Saint Corentin
Évêque de
Quimper (Ve siècle)
ou Cury, évêque de
Quimper.
Il fait partie des
"Sept-Saints" qui évangélisèrent la Bretagne et qui ont nom: saint
Tugdual de Tréguier, saint
Paterne de Vannes, saint
Samson de Dol, saint
Pol de Léon, saint
Malo et saint
Brieuc. Il est certain que saint Corentin a existé et qu'il a assuré
l'implantation de l'Église de Cornouailles. Il participa au concile d'Angers en
453. Mais il est le seul des sept à ne pas avoir une localité pour
conserver sa pieuse mémoire en Bretagne (On oublie souvent le vrai nom de
Quimper: Quimper-Corentin). Par contre le village de Cury en Cornouailles
britannique ne l'a pas oublié. Cependant de très nombreuses églises et
chapelles se sont placées sous son vocable dans le Finistère et les Côtes
d'Armor.
"Patron principal du
diocèse de Quimper. Né en Armorique, Corentin vécut pendant plusieurs années la
vie érémitique, dans les bois qui couvraient le versant sud du Ménez-Hom, en Plomodiern.
Réclamé comme évêque par le roi Gradlon et son peuple, il partagea dès lors son
temps entre sa tâche épiscopale à Quimper et la vie érémitique à laquelle il
restait fidèle. L'époque où il vécut ne peut être précisée; un manuscrit
d'Angers, daté de 897, place un saint Corentin au calendrier le 1er mai. Les
reliques du saint, dispersées lors des invasions normandes (Marmoutier -
Abinbdon, Waltham et Glastonbury en G.-B.), furent partiellement restituées à
la cathédrale de Quimper en 1623, où elles furent longtemps en honneur." (diocèse
de Quimper et Léon)
Un internaute nous écrit:
"Né en Armorique, il se retire dans la solitude dans la forêt de Nevet
afin de servir Dieu, à l'exemple de nombreux ascètes. Se nourrissant de racines
et de baies, une fontaine jaillit à sa prière, lui permettant d'avoir un peu d'eau.
Chaque jour, le même poisson vient s'offrir à lui en nourriture; Corentin en
coupe un morceau et remet le poisson encore en vie dans l'eau et chaque jour,
le poisson revient...
Le Roi Gradlon lui donne
des terres afin d'y construire un monastère.
Les nombreux miracles
qu'il accomplit et la sainteté de sa vie conduisent les chrétiens de
Cornouailles à le choisir comme évêque. Le roi Gradlon lui offre son palais
situé au confluent de l'Odet et du Frout: là où s'élève toujours la cathédrale
de Quimper."
À Quimper en Bretagne,
saint Corentin, honoré comme le premier évêque de la cité, qui joignait à
l'épiscopat la rude vie d'ermite.
Martyrologe romain
SOURCE : https://nominis.cef.fr/contenus/saint/248/Saint-Corentin.html
Saint Corentin, vitrail, église Saint-Thuriau à
Landivisiau dans le Finistère.
Saint Corentin
On sait que saint Corentin, jeune encore, se retira dans un ermitage au bord de la forêt de Névet, au territoire de Plomodiern et qu'il y vivait dans la pénitence. Voici comment en parle Albert le Grand : « Pour sa nourriture et sustentation en cette solitude, Dieu faisoit un miracle admirable et continuel : car, encore qu'il se contentast de quelques morceaux de gros pain, qu'il mendioit quelques fois ès villages prochains, et quelques herbes et racines sauvages, que la terre produisoit d'elle-mesme, sans travail ny industrie humaine, Dieu luy envoya un petit poisson en sa fontaine, lequel, tous les matins, se présentoit au Saint, qui le prenoit et en coupoit une pièce pour sa pitance, et le rejetoit dans l'eau, et, tout à l'instant, il se trouvoit tout entier, sans lésion ny blesseure, et ne manquoit taus les matins, à se présenter à saint Corentin, qui faisoit toujours de mesme ».
L'ancienne hymne de la fête de saint Corentin relatait ce prodige en ces termes : "Carne dum piscis redit integrata - In cibum sese toties daturus, - Aequa lex strictoe quoties suadet - Prandia mensoe".
Mais cette strophe a été retranchée du Pange solemnes, dans la réédition de 1851, par un censeur qui se croyait bien inspiré en supprimant la mention d'un fait qu'il trouvait trop merveilleux. Ce miracle du poisson se renouvelle encore d'une façon plus admirable lors d'une visite inopinée du roi Grallon au saint ermite :
« Un jour Gralion estant allé à la chasse, donna jusques dans la forêt de Névet, en la paroisse de Plomodiern, proche l'ermitage de saint Corentin ; et ayant chassé tout le jour, sur le soir, il s'égara dans la forest, et enfin se trouva près de l'ermitage du Saint, avec une partie de ses gens, ayant tous bon appétit : ils descendirent et s'adressèrent au saint ermite, luy demandèrent s'il ne pourroit pas les assister de quelques vivres ? « Ouy, répondit-il, attendez-moi un petit, et je vous en vays quérir ». Il s'en alla à sa fontaine, où son petit poisson se présenta à luy, du quel il en coupa une pièce de dessus le dos et la donna au maistre d'hostel du Roy, luy disant qu'il l'apprestast pour son maistre et les seigneurs de sa suite ; le maistre d'hostel se prit à rire et se moqua du saint, disant que cent fois autant ne suffiroit pour le train du Roy. Néanmoins contraint par la nécessité, il prit ce morceau de poisson, le quel (chose estrange !) se multiplia de telle sorte, que le Roy et toute sa suite en furent suffisamment rassasiez. Le Roy, ayant veu ce grand miracle, voulut voir le poisson du quel le saint avait coupé ce morceau et alla à la fontaine, où il le vid, sans aucune blesseure, dans l'eau ».
Ce trait est traduit tout entier de la chronique latine de Saint-Brieuc ; il est également relaté dans une séquence ancienne que le Père Cahier cite d'après un bréviaire in-16, d'environ 1600.
SOURCE : http://www.infobretagne.com/saints-bretons-animaux.htm
L'icône de St. Corentin (Kaourintin) peinte pour
l'Association orthodoxe sainte Anne (Bretagne).
Икона святого Корентина, написанная для Православной
ассоциации святой Анны (Бретань).
Saint Corentin, évêque de Quimper
Le nom de saint Corentin apparaît pour la première
fois dans un passage de la vie de saint Guénolé composé vers l’an 880 par
Wrdisten, moine de Landevennec. Des litanies anglaises attestent son culte au
Xe siècle aussi bien en Bretagne insulaire qu’en Bretagne armoricaine. Wrdisten
associe dans son éloge saint Corentin au légendaire roi Gradlon et à saint
Guénolé comme « un des trois rayons de la lumière du Christ qui
brilla sur la Cornouaille ».
Selon la tradition, établie d’après deux textes des
XIe et XIIIe siècles, Corentin naquit en Armorique de parents bretons. Albert
le Grand, hagiographe du XVIIe siècle place sa mort à 530, sans que l’histoire
puisse confirmer cette datation : il semble que Corentin ait commencé son
ministère plus tardivement. Très tôt, le futur évêque rechercha la solitude en
se retirant dans une sombre forêt sur la paroisse de saint Modiern
(Plomodiern). Sa vie fut longtemps celle d’un ascète de type celtique, tel
qu’il en existait beaucoup dans les lieux reculés d’Irlande, de Bretagne et
d’Armorique. La légende raconte que Corentin, qui se nourrissait surtout de
racines et de baies fut gratifié d’un saumon miraculeux dans une fontaine
jaillie à sa prière. Ce poisson demeurait toujours vivant et intact lorsque le
saint en prélevait une tranche sans en abîmer l’arrête. Il se multipliait même
lorsque Corentin recevait des visites, car sa réputation de grand ascète aurait
fait venir à lui les saints Melaine de Rennes et Patern de Vannes ! C’est
ainsi que le découvrit un jour le roi Gradlon, égaré au cours d’une chasse.
Frappé de l’austérité de l’ermite, Gradlon s’empressa de lui faire don des
terres sur lesquelles il habitait. Corentin put alors y bâtir un monastère.
Sous la pression de ses moines, du peuple et de Gradlon lui-même, Corentin dut
accepter le siège épiscopal de Cornouaille et, toujours selon la tradition, il
se rendit à Tours pour y être sacré par saint Martin lui-même. Il aurait
assisté au Concile d’Angers en l’an 458, où les Actes le nomment Charlaton… Des
éléments qui ne peuvent concorder entre eux. Il établit sa résidence
d’évêque-abbé au palais de Gradlon, au confluent de l’Aodeb et du Froud, là où
s’élève encore la cathédrale qui porte son nom. Il conféra à son tour la
dignité abbatiale à Tudy et Guénolé. On ignore la durée exacte de l’épiscopat
de Corentin, on sait seulement qu’il fut enterré dans la cathédrale où les
miracles se multiplièrent sur son tombeau.
Ses reliques furent transportées en 878 et confiées à
l’évêque d’Alet, qui se réfugia en France avec les corps des saints. Une part
des reliques aurait ainsi été remise à Hugues Capet en 965, et déposées dans
l’église saint-Bathélémy, devenu église Saint-Magloire. Elles furent ensuite
disséminées entre divers localités et Montreuil-sur-Mer, où l’abbaye Sainte
Mauve prétendait en posséder une grande partie. Il y en avait aussi à
Marmoutier. Un monastère de 120 religieuses bénédictines avait été fondé par le
roi Philippe Auguste à une dizaine de km de Mantes sous le patronage de saint
Corentin. En 1623, Quimper retrouva une partie des reliques de son saint
patron, obtenues de l’abbaye de Marmoutier. A la Révolution, elles furent en
partie sauvées du pillage de la cathédrale par des fidèles qui les mirent à
l’abri. Une autre partie fut détruite par les révolutionnaires et c’est encore
de l’église de Tours que Quimper reçut une relique de son saint patron. Il y a
cinq ans, une partie des reliques ont été volée. Une autre partie se trouve
également à l’abbaye de Boquen, où elle fut ramenée avec d’autres par Dom
Alexis Presse depuis l’église saint Jacques du Haut-Pas à Paris. Le culte de
Corentin se développa surtout en Cornouaille, et de là vers l’intérieur des
terres. Il est au contraire mal connu dans les anciens diocèses de Léon et de
Tréguier. Son nom est cité dans les litanies anglaises du VIIe siècle mises à
jour par dom Mabillon.
Bien que considéré comme fondateur, Corentin n’est pas
le premier évêque de Cornouaille. La région avait connu une première
évangélisation par l’intermédiaire des moines et évêques de Nantes dès le IVe
siècle. La tradition du sacre de Corentin par Martin de Tours veut peut-être
simplement signifier cette filiation avec la métropole tourangelle et les
origines gallo-romaines du diocèse. Les recherches archéologiques menées à
Locmaria, faubourg de Quimper mais premier emplacement de la ville à l’époque
gallo-romaine, tendent à confirmer cette interprétation. La future Cornouaille
semble aussi avoir été habité au IVe et Ve siècle par le peuple des
Curiosolitae, originaires des environs de Dinan. Leur capitale avait rang de
civitas, ces villes principales de l’empire, pourvues d’un grand-prêtre de la
religion officielle. Après Constantin, les civitas sont souvent devenues villes
épiscopales, et il est possible que Locmaria ait alors connu un premier évêché,
ce que tendrait à montrer l’utilisation du titre d’évêque des Curisopites,
branche des Curiosolitae. Il y aurait donc eu une seconde fondation épiscopale,
due aux efforts de Gradlon et Corentin. La suprématie de l’actuel Quimper sur
Locmaria ne s’effectuera que progressivement à partir de la nouvelle cathédrale
et a donc pour origine le culte rendu à saint Corentin. Il s’agit là avant tout
de suppositions.
Une autre interprétation souligne la présence à
Aquilonia, autre nom de Locmaria, d’un monastère-évêché celtique établi par des
bretons sous autorité insulaire, dans une partie de l’Armorique où ils se
trouvaient depuis le IIIe siècle. Son évêque-abbé aurait été totalement
indépendant de l’autorité du siège de Tours. De cela, on trouve des témoignages
tant par le fait qu’une chrétienté organisée s’y trouvait dès avant l’arrivée
des saints fondateurs, que dans la liturgie elle-même, telle l’ancienne
intronisation de l’évêque de Quimper qui commençait à Locmaria.
Il y aurait donc eu une seconde fondation que
l’historien Le Duc situe vers la fin du VIIIe siècle, d’autres sources au VIe,
lorsque le siège épiscopal d’Aquilonia-Locmaria fut déplacé à Quimper avec la
première construction d’une cathédrale sous le roi Gradlon. Corentin fut alors
le premier évêque d’un diocèse véritable s’étendant jusqu’à la limite orientale
du territoire des Ossismes (Nord-ouest de la Bretagne), longtemps après que la
première fondation se fût étiolée peu avant l’arrivée de saint
Pol au début du VIe siècle. Cette interprétation a en outre le mérite
de justifier la présence d’évêques bretons aux conciles contemporains de la
fondation et les allusions à des pratiques manifestement insulaires sans que
l’on connaisse par ailleurs la titulature exacte de ces évêques. De surcroît,
nombre de saints vénérés comme d’anciens évêques de Cornouaille trouvent ici
leur place.
Les émigrants venus du Kernow prirent le contrôle de
cet évêché pour en faire le Kernow, tous deux dérivés du terme brittonique
Cornobia, qui donna le français Cornouaille et l’anglais Cornwall. Au XIe
siècle, le Cornwall avait encore son diocèse de Cornubia, où le culte de saint
Corentin était répandu autour de la ville de Curriton, devenue aujourd’hui
Curry. Dans le sud-est de la péninsule britannique, on trouvait aussi un Llan
Querenthyn, devenu en anglais Lacrenton.
Quelle que soit l’interprétation retenue –gallo-romaine ou celtique–, des origines du diocèse de Cornouaille, on reconnaîtra son antiquité et sa longévité. Jusqu’à la Révolution, le diocèse, très vaste, s’étendait depuis la pointe de Pennmarc’h au confluent de l’Ellé (Kemper-Elle, Kemperlé), des crêtes des monts de l’Arre jusqu’aux rives du Gouet en Quintin, ce qui correspond peu ou prou à l’ancien territoire des Ossismes, moins le Léon et le Goelo. A la Révolution, les diocèses furent réorganisés en fonction des départements nouvellement crées. Dans le département du Finistère, il n’y avait pas place pour deux évêchés, et Quimper, en raison de son soutien aux mesures révolutionnaires fut choisi comme siège de l’évêché de Quimper et Léon, au détriment de saint Pol de Léon, siège d’une région traditionnellement plus pieuse et plus monarchiste.
Icônes
des saints fondateurs de Bretagne ;
Tropaires
des saints de la Bretagne Armorique.
SOURCE : https://web.archive.org/web/20070927013143/http://la-france-orthodoxe.net/fr/saint/corentin
La vie des saints de la
Bretagne Armorique
1901 (p. 683-699).
LA VIE DE SAINT CORENTIN,
Confesseur et premier
Evesque de Cornoüaille, le 12. de Decembre.
Saint Corentin, premier
Evesque de Cornoüaille, en la Bretagne Armorique, nasquit au même Diocese,
environ l’an 375, treize ans avant que le tyran Maxime passast és Gaules, &
fut, dès son enfance, instruit par ses parents en la Religion
Chrestienne ; & ayant esté par une grace & protection speciale de
Dieu, preservé pendant les guerres que le Roy Conan Meriadec fit aux garnisons
Romaines, qu’il chassa entierement de Bretagne, il s’adonna tout de bon au
service de Dieu ; &, pour mieux y vacquer, & faire un perpétuel
divorce avec le monde, il se retira en une solitude, dans une forest en la
Paroisse de Plou-Vodiern, au pied de la montagne de S. Cosme, où il bastit
an petit Hermitage près d’une fontaine, &, tout joignant un petit
Oratoire ; passant en ce lieu les nuits & les jours en prieres &
Oraisons, inconnu & retiré de toute conversation humaine, mais chery &
consolé de Dieu, qui jamais n’oublie ceux qui, pour son Amour, oublient toutes
choses, & fortifié de sa grace contre les attaques & tentations de ses
ennemis, & comblé de ses celestes et divines caresses. Pour sa nourriture
& sustentation en cette solitude, Dieu faisoit an miracle admirable &
continuel ; car, encore qu’il se contentast de quelques morceaux de gros
pain, qu’il mendioit quelques fois ès villages prochains, & quelques herbes
& racines sauvages, que la terre produisoit d’elle-mesme, sans travail ny
industrie humaine, Dieu luy envoya un petit poisson en sa fontaine, lequel,
tous les matins, se presentoit au Saint, qui le prenoit & en coupoit une
piece pour sa pitance & le rejetoit dans l’eau, &, tout à l’instant, il
se trouvoit tout entier, sans lesion ny blesseure, & ne manquoit, tous les
matins, à se presenter à S. Corentin, qui faisoit toujours de mesme.
II. En mesme temps,
vivoit un saint Prestre solitaire, nommé Primael, ou Primel, lequel menoit une
vie fort sainte dans une forest en Cornoüaille[1].
S. Corentin l’alla visiter, pour recevoir de luy quelques salutaires
instructions S. Primel le recueillit gracieusement, & passèrent les deux
Saints le reste de la journée en saints propos & colloques spirituels, &
la nuit suivante en prieres & Oraisons. Le matin, saint Corentin désira
dire la Messe en l’Oratoire de saint Primael, qui, luy ayant disposé tout ce
qui estoit requis & necessaire, s’en alla querir de l’eau à une fontaine
assez éloignée de son Hermitage ; Saint Corentin l’ayant longtemps
attendu, sortit de la Chapelle & vid venir le Saint vieillard tout
doucement & à petits pas, tant pour sa lassitude & que la fontaine
estoit loin de là, que parce qu’il estoit boiteux. Saint Corentin, le voyant
tout hors d’haleine, en prit pitié & supplia Nostre Seigneur de luy
octroyer de l’eau plus prés de son Hermitage puis, dit la Messe, pendant
laquelle il reitera son Oraison Dieu exauça sa prière, car au lieu mesme où il
mit son baston en terre, après la Messe, il rejaillit une source d’eau, dont
les deux Saints rendirent graces à Dieu ; &, ayant séjourné quelques
jours avec S. Primael, il s’en retourna en son Hermitage à Plovodiern.
Encore qu’il tâchast à se derober de la hantise & conversation des hommes,
si ne se peut-il tellement cacher, que la reputation de sa Sainteté ne retentit
par toute la Bretagne, de sorte que deux Personnages de grande sainteté le
vinrent visiter en son Hermitage[2] ;
saint Corentin les receut fort humainement ; &, pour les festoyer,
leur dressa des crèpes (à la mode du païs) qu’il accomoda de quelque peu de
farine qu’on luy avoit donnée par aumône és villages prochains mais Dieu, qui
ne délaisse ceux qui ont jetté en luy toute leur esperance, pourveut
miraculeusement à la nourriture de ses serviteurs car S. Corentin, estant allé
puiser de l’eau à la fontaine, la trouva pleine de belles & grosses
anguilles, dont il en prit autant qu’il luy fut necessaire pour festoïer ses
hôtes, lesquels se retirèrent, loüans Dieu qui, par des miracles si signalez,
témoignoit la Sainteté de son serviteur S. Corentin.
III. En ce temps-là, le
Roy Grallon, qui avoit succedé à Conan Meriadek, se tenoit, avec toute sa Cour,
en la Ville de Kemper-Odetz, capitale du Comté de Cornoüaille. Un jour,
estant allé à la chasse, il donna jusques dans la forest de Nevel (qui n’est
plus), en la Paroisse de Plovodiern, proche l’Hermitage de saint Corentin
&, ayant chassé tout le jour, sur le soir, il s’égara dans la forest, &
enfin se trouva prés l’Hermitage du Saint, avec une partie de ses gens, ayans
tous bon appetit ; ils descendirent et s’adressèrent au Saint Hermite, luy
demandèrent s’il ne les pourroit pas assister de quelques vivres ? « Oüy
(répondit-il), attendez un petit, & je vous en vays querir. » Il s’en
alla à sa fontaine, où son petit poisson se représenta à luy, duquel il en
coupa une pièce de dessus le dos & la donna au maistre d’hôtel du Roy, luy
disant qu’il l’apprestast pour son maistre & les Seigneurs de sa
suite ; le maistre d’hôtel se prit à rire & se mocquer du Saint,
disant que cent fois autant ne suffiroit pour le train du Roy. Neanmoins,
contraint par la nécessité, il prit ce morceau de poisson, lequel (chose
étrange !) se multiplia de telle sorte, que le Roy & toute sa suite en
furent suffisamment rassasiez. Le Roy, ayant veu ce grand Miracle, voulut voir
le poisson duquel le Saint avoit coupé ce morceau & alla à la fontaine, où
il le vid, sans aucune blessure, dans l’eau ; mais quelque indiscret (que
la Prose, qui se chante le jour de la Feste du Saint, dit avoir esté de
l’Evesché de Léon) en coupa une pièce pour voir s’il deviendroit entier, dont
il resta blessé, jusqu’à ce que saint Corentin y vint, qui, de sa Benediction,
le guerit, & luy commanda de se retirer de là, de peur de semblable
accident, à quoy il obeït[3].
Le Roy Grallon, ravy de ces merveilles, se prosterna aux pieds du saint
Hermite & luy donna toute sa forest & une maison de plaisance qu’il
avoit en ladite Paroisse de Plovodiern puis, s’étant recommandé à ses prieres,
il se retira à Kemper-Odetz. S. Corentin convertit cette maison que le Roy
luy avoit donnée en un Monastere, où, ayant amassé nombre de saints Religieux,
il vivoit en grande sainteté & austerité.
IV. Le Saint, sçachant
combien il importoit au bien de la republique que les enfans des seigneurs
& gentils-hommes fussent, de bonne heure, élevez & dressez à la vertu,
prenoit le soin de les instruire &, à cette fin, il avoit un nombre de
pensionnaires en son Monastere, entre lesquels les plus signalez furent
Wennolé, Tugdin & Jacut, lesquels, depuis, furent Abbez en trois célèbres
Monasteres. Quelque temps après, le Roy Grallon fut supplié par les seigneurs
& tout le Peuple de procurer l’erection d’un Evesché à Kemper-Odetz, pour
le Comté de Cornoüaille, le Roy s’y accorda, &, ayant fait toutes les
dépêches requises, nomma S. Corentin à ce nouveau Evesché, &, l’ayant
mandé, l’envoya à Tours vers S. Martin, Archevesque dudit lieu, pour estre par
luy sacré, luy donnant pour compagnons Wennolé & Tugdin[4],
pour estre benits Abbez de deux Monasteres qu’il vouloit édifier. Ils furent
gracieusement receus du saint Archevesque, lequel, au désir des lettres du Roy,
consacra saint Corentin, mais ne voulut benir les deux autres, disant que
c’estoit à faire à luy à benir les Abbez de son Diocese. Les Saints, ayans
achevé leur legation, s’en retournèrent à Kemper-Odetz, où le Roy, avec toute
sa Cour, les receut, & fut dressé une entrée Episcopale & solemnelle à
saint Corentin, qui prit possession de son Siège & celebra Pontificalement
la Messe. Le Roy vint à l’Offrande & offrit à Dieu & au saint Prélat
son palais qu’il avoit dans Kemper[5] &
grand nombre de terres & possessions les princes & seigneurs de sa
Cour, à son exemple, en firent de mesme, chacun selon ses moyens &
facultez. Le lendemain, S. Corentin benit solemnellement ses deux saints
Disciples, Abbez, destinant Wennolé pour le Monastere de Land-Tevenec, que
le Roy Grallon fonda quelque temps après. Ce pieux prince, non content des dons
qu’il avoit faits au saint Evesque, fonda la Cathedrale, arrenta nombre de
Chanoines ; &, pour laisser la Ville libre à saint Corentin, il en
retira sa Cour & la transfera en la fameuse ville d’Is.
V. Saint Corentin,
considerant que cette nouvelle dignité requeroit de luy une nouvelle
sollicitude, commença, à bon escient, à cultiver son Diocese il confera les
saints Ordres à bon nombre de vertueux personnages, lesquels il instruisoit
pour les faire Recteurs de son Diocese, lequel il visita & distribua par
paroisses & trêves, preschant partout d’une ardeur & zèle admirables,
non moins d’exemple que de vive voix, n’ayant relasché rien de ses austeritez
ordinaires. Ayant saintement gouverné son troupeau quelques années, Dieu le
voulut recompenser de ses travaux & luy envoya une maladie, qui l’affoiblit
tellement, que, prévoyant l’heure tant désirée s’approcher, il fit venir tous
ses Chanoines & Religieux, &, les ayant exhortez à l’Amour de Dieu
& perseverance en leur vocation, il receut, en leur présence, ses Sacremens
puis, leur ayant donné sa benediction, il rendit son Ame beniste és mains de
son Createur, le 12. Decembre l’an 401. Son Corps lavé fut revêtu de ses
Ornemens Pontificaux & porté dans son Église Cathedrale & son décez
estant sceu par le Pays circonvoisin, il se rendit une si grande affluence de
peuple à Kemper-Odetz, pour voir son saint Corps & le baiser, qu’on ne le
pût si-tost enterrer qu’on s’estoit proposé les malades y alloient & estoient
guéris ; les muets, sourds, boëteux, aveugles y receurent l’usage de leurs
membres ; les demoniacles y furent délivrez, & plusieurs autres
miracles s’y firent en témoignage de sa sainteté. Le Roy Grallon, qui s’estoit
rendu à Kemper-Odetz, quand il eut avis de sa maladie, assista, avec sa cour, à
son enterrement, qu’il fit faire avec autant de pompe & magnificence, que
si c’eust esté pour luy mesme, & défraya le tout ; il fut ensevely
dans le Chœur de sa Cathedrale, devant le grand Autel, où Dieu a fait plusieurs
miracles par son intercession, aucuns desquels nous rapporterons icy, à la
gloire de Dieu & de son Saint, duquel la mémoire fut si douce à ses
citoyens, qu’ils donnèrent son Nom à leur Ville, l’appelans KEMPER-CORENTIN,
& non plus KEMPER-ODETZ.
VI. Une damoiselle, ayant
receu quelque faveur par les mérites & intercessions de saint Corentin, fit
vœu d’offrir quelque quantité de cire à son Église, & vint rendre son
vœu ; comme elle s’approcha de l’Autel pour l’y présenter, le diable la
tenta de le retenir, ce qu’elle fit ; mais la miserable fut punie sur le
champ car la main qu’elle avoit tirée se ferma si fort, que, quelque effort
qu’elle fit, elle ne la pût ouvrir ; se voyant punie de la sorte, elle
s’en retourna au logis fort désolée, suppliant S. Corentin de luy impetrer
l’usage de la main. Une nuit qu’elle prioit de grande ferveur, S. Corentin luy
apparut, glorieux & resplendissant, & luy dit « Ma fille, quand
vous aurez promis quelque chose à Dieu, ou à ses serviteurs, ne vous en dédites
pas, mais accomplissez-le gayement allez demain à mon Église & priez devant
mon tombeau, & vous recevrez guerison. » Le lendemain, la femme alla
prier au Sepulchre du Saint, où s’estant endormie, S. Corentin lui apparut de
rechef & luy dit qu’elle estoit guérie ; elle, se réveillant là
dessus, se trouva avoir le maniement de sa main libre, dont elle rendit graces
à Dieu & à saint Corentin. Il apparut à un larron & le frappa de
Paralysie, dont il ne pût jamais estre guery, qu’il n’eut restitué ce qu’il
avoit dérobé. Quelques méchans, estans entrez de violence dans la maison d’un
honneste Personnage, l’enfermèrent dans un coffre, à dessein de l’y laisser
mourir de faim ; ce pauvre homme eut recours à Dieu par l’entremise de S.
Corentin, lequel parut en la chambre, tout éclatant & glorieux, &, du
bout de sa Crosse, leva la serrure de ce coffre & délivra ce pauvre homme,
qui, de ce pas, alla à son Église remercier Dieu & son serviteur saint
Corentin. L’an de grâce 1018, Alain Caignard, comte de Cornoüaille, pensa
devenir aveugle, à cause d’une défluxion qui luy tomba sur les yeux à
laquelle les médecins ne pouvoient remédier en cette affliction, la Comtesse
Judith, sa femme, fille de Judicaël, Comte de Nantes, luy conseilla de faire un
vœu à S. Corentin, & promettre de donner quelques terres & héritages à
son Église il la crût, & ainsi, ayant fait dresser & signé les contrats
des terres qu’il disposoit donner, il se fit porter à Kemper-Corentin, où il
visita l’Église & fit sa prière, puis mit ces contrats sur l’Autel, offrant
à Dieu & à S. Corentin les terres & héritages qui y estoient
mentionnez, &, aussi-tost, la défluxion se dissipa, &, du depuis, n’eut
plus mal aux yeux. Ce saint corps demeura à Kemper jusques à l’an 878. que les
Normands ayans pris terre en Cornoüaille, les Chanoines & Ecclesiastiques
de Kemper se retirèrent à Tours, emportans le trésor de leur Église, &,
entre autres Reliques, le Corps de saint Corentin, qu’ils mirent en l’Église de
saint Martin depuis, il fut transporté à Marmoutier, où il est reverement
conservé.
Cette Vie a esté par nous
recueillie des anciens Breviaires et Legendaires MSS. des Églises Cathedrales
des Dioceses de Cornoüailte, Léon et Nantes, qui en ont l’Histoire distribuée
en 9. Leçons ; Molanus, en ses Additions sur Usward, où il appelle Kemper-Corentin,
Civitas Aquilœ ; Robert Cœnalis, Evesque d’Avranches, de re Gallica lib.
2, perioche 6 Benoist Gononus, Célestin, in vitis PP. Occid. lib. 1 pag. 27
Alain Bouchard, en ses Annales de Bretagne, l. Il ch. 4, récite un abregé de sa
vie, et d’Argentré, en son Histoire de Bretagne, 1. 1, ch. Il et l. 11, ch.
9 ; le P. Augustin du Pas, en son Catalogue des Evesques de Cornoüaille, à
la fin de son Hist. des Illustres Maisons de Bretagne, saivu par Jean Chenu, en
son Histoire Chronologique des Evesques de France, et Claude Robert, en sa
Gallia Christiana, lettre B.
ANNOTATIONS. AUTORITÉ DE LA VIE DE SAINT CORENTIN (A.-M. T.).
En 1886, Dom F. Plaine 0. S. B. faisait paraître une à Vie inédite de saint
Corentin, écrite au siècle, par un anonyme de Quimper, publiée avec
prolégomènes, traduction et éclaircissements. » Le pieux et savant
bénédictin l’avait découverte lui-même au musée Bollandien de Bruxelles où elle
était venue de Montreuil-sur-Mer (on sait que dans cette ville était conservée
une partie notable des reliques de notre saint). Ce manuscrit n’est que de
1664, mais la lettre d’envoi qui l’accompagne et qui était adressée à
Henschenius affirme que la transcription a été faite sur des manuscrits rongés
de vétusté. « Le texte en est parfaitement identique quant au fond et
quelquefois même quant à la lettre avec celui du Chronicon Briocense, du
Sanctorale Corisopitense. etc. Cette identité serait absolument inexplicable si
l’on n’admettait pas qu’à l’époque de la translation du corps de saint
Corentin, le texte primitif de la Vie du saint fut transféré simultanément et
arriva ainsi jusqu’à Montreuil en Picardie. » C’est affirmer que ce
« texte primitif » était bien du IXe siècle.
Dom Plaine ajoute :
« Si nous examinons la vie de saint Corentin en elle-même, nous en
déduirons 1° Que l’auteur était clerc de l’église même de Quimper, par
conséquent des mieux placés pour en connaître les vraies traditions. Qui sait
même s’il n’avait point à sa disposition certains documents primitifs,
aujourd’hui et depuis longtemps perdus sans retour ? 2° Qu’il a dû
apporter le plus grand soin dans ses recherches, car il s’était proposé pour
but non de composer un simple éloge ou un panégyrique, mais bien de retracer
dans son ensemble la vie de son héros. » Dom Plaine constate ensuite que
l’écrivain anonyme écrit le latin avec une pureté et une élégance au moins
relative, admet bien qu’il est un peu déclamateur (non dans l’histoire du
saint mais dans le tableau qu’il fait des vices de sa propre époque) et
déclare qu’il rachète ce défaut par un ton de bonne foi et de franchise bien
propre à lui gagner des suffrages.
Évidemment je ne puis
reproduire ici ni ce texte, ni sa traduction ; qu’il suffise de constater
l’accord du récit d’Albert Le Grand avec celui du premier historien de saint
Corentin les seules différences viennent de la simplicité d’Albert qui attribue
toujours aux siècles même les plus reculés, les mœurs et le langage de son
temps.
Pour en revenir à
l’anonyme du IXe siècle, je dirai encore : Personnellement je suis porté
à trouver valables les raisons que Dom Plaine invoque en sa faveur, mais la
bonne foi me fait un devoir d’ajouter que M. de la Borderie ne fait pas grand
fond sur ce document. Il ne le fait remonter qu’au XIIIe siècle[6] et
y relève certains détails qu’il regarde comme des impossibilités
historiques ; exemple « Saint Martin était mort depuis un siècle
(lors de l’arrivée de saint Corentin à Tours). — Son successeur, en qualité de
métropolitain, avait le droit de confirmer l’élection épiscopale faite par le
peuple et le clergé d’un diocèse dépendant de sa métropole, nullement celui
d’en élire l’évêque. Quant à la dignité abbatiale soi-disant conférée par
Corentin à Gwennolé et à Tudi, en ce qui touche le premier du moins, rien de
plus faux. Gwennolé fut institué abbé par son maître saint Budoc quand celui-ci
mit sous sa direction onze moines de Lavré. Il était abbé avant l’épiscopat de
Corentin et contribua beaucoup plus à faire celui-ci évêque que Corentin à le
faire abbé. »
SAINT CORENTIN À PLOMODIERN (A.-M. T.).
Très peu favorable à notre légendaire en ce qui concerne l’épiscopat de saint
Corentin à son début, l’historien de la Bretagne est moins sévère pour la
partie qui concerne la vie du solitaire au Ménez-Hom, et il en admet le fond
comme croyable, mais là où je me sépare tout à fait de M. de la Borderie c’est
quand il explique le miracle du poisson mutilé tous les jours et toujours
vivant. « C’est simplement, dit-il, une figure de l’Eucharistie, car chez
les anciens chrétiens le poisson (ΙΧΥΣ en grec) est le symbole du
Christ. » M. l’abbé Guillotin de Corson s’est empressé d’admettre cette
explication, et j’avoue que je ne puis comprendre qu’on s’y soit arrêté. Ce symbole
du Poisson figure de Jésus-Christ, symbole si familier aux chrétiens de Rome,
au temps des persécutions, rien absolument ne l’indique comme ayant été connu
des chrétiens d’Armorique ni au temps de saint Corentin, ni au temps de son
légendaire, que celui-ci soit du IXe ou du XIIIe siècle.
Que le miracle quotidien
du poisson soit réel ou soit faux, pensez-en ce que vous voudrez, mais renoncez
à l’expliquer.
LE PLUS ANCIEN DOCUMENT RELATIF À SAINT CORENTIN (A.-M. T.).
Au tome III de l’Histoire de Bretagne, p. 321, nous lisons « Dans un des
chapitres en vers de la Vie de saint Gwennolé, il y a un bel éloge de Corentin
auquel sont associés et le roi Gradlon et le fondateur de Landevenec ;
c’est aujourd’hui le plus ancien texte concernant le premier évêque
de Corisopitum, en voici la traduction :
« Comme ils
brillaient d’une triple lumière les sommets de la Cornouaille, quand ces trois
grands hommes — Gradlon, Corentin et Gwennolé — y tenaient le premier
rang ! —Gradlon avait pour sa part l’empire terrestre sagement il
gouvernait les campagnes et les rivages. Corentin dans sa haute dignité, dans
la splendeur dont l’environnait le corps sacré du Christ, apaisait la soif du
peuple en lui distribuant le breuvage précieux de la foi. Il mérita d’être
appelé le premier des contemplatifs car, voué à la plus profonde contemplation,
à la vie la plus austère, il fallait pour le retirer du désert les plaintes des
églises avec soin et diligence il les examinait, il rendait aux peuples une
paix solide, puis retournait à la vie d’où il s’était arraché. Pour Gwennolé,
le plus illustre de tous, son activité prodigieuse, la hauteur transcendante de
ses vertus justifiaient sa prérogative de père des moines. »
EXTRAIT DE L’EPITRE DU VÉNÉRABLE PÈRE J. MAUNOIR AU GLORIEUX SAINT CORENTIN (1659) (A.-M. T.).
Dieu avait envoyé dans ces dernières limites de la Gaule Celtique, sept brillantes lumières pour dissiper les ténèbres de l’infidélité S. Paul en Léon, S. Tugdual en Tréguier, S. Brieu en Saint-Brieu, S. Malo en Saint-Malo, S. Samson en Dol, S. Paterne en Vennes et vous en Cornouaille. Vous avez esté entre ces beaux astres de l’Église, ce qu’est le soleil parmy les planettes vous avez esté le premier maistre des roys de l’Armorique, et l’Église, le jour de vostre feste, vous donne cet éloge, vous appellant Pater orphanorum, Patronus Oppressorum, Magister Regum, et vous disant en vostre octave :
Septem sanctos veneremur,
Et in ipsis demiremur
Septiformem gratiam
His proofulsit Corentinus.
« … Ça esté à la
faveur de cette langue Armorique, ô grand apostre, que vous avez planté la foy
dans la Cornouaille, avec des bénédictions du Ciel très spéciales, et qui
donnent une vénération particulière pour l’idiosme dont vous vous estes servy.
Le soleil n’a jamais éclairé de canton, où ayt paru une plus constante et
invariable fidélité dans la vraye foy, depuis que vous en avez banny
l’idolastrie. Dieu vous a mis comme un chérubin à la porte de ce Paradis
terrestre pour empescher le retour du serpent infernal. Il y a treize siècles
qu’aucune espèce d’infidélité n’a souillé la langue qui vous a servy d’organe
pour prescher Jésus-Christ, et il est à naistre qui ayt vu un Breton bretonnant
prescher une autre religion que la catholique. Les Eveschez, qui ont tenu
fidélement à l’idiosme que vous avez honoré de vostre bouche sacrée, ont les
mesmes avantages et faveurs, auxquelles aucune autre nation ne peut prétendre.
Dans votre Evesché, après
qu’on a franchi le Cap Sizan, se void une isle nommée l’isle de Sein, où ne se
trouve aucune beste venimeuse, et où aucun serpent ne peut subsister. C’est
l’image de vostre terre saincte, arrousée de vos sueurs, terre qui, depuis
qu’elle a esté cultivée par vos soins charitables, ne produit aucun venin
contraire au sentiment de nostre Mère la saincte Église. »
LES SEPT SAINTS DE BRETAGNE (A.-M. T.).
On a souvent écrit, en ces dernières années, sur le pèlerinage fort ancien
et fort populaire des Sept saints de Bretagne. M. Le Men, dans sa savante
monographie de la Cathédrale de Quimper, a parfaitement résumé tout ce qu’avaient
dit ses devanciers ; et ceux qui sont venus après lui n’ont guère ajouté à
son exposé aussi complet que lucide les sept saints sont les fondateurs des
sièges épicospaux bretons ; c’est pourquoi saint Clair, de Nantes, et
Saint Amand, de Rennes, ne figurent pas dans ce groupe glorieux ; leurs
sièges furent d’abord et longtemps occupés par des évêques gallo-franks ;
il est vrai qu’on peut en dire autant du siège épiscopal de Vannes, mais comme
politiquement il devint breton avant les deux autres, saint Patern fut
vite assimilé, dans la dévotion populaire, aux vrais évêques bretons. Celui-ci
était honoré, non dans l’église où il avait siégé, mais dans celle qui portait
son nom les six autres étaient "honorés chacun dans sa cathédrale.
Dom Lobineau dit avoir vu
au prieuré de Saint Georges, de Dinan, « des vestiges d’un chemin pavé
destiné tout exprez, appelé pour cela le Chemin des sept Saints. » Il
ajoute :« On voit encore dans l’Église de Quimper, au costé
méridional de la porte du chœur, un ancien autel dédié aux sept saints, ou ces
sept évesques sont dépeints avec leurs attributs tirés de leurs principaux
miracles, et leurs noms au bas. »
Cet autel a disparu, mais
la petite niche qui le surmontait existe toujours à l’entrée du chœur, au
dessous de la statue de saint Corentin ; c’est là qu’on exposait aux
époques de ces grands pèlerinages la relique du saint patron. Les pèlerinages
des Sept Saints, appelé aussi Tro Breiz, se renouvelait, à la fin du
XIVe siècle (du moins dans l’Evêché de Vannes), quatre fois par an à
Pâques, à la Pentecôte, à la fête de saint Michel, et à Noël ; c’est ce
qu’on appelait les quatre temporaux ; la durée de chacun était d’un mois
(quinze jours avant, et quinze après chacune des quatre fêtes).
Malgré les dangers du
voyage, l’affluence des pélerins était considérable il a été possible d’évaluer
à trente cinq mille environ le nombre des personnes qui visitèrent pendant une
année à la fin du XIVe siècle, l’église de saint Patern à Vannes. Le
montant de leurs oblations s’éleva à une somme représentant huit à neuf mille
francs de notre monnaie.
Ce pèlerinage se faisait
à pied, en suivant une voie romaine qui, partant de Vannes, se rend à Quimper
en passant par Hennebont, la Chapelle Saint-Pierre en Rédéné, Quimperlé,
Mellac, Le Trévoux, Bannalec, la Trinité en Melgven, Locmaria-an-Hent en
Saint-Yvi, et Saint-Anne de Guélen en Ergué-Armel. Tout près du bourg de
Locmaria-an-Hent, était une fontaine appelée encore, au
XVIe siècle, Fontaine des sept Saints, qui était au moyen-âge très fréquentée
par les pèlerins, et dont, pour ce motif, le prieur de Locamand, à qui elle
appartenait, tirait un certain revenu. Après avoir visité les reliques de saint
Corentin, les pèlerins devaient se rendre, par la route de Pleyben et de
Morlaix, à Saint-Pol de Léon, d’où ils gagnaient successivement Tréguier,
Saint-Brieuc, Saint-Malo et Dol, en suivant la voie romaine la plus voisine du
littoral. Il existe, où il a existé, à peu de distance de ce parcours, des
chapelles ou des fontaines qui ont conservé le vocable des sept saints
Coetmaloën, Erquy, Plédran, Plouaret, Yffiniac, Maroué, Bulat.
En 1410, le duc de
Bretagne, Jean V, étant malade de la rougeole, à Rennes, fit vœu de faire
le voyage des Sept Saints.
Dans la première moitié
du XVIe siècle la coutume de ce pèlerinage n’avait pas disparu, mais les
anciennes traditions étaient bien altérées ; par son testament daté du 11
avril 1518, Nicolas Coatanlem s’engageait à faire porter un écu (s’il ne
pouvait l’aller porter lui-même) « Aux sept saincts de la Bretagne,
sçavoir à monsr sainct Pierre de Nantes, à monsr sainct Paul, à
monsr sainct Tudgoal, à monsr sainct Guillaume, à monsr sainct
Brieuc à Saint-Brieuc, à monsr sainct Sampson, à monsr sainct
Malo. »
Donc, dans l’itinéraire,
Nantes est substitué à Quimper ou à Vannes, et l’apôtre saint Pierre à saint
Corentin ou à saint Patern la ville de Saint-Brieuc a deux stations, l’une en
mémoire de son patron, l’autre en l’honneur de saint Guillaume. Dans cette voie
de l’oubli des vieilles traditions on marche vite ; à Brest, dans la
vieille église des Sept Saints, les sept fils de sainte Félicité furent
substitués aux saints évêques qui ont fait notre Bretagne on peut voir encore
dans l’église Saint-Louis un tableau qui représente le martyre de ces saints
jeunes gens. A Locmaria-an-Hent, un bas relief fort laid représente également
sainte Félicité entourée de ses sept enfants ; cette œuvra baroque est du
XVIIIe siècle.
Nos sept saints sont
représentés dans une belle plaque d’émail sur lave à la cathédrale de Quimper
(retable de l’autel dans la chapelle absidale) dans les verrières si
consciencieusement
étudiées de
Plounéour-Trez, et dans les remarquables vitraux de la chapelle du
Grand-Séminaire.
LES TROIS GOUTTES DE SANG (A.-M. T.).
Dans le Propre du bréviaire pour le diocèse de Quimper, au
mercredi avant le Mercredi des Cendres, on trouve les leçons qui suivent pour
la fête de l’Effusion du Sang du Crucifix. « Ce qui a donné lieu à la
solennité d’aujourd’hui, c’est un miracle éclatant que la tradition dit s’être autrefois
accompli dans l’église de Quimper. Un habitant de la ville, homme honorable et
riche, allant partir pour la Terre-Sainte, confia à un ami la garde de sa
famille et l’administration de valeurs très considérables, et cela sans appeler
personne en témoignage. Il consacra plusieurs années à son pèlerinage, et quand
il fut enfin de retour il réclama de son ami le dépôt qu’il lui avait confié
celui-ci déclara qu’il n’avait rien reçu. Le pèlerin frustré le traduisit en
justice, mais ne pouvant, faute de témoins, prouver la culpabilité, il demanda
que les deux intéressés fussent admis à prêter un serment solennel devant le
Crucifix, admettant que cette épreuve terminerait l’affaire. Ils se rendirent
donc tous deux à la Cathédrale, et là, au moment même où le dépositaire
ajoutait le parjure à son premier crime, les pieds du Crucifix de bois,
attachés par un seul clou se séparèrent, et répandirent trois gouttes d’un sang
miraculeux. La réalité du prodige ayant été bien établie, il fut réglé que pour
en perpétuer la mémoire, la fête de l’Effusion du Sang du Crucifix, se
célébrerait chaque année le mercredi avant les Cendres. Les trois gouttes de
Sang sont encore conservées très religieusement avec l’image du Crucifix dans
la cathédrale de Quimper. »
Dans cette dernière
affirmation il y a deux inexactitudes 1° il n’y a plus que deux gouttes ;
celle qui était à part, dans un vase de cristal, d’après les inventaires de
1273 et de 1361 a disparu depuis un temps immémorial 2° du grand crucifix de
bois il n’y a plus que la tête, le reste a été brisé par les terroristes en la
fête de saint Corentin, 12 décembre 1793.
La fête de l’Effusion du
Sang du Crucifix se célèbre à Quimper, au moins depuis le
XIVe siècle ; le crucifix miraculeux était vénéré sur un petit autel
placé entre les deux piliers du fond du chœur sur une colonne dominant le
maître-autel était une châsse en vermeil exécutée en 1219 par les soins de
l’évêque Rainaud et ornée des figures des douze apôtres ; destinée à
recevoir les reliques de saint Ronan elle renferma aussi plus tard les gouttes
de Sang avec leurs nappes. En 1790, elles furent extraites du reliquaire qui
disparut dans l’odieuse confiscation de l’argenterie des églises, mais elles
furent sauvées en 1793 en même temps que le Bras de saint Corentin. À partir de
ce moment ces deux principaux trésors de la cathédrale de Quimper n’ont plus
qu’une seule et même histoire, et comme il nous fallait, dans l’annotation qui
suit, parler des Trois Gouttes de Sang, pensant que nous ne serions
pas compris si nous ne donnions pas une notice sur ce précieux objet, nous
avons inséré le récit qui précède.
LES RELIQUES ET LE CULTE DE SAINT CORENTIN (A.-M. T.).
Inutile de revenir sur l’exode des reliques de nos Saints quittant la
Bretagne pour être soustraites aux profanations des Normands. Dès que le danger
se fut manifesté, le corps de saint Corentin fut exhumé de son tombeau dans le
chœur de la cathédrale, et pendant quelque temps resta caché dans le pays.
1° Quimper garda au moins
un bras, comme on le voit par un inventaire de 1219 (Cartulaire de Quimper).
Depuis des siècles cette relique a disparu de la cathédrale sans qu’on sache ni
quand, ni comment.
2° Entre 910 et 920, le
monastère de Saint-Magloire de Léhon, près Dinan, possédait une partie notable
des restes de saint Corentin ; il y a lieu de croire que cette possession
datait de la première translation (876-880).
3° Montreuil-sur-Mer (aux confins de la Flandre et de la Picardie), reçut avec
le corps de saint Conogan, une partie notable du corps de saint Corentin.
4° Au commencement du
Xe siècle (910-920), les Normands gagnant toujours du terrain, Salvator,
évêque d’Aleth, et Junanus, abbé de Léhon, emportant les corps saints dont ils
avaient la garde, allèrent jusqu’à Paris où ils déposèrent les reliques des saints
bretons dans l’église de Saint-Barthélemy, d’où une partie peu notable des
ossements de saint Corentin fut apportée à Corbeil.
5° Plus tard, l’abbaye de
Marmoutiers reçut de Paris la plus grande partie des reliques de saint
Corentin, et en particulier son chef, mais il en demeura une partie encore fort
importante dans la ville royale.
6° C’est là, dans
l’église Saint-Magloire, qu’au XIIe siècle Philippe-Auguste en obtint une
part pour un monastère de religieuses qu’il fondait alors près de Mantes, au
diocèse de Chartres, monastère qui prit le nom d’Abbaye de Saint-Corentin. Une
autre partie fut donnée au célèbre monastère de Saint-Victor (de Paris), mais
beaucoup plus tard, à l’époque des guerres de religion.
7° Les reliques qui
étaient demeurées au trésor de Saint-Magloire (de Paris) arrivèrent en la
possession de l’Oratoire (du cardinal de Bérule). Elles appartiennent
maintenant à l’église de Saint-Jacques du Haut-Pas et nous aurons à y revenir.
Voilà donc bien des
églises en possession des reliques de saint Corentin, mais sa cathédrale et son
diocèse ne possédaient même plus une parcelle de ses os. Plusieurs fois,
paraît-il, les moines de Marmoutiers avaient été instamment priés de rendre à
la Cornouaille quelques fragments du corps de son premier évêque, mais ces
démarches étaient restées sans succès.
LE BRAS DE SAINT CORENTIN
À QUIMPER.
Enfin en 1619 Guillaume
Le Prestre de Lézonnet évêque de Quimper adresse une nouvelle demande ; il
le fait par écrit.
Le 10 mai 1623 se
trouvant à Tours il réclame de vive voix, et Jacques Dhuisseau grand prieur de
Marmoutiers, de l’avis du chapitre de ses moines, accueille favorablement les
instances de l’évêque auquel il donne Le Bras de Saint Corentin (l’os
humerus). Il donne en même temps une relique du même saint à Guillaume Le
Gouverneur évêque de Saint-Malo.
Guillaume Le Prestre
dépose le Bras de saint Corentin dans son manoir de Kervégan (paroisse de
Scaër), le laisse là pendant dix-sept ans, et ne s’en occupe plus que le jour
de sa mort. Il lègue alors 1.500 livres pour aider à faire un reliquaire.
Le 16 novembre 1C40 les
chanoines Étienne Follart archidiacre de Poher, et Julien Le Texier arrivant de
Scaër où ils se sont rendus sur les instances de l’évêque mourant, remettent au
trésor de la cathédrale le Bras de saint Corentin dans la petite caisse et avec
les actes de donation venus de Marmoutiers.
Depuis deux ans une terrible peste décimait la population de Quimper ; le fléau s’était déclaré après une odieuse profanation de la statue dominant la fontaine de saint Corentin. Le matin du 2 février 1640 un saint prêtre de la Compagnie de Jésus, le P. Pierre Bernard avait en révélation que c’était à saint Corentin qu’il fallait s’adresser pour obtenir la cessation de l’épidémie. Le procureur syndic informé ayant assemblé les bourgeois à la maison commune, le vœu avait été formulé le jour même ; sans retard, la fontaine du saint fut réparée, la statue remplacée, et celle qui avait été mutilée, placée après restauration dans la cour du collège, pour y devenir l’objet de la vénération des écoliers[7]. Cela ne pouvait suffire aux pieux bourgeois de Quimper ils réunirent tout ce qu’ils purent trouver de ressources pour vénérer dignement et placer honorablement la relique tant attendue.
Le 3 mai 1643 le jubé construit à grands frais à l’entrée du chœur pour
recevoir le Bras de saint Corentin était enfin terminé ; la chasse
d’argent surmontée de deux anges et de l’image du saint était toute
prête ; la veille de ce jour le pieux évêque René du Louet visita la
relique, reconnut les cachets dont elle avait été scellée (de l’abbaye de
Marmoutiers, des évêques de Quimper et de Saint-Malo, etc.) et la caisse même
qui portait l’empreinte de ces sceaux. Il dressa un nouveau procès-verbal. La
translation se célébra avec une solennité inouïe, et avec le concours du
Chapitre, de tout le clergé séculier et régulier de la ville et de Kerfeunteun,
du Présidial, de l’Hôtel de Ville ; la station de la procession solennelle
fut l’église de Locmaria. Une foule innombrable suivait le cortège. Pendant
huit jours la relique resta exposée à la vénération ; la grand’messe et
les vêpres se chantaient avec solennité et la procession se faisait à la
cathédrale, avec le même concours du clergé, des religieux, des magistrats et
du peuple.
On peut dire qu’à partir
de cette date le Bras de saint Corentin est devenu le palladium de la
ville de Quimper. L’octave de la translation ayant été célébrée, il fut placé
sur le jubé construit à cet effet, et de 1640 jusqu’à la Révolution il ne fut
descendu (c’est le mot consacré) que trois fois le 28 août 1768, par
Auguste-François-Annibal Guillé de Farcy, le 8 juillet 1782 et le 6 mai 1785
par Toussaint Conen de Saint-Luc. Le cérémonial fut exactement le même qu’en
1643, et les solennités durèrent encore huit jours. À ces processions
figuraient aussi les autres reliques que possédait la cathédrale, et la statue
d’argent de saint Corentin.
Cette statue avec les
reliquaires en métal précieux fut confisquée en 1790, et les reliques restèrent
sans aucune châsse convenable pour les exposer.
En 1791 l’évêque
constitutionnel Expilly fit démolir le jubé élevé d’après le vœu des bourgeois
et qui, il faut bien le dire, avait mieux prouvé leur piété et leur générosité
que leur bon goût. En dépit de l’enthousiasme qu’elle avait inspiré au bon Père
Maunoir, cette massive construction masquait le chœur on peut donc savoir gré
au prélat intrus, à ses vicaires épiscopaux, au maire Le Goarre et à l’entrepreneur
Castellan d’en avoir débarrassé la cathédrale. Alexandre Expilly fit alors
placer à l’entrée du chœur les immenses statues de Notre-Dame et de saint
Corentin qu’on peut voir aujourd’hui à l’église de Penmarc’h.
Dans la nuit du 8 au 9
décembre 1793, Daniel Sergent maître menuisier, et Dominique Mougeat
sous-diacre (assermenté), sacristain de la cathédrale, prirent le Bras de saint
Corentin et les Nappes des Trois Gouttes de Sang, traversèrent la rue
Neuve, le chemin de Pen-ar-Stang et transportèrent leur pieux larcin au
presbytère du Petit-Ergué ou Ergué Armel ils le confièrent au prêtre
constitutionnel Claude Vidal, mais en réalité ce fut le très catholique et très
vénérable maire M. Loëdon qui veilla sur le dépôt à lui confié. Daniel Sergent
et Dominique Mougeat avaient été bien heureusement inspirés, car trois jours
après, un hideux personnage nommé Dagorn[8] profanait
odieusement la cathédrale, criblait de balles les tableaux, brisait les
statues, violait les tombeaux et brûlait sur le champ de bataille un immense
amas de débris amoncelés. Après les événements de Thermidor (28 juillet 1794),
les catholiques et les constitutionnels crurent un instant au retour de la
liberté religieuse et Daniel Sergent alla reprendre au Petit-Ergué le Bras
de saint Corentin et les Trois Gouttes de Sang ; lui-même fit
deux châsses en bois sculpté et mouluré et c’est dans ces pauvres reliquaires
qu’il les restitua à la cathédrale de Quimper, la veille de la fête de saint
Corentin, 11 décembre 1795 cette restitution fut faite au clergé schismatique.
Les deux châsses furent portées en procession le lendemain dans la pauvre
cathédrale dépouillée, puis on les plaça dans l’église à l’endroit où elles
restèrent, bien négligées, jusqu’en 1821 ou 1825 les trois évêques qui se
succédèrent après le Concordat ne s’occupèrent pas d’en reconnaître le
contenu ; toutefois, Mgr Dombideau de Crouseilhes prouva qu’il admettait
l’authenticité du Bras de saint Corentin, puisqu’en 1819 il permit d’en
détacher une parcelle pour la paroisse de Plonévez-Porzay (parcelle révisée le
14 juillet 1855 par Mgr Sergent).
Le 24 juillet 1807, M.
l’abbé Le Guernalec de Keransquer, originaire du diocèse de Quimper, vicaire
général de Mgr de Barrai, archevêque de Tours, arrivait à Quimperlé, apportant
un fragment d’un os de saint Corentin, seul débris échappé à ses reliques
conservées à Marmoutiers. Le dimanche suivant, 2 août, Mgr Dombideau, évêque de
Quimper, en faisait la réception avec une grande solennité, mais la relique
(l’ossiculum) ne fut apportée dans la ville épiscopale que deux ans après, et
la translation en passa à peu près inaperçue.
Dans les inventaires
dressés par ordre épiscopal le 26 avril 1816, le 16 juillet 1814, le 12 janvier
1818, le 3 septembre 1821 sont invariablement signalés deux tombeaux contre les
piliers à l’entrée du chœur, et contenant à droite, la Nappe des trois
Gouttes de Sang ; à gauche, le Bras de saint Corentin.
En 1825, nouvel inventaire,
mais cette fois il n’est plus fait mention des deux tombeaux et de leur
contenu. C’est la période de l’oubli presque complet, du moins pour
le Bras de saint Corentin, car le 23 décembre 1829 le Chapitre décide
que les Trois Gouttes de Sang placées dans une nouvelle châsse
élégamment vitrée seront placées dans la chapelle à laquelle se rattache leur
souvenir. Mais pourquoi les reliques ont-elles été retirées de la place occupée
durant un quart de siècle ? C’est qu’il a fallu les reléguer à la sacristie
pendant qu’une escouade de barbares étend le badigeon sur les colonnes et les
murs noircis de la vieille église. Bientôt il n’y a plus que quelques prêtres
et quelques serviteurs de la cathédrale à connaître l’existence d’une vieille
petite caisse contenant un os qui pourrait être le Bras de saint Corentin,
comme on le dit timidement.
Le 9 décembre 1879 M. de
Penfentenyo, récemment promu à l’administration de la paroisse Saint-Corentin,
visite avec M. François Daoulas fils, maître menuisier, le mobilier de la
sacristie et y trouve l’os dont il vient d’être parlé, toujours dans sa petite
caisse ; celle-ci, très étroite, est placée en diagonale dans une autre
caisse plus large. La petite caisse porte différents cachets rompus, mais sans
que les fragments en soient détruits ou perdus. Évidemment c’est une relique
autrefois reconnue.
Pour la première fois
j’entends parler de cette trouvaille le mardi de Pâques 1880. Au mois d’août
suivant M. le Curé de la Cathédrale me prie de vouloir bien m’en occuper. Sur
les dires de ma grand’mère[9] et
de Mademoiselle Rosine Brisson, petite-fille du menuisier Daniel Sergent,
j’avais longtemps cru que le Bras de saint Corentin avait réellement été
restitué à la cathédrale, puis, faute de le voir vénéré, j’avais dû renoncer à
cette conviction, quand parut en 1877 la Monographie de la Cathédrale de
Quimper par M. Le Men, le savant archiviste du Finistère. Or cet ouvrage
affirmait la possession du Bras par la cathédrale, donnait la teneur du
procès-verbal dressé par les prêtres assermentés de 1795, la description
minutieuse des deux caisses qui contenaient la relique, la nomenclature des
cachets qui y figuraient. Reconnaître le taffetas vert dont la relique de saint
Corentin avait été enveloppée à Marmoutiers, la petite caisse dans laquelle
l’avait insérée le grand-prieur Jacques Dhuisseau, la châsse ou tombeau
fabriquée par D. Sergent, les sceaux de Marmoutiers, de Guillaume Le Prestre de
Légonnet et de René du Louet me fut chose très facile. Je ne reconnus pas le
sceau de Guillaume Le Gouverneur, évêque de Saint-Malo je manquais pour ceci
des éléments nécessaires. Mgr Nouvel chargea M. Jégou, vicaire général, de
continuer l’enquête commencée par moi. Il déclara en être très heureux, mais
négligea de s’en occuper. À sa mort, M. du Marhallac’h, vicaire général, lui
fut substitué à cet effet et mit à ses investigations une ardeur peu commune.
C’est à lui que sont dues les indications sur les inventaires où figure la
relique pendant les premières années du siècle, et les explications très
admissibles sur l’état d’esprit qui amena l’oubli du Bras tant vénéré
autrefois. Son rapport fut présenté à l’Évêque en mai 1885 ; en 1886, le
30 novembre, Mgr Nouvel adressa à son clergé la lettre par laquelle il
reconnaissait comme étant le Bras de saint Corentin la relique trouvée à la
sacristie par M. de Penfentenyo, et depuis soumise à de consciencieuses études.
Le 9 décembre, devant les chanoines réunis, Monseigneur et M. Téphany,
secrétaire du chapitre, scellaient le nouveau reliquaire destiné à l’enfermer
désormais.
Le samedi 11 décembre
1886, au chant enthousiaste du Pange solemnes soutenu par toute la
puissance des grandes orgues, devant une foule de prêtres lui formant un
glorieux cortège, en présence d’un peuple joyeux, le Bras de saint Corentin,
après plus de soixante ans d’oubli, fait son entrée dans sa cathédrale, naguère
si pauvre et si nue, maintenant si belle et si somptueuse, et après avoir fait
le tour de la noble église il est déposé sur un trône digne d’un roi, à
l’entrée du chœur ; c’est là qu’entouré de palmes, de fleurs et de
lumières, il reçoit les hommages de la Cornouaille et aussi ceux du Léon,
pendant cette soirée et les deux jours qui suivent. Le dimanche 12, Quimper,
Concarneau, Douarnenez, Pont-PAbbé, offrent à saint Corentin un triomphe
incomparable ; jamais peut-être ville n’a offert une décoration aussi
somptueuse sur le parcours d’une procession. Le quartier favorisé est la rue
Neuve, où Daniel Sergent demeurait quand il reçut chez lui le Bras de saint
Corentin, et le zèle et la dévotion des braves gens de cette rue justifient
grandement le choix de cet itinéraire. Le lundi 13 la cathédrale est
insuffisante pour recevoir la multitude innombrable venue des paroisses rurales
du canton de Quimper sous une pluie torrentielle, avec un vent qui a exigé des
efforts héroïques aux porteurs de bannières. Et depuis ces trois jours, 11, 12,
13 décembre 1886, la dévotion à saint Corentin a repris une intensité dépassant
probablement celle qui se manifesta vers le milieu du XVIIe siècle sous
l’influence du P. Maunoir et du P. Bernard. Chaque année, le dimanche qui suit
le 12 décembre, à cinq heures du matin, la cathédrale est envahie par la foule
des pèlerins venus de la campagne pour entendre déclarer saint Corentin,
c’est-à-dire pour écouter son panégyrique. Aux offices solennels et surtout à
la procession du Bras de saint Corentin (qui suit le panégyrique français,
après les vêpres) ce sont surtout les fidèles de la ville qui sont
présents ; et c’est un spectacle bien touchant que celui des visages se
tournant avec une visible vénération vers le splendide reliquaire où, dans son
cylindre de cristal aux frontons d’or et d’émail, apparaît le Bras de saint
Corentin, reliquaire non seulement riche mais gracieux sur une plate-forme
toute brillante d’or, quatre statuettes d’argent portent la relique et deux
autres l’accompagnent elles représentent Salvator, évêque d’Aleth, et Guillaume
Le Prestre de Lézonnet, évêque de Quimper, Jacques Dhuisseau, grand prieur de
Marmoutiers, et Mgr Anselme Nouvel, évêque de Quimper et de Léon, enfin M. de
Penfentenyo et M. du Marhallac’h c’est donc comme un résumé de l’histoire de
cette relique.
Le jeudi 20 juillet 1893
le Bras de saint Corentin fut extrait pour la première fois de son nouveau
reliquaire. M. Nicolas, recteur de Plomodiern, avait demandé à Mgr Valleau et
au Chapitre une parcelle du Bras vénéré pour la chapelle érigée au lieu où le
saint passa sa jeunesse sacerdotale. Cette demande était trop bien justifiée
pour ne pas être favorablement accueillie. La parcelle accordée fut insérée
dans un reliquaire rappelant celui de la cathédrale. Le samedi 22, elle était
apportée à Ploéven par M. Corentin Toulemont, chanoine délégué du Chapitre, et
recevait bien des hommages en passant par Plogonnec, Locronan et
Plonévez-Porzay La procession de Plomodiern arrivait vers le soir à Ploéven
pour recevoir la relique et repartait presque immédiatement. Le dimanche 23, à
la procession de Plomodiern s’unissaient celles de Douarnenez, Ploaré, Tréboul,
Le Juch, Kerlaz, Plonévez-Porzay, Ploéven, Locronan, Quéménéven, Dinéault,
Saint-Nic, Trégarvan, Argol, Telgruc, Lanvéoc et Crozon. Toutes les solennités
de ce beau jour furent présidées par Mgr Valleau.
Cette année 1900, le
dimanche 22 juillet, Mgr Dubillard célébrait à Plomodiern une fête encore bien
belle. Il bénissait la nouvelle chapelle érigée là où, en 1893, on trouvait si
peu digne de saint Corentin le pauvre édifice élevé au XVe siècle. Pendant
ces six années, M. Nicolas s’était fait quêteur volontaire, et il avait glané à
peu près de quoi réaliser son beau rêve. Un architecte particulièrement
dévot à saint Corentin avait été initié à ce rêve et l’avait traduit dans le
plus gracieux des projets. Outre les processions des paroisses énumérées plus
haut, nous trouvions encore cette fois à Saint-Corentin de Plomodiern :
Châteaulin, Port-Launay, Saint-Ségal, Saint-Coulitz et Cast.
Puisque j’ai uni
l’histoire des Trois gouttes de Sang à celle du Bras de Saint
Corentin, il me faut dire que Mgr Nouvel en fit la vérification le samedi 27
janvier 1883. En les extrayant de la châsse de saint Ronan, en 1714, l’évêque
Hyacinthe de Plœuc n’avait point brisé les sceaux apposés par François de Coëtlogon
en 1687 il s’était donc écoulé 203 ans depuis le dernier examen de la relique.
J’ai assisté à cette
vérification : les nappes, en parfait état de conservation, sont d’une
belle toile, et ornées de barres bleues d’une jolie nuance ; aux
extrémités, de longues franges font corps avec le tissu. On y voit des trous
qui doivent correspondre aux coupures des parties imprégnées de sang, car
celles-ci ont été mises à part, comme je l’ai dit. Le mercredi suivant, 31
janvier, Mgr Nouvel consacra l’autel des Trois gouttes de Sang. La
chapelle où il se trouve est ornée d’une belle verrière moderne où le miracle
est représenté d’une manière très frappante. Le dimanche 17 décembre, amende
honorable pour le centenaire de la profanation de la cathédrale en 1793.
Le dimanche 15 décembre
1895, la fête de saint Corentin est célébrée comme en 1886 par une procession
magnifique qui suit le même itinéraire. C’était le centenaire de la rentrée du
Bras de saint Corentin à la Cathédrale, et la dévotion populaire se manifesta comme
elle l’avait fait sept ans auparavant. Ces deux cérémonies furent célébrées sur
l’initiative de M. J.-C. Coat, curé-archiprêtre.
MONUMENTS DE SAINT CORENTIN (A.-M. T.).
Saint CORENTIN construisit la première Cathédrale de Quimper sur l’emplacement
que lui avait donné le roi Grallon, et le Père Maunoir dit qu’il y travailla de
ses mains. Il la dédia à Notre-Dame. Avant la Cathédrale actuelle, une autre
(d’après M. Trévédy), plusieurs (d’après M. Le Men) furent successivement
bâties.
La chapelle absidale est
actuellement la partie la plus ancienne de la Cathédrale ; construite au
XIe siècle en exécution d’un vœu à la suite d’une victoire remportée par
le comte de Cornouaille, Alain Canihart, elle fut modifiée dans le
XIIIe siècle, et rattachée à la nouvelle Cathédrale, jusque-là elle
formait un édifice à part.
Saint Corentin n’avait
point tardé à être patron de l’église de Quimper, de concert avec Notre-Dame.
La plus belle, la plus harmonieuse, la plus richement ornée des cathédrales de
Bretagne fut commencée en 1239 par l’évêque Rainaud, auquel on doit le chœur
les bas côtés qui l’entourent furent élevés par Yves Cabellic (1280), et Allain
Gonthier (1335), Gatien de Monceaux construit les voûtes du chœur (1408-1416),
Bertrand de Rosmadec les fait peindre (1417), orne les fenêtres de vitraux
peints et entreprend la construction de la nef ; en outre, il dote son
église d’un splendide mobilier. La nef est terminée en 1460 sous l’épiscopat de
Jean de Lespervez qui consacre une grande partie de ses biens à l’achèvement de
l’édifice ; en 1469 il fait construire le clocher central en charpente
recouverte de plomb (qui fut incendié en 1620). Thibaud de Rieux (1475), Alain
Le Maout (1487-1493), élevèrent le transept et ses voûtes Raoul Le Moél (1494)
fit faire les meneaux et les verrières des fenêtres de la nef, les balustres,
les galeries, les pinacles.
Mgr Graveran (1854), au
moyen du sou de saint Corentin donné par chacun des diocésains pendant cinq
ans, commence les flèches de la Cathédrale sur les plans de M. Joseph Bigot.
Mgr Sergent voit les flèches terminées et débarrassées de leurs échafaudages
(1856). Son épiscopat est la période de transformation pour la Cathédrale
1857-1859, reconstruction de la sacristie 1860, galeries de la nef
1862-1867 débadigeonnage, œuvre délicate remarquablement accomplie
par M. Mahé 1868 consécration du maître autel en orfèvrerie dessiné par M.
Boeswilwald, etc., etc.
Mgr Nouvel prit fort peu
de part aux travaux à exécuter dans sa Cathédrale, mais il lit continuer les
peintures murales de M. Yan’ Dargent, et il encouragea le curé archiprêtre M.
de Penfentenyo à qui l’on doit, entre autres choses, la restauration de la
chapelle absidale, l’autel et le reliquaire de saint Corentin.
Dans cette même
Cathédrale il nous faut signaler par ordre de dates :
1° Les représentations de
saint Corentin dans les verrières du chœur, de la nef et du transept
(XVe siècle).
2° Plusieurs bas reliefs
reproduisant les principaux faits de la vie du saint dans les panneaux de la
chaire à prêcher (1679, épiscopat de François de Coetlogon).
3° Petite statue de saint
Corentin, exposée tous les jours de marché, et très vénérée des paysans
Cornouaillais (XVIIe ou XVIIIe siècle).
4° Dans la chapelle de
saint Corentin : — le reliquaire décrit, ordinairement enfermé, mais
exposé pendant l’octave de saint Corentin, et aux principales solennités – un
curieux bas relief représentant l’évêque G. Le Prestre recevant de Jacques
Dhuisseau, prieur de Marmoutiers, le Bras de saint Corentin les peintures de
Yan’ Dargent au-dessus de l’autel, saint Corentin porté au Ciel par les anges
en face, la conversation de saint Corentin et de saint Primel. La seconde est
la plus belle de toutes les peintures murales de la Cathédrale de
Quimper ; les statues de saint Corentin et de saint Primel une
intéressante verrière moderne reproduisant en 16 médaillons les principales
scènes de la vie du Saint.
5° Dans la chapelle
absidale, un très beau vitrail de M. G. Cl.-Lavergne, représente saint Corentin
acceptant en présence de saint Guénolé, suivi des seigneurs bretons, l’offrande
de la Cathédrale de Quimper que le roi Grallon présente à Notre-Dame. À
l’entrée de cette même chapelle, saint Corentin figure encore avec saint
Guénolé derrière le pieux évêque René du Louet, qui bénit dom Michel Le Nobletz
et le P. Julien Maunoir, puis auprès de Mgr de Saint Luc, présentant à Pie VI
sa protestation contre la constitution civile du Clergé.
6° Chapelle de
Saint-Pierre Notre-Dame et saint Corentin acceptent les flèches de la
Cathédrale présentées par Mgr Graveran. (Vitrail de M. Léopold Lobin, de Tours,
1856.)
7° À l’entrée du chœur,
belle statue moderne de saint Corentin dans une jolie niche en granit au
dessous une seconde niche presque semblable abrite un petit reliquaire. En
dehors de la Cathédrale, le plus beau des vitraux où figure saint Corentin, est
celui de Rumengol, représentant l’institution du pèlerinage de Notre-Dame
d’après la tradition œuvre de M. Léopold Lobin[10].
Il faut aussi signaler la
belle verrière du Grand-Séminaire : saint Corentin ayant le Père Maunoir
agenouillé à ses pieds. (Œuvre de M. Georges Cl.-Lavergne.)
Si saint Corentin est
premier patron de la Cathédrale, de la Ville et du Diocèse de Quimper, il l’est
encore de sa très élégante chapelle érigée à la place de son ermitage en
Plomodiern, sur les plans de M. J.-M. Abgrall, chanoine honoraire, architecte.
Bâtie dans le style du XXIIIe siècle, cette chapelle a au-dessous de son
porche latéral une Scala, édifice couvert s’ouvrant par une grande baie
ogivale d’où l’autel est visible aux foules qui sont venues et viendront encore
honorer en ce lieu sanctifié le patron de la Cornouaille. Au sommet du fronton
se dresse une belle statue en kersanton représentant le saint évêque ; une
autre statue toute semblable, mais polychrome se voit à l’intérieur ;
enfin, sous le porche, saint Corentin est encore représenté, mais en costume de
solitaire et avec une physionomie d’adolescent, c’est-à-dire tel qu’il devait
être en arrivant ici. À quelques pas de la chapelle est la fameuse
fontaine. On trouve encore le patronage de saint Corentin à Carnoët, à
Saint-Connan, à Loperhet, dans des chapelles de Baud, Berrien, Poullaouen,
Scrignac. Le saint a des autels à Moëlan, à Beuzec-Cap-Sizun et aussi à Melgven
des statues à Châteaulin (église paroissiale et chapelle de Kerluan), Dirinon,
Le Faouet (chapelle de sainte Barbe), Kerfeunteun (chapelle de la Mère de
Dieu), Landeleau, Landrévarzec (chapelle de Quilinen), Meilars (chapelle de
Notre-Dame de Confors), Pencran, Penmarc’h, Pleyben, Plomeur, Plonévez du Faou
(chapelle de saint Herbot), Plouégat-Guerran, Plouguer, Riec, Saint-Divy la
Forest, Douarnenez, Pluguffan, Pont-l’Abbé, Esquibien, Landerneau, Roscoff,
Coray, Plounéour-Trez.
Il est représenté dans un
bas-relief sur les volets de la niche de saint Maurice à la chapelle de
Sainte-Cécile de Briec ; dans une peinture murale à l’église de
Poullan ; sur une colonne dans la nef de la cathédrale de Tréguier ;
belle peinture sur le lambris du sanctuaire de l’église du Bodéo. Statue dans
une chapelle de Caurel (ces deux dernières paroisses de l’ancienne Cornouaille
appartient présentement au diocèse de Saint-Brieuc.)
Je ne puis omettre de
dire que l’ami de saint Corentin et de saint Guennolé, le bon et populaire roi
Grallon à sa statue équestre en granit au fronton de la cathédrale de Quimper,
entre les deux belles tours.
LES RELIQUES CONSERVÉES DANS L’ÉGLISE DE SAINT-JACQUES DU HAUT-PAS À PARIS (A.-M. T.).
Il a été plusieurs fois question dans les annotations sur les reliques de
nos saints, de celles qui sont conservées dans cette église, et j’avoue que je
me suis demandé plusieurs fois si l’autorité diocésaine de Paris avait fait
tout ce qui était possible pour que chacune de ces reliques fût reconnue
séparément. La savante étude récemment publiée sur le cartulaire de l’abbaye de
Sainte-Croix de Quimperlé par MM. Léon Maitre et Paul de Berthou répond au
doute que je m’étais fait sur ce point, et prouve que l’enquête a été aussi
consciencieuse et aussi complète que possible. Je cite textuellement ce qui est
dit à ce sujet dans les observations à la vie de saint
Gurthiern :
« En 965, Salvator,
évêque d’Aleth, craignant les suites de la guerre entre Richard duc de
Normandie, et Thébaut, comte de Chartres, transporta à Paris les reliques de
onze évêques, deux martyrs et quatre abbés, presque tous Bretons, entre autres
des saints Magloire, Samson et Leutherne ou Lauthiern. Elles furent placées par
Hugues Capet dans l’église royale de Saint-Barthélemy. Les Bretons, ayant plus
tard remporté leurs reliques, en laissèrent quelques-unes à Paris, et c’est en
leur honneur que l’église des saints Barthélemy et Magloire fut reconstruite et
confiée aux Bénédictins. Vers 1138, les religieux allèrent habiter, hors de la
ville, la chapelle Saint-Georges qui prit le nom de Saint-Magloire ;
enfin, en 1572, ils emportèrent leurs reliques à l’hôpital Saint-Jacques [11].
Henri de Gondi établit ensuite un séminaire dans la maison des religieux ;
ce fut le séminaire Saint-Magloire, aujourd’hui Institution des Sourds-Muets.
En 1793, le Père
Tournaire, supérieur, fit cacher les reliques dans la terre. Elles en furent retirées
en 1797, et on les déposa dans l’autel paroissial de Saint-Jacques du Haut-Pas,
près de l’église de Saint-Magloire. Retrouvées en 1835 lorsqu’on substitua un
revêtement de marbre au revêtement de bois du maître-autel, tous les ossements
étaient mêlés ensemble. Toutefois, on savait à quels saints ils avaient
appartenu. Mgr de Quélen en fit la translation solennelle le 25 octobre 1835.
En juillet 1871, un incendie allumé par mégarde endommagea tellement les
châsses de bois doré placées dans la sacristie de Saint-Jacques du Haut-Pas,
qu’on dut placer les ossements dans d’autres reliquaires semblables. Les
authentiques, en date du 8 mars 1873, reproduisant les premières à demi
brûlées, émanent de Mgr Guibert et nous offrent bien, entre autres noms,
ceux des saints Magloire, Samson et Leutherne mais il n’y est point question de
saint Gurthiern.
Après nous être renseigné
avec soin nous avons acquis la conviction que M. de la Villemarqué a
lu Sancti Gurthierni là où il y avait Sancti Leutherni. La
similitude des désinences et l’éloignement de la châsse placée au sommet d’un
pilier du chœur, expliquent fort bien cette erreur. »
1. En voyant saint
Corentin vivre en ermite dans la forêt de Névet, et aller faire visite à un
autre solitaire plusieurs ont supposé que leurs ermitages étaient
voisins ; c’est une erreur. M. d Kerdanet a très bien désigné le lieu
sanctifié par saint Primel ; il est marqué par une chapelle aujourd’hui en
ruines, dans la paroisse de Saint-Thois, non loin de la route de Quimper à
Châteauneuf, sur un des points les plus pittoresques de cette contrée
accidentée.
2 L’ancienne Vie dit
que ces visiteurs étaient saint Malo et saint Patern ; au nom du premier,
don Plaine a substitué le nom de saint Melaine dans la traduction ; encore
aurait-il mieux valu qu’il se contentât de la note chronologique qu’il a placée
sur le texte latin. A.-M. T.
3 Ce n’est pas du
tout l’ancienne Vie qui indique la nationalité du serviteur de Grallon coupable
d’avoir mutilé le poisson de saint Corentin. Et d’abord, ce personnage n’est
pas un voleur ; Albert Le Grand l’appelle plus judicieusement « un
indiscret » ce n’est donc pas à lui qu’il faut appliquer la fameuse
strophe que l’on chantait trois fois dans la séquence ou prose usitée pour la
fête de saint Corentin
Aperitur clausa manus
Reddit furtum et fit sanus
Latro de Leonia.
Il s’agissait là d’un
voleur de profession, et vraiment Léonard de naissance, qui étant venu à
Quimper afin de pouvoir faire son métier dans la foule le jour où l’on
consacrait la cathédrale, s’empara d’un peloton de fil de soie au détriment
d’un pèlerin. Sa main se ferma sur l’objet du larcin et ne put s’ouvrir que
quand le larron eut réclamé l’intervention du saint patron de la Cornouaille et
promis la restitution. Non-seulement ce malheureux se convertit, mais il devint
un zélé propagateur de la dévotion à saint Corentin. La tradition populaire
(malencontreusement suivie par Albert Le Grand) a confondu le Léonard voleur de
soie (illustré par la séquence) et le mutilateur du poisson. A.-M. T.
4 On sait peu de
choses sur saint Tudy il débuta dans la vie religieuse sous la discipline de
saint Maudet, puis il vécut en solitaire à l’île qui porte son nom, et fonda
une abbaye là où est aujourd’hui la belle église paroissiale de Loctudy
(XIIe siècle). M. de la Borderie (tome III p. 166) suppose que cette
abbaye subsista peu de temps et qu’elle fut, non pas restaurée, mais remplacée
par un nouveau monastere avant la fin du XIe siècle où l’on voit figurer
dans deux chartes du duc Alain Fergent, les noms de deux abbés de saint Tudi
Guégon et Daniel. Ce nom d’abbé indique bien, il est vrai, des chefs de maisons
monastiques ; mais il y eut à une époque très reculée un collège de
chanoines ou de chapelains desservant l’importante église que les barons du
Pont (Pont-l’Abbé) avaient érigée dans les dépendances de leur château, en
l’honneur de saint Tudy ; on pourrait se demander si l’abbé de saint Tudy
n’était pas le prélat de ce collège canonial. Parmi les reliques dont il a été
parlé aux annotations de la Vie de saint Guénolé figurent celles de saint Tudy,
portées du monastère d’Anaurot à l’île de Groix, et retrouvées au
XIe siècle, sur les indications d’un moine de Sainte-Croix de Quimperlé.
Conservées dans l’île (du moins en partie) jusqu’à la Révolution, elles sont
aujourd’hui perdues. Saint Tudy est le patron de Groix, des deux paroisses qui
portent son nom, et de plusieurs chapelles. Avec saint Primel, il est
représenté dans un beau vitrail à la chapelle du Grand-Séminaire de Quimper.
A.-M. T.
5 C’est-à-dire le
château, situé au confluent de l’Odet et du ruisseau appelé le Frout. C’est en
effet à cette place que saint Corentin batit la cathédrale et la monastere où
il devait vivre entouré de ses religieux. Ce fut la le centre d’une ville
nouvelle appelée en latin Corisopitum, (parce que les habitants de la
contrée s’appelaient les Corisopites), et en breton Kemper qui
veut dire confluent ; l’ancienne ville s’etendait sur les deux rives
de l’Odet, mais en aval, la où sont les faubourgs de Locmaria et de Bourlibou,
rejoints alors par un pont. Cette vieille cité
s’appelait Civitas Aquilæ ou Civitas Aquilonia.
6 En se basant sur
cette particularité Au § XVI il est question de fil de soie en peloton mis en
vente et volé sur le marché de Quimper ; or, la fabrication de la soie en
France, par conséquent la vente du fil de soie sur les marchés de Bretagne
n’est certainement pas antérieure au VIIIe siècle. Francisque Michel
prouve même par des faits que la soie était encore très rare en France en 1315.
— À cela l’on peut répondre que Dom Plaine lui-même reconnaît les $ XVI, XVII
et XVIII comme n’étant pas antérieurs à l’époque désignée par M. de la
Borderie, car le fait qui y est raconté s’est produit lors de la consécration
de la Cathédrale, fixée par Dom Plaine au XIVe siècle.
7 Une grande et
belle statue de saint Corentin occupe maintenant la première place dans
l’ancienne église du Collège des Jésuites, aujourd’hui chapelle du Lycée de
Quimper.
8 Né à Rennes en
1758 successivement receveur des domaines à Plélan et à Carhaix, puis
contrôleur à Lesneven où il se trouvait en 1789.
9 Pauline
Boustouler, veuve de Pierre Thomas. Elle était douée d’une étonnante mémoire et
racontait avec une grande précision les scènes de la Terreur telles qu’elles
s’étaient produites à Quimper. Élevé près d’elle, j’ai pu recueillir ses
souvenirs ; elle mourut à un âge très avancé.
10 Voir S.
Corentin, Histoire de sa vie et de son culte, par l’abbé A. Thomas. J’ai
donné dans ce volume (aujourd’hui épuisé) une description détaillée (p. 248).
On trouvera dans ce livre et dans la Visite à la Cathédrale beaucoup de détails
qui ne peuvent trouver ici leur place.
11 Légende du
Bréviaire de Paris au 24 octobre fête de saint Magloire.
SOURCE : https://fr.wikisource.org/wiki/La_Vie_de_saint_Corentin
Saint Corentin. Procession des saints de Bretagne.
Diocèse de Cornouaille. Déambulatoire de la métropole Saint-Pierre de Rennes
(35).
Also known as
Corentin
Corentinus
Cury
Profile
Son of a British chieftain. Hermit at
Plomodiern in Brittany.
First bishop of
Cornouaille, (modern Quimper), France,
consecrated by Saint Martin. Signed the decrees of the Council of Angers
in 453.
Legend says that when a hermit,
he fed on a fish that
would regenerate after Corentius had taken a piece of its flesh.
c.490 of
natural causes
Additional Information
Book
of Saints, by the Monks of
Ramsgate
Lives
of the Saints, by Father Alban
Butler
books
Our Sunday Visitor’s Encyclopedia of Saints
other sites in english
images
sitios en español
Martirologio Romano, 2001 edición
sites en français
fonti in italiano
MLA Citation
“Saint Corentius of Quimper“. CatholicSaints.Info.
8 April 2019. Web. 12 December 2021.
<https://catholicsaints.info/saint-corentius-of-quimper/>
SOURCE : https://catholicsaints.info/saint-corentius-of-quimper/
Carnoët. Vallée des Saints. Saint Corentin
December 12
St. Corentin, Bishop and Confessor
[First Bishop of Quimper, in
Brittany.] HE was son of a British nobleman, and being educated
in the fear of God, retired young into a forest in the parish of Ploe-Madiern,
where he passed several years in holy solitude, and in the practice of great
austerities. Marcellus, who subscribed the first council of Tours, and the
several other bishops who came over with the Britons into Armorica, had
continued to govern their flocks without any correspondence with the French,
being strangers to their language and manners. These being all dead, it was
necessary to procure a new succession of pastors. St. Corentin was appointed
bishop of Quimper or Quimmer, which, in the British language, signified a
conflux of rivers, such being the situation of this place near the
sea-coast. The cities of Rennes, Nantes, and Vannes were reconquered by Clovis
I., and subject to him and his successors, and only became again part of the
dominions of the Armorican Britons in the ninth century. French bishops,
therefore, governed those sees, and even the Britons who were settled in those
parts. But Lower Brittany was at that time independent; first under its kings,
afterwards under counts. The count of Cornouaille (said in the legends to be
Grallo I., who died about 445), in imitation of Caradoc, count of Vannes, gave
his own palace at Quimper to serve the bishop, part for his own house, and part
for his cathedral. As low as in the year 1424, under an old equestrian statue
in the lower part of the church was read this inscription: Here was his
palace.
St. Corentin was consecrated by St. Martin at Tours,
says the legend, but that holy prelate died about the year 397, and the first
colony of the Britons was only settled by the tyrant Maximus under their first
king Conan, in 383, and their last greatest colonies under Riwal or Hoel I.,
about the year 520, when they recovered under Childebert part of what Clovis
had conquered. It seems, therefore, most probable that St. Corentin received
the episcopal consecration from one of St. Martin’s successors at Tours. He
subscribed the council of Angers in 453, under the name of Charaton. Having
long governed his church, worn out with his apostolic labours, he gave up his
soul to God before the end of the fifth century, probably on the 12th of
December, on which his principal festival is celebrated at Quimper, Leon, St.
Brieuc, Mans, &c. His name occurs in the English litany of the seventh
century, published by Mabillon. (Annal.) His relics were removed to Marmourtier
at Tours, in 878, for fear of the Normans, and are still preserved there. See
Dom. Morice, Hist. de Bret. t. 1, p. 8, and note 13, 14, 19. Lobineau, Vies des
Saints de la Bretag. p. 51.
Another ST. CORENTIN, now called
CURY, was honoured in Denvonshire and Cornwall. He came from little
Britain, and lived a hermit at the foot of Mount Menehent, which Parker, Drake,
&c., take for Menehout, in Devonshire. He preached to the inhabitants of
the country with great fruit, and died in that place in 401. See Borlase, Ant.
of Cornwall, &c
SOURCE : https://www.bartleby.com/210/12/126.html
Statue de saint Corentin, Église Saint-Nonna de
Penmarc'h
San Corentino di Quimper Vescovo
† Quimper, Francia, 453 circa
Patronato: Paralitici
Etimologia: Corentino = che ama danzare, dal
gaelico
Emblema: Bastone pastorale, Mitra, Piviale,
Pallio, Pesce
Martirologio Romano: A Quimper nella Bretagna in
Francia, san Corentino, venerato come primo vescovo di questa città.
San Corentino, in francese Saint Cury, eremita celtico proveniente dalla Cornovaglia, fondò il paese di Cury nel promontorio di Lizard, del quale divenne in seguito patrono. Un’antica croce si erige ancora oggi dinnanzi alla sua chiesa. Nel 1890 fu rinvenuto un affresco a Breage, chiesa madre di Lizard, che ritrae il santo con il piviale, la mitra ed il pastorale.
San Corentino è popolare anche in Bretagna, ove visse in eremitaggio, e parecchie leggende narrano di un pesce miracoloso da cui ogni giorno asportava un pezzo per cibarsene, ma nonostante ciò rimaneva in vita. Talvolta egli è infatti raffigurato in posizione eretta vicino ad una sorgente od un secchio, in cui nuota il pesce.
Il santo ebbe numerosi discepoli e dovette lasciare il suo eremo su pressione del popolo bretone, che in lui desiderava avere un degno pastore. Fu così che Corentino divenne primo vescovo della regione, la cui sede ancora oggi si trova presso Quimper. Morì infine verso l’anno 453.
Il culto del protovescovo crebbe notevolmente nel XVII secolo in seguito all’attività missionaria del Beato Giuliano Maunoir ed al restauro di diversi sepolcri antichi in Bretagna. Il nome di San Corentino compare però già in un messale di Winchester risalente al X secolo ed in una litanie di Canterbury dell’XI secolo. E’ invocato contro le paralisi e quale protettore dei paralitici.
Autore: Fabio Arduino