertus, ait des égards particuliers qui se sont pratiqués dans des cas semblables, des cas qui, de fait, ne sont pas fréquents ".

Le cardinal Odescalchi référa immédiatement, la chose au pape qui donna, sans tarder, l’instruction que la dépouille d’Anne-Marie serait placée le plus prés possible de la chapelle du cimetière, du côté de l’Évangile, près de la marche de la porte.

Dans les jours qui suivirent, pendant que les fils faisaient installer une plaque de marbre blanc, sur la tombe, une plaque sur laquelle, sous la croix rouge et bleue des trinitaires, on avait inscrit : " Anne-Marie Antonia Gésualda Taïgi, née Giannetti, à Sienne, le 20 mai 1769, décédée à Rome, le 9 juin 1837, tertiaire déchaussée de l’Ordre de la Sainte-Trinité ". Le cardinal Pedicini apprit que les conditions financières de la famille Taïgi étaient précaires. Toute la maisonnée devait survivre avec quatre écus, le reste du mois, pendant que les dettes atteignaient 200 écus : pour le médecin, les funérailles, le masque et le buste de cire, les deux cercueils, l’acte notarié, la pierre tombale.

Le cardinal se faisait pourvoyeur ; il envoya sur la " via Santi Apostoli ", son maître de chambre, avec cinquante écus, " en mémoire de la disparue ". Il envoya aussi, certaines personnes de Milan et de Turin, demeurées tout à fait inconnues. Ces personnes faisaient parvenir des offrandes généreuses, des offrandes qui permirent de solder les dettes.

La Providence ne manqua jamais de veiller sur la pauvreté de la maison Taïgi. Elle veilla de façon particulière sur Sophie qui se préoccupait, avant la mort de sa mère, de l’avenir de ses enfants. Anne-Marie l’avait rassurée.

Dix-neuf ans après, le 31 mars 1856, le procès informatif sur la renommée des vertus et la sainteté d’Anne-Marie eut lieu. On procéda à l’exhumation de sa dépouille pour l’identification et la translation, à l’intérieur des murs de la cité.

" La planche qui fermait le cercueil de bois fut enlevée et, comme il est écrit dans l’acte légal de reconnaissance, le cadavre tout entier, recouvert de ses vêtements, se montra à tous ".

Puisque en ce temps, le corps d’Anne-Marie Taïgi, tertiaire déchaussée de l’Ordre des trinitaires, était réclamé soit par les trinitaires espagnols de Saint-Charles-aux-Quatre-Fontaines, soit par les trinitaires italiens de la basilique Saint-Chrysogone au Transtévère, pour ne pas léser les uns et les autres, la nuit du 11 juin 1856, elle fut ensevelie dans l’église de Santa Maria della Pace ", dans un sépulcre fermé par un marbre, portant l’inscription : " Ici repose la servante de Dieu, Anne-Marie Taïgi ".

Huit ans après, le pape Pie IX l’honora du titre de vénérable. C’était, selon la règle du temps, le premier pas sur la voie de la glorification.

Entre-temps, l’autorité ecclésiastique reconnaissait le droit incontestable des trinitaires italiens, parce qu’il revenait aux Italiens de conserver la dépouille mortelle de l’Italienne Anne-Marie Taïgi. Ainsi, au cours de la nuit du 10 juillet 1865, le corps était définitivement transférée au delà du Transtévère, dans l’antique basilique de Saint-Chrysogone.

Finalement, le 30 mai 1920, le jour même où l’église célébrait la fête de la Sainte Trinité, l’humble femme du peuple, femme de maison, mère de famille et tertiaire déchaussée, eut une grandiose apothéose ; elle connut, dans sa ville d’adoption, le triomphe des saints. Tout Rome qui, depuis quelque temps, parlait de ses miracles, parut vouloir converger vers Saint-Pierre, pour assister à l’acte de sa béatification.

" C’est une mère de famille, avait déjà dit d’elle le pape Benoît XV, qui se présente, après avoir été l’ange consolateur de ses parents, après avoir édifié ses compagnes d’études, après avoir dépensé utilement ses années d’adolescence, en travaux et en services propres à son état et à sa condition. Elle peut servir de modèle à ceux qui n’ont pas encore quitté le foyer domestique. C’est une mère de famille à qui n’a jamais souri une grande aisance ; sa jovialité calme et paisible rendait alors inexcusables toutes ces mères qui disaient ne pouvoir atteindre la piété, ne pouvoir s’abstenir de continuelles lamentations, à cause de leur pauvreté et de leurs misères. Elle est une mère de famille sur qui pesait lourdement l’assistance de ses vieux parents, le soin d’un mari pas toujours aimable, l’éducation d’une nombreuse progéniture. Oh ! Comme elle fut admirable, l’affabilité avec laquelle Anne-Marie répondait aux exigences des vieux parents ; elle vainc le mal par le bien, et gagne le coeur de son mari. Elle éduque ses enfants en leur prodiguant beaucoup d’affection, évitant de leur infliger des sentiments de peur ou de crainte. Elle est une mère de famille qui ordonne bien sa maison, n’abandonne pas ses devoirs envers chacun, trouve le temps et le moyen de visiter les pauvres, les malades, de se faire toute à tous ".

C’est la page indubitablement la plus maigre de l’allocution de Benoît XV, parmi les nombreuses que j’ai eu le loisir de lire, à l’exaltation d’Anne-Marie Taïgi. C’est en même temps la page la plus efficace qu’on peut écrire pour présenter notre protagoniste dans ses traits les plus purs, dans son aspect le plus humain, dans sa valeur la plus authentique, dans son essence la plus vraie : femme du peuple, épouse et mère comme le sont des millions d’autres épouses et d’autres mères, et toutefois lumineuse, d’une lumière du paradis, non pas tant par les dons surnaturels par lesquels le ciel a voulu la récompenser abondamment, que par cette sainteté acquise instant par instant, avec les minimes actions journalières, imprégnées de respect affectueux envers les parents, d’amour compréhensif à l’égard du compagnon de sa vie, de patience dans l’éducation des fils et des filles, des petits-enfants, de modestie dans les occupations domestiques avec le balai et au milieu des casseroles, de charité sans bornes pour le prochain. Oui, la sainteté, en somme, à la portée de toutes les mères de famille. Que toutes sachent, comme Anne-Marie, se faire toutes à tous.

Accrochons-nous à cette essentielle présentation faite par un pape, à la chrétienté entière, et nous goûterons les pages de Louis Veuillot, brillant écrivain français qui, exilé de France, respira à Rome les parfums enivrants d’Anne-Marie Taïgi.

JE VEUX MAINTENANT M’ÉLOIGNER DE QUELQUES PAS, PRENDRE CONGÉ DE LA FAÇON LA PLUS DIGNE DE CEUX QUI AURONT CONDESCENDU À LIRE CETTE COURTE ET MODESTE BIOGRAPHIE, EN AJOUTANT QUELQUES PAGES, QUELQUES RÉFLEXIONS QUI ME SONT PLUS PERSONNELLES.

" Elle était une Thérèse, une contemplative, une vraie amante. Rien de tellement plaisant, cependant, dans sa vie : un mari à servir, un homme grossier bien qu’honnête, plusieurs enfants, mille difficultés, des maladies fréquentes, des ennemis, des calomniateurs. Elle avait beaucoup à faire, dans la gouverne de sa maison ; elle y faisait non seulement régner l’ordre, mais la joie sainte. La pauvreté y habitait à demeure, mais jamais la misère n’y pénétra. Elle convertissait ses ennemis, pardonnait à ses détracteurs. Elle savait être toute, et toujours, à Dieu ".

" Elle avait été belle et gracieuse. Elle n’attendit pas que cette fleur se fanât ; dés qu’elle fut appelée, elle se rendit. Dieu l’enveloppa promptement dans l’amour, la lumière, le désir du sacrifice, la connaissance de la douleur, la contemplation de la vérité. Il donnera satisfaction à sa charité, quand elle lui demandera de guérir les malades. Il y joignait la science de la religion, à la connaissance du passé, du présent et du futur, nourrissait cette charité qu’elle ne cessait de lui demander, dans le souci qu’elle avait de la conversion des pécheurs ".

" Les dons intellectuels lui furent distribués comme par un miracle sans pareil. Peu de temps, avant qu’elle fut entrée dans la vie de perfection, elle vit apparaître un globe d’or, terne, qui devint un soleil incomparablement resplendissant, dans lequel elle voyait toutes choses. Elle connaissait avec certitude le sort des défunts. Son regard allait jusqu’aux extrémités du monde ; elle reconnaissait des personnes qu’elle n’avait jamais vues, pénétrait l’âme jusqu’au tréfond. Les choses accomplies, comme les choses futures, se révélaient à sa vie, dans les circonstances les plus détaillées. Un simple coup d’oeil lui suffisait. L’objet réclamé par sa pensée, se montrait et elle le reconnaissait. Elle voyait le monde entier, comme nous apercevons la façade d’un édifice. Les individus comme les nations, lui étaient présents. Elle discernait les causes du mal, les remèdes qui pouvaient le guérir. "

" Par ce miracle permanent et sans limites, la pauvre compagne de Dominique Taïgi, devenait un théologien, un docteur, un prophète. Jusqu’à sa mort, l’humble femme put lire dans le soleil mystérieux. "

" Les pauvres, les grands du monde, les princes de l’église venaient lui demander conseil et secours, la surprenaient au milieu des humbles services de sa maison, alors que, souvent, elle était malade. Elle ne refusait jamais son dernier morceau de pain, ni l’or plus précieux encore, de son temps. Elle n’acceptait jamais de dons, et à plus forte raison, des louanges. Les plus puissants protecteurs ne purent jamais la décider à faire sortir les siens de la condition dans laquelle ils étaient nés. Une reine, réfugiée à Rome, l’invita à accepter de l’or. Madame, lui répondit-elle, comme vous êtes naïve, je sers un Dieu qui est plus riche que vous ".

Elle touchait les malades et ceux-ci guérissaient par la puissance qui lui venait de la prière. D’autres, avertis de leur mort prochaine, mouraient saintement. Elle pratiquait de grandes austérités pour les âmes du purgatoire, et ces mêmes âmes venaient la remercier ".

" Elle souffrait dans son corps et dans son âme ; attirée instamment vers le ciel, par la véhémence du désir. Elle était ramenée et clouée sur la terre par les nombreux poids de la vie. C’était un perpétuel martyre. Mais elle savait que Dieu le voulait ainsi. Elle savait aussi, qu’elle expiait pour les autres, que Jésus l’associait à son sacrifice, qu’elle était victime avec lui. Les douleurs d’amour sont d’ineffables ivresses ".

" Pie VI mourait à Valence, Pie VII était prisonnier à Fontainebleau ; sous Grégoire XVI, réapparaissait la révolution. On disait que le règne des papes était terminé, que la loi du Christ et le Christ lui-même se mouraient, que la science aurait vite relégué parmi les chimères ce prétendu Fils de Dieu, déchiré ses maximes, injurieuses à la raison humaine ".

" Durant ce temps, Dieu suscitait cette femme qui guérissait les malades par le seul attouchement de sa main, les sortait de leur lit par la seule force de la prière. Dieu lui donnait la connaissance du passé, du présent et de l’avenir. Elle affirmait le retour de Pie VII, annonçait l’élévation de Grégoire XVI, voyait déjà Pie IX lui succéder ".

" Elle était la réponse de Dieu aux forts vainqueurs de la politique, des champs de bataille, des académies ".

FIN

SOURCE : http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/Mariataigi/anna_maria_taigi.htm


Particular de un vitral en la Iglesia de Santo Tomás in Formis de Roma.


Blessed Anne Marie Taigi

Also known as

Anna Maria Gesualda Antonia Taigi

Anna Maria Taigi

Anne Marie Gianetti

Memorial

9 June

Profile

Daughter Luigi Giannetti and Maria Masi. Her father was a pharmacist in SienaItaly, but his business went bankrupt when Anna Marie was five years old. The family moved to RomeItaly in search of work, but Luigi could only find a job as a household servant. Anne was married on 7 January 1789 to Dominico Taigi, a butler to the noble family of Chigi. She was married for 48 years, and mother of seven, two of whom died very young.

Anne Marie was always very concerned about her dress and appearance, far more than would be expected of a working class mother. Life at home was not always peaceful, Dominico could be ill-tempered and caustic, and Anne was known to have had an adulterous affair with an older man. But one day while at prayer at Saint Peter’s Cathedral, she felt a sudden strong inspiration to ignore the things of this world. She began to live a more austere life, and to listen to the Spirit. Trinitarian tertiary. She found holy spiritual directors, gave all she could to the poor, visited the sick, and counselled many of the patients at the hospital of San Giacomo of the Incurables. She worked hard to evangelize her own family, changing her husband’s demeanor, and they all regularly assembled in a small personal chapel to pray together.

As the years went on and Anne Marie devoted herself more and more to prayer, she began to receive mystical gifts, including prophecy and clairvoyance. She sometimes went into ecstacies, and received heavenly and prophetic visions. Her simple presence had a powerful effect on many, and she helped with many conversions. Counsellor to cardinals, royalty and three popes.

Because of her charismatic gifts, and her lack of concern about worldly matters, Anne was often the topic of gossip and sander, but she was the recipient of public veneration soon after her death, and her Cause for beatification began in 1863.

Born

29 May 1769 at SienaItaly as Anne Marie Gianetti

Died

9 June 1837 at RomeItaly of natural causes

body incorrupt

remains transferred several times

interred at Saint Crisogono church, Trastevere, RomeItaly

Venerated

4 March 1906 by Pope Saint Pius X (decree of heroic virtues)

Beatified

30 May 1920 by Pope Benedict XV

Patronage

victims of verbal spouse abuse

Additional Information

Catholic Encyclopedia

Great Wives and Mothers, by Father Hugh Francis Blunt

New Catholic Dictionary

Saints of the Day, by Katherine Rabenstein

Stories of Holy Lives, by M.F.S.

The Holiness of the Church in the 19th Century

books

Our Sunday Visitor’s Encyclopedia of Saints

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“Blessed Anne Marie Taigi“. CatholicSaints.Info. 5 May 2022. Web. 2 May 2023. <https://catholicsaints.info/blessed-anne-marie-taigi/>

SOURCE : https://catholicsaints.info/blessed-anne-marie-taigi/

Ven. Anna Maria Gesualda Antonia Taigi

(Maiden name Giannetti.)

Venerable Servant of God, born at SienaItaly, 29 May, 1769; died at Rome, 9 June, 1837. Her parents, Luigi Giannetti and Maria Masi, kept an apothecary shop at Siena, but lost all their fortune and were obliged to go toRome in search of a livelihood. Anna Maria was then five years old. Having been educated in all the domesticvirtues, she was married in course of time, 7 January, 1789, to Dominico Taigi, a retainer of the noble family of Chigi, with whom she lived happily for forty-eight years. Hitherto nothing extraordinary had happened in her life. But one day while she knelt with her husband at the Confessio in St. Peter's she felt a strong inspiration to renounce such little vanities of the world as she had allowed herself. She began to pay little attention to dress and to listen to the inner voice of grace. Soon afterwards she was received publicly in the Third Order of Trinitarians in the Church of S. Carlo alle Quarto Fontane, and having found holy spiritual directors, she made rapid progress in the way of perfection. All the money she could spare she devoted to the poor and miserable, and though not rich she was very charitable. Of the hospitals she regularly visited, the preferred one was S. Giacomo of the Incurables. Despite her love for the poor, she never neglected her own family. Of her children two died young, the others grew up in piety under the surveillance of the mother. But she never availed herself of her connections with persons of good position to take her children out of their humble social environment. The whole family were wont to assemble for prayers in a small private chapel, and here, later on, in a small privatechapel, and here, later on, Mass was celebrated by a priest who dwelt with the family. The great virtues of AnnaMaria were rewarded by extraordinary gifts of God's grace. During many years, when praying in her chapel she had ecstasies and frequent visions, in which she foresaw the future. She exercised a peculiar influence overindividuals and converted many a sinner to God. During her life she suffered much both corporally and spiritually, and was at times meanly calumniated. But after death her name soon became venerated in Rome. Her body was several times transferred, and rests finally at S. Crisogono in Trastevere. The process of her beatification was begun in 1863, but has not yet been finished.

Oliger, Livarius. "Ven. Anna Maria Gesualda Antonia Taigi." The Catholic Encyclopedia. Vol. 14. New York: Robert Appleton Company, 1912. 8 Jun. 2015 <http://www.newadvent.org/cathen/14430b.htm>.

Transcription. This article was transcribed for New Advent by Christine J. Murray.

Ecclesiastical approbation. Nihil Obstat. July 1, 1912. Remy Lafort, S.T.D., Censor. Imprimatur. +John Cardinal Farley, Archbishop of New York.

Copyright © 2021 by Kevin Knight. Dedicated to the Immaculate Heart of Mary.

SOURCE : http://www.newadvent.org/cathen/14430b.htm

Blessed Anna Maria Taigi, Matron (AC)

Born in Siena, Italy, May 29, 1769; died 1837; beatified in 1920. Although she was the wife of a Roman working man, Anna Maria was consulted by royalty because she could read souls. Anna Maria Gianetti was the daughter of a druggist, who was soon impoverished and moved his family to Rome, where he was employed as a house servant. She left school at about 13 and learned the trade of wool-winding. Then she became a housemaid to a noble family. In 1970, she married Domenico Taigi, the butler of the nearby Chigi Palace, and began to live the normal life of a married woman of the working class. It was in the discharge of these humble duties that she attained a high degree of holiness, but not without a detour.

After her marriage she began to dress gaily, and then fell into grave sin--adultery with an older man. It was a momentary sin but her conscience tormented her. Worldly distractions brought her no peace.

Shortly, she changed her whole life. Walking through Saint Peter's Square with her husband, Padre Angelo (a Servite Father) gave her a piercing look, which she took as a warning of impending judgment. It is said he had a revelation that a woman would come to him to be directed in the way of sanctity and he knew the woman was Anna Maria when she passed him.

She fell on her knees over Saint Peter's tomb, then sought out a confessional, but the priest sent her away, telling her she was not one of his usual penitents. A few days later she was led to Padre Angelo's confessional and he greeted her, "So you have come at last! Be of good cheer, my child; God loves you and he asks for your whole heart in return." This was the hour of her total conversion to God. Immense joy filled her.

She put away her trinkets and became a tertiary of the Order of the Most Blessed Trinity (with her husband's permission). The day she was accepted, she heard Christ's voice saying she was chosen to convert sinners and console sufferers.

In 14 years, she bore four sons and three daughters. Three children died young. Anna Maria trusted always in the abundance of God. She instructed her children in the Catholic religion and tried to form them according to the divine Model. She was strict but merciful.

She went to daily, early morning Mass and worked far into the night. She took in sewing and washing to provide for her household and the poor. Her house was spotless; her children, well-tended. Rarely did she accept charity. In short, she was a model housewife and mother.

Domenico was not a saint, but a moderately good husband. He was ill-tempered, but after her death, said, "It is due to her that I corrected some of my faults." He always found his wife up and waiting for him when he returned from work, sometimes at 2:00 or 3:00 a.m. "She was glad of an excuse to spend the quiet hours in prayer." Obedient to her husband, she honored him as the head of the household.

Anna Maria's parents spent their last years in her crowded home. Her father was an invalid, her mother irritable. Domenico testified, "It almost seems that God had given her such parents in order to try her virtue."

She was a good story-teller, merry, easy going, and her husband praised her for her virtues. She rarely dined, but rather served her family. She fasted on Saturday to honor Mary, and on Wednesday for Joseph. She practiced great mortifications on Fridays, in Lent, and on Ember fasts.

Humility and meekness were her favorite virtues. She rejoiced in humiliation and contempt, loved those who hated and spoke ill of her. She was oblivious to praise. Christ revealed to her, "The humble are always patient, and the patient sanctify themselves. Patience is the best of all penances, and he who is truly patient possesses all earthly treasure, and will receive a heavenly crown." This kind of patience entails a gentle forbearance and uncomplaining acceptance of trials.

Her mystical experiences were extraordinary: revelations, visions, rapture, and ecstasies. She had these experiences because she was a saint and not vice versa; because she tried in everything to act in conformity to God's will. Ecstasies often came at inconvenient times. Once while doing housework: "O Lord, leave me in peace! Withdraw thyself and let me get on with my work. Keep the treasures of thy love for consecrated virgins; I am only a poor wife and mother."

She saw thoughts and distant events in a symbolic, miniature sun, in which the hearts of others were revealed. Three popes and innumerable royalty sought her counsel. She also foretold many political and temporal events (Benedictines, S. Delany)

SOURCE : http://www.saintpatrickdc.org/ss/0609.shtml#feli

Anna Maria Gesualda Antonia Taigi at San Crisogono in Rome
Beata Anna Maria Taigi San Crisogono

Sanctuaire de la Bienheureuse Anna Maria Taigi, Basilique Saint-Chrysogone, Rome


Catholic Heroes . . . Blessed Anna Maria Taigi

June 7, 2016

By CAROLE BRESLIN

Siena, Italy — 30 miles south of Florence, the birthplace of saints such as Bernardine of Siena (born on December 8, 1380), and Catherine of Siena (born on March 25, 1347). Four hundred years later, Siena became the birthplace of another great mystic of the Church: Blessed Anna Maria Taigi.

Anna Maria entered our world on May 29, 1769. Her father, Luigi Giannetti, and her mother, Maria Masi, were poor working-class people from Tuscany. The day after her birth, they took their infant daughter to the church and baptized her with the name Anna Maria Gesualda Antonia.

When Anna Maria was six years old her family moved to Rome to find work. She stayed in Rome for the rest of her life. For two years Anna attended the school run by the Filippini Sisters, after which she worked in several non-skilled positions to help with the family finances. At this point, she performed only the basic Catholic devotions.

On January 7, 1790, Anna married Domenico, who was a porter for the chef of Prince Chigi. Although Domenico had rather good morals and dutifully practiced his faith, he also possessed a fiery temper and crude manners. His vulgar language and sudden anger caused Anna much suffering.

Being married to Domenico enabled Anna to practice much patience, humility, and forgiveness. Quickly she learned that meekness would dissipate her husband’s wrath much more quickly than an angry retort.
Domenico, who loved Anna, never struck her and explained during her process of beatification how she “tamed” him. During their marriage Anna delivered seven children, only four of whom survived to adulthood. They raised these four children to be faithful Catholics and morally upright.

Anna enjoyed pretty dresses and socializing as most young women do. While she adhered to Church teaching, she demonstrated no unusual holiness. Nevertheless, her lifestyle began to prick her conscience.

When Anna and her husband went to the Basilica of St. Peter dressed in their best clothes, the crushing crowd knocked her into a Servite priest, Fr. Angelo. When it happened, Fr. Angelo “heard” a voice tell him, “Notice that woman, for I will one day confide her to your care and you will work for her transformation. She shall sanctify herself, for I have chosen her to become a saint.”

Finally, Anna went to Confession and hastily accused herself of being a great sinner to which the priest responded, “Go away!” Nevertheless, he did relent and he gave her absolution.

After a long period of inner turmoil, Anna again went to Confession, going to a different church, the one where she and Domenico were married. This time she entered the confessional of Fr. Angelo and together they trod the delicate path of developing the mystical spirituality of a married woman. Such direction could not be based on the great mystics of the Church such as Teresa of Avila and Catherine of Siena, since they were religious and not married. At the time of this meeting, Anna had only been married three years.

In the beginning of her journey, she faced the difficulty of learning detachment. It seemed that “he finds fault with everything.” And the priest had to restrain Anna’s desire to perform penances damaging to her health. He explained to her that her state in life as a wife and mother must be fulfilled in holiness.

The next step in her journey came when she convinced her husband to forgo the unnecessary comforts in their state of life. Anna Maria, as her husband testified, “gave up for the love of God, all the jewelry she used to wear — rings, earrings, and necklaces. . . . She wore the plainest possible clothing.” She only did this with her husband’s permission.

Shortly thereafter, Anna Maria learned from her “inner voice” — which she always took to her confessor — that the true path to God can only be achieved by humility and charity. Divisiveness, complaining, and criticizing are from the evil spirit, while peace, unity, and serenity — even in suffering — are a special grace from God.

In 1790 Anna was given a unique favor from Christ: a globe of light like the sun which became clearer the more her soul became purified. In this orb, she saw future events and could read souls and their most secret impulses. Most important, this orb revealed to her how she could move toward perfection, how other souls could be led to God, and how she could help both the Church suffering and the Church militant.

The breadth of what she saw happening in the world astounded her confessors, including Cardinal Pedicini, who knew her for over 30 years. She saw inside the remote prisons of China and the suffering confessors and nuns there.

She could see inside secret societies, back-door diplomatic maneuverings, and the languishing prisoners and slaves in the Middle East. She would witness the shipwrecks around the world and hear the cries of those dying from them.

So extensive was Anna Maria’s experience of these events that the cardinal explained during the hearings for her process of canonization: “Nor let anyone think I am exaggerating, for, on the contrary, I find myself incapable of describing the wonders of which I was for 30 years the witness.”

Even with this extraordinary gift of sight into world events — a gift that kings, queens, Popes, and saints sought to benefit from — Anna Maria remained humble. She sought no money and hoped for more isolation from such requests, only revealing and meeting with people under obedience.

Anna also suffered in body and soul, turning all to God for His glory. She warned people when they were going to die so that they could have a holy death; she offered her suffering for the Poor Souls in Purgatory and when they were released they came to thank her. Her mere touch would cure the sick.

Many wanted to shower her with wealth and gifts, but she refused them all. Nor were any in her family allowed to accept offerings. As a witness said, “She thought it good to live from day to day, like the birds. A refugee queen in Rome wished to give her money. ‘Madame,’ Anna responded, ‘how simple you are. I serve God, and He is richer than you’.”

The Lord also drew her into ecstasies whenever she received Holy Communion. Her family misunderstood these moments and even scolded her for them. It was not until after her death that Domenico understood what happened to his wife — she never explained or defended herself.

She cared for the homeless, fed the hungry, visited the sick, and gave alms to the poor — thereby inspiring many others to follow her example as her children testified. She did this until the day of her death, June 9, 1837. She received Viaticum and the Sacrament of the Sick which had been given to her by her parish priest.

Her cause was opened in 1852 and she was beatified on May 30, 1920 by Pope Benedict XV who also made her protector of mothers of families and the patroness of the Women’s Catholic Union. She is also the patron of victims of verbal and spousal abuse. Her feast is June 9.

(Carole Breslin home-schooled her four daughters and served as treasurer of the Michigan Catholic Home Educators for eight years. For over ten years, she was national coordinator for the Marian Catechists, founded by Fr. John A. Hardon, SJ.)

SOURCE : https://thewandererpress.com/saints/catholic-heroes-blessed-anna-maria-taigi/

Jun 12 – Blessed Anna Maria Taigi (1769-1837)

12 June, 2012

Summary: Blessed Anna Maria Taigi, a good example of how an ordinary mother with little education can become a saint and influence others by her spirituality.

Patrick Duffy tells her story here.

Early life

Anna Maria Gesualda was born in 1769. She came from a moderately wealthy family of apothecaries in Siena. The family business failed when she was six and they had to move to Rome where she grew up in real poverty. Her parents had to work as domestic servants.

Schooling and marriage

After her schooling she could recite most of the psalms by heart, but could scarcely read or write. Her father found employment with a relative of the prominent Chigi family and Anna fell in love with Domenico Taigi, the kitchen porter for Prince Chigi, who used to bring food to her family from the Chigi palace.  They married – he was twenty eight, she was twenty. They had seven children, three of whom died.

Holiness and tensions

Married life was hard enough. Domenico was a bit coarse, but when Anna’s mother moved in,  it caused untold difficulties as she proved quite interfering. Anna Maria herself felt a call to expiate for the sins of the world by exceptional penances. She had a  vision of a dazzling globe surrounded by a crown of thorns where she could see present and future events anywhere in the world as well as the state of grace of individuals, living and dead. Domenico, not having any such vision, became ill-tempered and demanding. Also Napoleon’s invasion of Rome caused the Chigi family to leave Rome and so Domenico was unemployed for some time.

Works of charity, prayer, and spiritual advice

Anna felt called to engage in many practical works of charity – caring for the sick and dying in hospitals, helping battered wives and even looking after stray cats. Many famous people – such as Napoleon’s mother Letizia Buonaparte and the daughter of the queen of Spain Marie-Louise de Bourbon – heard of her great powers and came seeking spiritual advice. She had become a tertiary of the Order of the Trinity and later became the centre of a confraternity which met every Friday for the Stations of the Cross and prayer.

Her death and beatification

Anna’s health failed and she died in 1837. The process for her beatification brought many testimonies of her holiness from nobles, cardinals and even the pope. Benedict XV beatified her in 1920 holding her as an example of how an ordinary mother can become a saint and influence others by her spirituality. Her feast is kept on the 9th June.

Bl Anna’s body still lies uncorrupt. >.

SOURCE : https://www.catholicireland.net/saintoftheday/blessed-anna-maria-taigi-17sionary/

Blessed Anna Marie Taigi

Today’s saint was unknown to me until now: Blessed Anna Marie Taigi (1769-1837). She was known as a mystic, wife, mother, and  penitent.  She was a tertiary member of the Trinitarian order.

The beatus’ remains are interred in the Church of Saint Crisogono,  Trastevere, Rome, Italy, the neighborhood where she lived. Until about 1920 Taigi’s body was incorrupt but since then a wax face and hands have been in-place to cover for what nature destines us.

Anne was married on 7 January 1789 to Dominico Taigi, a butler to the noble family of Chigi. Together they were married for 48 years, and the parents of seven, two of whom died very young. Marriage was a crown she bore.

Blessed Anna Marie was fortunate to have found holy spiritual directors who directed her spiritual life that ultimately put her on the path to real sanctity. She was a woman of Matthew 25: gave all she could to the poor, visited the sick, and counselled many of the patients at the hospital of San Giacomo of the Incurables;  worked hard to evangelize her own family, changing her husband’s demeanor, and they all regularly assembled in a small personal chapel to pray together.

Anne Marie devoted herself to a life of prayer as a lay woman and God richly blessed her with mystical gifts, particularly the gifts of prophecy and reading hearts. One ought not to underestimate the power of asking the Holy Spirit for gifts necessary to do the Father’s will: you may just get what you ask for.  It is recorded that she went into ecstacies, and received heavenly and prophetic visions. The gift of counsel allowed her to be a counsellor to cardinals, royalty and to three popes.

As a person in-touch with the need for forgiveness, Blessed Anna Marie is especially important for those who think their past sins cannot be forgiven!

The charismatic gifts, and her lack of concern about worldly matters, Anne was often the topic of gossip and sander, but she was the recipient of public veneration soon after her death, and her Cause for sainthood began in 1863.

The recorded acts that has encouraged the Church to study the life of Anna Marie has now given us Blessed Anna Marie Taigi, a woman who had a simple presence and a powerful effect on many –she was instrumental with many conversions. It was Pope Benedict XV on May 30, 1920, who declared Anna Marie a blessed of the Church. More of her life can be read here.

SOURCE : https://communio.stblogs.org/index.php/2015/06/blessed-anna-marie-taigi/

BLESSED ANNE MARIE TAIGI

Blessed Anne Marie Taigi was born in Siena on May 29, 1769 and baptized the following day. Because of financial difficulties, her parents, Louis Giannetti and Mary Masi, moved to Rome when Anne Marie was six years old.

In the Eternal City, Anne Marie attended the school conducted by the Flippini Sisters for two years. Following her schooling she worked at various occupations, even that of a maid, to bring financial assistance to her parents.

When still a young girl, she married Dominic Taigi, a pious young man but of difficult and rather coarse character. Disregarding these defects, Anne Marie was more concerned with his virtue and for the forty-nine years of their married life she conducted herself with the greatest affability and delicacy, finding ample opportunity to exercise continually the virtues of patience and charity.

Their marriage was characterized by the highest Christian principles. Understanding the profound social and moral values of Christian marriage and considering it, above all, as one of the highest missions from Heaven, Blessed Anne Marie transformed her home into a real sanctuary in which God had the first place. Docile to her husband in every way, she avoided anything which might irritate him and thus disturb the family peace. Serious and hardworking, she saw to it that nothing was lacking to her family and, in so far as one in her impoverished circumstances could, she was generous to the poor.

She bore seven children, three of whom died in childhood. Two boys and two girls grew to maturity and she provided them with the most accurate and complete religious and secular education.

Having sought to correspond to grace from her childhood, she now began to live a life of intense spirituality. She had one desire only: to love God and to serve Him in everything; she had only one preoccupation: to avoid the least shadow of the slightest voluntary imperfection. She was greatly devoted to the Holy Eucharist, to the Most Holy Trinity, to the Infant Jesus, to the Sacred Passion of Our Lord and ever had the tenderest devotion to our Lady.

God enriched her with many supernatural gifts. The most unusual of these was the apparition of a luminous globe like a miniature sun which shone before her eyes and in which, for forty-seven years, she could see present or future events anywhere in the world as well as the state of grace of individuals, living or dead.

She died on June 9, 1837, and was beatified on May 30, 1920. Her body is buried in Rome in the Basilica of San Crisogono.

Provided Courtesy of: Eternal Word Television Network, 5817 Old Leeds Road, Irondale, AL 35210

www.ewtn.com

SOURCE : http://www.ewtn.com/library/MARY/TAIGI.htm

Stories of Holy Lives – Venerable Anna Maria Taigi

Article

In the world around us there are many persons struggling with the difficulties of poverty, who are loaded with cares and anxieties which seem to hinder them in the service of God. There are many who cannot offer Him a pure heart which has never been stained by sin, yet, in their grief for misspent time and neglected grace, would gladly atone for the past by fervent, grateful love, casting themselves upon the mercy of the Saviour; and to all such the life of Anna Maria Taigi is full of holy lessons of contrition, of patience, of the faithful discharge of daily duty, and of a spirit of humble, constant prayer.

It was upon the 80th of May, 1769, that she was born in the city of Siena, and baptised at the Church of Saint John the Baptist there.

Her father was in business as a chemist, but when Anna Maria was about six years of age he lost all he had through his own fault, and having no means of living in Siena, he resolved to go to Rome, and his poverty was such that he, with his wife and little daughter, had to journey on foot the whole way.

Wishing to give the child a Christian education, her parents placed her in a school under the care of some nuns, and there she prepared to make her First Communion, which took place when she was about thirteen years old. The time had come then for her to leave school and assist her mother. The world seemed very bright and tempting, and she felt drawn to its pleasures, but Jesus and His Mother watched over the young girl, and preserved her from falling into any great sin.

In 1798 Anna Maria married Dominic Taigi, who was employed in the service of a noble family, and although he was a man of good character, he had a disposition which was very trying to his wife, and gave her constant opportunity for the exercise of patience and gentleness.

But as soon as the marriage had taken place it would seem that Anna Maria forgot the teaching of earlier years, and gave herself up to the pleasures of the Italian people. Dress was the first object of her desire; theatres and other places of amusement possessed a charm which the practice of her religion did not then afford her; serious temptations fell across her path, and she did not seek God’s grace to resist them. Conscious of her sinfulness and worldliness, Anna Maria was not happy. There were moments when she found distraction in pleasure which was sufficient to silence the pleading of the Holy Spirit, but God was too merciful to let her alone, and in His love He filled her heart with pain and remorse.

One day she was setting off to some amusement, dressed in very gay attire, when a holy priest whom she did not know met her in her way, and as she passed the voice of his Master seemed to say to him, “Dost thou see that woman? Thou wilt convert her, and she will be a saint.” The priest was much struck by this occurrence, and pondered over the words which he had heard. But Anna Maria was as yet unconscious of God’s purposes with regard to her, and some time had still to pass before she loosed her hold of the vanities of the world.

At last the day came when in her misery and remorse she resolved to begin a new life, and going into a church, she entered a confessional, and said to the priest who sat there, “Father, you see before you a great sinner.” It seems strange to hear that the priest bid her leave him, saying that she was not his penitent, but thus it was; and Anna Maria, full of confusion and discouragement, went away: however the impulse of grace remained in her heart, and after some delay she went to another church, desiring to be reconciled with God.

Once more she entered the first confessional in which there happened to be a priest, but before she spoke he exclaimed, “So you, are come at last.” It was the Religious who had once met her gaily dressed for a scene of pleasure, to whom God had promised her conversion, though she knew it not; and now he told her what had happened to him, and the impression made upon her was so great that she generously gave herself up to her Lord, confessing every sin against Him with the deepest contrition. Thus Anna Maria Taigi found one who bestowed upon her the greatest care, helping her to practise virtue, as well as instructing her in the way of self-renunciation and sacrifice which God seemed calling her to pursue, and thus the apparent harshness of the priest who had refused to listen to her proved the means of carrying out the Divine purpose by leading her to another who could better undertake the guidance of her soul.

Anna Maria Taigi’s conversion was thorough, and she wished at once to give up the fine clothing and ornaments which had been to her occasions of many temptations and sins; she longed also to practise severe penances in expiation of her offences against God, but in this her confessor frequently restrained her.

In reading the lives of the favoured servants of the Almighty, we cannot fail to be struck by the different methods by which He rules and guides them, and thus we find that Anna Maria had only just given her heart to God when He poured out upon her wonderful gifts and graces, which are often delayed till the later years of some of the greatest saints. Perhaps thus her soul was more penetrated with a sense of His great love – a love so undeserved by one who had neglected and turned from Him too long; perhaps this was her best preparation for the bitterness of desolation which was to follow. However, her intimate union with God caused such raptures of love, that she frequently appeared quite out of herself, neither seeing nor hearing any one who was present.

When Anna Maria received Holy Communion, her love for Jesus was so ardent that some sign of it would appear upon her face, and many persons observed her fervour, and would wait outside the church and ask for her prayers. Others called her a hypocrite, or said she was an enthusiast, and in different ways she attracted so much attention that she was obliged to make her Communions sometimes in one church and sometimes in another, until her Lord Himself made known to her that His Will was for her to frequent her own church and make no account of those who remarked her.

In the year 1799 the French had come to Italy to make it into a republic, and one morning the troops were hastily assembled in the square where the Church of Our Lady of Piety was situated, and the noise and confusion caused all the people there to hasten home, with the exception of Anna Maria Taigi. The sacristan came to shut up the church, and found her motionless in prayer, giving no sign of having heard anything; and it was not for some time that she rose up, finding with surprise what had happened, and then passing quietly without any molestation through the midst of the French troops.

But although God gave His servant these favours in prayer, He soon called her to suffer for Him both pains of body and the far worse pains of soul which followed the sweetness of the days succeeding her conversion. Temptations to doubt her faith, temptations to hate God- in these and other such ways was the enemy of souls permitted to try her; but when her need was greatest our Lord always came to her help, and taught her to drink lovingly of His own chalice.

Great privations had to be borne in her home life also, for it seemed that God’s way was to keep her in continual want. After a while her earnings were scarcely sufficient to give her children bread, but in all these anxieties she betook herself to prayer, and in a miraculous way help came from those who were often perfectly unknown to her.

Upon one occasion, when her distress was very great, Anna Maria went to the church of Saint Paul, and as she prayed there before a crucifix, she heard a heavenly voice say, “Go home – you will find providence there.” Scarcely had she entered her dwelling before a letter came containing money, from one who had never heard from her of the state of mind she was in.

As a wife and mother this holy woman was faithful in discharging every duty, yielding to her husband with much humility, and by her sweetness and patience winning him to a more Christian life than he had before pursued. She brought up her children with the greatest care, not only teaching them what was right, but setting it before them by her own practice, and removing from them every occasion of sin as far as lay in her power. The morning began with prayers, after which the elder ones were sent to work and the younger to school; in the evening she recited with them the rosary and night prayers, and always took care to see that they avoided evil company. On holidays of obligation she was not satisfied with their attendance at Mass alone, but sent them also to Catechism, or to hear some preacher, and thus she neglected nothing which was a means of grounding them in the knowledge of their religious duties, praying always that they might each receive grace to practise at home and abroad what they learned, and become faithful children of Christ’s Church.

The charity of this poor woman was extended to all who might need it. Wonderful conversions were granted to her prayers, and while her first thought was for the souls of others, she did not forget to aid them in temporal trials. Though so poor, she would share what she had with those who were still poorer, and if she had nothing to give she would then try and interest some richer person in their favour. Her visits to the hospitals were frequent, and she would sometimes take her daughters with her, hoping to teach them great charity for the sufferers.

Anna Maria did not escape those calumnies and injuries which in some degree are always the portion of those whom God loves best. One person, a neighbour, conceived a violent hatred for her, which lasted more than eight years, during which time she accused her both in public and private of being a hypocrite, and of leading a most wicked life, although trying to disguise it under the appearance of piety; yet during this long trial the servant of God only prayed for the unhappy woman, and never lost patience or omitted showing her a kindness if ever the opportunity came.

While God thus suffered Madame Taigi to bear trials of so many kinds from His hands, He also led her to practise many severe mortifications by fasting, and especially in abstinence with regard to drinking, for she frequently deprived herself of even a drop of water for a whole week. Wednesday, Friday, and Saturday were days upon which she always fasted, and for special reasons she would undertake special fasts for long periods.

Such a life of fidelity, humility, and penance drew down from heaven the choicest blessings which God gives to souls that are very dear to Him, and she was made the instrument of help and salvation to many. One of the noble families of Rome owed to her prayers the restoration to health of many of their children, who had before been constantly ailing. One day she was making the pilgrimage of the Seven Churches with some friends, when a drenching rain compelled her to seek shelter in some house near by. There lay a woman dying, the last Sacraments had been administered to her, her friends knelt weeping round her bed, and Anna Maria began to pray, making over the sick person the sign of the Cross with a small picture of the Blessed Virgin. Presently the rain ceased, and she left the room, to continue her pilgrimage, but before she had descended the stairs, the watchers by the sick-bed ran to tell her that the dying woman was restored, and had begun to speak once more.

Amidst all these graces she showed the greatest humility, never speaking of spiritual helps which she received excepting to her confessor, or by his desire to a few whom she assisted in devoting themselves to the service of God; and in such cases her words were those of a person who feels herself completely unworthy of the gifts of her Divine Spouse.

At last, Anna Maria became so ill and suffering that she was forced to keep her bed, and for more than nine months she lay there, bearing acute pain with perfect sweetness and submission, her one consolation being that she received Holy Communion daily.

In the month of June, 1887, she was seized with fever, but it passed, and no one felt any special anxiety as to her state, yet she herself knew that death was near, and so she began gradually to set all her household affairs in order, that she might have nothing to occupy her but heavenly things.

Towards the last, Anna Maria called her husband and children to her, to take leave of them, placing them first under the special protection of the Blessed Virgin, and then of Saint Philomena, to whom she had ever a great devotion; and after receiving the last Sacraments her sufferings increased, and she lost the power of speech, but it was God’s Will that she should expire almost suddenly – when those who had watched her thought she would live some hours – upon a Friday night, as she had herself predicted.

Anna Maria’s extraordinary graces and virtues had not – with all her efforts – been hidden from the world, and when she was dead, visitors came from distant parts to kneel beside her tomb; and so many persons have given testimony of the sanctity of this poor woman, that it is believed God will so make manifest the gifts He bestowed upon her as to lead to her being raised to the altars of the Church. Meanwhile, the history of her humble life is given as an example of piety and devotion, that we who read it may seek grace to give ourselves wholly to God, as she did, and while dwelling in the world, meeting its trials and difficulties, struggling perhaps against its temptations, and burdened with its cares, may, like Anna Maria Taigi, learn to find God in all things, and keep closely united to Him.

MLA Citation

M.F.S. “Venerable Anna Maria Taigi”. Stories of Holy Lives. CatholicSaints.Info. 5 May 2022. Web. 2 May 2023. <https://catholicsaints.info/stories-of-holy-lives-venerable-anna-maria-taigi/>

SOURCE : https://catholicsaints.info/stories-of-holy-lives-venerable-anna-maria-taigi/


 Reliquiario contenente frammento ex corpore Beata Anna Maria Taigi (Prov. Postulazione Causa Anna Maria Taigi - Basilica San Crisogono Roma)


JUNE 9, 2016

Blessed Anna Maria Taigi: Housewife, Mother and Saint

BRIAN KRANICK

Imagine the saint who was a renown healer and a great mystic, who conversed with Jesus and Mary, and was supernaturally gifted by God for 47 years with a miraculous, luminous globe that stayed with her at all times, and in which, she could see nearly all things hidden, present, and in the future.  Was this an ascetic monk, or an angelic nun?  No, this was Blessed Anna Maria Taigi, an ordinary housewife and mother to seven children.  Bl. Anna Maria Taigi lived a saintly life as an ordinary layperson with worldly responsibilities, a spouse and children.  Bl. Anna Maria is a great reminder to us that the intimate life of the soul with God is not meant for just the religious and the consecrated, but for all people.

Anna Maria was born on May 29, 1769 in Siena, Italy.  She did not have wealth or worldly means.  As a young woman she married Dominic Taigi, a pious man but with a rough temper.  One day while they were at St. Peter’s Basilica in Rome, Anna Maria was overcome with an inspiration to renounce her worldliness.  She had been given over to some vanities, such as clothing and jewelry, but now began a new life of self-renunciation.  Her strong interior illumination showed the state of her soul with the effects of sin and its misery before God.  With that, she embarked on a life of obedience, mortifications, submission, patience, humility and self-renunciation.

Anna Maria found many opportunities to exercise her spiritual discipline of patience and charity towards her husband and children.  She considered marriage one of the greatest missions from Heaven.  For 49 years she submitted herself before her husband, keeping peace with him, assuaging his temper, and providing all things for her family.  She was the quintessential housewife.  She always fulfilled first her duties as wife and as mother, managing the daily activities of her home; cooking and cleaning, and rearing the children, including teaching them to pray.  She embraced a martyrdom of humility in submitting herself to all those around her.  This was her vocation of extraordinary holiness in the ordinariness of marriage and motherhood.

Yet, even though Anna Maria imposed great penances and mortifications upon herself, she never demanded that from other people.  In fact, she tried all the more to serve those around her, especially her family, trying to make them happy and comfortable.  Despite her self-sacrifices, she showed great affability to everyone else, including a special compassion and charity for the poor and suffering.  She sought above all else to serve God through serving her family and others.

She also devoted herself to the Church, especially to the Sacraments of Confession and Holy Communion, attending Mass daily.  She had a special devotion to our Blessed Mother, and to the Holy Trinity.  On December 26, 1808, she entered the Third Order of the Most Holy Trinity as a layperson.  She lived a sacramental life in the midst of the world.

Once, she heard the interior voice of Jesus tell her, “The greatest merit consists in being in the midst of the world and yet holding the world under one’s feet.”  Jesus also told her, “Virtue consists above all in the mortification of one’s own will.”

The Blessed Virgin spoke to her as well.  She told Anna Maria, “You must be devoted above all to doing His will and submitting your own constantly to his in the state of life to which it has pleased Him to call you; therein lies your special vocation.”  True virtue is surrendering our will for the love of God in all things.

Jesus called Anna Maria to self-sacrifice and redemptive suffering, to be lived out in the midst of her marriage and motherhood.  It was in her ordinary life that she progressed in sanctity and holiness.  Blessed Anna Maria Taigi died June 9, 1837, with June 9th now her feast day.  Years later, her body was exhumed and found to be uncorrupted.  On May 30, 1920, Pope Benedict XV, beatified Anne Maria by declaring her “Blessed,” one-step from official canonization.  She is now the patron saint of housewives, mothers, and victims of verbal and spousal abuse.

Blessed Anna Maria Taigi is a saint for the modern age.  She reminds us that no matter what our state in life or vocation, layperson, single, married, children or no children, God calls us to renounce our self-love and self-will, abandoning it to the will of God, by submitting it for the good of others, and in this way, strive to be saints within the world.

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By Brian Kranick

Brian Kranick's latest book is Burning Bush, Burning Hearts—Exodus as a Paradigm of the Gospel. Brian is a freelance writer focusing on all things Catholic. He has a master's degree in Systematic Theology from Christendom College. He has spent years working as an analyst in the Intelligence Community, and currently resides with his wife and three children in the Pacific Northwest.  He is the author of the blog: sacramentallife.com.

SOURCE : https://catholicexchange.com/blessed-anna-maria-taigi-housewife-mother-saint/

The Holiness of the Church in the Nineteenth Century – Venerable Anna Maria Taigi

Article

The fame of the Venerable Anna Maria Taigi has already spread throughout the world. The opening words of the decree introducing the process of beatification of this servant of God are as follows:

“When God wills to show His power and wisdom, He chooses what is weakest and most foolish in the eyes of the world to confound its vanity, frustrate the plans of the godless, and repulse the assaults of hell. Thus, in our days, when human pride seems to have conspired with the powers of hell to undermine both the foundations of the Church arid the very principles of human society, He chose for this work Anna Maria Jesualda Taigi, who, born of poor but virtuous parents, married a working-man and, since the care of the family lay mostly upon her shoulders, supported it by the work of her hands. God selected her to lead souls to Him, to serve as a victim of atonement, to be a bulwark against the assaults of His enemies and to avert misfortune by her prayers. After he had drawn her away from the current of the world, He united her to Himself by the bond of charity and adorned her with miraculous gifts and with such virtues as exercised a salutary influence upon pious persons, even in the highest stations, and also upon the godless and made the sanctity of the servant of God to shine before all men in the clearest light.”

That the words of the decree are not exaggerated, a few facts from the life of the servant of God will make fully clear. Anna Maria was born on May 29, 1769, at Siena, the daughter of an apothecary, Luigi Giannetti. Heavy reverses of fortune had reduced the once distinguished family almost to beggary. In 1775 Giannetti and his wife went to Rome and obtained positions as house-servants. He placed his daughter under the care of religious women devoted to the education of the children of the poor. When Anna Maria was thirteen she was obliged to help in earning the daily bread for the family. She first worked in a factory as a silk-spooler, afterward she was chambermaid to a lady of the nobility. Anna Maria could not altogether resist the allurements of the world, which exercise so strong an attraction upon persons of her age and condition. She longed to taste all the pleasures of life. She had no suspicion of the great danger she was exposed to, and it was only the good example of her parents and her religious training that kept her from ruin.

On 7 January 1790, she married Dominic Taigi, a servant in the Chigi Palace. During the first year of her marriage she still indulged in vanity and pleasure-seeking. But Anna Maria did not find the expected peace. Grace ever knocked harder at the door of her heart. Thoughts of God and of the hereafter continually rose more and more vividly before her mind. She now went to a priest for the purpose of making a general confession of her life. He barely allowed her to complete her confession, gave her absolution and said: “Go! You do not belong among my penitents.” This rough treatment caused the poor woman to fall into despondency and anxiety of mind. After a time she picked up courage again and sought another confessor. This time Providence led her to a wise director. It was the decisive hour of her life. She called it her conversion.

She had now put her hand to the plow, never more to look back; and till her death remained the most pliant instrument of grace. Rich gifts of mind and heart adorned her – a clear understanding, a deep humility, a strong and magnanimous character. To these natural gifts was added an extraordinary measure of grace. With all these powers Anna Maria now endeavored to reach the perfection of her state in life. She avoided all finery in dress, all exterior show and rejoiced in appearing poor. She seldom took part in worldly amusement and then only to please her husband. She considered it important that others should notice her change of mind, because she hoped thus to make amends for any scandal she might have given in the past. In prayer she now found an indescribable consolation and in prayer she spent all the time not employed in the performance of her duties as mother and housewife. Frequently she deprived herself of her night’s rest to satisfy the longing of her heart for God. There is no sanctity without mortification. Anna Maria Taigi eagerly looked for every occasion to make a victim of herself, though always careful to conceal it from others. Only her director and the duties of her state could set bounds to her zeal for external penance.

She well understood that her desire for prayer and penance should not in the least interfere with her duties as wife and mother. Her husband was a truly religious and good-hearted man, while at the same time somewhat narrow, eccentric, and hard. But she was so much mistress of herself that she could always anticipate his wishes and treat him with the greatest love and friendship. Dominic Taigi has left us a candid declaration on this point:

“It often happened that on my return home I found the whole house filled with people” – he speaks of the time when his wife was already known throughout all Rome – “at once she would leave them all alone – let them be prelates or great nobles who were present – and come to serve me with courtesy and attention. And they realized that her whole heart was in it when she loosened the latchets of my shoes, although I would have prevented her. In a word, she was a consolation to me and to everybody else. She knew how to admonish one skilfully and J. can thank her for the amendment of certain faults which I had. She gave me her admonitions with incomparable kindness and gentleness. . . . She was able by her wonderful prudence to preserve a heavenly peace in the family, although we were numerous and had very opposite characters among us, especially when my oldest son Camillus came to live with us at first after his marriage. My daughter-in-law had a very irascible temper and would play the mistress in everything. But the Servant of God was most tactful in keeping every one in the proper place, and this with so great courtesy that it can not be described in words . . . I was often sad, discouraged, and ill-tempered on arriving at home, but she knew how to cheer me and to restore peace by her amiability.”

Practically the whole care of providing for the family and the management of the house devolved on Anna Maria. It was not a small family. She had borne seven children, two of whom God took early to Himself. In addition, she had to care for her aged parents. In after years, persons of rank often proposed to make ample provision for her family, but she would never accept anything for herself or hers. She desired to remain in the condition of life in which God had placed her. She was and remained a poor workingman’s wife, but one wholly imbued with Christian spirit and therefore the possessor of profound contentment.

The Servant of God let pass no opportunity of promoting the spirit of religion. In the morning she gathered the whole family for prayer. Condition of work permitting, all in the house heard a Mass in the course of the forenoon and frequently received the sacraments. At night the family assembled for pious reading, to which the mother added some instructive religious conversation, ending with the Rosary and night-prayers. She watched over her children most carefully, especially when they were growing out of boyhood and girlhood, encouraging them to frequent Communion and guarding them against dangerous companions. Even when they were about to enter the married state, she would not permit the betrothed to converse together without supervision.

The goodness of God brought it to pass that the extraordinary virtues of Anna Maria became known to the world around her during her lifetime. Her little house became the chief center of attraction in Rome. Princes of the Church, prelates, and persons of high station in the world came and went, asking the intercession of her prayers or seeking her advice. The Venerable Bartolomeo Menochio, Papal Sacristan; the Venerable Vincent Strambi, and many others distinguished for their sanctity were her intimate friends, and the Popes Pius VII, Leo XII, and Gregory XVI showed the greatest veneration for the poor workman’s wife. Many miraculous events, due to her intercession, are well attested. God supernaturally enlightened her concerning the state of consciences, the designs of Providence in the afflictions of the Church, the mysteries of faith, and so forth. All was revealed to her in a mysterious sun which was continually suspended before her eyes.

It was the chief purpose of her life to aid the Church by prayer and suffering; and she was consumed with a burning zeal for its interests. She made sacrifices, prayed, and caused others to pray, whenever any important matter was in progress. Sinners were the principal object of her care. She was rich in sufferings. God tried her with dreadful desolation, sent her many illnesses, and permitted her to meet with hatred and persecution. She herself said that it often seemed impossible to bear the torture of the martyrdom any longer. Yet her courageous spirit of sacrifice never wavered.

In spite of such extraordinary graces, Anna Maria Taigi looked upon herself as the least among the people and fit only to serve others. It touches the heart to read of her profound humility. Truly the saints have so lofty an idea of God’s majesty that they deem it presumption to desire to be considered anything in themselves.

May we not piously assume that Anna Maria prayed to be permitted to die unhonored? For when she departed this life on 9 June 1837, no attention was paid to her death. But it was not long till her tomb became glorious. High and low revered her as a saint and at length the Apostolic See took steps to inaugurate the canonical process of her beatification. Its completion is near at hand.

MLA Citation

Father Constantine Kempf, SJ. “Venerable Anna Maria Taigi”. The Holiness of the Church in the Nineteenth Century: Saintly Men and Women of Our Own Times1916. CatholicSaints.Info. 28 April 2022. Web. 2 May 2023. <https://catholicsaints.info/the-holiness-of-the-church-in-the-nineteenth-century-venerable-anna-maria-taigi/>

SOURCE : https://catholicsaints.info/the-holiness-of-the-church-in-the-nineteenth-century-venerable-anna-maria-taigi/

Blessed Anna Maria Taigi (1769-1837) -Wife, Mother and Mystic

-Among many other extraordinary mystical gifts, Anna Maria Taigi was often given a remarkable sun-globe wherein she saw past, present and future happenings.

The main source for this article is the book “Wife, Mother and Mystic” by Albert Bessieres, S.J., translated from the French by Rev Stephen Rigby, Tan Books, 1970, availible through Tan books here.

Early life

Blessed Anna Maria Taigi was born in Siena, Italy on May 29, 1769. Her parents, Luigi Giannetti and Maria Masi were of a poor, working class family, and Anna was of Italian and Tuscan blood. She was Baptised Anna Maria Antonia Gesualda on the day after her birth. Due to the collapse of her fathers buisness, when she was 6 years old she moved with her parents to Rome, where she remained the rest of her life .

In Rome, Anna Maria (she was nicknamed “Annette”) attended for 2 years parochial school of the Filippini Sisters the “good Mistresses” as they were called. Following her schooling, she worked as a household maid and several other non-skilled occupations in an effort to help with the family finances. Throughout her childhood and teenage years, she seemed to be of average piety and spirituality.

At age 20, on January 7, 1790, she married Domenico Taigi, who was a poor porter or “servant” of the chef for Prince Chigi. Domenico’s morals and piety were very good, but he had a terrible temper. Or, as the decree for Anna’s Beatification puts it “his [Domenico] manners were rough and uncultured and his temperment undesirable.” His brusque and turbulent manner and quick temper caused Anna much suffering, but it also caused her to exercise her virtue of patience, meekeness, humility and forgiveness. She learned that a smile and silence often appeased his wrath. He never was physically abusive to her, but he certainly was a tyrant at times. Nevertheless, he loved her deeply, as once can easily detect the frank and sincere testimonies that he gave during the official process of her Beatification. As the years progressed, bore seven children, three of whom died in childhood. The remaining two boys and two girls grew to maturity with her ever attentive concern for both their religious and moral upbringing, along with their secular education.

The Call of God- Her deep conversion

Describing her life as a young wife, one source states “"Chaste in morals, attached to her wifely duties, Anna-Maria yet lived more for the world than for God.” However, an increasing sense of spiritual disturbance began to mingle with Anna's frivolities and worldliness. One day she went to the Basilica of St. Peter's. There was a great throng. She was leaning on the arm of her husband, all radiant and decked with her prettiest necklaces. They were in the piazza, surrounded by Bernini's colonnade. The jostling of the crowd threw her against one Father Angelo, a Servite. He had never seen the young woman before, but he heard an interior voice say: "Notice that woman, for I wiII one day confide her to your care and you will work for her transformation. She shall sanctify her­self, for I have chosen her to become a saint."

Eventually Anna Maria made up her mind to leave her worldliness aside and to make a good confession, so she went to a neighboring church, seeking in con­fession the solution to her unsettled conscious. She chose a confessional surrounded by numerous penitents, but on entering it in her turn tears overcame her, and she cries: "Father, you have at your feet a great sinner." The priest wondered for a moment who the unknown might be, and then said brusquely:

"Go away; you are not one of my penitent." How­ever, he consented to hear a hasty recital. Yet discovering nothing to justify her passionate out­burst, he gave her absolution and curtly slammed back the slide, leaving the unfortunate woman more troubled than ever.

There followed a period of discouragement. In a soul of poorer caliber the matter might have had a tragic ending; in truth it had an ending as fortunate as that of St. Teresa of Avila, so misunderstood and mishandled by one confessor after another.

After having savored this humiliation, Anna returned to pray in the church of St. Marcellus, where she had been married. Entering one of the confessionals in trepidation, she found herself in the presence of the curate, a religious of the Servite Order, Father Angelo Verandi. It was he who in the piazza in front of St. Peter‘s had heard the Lords voice say to him: "Take notice of that woman .... I am calling her to sanctity."

Now, our Lord enabled him to recognise her: "So you have come at last my daughter," he said. "Our Lord loves you and wants you to be wholly His" and he told her of the message he had received before at St. Peter's. Anna had spent three years in vain worldly triflings, and now a new life was to begin. Concerning Anna’s spiritual direction, Father Angelo needed it to undertake a task so infinitely delicate. For Anna Taigi was neither a Carmelite Nun nor a devout widow, but the young wife of Domenico, by whom she was to have seven children in a dozen years. There lay her essential duty. Everything else: penances, prayers, miracles, ecstasies, could play their part only in so far as the obligations of her state would allow. Consequently it was no good for Father Angelo just to re-read St. Teresa; he had to have, together with mystical learning, a robust common sense and a profound humility to guide this young mother and wife.

The first demand of the Master was purification: to that end God immediately gave Anna a keen conscience of her own weaknesses and misery. St. Catherine of Genoa describes these terrible enlightenments given by God concerning our sins by saying:
"He finds fault with everything."

This spirit of penance, so far as the Beata was concerned, dated from the moment of her confession at St. Marcellus, and was never to leave her. Upon returning home, she prostrated herself before the new little altar that she had made in her room, gave herself a pitiless scourging and beat her head severely many times on the floor till the blood came. Father Angelo soon had to check this thirst for penance and austerities and to remind her she was a wife and mother and that such extraordinary penances were not her duty—her duty must lie in the holy fulfillment of her state in life.

The ever-present difficulty was that her husband Domenico was no St. Joseph. The first of Anna's miracles was to get him to consent to forgo all those luxuries in which he led the way and sought her participation. Wonderful to say, he surprisingly became resigned to the holy will of his wife.

"About a year after our marriage," he says in his official deposition, "the Servant of God, while yet in the flower of her youth, gave up for the love of God, all the jewelry she used to wear--rings, ear-rings, necklaces, and so on, and took to wearing the plainest possible clothing. She asked my permission for this, and I gave it to her with all my heart, for I saw she was entirely given to the love of God."

This miracle of grace moves one more than the cure of incurables, of which we are yet to recount. "I have chosen her .... I call her to sanctity." -Such was the message of our Lord as heard by Father Angelo. God had decreed that this woman of twenty-one years, who was suckling a new-born baby, was to be a Saint and a great help for the Church.

Anna begins to hear an inner Voice

Not long after her fervent coming to God, our Lord pointed out the first step in her ascent to Him- The enormous value of simplicity and charity towards others:

"Remember that you must be prudent in everything. The devil, My daughter, is a spirit of contradiction. He who is under the devil’s influence cannot rest either day or night. My spirit, on the other hand, is a spirit of love and peace, full of condescension for every­thing that is not sin. Who possesses My peace, possesses all things: Many souls do severe penance in order to reach this great good. None can reach the peace of my elect unless strives to become as simple as a child and to acquire from the start true charity. Who possesses charity, My daughter, possesses patience. Charity works with zeal and love. It speaks evil of no one, for it fears to lose the precious pearl of My friendship. It understands all, sees all notices all, but it covers all with Its mantle. It excuses the faults of its neighbors, and sympathizes with his sorrows and says to itself: 'Truly, I would be even worse, if You did not come to rescue me.’

"You must know," said Jesus to her, "that when I speak to you I produce in you tenderness, peace, compunction for your sins and above all, humility. Know well, my daughter, that no matter how much he desires to love me, if a man enter not the straight path of humility he will keep on stumbling. Man has within himself a dust that settles round his heart; it is called self-love ....Man is full of pride, and I have nothing to do with the proud. Only the humble find favor in My sight. He who wishes to taste My delights must despise the world, and expect to be despised by it in turn."

"I make My abode in humble souls that are full of simplicity. The more lowly and uncultured they are, the more I take pleasure in them. As to these wise and learned professors whose heads are. full of the fumes of pride, I put them down from their seats, and you yourself shall soon learn where I send them. Thus ends their false wisdom and self-advertise­ment. Oh My daughter, I exalt those who humble themselves. They merit My Kingdom, and to these I unfold all My secrets. Love then to meet with contempt, for love of contempt is a true foundation of virtue.”

The Blessed Virgin Mary also became her guide and helped her to prepare for the mission that God had called her to:

"Know well, My dear daughter, that here below you will have for every one. good day a hundred bad ones, because you must be like My Son Jesus. You must be devoted above all to doing His will and submitting your own constantly to His in the state of life to which it has pleased Him to call you; there­in lies your special vocation. Later on, when people come to examine your conduct closely, every indi­VIdual must be able to convince himself that it is possible to serve God in all states and conditions of life without the performance of great exterior penances, provided only one fights vigorously against one's passions and conforms oneself in all things to the holy will of God. Remember it is far more meritorious to renounce one's own will and submit oneself entirely to the will of God than to perform the greatest bodily mortifications."

Anna Maria is given the extraordinary miracle of a mystic globe-sun

Jesus told Anna Maria that by being a simple wife and mother she was to be a sign that holiness and union with God is available to everyone. He further stated “Jesus described her mission: "I destine you to convert sinners, to console people of all sorts and conditions-priests, prelates, My very Vicar himself. All who listen to your words will be granted signs and graces at My hands .... But you will also meet with false and treacherous people; you will be submitted to ridicule, scorn and calumny, but you will endure it all for love of Me."

This frightened her. "My God, whom are You choosing for this task? I am a creature unworthy to tread the earth." “I see that also," answered the Voice. "It is I who will guide you by the hand, as a lamb is led by the shepherd, to the altar of sacrifice."

As she was praying one day in the church of St. Andrew della Valle, before the crucifix she heard this question from the lips of the Crucified: "What is your wish? To follow Jesus poor and naked and stripped of all, or to follow Him in His triumph and glory? Which do you choose?" "I embrace the Cross of my Jesus," she answered. "I will carry it, like Him, in pain and ignominy. I await at His Hands triumph and glory in the hereafter."

It was in 1790, the very year of her call, that the Beata was the object of a most unique and remarkable favour.

The Decree of the Beatification thus refers to it:

"Among other gifts the most remarkable was that for a space of forty-seven years she saw a kind of sun in whose light she descried things at hand and things afar off foresaw future events, scrutinized the secrets of hearts and the most hidden and most inward impulses." Suddenly, then, in her humble home, Anna saw a little above her head, as it were a blazing sun crowned by a circle of thorns; two long thorns clasped it round; in the centre was the Eternal Wisdom (presumably), represented by a young woman seated in contempla­tion. Films of cloud dimmed the dazzling light, but an interior voice told her that the clouds would disappear according to the increasing measure of her purification. In this light she was to see, until her death, not only everything that might conduce her to perfection, but also everything that could help win others for God and allow her to help the Church militant or suffering.

Cardinal Pedicini, who knew Anna Maria for over 30 years, and whose position in the great Roman congregations shows a rnan little given to credulity or wild assertions speaks at great length in his judicial depositions concerning this prodigious gift:

"For forty-seven years, day and night, at home, at church, in the. street, she saw in this sun, which became increasingly brilliant, all things on this earth both physical and moral; she penetrated to the depths and rose up to heaven, where she saw the eternal lot of the dead. She saw the most secret thoughts of persons nearby or far off; events and personages of bygone days ....She had only to think of a thing and it presented itself in a clear and, complete manner .... A mere glance at this mystic sun and she entered at will into the most secret council-rooms of kings.

She saw the people who handled affairs, the places concerned, the opinions that each one held, the sincerity or guile of the ministers; all the back-door diplomacy of our era, and also the decrees of God for the confusion of these mighty ones. She saw the plotting and the dark ­gatherings of various sects; the members of these societies, their ranks, their ceremonies--all in the minutest detail and in all parts of the world--all as if it were happening in her room ....We may say that this gift was one of omniscience for it was the knowing of all things in God so far as the intelligence is capable of such knowledge in this life.... She saw distant sea ships being wrecked and heard the cries of the shipwrecked; she penetrated into the prisons of China and Arabia ... where confessors of the faith, slaves and prisoners languished in agony .... In this way did she exercise an un­bounded apostolate, won souls to grace in every part of the globe, and prepared the way for missionaries; the entire world was the theatre of her labours .... Nor let anyone think I am exaggerating, for, on the contrary, I find myself incapable of describing the wonders of which I was for thirty years the witness."

The Cardinal added that if obedience compelled the holy woman to hide nothing from him, she took extreme pains to remain hidden herself from people whom she benefited by means of the lights God gave her. Above all, she was most anxious to receive no gifts from them. Princes of the Church, kings, queens, Popes and saints came to ask this humble woman to teach and enlighten them to the secrets of heaven. She enlightened them to the extent demanded by obedience, putting far from her all spirit of curiosity, not even asking an explanation of those things she failed to understand.

"A prodigy unique" in the annals of sanctity is the way the Decree of Beatification speaks of it, and it is to be explained by the unique circumstances in which the world and the Papacy then were. A crumbling world threatened to involve the Church and the Papacy in its own ruin. Her mission then was to help those who were in charge of guiding the Church through this difficult and turbulent period. Her husband stated:

“She prayed for the Holy Father, for the Cardinals and Bishops, for the conversion of sinners, for heretics, for all the world, for evil tongued people…it all seemed to me a paradise”
Concerning this miraculous sun, in a book by Louis Veuillot entitled “The Fragrance of Rome” we read:

“In the Decree that introduces the Process for Beatification of Anna Maria Taigi it is said that she was chosen by God to draw souls to Him; to be a victim of expiation, to avert great catastrophes, all by the power of her prayers….to the opened floodgates of iniquity God opposed a simple woman.”

“Shortly after she had entered on the way of perfection there began to appear to her a golden globe which became as a sun of matchless light; in this all things were revealed to her. Past and future were to her an open book. She knew with certainty the fate of the dead. Her gaze travelled to the ends of the earth and discovered there people on whom she had never set eyes, reading them to the depth of their souls. One glance sufficed; upon whatever she focused her thoughts, it was revealed to her and her under­standing. She saw the whole world as we see the front of a building. It was the same with nations as with individuals; she saw the cause of their distresses and the remedies that would heal them.

"By means of this permanent and prodigious miracle, the poor wife of Domenico Taigi became a theologian, a teacher and a prophet. The miracle lasted forty-seven years. Until her death the humble woman was able to read this mysterious sun as an ever-open book. Until her death she looked into it solely for the glory of God; that is, when charity suggested or obedience demanded it. Should things for which she had not looked or which she did not understand appear, she re­frained from seeking to know more and asking explanations.”

"The poor, the great of the world, the princes of the Church came to her for advice or help. They found her in the midst of her household cares and often suffering from illness. She refused neither her last crust of bread nor the most precious moments of her time, yet she would accept neither presents nor praise.

"Her most powerful friends could not induce her to allow them to favor her children beyond the conditions in which they were born. When she was at the end of her resources she told God about it, and God sent what was necessary.

"She thought it good to live from day to day, like the birds, A refugee queen in Rome wished to give her money. 'Madame,' she kindly said, 'how simple you are. I serve God, and He is richer than you.’

"She touched the sick, and they were cured; she warned others of their approaching end, and they died holy deaths. She endured great austeri­ties for the souls in Purgatory, and the souls, once set free came to thank her .... She suffered in body and soul. ... She realized that her role was to expiate the sins of others, that Jesus was associating her with His sacrifice, and that she was to be a victim in union with Him. The pains of Divine Love have an intoxication that no words can explain. After Holy Communion there were times when she sank down as though smitten by a prostrating stroke. To tell the truth, her state of ecstasy was continual because her sense of the presence of God was continual. ... All pain was sweet to her .... She went her way, her feet all bloody; with shining eyes she followed the Royal Way.”

"Behold, then, the spectacle God raised to men's sight in Rome during that long tempestuous period which began at the time the humble Anna­ Maria took to the way of saints. Pope PlUS VI dies at Valence; Pius VII is a prisoner at Fontainebleau; the Revolution will reappear before Gregory XVI reigns. Men are saying that the day of the Popes is over, that Christ s law and Christ Himself are on the wane, that science will soon have relegated this so-called Son of God to the realm of dreams . . . . He will work no more miracles.”

"But at precisely this time God raised up this woman to cure the sick .... He gives her know­ledge of the past, present and future. She declares that Pius VII will return to his seat in Rome. She sees even beyond the reign of Pius IX She is God's answer to the challenge of unbelief."

Her ecstasies and her love and devotion to the Holy Eucharist

Along with receiving the extraordinary ongoing vision of the sun, Anna Maria began to be drawn into ecstasies along with hearing the inner Voice. Most often, she was often drawn into ecstasy while receiving Holy Communion, but also even during the most humble tasks of washing clothes or even while eating. Her husband and children did not understand what was happening to her once when Anna fell into ecstasy at the table and came back to her senses he grumbled at her saying: "How can you doze at table? You are stupefied with sleep. You must go to bed earlier." After the death of his wife he suspected the true nature of things: "I do really believe that my wife was favored with heavenly gifts. As to ecstasies, I could never discern any. I remember, however, that at night-time, as we said the Rosary, there were times when she did not answer. At table, also, it often happened that she was absent-minded, sometimes with a fork in her hand, sometimes without movement. I spoke to her and she took up again what she had left off, giving me a smile."

When she thus went to sleep with her eyes towards heaven, her daughter Mariuccia once said tearfully:
"Mamma is dead. Mamma is dead." "No! she is praying." Sophie would say by way of correction.
"Be quiet, she's asleep," Domenico would growl. "Let her alone; she had no sleep last night."

While reciting the daily family Rosary, ecstasy was quite common and at this Domenico was still more shocked. "It is shameful to go to sleep like that during prayers, when one has the whole night for sleeping" (Statement taken during the Process and Summary).

"When I used to go to see her in the morning," says Cardinal Pedicini, “I often found her in ecstasy, and was obliged to wait patiently till she cane to herself. Ecstasy would again seize her in the middle of our conversation. I would wait again. Only obedience had power to call her to herself."

Her confessor says, "I was often the witness of her ecstasies when we used to visit the seven basilicas in company with Cardinal Pedicini. At that time she usually went to Communion in the chapel of the Holy Crucifix at. St. Paul's. Immediately after Com­munion she entirely lost herself in transport. Yet, as we needed to contmue the pilgrimage, I ordered her quickly in the name of obedience to recall her mind and follow us without delay. She obeyed."

After Holy Communion, when she felt ecstasy overwhelming her, she cut matters short and hastened back to her kitchen, but the Spirit often overcame her in the road, so much so that she had to have a companion. The sight of a cross, of a flower, or of a statue of Our Lady, would halt her, ravished in the love of God. Naturally the gossipers missed nothing, and she suffered on account of their uncharitable tongues and culmunies.

Her extraordinary Charity

One day in winter, when she came out of the Pieta church with Mgr. Natali, she met in the street a young man who was almost naked; his eyes were. haggard; he was crying with cold and hunger, a veritable spectre covered with filth, from whom the passers-by drew aside as from one smitten with the plague. Anna ran to him, took him by the hand, led him to her home, warmed him, washed him dressed him, restored and consoled him, gave him alms, and sent him away with a thousand expressions of regard, so that he wept and could find no word to answer.

Another day she had reached the church of Our Lady of Consolation when. she came upon a poor woman stretched on the road, foaming at the mouth, in a fit of epilepsy. The passers-by shunned her with averted heads. Anna drew near, wiped away the slaver, lifted her up and went to a neighboring shop to buy her a cordial. Charity is contagious. The crowd stopped, a voluntary collection was organised and given to the poor woman. Once she had restored her, Anna effaced herself and went to the church. There an ecstasy awaited her. Like St. Martin of old, who had just shared his cloak with a poor man of Amiens, she heard Our Savior say to her: "Thank thee, my daughter, for the care you have given to Me."

At the hospital of St. John, for Incurables, in the St. James quarter, there were similar incidents. Sophie [her daughter] who accompanied her, saw her mother going from bed to bed, distributing sweetmeats and help­ing the sick to bring up phlegm. The patient she singled out was a woman whose face was eaten away by a cancer. Her head had been covered by a veil. The moment she heard Annette a murmur of joy came from behind her mask. Anna went to her, caressed her, washed her, and, while rocking her like a baby, spoke to her of heaven.

"At this hospital of St. James" (it is still Sophie referring to the same case) "there was a woman called Santa whose husband had given her a conta­gious disease that ravaged her face. For that reason her head was covered in a hood. I think, too, she was no longer able to see. Whenever she heard Mamma’s voice, she used to cry: 'Here is my angel'. My mother would remain a long time with her. I would call and press her to come away, for the stench was very bad. But she would answer: 'But smell the fragrance of her soul: she will go straight from bed to paradise.' "

Another day, when she heard that the daughter of one of her bitterest persecutors was ill, she went to pay her a visit, and to comfort her mother. At every visit she took some sweetmeats. In the end she made the sign of the Cross over the daughter with her statue of Our Lady, and the sick woman recovered.
Anna Maria given the grace to obtain cures

The grace of healing was bestowed upon this humble woman, as it was formerly upon the Apostles in an official manner. Soon after her con­version, when she was gravely ill in her humble home, she was preparing herself for death when our Saviour appeared to her, dressed in a great blue cloak; He took her by the left hand and told her He took her for His spouse and granted to that hand the gift of curing the sick. Then he said:

"You may get up. You are cured." She cried out aloud and got up.

Sometimes Anna was content with touching a sick person with this sore hand which bore the invisible mark of her power. More often, so as to avoid admiration, she made use of a statue of Our Lady, or St. Philomena, of a relic, or of oil from the votive-lamp. Here are a few anecdotes: A lady of the princely house of the Albani was dying of cancer of the womb. She appealed to Anna's confessor, and he appealed to Anna. The Beata gave him a drop of oil from the votive-light, saying: "Let her put the oil on the affected part and invoke Our Lady." It was done. The following night the tumor broke painlessly and the invalid was cured. Overwhelming gratitude followed. The noble lady multiplied her offers of kindly offices and Anna ended by allowing her to undertake the upkeep of the votive-lamp, the oil of which had been the instrument of cure. The first bottle of oil was brought with demonstrations of eternal gratitude. Anna, though still a young woman, knew enough about the durability of gratitude among men and women. She smiled and said, "Quietly, daughter ! You run too fast, and will grow cold. Remember, however, that you have made a promise, and, if you fail to keep it, misfortune will follow."

Some months later the noble lady made an excuse for no longer sending the weekly bottle. She had to economize and was cutting out unnecessary expenses. She had scarcely sent the message when a series of disasters occurred among her extensive properties. A long illness completed her ruin. Anna pleaded for her, but Our Lord declared He had a peculiar horror of ingratitude. All that she obtained was the conversion of the poor woman.

A Princess Doria, a religious of SS. Dominic and Sixtus, was similarly afflicted with cancer of the womb. She sent a secret message to Anna, saying:

I do not wish to show my complaint to anybody, wherefore it is your duty to cure me."

"But what," Anna replied, "do you imagine I am? I am only a poor woman and a sinner at that."

"It is useless for you to make excuses. You are what you are, but I will you to obtain my cure. I have told you; it is for you to think about it. It is your business."

So Anna therefore spoke to Our Lord, and the same evening she sent some cotton fabric soaked in oil. The following day the growth had disappeared.

The same thing happened to a religious oblate of the Child Jesus, only she had no confidence, and had a poor opinion of Anna. Anna was not even a religious, but a laywoman of no birth! Her confessor rebuked her. In the end, the day before the surgeon was to operate, the religious, in desperation, made her decision to use the cotton soaked in oil. The next day the surgeon found that he had only to put back his instruments; the evil had vanished. The doubting Thomas was never finished praising the sanctity of that woman, even though she was married and the mother of a family.

And here are scenes that are the Gospel over again. Jesus had just cured the mother-in-law of St. Peter at Caparnaum. The sick heard of it and flocked to Him by every road, and even by way of the roof. So also Anna, with Mgr. Natali, went to the house of a woman whose daughter was dying of the croup. The doctors had given her up, only the mother pleaded with Anna in the tones of the Chananite woman. Anna consoled her, saying:

"It will be nothing." She made the sign of the Cross upon the swollen throat. The little girl was cured. The whole neighborhood was stirred. Another mother, whose daughter was smitten with the same epidemic, asked for help. Anna cured this one also. There was a third neighbor. Her little boy was tormented with an abscess in the ear. With a caress of her right hand Anna cured the child. The mother had not finished thanking her when the second mother, whose little daughter had been cured ran up to her, bringing her little boy, smitten with diphtheria. The child was freed from the disease by a sign of the Cross. It is said that the series of cures continued, and I know well that smiles are likely to be raised by such tales, but I content myself by answering with Pascal's astonishment at his own folly: "What a fool I am! If Jesus Christ is God, what difficulty is there in it?"

A cure that made more noise, and one of which I have already said a word, was that of Marie-Louise de Bourbon, the dethroned Queen of Etruria. Expelled from her State, General Miollis had placed her under house-detention in the Convent of SS. Dominic and Sixtus, where she lived surrounded by a small court. But the sadness that gnawed at her devel­oped into epilepsy. She had to be shut up in apart­ments covered with thick carpets, where she rolled about uttering frantic cries. After these attacks she lay motionless and as though dead. Remedies proved ineffective.

The Queen having heard of the cure of Princess Doria, summoned Anna, and begged her to plead with God for her. Anna told her to have confidence in the Blessed Virgin, and then, with her little statue of Our Lady, made the sign of the Cross. The attacks of epilepsy fled for ever, and the Queen was able to go out and about in Rome without hindrance. The medical world made a great to-do about the cure of a queen such as it had not made for two broom-wielders, and that is why Anna preferred to cure the broom-wielders. But the Queen showed a royal gratitude towards her benefactress, made her her adviser, her sister in God unto death, and faithfully kept alight the votive-lamp that had been so speedily deserted by the other noble lady.

This cure was the beginning of a new series. It was Anna's confessor who recommended a young man also smitten with epilepsy. She found the in­valid in bed, broken by a crisis of the disease. His parents stood by in distress. Anna said, with the utmost cheerfulness: "Come on! Up you get! Quick! I can't abide seeing people in bed. You will not die of that, at least."

The sick man threw off the bedclothes and rose, cured. His stunned parents had not recovered from their amazement before Anna fled. The gratitude of the now miraculously cured man lasted a good month, during which he came often to assure Anna of his undying thanks and to offer her his services without wages. She smiled and said : "You will very soon forget"

He forgot so soon that he was not seen again. He was speedily punished, was smitten with a fresh complaint, did not dare to approach his benefactress, and ended sadly. But as in the case of the votive­lamp, God soon sent a faithful servant who asked no wages; it was Luigeto Antonini, who, in spite of banter and sarcasm, remained loyal to his bene­factress until death, and made a deposition at the Process.

We owe to the Princess of Palestrina the account of the cure of her brother-in-law, Cardinal Barberini. "I used to love to confer with Anna. When I could not see her I wrote to her. She prayed to God for me, and for all that concerned me, and the result was always as she foretold. She was frank and friendly. If my children were ill I turned to her. My brother­in-law, Mgr. Barberini, was stricken with a fatal disease a little before his promotion to the cardinal­ate, and I told the holy woman this. The terrible illness grew worse, and yet she bade me fear nothing and not to be troubled, but to have recourse to St. Philip Neri. She also sent a relic of the saint."

It was an un-hoped for cure, and actually from the moment the Beata began to pray Our Lord had said to her: "The prelate's death is decreed by the divine counsel." Yet Anna only insisted the more for this impossible cure, and obtained it. Our Lord told her no one would attribute it to her, and in fact it was credited to St. Philip Neri. That, however, was fresh reason for insistence. Anna never believed in patenting her good deeds.

The Luigeto Antonini, whom I have just named, the knight and servant of the Beata, and the agent of her miracles, deposed that he assisted at a great number of cures. "Oftentimes I accompanied her on such errands. When she could not go in person she sent me with a little cotton soaked in the oil of the lamp that burned before her statue of Our Lady." And the good young fellow was no more astonished at being the agent of cures than were the little Indians sent on similar errands to the sick by St. Francis Xavier. He himself, when attacked by sciatica, which tied him to his bed, or constrained him to walk with crutches, spoke to the Beata, who cured him with a sign of the Cross. From then onwards he could go limping but alert here and there through the town at all times. If he caught a cold or a catarrh in going the Beata's errands, it was enough for him to tell his "Mamma", and a sign of the Cross put all to rights." Headaches or pains in the chest, swellings and other miseries which he contracted in the service of the saint fled at a sign of the Cross.

Here is a moving incident. In Anna's last illness the Abbe, worn out with going for the doctor, the priest, her friends, fell ill of congestion. The Beata beckoned him to come near, and tracing on his breast the sign of the Cross said: "Go to bed. Go to sleep for half an hour and all will be well. I have too much need of you at this moment to allow you to be ill." Half an hour later he was cured, but Anna was in her agony.

Her death and postmortem -Blessed Anna Maria Taigi is found to be an incorruptable

Anna Maria Taigi died 4:00am on the morning of June 9, 1837, after having received Viaticum and the Sacrament of the sick given by the local Curate (Parish Priest). Our Lord had promised Anna that the cholera would spare Rome until her death. She had scarcely breathed her last when the scourge broke out amidst scenes of indescribable panic. The death of the Beata at first passed unnoticed, but piety recovered quickly and the body was left exposed for two days for the veneration of the faithful in the church of Santa Maria, in Via Lata. On the Sunday evening a devout cortege conducted it to the new cemetery, in the Campo Verano, where, conformably to the instructions of Gregory XVI, it was enclosed in a leaden sepulchre, with seals affixed, near the chapel. Mgr. Natali had caused a mask of the face to be taken before the body was placed in the coffin.

After a few days, in spite of the cholera, the procession of pilgrims began. Ordinary folk, bishops, cardinals, elbowed one another near the humble tombstone. Cardinal Odescalchi forthwith instructed Mgr. Natali to collect all the documents, from which Mgr. Luquet, postulator of the cause, published the first biography. It had an immediate success, and was translated into several languages.
The fame of her sanctity increased day by day.

Mgr. Natali and Domenico did not know to whom to reply first. "Many people," says the latter, "who had known her plied me with all sorts of questions as to how she died. Some asked one question, some asked another. Some spoke of the special gifts she had received from God; others of the graces they had received through her intercession while she was yet alive. Everybody spoke well of her, praised her and described her as full of merits and virtues. As for me, I always thought highly of her and I declare that Our Lord took this, His good servant, away from me, because I was not worthy of her."

Cardinal Pedicini, while drawing up his volumi­nous memoirs of her, went often to pray at her tomb. Cardinal Micara, the Capuchin, doyen of the Sacred College, and Prefect of the Congregation of Rites, always carried a picture of her about his person. The Venerable Bernard Clausi, of the Minim Order of Franciscans, who often asked for her prayers, said to all who came his way: "If she is not in heaven, there is no room there for anybody."

The Venerable Vincent Pallotti called Anna "his secretary, his plenipotentiary, charged with all the interests of his congregation in the presence of the Most Holy Trinity".

The Blessed Mary Euphrasia Pelletier, foundress of the Good Shepherd Congregation, confided to her the thorny questions she had to deal with in Rome.

Mgr. Flaget, Bishop of Louisville, who was to die in the odour of sanctity, had visited the Beata during her last illness and sang her praises throughout the United States.

The number of miracles increased and the people deplored the fact that the body of the Beata rested so far from Rome. By order of the cardinal-vicar it was brought to the church of Our Lady of Peace. The coffin, sealed for eighteen years, was re-opened, and the body was found as fresh as if it had been buried the day before. In spite of instructions for secrecy, and although the middle of the night was chosen as the moment of removal, a vast crowd came to acclaim "The Saint of Rome and its Palladium".

Pope Pius IX surrounded the servant of God with great veneration. On the eve of the battle of Mentana, pictures representing him beside Anna-Maria pray­ing for the triumph of the Church, were spread far and wide. Learning that she had expressed a wish to be buried in the church of the Trinitarians, he had the body brought on August 18, 1865 to the basilica of San Chrysogono. Three years later the coffin was again opened, and though the clothes of the Beata had decayed, her body was still intact.The sisters of St. Joseph took off the poor clothing and replaced it by new. For eight days the body was exposed for the veneration of the faithful; the whole neighbourhood of Trastevere seemed on the move, and troops were necessary to ensure order. The body, enclosed in a double coffin of lead and of cypress, was near the chapel of the Blessed Sacra­ment in a memorial tomb, and, later on, in the chapel to the left, under the altar within a large glass shrine which allowed it to be seen in the habit of a Trinitarian Tertiary. The hands were joined in front of the breast. The face, giving an impression of infinite serenity, was covered in a light wax mask beneath the white coif.

Meanwhile the Process took its course. After the official enquiry entrusted to Mgr. Natali, the juridical enquiry was begun in 1852. Thirty wit­nesses upon oath were heard--Cardinals, bishops, nobles, servants, two daughters of the Beata and finally, leaning on his stick, with hunched shoulders, an old man of ninety-two years, the man who, after God, had the most to do with making Anna-Maria a saint-Domenico. In 1863 Pope Pius IX introduced the Cause of Beatification; on 4th March, 1906, Pope Pius X declared the heroicity of her virtures. On May 30, 1920, Pope Benedict XV ranked Anna-Maria Taigi, mother of a family, amongst the Blessed. A little while later he made her the special protectress of mothers of families and the patroness of the Women's Catholic Union.

When her holy remains were once again examined in 1920, they were found to be no longer incorrupt, and were at that point subject to the normal processes of decomposition. A wax covering has been placed over the face and hands, preserving her resemblance. The holy remains of Blessed Anna Maria Taigi lie in state in the Chapel of the Madonna in the basilica of San Chrysogono in Rome. Her Memorial feastday is celebrated in the Church on June 9.

~Blessed Anna Maria Taigi, pray for us!

The webmaster would like to thank Brother Stephen O. at the Sub Tuum blog for the awesome photographs of the holy remains of Blessed Anna Maria.

SOURCE : https://www.mysticsofthechurch.com/2009/12/blessed-anna-maria-taigi-wife-mother.html

Blessed Anna Maria Taigi, by Father Hugh Francis Blunt

(17691837)

God calls us all to sanctity. It is our blessed privilege that we all are the children of God, sharers in His abundant graces, and that no matter what our state in life, we can aspire to be great in His kingdom. Sometimes one is apt to think that the present circumstances of life are not conducive to sanctity. The mother of a family, for instance, is apt to think that the care of her children is an excuse for her coldness in the service of God. “How can I be devout, let alone aspire to sanctity,” she asks, “when all my life is filled with the cares of the home? Now if I were in a convent, I would have more time to give to God, and I am sure that in such an atmosphere of sanctity my soul would grow in holiness.” Always the same old excuse – if I were somebody else, I would be better than I am now.

But that is only a way to deaden the conscience. A woman – even while we know that the virgin life in itself is a higher life – may be married, may be the mother of many children, may be obliged to lead a life that is full of the trivialities incident to the bringing up of those children, may find her days but “the trivial round, the common task” of baking and cleaning and mending, may have to struggle against poverty, and yet may so use that life that it becomes doubly dear in the sight of God. There have been great saints who have been great mothers, toiling mothers, ordinary mothers in the eyes of the world. From every walk of life they come, these saints of God, so that we all, no matter what our station in life, may take courage in doing His work. After all, the Queen of all saints was a mother, – Mary, the Mother of God. Hers was a humble life, a humdrum life if you will, a life of simple duty, – the handmaid of the Lord. And while there is a vast difference between the life of the Mother of God and the life of the mothers of men, still may the mothers of men look to her to learn from her motherhood the way to sanctify their own.

And so that we may not be discouraged by the sight of her great glory, God has raised up lesser glories of motherhood in order that mothers may emulate them, knowing that what has been possible to the saintly mothers raised to the altars of God is still possible to the most lowly mother of today.

The story of Anna Maria Taigi is a glorious one for this reason – it is a glorification of the simple life, the life of a poor woman, the mother of seven children, with all the cares which that implies, yet of one who, while neglecting none of her duties to her family, realized that even more than to them her first duty was to God and her own soul.

The whole of this woman’s life is well summed up in the Decree of the Sacred Congregation of Rites regarding her beatification and canonization. It may be taken as a sketch which we shall try to fill in later. It reads: “He who, when He would show forth His power and wisdom, hath been wont for the most part to use the weak and foolish things of the world to confound the haughtiness of man, to frustrate the designs of the impious, and bring to naught the efforts of hell, hath in this our age, when human pride and infernal power have seemed to combine to subvert, if it were possible, the foundations, not only of the Church, but even of civil society itself, opposed a poor, weak woman to the floods of impiety bursting in on every side. He hath employed for this work Anna Maria Antonia Gesualda Taigi, born, indeed, of honest parentage, but poor, married to a common man, hampered with the cares of a family, and fain to seek wherewith to support herself and them by the constant labor of her hands. This woman, whom He hath chosen for Himself to be an attracter of souls, a victim of expiation, a bulwark against plots, a warder- off of evils by her prayers, He hath first cleansed from the dust of this world and then hath united to Himself by the strictest bond of charity, hath adorned with wonderful gifts, and hath replenished with such virtues as to draw to her on all sides, not pious persons only, from every rank of society up to the very highest, but even the impious themselves, and to inspire all with the highest opinion of her sanctity.”

It is remarkable that the cause of this poor woman, who died in 1837, was introduced in 1862, only twenty- five years afterwards, at a time when her husband and some of her children were still living, a proof at least of the reputation for sanctity she enjoyed among her neighbors.

Her maiden name was Giannetti. She was the only child of Luigi Giannetti, who was by profession an apothecary in the city of Siena. He and his wife, Santa Maria Masi, were people in good circumstances, highly respected by their friends, Giannetti being especially noted for his absolute honesty and trustworthiness in his business.

The child was born May 29, 1769, and was baptized the next day, receiving the name of Anna Maria Antonia Gesualda. The little girl was barely six years of age when misfortune came upon her parents. They lost all they had of this world’s goods, and rather than face poverty among those who knew them in their days of prosperity, they left Siena and came to Rome, where, too, the apothecary knew there would be a better chance for him to get employment. So poor were they that they had to make the journey on foot, and yet we can well believe that the hand of God was directing them in what they considered a severe trial.

Giannetti and his wife soon found employment as domestic servants, and took a small lodging in humble quarters. Their hearts were centered in their little daughter, who was a pretty child of attractive manners. They gave her an excellent education, as far as they could, sending her to the nuns to school, with whom she soon proved to be a great favorite. But better than all else, the good nuns as well as the parents laid in the child’s heart the deep foundations of solid piety. The parents, before going to work, took her with them to Mass every morning, while at home they faithfully trained her childish lips to pray and to repeat often the names of Jesus and Mary.

Those years of childhood were uneventful. She was simply a poor child of poor parents. She would have to make her living in the world; and so, when she was thirteen, she was taken from the good nuns who had taught her so many things to be of service to her in later life, and put to live with two old women, along with other girls, where her work was to wind silk in preparation for manufacture. She made a few cents a week at this work, which she gave to her parents. For six years she was thus employed, and then she got tired of it and wanted to come back home to help her mother. She was now a young woman, grown tired – and no wonder! – of the humdrum life of silk-weaving. She wanted, too, to see something of the world. She loved dress, and later reproached herself that during these days she was vain of her personal appearance. Still, withal, she remained a good, virtuous girl, an ordinary, good Catholic girl, faithful to her religious duties, but with no remarkable piety. Her parents succeeded in placing her as lady’s-maid in the house where they were still employed as domestics. She was under their protecting eyes, and yet an attractive, refined girl like Anna was not free from danger. She realized this, knew the temptations, and as a result was more earnest in her prayers, more ready to seek the advice of her confessor, who counseled her to marry.

She was about twenty-one when she was married to Domenico Taigi. He was descended from a good, even an illustrious Milanese family, but was a poor man, a domestic servant. He was, however, a good man, religious and of excellent character. But he was uneducated, even a rustic boor, far inferior to his young wife in point of breeding, and so in many cases a trial to her.

He asked for her hand. They both prayed to ascertain the will of God, and finally, after a month, they were united in a marriage which, with all its trials, proved particularly happy. She was loving, faithful, industrious, and studied all his wishes. He was proud of his beautiful young wife, and liked to show her to his friends. She was gay and happy, attractive and vain of her beauty and her dress. But all the while she was displeased at her own worldliness, for she felt in her heart that God was seeking to draw her to a more devout life.

One day, when she was praying in Saint Peter’s, the grace of God touched her. She realized her vanity and frivolity, her passion for amusement, and determined to put it all aside. She had not committed any serious sin, but she felt that such a frivolous life was wrong. From the day she made her confession to the Servite priest, Father Angelo, to whom God had led her almost miraculously, this young wife of twenty-two entered upon the road to perfection, from the pursuit of which she was never to swerve during the long years of her married life. She put aside the life of pride and pleasure for the life of mortification. When she returned home from confession, she threw herself before the crucifix and scourged herself, and struck her head against the floor many times, exclaiming, “Satisfy to God, impure head, for so many frivolous ornaments with which you have dared to adorn yourself.” God rewarded this self-abasement with many graces, and in particular with the gift of a luminous disc in which, as in a mirror, she saw the past, present, and future, a gift which she enjoyed for the remaining forty-seven years of her life. Shortly afterwards she was given the power of healing with the touch of her hand, could read the secret thoughts of others, was granted the privilege of ecstasies, and all this at the very beginning of her conversion to a more earnest life. God thus rewarded early her love for Him.

At once she put aside all her ornaments of vanity, her rings, her ear-rings, necklaces, and fine clothes, and dressed herself in the commonest and coarsest of garments. She joined the Third Order of the Trinitarians, and wore the habit under her other clothes. She put aside all her worldly amusements and even denied herself the simple pleasure of visits to her friends. There was no half way about her giving herself to God. She punished herself, used the discipline, wore a hair shirt, and even an iron chain. She fasted rigorously, sometimes for a period of forty days, and went for days without a drink of water, a terrible penance in a hot climate, and especially for one who worked as hard as she. As she used to say, “The more greedy the ass is, the more needful is it to draw the rein tight.” She mortified her sight, too, and was as modest as a young girl. Not only did she not criticize anybody, but she would allow no one to make in her presence depreciating remarks about others.

“My mother,” said one of her daughters, “scarcely slept at all. She spent most of the night in prayer, and was up early in the morning to go to Mass, after having slept but two hours.” In a word, she lived in God and for God. “To acquire the love of God,” she used to say, “we must always be rowing against the current, and never cease counteracting our own will.”

If this woman had not been married, no doubt she would have entered the religious life. It is useless, however, to speculate on that, for it was the will of God that she should be a wife and mother, no doubt, in order that she might show that it is possible to lead a holy life even in the lowliest surroundings. And this poor woman became, says one of her biographers, “the rampart of the Holy See, the oblation of sinners, the consolation of the afflicted, the succorer of the poor, the guider of the learned, and the counselor of priests; she was a theologian, a doctor, a mother in Israel, a seer of the ancient days, an inspired prophet, a true wonder-worker.” What a panegyric for a poor, hard-working mother of seven children! Yet it was because she was a devoted wife and mother, faithful to the duties of her home, that God raised her to such heights.

Her religious ardor was never an excuse for neglect of duty. Not even her husband or her children knew to what heights of sanctity she had reached. It was only after her death that her instruments of self-mortification were discovered. Her penances, like her trials, she hid in her own heart.

And she had her trials. She was refined and sensitive; her husband was rough, coarse, and uncouth. He was self-willed, easily angered, and would fly into a rage if contradicted. She never argued with him or contradicted him. She was always patient, silent when he was angry, and in such a way that he soon became ashamed of himself, fearing that he had distressed her.

Domenico Taigi, with all his faults, had a good heart. His wife always sought to please him, would even set aside her devotions in order to accompany him or to do some service for him. As he said, long after she had died, at the time of the opening of the process of her beatification – he was then ninety-two – “I always found her as docile and submissive as a lamb.” It was a touching tribute to a loving wife, words that could be taken to heart by many wives of today, when we are hearing so much about women’s rights and so little about their duties.

And this docility and simplicity on her part are all the more remarkable when one knows that the humble home was always crowded with persons of distinction, ecclesiastical and lay, come to seek her advice; for by her great sanctity, her charity to the sick and poor, her ecstasies in the churches, and her ability to give the soundest advice, she was renowned all over Rome.

And yet, in spite of that popularity, her first thought was for her husband. “It happened to me frequently,” he said, “when coming home to change my clothes, that I found the house full. Immediately she would leave everybody, whatever lord or prelate might be there, and hasten to me with the greatest cheerfulness and pleasure, that she might brush my things and wait upon me, even to the tying of my shoe-strings. In short, she was my consolation, and that of all the world.”

In her he had the greatest confidence. “I let her manage everything,” he said, “because I saw that she acquitted herself perfectly of the task.” Yet she would never do anything unusual without first of all consulting him. What a simple tribute are the words of the old man of ninety-two, looking back over the past happy years. “She was always cheerful and pleasant,”’ he said; “yet she had a host of maladies. This, however, did not hinder her from putting her hand to work; she looked to everything and had hands of gold. As for me, I did not give a thought to anything. She made pantaloons for me, and overcoats. I do not well know how to express myself. To cut the matter short, I am old; but if I were young, and were minded to travel over the whole earth to find such a woman, it would be impossible to meet with her. I have lost a great treasure.”

She was the mother of seven children, four boys and three girls. Camillo, the eldest, died at the age of forty-two; Alessandro at thirty-five; Luigi at a year and a half; and Pietro at two years. Two of the daughters were living at the time of the process of her beatification, one unmarried, the other a widow.

It can be easily believed that this mother, holy as she was, took a deep interest in her children. She nursed all of them, taught them their catechism, and instructed them how to read and write. Morning and night, the whole family had prayers together, and always she taught the children to thank God that they had been born in the Catholic Church. She prepared them for Confession and Communion, and saw that the girls frequented the sacraments once a week, and the boys two or three times a month.

She arranged that all the boys should learn a trade according to their station in life. She had no foolish ideas about their becoming wealthy. The girls she sent to school. Over them all she exercised a watchful care. She guarded their modesty even in their own home, and kept them from bad companionship. In a word, she was a hard-working, prudent, common-sense mother, devoted to her children. “I will save your children,” Our Lord said to her one day, “because they are of your blood, because they are poor, and the poor are my friends. Yes, I will save them, although they have many faults.”

She did not hesitate to punish the children when they needed correction. She always insisted that they give their father strict obedience. She would allow no one to criticize others in the presence of the children. In fact, she would not listen to remarks about others, anyway, and especially about priests. “They are God’s ministers,” she would say, “and therefore always worthy of our respect; at the hour of death whom shall we need save the priest?” And this reverence for priests she instilled into the hearts of her children.

It was a happy household, a home simple in its furnishings – poor, even – but rich in its simple, unaffected piety. As soon as she awoke the children in the morning, they all would kneel about the little altar and say their morning prayers, together with her old mother, who lived with them. And after supper all would gather and listen to the reading of some pious book, and then before retiring there would be family prayers, the recitation of the Rosary, and other devotions. In her family God was the first consideration. And yet it was not a gloomy household. There was nothing unhappy about her. She was always pleasant, always could enjoy a good joke, and always sought to provide simple amusement for the children, taking them on picnics and otherwise seeking to make them light-hearted.

We get a good picture of her as manager of the home. Her husband received small wages, scarcely two dollars a month, so one can imagine how she had to plan in order to bring up her large family. She always stood and served the others while they sat at meals. Difficulties came upon the family when the husband lost his position through the removal to Paris of the family he worked for, at the time the French army in 1798 occupied Rome. It was discouraging to Domenico, but the wife urged him to put his trust in God; and then, to help out in the care of the family’s support, she learned to make women’s shoes and stays and worked at the new trade night and day. So successful was she that soon she was able not only to support her own family, but also to feed a great number of poor people.

It was at this time that she met the Princess Maria Luisa, afterwards Queen of Etruria, who came to her assistance in helping the poor. It was the time of the terrible famine in Rome, and Mrs. Taigi, delicate of health, through the long cold days would stand in the bread-line before the baker’s so that her children should not go hungry. Yet she was always calm and patient. She was never idle, and even when confined to the bed with torturing illness would do the family mending.

Besides the care of the children, she also had the care of her father and mother, who in their old days had been obliged to give up their work. The mother was hard to get along with, a woman with a bad temper, but her daughter was ever kind to her and tended her devotedly to the end. So, too, with her father. In the last years of his life he was afflicted with a horrible leprosy, but she would wash and comb him and attend to all his wants. Added to that, her son Camillo brought his wife to live with them, a woman who was a trial, since she wanted to be the mistress of the house, always looking for trouble. And then, when her daughter Sofia lost her husband, she came with her six children to live with her parents. It was a patriarchal way of living, but it brought its trials. Yet the good mother who was the head of the house never complained, but tried to make everybody feel at home.

To bear such trials and petty hardships she needed a lively faith. And surely she had that. She ever thanked God for the gift of faith, and had the utmost reverence for everybody and everything connected with religion. She had a special devotion to the Blessed Trinity, and soon after her conversion, as we have seen, became a member of the Third Order of Discalced Trinitarians, founded in 1198 for the redemption of captives, which may be called a religious order for those who live in the world.

And with it all there was that same confidence in God which knows that He will help those who help themselves and pray. “She did not,” says her husband, “wait for the basket to come down from heaven without doing anything herself. She joined labor to prayer in order not to tempt God by seeming to expect that He would work a miracle for her. When she found herself in a position of real necessity, she addressed herself to God with all the greater confidence, and the Lord helped her so well that the maintenance of her numerous family without their ever suffering want was a continual miracle.” And then he asks very simply, “What could I do with my salary, if I had not the servant of God?”

It was all her simple trust in the providence of God. They were always on the verge of poverty, but always managed to get along. The wealthy who came to the house to consult with her wished to make presents to her, but she would have none of that. God was the only help she wanted. Even when her daughter Sofia brought home her six children to increase the family burden, and began to weep and to wonder how they would all be fed, she was reproached by her mother. “What are you thinking about?” she asked. “You must know that God never abandons any one. You will have what you need. Place your trust in God, and give no thought to anything else; as for me, I will never forsake you.”

One day, when she called to see the Princess Luisa, the latter opened a drawer full of gold, and said to her: “Take, take, Nanna mia, what you will.” But the poor woman merely smiled and answered: “How simple you are, madam! I serve a Master richer than you. I trust and hope in Him; and He provides for my daily necessities.” It was not pride that made her refuse help from others; it was just her simple trust in God and her desire to remain always poor.

Later on, when she was unable to work, the family was in great poverty, and, painful as the humiliation was, the poor woman had to accept alms. She was poor in everything but the grace of God. And how rich she was in that! She lived in the presence of God, and endeavored to please Him in all things. This love of God made her endure physical and mental suffering, calumnies, contempt, harshness, not merely with resignation, but with joy. Her life was one long martyrdom gladly borne. Hers was a soul that God loved exceedingly, and He showered His choicest blessings upon it. Sometimes, when she was busy sweeping the floor or cooking, she would go into an ecstasy. At times even the note of a bird would transport her, so tenderly did she love God. Yet some of her neighbors, seeing these things, used to say that she was possessed, or that she was a hypocrite. Even her husband used to think, when these ecstasies came upon her, that she bad a fit of convulsions, and would try to shake her out of them. So little even he suspected the wonders God was working in the soul of this humble wife of his.

And through it all was her intense hatred of sin. She told her confessor that rather than commit a venial fault, she would mount a scaffold and endure all its shame, together with the infliction of every conceivable torture. As her love for God, so her love for her neighbor. Even out of her poverty she helped the poor, spending some of her time at night working for them, taking into her house the chance wanderer to feed and clothe, always seeing in the poor Jesus Christ Himself. “Never send the poor away,” she would say to her family; “when you have nothing else, give them a bit of bread.” When sent for by the sick, she always went, no matter what the weather. And she was always being sent for. She had a special gift for consoling the afflicted, and if she found poverty she would herself go begging alms for the destitute ones, and even take the bread out of her own mouth to succor them.

Hers was a charity that extended even to the dumb animals. “These poor beasts have no paradise save in this world,” she would say, and would even use the power she had to cure them. It is said that she would leave her own dinner to feed a hungry cat. She saw all animals as creatures of God. In her was renewed that love for animals so characteristic of Saint Francis.

If there was one virtue for which she was especially noted, it was her patience. Sometimes her neighbors insulted her, so much so that the angered Domenico had to defend her. But the more she was insulted, the more she rejoiced. For years she endured bodily ills, constant sick-headaches, neuralgia, rheumatism, asthma, gout – in fact, all the ills to which the flesh is heir. But never a murmur from her. Despite her sufferings, she kept at her devotions. She had a special devotion to the Infancy and Passion of Our Lord and to the Blessed Sacrament. And she had a tender devotion to the Blessed Virgin and the poor souls in Purgatory.

Many a sinner she converted, offering up herself in expiation, and God accepted the .sacrifice, sending her all manner of trials, and permitting her to be sorely beset with temptations of every kind.

It was a time of trial for the Church, a time of persecution, and she was a victim of penance for the sins of the world and for the evils affecting the Church.

But with her sufferings God gave her great privileges. There is no doubt, in reading her life, that she had the gift of prophecy, and also worked miracles of healing. “Anna Maria the Saint,” was what the people called her, and high and low came to her, begging her advice and her prayers.

For eight months before her death she was confined to her bed of pain – of torture, rather – for every member suffered as if on a rack. And with what patience!

She did not fear death. She even announced her approaching end to her family with great cheerfulness. Then she called Domenico, her husband, and thanked him with tenderness for all the care he had taken of her, and all his kindness to her. Then she called her children and gave each of them advice. “My children,” she said, “have Jesus Christ always before you; let His Precious Blood be ever the object of your veneration. You will have to suffer much, but sooner or later the Lord will console you. Keep His commandments, cherish devotion to the most Holy Virgin, who will be your mother in my place.”

She left them nothing; rather, she left them poverty. But she did not bemoan that. She knew that God would take care of them.

And so, in poverty and alone, the good wife and mother died in 1837, at the age of sixty-eight. On that occasion the following letter was written by her confessor, Father Filippo, to the Pope’s vicar, Cardinal Odescalchi: “It is very just and proper seasonably to reveal the works of God, for His greater glory and for the edification of the faithful. Yesterday, Friday, the ninth of the current month (June), passed to eternal rest the soul of Anna Maria Taigi, who lived in the parish of Santa Maria in Via Lata. I know that the secretary of his Eminence Cardinal Barberini, D. Raffaele Natali, who has lived with her nearly twenty years, has addressed, in conjunction with other persons, a petition to your Eminence, to the intent that regard should be had to the body of this holy woman, which merits all respect. As for me, who have been her confessor for more than thirty years, until the day before yesterday, when she received the last sacraments, I believe myself to be bound in conscience to make known to your Eminence that not only did she exercise the Christian virtues in an heroic degree, but that God favored her also with special graces and extraordinary gifts, which will excite admiration, should it please God to publish them authentically before the whole Church, as I hope. I should have much to say on this head. I content myself with testifying to the charity of this holy soul, which constituted itself as a victim before God, and which obtained signal graces for Rome. I hope that God will cause this to be recognized later. The mortal remains, therefore, of so virtuous a soul, and one so highly esteemed by Pius VII and Leo XII, by Monsignore Strambi, Monsignore Menacchio, and a crowd of persons of every rank and every country who obtained extraordinary graces through her intervention, seem to merit special regard, in accordance with the constant practice of the Church.”

The same priest said: “Well, a woman replenished with so many merits, virtues, and supernatural gifts lives unknown and dies abandoned by every one; having round her bed of suffering only a poor family whom she leaves in destitution, and recommends to a priest, equally poor, who is to continue collecting daily alms for them. She blesses her children, and leaves them, as her sole bequest, piety, religion, devotion to the Virgin, to the saints, and particularly to Saint Philomena, her patroness, whom she constituted the guardian and protectress of her poor and numerous family. After which, recollected in God and animated by the fortitude which resignation imparts, she drinks to the very last drop the bitter chalice of a painful death.”

When this poor woman died there was universal sorrow throughout the city as soon as the sad news was learned. “The saint is dead,” was heard on all sides. High and low visited the house where she had died, and many, in spite of the fear of cholera then prevalent, went to pray at her tomb. Her work went on even after her death. The sick were healed through her intercession, sinners converted, and many other graces granted. So general was the opinion of her sanctity, that the Cardinal Vicar commissioned Raffaele Natali to collect all the documents relative to her life. When her biography was written shortly afterwards, seventeen thousand copies of it were sold in Rome alone. It was translated into many languages and spread over all the world.

For eighteen years the body lay in the common cemetery, and then there arose a desire to remove it into Rome. It was found incorrupt, and the clothes in perfect preservation. It was then placed in the Church of Santa Maria della Pace. Ten years later, on the occasion of the removal of the body to its last resting-place in the Church of the Trinitarians, it was still incorrupt. Her tomb was ever after a shrine at which the faithful prayed. The process of her beatification was begun in 1863, and it has not yet been finished.

So passed a poor, simple woman; so passed a great servant of God. What an example, we say, to all, but especially to the mothers of whom she may well be patroness! What mother ever had a harder life, one of continual toil, continual pain? Yet she was always rapt in God. Faithful to her husband, faithful to her children, and, above all, faithful to God, surely the venerable Anna Maria Taigi understands the difficulties of mothers, and will help those that pray to her.

– text taken from the book Great Wives and Mothers by Father Hugh Francis Blunt, 1917

SOURCE : https://catholicsaints.info/blessed-anna-maria-taigi-by-father-hugh-francis-blunt/

Triduum in Honor of Blessed Anne Marie Taigi

BLESSED ANNE MARIE TAIGI

Model and Patroness of a Family,

a Wife, a Mother, and a Mystic

Blessed Anne Marie Taigi was born in Siena on May 29, 1769 and baptized the following day.  Because of financial difficulties, her parents, Louis Giannetti and Mary Masi, moved to Rome when Anne Marie was six years old.

In the Eternal City, Anne Marie attended the school conducted by the Filippini Sisters for two years.  Following her schooling, she worked at various occupations, even that of a maid, to bring financial assistance to her parents.

When still a young girl, she married Dominic Taigi, a pious young man but of difficult and rather coarse character.  Disregarding these defects, Anne Marie was more concerned with his virtue and for the forty-nine years of there married life she conducted herself with the greatest affability and delicacy, finding ample opportunity to exercise continually the virtues of patience and charity.

Their marriage was characterized by the highest Christian principles.  Understanding the profound social and moral values of the Christian marriage and considering it, above all, as one of the highest missions from Heaven, Blessed Anne Marie transformed her home into a real sanctuary in which God had the first place.  Docile to her husband in every way, she avoided anything which might irritate him and thus disturb the family peace.  Serious and hardworking, she saw to it that nothing was lacking to her family and, in so far as one in her impoverished circumstances could, she was generous to the poor.

She bore seven children, three of whom died in childhood.  Two boys and two girls grew to maturity and she provided them with the most accurate and complete religious and secular education.

Having sought to correspond to grace from her childhood, she now begun to live a life of intense spirituality.  She had one desire only: to love God and to serve Him in everything; she had only one preoccupation: to avoid the least shadow of the slightest voluntary imperfection.  She was greatly devoted to the Holy Eucharist, to the Most Holy Trinity, to the Infant Jesus, to the Sacred Passion of Our Lord and ever had the tenderest devotion to Our Lady.

Anne Marie Taigi is one of the great mystics of the last century.  Yet, she achieved her sanctification by living the ordinary life of wife and mother in a spirit of Christian mission and compliance with God's will. Her daily attendance at Mass, her total surrender to God, her readiness to help anyone in need, and her being an active member of the Third Order of the most Holy Trinity were, at the same time, the sources and the fruits of her intense spiritual life.  She entered the Third Order of the Most Holy Trinity on December 26, 1808.  God enriched her with many supernatural gifts.  The most unusual of these was the apparition of a luminous globe like a miniature sun which shone before her eyes and in which, for forty-seven years, she could see present and future events anywhere in the world as well as the state of grace of individuals, living or dead.

Anne Marie Taigi died June 9, 1837.  In testimony to how an ordinary housewife and mother could become a saint and positively affect society and the lives of those who come in contact with her.  The Church declared her “Blessed” on May 30, 1920.  Her mortal remains lie in the Chapel of the Madonna in the Basilica of San Crisogono in Rome, Italy.  The Trinitarians are actively promoting the cause of her canonization.

SOURCE : https://maryqueenofpeace.tripod.com/id489.htm


Targa Anna Maria Giannetti nei Taigi, Via dei Rossi, Siena


Beata Anna Maria Taigi Madre di famiglia, terziaria trinitaria

9 giugno

Siena, 29 maggio 1769 - Roma, 9 giugno 1837

Sposa esemplare e devota della Santissima Trinità. Sono le due caratteristiche di Anna Maria Taigi, nata Anna Maria Giannetti a Siena nel 1769 e vissuta a Roma dall'età di sei anni alla morte, avvenuta nel 1837. Per aiutare i genitori bisognosi si dedicò a diversi lavori. Ancor giovane si sposò con Domenico Taigi, uomo dal carattere molto difficile. Mandò avanti la casa, dando un'educazione cristiana ai figli. La coppia ne ebbe sette (tre morirono, però, in tenera età). E non si dimenticava dei poveri. Tanto che un mistico fiammingo disse di lei che non disdegnava di lasciare le visioni ultraterrene per scaldare la minestra a un malato. Nel 1808 abbracciò l'Ordine secolare trinitario. Tra i doni miracolosi che ebbe c'era un sole luminoso che per 47 anni le brillò davanti agli occhi. Vi vedeva quanto accadeva nel mondo e la situazione in cui si trovavano le anime di vivi e morti. Anna Maria è stata beatificata nel 1920 e il suo corpo riposa in una cappella della chiesa romana di San Crisogono. (Avvenire)

Etimologia: Anna = grazia, la benefica, dall'ebraico

Martirologio Romano: A Roma, beata Anna Maria Taigi, madre di famiglia, che, pur maltrattata da un marito violento, continuò a prendersi cura di lui e a provvedere all’educazione dei suoi sette figli, senza mai trascurare la sollecitudine spirituale e materiale per i poveri e gli ammalati.

«I sacerdoti secolari, i religiosi e le religiose votati alla vita attiva, ma anche alla vita interiore, partecipano allo stesso potere che le anime del chiostro hanno sul cuore di Dio. Ne sono esempi magnifici un padre Chevier, un don Bosco e […] la beata Anna Maria Taigi che, nelle sue funzioni di povera massaia, era un’apostola come lo era s. Benedetto Giuseppe Labre che schivava le vie battute». È uno dei passaggi della celebre opera «L’anima di ogni apostolato» (1907), dell’abate Jean-Baptiste Chautard (1858-1935), dedicati ad Anna Maria Giannetti Taigi (1769-1837), laica trinitaria e madre di sette figli, della quale ricorre oggi la festa liturgica.

La beata Taigi, che era nata a Siena ma visse la maggior parte della sua vita a Roma, da semplice madre di famiglia e domestica della famiglia Chigi, ricevette secondo quanto riportato dal celebre Abate trappista nella sua più importante opera, «livre de chevet» di decine di santi fra i quali Pio X, «singolari doni soprannaturali di sapienza, discernimento spirituale e di profezia, soprattutto sui gravi problemi religiosi e politici del tempo. A lei ricorsero vescovi, cardinali, papi e uomini di Stato per ricevere consigli».

Beatificata da Benedetto XV nel 1920, Anna Maria Taigi fu terziaria dell’Ordine della Santissima Trinità e, sotto la direzione spirituale di monsignor Raffaele Natali, allora segretario del maestro di camera di papa Pio VII (1800-1823), condusse una vita umile e di austera penitenza. Il prelato marchigiano visse ospite della beata Taigi per circa venti anni e, quindi, fu testimone oculare di numerosi fatti straordinari che ne intesserono la vita. Nell'archivio della Chiesa di San Carlo a Roma, tenuta dai Padri trinitari, sono conservati alcuni volumi che lo stesso Natali scrisse, in parte durante la permanenza in casa della Beata, in parte dopo la sua morte. Nel 2005 una studiosa appartenente al laicato trinitario, Giovanna Cossu Merendino, ha raccolto questi scritti in un ponderoso volume intitolato «Le misericordie di Dio verso le sue creature: beata Anna Maria Giannetti Taigi» (Tipografia Vaticana, Città del Vaticano 2005, pp. 572). Nell’introduzione rileva come «nel nostro tempo di crisi di valori, di divorzi, di aborti, di sperimentazioni su embrioni umani, di unioni irregolari, la figura di questa donna appare quanto mai attuale; la fedeltà, la forza con cui visse la sua non facile condizione familiare, rappresenta un esempio prezioso, un richiamo ai valori della famiglia, all’amore per le piccole cose, all’amore di Dio». Non a caso il convegno che l’Associazione San Giovanni de Matha dei laici trinitari d’Italia ha tenuto l’anno scorso a Roma, è stato proprio dedicato al tema «Le radici spirituali e culturali della crisi economica in atto». Nella sua relazione la Cossu ha rilevato che, della carità che riceveva, la beata Taigi tratteneva soltanto l’indispensabile per le necessità della famiglia, perché «il resto lo distribuisce tra chi è più povero di lei e si umilia a chiedere lei stessa l’elemosina vedendo che non sono sufficienti le sue risorse per soccorrere i bisognosi». A 20 anni Anna Maria Giannetti aveva sposato Domenico Taigi, un servitore della famiglia Chigi, dal cui matrimonio nacquero ben sette figli.

Per far sì che la figura e l'opera della Beata siano conosciute e servire d’esempio per i laici e le madri di famiglia di oggi, la Cossu sottolinea anche che, questa straordinaria laica vissuta nella Roma dell’Ottocento, sia «la prima donna popolana che ha raggiunto la perfezione cristiana nella vita matrimoniale; prima di lei molte donne hanno avuto gli onori degli altari, ma non erano sposate, oppure erano vedove o religiose, regine o principesse. […] il marito della Beata guadagna appena 6 paoli al mese, ma la povertà non è un ostacolo per la loro felicità, perché non sono soli, il loro matrimonio è composto di tre persone: c’è Gesù con loro» (Giovanna Cossu Merendino, «La carità della Beata Anna Maria Giannetti Taigi e il suo impegno in campo sociale», relazione al convegno «Le radici spirituali e culturali della crisi economica in atto; la dimensione e la rilevanza sociale della nuova evangelizzazione alla luce della lettera apostolica Evangelii Gaudium», Roma 10 - 13 ottobre 2014, pp. 1-2).

Autore: Giuseppe Brienza

Fonte: Vatican Insider

La beata Anna Maria Taigi nacque a Siena il 29 maggio 1769 e fu battezzata il giorno seguente. In seguito a dissesti finanziari i suoi genitori, Luigi Giannetti e Maria Masi, si trasferirono a Roma, quando lei aveva sei anni.

Nella città eterna venne affidata alle suore Maestre Pie Filippine, dove in due anni ricevette una completa formazione. 

Per aiutare i genitori bisognosi, si dedicò a lavori diversi, anche più umili.

Ancor giovane si sposò con Domenico Taigi, uomo pio ma di un carattere difficile e grossolano. Anna Maria vi passò sopra, e badò principalmente alla virtù. Così per 49 anni, lei finissima nel tratto, ebbe l'opportunità di esercitare continuamente la pazienza e la carità.

Il matrimonio fu improntato ai più elevati principi cristiani. Conoscendone tutto il profondo valore etico-sociale, e considerandolo semplicemente come un'altissima missione ricevuta dal cielo, la Beata trasformò la sua casa in un vero santuario, dove Iddio aveva il primo posto. Docile al marito, evitava quanto poteva irritarlo e turbare la pace domestica. Sobria e laboriosa, non fece mancare mai nulla alla famiglia e, nel limite delle sue possibilità, fu larga con i poveri.

Ebbe sette figli dei quali tre morirono in tenera età: due maschi e due femmine diventarono adulti. Impartì loro un'educazione civile e religiosa accuratissima e completa.

Fin da bambina imparò a corrispondere alla grazia e cominciò a vivere una vita spirituale intensa. Aveva un solo desiderio: amare Dio e servirlo in tutto; una sola preoccupazione: evitare anche l'ombra di una qualsiasi imperfezione volontaria. Fu devotissima alla SS.ma Trinità, di Gesù Sacramento e della Passione del Signore; per la Madonna ebbe una tenerissima devozione.

Abbracciato l'Ordine Secolare Trinitario il 26 dicembre 1808, ne visse perfettamente lo spirito, e divenne serva fervida e adoratrice della SS.ma Trinità. Iddio l'arricchì di molti doni carismatici; singolare fra tutti, quello di un sole luminoso, che per 47 anni brillò davanti al suo sguardo, e nel quale vedeva quanto accadeva nel mondo e lo stato delle anime in vita e in morte.

Volò al paradiso il 9 giugno 1837; fu beatificata il 30 maggio 1920. Il suo corpo si conserva a Roma, nella Basilica di S. Crisogono nella Cappella a lei dedicata.

Autore: Carmelo Randello

SOURCE : http://www.santiebeati.it/dettaglio/33200

Sotto un sole infuocato

· Elena Buia Rutt racconta Anna Maria Taigi, la santa del mese ·

02 giugno 2014

Nei primi versi di Mistica, una poesia del 1963, Sylvia Plath descrive la propria condizione esistenziale come una sorta di paralisi angosciosa: «L’aria è un mulino di uncini / domande senza risposta». La poetessa americana, stremata dal fallimento del suo matrimonio con il poeta inglese Ted Hughes, di lì a qualche giorno si toglierà la vita, infilando la testa nel forno, non senza aver prima messo i vassoi della colazione vicino ai lettini dei suoi due figli. Eppure, in questa poesia, i versi centrali ci parlano di un’esperienza spirituale determinante, quella del contatto con Dio: «Quando si è visto Dio, qual è il rimedio?».

Sylvia Plath ha provato l’estasi dello slancio mistico, ma si ritrova incapace di normalizzare quest’esperienza, reinserendola nella vita di tutti i giorni. Non riesce a dare un senso concreto a questa sua “visione”, né tantomeno è in grado di trarne consolazione e scopo. Nei versi finali, però, fa un passo in avanti; capisce come «il significato cola dalle molecole», emerga cioè dalla concretezza opaca, precaria, ma autentica della vita reale e non da un astratto moto ideale.

Una donna vissuta a Roma circa due secoli e mezzo fa, una ex-domestica della famiglia Chigi, Anna Maria Taigi, aveva sette bambini (di cui tre morirono in tenera età) e, venendo continuamente rapita da estasi mistiche durante le faccende di casa, non aveva il timore di rivolgersi direttamente al Signore, pregandolo cortesemente di lasciarla in pace, dato che era «madre di famiglia e aveva altro da fare». Infatti, a differenza di Sylvia Plath, Anna Maria Taigi viveva l’esperienza dell’incontro con Dio, soprattutto nella sua faticosa, povera e laboriosissima vita quotidiana, svolgendo appieno i suoi compiti di madre di famiglia, arrancando per mettere insieme il pranzo con la cena, assecondando con pazienza l’irascibile carattere del marito, prodigandosi per poveri e malati, pregando e facendo penitenza per tutti coloro che ne avevano bisogno, fossero Papi o popolani. Oltre ai sette figli, Anna Maria si dedicava ai sei nipoti, figli della figlia Sofia rimasta vedova: senza contare le cure intensissime nei riguardi dei vecchi genitori, in particolare verso il padre, malato di lebbra.

Eppure era una giovane donna che, per bellezza e portamento, avrebbe potuto condurre una vita dedita allo svago e alla mondanità; ma aveva scelto la via stretta della sequela del Signore, motivo per cui chiese di essere aggregata al Terz’Ordine dei Trinitari Scalzi.

Il significato che Plath faticosamente intravedeva e intellettualizzava (ma che non le impedì di togliersi la vita), Taigi lo viveva in modo diretto in una fede radicata nel «prosaico e incompiuto» mondo quotidiano. Un significato basato su un servire spassionato, estremo, ispirato: un significato alimentato da una carità smisurata. Fu beatificata nel 1920, da Benedetto xv, perché «sposa esemplare, madre premurosa e testimone dell’amore alla Santissima Trinità». Eppure Anna Maria per quarantasette anni (dal 1790 alla morte) vide splendere, a una distanza di circa un metro e venti e a circa venti centimetri sopra il suo capo, un sole infuocato, circondato orizzontalmente da una corona di spine dalla quale scendevano due lunghe spine, che si incrociavano con le punte arcuate verso il basso. Nel centro della sfera c’era una donna seduta, con lo sguardo levato in direzione del cielo.

In questo “sole mistico” Anna Maria parlava con Dio, vedeva avvenimenti passati, presenti e futuri, leggeva i segreti dei cuori.

Vi conobbe anche con assoluta certezza la sorte dei defunti, come anche la durata e la causa delle loro pene riparatrici in purgatorio: un’umile donna del popolo era così a conoscenza del destino delle anime e dei più alti segreti di capi di Stato, generali, Papi. Profetizzò molti eventi storici che poi si realizzarono come lei aveva annunciato: tra questi, la sconfitta dell’esercito napoleonico in Russia, la conquista dell’Algeria da parte della Francia, la liberazione degli schiavi nelle Americhe, l’inizio, la durata, le linee teologiche e le vicissitudini politiche del pontificato di Giovanni Mastai Ferretti, che non era ancora cardinale quando Anna Maria morì nel 1837. Quanto a Napoleone, conobbe non soltanto i diversi avvenimenti della sua vita, ma profetizzò anche la morte a Sant’Elena, descrivendone i funerali, come se vi fosse presente. Taigi, inoltre, ebbe con Pio vii parecchi colloqui: combatté con moniti, incoraggiamenti, preghiere, digiuni, penitenze a difesa dell’indissolubile legame tra papato e sede romana, messo seriamente in discussione dalla bufera napoleonica in corso. Una povera donna del popolo, ispirata dall’alto, si offriva come vittima della giustizia divina: in questo risiede quella sua santità, fatta di vita pratica (Anna Maria non sapeva scrivere), umiltà, forza d’animo e amore per Cristo crocifisso.

Anna Maria Taigi morì il 9 giugno 1837, a sessantotto anni. Il suo corpo, perfettamente intatto, riposa in una cappella della chiesa di San Crisogono a Trastevere.

Nata nel 1971, laureata in lettere e poi in filosofia, Elena Buia Rutt ha collaborato a Radio 3 e Rai educational. Tra le sue pubblicazioni, Ti stringo la mano mentre dormi (2012), Flannery O’Connor: il mistero e la scrittura (2010), Verso casa: viaggio nella narrativa di Pier Vittorio Tondelli (200o). Per noi, ha scritto la storia di santa Teresa di Lisieux (ottobre 2013).

SOURCE : https://web.archive.org/web/20180612141105/http://www.osservatoreromano.va/it/news/sotto-un-sole-infuocato

BEATA ANNA MARIA TAIGI

L’ORDINARIETÀ DI UNA VITA VISSUTA IN UNA CONTINUA TENSIONE VERSO IL CIELO

Del 09/06/2022

di Enrico Sigismondi

Difficile inquadrare in un unico, statico schema la figura della Beata Anna Maria Taigi. Donna laica, sposa, madre di ben sette figli - di cui tre morti in tenera età - terziaria dell’ordine della Ss. Trinità. Ricolma di grazie abbondanti quali il solo Vangelo di Nostro Signore Gesù Cristo poteva annunciare e promettere: “Una misura buona, pigiata, scossa e traboccante vi sarà versata nel grembo”. E veramente così fu per Anna Maria che, nata il 29 maggio 1769, a sei anni si trasferisce a Roma dopo aver fino ad allora vissuto a Siena con il papà Luigi Giannetti e la mamma Maria Masi.

Famiglia benestante quella di Anna Maria. Ma la fortuna finanziaria del padre, farmacista stravagante ed imprevidente, non dura che pochi anni. Venduto tutto per ripagare i debiti, il trasferimento è imperativo e Anna Maria inizia presto a conoscere il duro lavoro, la mortificazione dell’umile servizio in una fabbrica prima e poi l’imposto silenzio delle giornate trascorse da cameriera. Inizia presso una nobildonna dalla quale assimila la vita oziosa e gaudente. Infine a palazzo Maccarani, dei principi Chigi. Approdata qui dopo un’istruzione sommaria ma completa ed imbevuta di quel ricco bagaglio di fede trasmessole dalle suore Maestre Pie Filippine, conosce l’uomo che sposerà giovanissima: Domenico Taigi. Per compiacerlo vive per tre anni nella vanità femminile e i divertimenti mondani. Se ne stacca definitivamente dopo una confessione guidata dalla stessa mano provvidente del Signore..

Domenico non è un uomo cattivo. Si può dire che sia un devoto timorato di Dio, eppure manifesta un carattere difficile, puntuto e spigoloso che non di rado è ragione di sofferenza per chi gli è vicino. Anna Maria conoscerà anche in questo l’umile servizio di una sposa verso il proprio marito, attraverso la paziente sopportazione e la benevola testimonianza di un amore coniugale ricolmo della più alta spiritualità, ma denso di concrete e disinteressate attenzioni che altro non sono che il palpitare del Cuore Divino del Salvatore in Lei.

Dirà proprio Domenico al processo di beatificazione della moglie:

“Accadeva spesso che al mio ritorno a casa la trovassi piena di gente. Immediatamente ella si congedava da tutti, fossero anche una nobildonna o un prelato, per prendersi cura di me con sollecitudine amorosa: ognuno poteva rendersi conto che faceva ogni cosa con tutto il cuore, mi avrebbe perfino tolto i calzari dai piedi, se lo avessi permesso. In breve, era per me di consolazione e di conforto in ogni cosa [...] La serva di Dio sapeva come mettere ognuno a suo agio e lo faceva con una grazia che non mi è possibile descrivere. Spesso tornavo a casa stanco, di malumore e irascibile ma ella sempre sapeva addolcirmi e rallegrarmi.”

Sì. La casa di Anna Maria è spesso piena di gente. Di ogni estrazione sociale e culturale. Il cardinal Pedicini - suo direttore d’anima assieme a monsignor Raffaele Natali - a chi gli chiede consiglio e istruzioni di spirito rimanda molti da Anna Maria.

Ella accoglie tutti con soave delicatezza ed attenzione materna, senza badare a chi ha davanti, fosse anche una regina.

Ed in effetti una regina si presenta. Si tratta - tra le tante personalità di spicco, curiali e nobiliari - di Maria Luisa di Borbone-Spagna, regina consorte di Etruria investita della sua regalità sovrana assieme al marito Ludovico nientemeno che da Napoleone Bonaparte in persona.

La regina soffre di crisi epilettiche frequenti e violente. Va da Anna Maria. Guarisce.

La nostra beata sparge, per conto del Salvatore tanto amato, continue grazie attorno a lei. Un giorno la nipote con un nocciolo di prugna si ferisce un occhio gravemente. La vista sembra ormai persa. La Beata prende un po’ di olio del lume che tiene acceso in casa; traccia un segno di croce sull'occhio della bambina. Il giorno dopo quest’ultima va a scuola come sempre. La guarigione è completa. Nulla sembra che le sia mai accaduto.

Nella chiesa di San Marcello il marito Domenico si sente male all’improvviso. Quasi sicuramente un colpo apoplettico. Si accascia a terra. Anna Maria si raccoglie in preghiera: la grazia è ottenuta. Il marito si riprende istantaneamente e completamente.

Si potrebbe continuare per pagine e pagine, ore e ore di lettura, ad elencare i miracoli compiuti dalla nostra beata. Eppure ci occorre spazio per descrivere la grazia che accompagna Anna Maria per tutta la vita: un globo di luce indescrivibile, un “sole mistico” come soleva chiamarlo, proprio davanti a lei. In esso vede perfettamente tutto il passato, scruta il presente e prevede il futuro.

Diverse e dettagliate sono le predizioni che fa di avvenimenti tutti verificatisi alla lettera.  L’elezione del cardinal Cappellari a futuro pontefice con il nome di Gregorio XVI. L’elezione del cardinal Mastai - Ferretti al soglio pontificio come Pio IX in conclave dai tempi record (solo quarantotto ore) quando quest’ultimo si trovava ancora nella lontana Nunziatura del Cile. 

E in questo globo di luce vede anche le anime che si salvano o si perdono per sempre. All’avvicinarsi a lei di un’anima in stato di grazia, la luce diventa più intensa e il profumo della virtù si fa sensibile. Se, al contrario, si approssima un'anima pervertita, il globo si oscura e il fetore del peccato diventa quasi insostenibile.

Nella sua ultima malattia nessuno si accorge che per Anna Maria è vicino il momento delle Nozze eterne. La lasciano sola, per permetterle di riposare.  Eppure Dio non la abbandona. Giunta l’alba del 9 giugno 1837 – un venerdì – monsignor Natali ha la premonizione esatta di quanto sta per accadere. Si reca immediatamente a casa della povera malata e la trova nei suoi ultimi momenti. Recita le preghiere della Chiesa per quest'ora estrema, le dà l'ultima assoluzione e la Beata si incammina per l’eterna Dimora Celeste.

La portata della vocazione ricevuta da quest’anima è già abbastanza evidente in queste povere righe offerte a gloria della potente misericordia di Dio. Ma ciò che colpisce nella biografia della Beata Anna Maria Taigi non sono le grazie straordinarie provenienti dal Cielo. In esse non c’è merito per l’anima eletta a tale disegno di salvezza. Ciò che penetra la nostra realtà quotidiana ancora a distanza di quasi tre secoli, è sempre l’ordinarietà di una vita vissuta in una continua tensione verso il Cielo. Come accade un po’ per tutti i santi. Ancora una volta i sapienti del mondo vengono confusi nella propria boria di presunta conoscenza, di presunta sapienza, di presunta ricchezza.

Una semplice donna, madre e sposa; figlia ubbidiente della Chiesa e umile nell’amare la volontà di Dio, viene rivestita di quella grazia che stordisce i grandi del mondo. E perché mai? In virtù della piena donazione di se stessa all’amore di Dio. Quella stessa donazione di cui siamo capaci tutti, che ciascuno di noi è in grado fare. Sarà senz’altro una banalità, ma pare bene ribadirla se tante anime ancora faticano a concepire la propria dignità e la propria grandezza: la santità è per tutti. Vocazione universale delle anime che bramano fare una scelta verso il Bene e che forse ancora non chiamano con il suo vero nome: Gesù, “Dio salva”. Anime che invece sono continuamente cercate, amate, ardentemente desiderate! Non importa chi si è, dove ci si trova, di quali mezzi terreni si dispone. Se di pochi beni materiali. Di pochi beni intellettivi. Di pochi beni spirituali. L’amore di Dio è vivo e vigile. E noi non abbiamo bisogno di tutte queste cose per amarLo. Come non ne ebbe bisogno la beata Anna Maria. Il nostro tutto, anche se poco o quasi nulla, consegnato a Dio con costante generosità spalanca quell’abisso di grazie e miracoli che sono la gloria di Dio in terra. Per noi è gloria, invece, la fedeltà di un “mio Dio ti amo” che si rinnova in spirito ed in opere tutti i giorni. Con tutto se stessi.

SOURCE : https://www.fcim.it/sussidi-e-riflessioni/beata-anna-maria-taigi-1641

TAIGI, Anna Maria, beata

Enciclopedia Italiana (1937)

Nata in Siena il 29 maggio 1769 di povera condizione, fu condotta giovane a Roma; ivi, a 20 anni, sposò Domenico Taigi (in realtà Taeggi), facchino di dispensa della nobile famiglia Chigi, e con lui convisse fino alla morte, facendolo padre di 7 figli. Trascorse la vita nella cura assidua delle facende domestiche e della numerosa prole. Morì il 9 giugno 1839. Come terziaria dell'ordine trinitario il suo corpo fu traslato nella basilica di San Crisogono nel Trastevere, e quei padri ne curarono la causa di beatificazione. Come visione caratteristica della sua vita mistica si ricorda dai biografi quella di un sole coronato di spine, nel cui centro troneggiava la figura muliebre della Sapienza divina.

Bibl.: T. Barbetti, Breve compendio della vita della beata A. M. Taigi, Roma 1920.

SOURCE : https://www.treccani.it/enciclopedia/taigi-anna-maria-beata_%28Enciclopedia-Italiana%29/

Voir aussi http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/Mariataigi/anna_maria_taigi.htm