vendredi 2 novembre 2012

La COMMÉMORATION DES FIDÈLES DÉFUNTS

Commémoration des défunts

Lendemain de la Toussaint

"Jour où l'Église intercède pour ses membres endormis dans la mort et qui souffrent dans une ultime purification avant d'entrer dans la Gloire" (Martyrologe de Solesmes). 

Saint Odilon, abbé de Cluny, établit, dans le millier de monastères qui dépendaient de la grande abbaye bourguignonne, un office liturgique à l'intention de tous les frères défunts. L'extension de l'influence clunysienne étendit cette coutume à l'Église universelle en même temps que se précisait la doctrine concernant les âmes du Purgatoire ('Le purgatoire est l'infirmerie du Bon-Dieu' disait le curé d'Ars).

Voir aussi 

'Le Sanctuaire de Notre-Dame de Montligeon', un lieu où l'on peut confier les défunts à la prière.

Communion des saints.

Commémoraison de tous les fidèles défunts. La sainte Mère Église, attentive à rendre de dignes louanges à tous ses enfants qui jouissent du bonheur du ciel, s'empresse d'intercéder auprès de Dieu pour les âmes de tous ceux qui se sont endormis dans l'espérance de la résurrection, mais aussi en faveur de tous les hommes depuis la création du monde, dont le Seigneur seul connaît la foi, pour, qu'avec le secours d'instantes prières, ils puissent entrer dans la communauté des habitants du ciel et jouir de la vision du bonheur éternel.

Martyrologe romain

SOURCE : https://nominis.cef.fr/contenus/saint/170/Fete-des-defunts.htm



La Commémoration des Fidèles Trépassés

La Commémoration des Morts est le complément de la fête de la Toussaint: ces deux jours nous rappellent et nous montrent en action, d'une manière excellente et sublime, ce dogme consolant appelé par l'Église la Communion des Saints. La terre, le purgatoire, le Ciel, sont la même Église de Jésus-Christ en des états différents; les fidèles vivants, les défunts dont l'âme a besoin d'être purifiée, les élus déjà parvenus au sein de la gloire, sont tous frères; les uns ont été hier ce que nous sommes, et demain, avec le secours de la grâce, nous serons ce qu'ils sont eux-mêmes. Pleurons nos défunts, revêtons-nous de deuil à la mort de nos parents et de nos amis, gardons leur souvenir; mais cela ne suffit pas: nous devons prier pour eux.

La foi nous enseigne qu'entre la terre et le Ciel il y a un lieu intermédiaire appelé purgatoire, lieu de purification, où les âmes des élus dont la pureté n'est pas parfaite expient, dans un feu mystérieux, mais redoutable, le reste de leurs fautes. Dieu est si pur, Dieu est si saint, que nul ne peut voir Sa face à découvert ni être admis en Sa présence, s'il n'est exempt de la plus légère souillure. Nous avons tous à craindre pour nos défunts que leur âme ne soit retenue captive dans ce lieu d'expiation; ne nous rassurons pas trop vite sur leur entrée au Ciel; prions pour eux, offrons à Dieu, pour leur soulagement, nos bonnes oeuvres, nos souffrances, les indulgences, surtout le Saint Sacrifice de la Messe. Ces âmes demandent à grand cri notre secours, elles se plaignent de notre abandon; nos prières et nos bonnes oeuvres sont pour elle une rosée rafraîchissante, une douce consolation, une cause de diminution de leurs souffrances, un moyen de plus prompte délivrance.

La Vie des Saints, par mille traits du plus haut intérêt, nous rappelle ce que l'Église de la terre doit à celle du purgatoire. Si nos chers défunts viennent rarement, par des apparitions, secouer notre négligence et réveiller notre charité trop oublieuse, puissions-nous du moins souvent, chaque jour, être hantés par cette pensée: "Les âmes souffrantes m'implorent; je puis facilement leur venir en aide; à l'oeuvre, sans retard et sans trêve!" La dévotion envers les âmes du purgatoire aura pour nous-mêmes un double résultat salutaire: elle nous fera craindre les moindres fautes, par le souvenir des châtiments qui devront les expier; elle attirera sur notre âme, après notre mort, les miséricordes divines promises aux coeurs miséricordieux.

Abbé L. Jaud, Vie des Saints pour tous les jours de l'année, Tours, Mame, 1950

SOURCE : http://magnificat.ca/cal/fr/saints/la_commemoration_des_fideles_trepasses.ht


Joža Uprka  (1861–1940), All Souls' Day, 1897, 79,5 X 102, National Gallery in Prague


Pour l'Eglise catholique , le 2 Novembre est le jour de la commémoration des fidèles défunts. La liturgie prévoit un office particulier et des prières sont dites pour leurs âmes. Le 2 Novembre s'appelle aussi le jour des morts ou la fête des morts.

Depuis les premiers temps du christianisme, les liturgies occidentales et orientales consacrent une partie de la messe à la commémoration des défunts. Au moment du « mémento » on récitait les noms des défunts qui étaient inscrits sur des dyptiques, des tablettes généralement en ivoire. De nos jours, cet usage est remplacé par la lecture de la deuxième prière eucharistique de la liturgie Vatican II qui commence par : « Souviens-toi aussi de nos frères qui se sont endormis dans l’espérance de la résurrection, et de tous les hommes qui ont quitté cette vie ».

En même temps que cette célébration quotidienne, s’est installée la coutume de commémorer les défunts suivant certains rythmes.

Tertullien ( mort vers 230-240 ) témoigne de l’existence de cette pratique à son époque : « Nous faisons annuellement des oblations pour les défunts et pour les nativités des martyrs ». ( De la couronne du soldat chapitre III ). On remarque que dans ce témoignage Tertullien établit déjà une relation entre la commémoration des morts et la Toussaint.

Après l’inhumation, des prières sont dites près de la tombe du défunt pendant les trois premiers jours de deuil.

Au IV ème siècle Saint Augustin recommande un deuil de sept jours au lieu du deuil de neuf jours que pratiquaient les latins et qu’ils appelaient les novandiales. « Le nombre septénaire marque principalement le repos à cause de la religion du Sabbat; c'est donc avec raison qu'on l'observe pour les morts, parce qu'ils sont comme entrés dans leur repos ». ( Questions sur la Genèse. Chapitre CLXXII ).

Au VI ème siècle le pape Saint Grégoire le Grand institua la pratique du « trentain » c’est à dire la célébration de trente messes trente jours de suite pour qu’une âme soit libérée du purgatoire. Un jour, ayant pitié d’un frère défunt , il avait dit au prévôt du monastère : « Va donc, et à partir de ce jour, durant trente jours continus, aie soin d’offrir pour lui le sacrifice, et ne laisse passer absolument aucun jour où ne soit pas immolée l’hostie salutaire pour sa libération ». ( Dialogues Livre IV chapitre 55 ).

On pouvait ainsi célébrer un office pour les défunts le jour de l’inhumation puis trois , sept et trente jours après leur décès et à chaque anniversaire mais cette commémoration se situait dans le cadre d’un office ordinaire.

Un office spécifique pour les morts n’a été créé que plus tardivement, les premiers textes qui en parlent datent du IX ème siècle. Amalaire, diacre puis abbé de Metz, le signale dans son ouvrage « De ecclesiasticis officiis » écrit vers 820.

En 998 Odilon de Cluny institue une journée consacrée à la commémoration de tous les fidèles trépassés et la fixe le 2 Novembre. Son biographe raconte : « le saint père abbé proposa à tous les monastères que, le lendemain de la fête de tous les saints, on célèbre partout la mémoire de tous les fidèles pour assurer le repos de leur âme, que des messes soient célébrées, que les aumônes soient distribuées sans compter pour les pauvres ». Un texte des années 1070-1080 laisse entendre que le pape Léon IX ( 1049-1054 ) approuva cette décision peu après le décès d’Odilon. La fête des morts se répand dans tout l’occident chrétien dès la seconde moitié du XI ème siècle. Elle passe en Angleterre au début du XIII ème siècle. Le concile d’Oxford de 1222 déclare cette commémoration fête de seconde classe.

La commémoration des fidèles défunts entre dans la liturgie romaine et devient universelle au XIII ème siècle.

SOURCE : http://frederic.simon1.free.fr/jour_des_morts.html



CONGREGATIO PRO CLERICIS



Homélie à Cluny - 13 septembre 1998



Célébration du millénaire de l’institution du " Jour des morts ",



2 novembre, par saint Odilon, abbé de Cluny.


La Célébration qui nous rassemble aujourd’hui veut rappeler l’institution par saint Odilon de Cluny, pour les monastères soumis à son autorité, d’une " journée ", dirait-on en style moderne, consacrée à la commémoraison, dans la prière, de tous les fidèles trépassés.

Ce fait, la tradition le fixe à l’année 998, il y a donc un millénaire.

[Les historiens hésitent sur la date exacte : le décret définitif pourrait être plus tardif et conclure plusieurs dispositions dont la première remonterait à l’an 998 : la tradition, en simplifiant, ne s’éloigne pas de la vérité.]

Et c’est en 1898, à l’occasion du neuvième centenaire, qu’a été instituée par le pape Léon XIII, en l’église Notre-Dame de Cluny, l’Archiconfrérie de prière pour les âmes du purgatoire. L’esprit de saint Odilon se perpétue ainsi et fructifie à travers les siècles, comme a voulu le manifester par la lettre que vous avez entre les mains le Saint-Père Jean-Paul II, dont je vous apporte une bénédiction spéciale.

Quel est cet esprit ? C’est, simplement, l’esprit catholique.

Et c’est aussi, chez ce grand Abbé, l’esprit monastique, l’esprit de son ordre, voué à la prière et à l’intercession.

C’est l’esprit catholique. Le signe en est l’approbation universelle qu’a suscitée la pratique instaurée par notre saint. Cette " fête des morts ", comme l’on dit parfois de façon inexacte, rattachée par lui à la fête de tous les saints du 1er novembre, s’est répandue dans l’Église entière, qui l’a approuvée officiellement par la voix du Pontife romain, peut-être dès le milieu du onzième siècle avec saint Léon IX, et l’a fait entrer plus tard dans sa Liturgie.

À vrai dire, il ne s’agissait pas d’une création et la prière pour les morts est aussi ancienne que le Christianisme, plus ancienne même puisque la piété juive, dans ses derniers développements, la connaissait déjà.

Les Pères de l’Église recommandent unanimement cette prière, dont la forme privilégiée est l’offrande du Saint Sacrifice. Saint Augustin évoque même la mémoire générale que fait l’Église des trépassés, en particulier de ceux en faveur de qui personne ne prie : elle les embrasse dans sa prière, elle, la " pia mater communis ". Et l’on voit cette pratique se développer largement chez les fidèles qui multiplient les dons, les fondations, auprès des monastères en particulier, afin qu’après leur mort on se souvienne d’eux, de leur famille, devant le Seigneur, pour leur obtenir le « repos éternel » dont parle la liturgie des défunts : « Requiem aeternam dona eis Domine ».

C’est donc là une aspiration profonde de l’âme chrétienne, entée d’ailleurs sur un sentiment profondément humain : tout homme face à la mort prend conscience de sa pauvreté, de son besoin de salut, du mystère de sa destinée. Il s’ouvre spontanément à une attitude religieuse. Le soin des morts chez les humains, nous disent les ethnologues, est une donnée constante et caractéristique : notre pastorale se doit de répondre à ces aspirations du cœur de l’homme, quitte à les évangéliser.

Car la Révélation divine devait éclairer ces pressentiments et fournir un fondement solide à la pratique chrétienne. La mort corporelle ne signifie pas la destruction totale de l’être humain. Celui-ci, Image de Dieu, est " Corps, âme et esprit ", dit saint Paul aux Thessaloniciens [1 Thess. 5, 23] : Il est doté d’une âme spirituelle. Devenu enfant de Dieu par le baptême, il est appelé à le rejoindre, au-delà de la mort, dans la vie éternelle. La mort n’est pas le terme : " Je ne meurs pas, j’entre dans la vie " s’écrie Thérèse de Lisieux.

Néanmoins cette entrée peut ne pas être immédiate. L’union intime avec Dieu suppose que soient écartés tous les obstacles, dont l’unique source est le péché ; Jésus évoque une pureté qui permet de voir Dieu : « Bienheureux les cœurs purs, car ils verront Dieu ». C’est donc l’âme elle-même, épouse du Christ, qui quand elle meurt dans son amitié - en état de grâce - tout en restant marquée par des fautes vénielles ou les conséquences de ses faiblesses passées, implore une purification pour pouvoir s’unir à son époux ; l’expérience de la prière du peuple chrétien pour les morts exprimait cette persuasion de la nécessité d’une purification, en même temps que sa foi en la communion des saints ; elle a amené à définir le dogme du purgatoire [cf. DS 1304 ; 1820 ; 1580], comme purification finale qui permet aux élus d’obtenir la sainteté nécessaire pour entrer dans la joie du ciel, pour parvenir à la vision béatifique de Dieu [cf. CEC n. 1032]. Et en cette célébration anniversaire, il semble particulièrement opportun de le rappeler, alors qu’une conception amputée de l’amour de Dieu réduit sa paternité à une " grand-paternité " condescendante. Dans le désir de l’excuser, de le laver de tout soupçon d’être un " Dieu vengeur ", on fait silence sur la fin ultime de l’homme et sur l’existence de peines après la mort ; c’est se méprendre sur qui est Dieu, et sur qui est l’homme ! Dieu n’a pas besoin de nos excuses embarrassées ! C’est parce que sa sainteté mérite d’être admirée, qu’il n’y a personne de plus désirable que Lui, que le péché qui s’oppose à Lui est grave pour l’homme ! Et c’est parce que " Dieu en vaut la peine ", qu’il peut rester des peines après la mort ! D’autre part, elles sont un signe de notre dignité : Dieu ne s’est pas résolu à ne nous demander d’être en sa compagnie que des enfants immatures contraints d’accepter ses prévenances : il veut être choisi, librement, comme l’époux de nos âmes, et c’est pourquoi nous sommes responsables de nos actes, de nos fautes. Ceux qui refusent cet appel ont encore une échappatoire qui leur permet de ne pas vivre une cohabitation forcée : c’est la damnation clairement évoquée par Jésus, « Allez, maudits, au feu éternel ». Mais ceux qui désirent cette communion ont au contraire la possibilité d’une ultime préparation.

Nous n’avons donc pas à rougir de cette doctrine : Dieu nous laisse libres comme l’enfant prodigue ; c’est par miséricorde qu’il permet à ceux qui le haïssent de s’éloigner définitivement de Lui ; et c’est par miséricorde qu’il permet aux autres de se débarrasser de leurs affections désordonnées, pour entrer de plain-pied dans la Société des Trois Personnes divines, de la Vierge Marie, des anges et des saints. Pouvoir nous purifier, nous détacher, expier, pour arriver à le regarder sans honte, à tout partager avec lui, c’est un privilège. Le feu du purgatoire n’est pas comme celui de l’enfer : c’est l’amour même de Dieu qui, dans ces ultimes épreuves, vient préparer le cœur humain à l’union où il pourra l’étreindre et l’embrasser dans la « vive Flamme » de l’Esprit-Saint. Le subir, c’est être déjà plongé dans son amour passionné, car notre Dieu est un " feu dévorant ".

Mais cette purification est aussi douloureuse. Sainte Catherine de Gênes compare l’âme en purgatoire à une tige de métal rouillé, plongée dans la fournaise, et qui souffre de ne pouvoir s’unir à la flamme qui l’entoure tant que les scories qui l’alourdissent ne sont pas consumées. C’est pourquoi la deuxième certitude présente au cœur de l’Église qui prie pour les morts, c’est que, dans ce mystère de justice et d’amour, le chrétien n’est pas seul. En effet, selon la Constitution dogmatique sur l’Eglise du Concile Vatican II [n. 49], « tous ceux qui sont au Christ et possèdent son Esprit s’unissent organiquement dans une même Église et sont étroitement liés par une cohésion mutuelle en Lui [cf. Ep 4, 16]. L’union de ceux qui sont encore en chemin avec leurs frères qui se sont endormis dans la paix du Christ n’est pas du tout interrompue, bien au contraire, selon la foi constante de l’Église, elle est renforcée par la communication des biens spirituels ». Il est donc possible de venir en aide aux parents, aux amis, qui nous ont quittés, à toute la famille des fidèles à travers le monde. C’est le mystère de la communion des saints par lequel tout est commun dans l’unité d’un même Corps, le Corps mystique du Christ : prières, œuvres de charité, œuvres de pénitence offertes par amour, tout cela compose, ajouté aux mérites du Christ, de la Vierge et des saints, le trésor de l’Église, et va au bénéfice de chacun de ses membres. Toute âme qui s’élève élève le monde, a-t-on dit justement. Et le Seigneur agrée que nous venions en aide plus particulièrement à telle ou telle personne : si la miséricorde est « un élément indispensable pour façonner les rapports mutuels entre les hommes, dans un esprit de grand respect envers ce qui est humain et envers la fraternité réciproque » (Jean-Paul II, encyclique Dives in misericordia 14), nous devons prendre conscience qu’il n’est pas pas possible d’imaginer une société plus humaine sans y instaurer cette tendresse et cette sensibilité du coeur dont nous parle si éloquemment la parabole de l’enfant prodigue, ou encore celle de la brebis et de la drachme perdue [cf. Luc 15, 1-32]. Cette tendresse doit s’étendre à nos frères défunts : sans compassion pour leur peine, c’est un monde cruel que nous préparerions. C’est pourquoi Saint Jean Chrysostome nous exhorte ainsi : " Portons-leur secours et faisons leur commémoraison. Si les fils de Job ont été purifiés par le sacrifice de leur père [cf. Jb 1, 5], pourquoi douterions-nous que nos offrandes pour les morts leur apportent quelque consolation ? N’hésitons pas à porter secours à ceux qui sont partis et à offrir nos prières pour eux " [hom. in 1 Cor. 41, 5 : PG 61, 361C].

Parmi ces "secours", il faut placer en premier lieu l’offrande du Sacrifice de la Messe, qui répand sur l’humanité la grâce de la Rédemption opérée sur la Croix. Ce Saint Sacrifice, l’Église l’offre quotidiennement pour les vivants et pour les morts. Et les fidèles tiennent à juste titre, à ce que l’Eucharistie accompagne la cérémonie des funérailles. N’était-ce pas déjà le vœu de sainte Monique, demandant seulement qu’on se souvienne d’elle, après sa mort, " à l’autel du Seigneur " ? On sait qu’en 1915 le pape Benoît XV accorda à tout prêtre de célébrer le 2 novembre trois messes pour les défunts, et ce privilège demeure dans la Liturgie rénovée après Vatican II.

Ce sont ces convictions qui sont à l’origine de la décision dont nous fêtons le millénaire. La foi profonde au mystère de notre communion dans le Christ, l’amour ardent des frères dans le besoin, de ces frères défunts privés du seul Bien qui puisse combler leur cœur, c’est l’esprit catholique. C’est l’esprit monastique aussi, si le moine n’est autre qu’un chrétien qui veut l’être en perfection et totalement. Il n’y a pas à s’étonner que cette initiative de la « journée » du 2 novembre soit née dans le cœur d’un moine. On sait comment traditionnellement chez eux la prière pour les morts était pratiquée avec générosité et ferveur : frères, amis, bienfaiteurs étaient quotidiennement évoqués devant la miséricorde de Dieu. Mais celle-ci est sans mesure, et le cœur qui s’y ouvre se dilate aux dimensions de l’amour divin : il accueille toute détresse. C’est ainsi qu’Odilon a voulu embrasser dans sa charité tous les défunts en voie de purification, sans exception ni discrimination. De même que tous les saints du ciel sont honorés, en la fête de la Toussaint, dans une même allégresse, de même, le lendemain, tous nos frères du purgatoire sont l’objet de notre charité secourable.

La charité ne passe pas. Si elle vit dans nos cœurs, elle y éveille les mêmes sentiments, « ceux qui sont dans le Christ Jésus » [Philippiens 2, 5]. Ainsi la piété pour les morts, le souci de leur venir spirituellement en aide, doit caractériser de façon permanente l’Église du Christ. Alors que le passage au second millénaire a été marqué par l’instauration de cette forme exquise de charité pour les défunts, qui dure depuis mille ans, que pouvons-nous faire pour renouveler cette charité et nous renouveler dans l’Esprit-Saint, pour ouvrir à notre tour le troisième millénaire ? L’initiative prise il y a mille ans demeure un défi pour notre temps. Il nous faut susciter un nouveau zèle de charité envers les défunts, pour que le Peuple chrétien se nourrisse de nouveau de la foi en la vie éternelle. Vivants et défunts, puissions-nous tous partager ce désir ardent de la Rencontre définitive : « L’Esprit et l’Époux disent : Viens - Amen, Viens Seigneur Jésus » [Apoc. 22, 17. 20].

SOURCE : http://www.vatican.va/roman_curia/congregations/cclergy/documents/rc_con_cclergy_doc_13091998_homcluny_fr.html


LA COMMÉMORATION DES ÂMES

La commémoration de tous les fidèles défunts a été instituée en ce jour par l’Eglise, afin de secourir par des bonnes œuvres générales ceux. qui n'ont pas le bonheur d'être soulagés par des prières particulières, ainsi qu'il a été démontré parla révélation précédente. Saint Pierre Damien rapporte encore que saint Odilon, abbé de Cluny, ayant découvert, qu'auprès d'un volcan de Sicile, on entendait souvent les cris et les hurlements des démons se plaignant que les âmes des défunts fussent arrachées de leurs mains par les aumônes et les prières, ordonna, dans ses monastères, de faire, après la fête de tous les saints, la commémoration des morts. Ce qui, dans la suite, fut approuvé par toute l’Eglise (Iottald, Vie de saint Odilon, l. II, c. XIII). A ce sujet, ou peut faire deux considérations générales : 1° sur ceux qui doivent être purifiés, 2° sur les suffrages qui sont adressés pour eux. Dans la première considération, on peut examiner : 1° qui sont ceux qui sont purifiés, 2° par qui ils le sont, 3° où ils le sont. Ceux qui sont purifiés se divisent en trois catégories. Les premiers sont ceux qui décèdent sans avoir accompli la satisfaction qui leur a été enjointe. S'ils avaient eu au fond du coeur une contrition suffisante pour effacer leurs péchés, ils seraient librement passés à la vie, quand bien même ils n'auraient accompli aucune satisfaction, puisque la contrition est la plus grande satisfaction pour le péché et qu'elle l’efface entièrement. « Dieu, dit saint Jérôme, ne regarde pas tant à l’espace du temps qu'à la mesure de la douleur, ni tant à l’abstinence de la nourriture qu'à la mortification des vices.» Mais ceux qui ne sont pas assez contrits, et qui meurent avant l’achèvement de leur pénitence, sont punis très sévèrement dans le feu du purgatoire, à moins toutefois que des personnes auxquelles ils sont chers ne se chargent de leur satisfaction. Or, pour que cette commutation ait de la valeur, quatre conditions sont requises. La première, l’autorité de celui qui commue, et cette autorité est celle du prêtre; la deuxième, le besoin qu'éprouve celui en faveur duquel s'opère la commutation, car il doit se trouver dans une position telle qu'il ne puisse satisfaire pour soi-même, mais qu'il ait besoin d'être aidé ; la troisième, la charité de celui pour lequel se fait la commutation, charité qui lui est nécessaire pour rendre sa satisfaction méritoire et complète; la quatrième, la proportion à établir par, rapport à la peine, en sorte qu'une plus petite soit commuée en une plus grande; car, on satisfait plus à Dieu par; la peine personnelle due par celle d'autrui. Or, il y a trois genres, de peines : 1° la personnelle et volontaire, c'est celle par laquelle on satisfait le mieux ; 2° la personnelle qui n'est, pas volontaire, elle est subie dans le purgatoire; 3° la volontaire; mais sans être personnelle, telle qu'elle existe dans la commutation que l’on traite ici ; elle satisfait, moins que la première, par cela même qu'elle n'est point personnelle, et elle satisfait plus que la seconde, parce qu'elle est volontaire. Cependant, si celui pour lequel on se charge de satisfaire vient à décéder, il n'en souffre pas moins dans le purgatoire, quoiqu'il soit délivré plus tôt par la peine qu'il endure lui-même, et par celle que les autres paient pour lui, parce que le Seigneur compte pour somme principale sa peine et celle des autres. D'où il suit que s'il doit, dans le purgatoire, souffrir deux mois, il pourra, au moyen du secours qu'il reçoit, être délivré en un seul. Cependant, jamais il n'en sort que la dette ne soit payée. Que si elle est acquittée, cette dette compte pour celui qui la paie et retourne à son profit; et s'il n'en a pas besoin, elle revient au trésor de l’Eglise, ou bien elle vaut pour ceux qui sont dans le purgatoire. Les seconds, qui vont dans le purgatoire, sont ceux qui ont vraiment accompli la pénitence qui leur a été enjointe ; cependant, elle n'a pas été suffisante par l’ignorance ou la négligence du prêtre. Alors ceux qui descendent dans le purgatoire, à moins qu'ils ne suppléent par la grandeur de leur contrition, y complèteront en entier ce qu'ils auront fait en moins dans cette vie. Dieu, en effet, qui sait la proportion et la mesure entre les péchés et les peines, ajoute quelque peine suffisante, afin qu'aucun péché ne reste impuni. D'ailleurs, la pénitence imposée est ou bien trop forte; ou bien égale, ou bien trop faible; si elle est trop forte, elle procure une augmentation de gloire dans ce qu'elle a d'excessif; si elle est égale, elle suffit alors pour la rémission de toute la coulpe ; si elle est trop faible, ce qui reste est suppléé par la puissance de la justice divine. Ecoutez ici ce que pense saint Augustin de ceux qui font pénitence à la dernière extrémité : « Celui qui vient d'être baptisé sort de ce monde tranquille sur son sort; le fidèle qui vit bien sort de ce monde tranquille sur son sort ; celui qui fait pénitence et qui est réconcilié, quand il est en santé, sort tranquille d'ici-bas ; celui qui fait pénitence à la dernière extrémité et qui s'est réconcilié, s'il sort d'ici-bas tranquille, moi, je ne le suis pas : donc, prenez le certain et laissez l’incertain. » Si saint Augustin parle ainsi, c'est que ces personnes ont coutume de faire pénitence, plutôt par nécessité que par bonne volonté, plutôt par crainte du châtiment que par amour de la gloire. Les troisièmes, qui descendent dans le purgatoire; sont ceux qui portent avec eux du bois, du foin et de la paille, c'est-à-dire ceux qui ont une affection, charnelle pour leurs richesses, moins grande cependant que celles qu'ils ont pour Dieu. Les affections charnelles qu'ils ont pour leurs maisons, leurs femmes, leurs possessions, bien qu'ils ne préfèrent rien à Dieu, sont indiquées par ces trois choses : selon qu'ils auront aimé, ou bien ils seront brûlés plus de temps comme bois, ou moins de temps comme foin, ou très peu comme paille. « Ce feu, comme dit saint Augustin, bien qu'il ne soit pas éternel, est pourtant merveilleusement fort ; il surpasse toute peine qui ait jamais été endurée ici-bas par personne ; aucune souffrance n'a existé pareille dans la chair, tout extraordinaires qu'aient été les supplices des martyrs. »

II. Par qui sont-ils purifiés ? Cette purgation et cette punition s'opérera par les mauvais anges et non par les bons; car les bons anges ne tourmentent pas les bons ; mais les bons anges tourmentent les mauvais, les mauvais les bons, et les mauvais ceux qui leur ressemblent. C'est cependant chose pieuse de croire que les bons anges visitent et consolent fréquemment leurs frères et concitoyens, et les exhortent à souffrir avec, patience. Ils ont encore un autre sujet de consolation en ce qu'ils attendent avec certitude la gloire future: car ils la possèdent certainement, toutefois dans un moindre degré que ceux qui sont dans la patrie, mais dans un plus grand que ceux qui sont en chemin pour l’autre vie. La certitude de ceux qui sont dans la patrie est sans attente et exempté de crainte, parce qu'ils n'attendent pas la vie future, puisqu'ils la possèdent réellement, et qu'ils ne craignent pas de la perdre plus tard, tandis que c'est le contraire dans ceux qui sont en chemin pour l’autre vie. Mais la certitude de ceux qui sont en purgatoire tient le milieu. Elle est accompagnée d'attente puisqu'ils attendent la vie future elle-même : mais elle est exempte de crainte, car ayant leur libre:arbitre affermi, ils savent que désormais ils ne peuvent plus pécher. Ils ont encore un autre sujet de consolation, c'est de croire que l’on peut prier pour eux. Cependant il serait peut-être plus conforme à la vérité de croire que cette punition ne s'exerce pas par le ministère des mauvais anges, mais que c'est un ordre de la justice divine et par une conséquence de sa volonté.

III. Où sont-ils purgés? C'est dans un lieu situé à côté de l’enfer, qui se nomme Purgatoire ; c'est là que le placent plusieurs savants, bien qu'il semble à d'autres qu'il soit situé dans l’air et dans la zone torride. Cependant il entre dans l’économie du plan divin que divers lieux soient assignés à différentes âmes, et cela pour plusieurs raisons, soit pour la légèreté de leur punition, soit à cause de leur délivrance prochaine, soit pour notre instruction, ou bien pour une faute commise dans ce lieu, ou enfin à cause des prières de quelque saint : 1° Pour la légèreté de leur peine, ainsi il a été révélé à quelques personnes, au témoignage de saint Grégoire, qu'il y a des âmes punies dans l’obscurité. 2° Pour leur délivrance prochaine, afin qu'elles puissent révéler leur indigence aux autres et en impétrer les suffrages pour sortir de peine plus vite. On lit en effet que des pêcheurs de Saint-Théobald prirent en automne un énorme bloc de glace dais leur filet, et ils en furent pourtant beaucoup plus satisfaits que si c'eût été un poisson, parce que l’évêque avait mal aux pieds, et ils lui procurèrent un grand soulagement en appliquant cette glace sur ses membres souffrants. Or, une fois l’évêque entendit sortir de la glace la voix d'un homme qui ayant été adjuré de lui dire qui il était, répondit: « Je suis une âme, tourmentée dans cette glacière pour mes péchés, et je pourrais être délivrée si vous disiez trente messes pendant trente jours sans interruption. » L'évêque avait dit la moitié de ces messes et se préparait à en célébrer une autre, quand il arriva;que, le diable y poussant, une sédition s'éleva parmi la presque totalité des habitants de la ville. Alors l’évêque, ayant été appelé pour apaiser la discorde, quitta les ornements sacrés, et ne dit pas la messe ce jour-là. Il recommença donc et déjà il avait dit les deux tiers des messes, quand une grande armée, semblait-il, assiégea la ville; et il fut forcé de ne pas dire la messe. Il recommença, donc encore une troisième fois, et il avait dit toutes, les messes excepté la dernière qu'il allait célébrer, quand la maison de l’évêque et sa villa parurent tout en flammes. Comme ses serviteurs lui disaient de laisser passer ce jour sans dire la messe, il répondit : « Quand toute la villa devrait brûler, je la célébrerais. » Lorsqu'elle fut achevée, aussitôt la glace se fondit et l’incendie qu'on croyait voir disparut comme un fantôme sans avoir causé aucun dommage. 3° Pour notre instruction : car c'est afin que nous sachions qu'une grande peine est infligée après cette vie aux pécheurs; comme on dit qu'il arriva à Paris, d'après ces paroles du Chantre de Paris (Pierre le Chantre) : Maître Silo (Ou Siger de Brabant) pria avec instance un de ses écoliers, qu'il soignait dans sa maladie, de revenir le trouver après sa mort, pour lui rapporter en quelle situation il se trouverait. Quelques jours après, il lui apparut avec une chappe de parchemin, sur l’extérieur de laquelle étaient écrits partout une foule de sophismes, et dont l’intérieur était tout doublé de flammes. Le maître lui demanda qui il était. « Je suis bien, dit-il, celui qui vous ai promis de revenir vous trouver. », Interrogé sur l’état dans lequel il se trouvait, il répondit : « Cette chappe me pèse et m’écrase plus que si j'avais sur moi une tour; et elle m’a été donnée à porter à cause, de la gloire que je retirais à faire des sophismes. Pour ce qui est de la flamme de feu dont elle est doublée, ce sont les pelleteries délicates et mouchetées que je portais : cette flamme me torture et me brûle. » Or, comme le maître jugeait cette peine facile à endurer, le défunt, lui dit de tendre la main pour apprécier à quel point ce châtiment était supportable. Quand il eut présenté sa main, le revenant laissa tomber une goutte de sa sueur qui perça la main de Silo comme une flèche, en sorte que celui-ci en ressentit une douleur prodigieuse, et il lui dit : « Voici comme je suis partout.»: Le maître, effrayé de la sévérité de ce châtiment, résolut de quitter le monde et d'entrer en religion. Le lendemain matin quand ses écoliers furent rassemblés; il composa ces vers :

Linquo coax ranis, ira corvis, vanaque vanis,

Ad logicam pergo quae mortis non timet ergo


(Je laisse coasser les grenouilles, croasser les corbeaux, les gens frivoles s'occuper des frivolités.

Je cherche une logique qui ne craigne point la mort pour conclusion).

Et quittant le siècle, il se réfugia dans un cloître. 4° Pour avoir commis une faute dans un endroit, comme le dit saint Augustin, et ainsi que le prouve un exemple rapporté par, saint Grégoire. Un prêtre, qui fréquentait les bains, y rencontrait un inconnu toujours disposé à le servir. Un jour, pour le bénir et le payer de son labeur, le prêtre lui ayant offert un pain bénit, cet homme répondit en gémissant : «Pourquoi ne donnez-vous cela, mon père ? Ce pain est sanctifié, or, je ne puis le manger; car autrefois j'ai été le maître de ce lieu, mais pour mes péchés, j'y ai été envoyé après ma mort : cependant je vous prie d'offrir au Dieu tout puissant ce pain pour mes péchés : vous saurez que vous aurez été exaucé quand vous ne me trouverez plus en revenant ici. » Alors le prêtre offrit pour lui tous les jours pendant une semaine l’hostie salutaire, après, quoi, i1 ne le rencontra plus désormais. 5° A cause de la prière de quelque saint ; ainsi lit-on de saint Patrice qui demanda pour quelques personnes un purgatoire en un certain lieu sous terre vous en trouverez l’histoire après la fête de saint Benoît.

La seconde considération a rapport aux suffrages que l’on peut adresser pour eux. A ce propos, trois considérations se présentent : 1° Les suffrages en eux-mêmes. 2° Ceux pour qui ils se font. 3° Ceux par qui ils se font. I. Il y a quatre espèces de suffrages qui sont très avantageux aux morts, savoir: la prière des fidèles et celle de leurs amis, l’aumône, l’immolation de l’hostie salutaire, et le jeûne. 1° Que la prière de leurs amis leur serve, cela est évident par l’exemple de Paschase rapporté dans saint Grégoire (Dialogues, l. IV, c. XXXVI). Il raconte qu'un homme d'une sainteté et d'une vertu éminente existait quand deux souverains pontifes furent élus à la fois. Cependant dans la suite, l’Église ayant reconnu l’un d'eux pour légitime, Paschase, entraîné dans l’erreur, préféra toujours l’autre, et persista dans son sentiment jusqu'à la mort. Quand il fut trépassé, un démoniaque ayant touché la dalmatique posée sur son cercueil, fut guéri. Or, longtemps après, Germain, évêque de Capoue, étant allé au bain pour sa santé, y trouva le diacre Paschase debout et prêt à le servir. A sa vue, il eut grande peur, et il lui demanda ce que faisait là un homme si important que lui. Paschase lui avoua qu'il n'avait été envoyé en ce lieu de peine pour aucun autre motif que celui d'avoir abondé en son sens plus que de raison dans l’affaire susdite; puis il ajouta : « Je vous en prie, adressez, pour moi des prières au Seigneur, et vous saurez que vous avez été exaucé, quand vous ne me trouverez plus lorsque vous reviendrez ici. » Germain pria donc pour lui et étant revenu peu de jours après, il ne trouva plus Paschase en ce lieu.

Pierre de Cluny dit qu'un prêtre, qui célébrait tous les jours la messe pour les morts, fut accusé auprès de son évêque et suspendu de son office. Or, un jour de grande solennité, comme l’évêque passait par le cimetière pour aller à matines, les morts se levèrent devant lui et dirent : « Cet évêque ne nous donne pas une messe ; de plus, il nous a enlevé notre prêtre ; mais certainement, s'il ne s'amende, il mourra. » Alors l’évêque donna l’absolution au prêtre, et, dans la suite, il célébra la messe de bon coeur pour les morts. Les prières des vivants sont très agréables aux défunts, comme on peut s'en assurer par ce que rapporte le Chantre de Paris (Pierre Cantor, moine de Cîteaux, + 1297). Un homme récitait toujours le psaume De profundis pour les morts, chaque fois qu'il passait par un cimetière. Un jour que, poursuivi par des ennemis, il s'y était réfugié, aussitôt les morts se levèrent, chacun avec l’instrument de sa profession à la main, et ils le défendirent vigoureusement, forçant ses ennemis effrayés à prendre la fuite. — La seconde espèce de suffrages qui est utile aux défunts, c'est l’aumône: cela est évident parce qu'on lit dans le livre des Macchabées, que le vaillant Judas, ayant recueilli douze mille dragmes d'argent, les envoya à Jérusalem dans le but de les offrir pour les péchés dés morts; car il avait de bons et religieux sentiments touchant la résurrection. Un exemple rapporté par saint Grégoire, au IV° livre de ses Dialogues (c. XXXVI), confirme l’avantage de l’aumône en faveur des défunts. Un soldat vint à mourir, mais bientôt après il revint à la vie et raconta ce qui lui était arrivé. Il disait donc qu'il y avait un pont sous lequel coulait un fleuve noir, bourbeux et fétide. Quand le pont était passé, se trouvaient des prairies agréables, ornées d'herbes aux fleurs odoriférantes, au milieu desquelles paraissaient réunis des hommes vêtus de blanc que rassasiait cette suavité merveilleuse et variée des fleurs. Mais sur ce pont était une épreuve, c'est-à-dire que si un homme injuste voulait le passer, il tombait dans ce fleuve noir et puant, tandis que les justes d'un pas assuré arrivaient à ces prairies charmantes. Il raconta y avoir vu un homme appelé Pierre, lié, couché sur le dos à une grande masse de fer. Et le soldat lui avant demandé pourquoi il était là, on lui répondit : « S'il souffre ainsi, c'est, que quand on lui commandait l’exécution d'un coupable, c'était plus à la cruauté et au désir de faire des blessures qu'à l’obéissance qu'il cédait. » Il disait encore y avoir vu un pèlerin qui, arrivé sur le pont, le passa avec une autorité pareille à la pureté de sa vie sur la terre. Un autre, nommé Etienne, qui avait voulu passer, fit un faux pas et fut jeté hors du pont, le corps restant à moitié suspendu. Alors des hommes affreusement noirs, sortis du fleuve, le saisirent d'en bas par les jambes, tandis que d'autres personnages vêtus de blanc et resplendissants de beauté le tinrent d'en haut par les bras. Or, pendant cette lutte, le soldat qui en était témoin revenait à, son corps et ne put savoir quel fut le résultat de cet examen et qui fut le vainqueur. Ce qui nous donne à comprendre que dans Etienne les péchés de la chair combattaient avec ses aumônes. Car le fait d'être tiré d'en bas par les cuisses et celui d'être tiré d'en haut par les bras indique qu'il avait aimé faire des aumônes et qu'il n'avait pas su résister entièrement aux mauvais penchants de la terre. La troisième espèce de suffrages, qui est l’immolation de l’hostie salutaire, est très avantageuse aux défunts; ce qui est prouvé par beaucoup d'exemples. Saint Grégoire rapporte au IV° livre de ses Dialogues (c. LV), qu'un de ses moines, appelé Juste, étant, à la dernière extrémité, indiqua qu'il avait trois pièces d'or cachées, et mourut en gémissant de cette action; saint Grégoire commanda alors aux frères de l’ensevelir dans le fumier avec ses trois pièces d'or en disant : « Que ton argent périsse avec toi.» Cependant saint Grégoire ordonna à un des frères d'immoler chaque jour la sainte Hostie pour lui pendant trente jours. Quand il eut exécuté ce que lui avait intimé saint Grégoire, celui qui était mort apparut le trentième jour à un frère qui lui demanda : « Comment es-tu? » Et il répondit: « Jusqu'à présent, j'ai été mal, mais maintenant je suis bien, car j'ai reçu aujourd'hui la communion.

On s'assura encore que l’immolation de la sainte, Hostie était fort utile non seulement aux morts, mais, encore aux vivants. Quelques hommes en effet étaient dans le creux d'un rocher occupés à extraire de l’argent, quand tout à coup le rocher croule et écrase tous ceux qui se trouvaient là, à l’exception d'un seul qui échappa à la mort protégé, par un retrait, mais sans pouvoir en sortir. Sa femme, le pensant mort, faisait dire tous les jours la messe pour lui et offrait chaque fois un pain, un vase de vin avec une chandelle. Le diable, jaloux, lui apparut trois jours de suite sous une forme humaine et lui demanda où elle allait : la femme lui ayant exposé le motif de sa démarche, le diable lui disait : « Ne te fais, pas de mal inutilement, car déjà la messe est dite » ; de sorte que ces trois jours-là elle manqua à la messe et ne la fit même pas dire. Or, un certain temps après, quelqu'un, en fouillant dans ce même rocher pour trouver de l’argent, entendit, au-dessous de soi, une voix qui disait : « Frappez doucement, car une grosse pierre va me tomber sur la tête. » Or, comme l’ouvrier avait peur, il appela beaucoup de monde pour entendre cette voix; ensuite il se mit à creuser et il entendit les mêmes paroles. Alors tous s'approchèrent plus près et dirent: « Qui es-tu? » On répondit : « Allez doucement, car une grosse pierre semble tomber sur moi. » On creusa donc par le côté et on parvint jusqu'à cet homme qu'on retira bien portant et sain et sauf; on lui demandait comment il avait pu vivre si longtemps, il dit que chaque jour on lui avait donné un pain, un pot de vin et une chandelle allumée, excepté seulement pendant trois jours. Quand sa femme apprit cela, elle fut toute transportée, et elle connut que son mari avait été sustenté par son oblation et que le diable l’avait trompée pour que, ces trois jours-là, elle me fît pas dire de messes. Cet événement s'est passé, au témoignage de Pierre de Cluny, dans une villa nommée Ferrières, au diocèse de Grenoble (Le fait rapporté par la légende est bien le même, quant au fond, que raconte Pierre le vénérable. La femme du malheureux faisait dire une messe chaque semaine à l’intention de son mari, mais elle y manqua une fois par négligence. Ce ne fut qu'au bout d'un an qu'eut lieu la délivrance. (Pierre le vénérable, De miraculis, 1. II, c. II.) Le cardinal Bossa parle du même prodige et le lit dans saint Pierre Damien, Opp. XXIII, il serait arrivé auprès du lac de Côme apud Clavennam montem. Henri de Gand, + en 1275). Saint Grégoire rapporte encore qu'un nautonier fit naufrages et qu'un prêtre ayant immolé pour lui la sainte Hostie, il sortit enfin de la mer sain et sauf. On lui demandait comment il avait échappé, au péril ; il dit qu'étant au milieu de la mer, déjà épuisé et presque défaillant, quelqu'un s'approcha de lui et lui offrit un pain. Quand il l’eut mangé, il recouvra aussitôt toutes ses forces et fut recueilli sur un navire qui passait par là. Or, il reçut le pain à l’heure même où le prêtre disait la messe pour lui. — La quatrième espèce de suffrages qui est le jeûne, est avantageuse aux défunts, sur le témoignage de saint Grégoire, lequel traite de ce suffrage en même temps que des trois autres, en disant: « Les âmes dés défunts sont délivrées de quatre manières, ou bien par les offrandes des prêtres, ou par les prières des saints, ou par les aumônes de leurs amis, ou par les jeûnes de leurs parents. La pénitence que font pour elles ceux qui ont été leurs amis a beaucoup de valeur. » Le docteur Solennel (Henri de Gand, + en 1275) raconte qu'une femme, qui avait perdu son mari, se désespérait d'être pauvre, quand le diable lui apparut et lui dit qu'il. l’enrichirait si elle consentait à faire ce qu'il voudrait. Elle le promit; alors il lui enjoignit: 1° de faire tomber dans, la fornication les ecclésiastiques qu'elle logerait chez elle ; 2° d'accueillir les pauvres dans le jour et de les chasser la nuit sans leur laisser rien; 3° d'empêcher de prier dans l’église par son babil; 1° de ne jamais se confesser de cela. Arrivée a l’article de la mort, et invitée par son fils à se confesser, elle lui révéla le fait, en lui disant qu'elle ne pouvait pas se confesser et que sa confession ne lui vaudrait rien. Mais son fils insistant avec larmes et promettant de faire pénitence pour elle, elle se laissa toucher et envoya son fils chercher un prêtre. Avant que celui-ci n'arrivât, les démolis se ruèrent sur elle, la saisirent de crainte et d'horreur, au point qu'elle en mourut. Son fils confessa pour elle le péché de sa mère et fit pénitence pendant sept ans; après lesquels il vit sa mère qui le remerciait de sa délivrance. Les indulgences de l’Eglise font aussi du bien aux défunts. Un légat du siège apostolique pria un soldat distingué de combattre au service de l’Eglise dans l’Albigeois, en lui accordant une indulgence pour son père qui était mo&t ; il y resta une quarantaine de jours, après quoi son père lui apparut tout éclatant de lumière et le remerciant de sa délivrance.

II. Il reste à examiner quatre points encore, par rapport à ceux en faveur desquels s'adressent les suffrages. 1° Quels sont ceux auxquels ils sont profitables; 2° pourquoi ils doivent leur profiter; 3° s'ils profitent également à, tous; 4° comment ils peuvent savoir qu'on adresse des suffrages pour eux. 1° « Tous ceux qui sortent de cette vie, dit saint Augustin, sont ou très bons ou très méchants, ou médiocrement bons. Les suffrages adressés en faveur de ceux qui sont très bons sont des actions de grâces; ceux en faveur des méchants sont des consolations quelconques; pour les médiocrement bons, ce sont des expiations. » On appelle très bons, ceux qui s'envolent immédiatement au ciel sans passer par le feu de l’enfer ni du purgatoire. Il y en a de trois sortes : les baptisés, les martyrs et les hommes parfaits, qui ont amassé dans la perfection, de l’or, de l’argent et des pierres précieuses, c'est-à-dire qui ont l’amour de Dieu, l’amour du prochain, et des bonnes couvres, au point de ne penser pas à plaire au monde, mais seulement à Dieu. Ils peuvent commettre des péchés véniels, mais la ferveur de la charité consume en eux le péché, comme une goutte d'eau est totalement absorbée dans un foyer incandescent; en sorte qu'ils n'ont en eux rien qui mérite d'être expié par le feu. Celui donc qui prierait pour quelqu'une de ces trois catégories de personnes, ou qui ferait d'autres bonnes oeuvres à leur intention, leur ferait injure, « parce que, dit saint Augustin, c'est faire injure à un martyr que de prier pour un martyr. » Cependant si quelqu'un priait pour un très bon, dans le doute que son. âme fût au ciel, ses oraisons seraient des actions de grâces et tourneraient au profit de celui qui prie, selon les paroles de l’Ecriture sainte (Ps. XXXIV) : « Ma prière retourne en mon sein. » Car à ces trois sortes de personnes le ciel est ouvert immédiatement après leur mort, et ils ne passent pas par le feu du purgatoire. Ce qui est indiqué par ces trois personnes pour lesquelles le ciel s'ouvrit. 1° Pour J.-C. après son baptême : « Jésus étant baptisé et priant, le ciel fut ouvert. » (Saint Luc, III.) Ce qui montre que le ciel s'ouvre à tous les baptisés, soit petits enfants, soit adultes, en sorte qu'aussitôt après, s'ils venaient à décéder, ils s'y envoleraient; car le baptême, en vertu de la passion de J.-C. purifie de tout péché soit originel, soit mortel, soit véniel. 2° Le ciel s'ouvrit pour saint Etienne qu'on lapidait: « Je vois, dit-il (Actes, VII) les cieux ouverts. » Ce qui montre que le ciel s'ouvre à tous les martyrs, en sorte qu'ils y volent quand ils expirent, et s'il leur restait encore quelque faute à expier par le feu, tout est rasé par la faulx du martyre. 3° Il a été ouvert à saint Jean qui était d'une haute perfection. « J'ai vu, dit-il, (Apocal., IV) et la porte du ciel était ouverte. » Ce qui signifie que pour les hommes parfaits qui ont accompli totalement leur pénitence, et qui n'ont pas commis de péchés véniels, ou qui, s'ils en ont commis, les ont consumés de suite par la ferveur de la charité, le ciel même est incontinent ouvert, et ils y entrent de suite pour y régner éternellement. — Ceux qui sont très mauvais sont précipités dans le gouffre de l’enfer, on ne devrait jamais faire aucun suffrage, pour eux si on était certain de leur damnation, d'après cette parole de saint Augustin : « Si je savais que mon père est dans l’enfer, je ne prierais pas plus pour lui que pour le diable. » Que : si on adressait quelque espèce de suffrages en faveur de certains damnés, sur le sort duquel on ne serait pas certain, cela ne leur servirait à rien, ni pour les délivrer de leurs tourments, ni pour adoucir ou diminuer leurs peines, ni pour suspendre pour un temps ou même pour une heure, leur damnation, ni pour leur donner une plus grande force afin de supporter plus aisément leurs tourments; car, en aucun cas, dans l’enfer, il n'y a de rédemption. On appelle médiocrement bons ceux qui portent avec eux des matières à brûler, comme du bois, du foin, de la paille; ou qui, surpris par la mort, n'ont pu faire une pénitence imposée et suffisante. Ils ne sont pas assez bons pour n'avoir pas besoin de suffrages, ni assez mauvais pour que ces suffrages ne puissent leur être profitables. Or, les suffrages qu'on adresse pour eux leur servent d'expiation. C'est donc à ceux-là seulement que ces suffrages peuvent être utiles. Dans la manière de faire ces suffrages, l’Eglise a coutume d'observer trois sortes de jours principalement : le septième, le trentième et l’anniversaire, et la raison en est assignée dans le livre de l’Office mitral (ch. L). On a égard au septième jour afin que les âmes parviennent au sabbat éternel du repos, ou bien afin que soient remis tous les péchés commis dans la vie qui se divise en sept jours ; ou bien pour remettre les péchés commis avec le corps qui se compose de quatre humeurs, et avec l’âme qui a trois qualités. On observe le trentième qui se compose de trois dizaines pour les purifier des fautes commises contre la foi a la Sainte Trinité, ou par la transgression du Décalogue. On observe l’anniversaire afin que des années de calamité, ils parviennent aux années de l’éternité. De même que nous célébrons l’anniversaire des saints pour leur honneur et notre utilité, de même nous célébrons l’anniversaire des défunts pour leur utilité et notre dévotion. 2° On demandé pourquoi les suffrages doivent leur servir. On répond qu'ils le doivent en trois manières: 1° en faveur de l’unité; car ils font un corps avec l’Eglise militante, et pour cela ses biens doivent leur être communs; 2° en faveur de leur dignité, puisque, pendant leur vie, ils ont mérité d'en profiter ; d'ailleurs il est digne que ceux qui ont aidé les autres soient aidés à leur tour; 3° parce qu'ils en ont besoin : ils sont en effet dans une position à ne pouvoir pas se soulager. 3° On demande si ces suffrages profitent également à tous. On répond que si ces suffrages se font spécialement en faveur d'une personne, ils profitent plus aux personnes pour qui on les fait qu'aux autres; s'ils se font en commun, ils profitent davantage à ceux qui, dans cette vie, ont plus mérité qu'ils leur profitent, selon qu'ils, se trouvent dans une égale ou une plus grande nécessité. 4° Comment, peuvent-ils savoir que ces suffrages se font pour eux. Ils le peuvent savoir en trois manières, d'après saint Augustin : 1° par une révélation de Dieu qui les en instruit; 29° par une manifestation des bons anges, car eux qui ici-bas sont toujours avec nous et qui considèrent chacune de nos actions, peuvent en un instant descendre, en quelque sorte, auprès de ces patients et le leur annoncer aussitôt; 3° parla connaissance que leur en donnent les âmes qui en sortent, puisqu'elles peuvent leur annoncer cela comme d'autres choses encore ; 4° ils peuvent le savoir enfin par ce qu'ils éprouvent eux-mêmes et par révélation, car en se sentant soulagés dans leurs tourments, ils connaissent qu'on prie pour eux.

III. De ceux par qui se font les suffrages. Si ces suffrages doivent être profitables, il faut qu'ils soient faits par ceux qui sont dans la charité ; car s'ils étaient faits par des méchants ils ne serviraient à rien. On lit en effet qu'un soldat, au lit avec sa femme, admirait, en voyant la lune qui jetait une grande lumière par des crevasses, comment il se faisait que l’homme doué de la raison n'obéissait pas à son créateur, tandis que toutes les créatures inintelligentes obéissaient. Puis se mettant à déchirer la mémoire d'un soldat mort avec lequel il avait vécu en bonne union, tout à coup ce mort entra dans la chambre et lui dit : « Mon ami, ne te permets aucun mauvais soupçon contre personne, et pardonne-moi, si je t'ai offensé en quoi que ce soit. » Interrogé sur sa position, il dit : « Je souffre différents tourments, principalement pour avoir violé tel cimetière dans lequel après avoir blessé quelqu'un, je lui ai pris son manteau, que je porte sur moi et qui m’écrase plus que ne ferait une montagne. » Ensuite il le conjura de faire prier pour lui. Or, comme son compagnon lui demandait s'il voulait qu'il fît faire ces prières par tel ou tel prêtre, le revenant ne répondit rien, mais il secoua la tête comme pour dire non. Il lui demanda donc s'il voulait que tel ermite priât pour lui. « Plût à Dieu, répondit-il, que cet homme priât pour moi ! » Et quand il eut reçu la promesse que sa demande serait exaucée, il ajouta : « Et moi je te dis que d'aujourd'hui à deux ans, tu mourras aussi. » Alors il disparut. Le soldat amenda sa vie et mourut dans le Seigneur. Quand j'ai dit que les suffrages offerts par les méchants ne sont pas profitables, ceci ne doit point s'entendre des oeuvres sacramentelles, telles que la sainte messe qui ne peut perdre de sa valeur bien qu'offerte par un ministre mauvais; ou bien si le défunt lui-même ou quelqu'un de ses amis eût laissé de bonnes oeuvres à faire à des méchants ; ce dont ils doivent s'acquitter au plus tôt de crainte qu'il lie leur advienne ce qui est arrivé à quelqu'un. Dans les guerres de Charlemagne, raconte Turpin, un soldat, qui devait se battre contre les Maures, pria un parent de vendre son cheval et d'en donner le prix aux pauvres, s'il mourait dans la bataille. Il mourut et le parent, qui trouva le cheval fort à sa convenance, le garda pour lui. Mais peu de temps après, le défunt lui apparut comme un soleil brillant, et lui dit : « Bon cousin, pendant huit jours tu m’as fait endurer des peines dans le purgatoire, parce que tu n'as pas donné aux pauvres, comme je te l’ai dit, le prix de mon cheval; mais tu ne l’auras pas fait impunément : car aujourd'hui les diables tourmenteront ton âme dans l’enfer quant à moi qui suis purifié, je vais au royaume de Dieu. » Et voici que tout à coup on entend dans l’air un cri semblable à celui des lions, des ours et des loups et le parent fut enlevé par les diables (Hélinand, Chronique, an 807).

La Légende dorée de Jacques de Voragine nouvellement traduite en français avec introduction, notices, notes et recherches sur les sources par l'abbé J.-B. M. Roze, chanoine honoraire de la Cathédrale d'Amiens, Édouard Rouveyre, éditeur, 76, rue de Seine, 76, Paris mdccccii
SOURCE : http://www.abbaye-saint-benoit.ch/voragine/tome03/164.htm


LA COMMÉMORATION DES MORTS.

Nous ne voulons pas, mes Frères, que vous ignoriez la condition de ceux qui dorment dans le Seigneur, afin que vous ne soyez pas tristes comme ceux qui n'ont point d'espérance (I Thess. IV, 13). C'était le désir de l'Apôtre écrivant aux premiers chrétiens ; l'Eglise, aujourd'hui, n'en a pas d'autre. Non seulement, en effet, la vérité sur les morts met en admirable lumière l'accord en Dieu de la justice et de la bonté : les cœurs les plus durs ne résistent point à la charitable pitié qu'elle inspire, et tout ensemble elle offre au deuil de ceux qui pleurent la plus douce des consolations. Si la foi nous enseigne qu'un purgatoire existe, où des fautes inexpiées peuvent retenir ceux qui nous furent chers, il est aussi de foi que nous pouvons leur venir en aide (Conc. Trid. Sess. XXV), il est théologiquement assuré que leur délivrance plus ou moins prompte est dans nos mains. Rappelons quelques principes de nature à éclairer ici la doctrine.

Tout péché cause double dommage au pécheur, souillant son âme, et le rendant passible de châtiment. Tache vénielle, entraînant simple déplaisance du Seigneur, et dont l'expiation ne dure qu'un temps ; souillure allant jusqu'à la difformité qui fait du coupable un objet d'abomination devant Dieu, et dont par suite la sanction ne saurait consister que dans le bannissement éternel, si l'homme n'en prévient en cette vie l'irrévocable sentence. Même alors cependant, l'effacement de 'a coulpe mortelle, en écartant la damnation, n'enlève pas de soi toute dette au pécheur converti ; bien qu'un débordement inusité de la grâce sur le prodigue puisse parfois, comme il est régulier dans le baptême ou le martyre, faire se perdre en l'abîme de l'oubli divin jusqu'au dernier vestige, aux moindres restes du péché, il est normal qu'en cette vie, ou par delà, satisfaction soit donnée pour toute faute à la justice.

A contre-pied du péché, tout acte surnaturel de vertu implique double profit pour le juste : il mérite à son âme un nouveau degré de grâce ; il satisfait pour la peine due aux fautes passées en la mesure de juste équivalence qui revient devant Dieu à ce labeur, cette privation, cette épreuve acceptée, cette libre souffrance d'un des membres de son Fils bien-aimé. Or, tandis que le mérite ne se cède pas et demeure personnel à qui l'acquiert, la satisfaction se prête comme valeur d'échange aux transactions spirituelles ; Dieu veut bien l'accepter pour acompte ou pour solde en faveur d'autrui, que le concessionnaire soit de ce monde ou de l'autre, à la seule condition qu'il fasse lui aussi partie par la grâce de ce corps mystique du Seigneur qui est un dans la charité (I Cor. XII, 27).

C'est, comme l'explique Suarez en son beau traité des Suffrages, la conséquence du mystère de la communion des saints manifesté en ces jours. Invoquant l'autorité des plus anciens comme des plus grands princes de la science, discutant les objections, les restrictions proposées depuis eux par plusieurs, l'illustre théologien n'hésite pas à conclure en ce qui touche plus particulièrement les âmes souffrantes : « J'estime que cette satisfaction des vivants pour les morts vaut en justice (Esse simpliciter de justitia), et qu'elle est infailliblement acceptée selon toute sa valeur, et selon l'intention de celui ! qui l'applique ; en sorte que, par exemple, si la satisfaction qui est de mon fait me valait en justice, pour moi gardée, la remise de quatre degrés de purgatoire, elle en remet autant à l'âme pour laquelle il me plaît de l'offrir (Suarez. De Suffragiis, Sectio VI). »

On sait comment l'Eglise seconde sur ce point la bonne volonté de ses fils. Par la pratique des Indulgences, elle met à la disposition de leur charité l'inépuisable trésor où, d'âge en âge, les surabondantes satisfactions des saints rejoignent celles des Martyrs, ainsi que de Notre-Dame, et la réserve infinie des souffrances du Seigneur. ] Presque toujours, elle approuve et permet que ! ces remises de peine, accordées aux vivants par sa directe puissance, soient appliquées aux morts, ; qui ne relèvent plus de sa juridiction, par mode de suffrage ; c'est-à-dire : en la manière où comme nous venons de le voir, chaque fidèle peut offrir pour autrui à Dieu, qui l'accepte, le suffrage ou secours (Est enim suffragium, ut sumitur ex D. Thoma et aliis in 4 d. 43, auxilium quoddam, quod unus fidelis praebet alteri ad obtinendum a Deo remissionem pœnœ temporalis, vel aliud hujusmodi. Suarez. De Suffrages, in Prœmio) de ses propres satisfactions C'est toujours la doctrine de Suarez, et il enseigne que l'Indulgence cédée aux défunts ne perd rien non plus de la certitude ou de la valeur qu'elle aurait eues pour nous qui militons encore (De Indulgentiis, Disput. LIII. Sect).

Or, c'est sous toutes formes et c'est partout que s'offrent à nous les Indulgences.

Sachons utiliser nos trésors, et pratiquer la miséricorde envers les pauvres âmes en peine. Est-il misère plus touchante que la leur ? si poignante, que n'en approche aucune détresse de la terre ; si digne pourtant, que nulle plainte ne trouble le silence de ce « fleuve de feu qui, dans son cours imperceptible, les entraîne peu à peu à l'océan du paradis (Mgr Gay, Vie et Vertus chrétiennes : De la charité envers l'Eglise, II). » Pour elles, le ciel est impuissant ; car on n'y mérite plus. Lui-même Dieu, très bon, mais très juste aussi, se doit de n'accorder leur délivrance qu'au paiement intégral de la dette qui les a suivies par delà le monde de l'épreuve (MATTH. V, 26). Dette contractée à cause de nous peut-être, en notre compagnie ; et c'est vers nous qu'elles se tournent, vers nous qui continuons de ne rêver que plaisirs, tandis qu'elles brûlent, et qu'il nous serait facile d'abréger leurs tourments ! Ayez pitié de moi, ayez pitié de moi, vous au moins qui êtes mes amis ; car la main du Seigneur m'a touchée (Job XIX, 21).

Comme si le purgatoire voyait plus que jamais regorger ses prisons sous l'affluence des multitudes qu'y précipite chaque jour la mondanité de ce siècle, peut-être aussi en raison de l'approche du règlement de compte final et universel qui clora les temps, l'Esprit-Saint ne se contente plus d'entretenir le zèle des anciennes confréries vouées dans l'Eglise au service des trépassés. Il suscite de nouvelles associations et jusqu'à des familles religieuses, dont l'unique but soit de promouvoir en toutes manières fa délivrance des âmes souffrantes ou leur soulagement. Dans cette œuvre d'une autre rédemption des captifs, il est aussi des chrétiens qui s'exposent et s'offrent à prendre sur eux les chaînes de leurs frères, par l'abandon total consenti à cette fin, non-seulement de leurs propres satisfactions, mais encore des suffrages dont ils pourraient bénéficier après leur mort : acte héroïque de charité, qu'il ne faut point accomplir à la légère, que cependant l'Eglise approuve (Propagé au XVIII° siècle par les Clercs réguliers Théatins, enrichi de faveurs spirituelles par les Souverains Pontifes Benoît XIII, Pie VI, Pie) ; car il glorifie grandement le Seigneur, et pour le risque encouru d'un délai temporaire de la béatitude, mérite à son auteur d'être à jamais plus près de Dieu, par la grâce dès maintenant, dans la gloire au ciel.

Mais si les suffrages du simple fidèle ont tant de prix, combien plus ceux de l'Eglise entière, dans la solennité de la prière publique et l'oblation du Sacrifice auguste où Dieu même satisfait à Dieu pour toute faute ! Ainsi qu'avant elle la Synagogue (II Mach. XII, 46), l'Eglise dès son origine a toujours prié pour les morts. En la manière qu'elle honorait par des actions de grâces l'anniversaire de ses fils les Martyrs, elle célébrait par des supplications celui de ses autres enfants qui pouvaient n'être point encore au ciel. Quotidiennement, dans les Mystères sacrés, elle prononçait les noms des uns et des autres à cette double tin de louange et de prière ; et de même que ne pouvant néanmoins rappeler en toute église particulière chacun des bienheureux du monde entier, elle les comprenait tous en une commune mention, ainsi faisait-elle, à la suite des recommandations spéciales au lieu ou au jour, mémoire générale des morts. Ceux qui ne possédaient ni parents, ni amis, observe saint Augustin, n'étaient donc point dès lors cependant dépourvus de suffrages ; car ils avaient, pour obvier à leur abandon, la tendresse de la Mère commune (Aug. De cura pro mortuis, IV).

L'Eglise ayant suivi dès le commencement, à l'égard de la mémoire des bienheureux et de celle des défunts, une marche identique, il était à prévoir que l'établissement d'une fête de tous les Saints au IX° siècle appellerait bientôt la Commémoration présente des trépassés. En 998, selon la Chronique de Sigebert de Gembloux (Ad hunc annum), l'Abbé de Cluny, saint Odilon, l'instituait dans tous les monastères de sa dépendance, pour être célébrée à perpétuité au lendemain même de la Toussaint; c'était sa réponse aux récriminations de l'enfer le dénonçant, lui et ses moines, en des visions rapportées dans sa Vie (Petr. Dam.; Jotsald. II, XIII), comme les plus intrépides secoureurs d'âmes qu'eussent à redouter, au lieu d'expiation, les puissances de l'abîme. Le monde applaudit au décret de saint. Odilon, Rome l'adopta, et il devint la loi de l'Eglise latine entière.

Les Grecs font une première Commémoration générale des morts la veille de notre dimanche de Sexagésime, qui est pour eux celui de Carême prenant ou d’ Apocreos, et dans lequel ils célèbrent le second avènement du Seigneur. Ils donnent le nom de samedi des âmes à ce jour, ainsi qu'au samedi d'avant la Pentecôte, où ils prient de nouveau solennellement pour tous les trépassés.



LES MATINES DES MORTS.

Amalaire observait déjà de son temps (IX° siècle) que l'Office des défunts rappelle en sa forme les Offices célébrés aux jours anniversaires de la mort du Seigneur (Amalar. De ecclesiast. Officiis, III, XLIV). Même absence d'Hymnes, Doxologies, Absolutions, Bénédictions ; même suppression du prélude accoutumé Domine labia mea aperies, Deus in adjutorium meum intende ; bien qu'à la différence des derniers jours de la Semaine sainte, l'Office complet des morts ait cependant gardé ou recouvré depuis longtemps l'Invitatoire.

Or cet Invitatoire est, comme hier le premier Psaume des Vêpres, un chant d'amour et d'espérance: Tout vit, pour notre Roi; venez, adorons-le. Au delà comme en deçà de la tombe, tous les hommes vivent, devant Celui qui doit les ressusciter un jour (Luc. XX, 38). Dans la langue de l'Eglise, le champ des morts est le cimetière, c'est-à-dire un dortoir où ses fils reposent ; comme eux-mêmes sont des défunts, travailleurs qui, leur tâche accomplie, attendent le moment de la récompense.

Rome s'est montrée ici mieux inspirée que d'autres Eglises, où l'Antienne choisie comme refrain du joyeux Venite exsultemus était : Circumdederunt me gemitus mortis ; dolores inferni circumdederunt me (Voici que m'ont environne les gémissements de la mort, les douleurs de l'enfer). Que de variantes semblables, et toutes à l'avantage de l'Eglise Maîtresse et Mère, seraient à signaler dans une étude historique de l'Office des morts ! Mais pareil but ne saurait être le nôtre en ces pages trop restreintes.

INVITATOIRE.

Tout vit, pour notre Roi :* Venez, adorons-le.

PSAUME XCIV.

Venez, tressaillons dans le Seigneur; chantons dans la jubilation des hymnes à Dieu notre Sauveur : prévenons sa présence par des chants de louange, et jubilons en son honneur dans la psalmodie.

Tout vit, pour notre Roi : * Venez, adorons-le.

Car le Seigneur est le grand Dieu, le grand Roi au-dessus de tous les dieux: il ne repoussera point son peuple. Dans sa main sont toutes les profondeurs de la terre, et son œil domine les sommets des montagnes.

Venez, adorons-le.

La mer est à lui, et il l'a faite, et ses mains ont formé la terre. Venez, adorons et prosternons-nous devant ce Dieu ; pleurons devant ce Seigneur qui nous a faits : car il est le Seigneur notre Dieu, et nous son peuple et les brebis de son pâturage.

Tout vit, pour notre Roi : * Venez, adorons-le.

Si aujourd'hui vous entendez sa voix, n'endurcissez pas vos cœurs, comme au jour du murmure et de la tentation dans le désert, où vos pères me tentèrent, où ils me mirent a l'épreuve, et virent mes œuvres.

Venez, adorons-le.

Pendant quarante ans, j'ai couvert de ma protection cette génération, et j'ai dit : « C'est un peuple dont le cœur est égaré ; ils ne connaissent pas mes voies ; c'est pourquoi j'ai juré dans ma colère qu'ils n'entreraient point dans la terre de mon repos. »

Tout vit, pour notre Roi : * Venez, adorons-le.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ; que luise pour eux la lumière sans fin.

Venez, adorons-le.

Tout vit, pour notre Roi : * Venez, adorons-le.

Un tel début montre assez quelle part il convient de faire, selon l'Eglise, à la reconnaissance et à la louange dans la prière pour les morts.

Ludovico Carracci  (1555–1619). Âmes du Purgatoire, vers 1610, 44 X 51, Vatican Pinacoteca


PREMIER NOCTURNE.

Elles débordent, dans le premier Psaume des Nocturnes, la reconnaissance et la louange de l'âme échappée aux filets des pécheurs, en ce premier matin du salut assuré pour jamais qui l'introduit parmi les âmes très saintes du purgatoire. C'est avec confiance qu'elle s'en remet à son Seigneur du soin de la conduire par le chemin douloureux et purifiant qui doit l'amener à l’entrée même de la maison de Dieu.

Ant. SEIGNEUR mon Dieu, dirigez mes pas en votre présence.

PSAUME V.

Seigneur, prêtez l'oreille aux paroles de ma bouche, entendez le cri démon cœur.

Ecoutez ma voix suppliante, ô mon Roi et mon Dieu.

Oui ; c'est vous que j'implore : Seigneur, au matin vous m'exaucerez.

Au matin, me voici devant vous ; je saurai que vous n'êtes point un Dieu favorable au péché,

Que le méchant n'habitera point votre demeure, que les injustes ne pourront subsister devant vous.

Vous haïssez tous ceux qui font l'iniquité ; vous perdrez tous ceux qui aiment le mensonge.

Le Seigneur a en abomination l'homme de sang et d'astuce. Pour moi, c'est me confiant en votre miséricorde infinie,

Que j'entrerai dans votre maison ; c'est pénétré de votre crainte, que j'adorerai dans votre saint temple.

Seigneur, guidez-moi dans votre justice ; à cause de mes ennemis, dirigez mes pas en votre présence.

Eux, en effet, n'ont point la vérité dans leur bouche ; leur cœur est vain.

Leur gosier est un sépulcre ouvert, leur langue un instrument de tromperie : jugez-les, ô Dieu.

Qu'ils soient déçus dans leurs pensées : rejetez-les ; car leurs impiétés sont sans nombre, et ils ont mérité votre colère, ô Seigneur.

Et que soient dans la joie tous ceux qui espèrent en vous : ils seront dans l'allégresse à jamais ; vous habiterez en eux.

Et ils se glorifieront en vous, tous ceux qui aiment votre nom ; car vous bénirez le juste.

Seigneur, vous nous avez comme d'un bouclier cou verts de votre amour.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ;

Que luise pour eux la lumière sans fin.

Ant. Seigneur mon Dieu, dirigez mes pas en votre présence.

L'âme est exaucée : la justice s'est emparée d'elle ; car le temps de la miséricorde n'est plus. Sous la terrible mainmise de son guide nouveau, à l'implacable lumière qui, en regard de l'infinie pureté, met à nu ses replis les plus ignorés, et ses vertus si mélangées, et tant de traces restées des souillures d'antan, la pauvre âme sent lui manquer tout ce qu'elle se croyait de force , tremblante, elle supplie Dieu de ne point la confondre en sa fureur avec les éternels maudits dont le voisinage accroît son tourment. Mais sa supplication, comme son effroi, est toute d'amour : Seigneur, sauvez-moi ; car il n'est personne qui pense à vous louer dans cette mort. Ce Psaume est le premier des sept de la pénitence.

Ant. Seigneur, tournez - vous vers moi, et délivrez mon âme ; car nul dans la mort ne se souvient de vous.

PSAUME VI.

Seigneur, ne me reprenez pas dans votre fureur, et ne me châtiez pas dans votre colère.

Ayez pitié de moi, Seigneur ; car je languis de faiblesse ; guérissez- moi, Seigneur, parce que le trouble m'a saisi jusqu'au fond de mes os.

Mon âme est toute troublée ; mais vous, Seigneur, jusqu'à quand différerez-vous ?

Seigneur, tournez-vous vers moi, et délivrez mon âme ; sauvez-moi, à cause de votre miséricorde.

Car nul dans la mort ne se souvient de vous : qui publiera vos louanges dans l'enfer ?

Je me suis épuisé à force de gémir ; j'ai baigné chaque nuit mon lit de mes pleurs ; j'ai arrosé ma couche de mes larmes.

Mon œil a été tout troublé de fureur : j'ai vieilli au milieu de tous mes ennemis.

Retirez-vous de moi, vous tous qui commettez l'iniquité ; car le Seigneur a exaucé la voix de mes pleurs.

Le Seigneur a exaucé ma supplication ; le Seigneur a reçu ma prière.

Que tous mes ennemis rougissent et soient saisis d'étonnement ; qu'ils retournent en arrière, et soient couverts de honte.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ;

Que luise pour eux la lumière sans fin.

Ant. Seigneur, tournez-vous vers moi, et délivrez mon âme ; car nul dans la mort ne se souvient de vous.

David, accusé par ses adversaires, en appelle au Seigneur de leurs calomnies. La crainte qui prosterne l'âme, au purgatoire, en un saint tremblement devant la justice de Dieu, n'a point fait vaciller l'espérance en elle plus que l'amour ; elle s'appuie sur la sentence même, sur le secours imploré de son juge, pour tenir tête au lion infernal qui la poursuit de ses indignes clameurs dans le délaissement et le dénuement auxquels la réduit son expiation.

Ant. Que l'ennemi comme un lion ne se saisisse pas de mon âme, sans que personne se trouve pour m'arracher à lui et me sauver.

PSAUME VII.

Seigneur mon Dieu, j'ai mis en vous mon espérance : sauvez-moi de tous ceux qui me persécutent, et délivrez-moi.

Que l'ennemi comme un lion ne se saisisse pas de mon âme, sans que personne se trouve pour m'arracher à lui et me sauver.

Seigneur mon Dieu, si j'ai fait ce dont il m'accuse, si l'iniquité se rencontre en mes œuvres,

Si j'ai rendu le mal pour le mal, ce sera justice, que je succombe sous mes ennemis sans nul espoir.

Que l'ennemi poursuive mon âme, qu'il s'en empare ; qu'à terre il foule aux pieds ma vie ; qu'en poussière il réduise ma gloire.

Levez-vous. Seigneur, dans votre colère ; faites paraître votre puissance au territoire de mes ennemis.

Oui; levez-vous, Seigneur mon Dieu ! Que vos édits soient respectés. Voici que va vous entourer l'assemblée des peuples ;

A cause d'elle, reprenez place sur votre trône dans les hauteurs : le Seigneur juge les peuples.

Jugez-moi, Seigneur, selon ma justice, selon mon innocence.

La malice des pécheurs sera anéantie, et vous guiderez le juste, ô Dieu qui sondez les reins et les cœurs.

Il est juste que j'attende le secours du Seigneur qui sauve ceux qui ont le cœur droit.

Dieu est un juge équitable, fort et patient : fait-il chaque jour éclater sa colère?

Si vous ne changez, il brandira son glaive ; il a tendu son arc, il le tient prêt,

Il y a mis des traits mortels, ses flèches sont faites d'un feu dévorant.

Ainsi l'impie, mettant son injustice au jour, a conçu la douleur et enfanté l'iniquité.

Préparant son piège, il a creuse la terre, et il est tombé dans la fosse qu'il avait faite.

Le mal qu'il me voulait se retournera contre lui ; sa méchanceté retombera sur sa tête.

Pour moi, je chanterai la justice du Seigneur, j'exalterai le nom du Seigneur Très-Haut.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ;

Que luise pour eux la lumière sans fin.

Ant. Que l'ennemi comme un lion ne se saisisse pas de mon âme, sans que personne se trouve pour m'arracher à lui et me sauver.

De la porte de l'enfer,

R/. Seigneur, délivrez leurs âmes.

A la suite de ce cri maternel sorti du cœur de l'Eglise, toute l'assemblée prie en silence, offrant à Dieu l'Oraison Dominicale pour les trépassés aux prises avec les puissances de l'abîme.

Et voici que dans le recueillement de ce silence, omettant la demande d'une Bénédiction qu'ils ne peuvent plus recevoir au même titre que nous de l'Eglise, s'élève seule en leur nom la voix du Lecteur. Empruntant les accents du juste de l'Idumée sous la main qui l'éprouve, elle dit la souffrance qui les oppresse, leur foi indomptée, leur prière sublime. Et comme dans la tragédie antique, le Chœur intervient après chaque Lecture, en autant de Répons dont la mélodie s'harmonise merveilleusement avec ces échos d'outre-tombe : soit qu'il reprenne en s'y unissant la parole des morts, ou appuie leur prière de ses propres supplications ; soit que terrifié par cette rigueur de Dieu contre des âmes qui pourtant lui sont chères et sont sûres de l'aimer toujours, il tremble pour lui-même pécheur, dont le jugement est encore en suspens.

Au témoignage de saint Antonin et de Démocharès, cités par Gavanti (De Officio Defunct), la composition de ces admirables Répons reviendrait pour une part à

Maurice de Sully, l'évêque de Paris qui commença Notre-Dame ; toutefois le plus grand nombre d'entre eux se trouvent déjà dans les manuscrits grégoriens de l'époque antérieure.

D'autres livres de l'Ecriture que celui de Job, et aussi les Œuvres de saint Augustin, fournirent longtemps en différents lieux les Leçons des morts ; et diverses églises avaient la coutume de terminer celles-ci par la formule : Beati mortui qui in Domino moriuntur (Heureux les morts qui meurent dans le Seigneur).

LEÇON I.

Épargnez-moi, Seigneur ; car mes jours ne sont que néant. Qu'est donc l'homme, pour l'estimer tant que d'arrêter sur lui votre pensée ? Vous venez à lui dès le matin, pour aussitôt l'éprouver. Jusques à quand ne m'épargnerez-vous pas, ne me laisserez-vous pas même avaler ma salive ? J'ai péché : pour vous apaiser, que ferai-je, gardien des hommes, à qui rien n'échappe? Pourquoi m'avoir mis en butte à vos traits, me rendant à charge à moi-même ? Pourquoi n'ôtez-vous pas mon péché, ne pardonnez-vous pas mon iniquité ? Voici que je vais m'endormir dans la poussière du sépulcre, et si vous me cherchez au matin, je ne serai plus.

R/. Je crois que mon Rédempteur est vivant, et qu'au dernier jour je ressusciterai de la terre. * Et dans ma chair je verrai Dieu mon Sauveur.

V/. Je le verrai moi-même, et non un autre, et mes yeux le contempleront. * Et dans ma chair.

LEÇON II. (Job. X.)

Mon âme a la vie en dégoût ; je m'abandonnerai aux plaintes contre moi-même, je parlerai dans l'amertume de mon âme. Je dirai à Dieu : Ne me condamnez pas ; indiquez-moi pourquoi vous me traitez de la sorte. Vous plairiez-vous à m'accuser sans fondement, à m'accabler, moi l'œuvre de vos mains, donnant gain de cause aux impies ? Vos yeux à vous aussi sont-ils de chair, et voyez-vous à la manière de l'homme? Vos jours sont-ils comptés comme les jours de l'homme et vos années s'écoulent-elles comme sa vie, pour vous presser ainsi d'informer contre moi et scruter mon péché de la sorte ? Et pourtant vous savez que je n'ai rien fait d'impie ; qui d'ailleurs pourrait me tirer de vos mains?

R/. Vous qui ressuscitâtes Lazare du tombeau, quand déjà il sentait mauvais : * Seigneur, donnez-leur le repos, conduisez-les au lieu du pardon.

V/. Vous qui viendrez juger les vivants et les morts, et ce monde par le feu. * Seigneur, donnez-leur.

LEÇON III. (Job. X.)

Vos mains m'ont fait et façonné dans tout mon être : et c'est ainsi qu'en un instant vous me brisez ? Souvenez-vous, je vous prie, que vous m'avez pétri comme l'argile : et déjà vous me réduiriez en poussière ? N'ai-je pas d'abord été pour vous comme le lait sans consistance, qui s'épaissit ensuite? Puis vous m'avez revêtu de peau et de chair, consolidant par des nerfs et des os cet ouvrage de vos mains. Enfin vous m'avez donné la vie et comblé de bienfaits ; votre providence attentive a gardé mon âme.

R/. Seigneur, quand vous viendrez juger la terre, où me cacherai-je pour éviter la colère de vos yeux? * Car les péchés de ma vie ont passé les bornes.

V/. Mes forfaits m'épouvantent; ma confusion devant vous est extrême : quand vous viendrez,ô Juge, ne me condamnez pas. * Car les péchés.

V/. Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ; que luise pour eux la lumière sans fin. * Car les péchés.

DEUXIÈME NOCTURNE.

J'ai une nourriture à manger que vous ne connaissez pas (v). » C'est la réponse que s'attirerait de la part de? chères âmes notre étonnement au sujet de l'Antienne qui va suivre. Ineffablement justes et saintes, la parole du Seigneur est aussi la leur : « Ma nourriture est d'accomplir la volonté de mon Père (Ibid. 34). » Or en effet, vu de ces sommets comme le voit notre Antienne, quel pâturage que le purgatoire ! Seigneur qui me conduisez, qui par votre grâce daignez être avec moi dans cette ombre de la mort, votre verge en me frappant me console; mon abandon à vos justices est l’huile qui coule à flots de ma tête et, oignant tous mes membres, les fortifie pour le combat ; avide de soumission, mon cœur a trouvé son calice enivrant.

Saint Jean Chrysostome atteste qu'on chantait déjà de son temps ce Psaume aux funérailles des chrétiens, ainsi que le Psaume Dilexi, premier de nos Vêpres des morts (Chrys. Hom. IV in Epist. ad Heb).

Ant. Il m'a placé dans un pâturage.

PSAUME XXII.

Le Seigneur me conduit, et rien ne me manquera : il m'a placé dans un pâturage.

Il m'a élevé près d'une eau nourrissante ; il a converti mon âme.

Il m'a conduit dans les sentiers de la justice, à cause de son nom.

Aussi, même en marchant dans l'ombre de la mort, je ne craindrai aucun mal ; car vous êtes avec moi.

Verge et houlette, en vos mains, me consolent.

Vous avez préparé devant moi une table, contre ceux qui me persécutent.

Vous avez répandu l'huile à flots sur ma tête : et qu'il est beau mon calice enivrant !

Votre miséricorde me suivra tous les jours de ma vie.

J'habiterai la maison du Seigneur durant des jours sans fin.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ;

Que luise pour eux la lumière sans fin.

Ant. Il m'a placé dans un pâturage.

Les fautes de ma jeunesse, mes ignorances, Seigneur, ne vous en souvenez plus. Plût à Dieu que nos examens de conscience eussent présentement le sérieux de celui qu'il nous faudra faire au lieu d'expiation, pour réparer leur insuffisance ! L'ignorance, qu'on prétend excuser tant d'hommes de nos jours, sera bien lourde alors pour ceux dont la négligence à s'instruire aura obscurci la foi, endormi l'espérance, attiédi l'amour, faussé sur mille points le christianisme et la vie. Alors aussi se solderont « jusqu'au dernier denier (MATTH. V, 26) » ces dettes de pénitence accumulées par tant de péchés remis quant à la coulpe, il est vrai, dès longtemps peut-être, et depuis non moins longtemps, hélas ! totalement oubliés. O Dieu, voyez ma peine et mon humiliation.

Ant. Les fautes de ma jeunesse, mes ignorances, Seigneur, ne vous en souvenez plus.

PSAUME XXIV.

Vers vous, Seigneur, j'ai élevé mon âme; en vous, mon Dieu, j'ai mis ma confiance : je n'aurai pointa en rougir.

Que mes ennemis ne se rient pas de moi : quiconque vous attend ne sera point confondu.

Cette confusion, qu'elle soit pour tous ceux qui font le mal comme à plaisir.

Montrez-moi, Seigneur, la voie qui conduit à vous ; apprenez-moi vos sentiers.

Dirigez-moi dans votre vérité, instruisez-moi ; car vous êtes mon Dieu sauveur, et je vous attends tout le jour.

Souvenez-vous de vos bontés, Seigneur, de vos miséricordes qui sont à jamais.

Les fautes de ma jeunesse, mes ignorances, ne vous en souvenez plus.

Souvenez-vous de moi selon votre miséricorde, ô Seigneur, dans votre seule bonté.

Doux et juste est le Seigneur ; c'est pour cela qu'il donne sa loi à ceux qui s'égarent.

Il guide les humbles dans la justice ; il enseigne ses voies à ceux qui sont doux

Toutes les voies du Seigneur sont miséricorde et vérité pour ceux qui recherchent son alliance et ses commandements.

Pour votre nom Seigneur, vous pardonnerez mon péché, si grand qu'il soit.

Quel est l'homme qui craint le Seigneur ? il ne sera point sans loi et direction dans le chemin qu'il a choisi.

Son âme aura la tranquille possession de tous les biens ; sa race aura la terre en héritage.

Le Seigneur est un ferme appui pour ceux qui le craignent ; par son alliance, il se révèle à eux.

Mes yeux restent tournés vers le Seigneur : c'est lui qui retirera mes pieds des filets.

Tournez vers moi les yeux, ayez pitié, car je suis pauvre et délaissé.

Mes afflictions et mes tribulations se sont multipliées; délivrez-moi de telles angoisses.

Voyez mon humiliation et mon labeur ; remettez-moi tous mes péchés.

Considérez mes ennemis, leur multitude, de quelle injuste haine ils me haïssent.

Gardez mon âme, et délivrez-moi : non, je n'aurai point à rougir d'avoir mis en vous mon espoir.

Les justes et les cœurs droits font avec moi cause commune, parce que c!est vous que j'attends.

Mon Dieu, délivrez Israël de toutes ses tribulations.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ;

Que luise pour eux la lumière sans fin

Ant. Les fautes de ma jeunesse, mes ignorances, Seigneur, ne vous en souvenez plus.

Le Psaume XXVI° fut chanté au Vendredi saint pour exprimer le sentiment de confiance qui n'abandonna pas le Messie durant les épreuves de sa Passion. Il reparaissait aux Matines du lendemain pour annoncer sa prochaine délivrance ; et l'Antienne qui l'accompagnait en ce dernier jour était celle-là même qui va suivre. Comme au grand Samedi où les limbes possédèrent le Sauveur, les hôtes du purgatoire s'unissent au Chef divin dans son attente du retour à la lumière, à la vie. Leur prière, que l'Eglise elle aussi fait sienne, est d'une inspiration bien faite pour toucher le Seigneur.

Ant. J'ai la ferme espérance de voir un jour les richesses du Seigneur, dans la terre des vivants.

PSAUME XXVI.

Le Seigneur est ma lumière et mon salut : qui craindrai-je ?

Le Seigneur est le défenseur de ma vie : qui pourrait m'intimider,

En ce moment où les méchants m'ont cerné pour me dévorer ?

Mes persécuteurs se sont affaiblis, et ils sont tombés.

Quand même une armée ennemie m'assiégerait, mon cœur serait sans crainte.

Si elle me déclarait la bataille, c'est alors que je serais plein de confiance.

Je n'ai demandé qu'une chose au Seigneur ; je la lui demanderai sans cesse : c'est d'habiter dans sa maison tous les jours de ma vie ;

Afin de goûter les délices du Seigneur, et de contempler les beautés de son temple.

Car il me couvrira de l'ombre de son tabernacle ; au jour de mon affliction, il me protégera dans le secret de son temple.

Il m'a établi sur le roc ; il a élevé ma tête au-dessus de mes ennemis.

Après une marche sacrée, j'offrirai dans son tabernacle un sacrifice accompagné de cris de joie ; je chanterai des cantiques au Seigneur.

Exaucez, Seigneur, le cri que je vous adresse ; ayez pitié de moi, et exaucez-moi.

Mon cœur vous parle ; mes yeux vous cherchent : Seigneur, je ne cesserai de chercher votre présence.

Ne détournez pas de moi votre visage ; dans votre colère, ne vous éloignez pas de votre serviteur.

Soyez mon appui ; ne m'abandonnez pas ; ne me dédaignez pas, ô Dieu de mon salut.

Mon père et ma mère m'ont abandonné ; mais le Seigneur a pris soin de moi.

Enseignez-moi vos sentiers, Seigneur; dirigez-moi dans la voie droite pour confondre mes ennemis.

Ne m'abandonnez pas à la fureur de ceux qui me persécutent ; car de faux témoins se sont élevés contre moi, et l'iniquité s'est menti à elle-même.

J'ai la ferme espérance de voir un jour les richesses du Seigneur, dans la terre des vivants.

Attends le Seigneur,ô mon âme, sois ferme ; fortifie ton courage, et attends le Seigneur.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ;

Que luise pour eux la lumière sans fin.

Ant. J'ai la ferme espérance de voir un jour les richesses du Seigneur, dans la terre des vivants.

V/. Veuille le Seigneur les placer avec les avec les princes de son peuple.

Le Chœur a fait écho dans le Verset au désir des âmes; il prie de nouveau en silence, disant le Pater.

C'est au début de la Leçon suivante que se rattache la scène terrifiante immortalisée dans la Vie de saint Bruno par le pinceau de Le Sueur. D'après une tradition conservée dans l'Ordre qu’il devait fonder, Bruno, séculier encore, assistait au service funèbre chanté à Notre-Dame de Paris pour un docteur de renom, Raymond Diocrès, lorsqu'à ces paroles : Responde mihi quantas habeo iniquitates et peccata, le mort se souleva de sa bière et prononça ces mots : « J'ai été accusé au juste jugement de Dieu. » L'Office interrompu dans l'émotion de tous, et remis au lendemain, la même tradition rapporte qu'on vit Diocrès se lever à nouveau, mais pour dire : « J'ai été jugé au juste jugement de Dieu. » Jusqu'à ce que, les funérailles une troisième fois reprises, la voix du malheureux se fit entendre au même moment que les deux premiers jours, et elle s'écriait, glaçant l'assemblée d'épouvante : « J'ai été condamné au juste jugement de Dieu (D. Le Couteulx, Annal. Cartns. in Proœmio, nis XXI XLI ; où l'on verra les arguments qui militent pour la substance du fait, sinon ses). »

LEÇON IV. (Job. XIII.)

Répondez-moi : quel est le nombre de mes iniquités? quelle est la gravité de mes fautes ? Faites-moi voir mes péchés et mes crimes. Pourquoi détourner de moi votre visage, et me considérer comme un ennemi? Vous déployez votre puissance contre une feuille qu'emporte le vent, vous poursuivez une paille desséchée. Car vous édictez contre moi les mesures les plus dures, et pour me perdre vous remontez jusqu'aux péchés de mon adolescence. Vous avez mis mes pieds dans les ceps, vous avez observé tous mes sentiers, vous avez relevé les traces de mes pas, à moi qui bientôt ne serai que pourriture, pareil au vêtement mangé des vers.

R/. Souvenez-vous de moi, ô Dieu, car ma vie n'est qu'un souffle. * Et les hommes ne me verront plus.

V/. De l'abîme j'ai crié vers vous, Seigneur ; Seigneur, écoutez ma voix. * Et les hommes. (Job. XIV.)

LEÇON V. (Job. XIV.)

L'homme, né de la femme, vit peu de temps, et est rempli de beaucoup de misères. Il germe comme la fleur et comme elle est foulé aux pieds ; il fuit comme l'ombre et ne demeure jamais stable. Et c'est lui que vous estimez digne d'attirer vos regards, c'est lui que vous appelez en jugement avec vous ! Qui peut rendre pur l'être sorti d'une source souillée ? N'est-ce pas vous seul qui le pouvez? Les jours de 1 homme sont courts ; vous connaissez les mois que doit durer sa vie : vous en avez marqué les bornes, qui ne seront point dépassées. Retirez-vous un peu de lui, afin qu'il ait quelque relâche, en attendant que vienne le jour désiré qui comme pour le mercenaire finira ses travaux.

R/. Hélas ! Seigneur, "' O combien j'ai péché dans ma vie ! Que ferai-je, malheureux ? Où fuir, sinon vers vous, mon Dieu ? * Ayez pitié de moi, quand vous viendrez au dernier jour.

V/. Mon âme est grandement troublée ; mais vous, Seigneur, secourez-la.* Ayez pitié.

LEÇON VI. (Job. XIV.)

Qui me donnera de me voir mis à l'abri, caché par vous au séjour des morts, jusqu'à ce que passe votre fureur, et que vous me marquiez un temps où vous aurez souvenir de moi? Mais se peut-il qu'une fois mort, l'homme revive ? Chacun de ces jours de ma milice terrestre, j'attends que survienne ma transformation . Vous m'appellerez alors, et je vous répondrai ; vous tendrez votre droite à l'ouvrage de vos mains. Mais maintenant vous comptez tous mes pas ; pardonnez mes péchés.

R/. SEIGNEUR, ne vous souvenez vous pas de mes péchés, * Quand vous viendrez juger le monde par le feu.

V/. Seigneur mon Dieu, dirigez mes pas en votre présence, * Quand vous viendrez.

V/. Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ; que luise pour eux la lumière sans fin, * Quand vous viendrez.

Azulejo de las Ánimas Benditas del Purgatorio con la frase "Tened compasión de mí, al menos vosotros mis amigos". (Juan Oliver Míguez, 1960). Sevilla, Andalucía, España.


TROISIEME NOCTURNE.

A mesure que se poursuit l'expiation purifiante, l'ombre qui ternissait l'âme se dissipe, et laisse comme poindre déjà l'auréole. Certes, ni l'expression de la souffrance, ni l'élan de la prière ne font défaut au Psaume XXXIX°, que nous chantâmes lui aussi à la mort du Sauveur (IIe Nocturne du Vendredi saint). Mais combien s'y montre surtout l'union toujours plus marquée dans la douleur au libérateur divin, dont le sang éteignit la flamme de tous les holocaustes ! combien dominent en ce Psaume, non seulement l'action de grâces, mais l'admiration pour Dieu à cause de ses bontés, et le besoin de le louer pour lui-même, de le voir louer par tous ! Oui ; qu'il vous plaise, Seigneur, de me délivrer; mais qu'ils tressaillent en vous ceux qui vous cherchent, qu'ils disent sans fin : Soit magnifié le Seigneur !

Ant. Qu'il vous plaise, Seigneur, de me délivrer; Seigneur, protégez-moi de votre regard.

PSAUME XXXIX.

J'ai attendu le Seigneur avec persévérance, et il s'est enfin tourné vers moi.

Il a exaucé ma prière ; il m'a tiré d'un abîme de misère et d'un bourbier profond.

Il a établi mes pieds sur le roc, et dirigé lui-même mes pas.

Il a mis dans ma bouche un cantique nouveau, un cantique de louanges pour notre Dieu.

Plusieurs verront ceci, ci seront dans la crainte ; ils espéreront dans le Seigneur.

Heureux l'homme qui met son espérance dans le nom du Seigneur, et qui ne cherche pas des appuis vains et insensés!

Seigneur mon Dieu, vous avez opéré d'innombrables merveilles ; et nulle créature, dans ses desseins, ne peut être comparée à vous.

Si je veux parler de vos oeuvres et les annoncer,elles se trouvent au-dessus de mes paroles.

Vous n'avez pas agréé les victimes ni les offrandes ; mais vous m'avez formé des oreilles dociles.

Vous n'avez point demandé d'holocaustes, ni sacrifices pour le péché ; alors j'ai dit : Voici que je viens.

Il est écrit de moi en tête du livre que je ferai votre volonté ; je le veux ainsi, mon Dieu, et votre commandement est gardé dans le plus intime de mon cœur.

J'ai annoncé votre justice dans une grande assemblée ; je n'ai point fermé mes lèvres ; vous le savez, Seigneur.

Je n'ai point retenu votre justice dans le secret de mon cœur : j'ai publié votre vérité et le salut qui vient de vous.

Je n'ai point caché votre miséricorde et votre vérité à cette réunion nombreuse.

Mais vous, Seigneur, n'éloignez pas de moi vos bontés ; que votre miséricorde et votre vérité m'accompagnent toujours.

Des maux sans nombre sont venus fondre sur moi ; mes iniquités m'ont enveloppé de toutes parts ; et je n'ai pu en soutenir la vue.

Elles surpassent le nombre des cheveux de ma tête ; et mon cœur en est tombé dans la défaillance.

Qu'il vous plaise, Seigneur, de me délivrer ; Seigneur, protégez-moi de votre regard.

Que ceux qui cherchent à m'ôter la vie soient couverts de honte et saisis de crainte.

Que ceux qui désirent ma perte soient mis en fuite et livrés à l'ignominie.

Qu'ils soient couverts de confusion, ceux qui disent en m'insultant : Allons, allons 1

Que tous ceux qui vous cherchent soient dans l'allégresse ; que tous ceux qui n'attendent leur salut que de vous disent sans cesse : Soit glorifié le Seigneur 1

Pour moi, je suis pauvre et mendiant ; mais le Seigneur prend soin de moi.

Vous êtes mon libérateur et mon appui : mon Dieu, ne tardez pas.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ;

Que luise pour eux la lumière sans fin.

Ant. Qu'il vous plaise, Seigneur, de me délivrer ; Seigneur, protégez-moi de votre regard.

Pour moi, je suis le pauvre et le mendiant de Dieu, disait sur sa fin le dernier Psaume. Et le suivant débute en proclamant bienheureux celui qui s'ingénie à secourir l'indigent et le pauvre. Parmi tous les nobles sentiments qui règnent au purgatoire, ne pouvait manquer celui de la reconnaissance pour quiconque ne partage point l'oubli dont trop souvent sont l'objet les morts ; indifférence odieuse à l'égal d'une trahison, quand elle est celle de ces hommes de leur paix, comme dit le Psalmiste, de ces convives des heureux jours, en lesquels si à tort ils avaient mis espoir et confiance. Mais entendons leur prière humble et douce pour le bienfaiteur ignoré d'eux, dédaigné d'eux peut-être au temps de la prospérité mondaine, et venu au secours de leur abandon : Que le Seigneur le rende heureux sur la terre et le délivre de ses ennemis ; que le Seigneur lui vienne en aide, s'il est sur un lit de douleur.

Ant. Seigneur, guérissez mon âme, car j'ai péché contre vous.

PSAUME XL.

Heureux celui qui s'ingénie à secourir l'indigent et le pauvre ! Le Seigneur le délivrera au jour mauvais.

Que le Seigneur le garde et qu'il le vivifie ; qu il le rende heureux sur la terre et le délivre des embûches de ses ennemis.

Que le Seigneur lui vienne en aide, s'il est sur un lit de douleur. Ainsi faites-vous toujours, ô Dieu! vous-même alors refaites et retournez son lit.

Pour moi, j'ai dit : Seigneur, ayez pitié de moi ; guérissez mon âme, car j'ai péché contre vous.

Mes ennemis ne me souhaitent que du mal, et ils disent: Quand mourra-t-il? quand périra son nom?

Si quelqu'un d'eux entrait pour me voir, il ne disait que tromperies, tandis qu'il amassait l'iniquité dans son cœur.

Une fois sorti, il se concertait avec les autres ;

Et ils chuchotaient contre moi, et tous mes ennemis combinaient contre moi des desseins perfides.

Entre eux s'est formé contre moi un complot inique. Mais celui qui dort dans le tombeau ne pourra-t-il ressusciter?

L'homme de ma paix, de ma confiance, l'homme qui mangeait mon pain m'a odieusement trahi.

Mais vous, Seigneur, ayez pitié de moi, ressuscitez-moi, et je le leur rendrai.

Le signe que vous m'aimez, c'est pour moi que mon ennemi n'aura point à se réjouir à mon sujet.

Vous m'avez pris en votre protection à cause de mon innocence, et vous m'avez établi devant vous pour toujours.

Béni soit le Seigneur, Dieu d'Israël, dans tous les siècles. Ainsi soit-il, ainsi soit-il.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ;

Que luise pour eux la lumière sans fin.

Ant. Seigneur, guérissez mon âme, car j'ai péché contre vous.

« Je ne crois point, dit sainte Catherine de Gênes, qu'il se puisse trouver contentement qui puisse être comparé à celui d'une âme de purgatoire, excepté celui des saints de paradis. Et d'autant croît ce contentement que la rouille du péché consumée par le feu diminue, laissant l'âme exposée d'autant mieux à la réverbération du vrai soleil, qui est Dieu. La peine pourtant ne diminue pas ; ains au contraire, l'amour, qui se trouve retardé, est ce qui fait la peine des âmes, et d'autant la fait-il plus grande que la perfection de l'amour, duquel Dieu les a faites capables, est grande (Traité du Purgatoire, traduction des Chartreux de Bourgfontaine, 1598). » Mais entendons l'âme elle-même exprimer son tourment ; nulle langue mortelle, fût-ce celle de la grande théologienne du purgatoire, ne rendra pareillement ces sublimités. Oh ! comme l'Eglise, avec ses Psaumes et sa Liturgie, surpasse ici encore ses fils les plus saints, les plus doctes !

Ant. Mon âme a soif du Dieu vivant : quand viendrai-je et paraîtrai-je devant la face de Dieu?

PSAUME XLI.

Comme le cerf aspire après l'eau des fontaines, ainsi mon âme aspire après vous, ô Dieu.

Mon âme a soif du Dieu fort et vivant : quand viendrai-je et paraîtrai-je devant la face de Dieu?

Mes larmes sont devenues mon pain du jour et de la nuit : on me dit tous les jours : Où est ton Dieu ?

J'ai repassé leurs injures, et j'ai répandu mon âme au dedans de moi-même ; mais je passerai jusqu'au lieu du tabernacle admirable, jusqu'à la maison de Dieu.

Voix d'allégresse et de louange ! c'est l'écho du festin.

Pourquoi es-tu triste, mon âme? pourquoi me troubles-tu?

Espère en Dieu, parce que je le louerai encore : il est le salut que verra mon visage, il est mon Dieu.

Mon âme s'est troublée en moi-même; c'est pourquoi je me souviendrai de vous dans la terre du Jourdain, sur les montagnes d'Hermon.

L'abîme appelle l'abîme au bruit de vos cataractes.

Tous les torrents des nues, tous les flots de la terre ont passé sur moi.

Le Seigneur a fait éclater sa miséricorde en plein jour, et la nuit je chanterai ses louanges.

Je prierai en mon cœur le Dieu de ma vie ; je dirai à mon Dieu : Vous êtes mon refuge.

Pourquoi m'avez-vous oublié ? pourquoi suis-je réduit à marcher dans la tristesse, sous l'affliction de mon ennemi?

Mes os en sont brisés ; les ennemis qui me poursuivent m'accablent d'injures.

Ils me disent tous les jours : « Où est ton Dieu ? » Pourquoi cette tristesse, ô mon âme? pourquoi me troubles-tu?

Espère en Dieu, car je le louerai encore : il est le salut que verra mon visage, il est mon Dieu.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ;

Que luise pour eux la lumière sans fin.

Ant. Mon âme a soif du Dieu vivant : quand viendrai-je et paraîtrai-je devant la face de Dieu ?

V/. Ne livrez pas aux bêtes les âmes qui vous louent.

R/. N'oubliez pas à jamais les âmes de vos pauvres.

C'est toujours des mêmes pauvres que précédemment, à savoir les âmes souffrantes, qu'il est question dans la supplication instante du Verset (Psalm. LXXIII, 19).

Après la récitation silencieuse du Pater par le Chœur, la voix de Job retentit à nouveau pour nous redire au nom des trépassés la vanité de cette courte vie, les lugubres réalités de la tombe, mais aussi, par delà cette vie et la tombe, les splendeurs attendues de la résurrection finale où dans sa chair tout homme verra son Dieu.

LEÇON VII. (Job. XVII.)

Ton souffle s'épuise, mes jours s'abrègent, il ne me reste plus que la tombe. Je n'ai point péché, et mon œil ne voit que persévérantes amertumes. Délivrez-moi, Seigneur, placez-moi près de vous : et que la main de qui que ce soit me combatte. Mais mes jours ont passé ; mes espérances se sont dissipées, ne me laissant au cœur que tourments. Elles prétendaient changer la nuit en jour, et me promettent encore qu'après les ténèbres reviendra la lumière. Mais qu'attendre, maintenant que je n'ai plus à compter sur d'autre asile que le séjour des morts ? Déjà j'ai dressé mon lit au pays des ombres. J'ai dit à la pourriture : C'est toi mon père ; aux vers : Vous êtes ma mère et ma sœur ! Où donc est désormais pour moi l'espoir, et qui prend souci de mes maux?

R/. PÉCHANT tous les jours, et ne faisant point pénitence, je suis troublé par la crainte de la mort ; * Car en enfer, aucune rédemption n'a plus lieu : ayez pitié de moi, ô Dieu, et sauvez-moi.

V/. O Dieu, pour la gloire de votre nom, sauvez-moi ; faites éclater votre puissance, et délivrez-moi. * Car en enfer, aucune rédemption n'a plus lieu : ayez pitié de moi, ô Dieu, et sauvez-moi.

LEÇON VIII. (Job. XIX.)

Mes chairs se sont consumées, mes os sont collés à ma peau, et il ne me reste plus que les lèvres autour des dents. Ayez pitié de moi, ayez pitié de moi, vous au moins qui êtes mes amis ; car la main du Seigneur m'a touché. Pourquoi me persécuter comme Dieu, et vous rassasier de ma chair? De qui obtiendrai-je que mes paroles soient écrites ? qui me donnera qu'elles soient tracées dans un livre, qu'elles soient gravées avec un stylet de fer sur une lame de plomb, qu'elles soient sculptées dans le roc avec le ciseau? Car ce que je dis, je le sais : mon Rédempteur est vivant, et au dernier jour je ressusciterai de la terre ; et de nouveau je revêtirai cette peau qui est mienne, et dans ma chair je verrai mon Dieu. Je le verrai moi-même, et non un autre, et mes yeux le contempleront. Cette espérance repose en mon sein.

R/. Seigneur, ne me jugez pas selon mes actions : je n'ai rien fait devant vous qui soit digne de vous ; c'est pourquoi j'implore votre majesté, * Pour que vous daigniez, ô Dieu, effacer mon péché.

V/. Seigneur, lavez-moi toujours plus de mon iniquité, purifiez-moi de mon offense. * Pour que vous daigniez, ô Dieu, effacer mon péché.

LEÇON IX.

Pourquoi m'avez-vous tiré du sein de ma mère ? que n'y suis-je mort sans que personne m'eût jamais vu? J'aurais été comme n'ayant point été, du sein de ma mère porté au tombeau. Le petit nombre de mes jours ne doit-il pas au moins finir bientôt? Laissez-moi donc exhaler un peu ma douleur avant de m'en aller, pour ne plus revenir, à la terre ténébreuse que la mort ensevelit dans ses ombres : terre de misère et de ténèbres où sous la nuit mortelle habite le chaos, l'éternelle horreur.

R/. Délivrez-m o i, Seigneur, de la mort éternelle, en ce jour redoutable ; * Quand les deux et la terre seront ébranlés ; * Lorsque vous viendrez juger le siècle par le feu.

V/. Je tremble et suis dans l'épouvante, à la pensée de l'examen final, de la colère qui le suivra. * Quand les cieux.

V/. Quel jour que ce jour de colère, de malheur et de larmes ! grand jour, plein d'amertume,* Où vous viendrez juger.

V/. Donnez-leur,Seigneur, le repos éternel ; que luise pour eux la lumière sans fin.

On reprend Délivrez-moi jusqu'au premier V/.



LES LAUDES DES MORTS.

Les Laudes des morts débutent, comme celles de l'Office férial au cours de l'année, par le Psaume I, que David composa après son péché, et dans lequel il épanche d'une manière si vive et si humble les sentiments de sa pénitence. L'Eglise l'emploie toutes les fois qu'elle veut implorer la miséricorde de Dieu ; et de tous les Cantiques du Roi-Prophète il n'en est aucun qui soit plus familier aux chrétiens. C'est comme naturellement qu'il revient sur leurs lèvres, au lieu d'expiation.

Ant. Mes os humiliés tressailliront d'allégresse.

PSAUME L.

Ayez pitié de moi, Seigneur , selon votre grande miséricorde.

Et dans l'immensité de votre clémence, daignez effacer mon péché.

Lavez-moi de plus en plus de mon iniquité, et purifiez-moi de mon offense.

Car je reconnais mon iniquité ; et mon péché est toujours devant moi.

C'est contre vous seul que j'ai péché, et j'ai fait le mal en votre présence. Je le confesse; daignez me pardonner, afin que vous soyez reconnu juste dans vos paroles, et que vous demeuriez victorieux dans les jugements qu'on fera de vous.

J'ai été conçu dans l'iniquité ; ma mère m'a conçu dans le péché.

Vous aimez la vérité, vous m'avez découvert ce qu'il y a de plus mystérieux et de plus caché dans votre sagesse.

Vous m'arroserez d'eau avec l'hysope, comme le lépreux, et je serai purifié ; vous me laverez,et je deviendrai plus blanc que la neige.

Vous me ferez entendre des paroles de joie et de consolation ; et mes os humiliés tressailliront d'allégresse.

Détournez votre face de mes péchés, et effacez toutes mes offenses.

O Dieu, créez en moi un cœur pur, et renouvelez l'esprit droit dans mes entrailles.

Ne me rejetez pas de votre face, et ne retirez pas de moi votre Esprit-Saint.

Rendez-moi la joie en celui par qui vous voulez me sauver, et confirmez-moi par l'Esprit de force.

J'enseignerai vos voies aux méchants, et les impies se convertiront à vous.

Délivrez-moi du sang que j'ai versé, ô Dieu, ô Dieu mon Sauveur ! et ma langue publiera avec joie votre justice.

Seigneur, ouvrez mes lèvres ; et ma bouche chantera vos louanges.

Si vous aimiez les sacrifices matériels, je vous en offrirais ; mais les holocaustes ne sont pas ce qui vous est agréable.

Une âme brisée de regrets est le sacrifice que Dieu demande; ô Dieu, vous ne mépriserez pas un cœur contrit et humilié.

Seigneur, traitez Sion selon votre miséricorde, et bâtissez les murs de Jérusalem.

Vous agréerez alors le sacrifice de justice, les offrandes et les holocaustes; et on vous offrira des génisses sur votre autel.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ;

Que luise pour eux la lumière sans fin.

Ant. Mes os humiliés tressailliront d'allégresse.

L'effet de la prière prolongée des fidèles unis à l'Eglise, leur Mère, se fait sentir aux trépassés. Les temps s'abrègent, les distances se rapprochent ; voici qu'apparaissent enfin les horizons delà terre promise. En marche déjà pour quitter Babylone, les tribus captives célèbrent cette vision si douce; elles chantent la patrie aux fraîches eaux, aux collines bénies, aux vallons fertiles, Sion où réside le bonheur, Jérusalem où Dieu est loué comme il doit l'être.

Ant. Seigneur! exaucez ma prière ; à vous viendra toute chair.

PSAUME LXIV

Il convient qu'on vous loue dans Sion, ô Dieu; à vous l'on doit rendre ses voeux dans Jérusalem.

Exaucez ma prière ; à vous viendra toute chair.

Les méchants avaient prévalu contre nous ; mais nos péchés vont recevoir de vous le pardon.

Heureux l'élu de votre grâce : il habitera vos parvis.

Nous aurons dans votre maison l'abondance de tous biens. Saint est votre temple ; admirable s'y révèle votre équité.

Exaucez-nous, ô Dieu notre sauveur, vous l'espérance de toute nation jusqu'aux plus lointains rivages ;

Vous qui, vous ceignant de force, affermissez les monts par votre puissance, qui soulevez la mer en ses profondeurs et faites mugir ses flots.

Jusqu'aux extrémités de la terre, les nations sont troublées, les peuples tremblent, à la vue de vos prodiges. Et c'est vous qui, de l'orient à l'Occident, répandez la félicité.

Vous visitez la terre et l'arrosez ; vous multipliez ses trésors.

Le fleuve de Dieu coule à pleins bords ; c'est l'abondance pour les humains : ainsi préparez-vous leur nourriture.

Enivrez les sillons, fécondez les germes ; le sol, fertilisé par la rosée des cieux, sera dans la joie.

Tout le cours de l'année, béni par vous, ressentira votre bonté : on verra les moissons déborder des champs,

Et s'engraisser les oasis du désert; les collines se revêtiront d'allégresse.

Les béliers au milieu des brebis seront fiers de leurs opulentes toisons ; le froment regorgera dans les vallées : tout retentira de cris joyeux, tout chantera vos louanges.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ;

Que luise pour eux la lumière sans fin.

Ant. Seigneur, exaucez ma prière ; à vous viendra toute chair.

L'aurore s'est donc montrée, au purgatoire. Aussi l'Eglise se garde-t-elle de remplacer le troisième Psaume qui revient chaque jour, sur la terre, à l'Office des Laudes. C'est le cri du chrétien qui élève son cœur vers Dieu à l'apparition de la lumière, et lui témoigne son amour et sa confiance. Ce Psaume est, comme toujours, accompagné du LXVI°, dans lequel le Psalmiste, au lever du soleil matériel, implore sur le monde le regard de la miséricorde divine.

Ant .Votre droite m'a soutenu, ô Seigneur!

PSAUME LXII

O Dieu, ô mon Dieu, je veille vers vous dès le point du jour.

Mon âme a soif de vous, et ma chair se consume pour vous,

Dans cette terre déserte, sans route et sans eau. Je me présente devant vous, dans votre sanctuaire, pour contempler votre puissance et votre gloire.

Votre miséricorde est pour moi plus douce que la vie ; mes lèvres ne cesseront de faire entendre vos louanges.

Tant que je vivrai, je vous bénirai ; pour invoquer votre nom, j'élèverai mes mains.

Mon Ame s'engraissera de vos faveurs, et ma bouche s'ouvrira pour des chants d'allégresse.

Je me souviendrai de vous sur ma couche : dès le matin je penserai à vous, parce que vous m'avez secouru.

Je tressaillirai de joie à l'ombre de vos ailes ; mon âme s'est attachée à vous ; votre droite m'a soutenu.

Mes ennemis ont en vain cherché ma ruine : les voilà précipités dans les abîmes de la terre ; ils seront livrés au glaive, et deviendront la proie des bêtes dévorantes.

Le juste délivré, semblable à un roi, se réjouira en Dieu : tous ceux qui jurent par son nom recevront des louanges ; parce que la bouche de l'iniquité est fermée à jamais.

PSAUME LXVI.

Que Dieu ait pitié de nous et qu'il nous bénisse ; qu'il fasse luire sur nous la lumière de son visage, et qu'il nous envoie sa miséricorde ;

Afin que nous connaissions sur la terre votre voie, et dans toutes les nations le salut que vous nous avez donné.

Que les peuples vous louent, ô Dieu ! que tous les peuples vous rendent hommage.

Que les nations soient dans la joie et l'allégresse ; car vous jugez les peuples dans l'équité, et vous dirigez les nations sur la terre.

Que les peuples vous louent, ô Dieu ! que tous les peuples vous rendent hommage ; la terre a porté son fruit.

Que Dieu, que notre Dieu nous bénisse ; que Dieu nous comble de ses bénédictions, et qu'il soit craint jusqu'aux confins de la terre.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ;

Que luise pour eux la lumière sans fin.

Ant. Votre droite m'a soutenu, ô Seigneur !

Le Samedi saint, qui vit l'Homme-Dieu habiter les demeures souterraines, est le grand jour des trépassés. C'est pourquoi l'Eglise, ayant à faire choix du Cantique qu'elle a coutume de chanter à cet endroit des Laudes matutinales, met en la bouche de ses défunts celui d'Ezéchias qui fut pour elle, en cette solennelle journée, le type du Christ implorant sa prochaine délivrance. La même Antienne qu'au Samedi saint l'accompagne.

Ant. De la porte de l’enfer, Seigneur, délivrez mon âme.

CANTIQUE D'EZECHIAS.

J'ai dit : A la moitié de ma vie, je vais donc voir les portes de la mort.

J'ai cherché en vain le reste de mes années ; et j'ai dit : Je ne verrai donc plus le Seigneur mon Dieu sur la terre des vivants.

Je ne verrai plus les hommes désormais, ceux qui habitent ce monde dans la paix.

Le tissu de ma vie est enlevé et replié, comme la tente d'un berger.

La trame en est coupée comme parle tisserand; il vient de la couper pendant qu'on l'ourdissait encore; du matin au soir vous aurez achevé ma vie.

J'espérais encore vivre jusqu'au matin ; mais le mal comme un lion a broyé tous mes os.

Du matin au soir vous aurez achevé ma vie : mes cris sont semblables à ceux du petit de l'hirondelle ; je gémis comme la colombe.

A force de regarder en haut, mes yeux se sont épuisés.

Seigneur, je souffre violence : soyez ma caution. Mais que dirai-je et que me répondra-t-il, quand c'est lui-même qui m'a frappé ?

Je repasserai devant vous toutes mes années dans l'amertume de mon âme.

Seigneur, si j'ai vécu ainsi, si mon âme s'est ainsi rendue coupable, châtiez-moi ; mais ensuite rendez-moi la vie. Déjà je sens la paix qui vient succéder aux plus amères douleurs.

Vous retirez ma vie du tombeau; vous jetez derrière vous tous mes péchés.

Le tombeau, en effet, ne vous rendrait plus d'actions de grâces; la mort ne saurait vous louer ; et ceux qui descendent dans le sépulcre n'attendent plus la vérité de vos promesses.

Ce sont les vivants qui vous louent, comme je fais aujourd'hui; le père racontera à ses enfants combien vous êtes fidèle à vos promesses.

Conservez-moi la vie, Seigneur, et nous chanterons dans votre maison des cantiques à votre gloire, tous les jours de notre vie.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel;

Que luise pour eux la lumière sans fin.

Ant. De la porte de l'enfer, Seigneur, délivrez mon âme.

Soit loué le Seigneur par tout ce qui respire ! L'amour déborde au purgatoire ; la louange y devient tout ; le ciel est proche. L'oubli de soi absolu marque la fin des purifications douloureuses. Dût l'âme rester encore dans le feu de l'expiation, qu'elle n'en serait point éprouvée, n'ayant plus tache ni rouille qui puisse tomber sous la prise des flammes, pleine de Dieu, impuissante à tout autre sentiment que celui de sa gloire.

Ant. Soit loué le Seigneur par tout ce qui respire.

PSAUME CXLVIII.

LOUEZ le Seigneur du haut des cieux; louez-le dans les hauteurs célestes.

Vous tous, ses Anges, louez-le ; vous tous qui formez ses armées, louez-le.

Soleil et lune, louez-le; étoiles et lumière, louez-le.

Cieux des cieux, louez-le ; eaux qui êtes par delà les airs, louez le nom du Seigneur.

Car il a dit, et tout a été fait ; il a commandé, et tout a été créé.

Il a établi ses créatures à jamais, et pour les siècles des siècles : il en a porté le décret, et sa parole ne passera pas.

Louez le Seigneur, vous qui êtes sur la terre; dragons, abîmes des eaux;

Feux, grêle, neige, glaces, souffles des tempêtes, qui obéissez à sa parole;

Montagnes et collines, arbres fruitiers et cèdres ;

Bêtes et troupeaux ; serpents et volatiles empennés;

Rois de la terre, et tous les peuples ; princes et juges de la terre ;

Jeunes hommes et vierges, vieillards et enfants, louez le nom du Seigneur ; car son nom seul est grand.

Sa gloire éclate au ciel et sur la terre; et il a relevé la puissance de son peuple.

Que sa louange soit dans la bouche de tous ses saints, des fils d'Israël, du peuple qu'il daigne réunir autour de lui.

PSAUME CXLIX.

Chantez au Seigneur un cantique nouveau ; que sa louange retentisse dans rassemblée des saints.

Qu'Israël se réjouisse en celui qui l'a fait ; que les fils de Sion tressaillent d'allégresse en leur roi.

Qu'ils louent son nom dans les chœurs ; qu'ils lui chantent d* psaumes au son du tambour et de la harpe.

Car le Seigneur aime son peuple avec tendresse ; il glorifiera, il sauvera les humbles.

Les saints tressailliront d'allégresse dans leur gloire ; ils seront comblés de joie sur leurs couches d'honneur.

La louange de Dieu sera dans leur bouche, et le glaive à deux tranchants dans leurs mains,

Pour tirer vengeance des nations, pour châtier les peuples rebelles ;

Pour enchaîner les rois superbes, et contenir les puissants par des liens de fer ;

Pour exercer sur eux le jugement rendu par le Seigneur : telle est la gloire qu'il a réservée à tous ses saints.

PSAUME CL

Louez le Seigneur dans son sanctuaire ; louez-le au firmament où éclate sa puissance.

Louez-le dans ses merveilles ; louez-le à cause de sa grandeur sans bornes.

Louez-le au son de la trompette, louez-le sur le psaltérion et la harpe.

Louez-le sur les tambours et dans les chœurs ; louez-le sur les instruments à cordes et dans les concerts.

Louez-le sur les cymbales harmonieuses, louez-le sur les cymbales de l'allégresse ; que tout ce qui respire loue le Seigneur.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ;

Que luise pour eux la lumière sans fin.

Ant. Soit loué le Seigneur par tout ce qui respire.

Comme à la fin déjà des Vêpres des morts, c'est en effet du ciel lui-même que descend jusqu'à nous le cri d'allégresse contenu au Verset.

V/. J'ai entendu une voix venant du ciel, qui me disait :

R/. Bienheureux ceux qui meurent dans le Seigneur.

Et dans le Cantique de Zacharie, l'Eglise, avec toutes les âmes délivrées ou soulagées par la vertu des suffrages liturgiques, remercie le Seigneur Dieu d'Israël qui a visité et racheté son peuple. Nous aussi rendons grâces, pour nos morts bien-aimés, à Celui qui est la résurrection et la vie: il n'abandonne, même dans la mort, aucun de ceux qui crurent en lui sur la terre (Johan. XI, 25).

Ant. Je suis la résurrection et la vie : celui qui croit en moi, quand bien même il serait mort, vivra ; et quiconque vit et croit en moi, ne mourra pas à jamais.

CANTIQUE DE ZACHARIE

Béni soit le Seigneur, le Dieu d'Israël ; car il a visité et racheté son peuple.

Et il nous a suscité un puissant Sauveur dans la maison de David, son serviteur ;

Comme il l'avait promis par la bouche de ses saints, de ses Prophètes,qui ont prédit, dans les siècles passés,.

Qu'il nous sauverait de nos ennemis et de la main de tous ceux qui nous haïssent ;

Qu'il ferait la miséricorde promise à nos pères, et se souviendrait de son alliance sainte,

Du serment par lequel il avait juré à Abraham, notre père, de faire, dons sa bonté,

Que, délivrés de la main de nos ennemis, nous le puissions servir sans crainte,

Dans la sainteté et la justice, marchant devant lui tous les jours de notre vie.

Et vous, petit enfant, vous serez appelé prophète du Très-Haut ; car vous marcherez devant la face du Seigneur, pour préparer ses voies

Pour donner à son peuple la connaissance du salut, et annoncer la rémission des péchés,

Par les entrailles de la miséricorde de notre Dieu, ce divin Orient qui s'est levé sur nous du haut du ciel.

Pour éclairer ceux qui sont assis dans les ténèbres et dans l'ombre de la mort, pour diriger nos pas dans la voie de la paix.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel;

Que luise pour eux la lumière sans fin.

Ant. Je suis la résurrection et la vie : celui qui croit en moi, quand bien même il serait mort, vivra ; et quiconque vit et croit en moi, ne mourra pas à jamais.

Le Prêtre commence, toute l'assemblée à genoux, l'Oraison Dominicale :

NOTRE PÈRE.

Le reste se continue dans le silence, jusqu'à cette conclusion que suivent les Versets et l'Oraison terminant l'Office des morts :

V/. Et ne nous laissez pas succomber à la tentation.

R/. Mais délivrez-nous du mal.

V/. De la porte de l'enfer,

R/. Seigneur, délivrez leurs âmes.

V/. Qu'ils reposent en paix.

R/. Amen.

V/. Seigneur, exaucez ma prière ;

R/. Et que mon cri parvienne jusqu'à vous.

V/. Le Seigneur soit avec vous.

R/. Et avec votre esprit.

ORAISON.

Dieu Créateur et Rédempteur de tous les fidèles, accordez la remise de tous leurs péchés aux âmes de vos serviteurs et de vos servantes, afin que soit acquise à leurs pieuses supplications l'indulgence qu'ils ont toujours désirée. Vous qui vivez et régnez avec Dieu le Père en l'unité du Saint-Esprit, Dieu vous-même, durant tous les siècles des siècles. R/. Amen.

V/. Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ;

R/. Que luise pour eux la lumière sans fin.

V/. Qu'ils reposent en paix.

R/. Amen.




LA MESSE DES MORTS.

L'Eglise Romaine double aujourd'hui la tâche de son service quotidien envers la Majesté divine. La mémoire des défunts ne lui fait pas mettre en oubli l'Octave des Saints. L'Office du deuxième jour de cette Octave a précédé pour elle celui des morts ; Tierce de tous les Saints a été suivie de la Messe correspondante ; et c'est après None du même Office qu'elle va offrir le Sacrifice de l'autel pour les trépassés.

Un tel surcroît, le souci de maintenir la proportion harmonieuse établie par elle entre le double objet liturgique de ce jour, ont rendu jusqu'ici Rome peu favorable à l'extension du privilège qui autorise chaque prêtre, en Espagne, à célébrer aujourd'hui trois Messes pour les morts.

Longtemps l'Eglise mère fut presque seule, en la compagnie de ses filles les plus rapprochées, à ne pas omettre au 11 Novembre le souvenir des Saints ; la plupart des Eglises d'Occident n'avaient en ce jour d'autre Office que celui des morts. On supprimait aux différentes Heures, aussi bien qu'à Matines et à Laudes, l'Hymne ainsi que le Deus in adjutorium ; les Psaumes ordinaires y étaient suivis du Requiem aeternam, et l'on concluait par l'Oraison des défunts, comme il est de nos jours encore en usage chez les Frères Prêcheurs. L'unique Messe solennelle, celle des morts, était après Tierce. On terminait généralement à None cette commémoration des trépassés, bien que Cluny jusqu'au dernier siècle ait gardé la coutume d'en célébrer aussi les secondes Vêpres.

Quant à l'obligation de chômer le jour des âmes, elle n'était que de demi-précepte en Angleterre, où les travaux plus nécessaires demeuraient permis ; le chômage ne dépassait pas le milieu de la journée en plusieurs lieux ; en d'autres, l'assistance à la Messe était seule prescrite. Paris observa quelque temps le 11 Novembre comme une fête de première obligation ; en 1613, l'archevêque François de Harlay maintenait encore jusqu'à midi, dans ses statuts, le commandement de garder ce jour. Même à Rome, aujourd'hui, le précepte n'existe plus.

La remarque d'Amalaire citée plus haut, en ce qui touche l'Office des défunts (Page 119), ne s'applique pas moins,à la Messe des morts. Sans parler de la suppression du Gloria in excelsis et de l’Alléluia, le Prêtre y omet au pied de l'autel le Psaume Judica me Deus, comme on le fait dans le Temps de la Passion. Il est revêtu d'ornements noirs comme au jour de la mort du Seigneur ; même suppression qu'au grand Vendredi de la plupart des bénédictions, du baiser de paix, des signes d'honneur rendus au Célébrant ; l'autel n'y est pareillement encensé qu'une fois ; le chant de l'Evangile s'y accomplit suivant le même rit, non seulement sans bénédiction du Diacre par l'Officiant, mais sans cierges, ni encens, ni baiser du texte sacré par le Prêtre. Ainsi toujours, et jusque dans la mort, l'Eglise rapproche en toutes manières ses fils de Celui dont ils sont les membres.

L'Antienne d'Introït n'est autre que la supplication instante qui remplace toute doxologie à l'Office des défunts, et qui s'inspire d'un passage du quatrième Livre d'Esdras (IV Esdr. II, 34-35). Le deuxième Psaume des Laudes a fourni le Verset.

INTROÏT.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel; que luise pour eux la lumière sans fin.

Ps. Il convient qu'on vous loue dans Sion, ô Dieu ; à vous l'on doit rendre ses vœux dans Jérusalem : exaucez ma prière ; à vous viendra toute chair. Donnez-leur.

Dans la Collecte, l'Eglise s'approprie maternellement la prière des âmes souffrantes ; et c'est à son Epoux, au Dieu fait homme, qu'elle la présente, l'appelant de ses titres de Créateur et de Rédempteur, qui disent tout ce que ces âmes lui ont coûté et l'invitent à parfaire son oeuvre.

COLLECTE.

Dieu Créateur et Rédempteur de tous les fidèles, accordez la remise de tous leurs péchés aux âmes de vos serviteurs et de vos servantes, afin que soit acquise à leurs pieuses supplications l'indulgence qu'ils ont toujours désirée. Vous qui vivez et régnez avec Dieu le Père en l'unité du Saint-Esprit, durant tous les siècles des siècles.

Lecture de l'Epître du bienheureux Paul, Apôtre, aux Corinthiens. I, Chap. XV.

Mes Frères, écoutez ce mystère : nous ressusciterons tous, mais nous ne serons pas tous changés. En un moment, en un clin d'oeil, au son de la trompette dernière, car la trompette sonnera, les morts ressusciteront incorruptibles, et nous nous serons changés. Il faut en effet que ce corps corruptible revête l'incorruptibilité, que ce corps mortel revête l'immortalité. Et quand ce corps mortel a revêtu l'immortalité, alors sera accomplie la parole de l'Ecriture : La mort a été engloutie dans la victoire. O mort, où est ta victoire ? O mort, où est ton aiguillon? L'aiguillon de la mort, c'est le péché ; comme la force du péché, c'est la loi. Mais grâces soient rendues à Dieu qui nous a donné de vaincre par notre Seigneur Jésus-Christ.

Tandis qu'au sortir de la vie Pâme supplée dans le purgatoire à l'insuffisance de ses expiations, le corps qu'elle a quitté retourne à la terre en exécution de la sentence portée contre Adam et sa race dès l'origine du monde (Gen. III, 19. 2). Mais pour le corps non moins que pour l'âme du fidèle, la justice est aussi amour ; ses reprises au delà du temps sont le prélude de la gloire qui attend l'être humain tout entier. L'humiliation du tombeau est le trop juste châtiment de la faute première ; mais ce renvoi de l’homme au limon d'où il fut tiré, saint Paul nous y fait voir encore l'ensemencement nécessaire à la transformation du grain prédestiné qui doit un jour reprendre vie dans des conditions tout autres (I Cor. XV, 36). C'est qu'en effet, la chair et le sang ne sauraient posséder le royaume de Dieu (Ibid. 50), ni des organes soumis à la dissolution prétendre à l'immortalité Froment du Christ, selon le mot de saint Ignace d'Antioche (Epist. ad Rom), le corps du chrétien est jeté dans le sillon de la tombe pour y laisser à la corruption ce qui était d'elle : la forme du premier Adam avec sa pesanteur et son infirmité ; mais par la vertu de l'Adam nouveau le reformant à sa propre image, il en sortira tout céleste et spiritualisé, agile, impassible et glorieux (I Cor. XV, 42-40). Honneur à Celui qui n'a voulu mourir comme nous que pour détruire la mort et faire de sa victoire notre victoire !

L'Eglise continue d'implorer, au Graduel, la délivrance des trépassés.

GRADUEL.

Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ; que luise pour eux la lumière sans fin.

V/. La mémoire du juste sera éternelle ; il ne craindra point les paroles fâcheuses.

TRAIT.

Absolvez, Seigneur, les âmes de tous les fidèles défunts des liens de tous leurs péchés.

V/. Que, secourus par votre grâce, ils méritent de sortir des peines portées contre eux par la sentence de votre justice.

V/. Qu'ils soient heureux dans l'éternelle lumière.

L'Eglise, nous le verrons, ne répudiait pas autrefois l'Alleluia dans les funérailles de ses fils; il exprimait son allégresse, motivée par l'espoir fondé qu'une mort sainte venait d'assurer au ciel un élu nouveau, dût le chrétien pour lequel prenait fin l'épreuve de la vie voir quelque temps se prolonger son expiation. Mais l'adaptation de la Liturgie des morts aux rites des derniers jours de la Semaine sainte ayant modifié sur ce point les anciennes coutumes, il eût semblé que la Séquence, développement festif, et suite originairement de l'Alleluia, ne devait pas non plus trouver place à la Messe des défunts. Rome cependant, et qui pourrait s'en plaindre? Faisait une exception sur ce point aux règles traditionnelles, en faveur de l'insigne poème de Thomas de Celano, lequel suivi bientôt du Stabat mater, œuvre de Frère Jacopone, méritait si belle place à la lyre franciscaine au sommet du Parnasse chrétien. Chanté dès le XIVe siècle en Italie, le Dies irœ passait plus tard les monts, et ses accents inspirés retentissaient au XVIe en toute Eglise.

SÉQUENCE.

Jour de colère que ce jour-là, qui doit réduire le monde en cendres, au témoignage de David comme de la Sibylle (Allusion au célèbre oracle de la Sibylle Erythrée sur la fin du monde, cité par saint Augustin en son Livre XVIII (ch. 23) de la Cité de Dieu, et dont les premières lettres de chaque vers réunies donnent en grec la formule : Jésus-Christ, Fils de Dieu, Sauveur).

Combien la frayeur sera grande, lorsque le Juge se présentera pour tout scruter rigoureusement !

La trompette éclatante, retentissant par les sépulcres de l'univers, rassemblera tous les humains devant le trône.

La mort et la nature seront dans la stupeur, lorsque ressuscitera toute créature pour répondre à son Juge.

On produira le livre écrit renfermant tout l'objet du jugement du monde.

Quand donc le Juge s'assiéra, tout ce qui se cache apparaîtra, rien ne demeurera sans châtiment.

Que dirai-je alors, malheureux? quel protecteur implorerai-je, quand à peine rassuré sera le juste ?

Roi de majesté redoutable, qui sauvez gratuitement ceux qui doivent se sauver, sauvez-moi, source de miséricorde.

Souvenez-vous, ô doux Jésus, que je suis la cause de votre venue : ne me perdez pas en ce jour !

En me cherchant, vous vous êtes assis de fatigue ; vous m'avez racheté en souffrant la croix : que tant de peine ne soit pas inutile.

Juge vengeur et juste, accordez-moi remise avant le jour des comptes.

Je me lamente, comme un coupable que je suis ; la confusion de mon péché couvre mon visage: ô Dieu, pardonnez à un suppliant !

Vous avez absous Madeleine ; vous avez exaucé le larron : à moi aussi vous avez donné l'espérance.

Mes prières ne sont pas dignes ; mais vous êtes bon : faites dans votre bonté que j'échappe au feu éternel.

Donnez-moi place au milieu des brebis, séparez-moi des boucs en me rangeant à votre droite.

Quand les maudits couverts de honte seront livrés par sentence aux terribles flammes, appelez-moi avec les bénis.

Suppliant, défaillant, le cœur broyé et comme réduit en cendres, je vous en prie, veillez sur mon heure dernière.

Jour de larmes que celui où ressuscitera de sa cendre,

Pour être jugé, l'homme coupable : daignez lui pardonner, ô Dieu !

Pie Jesu Domine, Dona eis requiem. Amen.

O doux Jésus, Seigneur, donnez-leur le repos. Amen..

EVANGILE.

La suite du saint Evangile selon saint Jean. Chap. V.

En ce temps-là, Jésus dit à la foule des Juifs : En vérité, en vérité, je vous le dis : l'heure vient, et elle est déjà venue, où les morts entendront la voix du Fils de Dieu, et l'entendant ils vivront. Car tout ainsi que le Père a la vie en lui-même, il a donné au Fils d'avoir pareillement la vie en lui-même ; et parce qu'il est Fils de l'homme, il lui a donné aussi le pouvoir de juge. N'en soyez point étonnés : l'heure vient où tous ceux qui sont dans les tombeaux entendront la voix du Fils de Dieu ; et ceux qui ont accompli le bien ressusciteront à la vie ; mais ceux qui ont fait le mal ressusciteront pour leur condamnation.

Le purgatoire n'est pas éternel. Les arrêts du jugement particulier qui suit la mort varient à l'infini sa durée ; il peut se prolonger des siècles entiers pour certaines âmes plus coupables, ou qui exclues de la communion catholique, demeurent privées des suffrages de l'Eglise, bien que la miséricorde divine ait daigné les arracher à l'enfer. Cependant la fin du monde et de tout ce qui est du temps, doit fermer le lieu de l'expiation temporaire. Dieu saura concilier sa justice et sa grâce dans la purification des derniers venus de la race humaine, suppléer par l'intensité de la peine expiatrice à ce qui pourrait lui manquer en durée. Mais au lieu qu'en ce qui touche la béatitude, les arrêts du jugement particulier sont le plus souvent suspensifs et dilatoires, qu'ils laissent provisoirement le corps de l'élu comme du réprouvé au sort commun de la tombe : le jugement universel aura ce caractère définitif de n'enregistrer pour le ciel comme pour l'enfer que des sentences absolues, immédiatement et totalement exécutoires. Vivons donc dans l'attente de l'heure solennelle où les morts entendront la voix du Fils de Dieu. Celui qui doit venir viendra, et il ne tardera pas, nous rappelle le Docteur des nations (Heb. X, 37, ex Habac. II, 3) ; son jour aura la soudaineté de l'arrivée d'un voleur, nous disent comme lui (I Thess. V, 2) et le Prince des Apôtres (II Petr. III, 10) et Jean le bien-aimé (Apoc. XVI, 15), faisant écho à la parole du Seigneur même (MATTH. XXIV, 43) : comme l'éclair sort de l'Orient et brille déjà en Occident, ainsi sera l'avènement du Fils de l'homme (Ibid. 27).

Entrons dans les sentiments qui inspirent le sublime Offertoire des défunts. Bien que l'éternelle béatitude demeure finalement assurée aux pauvres âmes en peine, et qu'elles en aient conscience, la route plus ou moins longue qui les conduit au ciel s'ouvre toutefois dans le péril du suprême assaut diabolique et l'angoisse du jugement. L'Eglise donc, étendant sa prière à toutes les étapes de cette voie douloureuse, n'a garde d'en oublier l'entrée ; et elle ne craint point de se montrer en cela trop tardive. Pour Dieu qui d'un regard embrasse tous les temps, sa supplication d'aujourd'hui, déjà présente à l'heure du redoutable passage, ménageait aux âmes le secours ici imploré. Cette même supplication les suit du reste au cours des péripéties de leur lutte contre les puissances de l'abîme, quand Dieu permet que celles-ci servent elles-mêmes sa justice au lieu d'expiation, en la manière que plus d'une fois l'ont vu les Saints. En ce moment solennel où l'Eglise offre ses dons pour l'auguste et tout-puissant Sacrifice, redoublons nous aussi nos prières pour les trépassés. Implorons leur délivrance de la gueule du lion infernal. Obtenons du glorieux Archange préposé au Paradis, appui des âmes au sortir de ce monde, leur guide envoyé de Dieu (Ant. et Resp. in fest. S. Michaelis), qu'il les amène à la lumière, à la vie, à Dieu même, promis comme récompense aux croyants dans la personne d'Abraham leur père (Gen. XV, 1).

OFFERTOIRE.

Seigneur Jésus-Christ, Roi de gloire, délivrez les âmes de tous les fidèles défunts des peines de l'enfer et de l'abîme; délivrez-les de la gueule du lion; qu'ils ne soient pas la proie du tartare, qu'ils ne tombent pas dans la nuit : mais que saint Michel, porte-étendard, les présente à la sainte lumière * Qu'autrefois vous promîtes à Abraham et à sa descendance.

V/. Seigneur, nous vous offrons nos prières et ces hosties de louange ; recevez-les pour ces âmes dont nous faisons mémoire aujourd'hui : Seigneur , faites qu'elles passent de la mort à la vie * Qu'autrefois.

C'est la foi dont elles firent les œuvres en ce monde, qui garantit aux âmes du purgatoire la récompense dernière, et rend Dieu propice aux dons présentés pour elles, comme l'exprime la Secrète.

SECRETE.

Daignez, Seigneur, regarder favorablement ces dons qui vous sont offerts par nous pour les âmes de vos serviteurs et de vos servantes : et les ayant gratifiées du mérite de la foi chrétienne, donnez-leur-en la récompense. Par Jésus-Christ.

A l’Agnus Dei, la demande du repos pour les morts remplace celle de la paix pour les vivants:

Agneau de Dieu, qui ôtez les péchés du monde, donnez-leur le repos.

Agneau de Dieu, qui ôtez les péchés du monde, donnez-leur le repos.

Agneau de Dieu, qui ôtez les péchés du monde, donnez-leur le repos à jamais.

Comme descendent les flocons silencieux d'une neige abondante en un jour d'hiver, ainsi montent blanches et douces les âmes délivrées, à cette heure où par le monde entier l'Eglise, achevant ses longues supplications, verse à flots sur les flammes expiatrices le Sang rédempteur. Forts du crédit que donne à notre prière la participation aux Mystères sacrés, disons avec elle dans la Communion :

COMMUNION.

Que la lumière éternelle luise pour eux, Seigneur,* En la société de vos Saints à jamais, parce que vous êtes bon.

V/. Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel; que luise pour eux la lumière sans fin. * En la société.

Tel est cependant, bien au-dessus de nos humaines conceptions, l'impénétrable et adorable mystère de la justice de Dieu, que pour plus d'une âme l'expiation doit se prolonger encore. Aussi l'Eglise, sans se lasser ni cesser d'espérer, prolonge elle aussi dans la Postcommunion sa prière. A toutes les Heures de l'Office de chaque jour, en toutes les Messes offertes au cours de l'année, quelle qu'en puisse être la solennité, les trépassés auront un souvenir de leur Mère.

POSTCOMMUNION.

Daignez faire, Seigneur, que nos prières et nos supplications servent aux âmes de vos serviteurs et de vos servantes, en vous amenant à les délivrer de tous leurs péchés et à leur donner part à votre rédemption. Vous qui vivez.

Le Benedicamus Domino, qui tient lieu de L’Ite Missa est dans les Messes où l'on supprime le Gloria in excelsis, est remplacé lui-même à celle des défunts par une invocation pour les morts.

Qu'ils reposent en paix.

R/. Amen.

L'ABSOUTE.

La Messe achevée, les Clercs, précédés de la Croix et suivis du Célébrant, viennent se ranger autour du catafalque élevé dans la nef de l'église pour représenter les morts, à l'endroit même où leur dépouille inanimée reposa devant l'autel du Seigneur. Les Chantres y reprennent le neuvième Répons de l'Office des défunts ; suivent les prières de conclusion, pendant lesquelles le Prêtre rend aux trépassés l'hommage de l'eau sainte et de l'encens, comme au jour qui fut pour chacun d'eux le dernier des jours. L'Absoute tire son nom de l'Oraison Absolve, qui la termine le plus souvent, bien qu'on puisse comme aujourd'hui choisir la Collecte de la Messe, ou quelque autre Oraison indiquée par les circonstances.

REPONS.

Délivrez-moi, Seigneur, de la mort éternelle, en ce jour redoutable ; * Quand les cieux et la terre seront ébranlés;* Lorsque vous viendrez juger le siècle par le feu.

V/. Je tremble et suis dans l'épouvante, à la pensée de l'examen final, de la colère qui le suivra, * Quand les cieux.

V/. Quel jour que ce jour de colère, de malheur et de larmes ! grand jour, plein d'amertume,* Où vous viendrez juger.

V/. Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ; que luise pour eux la lumière sans fin.

On reprend Délivrez-moi jusqu'au premier V/.

Seigneur, ayez pitié.

Christ, ayez pitié.

Seigneur, ayez pitié.

Notre Père, et le reste en silence.

V/. Et ne nous laissez pas succomber à la tentation.

R/. Mais délivrez-nous du mal.

V/. De la porte de l'enfer,

R/. Seigneur, délivrez leurs âmes.

V/. Qu'ils reposent en paix.

R/. Amen.

V/. Seigneur, exaucez ma prière ;

R/. Et que mon cri parvienne jusqu'à vous.

V/. Le Seigneur soit avec vous.

R/. Et avec votre esprit.

ORAISON.

Absolvez de tout lien de péché, Seigneur, nous vous en supplions, les âmes de vos serviteurs et de vos servantes, pour qu'en la résurrection, ressuscités à la gloire, ils vivent parmi vos Saints et vos élus. Par Jésus-Christ notre Seigneur.

R/. Amen.

V/. Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel ;

R/. Que luise pour eux la lumière sans fin.

V/. Qu'ils reposent en paix.

R/. Amen.

Pour honorer les Saints, dont l'Octave se célèbre aujourd'hui concurremment avec le souvenir des morts, le Missel de Marmoutier nous donnera cette Séquence.

SEQUENCE.

Pour nous porter à suivre, héritiers de leur zèle, les traces des Saints, l'Eglise met sous nos yeux leur vie et leurs mœurs.

Elle nous présente la rose, la violette et le lis, nous montrant par les trois le chemin qui conduit à la récompense des cieux.

La rose rouge signifie les Martyrs ; les Confesseurs sont indiqués par la violette en leur ;

Le lis décèle l'amant de la virginité : par l'une donc de ces trois routes, il nous faut suivre Dieu.

Martyrs et immolés, soyons-le par une vraie patience ; qu'une retenue persévérante fasse de nous des Confesseurs.

Une pureté vigilante gardera les Vierges ; une courageuse continence sauvera ies tombés.

Viennent à notre aide les Saints dont nous célébrons la fête ; que leur prière nous fasse atteindre les deux.

Amen.

Dom Guéranger. L'Année liturgique

SOURCE : http://www.abbaye-saint-benoit.ch/gueranger/anneliturgique/pentecote/pentecote06/002.htm



Dom Lefèvre, Missel

A la fête de la Toussaint se rattache intimement le souvenir des saintes âmes qui, retenues au purgatoire pour y expier leurs fautes vénielles ou se purger des peines temporelles dues au péché, sont toutefois confirmées en grâce et entreront un jour au ciel. Aussi, après avoir célébré dans la joie la gloire des Saints qui constituent l’Église du ciel, l’Église de la terre étend sa sollicitude maternelle jusqu’à ce lieu d’indicibles tourments où sont plongées les âmes qui appartiennent aussi à l’Église. « En ce jour, dit le Martyrologe Romain, la commémoraison de tous les fidèles défunts : commémoraison en laquelle notre commune et pieuse Mère l’Église, aussitôt après s’être efforcée de fêter par de dignes louanges tous ses fils qui déjà se réjouissent dans le ciel, s’efforce d’aider par de puissants suffrages auprès de son Seigneur et Époux, le Christ, tous ceux qui gémissent encore dans le Purgatoire, afin qu’ils se joignent au plus tôt à la société des habitants de la céleste Cité ». Jamais dans la liturgie ne s’affirme de façon plus vivante l’unité mystérieuse qui existe entre l’Église triomphante, l’Église militante et l’Église souffrante ; et jamais aussi ne s’accomplit d’une façon plus palpable le double devoir de charité et de justice qui découle pour chacun des chrétiens du fait de son incorporation dans le corps mystique du Christ. C’est en vertu du dogme si consolant de la Communion des Saints que les mérites et les suffrages des uns peuvent en effet être attribués aux autres. De telle sorte que, sans léser les droits imprescriptibles de la justice divine qui s’appliquent dans toute leur rigueur après cette vie, l’Église peut unir sa prière ici-bas à celle du ciel et suppléer à ce qui manque aux âmes du purgatoire, en offrant à Dieu pour elles, par la Sainte Messe, par les indulgences, par les aumônes et les sacrifices de ses enfants, les mérites surabondants de la passion du Christ et de ses Membres mystiques. Aussi la liturgie, dont le sacrifice du Calvaire continué sur l’autel est le centre, a toujours été le moyen principal employé par elle pour mettre en pratique à l’égard des défunt : la grande loi de charité qui fait un précepte de subvenir aux nécessités du prochain, comme s’il s’agissait de nous-mêmes, en vertu toujours de ce lien surnaturel qui unit en Jésus le ciel, le purgatoire et la terre. La liturgie des défunts est peut-être la plus belle et la plus consolante de toutes. Chaque jour, à la fin de chaque Heure de l’Office divin, on recommande à la miséricorde divine les âmes des fidèles trépassés. Au Suscipe de la messe le prêtre offre le sacrifice pour les vivants et les morts, et dans un Mémento spécial il prie le Seigneur de se souvenir de ses serviteurs et de ses servantes qui se sont endormis dans le Christ et de leur accorder le séjour de consolation, de lumière et de paix. Dès le cinquième siècle, on trouve des messes des défunts. Mais c’est à S. Odilon, quatrième Abbé du célèbre monastère bénédictin de Cluny, qu’est due la Commémoraison de tous les défunts en général. Ce fut lui qui l’institua en 998 et la fit célébrer au lendemain de la Toussaint.

L’influence de cette illustre congrégation française fit qu’on adopta bientôt cet usage dans tout l’univers chrétien et que ce jour fut même parfois chômé. En Espagne, au Portugal et dans l’Amérique du Sud, qui en était autrefois dépendante, les prêtres, en vertu d’un privilège accordé par Benoît XIV, célébraient trois messes le 2 Novembre. Un décret de Benoît XV, daté du 10 Août 1915, autorise les prêtres du monde entier à faire de même.

L’Église nous rappelle dans une Épitre, tirée de S. Paul, que les morts ressusciteront, et nous dit d’espérer, car en ce jour nous nous reverrons tous dans le Seigneur. La Séquence donne une description saisissante du jugement dernier où les bons seront à tout jamais séparés d’avec les méchants. L’Offertoire rappelle que c’est S. Michel qui introduit les âmes dans le ciel, car, disent les prières de la recommandation de l’âme, c’est lui qui est « le chef de la milice céleste » dans les rangs de laquelle les hommes sont appelés à prendre la place des anges déchus.

« Les âmes du purgatoire, déclare le Concile de Trente, sont secourues par les suffrages des fidèles, principalement par le sacrifice de l’autel ». La raison en est qu’à la Sainte Messe le prêtre offre officiellement à Dieu la rançon des âmes, le sang du Sauveur. Et Jésus lui-même, sous les espèces du pain et du vin, qui rappellent au Père le sacrifice du Golgotha, prie pour que Dieu en applique la vertu expiatrice à ces âmes. Assistons en ce jour au Saint Sacrifice de la messe où l’Église demande à Dieu d’accorder aux défunts, qui ne peuvent plus rien pour eux-mêmes, la rémission de tous leurs péchés (Or.) et le repos éternel (Intr., Grad., Com.). Visitons aussi les cimetières, où leurs corps reposent jusqu’au jour où, subitement, au son de la trompette, ils ressusciteront pour être revêtus d’immortalité et remporter par Jésus-Christ la victoire sur la mort (Ép.).



Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

La liturgie byzantine célèbre chaque année un office pour le repos de l’âme de tous les défunts, le samedi avant la Sexa-gésime : Le samedi précédant le carnaval (carnis privii) nous faisons mémoire de tous les chrétiens orthodoxes, nos pères et nos frères qui sont sortis de ce monde.

Vers le XIe siècle, les liturgies latines adoptèrent quelque chose du même genre. L’abbé Hugues de Farfa raconte en effet que, dès le siècle précédent, existait dans son abbaye un précieux voile d’autel pour le dies iudicii ; sa vue remplissait les fidèles d’une sainte épouvante et les entretenait plusieurs jours dans la pensée de la mort. Au VIIIe siècle, entre autres usages du monastère de Fulda, nous trouvons celui de célébrer chaque mois une commémoration des défunts, avec office et prières spéciales. De la commémoration mensuelle à une commémoration annuelle il n’y avait qu’un pas ; et nous constatons en effet que vers le Xe siècle, dans les monastères bénédictins en particulier, l’usage s’était établi de célébrer chaque année la mémoire de tous les bienfaiteurs ou amis défunts du monastère. Saint Odilon, abbé de Cluny, passe pour avoir donné force de loi et un caractère universel à cette habitude, établie déjà dans un grand nombre d’églises. Nous connaissons l’édit de saint Odilon. Il est de 998 mais ne regarde que les monastères qui dépendaient alors de Cluny et dont le nombre atteignait plusieurs centaines, répandus en France, en Espagne et en Italie. Dans ce document, le pieux Abbé ordonne que le Ier novembre, après les vêpres solennelles, les cloches sonnent le glas funèbre et que les moines célèbrent au chœur l’office des défunts. Le lendemain, tous les prêtres doivent offrir à Dieu le divin sacrifice pro requis omnium defunctorum. Cet usage fut très favorablement accueilli, d’abord dans les différents monastères bénédictins, puis, peu à peu, dans les rituels diocésains, à Liège par exemple (1008), à Besançon, jusqu’à ce qu’il devînt un rite commun à toute l’Église latine.

Quant aux Ordines Romani, l’anniversarium omnium animarum apparaît pour la première fois dans l’Ordo XIV, du XIVe siècle. En ce jour, on ne célébrait pas le consistoire et on ne prêchait pas à la messe. Le jour choisi est celui-là même qui fut établi par saint Odilon, le 2 novembre. Dans l’Ordo Romanus XV, on trouve pourtant trace d’une coutume liturgique beaucoup plus ancienne, car le 8 juillet est indiqué un Officium defunctorum pro fratribus (les Cardinaux) et Romanis Pontificibus, comme dans l’Ordo de Farfa du Xe siècle. Dans ce même Ordo romain nous est décrit le rituel de la Chapelle papale sous Martin V, pour la commémoration de tous les fidèles défunts. Après les secondes Vêpres des Saints, le Pontife reprenait sa chape de couleur écarlate, le camauro et la mitre blanche, et les chantres entonnaient immédiatement les psaumes des vêpres des morts. Ensuite venaient les matines. Tant au Magnificat qu’au Benedictus des Laudes, le Pape accedit ad altare et thurificatur, et cophinum ubi stat Corpus Christi. Reverso vero ad cathedram suam, sibi soli et nulli alteri incensum datur. La collecte Fidelium Deus était chantée par le Pape, qui mettait fin à la cérémonie en donnant sa bénédiction solennelle.

Le lendemain, le Pontife assistait à la messe célébrée par un des cardinaux. A l’évangile, les acolytes portaient les flambeaux mais non l’encensoir ; à l’offertoire, on encensait l’autel d’abord et le Pape ensuite. Le rédacteur de l’Ordo remarque que la célébration solennelle de la messe pour les défunts par le Pontife romain n’est plus en usage, mais qu’il se contente de la dire de façon privée dans son oratoire.

La piété envers les pauvres âmes du purgatoire a fait d’immenses progrès durant les derniers siècles, comme en général toute la dévotion catholique, tel un arbre vigoureux qui étend de plus en plus ses rameaux, se couvre de feuilles et s’orne de fleurs. C’est ainsi que durant la cruelle dernière guerre, alors que chaque cité, sinon chaque famille, eut à pleurer ses morts, Benoît XV étendit à toute l’Église catholique un privilège que Benoît XIV avait jadis accordé aux États qui dépendaient alors de la couronne d’Espagne ; il autorisa chaque prêtre à célébrer le 2 novembre trois messes pour les défunts. Cette concession fut inspirée non seulement par l’inutile tuerie, comme Benoît XV appela cette guerre, mais par d’autres considérations encore. La piété des ancêtres avait richement doté des autels, des églises et des chapitres, afin que des messes fussent célébrées pour l’âme du donateur après sa mort. La révolution et la confiscation des biens ecclésiastiques ont le plus souvent dissipé ces legs ; aussi, en raison de la misère à laquelle était réduit le clergé, ce grand Pontife se voyait obligé continuellement de dispenser les chapitres, les communautés religieuses et les prêtres, de la charge de ces anciens legs de messes, qu’il n’était désormais plus possible d’acquitter. Que fit alors Benoît XV ? Habitué naguère à l’usage liturgique espagnol, au temps où il était secrétaire du cardinal Rampolla del Tindaro à la nonciature pontificale de Madrid, il permit à chaque prêtre de célébrer trois fois la messe, le jour de la commémoration des fidèles défunts, aux conditions suivantes : une des messes pouvait être offerte selon l’intention particulière du célébrant, mais le Pape voulut que l’une des deux autres fût célébrée pour tous les fidèles trépassés en général, et la troisième pour satisfaire à cette niasse énorme de legs que la faute du fisc avait empêché d’acquitter. Cette triple célébration de la sainte Messe par un même prêtre le 2 novembre constitue dans la discipline ecclésiastique actuelle un privilège plutôt unique que rare, et il égale en quelque sorte la Commémoration de tous les fidèles défunts au jour même de Noël. N’est-ce pas la vraie Noël des âmes du Purgatoire ? Cependant au moyen âge ce privilège n’était pas si exceptionnel, et nous savons que certains saints, et même plusieurs Pontifes romains, célébraient plusieurs messes par jour pour donner simplement libre cours à leur dévotion.

Le purgatoire représente la dernière et suprême tentative employée par l’amour de Dieu pour disputer le pécheur au démon et pour l’arracher de ses griffes. Il est comme un temple érigé en l’honneur de la sainteté divine, où les flammes expiatrices détruisent tout ce qui, dans la créature consacrée à Dieu, s’oppose à sa conformité avec Lui, avec sa beauté et ses perfections. Estote perfecti, sicut et Pater vester caelestis perfectus est. Quand donc la sainte Écriture nous parle du feu qui forme le trône de Dieu et qui l’enveloppe de toutes parts, qui constitue le rempart de sa demeure, il faut penser au Purgatoire, où notre faible vertu est éprouvée, comme l’or, dans le creuset de ces ineffables ardeurs de sainteté. Lorsque l’Apôtre nous dit que Dieu habite au milieu d’une inaccessible lumière, nous devons nous souvenir du sort des pauvres âmes du Purgatoire, dont les yeux, obscurcis par les brouillards du monde, se sentent encore trop faibles pour pouvoir soutenir, comme l’aigle, la vue de cette éblouissante splendeur. Saint Paul nous recommande aussi de prendre garde à la qualité des matériaux avec lesquels nous construisons : or, argent, pierres précieuses, bois, paille (I Cor., 3, 13), car le feu du jugement divin viendra les éprouver. Alors les matériaux solides résisteront, tandis que ceux qui seraient trop fragiles seront détruits, et l’imprudent constructeur, s’il veut se sauver, devra s’enfuir à travers les flammes, non sans se brûler et courir de grands périls. Il pourra bien se mettre à l’abri, ajoute l’Apôtre, mais toujours à travers le feu.

Dans cette comparaison employée par saint Paul pour expliquer sa pensée aux Corinthiens relativement à la pureté de l’enseignement évangélique, les exégètes catholiques voient avec raison une allusion au dogme du Purgatoire. Selon l’Apôtre, il est des fautes insuffisamment graves pour fermer sur notre tête les portes du ciel et ouvrir sous nos pieds le gouffre infernal, mais qui pourtant doivent recevoir, ou ici-bas ou dans l’autre monde, le châtiment proportionné. Ce que fait le feu pour les matériaux de construction, le jugement divin l’accomplit pour les actions morales. Si l’édifice brûle, c’est aux risques du constructeur, qui, ayant vu les flammes dévastatrices, se jette alors en toute hâte au dehors, fuyant à travers le feu et en rapportant de graves brûlures et un dommage. Si du moins les pauvres âmes du Purgatoire pouvaient obtenir la miséricorde de Dieu ! Mais non, car en Dieu rien n’échappe à l’ordre et tout a son moment propre. Celui de la miséricorde est désormais passé avec la vie du temps, pour faire place au contraire à celui de la justice dans l’éternité. Quand l’édifice est en flammes, on ne peut discuter ni hésiter : le feu n’épargne personne, et celui qui veut avoir la vie sauve doit se jeter hardiment à travers les flammes et s’enfuir.

Le purgatoire est un temple, mais sans sacerdoce ni autel de propitiation. Heureusement toutefois, la Communion des Saints unit en un seul corps mystique les bienheureux du ciel, les fidèles, voyageurs sur la terre et les âmes du purgatoire. En outre, le Sacrifice eucharistique, grâce auquel le Christ, par une seule oblation, a amené à la perfection pour toujours ceux qui sont sanctifiés : una oblatione consummavit in sempiternum sanctificatos, confère dans le ciel la gloire aux élus, et, dans le purgatoire, lave avec le sang de la Rédemption les souillures de ces membres prédestinés qui, heureusement, sont unies à lui par la foi, l’espérance et l’amour.

Les trois messes suivantes ne diffèrent entre elles que par les lectures et les collectes, car les chants responsoriaux et antiphoniques sont toujours les mêmes.

A LA PREMIÈRE MESSE.

L’antienne d’introït s’inspire d’un texte du IVe livre apocryphe d’Esdras. Cet emploi des apocryphes dans la liturgie est très rare et ne peut être postérieur au VIe siècle.

Suit le premier verset du psaume 64 : « A vous Seigneur est dû l’hymne en Sion ; dans Jérusalem seront accomplis les vœux que l’on vous fait. Écoutez ma prière, car tous les mortels s’adressent à Vous. » Aujourd’hui le psaume n’est pas suivi de la doxologie, mais on répète immédiatement l’antienne.

L’hymne qui est dû à Dieu dans Sion, et le lieu légal où doivent s’accomplir les vœux qu’on a faits, c’est-à-dire le temple de Jérusalem, symbolisent la vie glorieuse du ciel, où, dans la lumière de la gloire, seront satisfaites toutes nos pieuses aspirations. Il est à remarquer que certains Antiphonaires assignent pour introït l’antienne suivante, qui n’est dite actuellement que lors des funérailles, avant le commencement de la messe : Subvenite, Sancti Dei, succurrite, Angeli Domini, susct-pientes animant eius, afférentes eam in conspectu Altissimi. Psalm, 24. Anima eius in bonis demorabitur, et semen eius haereditet terram.

Collecte. Cette antique collecte est un petit chef-d’œuvre qui vaut tout un traité d’ascétique. On y indique d’abord le motif pour lequel Dieu est si bon pour nous : parce qu’il nous a faits. Nous sommes l’œuvre de ses mains ; et non seulement de ses mains, mais le fruit de sa passion, et il nous a achetés ou plutôt rachetés (redemptor) avec son sang. On met ensuite en cause la communion des Saints, qui unit l’Église orante et militante à l’Église souffrante qui expie dans le purgatoire. Quant au motif spécial qui attire sur les âmes du purgatoire la pitié divine, c’est, non seulement notre prière, mais aussi l’espérance de ces pauvres âmes. Durant leur vie et à leur mort, elles ont mis leur confiance et ont espéré non en leur propre justice, mais en la clémence divine : or, dit l’Apôtre : Spes non confundit, car Dieu ne nous donne jamais moins que ce qu’il nous fait espérer par sa grâce.

La lecture est empruntée à la Ire épître aux Corinthiens (15, 51-57). Saint Paul s’y réfère expressément au sort des justes sortis triomphants de la dernière persécution de l’Antéchrist et qui, en vertu d’un privilège spécial, se trouveront encore en vie au jour de la parousie. L’Apôtre veut révéler un secret aux Corinthiens. Quand, à la fin du monde, le Christ juge reviendra pour juger tous les vivants et les morts, alors, dit-il aux Corinthiens, nous ne mourrons pas tous, mais tous — donc même les justes, qui relinquimur, qui residui sumus, c’est-à-dire ceux qui, par un privilège divin spécial, seront vivants au moment de la parousie — nous serons transformés. Cette transformation, que certains théologiens veulent comparer à une sorte de mort semblable à celle à laquelle succomba la Bienheureuse Vierge, s’accomplira en un instant : in momento, in ictu oculi.

La victoire du Christ sur la mort et sur le péché sera donc complète et définitive, alors que la mort elle-même sera absorbée par la vie ; de la sorte, le corps, sujet encore à la corruption, deviendra incorruptible et immortel, à l’image de celui du commun prototype de tous les élus, Jésus-Christ.

Le répons-graduel répète, dans son premier verset, l’antienne de l’introït. Le second est tiré du psaume 111 : « Le juste laissera un souvenir éternel, et il n’aura à craindre aucun jugement défavorable. » Ce n’est pas toujours en ce monde que cet heureux sort des justes se réalise, mais il s’avère certainement à ce tribunal suprême auquel rien n’est caché et où la lumière de la vérité pénétrera dans les multiples replis de notre cœur. Alors tout ce que nous aurons fait même de plus secret, sera dévoilé à la face du monde entier dans les grandes et suprêmes assises de l’humanité.

Suit le trait qui cependant est généralement omis dans les Sacramentaires, puisqu’il s’agit d’une messe votive, de caractère non point joyeux mais funèbre. Qu’on se souvienne que le psaume trait était la caractéristique primitive des stations dominicales, ou du moins très solennelles, avant que saint Grégoire instituât le chant alléluiatique des dimanches hors du Carême.

Trait. — « Absolvez, Seigneur, de tout péché, les âmes de tous les fidèles défunts. V/. Afin que, par le secours de votre grâce, elles puissent échapper à une sentence défavorable. V/. Et jouir, au contraire des splendeurs de l’éternelle béatitude. »

Dans un grand nombre de ses prières funèbres comme d’ailleurs en celle-ci, la liturgie se rapporte au moment suprême et décisif du jugement particulier de l’âme où son sort se décide pour l’éternité. Les prières de l’Église accompagnent le mort couché dans son cercueil ; mais Dieu, pour qui il n’y a ni passé ni futur, a déjà vu comme présente la médiation de l’Église, laquelle devient ainsi un élément propitiatoire qui influe puissamment sur le jugement divin. C’est le vœu de l’Épouse et de la Mère, auquel ne peut certes demeurer indifférent le cœur de l’Époux et du Père universel.

La séquence Dies irae du franciscain Thomas de Celano, décrit avec des couleurs dignes de Michel-Ange le jugement universel. Nous faisons cette comparaison simplement pour qualifier un style, car ce n’est pas le peintre qui a inspiré le poète, mais c’est Michel-Ange qui, dans le drame terrible qu’il a évoqué sur le mur de la Chapelle Sixtine, s’est inspiré des notes effrayantes du franciscain médiéval. Le peintre de Jules II y a certainement puisé, outre les éléments apocalyptiques de son tableau, cette couleur chaude qui le distingue, ce caractère de force terrible qui domine dans presque toutes ses figures, y compris celle de la Vierge Marie elle-même. A l’origine on chantait cette séquence : Dies irae le Ier dimanche de l’Avent, comme se rapportant à la lecture évangélique de la fin du monde et du jugement universel. Mais par la suite, à cause de l’adjonction des deux derniers vers en faveur des défunts, elle fut, à tort ou à raison, adaptée à la messe de requiem. Dans ce cas d’ailleurs, on ne peut vraiment donner le nom de séquence à cette composition, car la séquence n’était autre à l’origine qu’une œuvre en prose ou en vers, adaptée aux mélismes trop prolongés qui suivaient l’alléluia au début du moyen âge. A la place de la simple et trop longue vocalise alléluiatique, on adapta donc des versets, appelés pour cette raison, et conformément à la terminologie grecque : sequentia ou acoluthia. Or il est clair que, si le verset alléluiatique n’existe pas, il ne saurait être question de séquence proprement dite. II faut en outre remarquer ici la psychologie religieuse de la société médiévale, au sein de laquelle naquit le tragique poème de Thomas de Celano, et la distance qui sépare sa muse de l’inspiration sereine et calme qui dicta jadis les épigraphes des catacombes et la très ancienne hymne vespérale jucundum lumen du lucernaire byzantin.

On peut même dire que le phôs hilaron et le dies irae sont comme les deux points extrêmes marquant le début et la fin de l’antique hymnodie chrétienne. Entre l’un et l’autre, onze siècles se sont écoulés. Le dogme demeure immuable, mais dans l’esprit des masses qui doivent le vivre au XIIIe siècle, quel changement est survenu ! L’hymne vespérale est l’hymne de la lumière sereine : iucundum lumen, de la joie, de la vie d’intimité avec Dieu, propre aux premiers siècles chrétiens, siècles de sacrifice et de martyre. Au contraire, le Dies irae traduit les remords d’une génération pleine de colères et de luttes fratricides d’un siècle de légèreté et d’oubli du Seigneur. Le iucundum lumen est serein parce qu’il aime ; le Dies irae au contraire tremble et s’effraie parce que la génération qui l’a dicté entend les reproches de la conscience coupable.

On peut dire que la lecture de l’Évangile (Jean., 5, 25-29) contient le texte de la Bonne Nouvelle, du mysterium dont tout à l’heure parlait saint Paul dans le magnifique passage de son épître aux Corinthiens. Le Christ est le nouvel Adam, et l’humanité tout entière forme son héritage. Comme Dieu, il a la même vie et la même nature divine que son Père ; aussi sa mission sotériologique est-elle de vivifier, de gouverner et de juger. Dieu a voulu restaurer en Lui toutes les ruines faites dans le monde par le péché, et c’est le motif de la résurrection glorieuse des justes, selon le prototype qui est Jésus. Quant aux pécheurs, ils ressusciteront eux aussi pour comparaître au jugement ; mais cette vie éternelle de peines sera pour eux pire que la mort, à ce point que l’Écriture l’appelle sans plus : mors secundo. Leur réprobation ne nuira d’ailleurs aucunement à la gloire du Christ, parce que, du fait de leur scission spontanée, ils ne lui appartiennent plus, et l’intégrité du corps mystique du Sauveur est parfaite, même sans eux.

Aujourd’hui l’offertoire, avec la répétition de sa finale, a conservé son antique caractère musical de chant antiphonique. A vrai dire, l’offertoire devrait être un chant de psaume et non une prex, comme l’est en effet le Domine lesu Christe inséré aujourd’hui dans le Missel. Mais il ne faut pas oublier que toute la messe pro defunctis représente un tardif assemblage d’éléments plus anciens contenus dans les divers Sacramentaires. Dans quelques Antiphonaires nous trouvons en effet, pour l’offertoire de la messe des défunts, le psaume 50 : Miserere, ou la belle antienne : Dextera Domini, du psaume 117, que le Missel a assignée au IIIe dimanche après l’Épiphanie.

L’offertoire suivant était également en usage : R/. Erue, Domine, animas eorum ab omni vinculo delictorum, ut in resurrectionis gloria inter Sanctos tuos resuscitari mereatur. V/. Tuam, Deus ,piissime Pater, deposcimus pietatem .ut eis tribuere digneris placidas et quietas mansiones.

L’offertoire prescrit aujourd’hui par le Missel, où les fonctions de signifer sont attribuées à saint Michel, est sûrement du haut moyen âge. En effet, ces fonctions de psychopompe (Celui qui introduit les âmes dans l’autre monde) attribuées à saint Michel, se retrouvent dans un très grand nombre d’autres documents de la littérature chrétienne primitive, où saint Michel est appelé : Praepositus paradyso, princeps Angelorum, et est chargé de peser dans la balance le mérite des âmes avant de les introduire dans le royaume céleste. En effet, dans l’Histoire arabe de saint Joseph le charpentier, le Saint prie ainsi : Si ma vie, Seigneur, est à son terme ; si le moment est venu pour moi de sortir de ce monde, envoyez-moi Michel, le prince de vos saints Anges. Qu’il reste près de moi, afin que ma pauvre âme sorte en paix, sans peine ni crainte, de ce corps affligé. — Cet apocryphe est sûrement antérieur au IVe siècle.

Dans le Sacramentaire Gélasien, nous trouvons la prière suivante pour les défunts : ... suscipe,Domine, animam servi lui... revertentem ad te. Adsit ei Angélus Testamenti tui, Michael.

Voici l’antique collecte qui précède l’anaphore consécratoire : « Recevez favorablement, Seigneur, les hosties que nous vous offrons pour vos serviteurs et vos servantes, afin que, leur ayant accordé le mérite de la foi chrétienne, vous leur en donniez aussi la récompense. » La liturgie des défunts insiste beaucoup sur le mérite de la foi catholique, par lequel l’Église veut recouvrir après la mort, comme d’un voile pieux, les misères de l’humanité fragile et défectible. En effet, la foi catholique, professée et vécue, est le moyen authentique de nous approcher de Dieu, et, avec la charité et la grâce, elle est la première racine de notre mérite dans l’ordre surnaturel, selon la parole de l’Apôtre : Accedentem ad Deum oportet credere.

La préface des défunts a été insérée dans le Missel romain sous Benoît XV. Elle représente une heureuse retouche faite à une antique préface en usage dans quelques églises gallicanes : Vere dignum... per Christum Dominum nostrum. In Quo no bis spes beatae resurrectionis effuhit, lit quos contristat certa moriendi conditio, eosdem consoletur futurae immortalitatis promissio. Tuïs enim fidelibus, Domine, vita mutatur, non Mlitur, et dissoluta terrestris huius incolatus dôme, aeterna in caelis habitatio compa-ratur, per Christum. Et ideo cum Angelis etc.

Cette antique composition liturgique est un vrai joyau, et à elle seule elle vaut beaucoup plus que toutes les navrantes inscriptions funéraires des cimetières modernes. Là où la nature est tentée de ne voir qu’une scène de mort et de larmes, l’Église s’élève au contraire jusqu’à la sublime contemplation de la résurrection et de la vraie vie. Vita mutatur, non tollitur. Pourquoi donc nous épuiser à pleurer, alors que le défunt, en nous laissant, n’a rien perdu et a, au contraire, tout gagné ? En échange de la vie temporelle, il a reçu la vie éternelle ; à la place d’une maison de boue, il a obtenu l’habitation céleste ; au lieu du monde, il a gagné Dieu lui-même. C’est pour cette raison que les premiers chrétiens, dans l’épigraphie cimétériale, évitaient même d’employer le mot mortuus ; ils disaient simplement dormit, depositus, defunctus. Aujourd’hui encore, les Grecs entonnent l’alléluia lors des funérailles, et durant la semaine de Pâques, s’ils ont à célébrer des obsèques, l’office n’est autre que celui de la résurrection du Christ.

L’antienne pour la Communion du peuple, dans quelques Sacramentaires, est empruntée à l’Évangile selon saint Jean (11, 25-26) : Ego sum resurrectio et vita, dicit Dominus. Qui crédit in me, etiam si mortuus fuerit, vivet. Dans le Missel actuellement en usage, la Communion s’inspire au contraire d’un texte responsorial qui rappelle de loin celui d’Esdras indiqué plus haut.

Après la Communion. Le sacrement de la Rédemption veut nous rendre conformes au Christ, notre chef mystique. La grâce inaugure cette ressemblance et cette conformité, mais c’est dans la lumière de la gloire que le sacrifice eucharistique obtient la plénitude de son effet, commencé durant notre pèlerinage ici-bas.

A la seconde et à la troisième messes, les antiennes et les répons sont les mêmes qu’à la première. Il n’y a de propres que les collectes et les lectures, et celles-ci ont d’ailleurs été empruntées elles aussi à d’autres messes du recueil pro defunctis.

A LA DEUXIÈME MESSE.

Collecte. Dans l’antiquité, le refrigerium désignait non seulement l’agape funèbre célébrée en mémoire des défunts, mais aussi le banquet céleste promis par Jésus dans l’Évangile à ses fidèles serviteurs : Faciet illos discumbere, et transiens ministrabit illis (Luc., 12, 37).

Les deux lectures sont empruntées à la messe in anniversario defunctorum. La première est tirée du Livre des Machabées (12, 43-46) et a trait à la collecte faite par Judas après la bataille, dans le but de faire offrir à Jérusalem un sacrifice pour les soldats morts. L’Auteur sacré qualifie cette pensée de sainte et utile, et même de profession de foi en la résurrection future. Si en effet celle-ci ne nous avait pas été promise, pourquoi nous préoccuperions-nous du sort des âmes des défunts ? Ce texte sacré est important, car il confirme une fois de plus le dogme catholique du purgatoire et la pratique universelle et très ancienne de l’Église, de secourir les âmes des défunts par le divin Sacrifice, les prières et les aumônes.

La lecture évangélique est tirée de saint Jean (6, 37-40). La volonté du Père en nous donnant Jésus-Christ, est que Celui-ci nous accorde ce que Lui-même est et possède, c’est-à-dire la lumière, la vie, le salut et la résurrection. Le Christ est donc pour nous en quelque sorte la mesure de la magnifique promesse que le Seigneur nous a faite par Lui : ut digni effîciamtr promissionibus Christi.

Sur les ablations. La messe est appelée, ici et dans le Canon : Sacrificium laudis, parce qu’elle contient la louange, l’adoration et l’action de grâces parfaite que le Christ lui-même, gratias agens pour nous, rend à son Père,

Après la Communion. Voilà comment, suivant la parole du pape Célestin Ier, legem credendi lex statuiat supplicandi, et comment les vénérables formules des antiques collectes liturgiques proclament que le sacrifice eucharistique a une valeur satisfactoire et propitiatoire même pour les défunts. Telles ont été la foi et la discipline constantes de l’Église, foi et discipline auxquelles se rapporte un texte des apocryphes Actus Iohannis, qui sont du IIe siècle. L’Apôtre et Andronicus nous y sont montrés se rendant au tombeau de Drusiana le troisième jour après sa mort.

A LA TROISIÈME MESSE.

Tout est commun à la première messe, sauf les lectures et les collectes. Les lectures sont empruntées à la Missa quotidiana pro defunctis, et les prières sont celles qui sont indiquées : pro defunctis fratribus, propinquis et benefactoribus, et qu’on dit aussi à la messe quotidienne pour les trépassés.

La première lecture est tirée de l’Apocalypse (14, 13). Le Voyant de Pathmos a l’ordre d’écrire : bienheureux les défunts qui meurent dans le Seigneur. Et pourquoi ? Parce que ces ouvriers infatigables de la vigne du Seigneur ne se sont pas détachés du travail, tant que le Saint-Esprit lui-même ne leur a pas dit : Assez. Ils sont alors sortis d’ici. Comme l’observe Job, ils y étaient arrivés nus, et nus ils s’en sont allés, laissant a d’autres leurs maisons, leurs terres, leurs biens. Avec eux ils n’ont emporté qu’une seule chose : leurs œuvres.

Nous devons tirer aujourd’hui deux conséquences pratiques de la méditation de ce passage de l’Écriture. Maintenant il faut travailler sans relâche, et personne n’a le droit de se dire : assez, jusqu’à ce que nous le dise l’Esprit divin, au jour de notre mort. D’autre part, en vue du voyage de l’éternité, nous devons préparer des bagages qui nous suffisent pour tous les siècles, et, pour que rien ne soit considéré comme objet de contrebande, pour qu’on ne nous arrête pas à la frontière, nous n’y devons rien mettre d’autre que les bonnes œuvres, et beaucoup de bonnes œuvres.

La lecture de l’Évangile est, elle aussi, tirée de saint Jean (6, 51-52). C’est un passage de l’admirable discours sur l’Eucharistie, fait par Jésus dans la synagogue de Capharnaüm. De même que tout fut fait et créé à l’origine par le Verbe, c’est également en Lui que l’humanité est vivifiée et conduite vers sa fin dernière, la béatitude. Le Christ est le pain de vie divine descendu du Ciel. Celui qui le mange, c’est-à-dire celui qui s’incorpore à Lui dans le Sacrement, et vit de Lui par cette foi quae per dilectionem operatur, celui-là a la vraie vie, et dès cette terre il reçoit et cache dans son sein le germe de la vie immortelle.


Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

Des vêpres de la Toussaints aux vêpres des défunts. Il n’y a pas, dans toute l’année, de vêpres qui fassent sur moi une impression aussi profonde que les secondes vêpres de la Toussaint suivies des vêpres des morts pour tous les fidèles trépassés. L’autel était d’abord paré de précieux reliquaires. Les saints eux-mêmes étaient présents dans leurs augustes restes sur l’autel qui symbolise le Christ. L’autel avait revêtu sa parure de fête : un antependium doré, des nappes blanches comme la neige. Il portait les six chandeliers dorés avec les six grands cierges allumés. Sur le retable étincelait l’Agneau de l’Apocalypse. Sur le trône était assis, comme représentant du Père éternel, l’Abbé, revêtu de la chape brochée d’or ; autour de lui, se tenaient “les vieillards” du monastère, en ornements blancs, tandis que, dans l’avant-chœur, les quatre choristes, vêtus de chapes précieuses, menaient le chant des vêpres et que le chœur des moines s’unissait aux mélodies célestes. Dans la vaste église abbatiale se tenaient debout ou assis “la foule des fidèles que personne ne pouvait compter, venant de toutes les classes sociales”. Et sur tout cela se répandaient en accords joyeux et enthousiastes les sons majestueux de l’orgue. C’était une heure de joie céleste. A peine avait-on chanté le “ Benedicamus Domino ” solennel que s’approchait de l’autel le thuriféraire, accompagné de huit porte-flambeaux. Les quatre choristes montaient à l’autel, prenaient avec respect les reliquaires et sortaient de l’église, au milieu des flambeaux allumés. Les bienheureux retournaient dans leur patrie céleste qu’ils avaient quittée pour quelques instants pour célébrer avec leurs frères et sœurs de la terre la fête de la Toussaint. Le Pontife se joignait avec ses assistants au cortège des saintes reliques. Dieu le Père, lui aussi, quittait la terre, sous le signe du symbole avec les vieillards. La majestueuse procession était tout entière enveloppée par les fumées de l’encens dont le Voyant de l’Apocalypse a écrit que c’était “la prière des saints” (Apoc., V, 8). Seul, le Fils de Dieu demeurait sur l’autel dans l’image du crucifix. Les lumières s’étaient éteintes ; l’orgue faisait entendre la plainte de lugubres accords. Des moines en ornements noirs étendaient un drap noir devant l’autel. Les cierges étaient maintenant de cire jaune. Des prêtres en chapes noires arrivaient à l’autel et entonnaient le chant plaintif du purgatoire : “Je marcherai devant le Seigneur dans la terre des vivants.” Le chant d’allégresse de la Toussaint s’est tu ; ce sont les âmes souffrantes qui gémissent.

La Commémoraison de tous les fidèles trépassés : “Donnez-leur le repos éternel”

Le Martyrologe annonce aujourd’hui en premier lieu : “Aujourd’hui, nous faisons la commémoration de tous les fidèles trépassés. L’Église, notre mère commune, après avoir mis tous ses soins à célébrer par de dignes louanges tous ses enfants qui jouissent déjà du bonheur céleste, veut aussi secourir toutes les âmes qui languissent encore dans le lieu de purification, en intercédant de tout son pouvoir pour elles auprès de Dieu et de son Époux, le Christ, afin qu’elles soient réunies le plus vite possible à la communauté des citoyens du ciel.” Historique. L’institution d’un jour commémoratif de tous les fidèles trépassés encore détenus dans le purgatoire remonte au pieux et saint Odilon, Abbé de Cluny (mort en 1048), qui décréta, en 998, que, dans tous les monastères de l’Ordre de Cluny, on célébrerait, après les vêpres du 1er novembre, l’office des morts. Cette coutume fut imitée et enfin adoptée par l’Église universelle. Le pape Pie X a donné au jour des morts le nom de “ grande fête des pauvres âmes ” ; chaque prêtre peut dire trois messes ce jour-là. L’Office des Morts. C est la prière liturgique de la profonde compassion, de la généreuse assistance, de l’efficace consolation, de la tristesse modérée, dans un esprit de solide charité chrétienne. Notre place dans cet office des Heures se trouve entre le Dieu infiniment juste et miséricordieux et les chères âmes du purgatoire qui nous sont unies. Toutefois, nous ne demeurons pas là inertes, mais nous sommes attirés, tantôt vers Dieu, tantôt vers nos frères et nos sœurs qui souffrent, comme des anges consolateurs. Dieu se montre à nous dans sa souveraineté vengeresse, dans sa sainteté, dans son infinie bonté. C’est avant tout en nous tournant vers Dieu, en nous approchant de Dieu que nous devons réciter l’office des morts. Il veut, par la souffrance vindicative et purificatrice, délivrer de toute souillure et de tout péché ses serviteurs et amis qui sont morts en état de grâce sanctifiante, pour les admettre à la contemplation d’éternelle félicité et à l’union avec lui dans la Jérusalem céleste. Notre union avec les âmes souffrantes est si intime dans l’office des morts que nous y rencontrons les défunts dans les différents états et dans les divers degrés de leurs besoins et de leurs tourments, que nous nous substituons souvent à eux en esprit dans le feu du purgatoire, en prenant sur nous tous leurs châtiments et toutes leurs souffrances, pour gémir à leur place, pour implorer avec instance et confiance l’adoucissement de leurs peines, mais aussi pour remercier Dieu, avec un cœur filial, de son pardon.

L’office des morts ressemble, à divers points de vue, à l’office des trois grands jours de la semaine sainte. Les formules d’introduction et de conclusion habituellement usitées sont la plupart du temps supprimées (verset initial, hymne, Gloria Patri, absolution et bénédiction avant les leçons, conclusion “tu autem” après les leçons). Toutes les parties de l’office se développent avec une joie solennelle, traversée par un souffle de tristesse grave et contenue. Les prières finales de chaque Heure se récitent à genoux ; nous sommes des intercesseurs suppliant en faveur des chers trépassés.

Jusqu’à Pie X, l’office des morts n’avait que les vêpres, les matines et les laudes, les trois Heures canoniques antiques et primitives. Maintenant il est complété pour le jour de la commémoraison de tous les fidèles trépassés par les autres Heures, de sorte qu’il constitue un office propre complet. L’ancien office, qui ne comprenait que les vêpres, les matines et les laudes, est un souvenir de l’office liturgique primitif de l’Église. — Les vêpres des morts produisent une profonde impression sur l’âme. Au lieu de la louange, c’est la supplication qui retentit sans cesse : “Seigneur, donnez-leur le repos éternel...” Dans les psaumes, nous chantons avec les âmes souffrantes et pour elles. Dans tous les psaumes de l’office, la pensée du purgatoire nous fait réfléchir à la misère et à la faiblesse de l’homme, à l’angoisse de l’heure dernière et du jugement, aux peines finales, mais aussi à l’infinie bonté de Dieu qui console et conduit au ciel. Au point culminant des vêpres, à Magnificat, l’espérance grandit : alors apparaît en personne le Divin Rédempteur qui nous promet, dans l’antienne, d’attirer à lui dans le royaume des cieux tous ceux que son Père lui a donnés.

Les Matines des morts commencent par le bel invitatoire : “Venez, adorons le Roi pour qui tout être vit.” Dans les leçons du premier nocturne, c’est Job, l’homme patient, la figure saisissante de ceux qui souffrent en purgatoire, qui implore la délivrance de ses cruelles souffrances dont il trace le tableau en gémissant et dont il désire connaître la cause. Au second nocturne, nous lisons un passage du livre de saint Augustin sur la sollicitude à témoigner aux défunts. Ce vénérable monument nous expose le prix qu’il faut attacher au corps humain, la piété avec laquelle on doit enterrer les cadavres et le devoir de prier pour les morts, à l’exemple de l’Église qui offre prières et sacrifice de la messe pour ceux envers qui elle peut quelque chose. Dans les leçons du troisième nocturne, l’Apôtre des nations proclame notre foi à la résurrection du Christ. Les antiennes, qui expriment ordinairement les sentiments des âmes souffrantes, produisent une impression particulièrement saisissante. Les psaumes qu’elles encadrent font entendre tour à tour le chant de la pénitence (1er et 3e nocturnes) et l’espérance du pardon (2e nocturne). — Les Laudes des morts expriment les sentiments d’une joyeuse espérance qui sont disséminés dans tout l’office. Elles commencent heureusement par le psaume 50, un psaume de la pénitence, mais elles passent bien vite au sentiment de joyeuse reconnaissance pour la moisson (ps. 64), à l’ardent désir de l’union à Dieu (ps. 62), à la joie de la résurrection (Cantique et ps. 150). Le cantique d’Ezéchias peint justement à merveille le passage des feux du purgatoire à la félicité du ciel.

La Messe de tous les fidèles trépassés (Requiem aeternam). Elle contient, comme les autres messes des morts, deux éléments exprimant différentes sortes de sentiments et de pensées. Le premier élément, le plus ancien, remontant à l’antiquité chrétienne, a des accents joyeux et expose le consolant message de la résurrection de la chair. C’est à lui qu’appartient l’Introït avec le joyeux psaume de la moisson (ps. 64) : l’Église pense à la moisson des âmes ; il faut réciter le psaume tout entier pour comprendre son application. C’est encore à ce premier élément qu’appartiennent les deux lectures, deux joyeuses révélations de la glorieuse résurrection des morts. Dans l’Épître, l’Apôtre explique le mode de la résurrection de la chair : la chair ressuscitera, mais ce n’est pas le corps putrescible, mais un corps glorifié qui sera réuni à l’âme. A l’Évangile, le Christ se tient devant nous comme celui qui ressuscite d’une double mort : sur la terre, il ressuscite les hommes à la vie de la grâce ; au jugement dernier, il les ressuscitera, corps et âme, à la vie de la gloire. Ici aussi se place la belle préface des morts (elle est sans doute de date très récente, mais elle remonte à un ancien type de la liturgie mozarabe). Ces courts versets sont d’une beauté inimitable : “Dans le Christ a lui pour nous l’étoile de l’espérance en la bienheureuse résurrection... A vos fidèles, Seigneur, la vie n’est pas enlevée, mais seulement renouvelée ; quand cet asile de leur pèlerinage tombe en poussière, l’éternelle habitation leur est accordée dans le ciel.”

Le second élément de la messe des morts remonte au Moyen Age, qui portait davantage son attention sur le péché ; il n’exprime pas la même joie ni le même esprit de victoire, mais il est pénétré de sollicitude pour les pauvres âmes dont il demande la délivrance. Ce second élément peint la mort et le jugement en sombres couleurs. Ce caractère apparaît dans la saisissante Séquence (Dies irae), qui est une peinture très poétique du jugement dernier. Le beau chant de l’Offertoire nous montre en saint Michel le guide des âmes, qui, la hampe de son étendard plantée devant les abîmes de l’enfer, les introduit dans la sainte lumière. Ce morceau est l’unique exemple, dans notre missel, d’un offertoire composé de versets (la procession des offrandes à la messe des morts dure plus longtemps qu’aux autres messes, d’où le développement plus considérable du chant). Cet antique chant s’inspire de la conception que se faisait l’antiquité païenne de la conduite des âmes. La supplication, deux fois répétée, demandant que les âmes “ ne tombent pas dans l’oubli ”, rappelle aussi la conception païenne (du fleuve de l’oubli). La foi à la résurrection de la chair et la prière pleine de sollicitude pour la délivrance des chers défunts, tel est donc le contenu de la messe d’aujourd’hui.

A remarquer que, pendant toute la durée de la messe, les fidèles tiennent des cierges allumés ; ceux-ci ne symbolisent plus, comme d’ordinaire au cours de l’année, la grâce du baptême, mais les âmes souffrantes au lieu et place desquelles nous sommes là et pour lesquelles nous aspirons à “ l’éternelle lumière ”.



William-Adolphe Bouguereau (1825-1905). Le Jour des morts, 1859, 


Leçons des Matines

Invitatoire. Le Roi pour qui vivent toutes les créatures, * Venez, adorons-le. Les Leçons se disent sans absolution, sans bénédiction et celles du premier nocturne sans titre, on les termine sans ajouter Tu autem.

AU PREMIER NOCTURNE.

Job 7, 16-21.

Première leçon. Épargnez-moi, Seigneur ; car mes jours ne sont rien. Qu’est-ce qu’un homme pour que vous fassiez un si grand cas de lui ? ou pourquoi mettez-vous sur lui votre cœur ? Vous le visitez au point du jour, et aussitôt vous l’éprouvez ; jusques à quand ne m’épargnerez-vous point, et ne me laisserez-vous pas avaler ma salive ? J’ai péché, que ferai-je pour vous, ô gardien des hommes ? Pourquoi m’avez-vous mis en opposition avec vous et suis-je à charge à moi-même ? Pourquoi n’ôtez-vous point mon péché, et pourquoi n’enlevez-vous pas mon iniquité ? Voilà que maintenant je dormirai dans la poussière, et, si vous me cherchez dès le matin, je ne serai plus.

R/. Je crois que mon Rédempteur est vivant ; et qu’au dernier jour je ressusciterai de la terre : * Et que dans ma chair, je verrai mon Dieu. V/. Je dois le voir moi-même, et non un autre, et mes yeux doivent le contempler. * Et que dans ma chair...

Job 14, 1-6.

Deuxième leçon. L’homme né d’une femme, vivant peu de temps, est rempli de beaucoup de misères. Comme une fleur, il s’élève et il est brisé ; et il fuit comme l’ombre, et jamais il ne demeure dans un même état. Et vous croyez, ô Dieu, qu’il soit digne de vous d’ouvrir les yeux sur un tel être, et de l’appeler avec vous en jugement ? Qui peut rendre pur celui qui a été conçu d’un sang impur ? N’est-ce pas vous, qui seul êtes pur ? Les jours de l’homme sont courts ; le nombre de ses mois est en vos mains-vous avez marqué son terme, lequel ne pourra être dépassé. Retirez-vous un peu de lui, afin qu’il se repose, jusqu’à ce que vienne, comme pour un mercenaire, son jour désiré.

R/. Vous qui avez ressuscité Lazare, alors que, déposé dans le tombeau.il sentait déjà mauvais : * Vous, Seigneur, donnez-leur le repos et faites-les parvenir au séjour de paix. V/. Vous, qui devez venir pour juger les vivants et les morts, et le monde par le feu. * Vous.

Job 19, 20-27.

Troisième leçon. A ma peau, après que ma chair a été consumée.se sont collés mes os, et il n’est resté seulement que les lèvres autour de mes dents. Ayez pitié de moi, ayez pitié de moi, vous du moins, mes amis, parce que la main du Seigneur m’a touché. Pourquoi me persécutez-vous comme Dieu.et vous rassasiez-vous de ma chair ? Qui m’accordera que mes paroles soient écrites ?Qui me donnera qu’elles soient tracées dans un livre avec un stylet de fer et sur une lame de plomb, ou qu’elles soient gravées au burin sur la pierre ? Car je sais que mon Rédempteur est vivant, et qu’au dernier jour, je ressusciterai de la terre ; et que de nouveau je serai environné de ma peau, et que dans ma chair je verrai mon Dieu. Je dois le voir moi-même, et non un autre, et mes yeux doivent le contempler : c’est là mon espérance, elle repose dans mon sein.

R/. Seigneur, quand vous viendrez juger la terre, où me mettrai-je à couvert des traits de votre colère ? * Car j’ai beaucoup péché dans ma vie. V/. Je crains mes offenses et je rougis devant vous ; lorsque vous viendrez juger, ne me condamnez pas. * Car j’ai... Le repos éternel, donnez-leur, Seigneur ; et que la lumière sans fin luise sur eux. * Car j’ai...

AU DEUXIÈME NOCTURNE.

Du livre de Saint Augustin, évêque : « Des devoirs à rendre aux morts ».

Quatrième leçon. Le soin des funérailles, les conditions honorables de la sépulture, la pompe des obsèques, sont plutôt une consolation pour les vivants qu’un secours pour les morts. Toutefois, ce n’est point là un motif de mépriser et de dédaigner les corps des défunts, surtout ceux des justes et des fidèles, qui ont été comme les instruments et les vases dont l’âme s’est saintement servie pour toutes sortes de bonnes œuvres. Si le vêtement et l’anneau d’un père, si quelque autre souvenir de ce genre, reste d’autant plus cher à des enfants que leur affection envers leurs parents est plus grande.il ne faut en aucune manière traiter sans respect le corps lui-même, que nous portons plus intimement et plus étroitement uni à nous que n’importe quel vêtement. Nos corps, en effet, ne nous sont pas un simple ornement ou un instrument mis extérieurement à notre usage, mais ils appartiennent à la nature même de l’homme. De là vient qu’une piété légitime s’est empressée de rendre aux anciens justes les soins funèbres, de célébrer leurs obsèques et de pourvoir à leur sépulture, et qu’eux-mêmes ont souvent, pendant leur vie, fait des recommandations à leurs fils au sujet de la sépulture ou même de la translation de leur corps.

R/. O Dieu, souvenez-vous que ma vie n’est qu’un souffle. * Le regard de l’homme ne m’apercevra pas. V/. Des profondeurs de l’abîme j’ai crié vers vous, Seigneur ; Seigneur, écoutez ma voix. * Le regard...

Cinquième leçon. Quand les fidèles témoignent aux défunts l’affection d’un cœur qui se souvient et qui prie, leur action est sans nul doute profitable à ceux qui ont mérité, quand ils vivaient en leur corps, que de semblables suffrages leur soient utiles après cette vie. Mais lors même qu’en raison de quelque nécessité, l’on ne trouve point moyen, soit d’inhumer des corps, soit de les inhumer en quelque lieu saint, encore faut-il ne pas omettre d’offrir des supplications pour les âmes des morts. C’est ce que l’Église a entrepris de faire à l’intention de tous les chrétiens décèdes dans la communion de la société chrétienne, et même sans citer leurs noms, par une commémoraison générale, en sorte que ceux auxquels font défaut les prières de parents, d’enfants, de proches ou d’amis, reçoivent ce secours de cette pieuse mère, qui est une et commune à tous les-fidèles. Si ces supplications qui se font pour les morts avec foi droite et piété venaient à manquer, je pense qu’il n’y aurait pour les âmes aucune utilité à ce que leurs corps privés de vie fussent placés en n’importe quel lieu saint.

R/. Ayez pitié de moi, Seigneur, car j’ai beaucoup péché dans ma vie ; que ferai-je, malheureux ? où fuirai-je, sinon vers vous, mon Dieu ? * Ayez pitié de moi, lorsque vous viendrez au dernier jour. V/. Mon âme est troublée à l’excès ; mais, vous Seigneur, secourez-la. * Ayez pitié...

Sixième leçon. Cela étant, soyons bien persuadés que, dans les solennités funéraires, nous ne pouvons faire parvenir du soulagement aux morts auxquels nous nous intéressons, que si nous offrons pour eux au Seigneur le sacrifice de l’autel, celui de la prière ou de l’aumône. Il est vrai que ces supplications ne sont pas utiles à tous ceux pour lesquels elles se font, mais seulement à ceux qui, au temps de leur vie, ont mérité de se les voir appliquées. Mais il vaut mieux offrir des suffrages superflus pour des défunts à qui ils ne peuvent ni nuire ni profiter, que d’en laisser manquer ceux auxquels ils sont utiles. Chacun cependant s’empresse de s’acquitter avec ferveur de ce tribut de prières pour ses parents et ses amis, afin que les siens en fassent autant pour lui-même. Quant à ce qu’on fait pour le corps qui doit être inhumé, il n’en résulte point de secours pour le salut du défunt, mais c’est un témoignage humain de respect ou d’affection, conforme au sentiment selon lequel personne ne hait sa propre chair. Il faut donc prendre lesoin que l’on peut de l’enveloppe de chair laissée par un de nos proches, quand lui-même, qui en prenait soin, l’aura quittée. Et si ceux qui ne croient pas à la résurrection de la chair agissent ainsi, combien ceux qui croient ne doivent-ils pas faire davantage, afin que les derniers devoirs soient rendus de telle manière à ce corps mort, mais destiné à ressusciter et à demeurer éternellement, qu’on y trouve même, en quelque sorte, un témoignage de cette foi.

R/. Ne vous souvenez pas de mes péchés, Seigneur. * Quand vous viendrez juger le siècle par le feu. V/. Seigneur mon Dieu, dirigez ma voie en votre présence. * Quand vous. Le repos éternel, donnez-leur, Seigneur ; et que la lumière sans fin luise sur eux. * Quand vous.

AU TROISIÈME NOCTURNE.

De l’Épitre de l’Apôtre S. Paul aux Corinthiens.

Septième leçon. Si on prêche que le Christ est ressuscité d’entre les morts, comment quelques-uns disent-ils parmi vous qu’il n’y a point de résurrection des morts ? Or, s’il n’y a point de résurrection des morts, le Christ n’est pas ressuscité. Et si le Christ n’est point ressuscité, notre prédication est donc vaine, et vaine est aussi votre foi. Nous nous trouvons même être de faux témoins à l’égard de Dieu, puisque nous rendons ce témoignage contre Dieu, qu’il a ressuscité le Christ, qu’il n’a pourtant pas ressuscité, si les morts ne ressuscitent point. Car, si les morts ne ressuscitent point, le Christ non plus n’est pas ressuscité. Que si le Christ n’est pas ressuscité, votre foi est vaine ; vous êtes encore dans vos péchés. Donc ceux aussi qui se sont endormis dans le Christ ont péri. Si c’est pour cette vie seulement que nous espérons dans le Christ, nous sommes les plus malheureux de tous les hommes. Mais très certainement le Christ est ressuscité d’entre les morts, comme prémices de ceux qui dorment ; car par un homme est venue la mort, et par un homme la résurrection des morts. Et comme tous meurent en Adam, tous revivront aussi dans le Christ.

R/. La crainte de la mort me trouble, moi qui pèche chaque jour et ne fais point pénitence ; * Car, dans l’enfer, il n’y a plus de rédemption à espérer ; ayez pitié de moi, 0 Dieu, et sauvez-moi. V/. Dieu, sauvez-moi par votre nom, et délivrez-moi par votre puissance. * Car, dans...

Huitième leçon. Mais, dira quelqu’un, comment les morts ressuscitent-ils ? Ou avec quel corps reviendront-ils ? Insensé, ce que tu sèmes n’est point vivifié, si auparavant il ne meurt. Et ce que tu sèmes n’est pas le corps même qui doit venir, mais une simple graine, comme de blé, ou de quelque autre chose. Mais Dieu lui donne un corps, comme il veut, de même qu’il donne à chaque semence son corps propre. Toute chair n’est pas la même chair ; mais autre est celle des hommes, autre celle des brebis, autre celle des oiseaux, autre celle des poissons. Il y a aussi des corps célestes et des corps terrestres ; mais autre est la gloire des célestes, autre celle des terrestres. Autre est la clarté du soleil, autre la clarté de la lune, autre la clarté des étoiles. Une étoile même diffère d’une autre étoile en clarté. Ainsi est la résurrection des morts. Le corps est semé dans la corruption, il ressuscitera dans l’incorruptibilité. Il est semé dans l’abjection, il ressuscitera dans la gloire ; il est semé dans la faiblesse, il ressuscitera dans la force. Il est semé corps animal, il ressuscitera corps spirituel.

R/. Seigneur, ne me jugez pas selon mes actions ; je n’ai accompli en votre présence rien qui soit digne de vous, aussi j’implore votre majesté. * Afin que vous, ô Dieu, vous effaciez mon iniquité. V/. Lavez-moi encore plus de mon iniquité, Seigneur, et purifiez-moi de mon péché. * Afin que.

Neuvième leçon. Voici que je vais vous dire un mystère. Nous ressusciterons bien tous, mais nous ne serons pas tous changés. En un moment, en un clin d’œil, au son de la dernière trompette ; car la trompette sonnera, et les morts ressusciteront incorruptibles, et nous, nous serons changés. Puisqu’il faut que ce corps corruptible revête l’incorruptibilité, et que ce corps mortel revête l’immortalité. Et quand ce corps mortel aura revêtu l’immortalité, alors sera accomplie cette parole qui est écrite : La mort a été absorbée dans sa victoire. O mort, où est ta victoire ? Où est, ô mort, ton aiguillon ? Or l’aiguillon de la mort, c’est le péché ; et la force du péché, la loi. Ainsi, grâces à Dieu qui nous a donné la victoire par notre Seigneur Jésus-Christ ! C’est pourquoi, mes frères bien-aimés, soyez fermes et inébranlables, vous appliquant toujours de plus en plus à l’œuvre du Seigneur, sachant que votre travail n’est pas vain dans le Seigneur.

R/. Délivrez-moi, Seigneur, de la mort éternelle, en ce jour redoutable. * Quand les deux et la terre seront ébranlés, * lorsque vous viendrez juger le siècle par le feu. V/. Je suis tremblant et saisi de crainte, en pensant à cet examen qui se doit faire, et à la vengeance qui le suivra. * Quand les deux et la terre seront ébranlés.V/. Ce jour-là sera un jour de colère, de calamité et de misère, un jour grand et plein d’amertume. * Lorsque vous viendrez juger le siècle par le feu. Le repos éternel, donnez-leur, Seigneur ; et que la lumière sans fin luise sur eux.On répète Délivrez, Jusqu’au V/. Je suis. exclus.

SOURCE : http://www.introibo.fr/02-11-Commemoraison-de-tous-les

Jan Zdzisław Konopacki - W dzień zaduszny; rycina opublikowana w Tygodniku Ilustrowanym



Solemnity of All Souls, November 2

"The Church, to which Jesus Christ promised the presence of the Holy Ghost and which therefore cannot be in error or mislead us, clearly teaches us the existence of Purgatory. It is then certain that there exists a place where the souls of the just complete the expiation of their sins before they are admitted to the joys of heaven. "God is just in all that he does. When he rewards us for the smallest of our good deeds, he does so far beyond anything that we could desire; a good thought, a good wish--that is to say a wish to do good even if it cannot be carried out--all are rewarded.

"But also when it is time for him to punish us he does so with severity, and we will be thrown into purgatory for even the smallest offense. We cannot doubt the truth of this, for we see in the lives of the saints that several of them have gone to heaven only after first passing through the flames of purgatory.

"Saint Peter Damian tells us that his sister remained in purgatory for several years for having once listened to a dirty song with a certain amount of pleasure.

"The story is told of two monks who promised each other that the first one to die would return to tell the other what had happened to him. One of them died and God allowed him to appear to his friend. He told him that he had spent fifteen days in purgatory for having been too fond of having his own way, and when his friend congratulated him on having spent so short a time there, he replied: 'I would rather have been flayed alive for 10,000 years, for even that would have been nothing when compared with the tortures that I endured in the flames.'

"A priest told one of his friends that God had condemned him to several months in purgatory for having delayed the execution of a will which made provision for good works. Alas, my brothers, how many of us have just such a fault on our consciences? How many are there who perhaps eight or ten years ago were charged by their parents or friends to give alms and have Masses said for them, but have done nothing?

"But perhaps some of you will tell me: 'Our parents lived good lives, they were upright people.' Yet how little it takes to be sent to those fires of purgatory! Remember that Albert the Great, whose virtue shone with such extraordinary brilliance, said about that.
"One day he told one of his friends that God had sent him to purgatory for having felt just a little conceited about his learning. And what is even more astonishing is that some of the saints, even canonized ones, have been through purgatory.

"A long time after his death, Saint Severin, Archbishop of Cologne, appeared to a friend and told him that he had been in purgatory for having postponed until evening a prayer that he should have said in the morning. How many years in purgatory await those Christians who find it easy to postpone their prayers on the excuse that they have a lot of work to do!

"If we sincerely desired the joy of possessing Go we would avoid the little faults as well as the great ones, since separation from God is such a fearful torture for these poor souls.

"How right are they who say that the memory of the dead fades with the notes of the passing bell. Suffer, poor souls; in vain do you weep in the fire lit by God's justice. No one is listening to you, no one will bring you succor.
"Yet how quickly we could empty purgatory if we but really wished to."

--From the Writings of the Curé d'Ars.

SOURCE : http://www.saintpatrickdc.org/ss/1102.shtml


Jakub Schikaneder, All Souls' Day, 1888, 139,5 X 220, National Gallery in Prague

November 2

All Souls; or, the Commemoration of the Faithful Departed

BY purgatory, no more is meant by Catholics than a middle state of souls; viz., of purgation from sin by temporary chastisements, or a punishment of some sin inflicted after death, which is not eternal. 1 As to the place, manner, or kind of these sufferings, nothing has been defined by the church; and all who, with Dr. Deacon, except against this doctrine, on account of the circumstance of a material fire, 2 quarrel about a mere scholastic question in which a person is at liberty to choose either side. This doctrine of a state of temporary punishment after death for some sins, is interwoven with the fundamental articles of the Christian religion. For, as eternal torments are the portion of all souls which depart this life under the guilt of mortal sin, and everlasting bliss of those who die in a state of grace, so it is an obvious consequence that among the latter, many souls may be defiled with lesser stains, and cannot enter immediately into the joy of the Lord. Repentance may be sincere, though something be wanting to its perfection; some part of the debt which the penitent owes to the Divine Justice may remain uncancelled, as appears from several instances mentioned in the holy scriptures, as of David, 3 of the Israelites in the wilderness, 4 of Moses and Aaron, 5 and of the prophet slain by a lion, 6 which debt is to be satisfied for either in this life or in the next. Certainly, some sins are venial, which deserve not eternal death; yet if not effaced by condign penance in this world, must be punished in the next. Every wound is not mortal; nor does every small offence totally destroy friendship. The scriptures frequently mention these venial sins, from which ordinarily the just are not exempt, who certainly would not be just if these lesser sins into which men easily fall by surprise, destroyed grace in them, or if they fell from charity. 7 Yet the smallest sin excludes a soul from heaven so long as it is not blotted out. Nothing which is not perfectly pure and spotless can stand before God, who is infinite purity and sanctity, and cannot bear the sight of the least iniquity. Whence it is said of heaven: There shall in no wise enter into it anything defiled. 8 It is the great employment of all the saints or pious persons here below by a rigorous self-examination to try their actions and thoughts, and narrowly to look into all the doublings and recesses of their hearts; continually to accuse and judge themselves, and by daily tears of compunction, works of penance, and the use of the sacraments, to correct all secret disorders, and wipe away all filth which their affections may contract. Yet who is there who keeps so constant a guard upon his heart and whole conduct as to avoid all insensible self-deceptions? Who is there upon whose heart no inordinate attachments steal; into whose actions no sloth, remissness, or some other irregularity ever insinuates itself? Or whose compunction and penance is so humble and clear-sighted, so fervent and perfect, that no lurking disorder of his whole life escapes him, and is not perfectly washed away by the sacred blood of Christ, applied by these means or conditions to the soul? Who has perfectly subdued and regulated all his passions, and grounded his heart in perfect humility, meekness, charity, piety, and all other virtues, so as to bear the image of God in himself, or to be wholly and perfect even as he is, without spot? Perhaps scarcely in any moment of our lives is our intention or motive so fervent, and so pure or exempt from the least imperceptible sinister influence and mixture of sloth, self-complacency, or other inordinate affection or passion; and all other ingredients or circumstances of our action so perfect and holy, as to be entirely without failure in the eyes of God, which nothing can escape. Assiduous conversation with heaven, constant watchfulness, self-denial, and a great purity of heart, with the assistance of an extraordinary grace, give the saints a wonderful light to discover and correct the irregularities of their affections. Yet it is only by the fervent spirit and practice of penance that they can be purified in the sight of God.

The Blessed Virgin was preserved by an extraordinary grace from the least sin in the whole tenour of her life and actions; but, without such a singular privilege, even the saints are obliged to say that they sin daily; but they forthwith rise again by living in constant compunction and watchfulness over themselves. 9 Venial sins of surprise are readily effaced by penance, as we hope of the divine mercy: even such sins which are not discovered by us, are virtually repented of by a sincere compunction, if it be such as effectually destroys them. Venial sins of malice, or committed with full deliberation, are of a different nature, far more grievous and fatal, usually of habit, and lead even to mortal sin. Those Christians who shun these more wilful offences, yet are not very watchful over themselves, and labour not very strenuously in subduing all their passions, have just reason to fear that some inordinate affections taint almost the whole body of their actions, without being sufficiently repented of. And the very best Christians must always tremble at the thought of the dreadful account they have to give to God for every idle word or thought. No one can be justified before God but by his pure and free mercy. But how few even among fervent Christians bring, by his grace, the necessary conditions of cleanness and disengagement of heart and penance, in so perfect a manner as to obtain such a mercy, that no blemishes or spots remain in their souls? Hence a saint prayed: Enter not into judgment with thy servant; for in thy sight shall no man living be justified. 10 No soul which leaves this world defiled with the least stain, or charged with the least debt to the Divine Justice, can be admitted in the kingdom of perfect purity and unspotted sanctity, till she be perfectly   purged and purified. Yet no man will say, that a venial sin which destroys not sanctifying grace, will be punished with eternal torments. Hence there must be a relaxation of some sin in the world to come, as is sufficiently implied, according to the remark of St. Austin, in these words of Christ, where he says, that the sin against the Holy Ghost shall not be forgiven in this world, nor in the world to come. 11 Christ, exhorting us to agree with our adversary or accuser by appeasing our conscience, mentions a place of punishment out of which souls shall be delivered, though not before they shall have paid the last farthing. 12 St. Paul tells us, 13 that he whose work shall abide the trial, shall be rewarded; but he who shall have built upon the foundation (which is Christ or his sanctifying grace) wood, hay, or stubble, or whose imperfect and defective works shall not be able to stand the fiery trial, shall be saved, yet so as by fire. The last sentence in the general judgment only mentions heaven and hell, which are the two great receptacles of all men, both the good and bad, for eternity, and after the last judgment there will be no purgatory. It is also very true of every man at his death that on whatever side the tree falls, on that it shall always lie; the doom of the soul is then fixed for ever either to life or death: but this excludes not a temporary state of purgation before the last judgment, through which some souls enter into everlasting life. This doctrine of a purgatory will be more evidently proved from the following demonstration of the Catholic practice of praying for the souls of the faithful departed.

The church of Christ is composed of three different parts: the triumphant in heaven, the militant on earth, and the patient or suffering in purgatory. Our charity embraces all the members of Christ. Our love for him engages and binds us to his whole body, and teaches us to share both the miseries and afflictions, and the comforts and blessings of all that are comprised in it. The communion of saints which we profess in our creed, implies a communication of certain good works and offices, and a mutual intercourse among all the members of Christ. This we maintain with the saints in heaven by thanking and praising God for their triumphs and crowns, imploring their intercession, and receiving the succours of their charitable solicitude and prayers for us: likewise with the souls in purgatory, by soliciting the divine mercy in their favour. Nor does it seem to be doubted but they, as they are in a state of grace and charity, pray also for us; though the church never addresses public suffrages to them, not being warranted by primitive practice and tradition so to do. That to pray for the faithful departed is a pious and wholesome charity and devotion, is proved clearly from the Old Testament, and from the doctrine and practice of the Jewish synagogue. The baptisms or legal purifications which the Jews sometimes used for the dead, demonstrate their belief that the dead receive spiritual succours from the devotion of the living. 14 In the second book of the Machabees 15 it is related, that Judas the Machabee sent twelve thousand drachms of silver to the temple for sacrifices to be offered for the dead, thinking well and religiously concerning the resurrection. It is therefore a holy and a wholesome thought to pray for the dead, that they may be loosed from their sins. This book is ranked among the canonical scriptures by the apostolical canons, Tertullian, St. Cyprian, St. Hilary, St. Ambrose, St. Austin, the third council of Carthage, &c. Some ancients call it apocryphal, meaning that it was not in the Hebrew canon compiled by Esdras, it being written after his time: and Origen and St. Jerom, who give it that epithet, sometimes quoted it as a divine authority. The Catholic church admits the deutero-canonical books of those which were compiled after the time of Esdras, as written equally by divine inspiration. If some among the ancients doubted of them before tradition in this point had been examined and cleared, several parts of the New Testament which are admitted by Protestants, have been no less called in question. Protestants, who at least allow this book an historical credit, must acknowledge this to have been the belief and practice of the most virtuous and zealous high-priest, of all the priests and doctors attached to the service of the temple, and of the whole Jewish nation: and a belief and custom which our Blessed Redeemer no where reprehended in them. Whence the learned Protestant, Dr. Jeremy Taylor, writes thus: 16 “We find by the history of the Machabees, that the Jews did pray and make offerings for the dead, which appears by other testimonies, and by their form of prayer still extant, which they used in the captivity. Now it is very considerable, that since our Blessed Saviour did reprove all the evil doctrines and traditions of the Scribes and Pharisees, and did argue concerning the dead and the resurrection, yet he spoke no word against this public practice, but left it as he found it; which he who came to declare to us all the will of his Father, would not have done, if it had not been innocent, pious, and full of charity. The practice of it was at first, and was universal: it being plain in Tertullian and St. Cyprian,” &c

The faith and practice of the Christian church from the beginning is manifest from the writings of the primitive fathers. In all ancient liturgies (or masses) express mention is made of prayer and sacrifice for the dead. 17 St. Cyril of Jerusalem, expounding to the catechumens the several parts of the liturgy, says, 18 that in it we pray for the emperor and all the living: we also name the martyrs and saints to commend ourselves to their prayers; then mention the faithful departed to pray for them. “We remember,” says he, “those that are deceased, first the patriarchs, apostles, and martyrs, that God would receive our supplications through their prayers and intercession. Then we pray for our fathers and bishops, and in general for all among us who are departed this life, believing that this will be the greatest relief to them for whom it is made whilst the holy and tremendous victim lies present.” These words of this father are quoted by Eustratius, in the sixth age, and by Nico the Monk. 19 St. Cyril goes on, and illustrates the efficacy of such a prayer by the comparison of a whole nation which, in a joint body, should address their king in favour of persons whom he should have banished, offering him at the same time a crown. “Will not he,” says the father, “grant them a remission of their banishment? In like manner, we, offering our prayers for the dead, though they are sinners, offer not a crown, but Christ sacrificed for our sins, studying to render the merciful God propitious to us and to them.” Arnobius, speaking of our public liturgies, says: 20 “In which peace and pardon are begged of God for kings, magistrates, friends, and enemies, both the living and those who are delivered from the body.” In the Apostolical Constitutions is extant a very ancient fragment of a liturgy, from which Grabe, Hicks, and Deacon borrow many things for their new models of primitive liturgies, and which Whiston pretended to rank among the canonical scriptures. In it occurs a prayer for the dead: “Let us pray for those who are departed in peace.” 21 There is no liturgy used by any sect of Oriential Christians though some have been separated from the communion of the church ever since the fifth or sixth centuries, in which prayer for the dead does not occur. 22 The most ancient fathers frequently speak of the offering the holy sacrifice of the altar for the faithful departed. Tertullian, the oldest among the Latin Christian writers, mentioning certain apostolical traditions, says: “We make yearly offerings (or sacrifices) for the dead, and for the feasts of the martyrs.” 23 He says, “that a widow prays for the soul of her deceased husband, and begs repose for him, and his company in the first resurrection, and offers (sacrifice) on the anniversary days of his death. For if she does not these things, she has, as much as lies in her, divorced him.” 24 St. Cyprian mentions the usual custom of celebrating sacrifice for every deceased Christian. 25 Nor can it be said that he speaks in the same manner of martyrs. The distinction he makes is evident: 26 “It is one thing to be cast into prison not to be released till the last farthing is paid, and another thing through the ardour of faith, immediately to attain to the reward: it is very different by long punishment for sin to be cleansed a long time by fire, and to have purged away all sin by suffering.” St. Chrysostom reckons it amongst the dreadful obligations of a priest, “that he is the intercessor to God for the sins both of the living and the dead.” 27 In another place he says: “It is not in vain that in the divine mysteries we remember the dead, appearing in their behalf, praying the Lamb who has taken away the sins of the world, that comfort may thence be derived upon them. He who stands at the altar, cries not out in vain: Let us pray for them who have slept in Christ. Let us not fail to succour the departed; for the common expiation of the world is offered.” 28 The Protestant translators of Du Pin observe, that St. Chrysostom, in his thirty-eighth homily on the Philippians, says, that to pray for the faithful departed in the tremendous mysteries was decreed by the apostles. 29 Mr. Thorndike, a Protestant theologian, says: 30 “The practice of the church of interceding for the dead at the celebration of the eucharist, is so general and so ancient, that it cannot be thought to have come in upon imposture, but that the same aspersion will seem to take hold of the common Christianity.” Prayer for the faithful departed is mentioned by the fathers on other occasions. St. Clement of Alexandria, who flourished in the year 200, says, that by punishment after death men must expiate every the least sin, before they can enter heaven. 31 The vision of St. Perpetua is related by St. Austin, and in her acts. 32 Origen in many places, 33 and Lactantius, 34 teach at large, that all souls are purged by the punishment of fire before they enter into bliss, unless they are so pure as not to stand in need of it.

To omit others, St. Austin expounds those words of the thirty-seventh psalm, Rebuke me not in thy fury, of hell; and those which follow: Neither chastise me in thy wrath, of purgatory, as follows: “That you purify me in this life, and render me such that I may not stand in need of that purging fire.” 35 In his Enchiridion 36 he says: “Nor is it to be denied that the souls of the departed are relieved by the piety of their living friends, when the sacrifice of the Mediator is offered for them, or alms are given in the church. But these things are profitable to those who, whilst they lived, deserved that they might avail them. There is a life so good, as not to require them; and there is another so wicked, that after death it can receive no benefit from them. When, therefore, the sacrifices of the altar or alms are offered for all Christians, for the very good they are thanksgivings; they are propitiations for those who are not very bad. For the very wicked, they are some kind of comfort to the living.” This father teaches that a funeral pomp and monument are comforts of the living, but no succour of the dead; but that prayer, sacrifices, and alms relieve the departed. 37 He repeats often that sacrifice is offered in thanksgiving to God for martyrs, but never for their repose. “It is an injury,” says he, “to pray for a martyr, to whose prayers we ought to be ourselves recommended.” 38 And again: “You know in what place (of the liturgy) the martyrs are named. The church prays not for them. She justly prays for other deceased persons, but prays not for the martyrs, but rather recommends herself to their prayers.” This he often repeats in other places. St. Austin, 39 and St. Epiphanius, 40 relate, that when Aërius, an impious Arian priest, denied suffrages for the dead, this heresy was condemned by the universal church. How earnestly St. Monica on her death-bed begged the sacrifices and prayers of the church after her departure, and how warmly St. Austin recommended the souls of his parents to the prayers of others is related in their lives. 41

The like earnest desire we discover in all ancient Christians and saints. St. Ephrem in his testament entreats his friends to offer for him, after his departure, alms, prayers, and oblations, (or masses,) especially on the thirtieth day. 42 St. Athanasius tells Constantius, that he had prayed earnestly for the soul of that emperor’s deceased brother Constans. 43 Eusebius relates, 44 that Constantine the Great would be buried in the porch of the church of the apostles, “that he might enjoy the communication of the holy prayers, the mystical sacrifice, and the divine ceremonies.” The same historian testifies, 45 that after his death, “numberless multitudes poured forth prayers to God with sighs and tears for the soul of the emperor, repaying a most grateful office to their pious prince. St. Paulinus upon his brother’s death wrote to his friends, earnestly recommending him to their prayers, that by them his poor soul amidst scorching flames might receive the dew of refreshment and comfort.” 46 St. Ambrose, writing to one Faustinus, who grieved immoderately for the death of his sister, says: “I do not think your sister ought to excite your tears, but your prayers; nor that her soul is to be dishonoured by weeping, but rather recommended to God by sacrifices.” 47 In his funeral oration on the great Theodosius he prays thus: “Give perfect rest to thy servant Theodosius.” 48 And again: “I loved him; therefore I follow him unto the country of the living. Neither will I forsake him till by tears and prayers I shall bring the man whither his merits call him, unto the holy mountain of the Lord.” 49 He mentions the most solemn obsequies and sacrifices on the thirtieth, sometimes fortieth day; 50 for so long they were continued: but, on third, seventh, and thirtieth days with particular solemnity. 51 St. Gregory the Great mentions that he having ordered thirty masses to be sung for a monk named Justus, on the thirtieth day after the last mass was said Justus appeared to Copiosus his provost, and said: “I was in pain, but now am well.”

It appears from Ven. Bede’s history, and the account of his death, 52 also from a great number of letters of St. Boniface, St. Lullus, 53 and others, how earnest and careful our ancestors were, from their conversion to the faith, in mutually desiring and offering sacrifices and prayers for their deceased brethren, even in distant countries. In the foundations of churches, monasteries, and colleges, in pious instruments of donations, charters, sepulchral monuments, accounts of funerals, or last wills and testaments, as high as any extant, from the time of Constantine the Great, especially from the sixth and seventh ages downwards, 54 mention is usually made of prayer for the dead. In the great provincial council of all the bishops subject to the metropolitical see of Canterbury, held at Cealchythe or Celchythe, by Archbishop Wulfred, in presence of Kenulf, king of Mercia, with his princes and great officers in 816, it was enacted: 55 “As soon as a bishop is dead, let prayers and alms forthwith be offered. At the sounding of a signal in every church throughout our parishes 56 let every congregation of the servants of God meet at the basilic,   and there sing thirty psalms together, for the soul of the deceased. Afterwards let every prelate and abbot sing six hundred psalms, and cause one hundred and twenty masses to be celebrated, and set at liberty three slaves, and give three shillings to every one of them: and let all the servants of God fast one day. And for thirty days after the canonical hours are finished in the assembly, let seven Belts of Pater Nosters 57 also be sung for him. And when this is done let the Obit be renewed on the thirtieth day (i. e. Dirge and mass sung with the utmost solemnity.) And let them act with as much fidelity in this respect in all churches as they do by custom for the faithful of their own family, by praying for them, that by the favour of common intercession, they may deserve to receive the eternal kingdom, which is common to all the saints.” What was here ordered for bishops was customary in each family for their own friends, sacrifices being continued for thirty days: doles distributed, which were alms for the repose of the departed soul; and beadsmen and beadswomen for alms received were obliged to say the beads daily at the tomb of the deceased person; monuments of which are found on many ancient grave-stones, and in the old writings of all our churches, where such things have escaped the injuries of the times. St. Odilo, abbot of Cluni in 998, instituted the Commemoration of all the faithful departed in all the monasteries of his Congregation, on the 1st of November; which was soon adopted by the whole western church. The council of Oxford in 1222, declared it a holiday of the second class, on which certain necessary and important kinds of work were allowed. Some diocesses kept it a holiday of precept till noon: only those of Vienne and Tours and the Order of Cluni the whole day: in most places it is only a day of devotion. 58 The Greeks have long kept on Saturday seven-night before Lent, and on Saturday before Whitsunday the solemn commemoration of all the faithful departed; but offer up mass every Saturday for them. 59

It is certainly a holy and wholesome thought to pray for the dead. 60 Holy and pious because most acceptable to God, to whom no sacrifices are more honourable and pleasing than those of charity and mercy, especially spiritual, and when offered to persons most dear to him. The suffering souls in purgatory are the chosen heirs of heaven, the eternal possession of which kingdom is secured to them, and their names are now written there amongst its glorious princes. God most tenderly loves them, declares them his spouses, enriches them with the precious gifts and ornaments of his grace, and desires to shower down upon them the torrents of his delights, and disclose to them the light of his glory. Only his justice opposes and obliges him to detain them in this distant banishment, and in this place of torments till their debts are discharged to the last farthing. Such is his hatred of the least sin; and such is the opposition which the stain of sin bears to his infinite justice and sanctity. Yet his tender mercy recommends them to the charitable succours which we, as their fellow-members in Christ, have in our power to afford them, and he invites us to appease his anger by interposing our prayers in order to avert from them the weight of his justice. If a compassionate charity towards all who are in any distress, even towards the most flagitious, and those who only labour under temporal miseries and necessities, be a most essential ingredient of a Christian spirit; and that in which the very soul of religion and piety towards God consists: if the least alms given to the poor be highly rewarded by him, will he not exceedingly recompense our charity to his friends and most beloved children, in their extreme necessity? All works of mercy draw down his most abundant graces, and will be richly repaid by Him, who at the last day will adjudge the immortal crowns of his glory to this virtue; but except the leading others to God by our instructions and prayers, what charity, what mercy can we exercise equal to this of succouring the souls in purgatory? A charity not less wholesome and profitable both to them and to ourselves, than pious in itself, and honourable to God. If we consider who they are, and what they suffer, we shall want no other motives to excite us to fervour in it. They are all of them our fellow-members in Jesus Christ. We are united with them by the bands of sincere charity, and by the communion of saints. Every one of them is that brother whom we are bound to love as ourselves. The members of one and the same body conspire mutually to assist one another, as the apostle puts us in mind; so that if one of these members suffers, the others suffer with it; and if one be in honour, the others rejoice with it. If our foot be pricked with a thorn, the whole body suffers with it, and all the other members set themselves at work to relieve it. So ought we in our mystical body. It would be impious and cruel to see a brother in the flames, and not to give him a hand, or afford him some refreshment if we can do it. The dignity of these souls more strongly recommends them to our compassion, and at the same time to our veneration. Though they lie at present at a distance from God, buried in frightful dungeons, under waves of fire, they belong to the happy number of the elect. They are united to God by his grace; they love him above all things, and amidst their torments never cease to bless and praise him, adoring the severity of his justice with perfect resignation and love.

These of whom we speak are not damned souls, enemies of God, separated or alienated from him: but illustrious conquerors of the devil, the world, and hell; holy spirits laden with merits and graces, and bearing the precious badge of their dignity and honour by the nuptial robe of the Lamb with which by an indefeasible right they are clothed. They are the sons of God, heirs of his glory, and saints. Yet they are now in a state of suffering, and endure greater torments, than it is possible for any one to suffer, or for our imagination to represent to itself, in this mortal life. They suffer the privation of God, says the council of Florence, the most dreadful of all torments. No tongue can express what a cruel pain this is to a soul separated from the body, impetuously desiring to attain to God, her centre. She seems just enjoying him, attracted by his infinite charms, and carried towards him by a strong innate bent not to be conceived: yet is violently repelled and held back. Whence the poor soul suffers an incomprehensible agony and torment. It is also the opinion of St. Austin and other learned fathers, founded in the words of St. Paul, and the traditionary authority of eminent prelates of the first ages, that they also suffer a material fire like that of hell, which, being created merely for an instrument of the divine vengeance, and blown up by the anger of God, with the most piercing activity torments even spirits not clothed with bodies, as our souls in this life feel the pain of the corporeal senses by the natural law of their union with our bodies. Though it be no article of faith, that the fire here spoken of is not metaphorical, to express the sharpness of these torments, yet that it is real and material is the most probable opinion, grounded on the most venerable authority. “The same fire torments the damned in hell and the just in purgatory,” says St. Thomas; 61 who adds: 62 “The least pain in purgatory exceeds the greatest in this life.” St. Austin speaks to this point as follows: 63 “It is said, He will be saved, at it were, by fire. Because it is said, He will be saved, that fire is contemned. Yet it will be more grievous than whatever a man can suffer in this life. You know how much wicked men have suffered here, and can suffer. Good men may undergo as much; and what did any malefactor ever endure which martyrs have not suffered for Christ? All these torments are much more tolerable. Yet see how men do all things rather than suffer them. How much more reason have they to do what God commands them, that they may escape his torments!” Venerable Bede says: “Purgatory fire will be more intolerable than all the torments that can be felt or conceived in this life.” Which words are but a repetition of what St. Cæsarius of Arles had written before to this purpose. 64 “A person,” says he, “may say, I am not much concerned how long I remain in purgatory, provided I may come to eternal life. Let no one reason thus. Purgatory fire will be more dreadful than whatever torments can be seen, imagined, or endured in this world. And how does any one know whether he will stay days, months, or years? He who is afraid now to put his finger into the fire, does he not fear lest he be then all buried in torments for a long time? Do we think that God can find torments in nature sufficient to satisfy his provoked vengeance? No, no. He creates new instruments more violent, pains utterly inconceivable to us.” 65 A soul for one venial sin shall suffer more than all the pains of distempers, the most violent colics, gout, and stone joined in complication; more than all the most cruel torments undergone by malefactors, or invented by the most barbarous tyrants; more than all the tortures of the martyrs summed up together. This is the idea which the fathers give us of purgatory. And how long many souls may have to suffer there we know not.

The church approves perpetual anniversaries for the dead; for some souls may be detained in pains to the end of the world, though after the day of judgment no third state will any longer subsist: God may at the end of the world make the torments of souls which have not then satisfied his justice so intense in one moment that their debts may be discharged. For we know that he will exact a satisfaction to the last farthing. How inexorable was he in punishing his most faithful servant Moses for one small offence! 66 How inflexible with regard to David 67 and other penitents! nay, in the person of his own divine Son! 68 This, even in the days of his mercy; but, after death, his justice is all rigour and severity, and can no longer be mitigated by patience. A circumstance which ought particularly to excite our compassion for these suffering souls is, that these holy and illustrious prisoners and debtors to the divine justice, being no longer in the state of meriting, are not able in the least to assist themselves. A sick man afflicted in all his limbs, and a beggar in the most painful and destitute condition has a tongue left to ask relief; the very sight of his sufferings cannot fail exciting others to pity, comfort, and succour him. At least he can implore heaven: it is never deaf to his prayers. But these souls have no resource but that of patience, resignation, and hope. God answers their moans, that his justice must be satisfied to the last farthing, and that their night is come in which no man can work. 69 But they address themselves to us, and not having a voice to be heard, they borrow that of the church and its preachers, who, to express their moans, and excite our compassion, cry out to us for them in the words of Job: Have pity upon me, have pity upon me, at least you my friends; for the hand of God hath smitten me. 70 Gerson, the pious and learned chancellor of Paris, represents them crying out to us as follows: 71 “Pray for us, Because we are unable to help ourselves. You who can do it, lend us your assistance. You who have known us on earth, you who have loved us, will you now forget and neglect us? It is commonly said, that a friend is tried in the day of need. What necessity can be equal to ours? Let it move your compassion. A hard heart shall fare ill at the last day. 72 Be moved by your own advantage,” &c.

Did we behold those dungeons open under our feet, or had we a view of the torments which these souls endure, how would this spectacle affect us! How would their pains alone speak to us more pathetically than any words! How would our eyes stream with tears, and our bowels be moved, to behold innumerable holy and illustrious servants of God, and our brethren in Christ, suffering “by wonderful, but real ways,” 73 more than our imagination can represent to itself! Here perhaps lies a parent, a brother, a bosom-friend and companion. For if we may be permitted to dive into the secrets of the divine judgments, we shall be persuaded that the number is very small of those that departing this life pass immediately to   glory without having some satisfaction to make, some debt to cancel. Who can flatter himself that his soul is so pure before God, as to have no unperceived irregular attachment or affection, no stain which he has not perfectly washed away? How rare is the grace for a soul to leave this infected region without the least spot: the judgments of God are hidden and unsearchable: but their very inscrutability makes us tremble. For we know that he will judge justices, and woe even to the commendable life of man if it be discussed according to the rigour of justice, as St. Austin says. Does not St. Peter assure us, that the just man himself will scarce be saved? If then we have lost any dear friends in Christ, whilst we confide in his mercy, and rejoice in their passage from the region of death to that of life, light, and eternal joy, we have reason to fear some lesser stains may retard their bliss. In this uncertainty why do not we earnestly recommend them to the divine clemency? Why do not we say with St. Ambrose in his funeral discourse on Valentinian the Younger, who was murdered in 392, at twenty years of age, whilst a Catechumen: 74 “Give the holy mysteries to the dead. Let us, with pious earnestness, beg repose for his soul. Lift up your hands with me, O people, that at least by this duty we may make some return for his benefits.” Afterwards joining with this emperor his brother Gratian who was dead before him in 383, he says: 75 “Both blessed, if my prayers can be of any force! No day shall pass you over in silence: no prayer of mine shall ever be closed without remembering you. No night shall pass you over without some vows of my supplications. You shall have a share in all my sacrifices. If I forget you let my own right hand be forgotten.” With the like earnestness this father offered the holy sacrifice for his brother Satyrus. 76 Perhaps the souls of some dear friends may be suffering on your account; perhaps for their fondness for us, or for sins of which we were the occasion by scandal, provocation, or otherwise; in which cases motives not only of charity, but also of justice call upon us to endeavour to procure them all the relief in our power.

 

If other motives have less weight with us, we certainly cannot be insensible to that of our own interest. What a comfort shall we find to eternity in the happy company of souls whose enjoyment of bliss we shall have contributed to hasten! What an honour to have ever been able to serve such holy and glorious saints! With what gratitude and earnestness will they repay the favour by their supplications for us, whilst we still labour amidst the dangers and conflicts of this world! When Joseph foretold Pharaoh’s chief butler the recovery of his dignity, he said to him: Remember me, when it shall be well with thee; and mention me to Pharaoh, that he may bring me out of this place. 77 Yet he remembered not Joseph, but forgot his fellow-sufferer and benefactor. Not so these pious souls, as St. Bernard observes: 78 only the wicked and depraved, who aro strangers to all feelings of virtue, can be ungrateful. This vice is far from the breasts of saints, who are all goodness and charity. Souls delivered and brought to glory by our endeavours will amply repay our kindness by obtaining divine graces for us. God himself will be inclined by our charity to show us also mercy, and to shower down upon us his most precious favours. Blessed are the merciful, for they shall obtain mercy. 79 By having shown this mercy to the suffering souls in purgatory, we shall be particularly entitled to be treated with mercy at our departure hence, and to share more abundantly in the general suffrages of the church, continually offered for all that have slept in Christ. The principal means by which we obtain relief for the suffering souls in purgatory are sacrifice, prayer, and almsdeeds. The unbloody sacrifice has always been offered for the faithful departed no less than for the living. 80 “It was not in vain,” says St. Chrysostom, 81 “that the apostles ordained a commemoration of the deceased in the holy and tremendous mysteries. They were sensible of the benefit and advantage which accrue to them from this practice. For, when the congregation stands with open arms as well as the priests, and the tremendous sacrifice is before them, how should our prayers for them not appease God? But this is said of such as have departed in faith.”

Note 1. See the Council of Trent, Sess. 25. Pope Pius IV’s Creed, Bossuet’s Exposition, and Catch. of Montp. [back]Note 2. Deacon, Tr. on Purgatory. [back]

Note 3. 2 Kings, or Samuel, xiv. 10 and 13, ib. xxiv. [back]

Note 4. Num. xiv. 20. [back]

Note 5. Num. xx. 24, Deut. xxxii. 51. [back]

Note 6. 3 Kings (or 1 Kings) xiii. [back]

Note 7. Prov. xiv. 16. James iii. 2. Matt. xii. 36. Matt. vi. 12. [back]

Note 8. Apoc. xxi. 27. [back]

Note 9. Prov. xxiv. 16. [back]

Note 10. Psalm cxliii. 2. [back]

Note 11. Matt. xii. 32, S. Aug. l. 21, de Civ. Dei, c. 13. [back]

Note 12. Matt. v. 27. [back]

Note 13. 1 Cor. iii. 13. On these texts see the Catechism of Montpellier, t. 2, p. 342, ed Latinæ. [back]

Note 14. 1 Cor. xv. 29. Ecclus. vii. 37. [back]

Note 15. 2 Mac. xii. 43, 46. [back]

Note 16. Dr. Jer. Taylor, Lib. of Proph., l. 1, sect. 20, n. 11, p. 345. [back]

Note 17. Beausobre, in his History of Manicheism, (l. 9, c. 3, not.) pretends that St. Cyril of Jerusalem had altered the liturgy on this article: but he is solidly refuted by the learned Henry a Porta, professor at Pavis, Append. ad traclat. de Purgat. Mediolani, 1758. [back]

Note 18. Catech. 19, n. 9, p. 328, ed. Ben. [back]

Note 19. See the notes of the Benedictins, ibid. [back]

Note 20. L. 4. adversus Gentes. [back]

Note 21. Constit. Apost. l. 8, c. 13. [back]

Note 22. See Le Brun, Litur. [back]

Note 23. L. de Cor. c. 3. [back]

Note 24. L. de Monog. c. 10. [back]

Note 25. Ep. 1, Ed. Oxon. See Fleury, t. 2, p. 273. [back]

Note 26. Ep. Cypr. ep. ad Antonian. Pam. et Baluzio 52, Fello 55. [back]

Note 27. De Sacerd. l. 6, p. 424, ed. Montfaucon. [back]

Note 28. Hom. 51, in 1 Cor. t. 10, p. 393. [back]

Note 29. Du Pin, Cent. 3, ed. Angl. S. Chrys. hom. 3, in Phil. t. 11, p. 217, ed Mont. [back]

Note 30. Just Weights and Measures, c. 16, p. 106. [back]

Note 31. Strom. l. 7, p. 794, 865. [back]

Note 32. See S. Aug. Serm. 280, p. 1134, her Life, 7 March, and Orsi Diss. de Actis SS. Perpet. et Felicit. [back]

Note 33. l. 5, contra Cels. p. 242, Hom. 28, in Num. Hom. 6 et 8, in Exod. &c. [back]

Note 34. Lactant. l. 7, Instit. c. 21. [back]

Note 35. S. Aug. in Ps. 37, n. 3, p. 295. [back]

Note 36. Enchir. c. 110, De Civ. Dei, l. 21, c. 24, l. de Curâ pro Mortuis, c. 4, et serm. 182, (ol. 32.) de verb, ap., where he says that prayer for the dead in the holy mysteries was observed by the whole church. [back]

Note 37. Serm. 182 (ol. 32) de verb. ap. t. 5, p. 827, et 1, de Curâ pro Mortuis, c. 1, et 18. [back]

Note 38. Serm. 159, fol. 17, de verb. ap. n. 1, t. 5, p. 765, ed. Ben. Serm. 284, p. 1143. [back]

Note 39. S. Aug. l. de hæres, c. 53. [back]

Note 40. S. Epiph. hær. 75, n. 3. [back]

Note 41. Conf. l. 9, c. 13, n. 36, &c. [back]

Note 42. T. 2. ed. Vatic., p. 230, 236. [back]

Note 43. S. Athan. Apol. ad Constant., t. 1, p. 300. [back]

Note 44. De Vitâ Const, l. 4, c. 60, p. 556. et c. 70, p. 562. [back]

Note 45. De Vitâ Const. l. 4, c. 71, p. 562. [back]

Note 46. S. Paulin. ep. 35, ad Delfin. p. 223, ep. 36, ad Amand. p. 224, &c. [back]

Note 47. S. Ambr. ep. 39, ad Faustin. t. 2, p. 944, ed Ben. [back]

Note 48. “Da requiem perfectam servo tuo Theodosio, requiem illam quam præparasti sanctis tuis.” n. 36, t. 2, p. 1207, ed. Ben. [back]

Note 49. “Dilexi, et ideo prosequor illum usque ad regionem vivorum; nec deseram donec fletu et precibus inducam virum quo sua merita vocant, in montem Domini sanctum.” ib. n. 37, p. 1208. See also his funeral oration on Valentinian, page 1193, t. 2. [back]

Note 50. S. Ambr. de Obitu Theodosii, n. 3, p. 1197, t. 2. [back]

Note 51. See Gavant, Comm. in Missal, par. 4, tit. 18, p. 275. Mention is made of these days, after the person’s death, by the Apost. Constit. l. 8, c. 42. Palladius in Lausiac. c. 26, &c. See on them Cotelier, not. in Constit. Apost. ib., and especially Dom Menard. in Concor. Regular, and in Sacram. S. Greg. [back]

Note 52. Dial. l. 4, c. 55, t. 2, p. 466. [back]

Note 53. See their lives. [back]

Note 54. See Fontanini, De Vindiciis Veterum Codicum; Miræus, Donat. Belg. and other Diplomatics, &c. [back]

Note 55. C. 10, ap. Spelman, Conc. Brit. vol. 1, p. 327, Johnson’s English Eccl. Laws and Canons, vol. 1, ad an. 816, Conc. Labbe, t. 7, p. 1489. [back]

Note 56. The first signals used in churches were a board or iron plate with holes, to be knocked with a hammer, &c., which is retained still among the Greeks, and in the latter part of Holy Week among the Latins. Bells were used in England before this time, (as appears from Bede, Hist. l. 4, c. 23, ad an. 680,) but not universally. [back]

Note 57. Beltidum Pater Noster. Belts of prayers mean, a certain number of studs fastened in belts or girdles like the strings of beads that are now in use. See Sir Henry Spelman’s Glossary, v. Beltis ed. novissimæ. [back]

Note 58. The Dies Iræ is ascribed by Bzovius (ad an. 1294) to cardinal Ursini or Frangipani: by others to Humbert, fifth general of the Dominicans, &c. The true author was probably some contemplative who desired to be unknown to the world. Mr. Crashaw, says Wharton, (Essay on Pope, p. 87,) has translated this piece very well, with a true poetical genius and fire; to which translation Lord Roscommon is much indebted, in his admired poem On the Day of Judgment. [back]

Note 59. Leo Allat. de Dom. p. 1462. Thomassin, Tr. des Fêtes, et Bened. XIV. De Festis SS. in Diœcesi Bononiensi. [back]

Note 60. 2 Mach. xii. 60. [back]

Note 61. S. Tho. Suppl. qu. 100, a. 2. [back]

Note 62. Ibid, n. 3. [back]

Note 63. S. Aug. in Ps. 37, t. 4, p. 295. [back]

Note 64. S. Cæsar. Hom. 1, p. 5, vel in app. Op. S. Aug. t. 5. [back]

Note 65. See Bourdaloue, Loriot, Le Rue, &c. [back]

Note 66. Deut. iii. 24, 25. [back]

Note 67. 2 Kings (Samuel) xxiv. 15. [back]

Note 68. Matt. xxvi. 36. [back]

Note 69. John ix. 4. [back]

Note 70. Job xix. 21. [back]

Note 71. Gerson, t. 3, p. 193. [back]

Note 72. Ecclus. iii. 26. [back]

Note 73. S. Aug. de Civ. 1. xxi. [back]

Note 74. S. Ambr. De Obitu Valent. n. 56, t. 2, p. 1189, ed. Bened. [back]

Note 75. S. Ambr. De Obitu Valent. n. 78, p. 1194. [back]

Note 76. De excessu fratris Satyri, n. 80. p. 1135. [back]

Note 77. Gen. xl. 11. [back]

Note 78. Serm. 5, in Fest. Omn. Sanct. n. 11. [back]

Note 79. Matt. v. 7. [back]

Note 80. See Card. Bona, Liturg. l. 2, c. 14. Le Brun, sur les Liturgies des quartres premiers siècles, t. 2, pp. 40, 41, 330, 364, 408, &c. [backNote 81. Hom. 3, in Phil. t. 11, p. 217. ed. Montfauc. [back]

Rev. Alban Butler (1711–73).  Volume XI: November. The Lives of the Saints.  1866.

SOURCE : http://www.bartleby.com/210/11/021.html

Andrea da Firenze, Ecclesia mllitans, Ecclesia poenitens et Ecclesia triumphans,

 affresco, 1365,  Basilica di Santa Maria Novella

Andrea da FirenzeThe Church Militant and the Church Triumphant,

 fresque, 1365, Santa Maria Novella

The Way of Salvation fresco is in the Spanish Chapel (Cappella Spagnuolo, or Guidalotti Chapel, after the patron) of the Spanish chapel.The black-cloaked figures are Dominican priests (the Blackfriars, the Order of Preachers, O.P.), and the black-and-white dogs are their symbol. (Founded by St. Dominic to preach against heresies, they were referred to as "domini canes", hounds of God.)

In the left foreground there is a group of about five dozen figures representing Christendom, and illustrating the religious and secular hierarchies. At the center are pope and emperor, and at their feet are black-and-white dogs protecting the sheep. The secular figures range from the emperor down to beggars and cripples. Behind them is the great Florentine Duomo, representing the Church. In the right foreground are three Dominican saints. (Their identification varies among sources.) St. Peter Martyr sends the dogs to round up lost sheep and fight off wolves.St. Dominic preaches to the people while St. Thomas debates heretics.

Behind the preachers, in the right middleground, there is a group of worldly pleasure-seekers (above Thomas and the heretics) and two more Dominican figures (above St. Peter and St. Dominic). The faithful are being blessed and ushered to the gate of Heaven, where St. Peter welcomes them. Above all is a scene of Christ in Majesty, with theemblems of the Evangelists. The overall composition, with the heretics on the right and faithful on the left, echoes many more conventional Judgment scenes



Commemorazione di tutti i fedeli defunti


La pietas verso i morti risale agli albori dell’umanità. In epoca cristiana, fin dall’epoca delle catacombe l’arte funeraria nutriva la speranza dei fedeli. A Roma, con toccante semplicità, i cristiani erano soliti rappresentare sulla parete del loculo in cui era deposto un loro congiunto la figura di Lazzaro. Quasi a significare: Come Gesù ha pianto per l’amico Lazzaro e lo ha fatto ritornare in vita, così farà anche per questo suo discepolo! La commemorazione liturgica di tutti i fedeli defunti, invece, prende forma nel IX secolo in ambiente monastico. La speranza cristiana trova fondamento nella Bibbia, nella invincibile bontà e misericordia di Dio. «Io so che il mio redentore è vivo e che, ultimo, si ergerà sulla polvere!», esclama Giobbe nel mezzo della sua tormentata vicenda. Non è dunque la dissoluzione nella polvere il destino finale dell’uomo, bensì, attraversata la tenebra della morte, la visione di Dio. Il tema è ripreso con potenza espressiva dall’apostolo Paolo che colloca la morte-resurrezione di Gesù in una successione non disgiungibile. I discepoli sono chiamati alla medesima esperienza, anzi tutta la loro esistenza reca le stigmate del mistero pasquale, è guidata dallo Spirito del Risorto. Per questo i fedeli pregano per i loro cari defunti e confidano nella loro intercessione. Nutrono infine la speranza di raggiungerli in cielo per unirsi gli eletti nella lode della gloria di Dio.

Martirologio Romano: Commemorazione di tutti i fedeli defunti, nella quale la santa Madre Chiesa, già sollecita nel celebrare con le dovute lodi tutti i suoi figli che si allietano in cielo, si dà cura di intercedere presso Dio per le anime di tutti coloro che ci hanno preceduti nel segno della fede e si sono addormentati nella speranza della resurrezione e per tutti coloro di cui, dall’inizio del mondo, solo Dio ha conosciuto la fede, perché purificati da ogni macchia di peccato, entrati nella comunione della vita celeste, godano della visione della beatitudine eterna. 

L’origine storica della festa  

La commemorazione liturgica dei fedeli defunti appare già nel secolo IX, in continuità con l’uso monastico del secolo VII di consacrare un giorno completo alla preghiera per tutti i defunti. Amalario Fortunato di Metz (770-850c), vescovo di Treveri (809), poneva già la memoria di tutti i defunti successivamente a quelli dei Santi che erano già in cielo.  La festività, però, venne celebrata per la prima volta nel cristianesimo nel 998, per disposizione di Odilone di Mercoeur, abate di Cluny, che ordinò a tutti i monaci del suo Ordine cluniacense di fissare il 2 novembre come giorno solenne per la “Commemorazione dei defunti”. 

Dal biografo del santo Odilone, san Pier Damiani, si conosce il decreto circa la data del 2 novembre come giorno per la Commemorazione di tutti i defunti dopo la festa di Tutti i Santi, del 1 novembre: “Venerabilis Pater Odilo per omnia Monasteria sua constituit generale decretum, ut sicut prima die Novembris iusta universalis Ecclesiae regulam omnium Sanctorum solemnis agitur, ita sequenti die in Psalmis, eleemosynis e paecipue Missarum solemnis, omnium in Christo quiescentium memoria celebratur” (in Jean Croiset, Esercizi di pietà per tutti i giorni dell’anno, Venezia 1773, 35-36). Il venerabile Padre Odilone emanò, nel 998, per tutti i suoi monasteri cluniacensi un decreto generale, affinché, come il primo di novembre secondo la chiesa universale si celebra la festa di tutti i Santi, così nel giorno seguente si celebri la solenne Messa per tutti i defunti in Cristo con salmi elemosine e canti.  

A partire, poi, dal XIII secolo, con il nome di “Anniversarium Omnium Animarum”, la festa era ormai riconosciuta da tutta la Chiesa Occidentale, apparendo per la prima volta in veste ufficiale nell’Ordo Romanus XIV, composto dal cardinale diacono Napoleone Orsini (1260-1342) e dal cardinale Giacomo Caetani Stefaneschi (1270-1343), poco prima del trasferimento della sede pontificia in Avignone (1309-1377), dove venne ampliato nel 1311, per ordine del papa Clemente V (1305-1314).

Antropologia cristiana

Nel grande mistero dell’esistenza terrena, solo l’uomo gode della libertà ed è responsabile delle sue azioni, perché solo lui è ritenuto artefice del suo destino, che si proietta in una vita trascendente. Ora, non tutte le concezioni antropologiche, che la storia registra, riconoscono l’esistenza di un Dio che, oltre a essere Creatore, sia, nello stesso tempo, anche Giudice. Di conseguenza, l’esistenza di vita ultraterrena, dopo la morte, non da tutte le antropologie viene considerata, perché concepiscono la vita perfetta ed esauriente in sé stessa, cioè “dalla culla alla tomba”, oppure ammettono la sua ciclicità con una nuova reincarnazione.

Nell’antropologia cristiana, invece, si afferma l’esistenza di un Dio Buono, che ha creato tutto ciò che esiste e lo mantiene in essere con la sua Provvidenza. All’uomo, fatto a immagine e somiglianza di Cristo, affida il compito non solo di governare il mondo creato per la sua conservazione, e gli concede anche il diritto di usarlo per il suo bene personale e per il bene di tutti gli uomini. E di questo delicato compito “amministrativo” è responsabile e dovrà rendere conto al suo Creatore, che, dopo la morte, sarà anche il suo giusto Giudice. Così, al termine della vita terrena, ogni creatura razionale libera e responsabile riceverà dal suo Signore una valutazione del suo operato per ratificare la dovuta ricompensa circa le opere compiute sia in bene che in male, per entrare o nella beatitudine eterna o nell’eterno tormento.

Di questo speciale rendiconto, la teologia cristiana ne distingue due: uno particolare e uno universale. Il primo viene emesso, dopo la morte, per ciascun individuo; l’altro, alla fine del tempo e riguarda tutti gli uomini. Non bisogna pensare al giudizio di Dio come una procedura giudiziale, ma come la normale attività con cui egli realizza il suo disegno generale, che si sviluppa in chiave di relazione personale: Dio invita e l’uomo risponde. Dal tipo di risposta, se di accettazione libera o di libero rifiuto, anche le conseguenze saranno diverse. Il giudizio di Dio assegna a ciascuno la giusta ricompensa: per quelli che muoiono in Cristo, sarà una perfetta ratifica del proprio operato svolto nel corso della vita; per quelli che muoiono lontano da Cristo, invece, una giusta riprovazione che li condannerà a restare soli con sé stessi nelle tenebre misteriose dell’al di là.

Alcune considerazioni teologiche

Al di là dell’occasione storica e dell’accenno antropologico generale, è importante riflettere sul valore profondamente teologico che sottende la Commemorazione di tutti i defunti, perché richiama all’attenzione tutto il mistero dell’esistenza umana dalle sue origini alla sua fine, coinvolgendo direttamente sia la causa efficiente o creativa sia la causa finale o del giudizio ultimo. Per questo veloce riferimento dottrinale, che coinvolge la fede, la cosa migliore è ascoltare il pensiero ufficiale della Chiesa, espresso chiaramente e sinteticamente in alcuni documenti conciliari del Vaticano II, con il dovuto confronto al dato rivelato.

- Comunione dei santi

Al capitolo VII della costituzione dogmatica Lumen Gentium si parla di tre stadi ecclesiali del Corpo Mistico: “Fino a che, dunque, il Signore non verrà nella sua gloria, alcuni dei suoi discepoli saranno pellegrini sulla terra, altri passati da questa vita, stanno purificandosi, e altri godono della gloria contemplando chiaramente Dio uno e trino, Quale Egli è; tutti però, sebbene in grado e modo diverso, comunichiamo alla stessa carità di Dio e del prossimo e cantiamo al nostro Dio lo stesso inno di gloria” (LG 49). 

Si afferma anche la realtà della Comunione dei Santi e della loro intercessione a favore di quanti sono ancora pellegrini sulla terra: “Tutti, infatti, quelli che sono di Cristo, avendo lo Spirito Santo, formano una sola Chiesa e sono tra loro uniti in Lui (Ef 4,16). L’unione quindi dei pellegrini sulla terra con i fratelli morti nella pace di Cristo, non è minimamente spezzata, anzi, secondo la perenne fede della Chiesa, è consolidata dalla comunicazione dei beni spirituali…offrendo i meriti acquistati sulla terra mediante cristo Gesù, unico mediatore tra Dio egli uomini” (LG 49). 

 E afferma, inoltre, la relazione della Chiesa pellegrinante con la Chiesa celeste: “La Chiesa dei pellegrini sulla terra, riconoscendo benissimo questa comunione con il Corpo Mistico di Gesù Cristo, fino dai primi tempi della religione cristiana, coltivò con grande pietà la memoria dei defunti, e, ‘poiché santo e salutare è il pensiero di pregare per i defunti perché siano assolti dai peccati’ (2Mac 12, 46), ha offerto per loro anche suffragi” (LG 51).

Fondamentale, per comprendere e vivere la Commemorazione dei defunti, è il mistero della Comunione di tutti i membri della Chiesa in Cristo, che non viene interrotta dalla morte, “anzi, secondo la fede, è consolidata dalla comunicazione dei beni spirituali”, come l’Apocalisse di Giovanni conferma con la la liturgia celeste, dove partecipano le anime dei beati, e con la stessa liturgia terrena che, soprattutto con il sacrificio eucaristico, si unisce al culto della Chiesa celeste insieme alla venerazione della gloriosa Vergine Maria, degli beati apostoli, dei martiri e di tutti i santi (specialmente i capitoli  4 e 5).

L’unione della liturgia celeste e terrena attorno all’Agnello che sta in piedi, come immolato (Ap 5, 6), cioè “Cristo Gesù, che è morto e   risorto, e sta alla destra di Dio e intercede per noi” (Rm 8, 34; Eb 7, 25), è la condizione indispensabile per ogni forma di comunione, nella carità, tra i vari membri dei diversi gradi della Chiesa. Per cui, secondo la fede della Chiesa, i beati pregano per noi sulla terra e intercedono per la nostra debolezza, e ogni nostra invocazione a loro è un riconoscimento di Dio, per mezzo di Cristo Gesù, che è l’unico Mediatore e Redentore.

E per quanto riguarda le anime dei defunti, che dopo la morte hanno bisogno ancora di purificazione, la Chiesa da sempre “ha offerto per loro anche i suoi suffragi” (GS 41); e crede, che per questa purificazione “riceveranno un sollievo [...], mediante suffragi dei fedeli viventi, come il sacrificio della messa, le preghiere, le elemosine e le altre pratiche di pietà, che i fedeli sono soliti offrire per gli altri fedeli, secondo le disposizioni della Chiesa” (LG 50).

Anche i Princìpi e norme per l’uso del Messale romano spiegano abbastanza chiaramente il senso di questo “consorzio vitale” tra i membri della Chiesa, che raggiunge il culmine della perfezione nella celebrazione eucaristica, al momento delle intercessioni, che così si esprime: “l’eucaristia viene celebrata in comunione con tutta la Chiesa, sia celeste sia terrestre, e che l’offerta è fatta per essa e per tutti i suoi membri, vivi e defunti, i quali sono stati chiamati a partecipare alla redenzione e alla salvezza acquistata per mezzo del corpo e del sangue di Cristo” (n. 79).

- Significato della morte cristiana

La concezione antropologica cristiana offre un modo tutto suo di considerare il fatto ineluttabile della morte. La morte considerata in sé stessa non è qualcosa di desiderabile, né un avvenimento che si possa abbracciare con animo tranquillo, senza superare la naturale ripugnanza. Nella visione cristiana, la morte, pur essendo un fatto di diritto naturale, come ricorda Duns Scoto, è contro la volontà di Dio (Sap 1, 13-14; 2, 23-24) e, quindi una conseguenza del peccato: “il salario del peccato è la morte” (Rm 6, 23). La morte allora si può considerare come fatto morale, come ricorda Paolo, e come necessità naturale come afferma il Cantore dell’Immacolata.

Il cristiano può superare il timore della morte, appoggiandosi su altri motivi, come la fede e la speranza, che aprono un diverso orizzonte alla stessa morte. La morte accettata con fede e nella fede di “abitare presso il Signore” (2Cor 5, 8) realizza il desiderio di comunione con Cristo, e giunge anche a lodare il Signore per la morte, non in sé stessa, ma in quanto realizza la speranza di possedere il Signore. Tale sembra la concezione cantata da Francesco d’Assisi nel famoso Cantico delle creature. La morte allora diventa, per il credente, come la porta che conduce alla comunione con Cristo. 

 Questo sentimento positivo della morte è direttamente proporzionato   alla “morte nel Signore”, che conduce alla beatitudine: “beati i morti nel Signore” (Ap 14, 13). In questo modo, la vita terrena è naturalmente ordinata alla comunione con Cristo, dopo la morte, che è un valore superiore alla vita terrena. Superiorità che giustifica il desiderio mistico della morte, che apre la via alla vita eterna. Questo modo di concepire la morte diventa una partecipazione al mistero pasquale di Cristo, di cui il battesimo, nel quale si muore misticamente al peccato, partecipa della risurrezione di Cristo (Rm 6, 3-7), e l’Eucaristia ne è la garanzia, il fondamento e anche la perfezione: fundamentum et forma, direbbe il Cantore dell’Immacolata. 

Oltre alla “morte nel Signore”, c’è anche la possibilità della morte fuori del Signore, che conduce alla morte seconda come ricorda l’Apocalisse (20, 14) e anche il Cantico delle creature. In questa seconda accezione della morte, la forza del peccato, attraverso il quale la morte entrò nel mondo (Rm 5,12), manifesta, in grado sommo, la sua capacità di separare da Dio.

- L’uomo è per la risurrezione

Anche dal concilio Vaticano II si apprende che l’uomo è per la risurrezione. Afferma: “Unità di anima e di corpo, l’uomo sintetizza in sé, per la stessa sua condizione corporale, gli elementi del mondo materiale, così che questi attraverso di lui toccano il loro vertice e prendono voce per lodare in libertà il Creatore. [...] L’uomo, però, non sbaglia a riconoscersi superiore alle cose corporali e a considerarsi più che soltanto una particella della natura o un elemento anonimo della città umana. Difatti, nella sua interiorità, egli trascende l’universo: a questa profonda interiorità egli torna, quando si volge al cuore, là dove lo aspetta Dio, che scruta i cuori, là dove sotto lo sguardo di Dio decide del suo destino. Perciò riconoscendo di avere un’anima spirituale e immortale, non si lascia illudere da fallaci finzioni che fluiscono unicamente dalle condizioni fisiche e sociali, ma, invece, va a toccare in profondità la verità stessa delle cose” (GS 14).

L’autoconsapevolezza dell’uomo di essere superiore a tutte le altre creature terrene ha il fondamento nella sua capacità di possedere Dio (capax Dei) sia con la conoscenza e soprattutto con l’amore. Questa differenza fondamentale si manifesta anche nella tendenza innata alla felicità, la quale fa sì che l’uomo aborrisca e respinga l’idea di un suo totale annientamento con la morte, anelando a una vita ultraterrena comunque intesa, dal momento che la sua anima, immortale e spirituale, tende naturalmente verso la sua origine, cioè verso il suo Creatore.

Questo riferimento antropologico fondamentale rende possibile anche una escatologia. Difatti, la realtà dell’uomo, nell’antropologia cristiana, include una dualità di elementi (corpo e anima), che si possono separare temporaneamente con la morte, tanto che l’anima può sussistere separata, conservando sempre la sua intima e profonda tendenza a riunirsi al suo corpo.  E questo perché lo stato di sopravvivenza dell’anima, dopo la morte, non è definitivo né ontologicamente ultimo, bensì intermedio transitorio e ordinato alla risurrezione.

Un cenno a questa interpretazione duale dell’uomo aperto alla risurrezione lo si trova nel logion evangelico: “non abbiate paura di quelli che uccidono il corpo, ma non hanno il potere di uccidere l’anima; temete piuttosto colui che ha il potere di far perire e l’anima e il corpo nella Geenna” (Mt 10,28). Esso, infatti, insegna che l’anima sopravviva dopo la morte terrena, finché nella risurrezione si unisca, di nuovo, al suo corpo.  

 Anche nel VT si trovano affermazioni che inducono a questa interpretazione. Si pensi, per esempio, al secondo libro dei Maccabei, al capitolo settimo presenta il martirio per la verità come l’occasione privilegiata, perché la fede possa illuminare sia il mistero delle origini o creazione e sia il mistero della fine o vita eterna (2Mac 7, 9-36); e al libro della Sapienza che parla di quelli che “agli occhi degli stolti parve che morissero; e la loro fine fu ritenuta una sciagura” (Sap 3, 2), mentre “le anime dei giusti sono nelle mani di Dio” (Sap 3, 1). In breve, questi cenni biblici aiutano a comprendere con chiarezza e sicurezza di fede che il Signore ha il potere di attuare la risurrezione degli uomini.

- La risurrezione di Cristo e quella dell’uomo

L’apostolo Paolo scriveva ai corinzi: “Vi ho trasmesso dunque, anzitutto, quello che anch’io ho ricevuto: che cioè Cristo morì per i nostri peccati secondo le Scritture, fu sepolto ed è risuscitato il terzo giorno secondo le Scritture” (1Cor 15,3-4). Ebbene Cristo non solo risuscitò di fatto, ma egli è “la risurrezione e la vita” (Gv 11,25) ed è anche la speranza della nostra risurrezione. Perciò i cristiani di oggi, come quelli dei tempi passati, nel Credo niceno-costantinopolitano, nella stessa formula “dell’immortale tradizione della santa Chiesa di Dio”, nella quale professano la fede in Gesù Cristo, che “risuscitò il terzo giorno secondo le Scritture”, aggiungono: “Aspettiamo la risurrezione dei morti”. In questa professione di fede riecheggiano le testimonianze del Nuovo Testamento: “Risusciteranno i morti in Cristo” (1Ts 4,16). “Cristo è risuscitato dai morti, primizia di coloro che sono morti” (1Cor 15,20). Questo modo di parlare implica che il fatto della risurrezione di Cristo non è un qualcosa di chiuso in sé stesso, ma si estenderà un giorno a quelli che sono di Cristo. Poiché la nostra risurrezione futura è “l’estensione della medesima risurrezione di Cristo agli uomini”, s’intende bene che la risurrezione del Signore è modello della nostra risurrezione. La risurrezione di Cristo è pure la causa della nostra risurrezione futura, “poiché, se a causa di un uomo venne la morte, a causa di un uomo verrà anche la risurrezione dei morti” (1Cor 15,21).

- Comunione con Cristo dopo la morte 

Dalla promessa fatta da Gesù crocifisso al buon ladrone si ricava l’esistenza di un certo stadio intermedio tra la morte e la risurrezione, insieme all’essere in comunione con lo stesso Cristo: “In verità ti dico: oggi sarai con me in paradiso” (Lc 23,43). Gesù vuole accogliere il “buon ladrone” in comunione con sé, immediatamente dopo la morte. Lo stesso Stefano, durante la lapidazione, manifesta la medesima speranza di entrare in comunione con Cristo: “Signore Gesù, accogli il mio spirito” (At 7,59), con il desiderio di essere accolto immediatamente da Gesù nella sua comunione. 

 L’esistenza di uno stato intermedio è presente anche in Paolo, specialmente quando scrive: “Per me il vivere è Cristo e il morire un guadagno. Ma se il vivere nel corpo significa lavorare con frutto, non so davvero che cosa debba scegliere. Sono messo alle strette, infatti, tra queste due cose: da una parte il desiderio di essere sciolto dal corpo per essere con Cristo, il che sarebbe assai meglio; d’altra parte, è più necessario per voi che io rimanga nella carne” (Fil 1, 21-24). 

 Lo stato dopo la morte è desiderabile soltanto perché implica unione e comunione con Cristo. Paolo con grande gioia parla della speranza della parusia del Signore: “il quale trasfigurerà il nostro misero corpo per conformarlo al suo corpo glorioso” (Fil 3,21). Lo stato intermedio, perciò, viene concepito come transitorio, con la speranza sempre della risurrezione: “È necessario che questo essere corruttibile [cioè il corpo] si vesta d’incorruttibilità e questo corpo mortale si vesta d’immortalità” (1Cor 15,53).

- Quando avverrà il giudizio?

È una domanda abbastanza frequente. E Gesù spesso ammonisce: “Vegliate, perché non sapete né il giorno né l’ora” (Mt 25,13); “Il Figlio dell’uomo verrà nella gloria del Padre suo, con i suoi angeli, e renderà a ciascuno secondo le sue azioni” (Mt 16, 27).  

Venuta gloriosa di Gesù e Giudizio universale saranno un solo e stesso avvenimento, ultima sequenza della storia, ultimo atto della vittoria di Cristo sul peccato e sulla morte, compimento della liberazione umana, della divinizzazione umana.

Il principio della retribuzione divina è presente abbastanza chiaramente in Paolo: “Il giusto giudizio di Dio, il quale renderà a ciascuno secondo le sue opere: la vita eterna a coloro che perseverando nelle opere di bene cercano gloria, onore e incorruttibilità; sdegno ed ira contro coloro che per ribellione resistono alla verità e obbediscono all’ingiustizia” (Rm 2, 6-8); “tutti dobbiamo comparire davanti al tribunale di Cristo, ciascuno per ricevere la ricompensa delle opere compiute finché era nel corpo, sia in bene che in male” (2 Cor 5,10).

- Il giudice dei vivi e dei morti

Pietro proclama a Cesarea: “Essi lo uccisero appendendolo a una croce, ma Dio lo ha risuscitato al terzo giorno... E ci ha ordinato di annunziare al popolo e d’attestare che egli è il giudice dei vivi e dei morti costituito da Dio” (At 10, 39-42).

L’espressione “dei vivi e dei morti” richiama la teoria dei Sadducei, che, negando la risurrezione, divideva l’umanità in due categorie: al di qua della morte, i vivi, e al di là, i morti. Gesù, invece, replica: “Quanto alla risurrezione dei morti, non avete letto quello che vi è stato detto da Dio: Io sono il Dio d’Abramo, il Dio d’ Isacco e il Dio di Giacobbe? Ora, non è Dio dei morti, ma dei vivi” (Mt 22,32). Pertanto, Abramo, Isacco, Giacobbe e tutti i defunti nel Signore non sono dei morti, ma dei vivi; solo che la vita è diversa. In questo senso, Gesù nega che si possa fare distinzione fra morti e vivi: esistono solo dei vivi. La morte non produce dei morti, ma è solo un passaggio verso un’altra vita. Difatti, il termine “defunto” (da latino defunctus: colui che ha abbandonato le sue funzioni sulla terra) non è un morto in senso assoluto, ma uno che vive in un modo diverso da quello che ha lasciato o abbandonato sulla terra. E nella sua venuta gloriosa, Cristo non privilegerà nessuno, affinché nessuno ne risulti frustrato

Paolo, parlando della fine del mondo in cui ci saranno ancora dei “viventi”, scrive: “Ecco, io vi annunzio un mistero: non tutti certo moriremo, ma tutti saremo trasformati, in un istante, in un batter d’occhio, al suono dell’ultima tromba; suonerà, infatti, la tromba e i morti risorgeranno incorrotti e noi saremo trasformati... si compirà allora la parola della Scrittura: la morte è stata ingoiata per la vittoria... per mezzo del Signore nostro Gesù Cristo” (1Cor 15, 51-57).

E sempre Paolo precisa: la risurrezione è per tutti. Il Risorto non dimenticherà nessuno dei suoi, sia esso morto che vivo, perché tutti parteciperanno al grande giorno e alla sua festa. Scrive: “Non vogliamo poi lasciarvi nell’ignoranza, fratelli, circa quelli che sono morti, perché non continuiate ad affliggervi come gli altri che non hanno speranza. Noi crediamo infatti che Gesù è morto e risuscitato; così anche quelli che sono morti, Dio li radunerà per mezzo di Gesù insieme con lui. Questo vi diciamo sulla parola del Signore: noi che viviamo e saremo ancora in vita per la venuta del Signore, non avremo alcun vantaggio su quelli che sono morti. Perché il Signore stesso, a un ordine... discenderà dal cielo. E prima risorgeranno i morti in Cristo; quindi noi, i vivi, i superstiti, saremo rapiti insieme con loro tra le nuvole, per andare incontro al Signore nell’aria, e così saremo sempre col Signore. Confortatevi dunque a vicenda con queste parole” (1Ts 4,13).

 Alle consolanti parole di Paolo, si possono aggiungere anche quelle di Pietro per terminare questo veloce riferimento sulla Commemorazione di tutti i fedeli defunti con la testimonianza diretta dei due grandi Apostoli: “Una cosa però non dovete perdere di vista, carissimi: davanti al Signore un giorno è come mille anni e mille anni come un giorno solo. Il Signore non ritarda nell’adempiere la sua promessa, come certuni credono; ma usa pazienza verso di voi, non volendo che alcuno perisca, ma che tutti abbiano modo di pentirsi... Quali non dovete essere voi, nella santità della condotta e nella pietà, attendendo e affrettando la venuta del giorno di Dio, nel quale i cieli si dissolveranno e gli elementi incendiati si fonderanno! E poi, secondo la sua promessa, noi aspettiamo nuovi cieli e una terra nuova, nei quali avrà stabile dimora la giustizia. Perciò, carissimi, nell’attesa di questi eventi, cercate di essere senza macchia e irreprensibili davanti a Dio, in pace” (2Pt 3, 8-14).

 In breve, come la cristianità primitiva, illuminata dalla fede degli Apostoli, interpretò il ritorno di Cristo come un avvenimento carico di speranza e di gioia, così anche i cristiani di oggi dovrebbero aspettare con profonda fede e gioiosa speranza il festoso giorno del “giudizio dei vivi e dei morti”.

Autore: 
P. Giovanni Lauriola ofm