Ruth, une femme à la
fidélité infaillible
Philippe-Emmanuel
Krautter - publié le 26/11/18 - mis à jour le 24/09/21
Ruth compte parmi ces
personnages jalonnant le récit biblique dont la discrétion a pu reléguer à
l’arrière-plan sa mémoire. Or cette femme, d’une grande fidélité, invite à
relire le livre que lui consacre l’Ancien Testament. Lorsque tout semble perdu,
les valeurs morales que Ruth manifeste tout au long de sa vie de convertie ne
peuvent que faire figure d’exemple.
Une jeune veuve
exemplaire. Ruth, originaire du royaume de Moab, a épousé le fils de Noémie,
une famille juive ayant fui la famine sévissant à Bethléem en Judée. Ruth et sa
belle-mère deviennent veuves peu de temps après. Noémie décide de retourner
dans la terre de ses ancêtres et encourage sa belle-fille à rester avec son
peuple. Mais Ruth en un inoubliable élan prononce ces paroles gravées à
jamais :
Les deux femmes rentrent
en Judée et s’installent à Bethléem dans le plus grand dénuement au moment des
moissons. Ruth décide alors d’aller glaner des épis de blé d’un champ
appartenant à Booz, un parent de son beau-père qui n’est pas insensible aux
charmes de la jeune femme. Selon les lois juives, Booz aurait dû par devoir de
solidarité épouser sa parente, la veuve Noémie, mais celle-ci trop âgée pour
enfanter de nouveau encourage sa belle-fille à se marier avec ce dernier. À
cette fin, la jeune Moabite se convertit au judaïsme. Désormais, Ruth associera
son destin à celui de Booz et de son peuple.
Cette union avec Booz,
ultime fidélité de Ruth, constitue pour beaucoup l’un des plus beaux récits
bibliques. Il a été magnifiquement évoqué par Victor Hugo dans La Légende
des siècles en 1859. Les célèbres vers du poète de son inoubliable poème
« Booz endormi », ont par leur beauté largement contribué à garder la
mémoire vivante du récit biblique de Ruth. Écoutons-les…
D’une force poétique
puissante proche du style biblique, l’inspiration du poète se veut aussi d’une
délicatesse suggérée par des images d’un rare raffinement évoquant tour à tour
l’ombre nuptiale, le vol des anges dans l’obscurité pour manifester le plan
divin.
Lire aussi :
Les
personnages de l’Ancien Testament : la sagesse de Salomon
De cette union, Ruth
donne un fils à Booz qui aura pour nom Obed, père de Jessé et grand-père
du roi
David. La Moabite originaire d’une nation opposée aux Israélites sera ainsi
associée à l’une des lignées les plus fameuses puisqu'elle conduira
elle-même à Jésus, ainsi que le rappelle le tout début de l’Évangile
selon saint Matthieu citant Ruth parmi son ascendance. La force de ce récit
réside dans le témoignage de fidélité irrépressible manifestée par la jeune
étrangère, acceptant de quitter les siens, une confiance absolue alors que
l’adversité s’abattait sur ces deux veuves dans le dénuement le plus grand.
L’histoire évoquée se veut aussi une limite au nationalisme israélite défendu
par Esdras et Néhémie.
Lire aussi :
Les
personnages de l’Ancien Testament : David, le roi poète et guerrier
Victor Hugo ne sera pas
le seul à être touché par la grâce de ce récit. Le grand poète-dramaturge
Goethe jugera cette histoire biblique comme une des nouvelles les plus belles
de la Bible alors que le compositeur César Franck se laissera également inspiré
par la beauté et la force de cette histoire en lui consacrant un oratorio Ruth, dans
l’ancien style dramatique italien, œuvre qui connaîtra un beau succès notamment
grâce au soutien de Franz Liszt.
Lire aussi :La
Bible, star des péplums : « L’histoire de Ruth » d’Henry Koster
SOURCE : https://fr.aleteia.org/2018/11/26/ruth-une-femme-a-la-fidelite-infaillible/
Ruth, première féministe
de l’humanité ?
Rachel Molinatti - publié
le 01/10/25
Ruth, que l'Église fête
le 2 octobre, ne serait-elle pas un exemple de femme bien dans ses baskets sur
lequel s’appuyer aujourd’hui ?
Vous connaissez Simone de Beauvoir… mais connaissez-vous Ruth la Moabite ? Et si cette femme du douzième siècle avant Jésus-Christ, fêtée le 2 octobre, se révélait être une figure féministe incontournable ? Personnage central du livre de Ruth, un petit livre de l’Ancien Testament, elle est originaire du pays de Moab et n'appartient donc pas initialement au peuple d’Israël. Ruth est décrite comme une femme à la fidélité infaillible. Mariée à un Israélite ayant émigré au pays de Moab, elle se retrouve prématurément veuve et décide d’accompagner sa belle-mère Noémi qui rentre à Bethléem. Un bel exemple de sororité, soit dit en passant. Quelle détermination, quelle audace, quelle expression d’une volonté propre ! Alors que le bon sens et Noémi elle-même lui enjoignent de rester dans son pays de Moab, Ruth choisit l’inconfort et le déracinement. Décidée à prendre sa vie en main, Ruth l’aventurière décide de faire fi de ce qui se fait ou non et n’en fait qu’à sa tête ! Elle suit sa belle-mère de l’autre côté de la mer Morte, à des jours de marche, pour un changement de vie et un avenir pour le moins incertain.
Une femme à la volonté de
fer
À cette époque, une femme
veuve, pauvre, sans enfants et étrangère a peu de valeur. Rien cependant qui
n’empêche Ruth d’avancer droit devant. On peut ainsi la voir comme une femme
libre et féministe avant l’heure en ce sens qu’elle sait ce qu’elle veut et y
va tout schuss. Et pourtant, nous sommes au temps des Juges, soit au douzième
siècle avant Jésus-Christ environ ! Ruth n’existe pas simplement en tant que
"femme de…" mais en tant que femme qui veut et sa volonté de rester
auprès de sa belle-mère est implacable, malgré les protestations de celle-ci :
"Ruth restait attachée à ses pas. Noémi lui dit : "Tu vois, ta
belle-sœur est retournée vers son peuple et vers ses dieux. Retourne, toi
aussi, comme ta belle-sœur". Ruth lui répondit : "Ne me force pas à
t’abandonner et à m’éloigner de toi, car où tu iras, j’irai ; où tu
t’arrêteras, je m’arrêterai ; ton peuple sera mon peuple, et ton Dieu sera mon
Dieu [...]. Voyant qu’elle était résolue à l’accompagner, Noémi cessa de
lui parler de cela"" (Rt 1).
Comme le dit la
philosophe Jeanne Larghero, le féminisme n’est pas une question de pouvoir,
mais une affaire d’engagement. Elle explique que le christianisme a produit des
femmes atypiques, souvent en rupture avec les codes sociaux de leur époque, qui
peuvent être des modèles pour nous. Bien sûr, l’histoire de Ruth précède l’ère
chrétienne mais peu importe : elle est un exemple fort de liberté intérieure et
un beau signe pour notre époque. Et c’est justement son héroïsme si singulier
qui permettra à Ruth de rencontrer Booz et de leur descendance naîtra le roi
David, puis plus tard le Messie lui-même. Comme quoi, le féminisme mène à
tout.
Découvrez aussi ces
femmes extraordinaires et inspirantes de la Bible :
Lire aussi :Longue vie au
féminisme!
Lire aussi :Les
personnages de l’Ancien Testament : la sagesse de Salomon
Lire aussi :Ruth,
une femme à la fidélité infaillible