Statue de Jean de Ruisbroek dans la cathédrale
Saints-Michel-et-Gudule de Bruxelles (Belgique)
Bienheureux Jan Van Ruysbroeck
Chanoine régulier de Saint Augustin (+ 1381)
Martyrologe romain
Voici mon âme et mon cœur comme des vases.
Remplissez-les, mon Dieu. Je serai magnanime et audacieux. Je suis rempli de
vous et je désire encore. Voilà bien la vie d'union contemplative offerte aux
âmes libres qui adhèrent à Dieu seul. Il demeure en eux et ils demeurent en
lui.
Jean Ruysbroeck - La pierre étincelante
SOURCE : https://nominis.cef.fr/contenus/saint/209/Bienheureux-Jan-Van-Ruysbroeck.html
Antony van der Does (1609–1680).
The Mystic Jan van Ruysbroek / Mysticus Jan van Ruysbroek, circa 1660, 25.3 x
13.2, Rijksmuseum
Maître spirituel dont les leçons inspireront de
nombreux mystiques, Jean de Ruysbrœck a donné ses lettres de noblesse à la
littérature néerlandaise. Pourtant, la pauvreté de ses vêtements et son
humilité étaient telles, qu'il fut longtemps considéré par ses contemporains
comme un illettré. Ses premiers biographes continuèrent à accréditer cette
"légende" quoique son érudition théologique et patristique ainsi que
sa maîtrise du latin eussent été remarquables. Son talent littéraire lui permit
de rédiger en moyen néerlandais[1] des ouvrages qui contribuèrent
beaucoup à la formation de la langue des Pays-Bas. Ainsi, notamment avec L’Ornement
des Noces Spirituelles, un de ses premiers ouvrages et l'un des plus grands
chefs-d’œuvre de la littérature mystique chrétienne, il adopta, autant que
possible, malgré les difficultés considérables liées aux expériences mystiques,
un vocabulaire courant, qu'il voulait compréhensible par les simples laïcs
comme par les ecclésiastiques.
Jean de Ruysbrœck a été surnommé, à cause de la
sublimité de sa doctrine, le divin Contemplateur ou encore l'Admirable.
Les documents dont nous sous sommes servis peuvent en
partie être retrouvés sur le site:
http://livres-mystiques.com/index.htm
ou, plus rapidement, dans la rubrique :
http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/Ruysbroek/Ruysbrœck/table.html
Miniatuur uit het manuscript "Werken",
vervaardigd door Jan van Ruusbroec te Bergen-op-Zoom. Gepubliceerd in 1480./ Miniature
from the manuscript "Werken", manufactured by Jan van Ruusbroec in
Bergen-op-Zoom. Published in 1480, Universiteitsbibliotheek UGent
Miniatuur uit het manuscript "Werken", vervaardigd door Jan van Ruusbroec te Bergen-op-Zoom. Gepubliceerd in 1480./ Miniature from the manuscript "Werken", manufactured by Jan van Ruusbroec in Bergen-op-Zoom. Published in 1480, Universiteitsbibliotheek UGent
La vie de Jan van Ruysbrœck nous est connue grâce à
Henri Pomerius (1382-1431) qui fut bien placé pour obtenir des renseignements
sûrs. En effet, né en 1382, un an seulement après la mort de Ruysbrœck, il entra
au monastère des chanoines réguliers de Groenendael, où Ruysbrœck avait passé
toute sa vie religieuse. Devenu prieur, Pomerius vit mourir deux disciples
immédiats de Ruysbrœck: Jean de Hoelaere († 16 mars 1431) et Jean de Scoonhoven
(† 22 janvier 1431). Ce dernier se rendit célèbre en défendant la doctrine de
son maître Ruysbrœck, contre les attaques de Gerson.
Pomerius mourut le 2 juin 1469; il avait écrit son
ouvrage avant 1420, soit moins de quarante ans après la mort de Ruysbrœck, le
saint Prieur de Groenendael.
L'ouvrage de Pomerius comprend trois parties :
1°L'histoire de la fondation de Groenendael,
2°La biographie de Ruysbrœck,
3°La biographie de Jean van Leeuwen, le « bon
cuisinier ».
Un autre document précieux sur la vie de Ruysbrœck est
un prologue inséré en tête du manuscrit le plus complet de ses œuvres. Ce
prologue est d'un contemporain de Ruysbrœck, Maître Gérard[2], prieur d'une Chartreuse proche de
Groenendael. Ce manuscrit, datant de 1461, et qui appartenait jadis au prieuré
même de Groenendael, se trouve aujourd'hui à Bruxelles.
1-L'ENFANCE
ET LA JEUNESSE DE JEAN DE RUYSBRŒCK
Jean de Ruysbrœck (Jan van Ruusbroec) est né en 1293
dans le petit village de Ruusbroeck, situé entre Bruxelles et Halle. Ce village
du Brabant est aujourd’hui englobé dans l’agglomération bruxelloise. Sa famille
était très honorable et très aisée. Dès sa plus tendre enfance il aima s'isoler
dans la nature. À l'âge de 11 ans, il fut confié à un oncle, Maître Jean
Hinckaert, chanoine de Sainte-Gudule, qui l'éveilla très tôt aux vérités de l'Evangile,
et le mit dans une école pour y apprendre les lettres, la philosophie, puis les
sciences: humaine et divine.
Jean de Ruysbrœck devint prêtre à 24 ans, en 1317, et
exerça son ministère durant vingt-cinq ans à Bruxelles, comme chapelain de
Sainte Gudule, en compagnie de Maître Hinckaert et de Franco van Coudenberg,
chapelains de la même église et animés des mêmes désirs de vie vertueuse. C'est
pendant sa présence à Bruxelles qu'il rédigea ses premiers ouvrages, écrits en
flamand[3], en réalité, en dialecte brabançon. Ces
ouvrages, parus entre 1330 et 1336, constituent l'essence même de sa doctrine
fondée essentiellement sur son expérience mystique. On peut citer:
– Le Royaume des Amants de Dieu,
– L'Ornement des Noces Spirituelles. Ce
livre commente une citation évangélique: Voici l’Époux qui vient, allez à
sa rencontre. (Mat, XV, 6) C’est surtout par Les Noces Spirituelles que la
doctrine Ruysbrœckienne se répandit dans les pays germaniques.
– L'Anneau de la Pierre Brillante
– La foi chrétienne et Les quatre
Tentations virent le jour entre 1336 et 1343
La sainteté de Jean de Ruysbrœck était telle que ses
hagiographes rapportèrent de nombreux miracles et légendes, destinés à montrer
les faveurs que Dieu lui réserverait tout au long de sa vie. Évidemment
il faut prendre ces légendes avec précaution et nous ne nous y attarderons
jamais. Cependant pour notre divertissement, nous rapportons ici un fait
étonnant raconté par un religieux[4] anonyme, son premier biographe:
"À peine l'enfant avait-il sept jours, comme sa
nourrice allait le laver dans un bassin, il se tint debout sans aucun autre
appui que celui d'une grâce particulière de Dieu."
On raconte aussi que lorsque sa maman fut décédée,
elle lui apparut à plusieurs reprises pour lui demander un soulagement à ses
peines du Purgatoire. Et l'on dit que, dès la fin de sa première Messe, le
jeune prêtre "apprit, dans une apparition certaine de sa mère,
qu'elle était enfin délivrée de toute peine."
Revenons maintenant à des choses plus terre à terre.
Prêtre séculier, Jean décida de suivre le Christ
humble dans la voie de l'humilité, et de se conformer autant qu'il le pourrait
à ce modèle, au point de passer même pour méprisable et sans valeur aux yeux de
tous ceux qui ignoraient sa vie très sainte. Cependant, il eut l'occasion, à
Bruxelles, de s'opposer fortement à Bloemardinne, une femme qui fut
l'initiatrice d'une secte, satanique dirions-nous aujourd'hui, secte qui
attirait de nombreux adeptes. Il semble que Bloemardinne dirigea la secte
"du libre esprit" vers 1307.
L'homme de Dieu s'opposa avec vigueur à ces erreurs
néfastes qui se multipliaient, et bien qu'il eût à soutenir un grand nombre d'adversaires,
il put démontrer pleinement la fausseté des écrits de cette femme perverse.
En 1343, Jan van Ruysbrœck, que nous appellerons le
plus souvent Ruysbrœck, ou encore le dévot Prieur, décida de vivre dans
la solitude, avec son oncle et Franco van Coudenberg, dans l'ermitage[5] de Groenendael[6] (Viridis Vallis, ou le Vauvert). Le
frère Jean van Leeuwen, surnommé "le bon cuisinier", devait bientôt
rejoindre la petite communauté naissante, qui, en 1350, adopta l'habit des
chanoines réguliers de saint Augustin, ainsi que la règle. Ruysbrœck put alors
s'adonner tout entier à la contemplation et se livrer à l'influence divine.
Lorsqu'il se sentait envahi par l'inspiration,
Ruysbrœck s'enfonçait dans la forêt toute proche, et se mettait à écrire tout
ce qui lui venait à la pensée. Puis, il retournait au monastère et partageait
avec ses frères les enseignements merveilleux qu'il avait reçus. Son influence
bénéfique était telle qu'on lui donna le surnom d'Admirable. Pèlerins et
fidèles affluaient pour l'écouter et prier avec lui.
Le prieur de Groenendael
Ruysbrœck avait déjà été prieur pour les quelques
compagnons qui, d’abord groupés autour de lui, dans la maison de son oncle,
l’accompagnèrent à Groenendael dans la forêt de Soignes, mise à leur
disposition par le duc Jean III de Brabant en 1343. Là, leur retraite était
mieux protégée, La communauté qu’il entendait former ne devait pas être
cloîtrée: sans règle, ni supérieur, avec très peu d’observances, elle devait
cependant permettre la réalisation d’une vie intérieure intense, et permettre
une vie commune, telle qu’elle sera plus tard décrite dans le livre, La
Pierre brillante. Cependant, la communauté d’abord informelle, évolua vers la
vie canoniale augustinienne, embrassée le 10 mars 1350. En effet, en 1349,
l'évêque de Cambrai avait vêtu les membres de la petite communauté de la tunique
blanche et de la chape noire des chanoines de saint Augustin. Le prévôt de la
communauté fut Franco van Coudenberg à qui Ruysbrœck, prieur, voulut demeurer
soumis.
La production littéraire de Ruysbrœck pendant cette
période reflète l’activité d’un conseiller spirituel attentif, discret et
retiré: ses ouvrages, surtout des opuscules, sont souvent de nature
explicative. On a parlé d'une mystique essentialiste sur la nature de laquelle
les erreurs d’interprétation sont aisées.
4-1-Dans un rayon de feu
Du vivant de Ruysbrœck, des hommes témoignèrent: nous
savons que très souvent le dévot Prieur se hâtait vers le bois, et, retrouvant
sa retraite solitaire, s'asseyait sous un arbre. Un jour qu'il y était resté
plus longtemps que d'habitude, les frères, inquiets, se mirent à le chercher à
travers les chemins de la vaste forêt.
"Par hasard, un frère, qui lui était assez
intime, le cherchant avec soin, remarqua de loin un arbre qui semblait par en
haut tout enveloppé d'un rayon de feu. S'approchant alors en silence, il trouva
l'homme de Dieu assis sous cet arbre, encore tout ravi hors de lui par la
grande ferveur de la douceur divine. De ceci il apparaît clairement de quelle
ferveur intérieure d'esprit et de quelle splendeur il était enflammé en même
temps qu'illuminé, alors que le rayonnement en paraissait au dehors d'une façon
si manifeste."
4-2-La lévitation
À force de méditer la Passion du Seigneur,
Ruysbrœck "parvint à une telle abondance de la divine grâce, que
souvent il s'élevait dans le ravissement divin au-dessus de
lui-même." Les lévitations de Ruysbrœck ont souvent été constatées
par ceux qui vivaient proches de lui.
4-3-Des apparitions du Christ, de la Vierge Marie et
des saints
Les hagiographes de Ruysbrœck racontent que souvent
Notre-Seigneur Jésus-Christ visitait son fidèle serviteur avec une douceur très
intime, et l'enrichissait de multiples grâces; ainsi, un jour il lui apparut
visiblement avec la bienheureuse Vierge Marie, sa glorieuse Mère, et tous les
saints de la cour céleste. Jésus lui parla:
— Tu es mon fils bien-aimé, en qui j'ai mis ma
complaisance.
Et l'embrassant, il dit à sa Mère et aux chœurs des
saints présents:
— Voici mon enfant d'élection.
En retour, le dévot Prieur manifestait pour le
Seigneur Jésus, une grande familiarité et un amour hors du commun. De plus, en
plusieurs circonstances il eut avec le Seigneur Jésus des entretiens
cachés, dont il n'est pas permis aux hommes de parler". Cela, le
dévot Prieur le fait entendre parfois en ses livres et le "Bon
Cuisinier" le rapporte lui aussi; "car ce dernier[7] le vit un jour élevé en une telle
gloire, qu'à ce moment, personne parmi les vivants ne le surpassait en
mérites."
5-LES
BONS EXEMPLES DONNÉS PAR RUYSBRŒCK
Beaucoup d'hommes remarquables de Flandre, de
Strasbourg, de Bâle et principalement des villes du Rhin, souvent élevés en
dignité, venaient à Ruysbrœck, désireux de le voir et de bénéficier de ses
conseils. Et le bon Prieur se montrait si prévenant envers eux, qu'il
semblait avoir été prévenu par avance de leur venue.
5-1-Ruysbrœck et Tauler
Parmi les nombreux visiteurs qui vinrent trouver le
bon Prieur, l'un des principaux fut un certain dominicain, docteur en
théologie, du nom de Jean Tauler, très célèbre, tant à cause de sa rare
érudition que de sa grande sainteté de vie. Tauler visitait fréquemment J.
Ruysbrœck, car il l'avait en grande vénération. Cela transparaît fréquemment
dans les écrits de Tauler, dans lesquels on peut remarquer bien des points
empruntés, sans aucun doute, au vénérable Ruysbrœck. Cela montre aussi combien
Tauler, comme de nombreux visiteurs du dévot Prieur, progressa auprès de lui dans
la connaissance de la vie intérieure et contemplative.
5-2-Une vocation religieuse
Une femme, d'une haute naissance, avait coutume de
venir visiter le dévot prieur, malgré l'éloignement, faisant jusqu'à deux
milles, pieds nus. Elle fut confirmée par Ruysbrœck dans le mépris du
monde et l'amour de Dieu: abandonnant tous ses biens, elle se rendit à Cologne
où elle embrassa la vie monastique dans l'ordre des Clarisses.
6-LES
DERNIÈRES ANNÉES DE LA VIE DE RUYSBRŒCK
Durant les dernières années de sa vie, le dévot
Prieur, devenu presque aveugle, emmenait fréquemment avec lui, dans la forêt,
un frère chargé de transcrire sur des tablettes ce qu'il dictait sous l'action
de l'Esprit-Saint. Il agissait également souvent ainsi pour échapper au nombre
grandissant des visiteurs. Réfugié dans la forêt il dictait de nouveaux
ouvrages.
Déjà ses livres se répandaient, ainsi que nous
l'apprend Maître Gérard, le prieur des Chartreux qui écrit: "Et moi,
frère Gérard, de l'ordre des Chartreux, de la maison de Notre-Dame de la
Chapelle près Hérinnes, toutes les fois que je rencontrais de ces livres, je
les annotais soigneusement, selon la force de mon intelligence." Frère
Gérard "en avait lui-même pris une copie[8] et comme il y trouvait certains
passages obscurs, il pria Ruysbrœck de venir lui en donner l'explication. C'est
ce que fit le saint prieur..."
Gérard Groot[9] fréquentait également Groenendael et
profitait de l'influence et des enseignements du prieur.
La mort de Ruysbrœck
Quand il eût atteint sa quatre-vingt-huitième année,
Ruysbrœck commença à voir ses forces décliner. Il comprit qu'il allait mourir
bientôt. En effet, lorsque sa mère fut délivrée des peines du Purgatoire après
l'ordination de son fils, elle lui apparut plusieurs fois et lui prédit qu'il
s'endormirait joyeusement pendant le temps de l'Avent du Seigneur.
Le dévot prieur, très avancé en âge, se disposa donc à
mourir saintement. Il demanda à être transporté par les frères à l'infirmerie
commune des frères. "Là, atteint d'une grave attaque de fièvre et
souffrant en même temps de dysenterie, il passa sur son lit presque quinze
jours, dans une grande faiblesse. Enfin au milieu de ses frères en prière, et
après s'être recommandé dévotement à eux, tout présent d'esprit et le visage
radieux, il s'endormit heureusement dans la paix en un très doux soupir et sans
les signes ordinaires des agonisants." Il avait plus de
quatre-vingt-huit ans et était prêtre depuis soixante-quatre ans.
7-CE
QUI SE PASSA APRÈS LA MORT DE RUYSBRŒCK
7-1-Apparition à un médecin
Un médecin, ami de Ruysbrœck, ayant appris que son ami
était très malade se rendit aussitôt à Groenendael. Ayant constaté la faiblesse
du serviteur de Dieu, il voulut rester pendant quelque temps auprès de lui.
Après la mort de son ami, le médecin fut pris d'un léger sommeil, et il vit le
saint Prieur, revêtu des habits sacerdotaux, s'avancer vers l'autel, comme pour
témoigner, par cette vision, de son affection envers lui, et de la grâce
singulière qui l'animait durant la célébration de la Messe.
7-2-Guérison d'un cruel mal de dents
À l'époque de Ruysbrœck, la médecine était peu
efficace et il n'existait aucun remède pour soulager les maux de dents. Une
religieuse béguine de Malines, tourmentée depuis longtemps par un cruel mal de
dents, recouvra soudainement la santé après avoir approché de sa bouche une
relique, une dent[10] du saint prieur.
7-3-La translation du corps
Environ cinq ans après la mort du dévot Prieur,
Monseigneur Jean Tserclaes, alors évêque de Cambrai, voulut que les ossements
du prieur fussent enlevés de son tombeau et transportés par les frères dans un
nouveau sépulcre. Lorsque le tombeau fut ouvert, les frères y découvrirent
le corps et les ornements qui l'enveloppaient: tout était intact. Alors
on exhuma le corps, saint et vénérable, et on l'exposa pendant trois jours dans
l'enceinte du monastère de Groenendael afin qu'il pût être vénéré par tous ceux
qui le souhaitaient. Il s'exhalait du corps un parfum si agréable, qu'on aurait
pu croire que ce n'était pas le corps d'un mort, mais bien plutôt quelque
onguent d'une merveilleuse suavité.
Nous savons que Jan van Ruysbroeck est mort en 1381,
en odeur de sainteté. Lors de la suppression du monastère (1783) son corps fut
transféré à Sainte-Gudule de Bruxelles. Il fut béatifié par le pape Pie X en
1908. L'Église voulait, en effet, reconnaître d'une façon officielle le "culte
rendu de temps immémorial au vénérable serviteur de Dieu, Jean de
Ruysbrœck, chanoine régulier. Le décret de la Sacrée Congrégation des
Rites est du 1er décembre 1908; il a été approuvé par Pie X, le 9 du même
mois.
Historique de cette béatification
La cause de béatification de Ruysbrœck avait été
introduite grâce à Jacques Boonen, archevêque de Malines en 1624; elle dut être
suspendue en 1627, en raison des guerres qui affligeaient les Pays-Bas.
En 1783, le chapitre de Sainte-Gudule de Bruxelles
obtint un office et une messe en l'honneur de Jean Ruysbrœck, puis tout fut de
nouveau interrompu par la Révolution française.
Enfin, en 1883, le cardinal Goossens put réintroduire
la cause, et obtenir la reconnaissance du culte, ce qui équivaut à une
béatification. L'office et la messe propres du Bienheureux ont été accordés le
29 août 1909 au diocèse de Malines.
9-LES
ATTAQUES DIRIGÉES CONTRE LES TEXTES DE RUYSBRŒCK
Démêlés avec Gérard Groot et Jean Gerson (1363-1429)
Un grand maître de l'époque, Gérard Groot (Gérard le
Grand) rencontra plusieurs fois le Prieur de Groenendael. Un jour, il crut
trouver dans ses écrits des éléments qui ne lui semblèrent pas conformes à la
foi catholique, et il exprima ses doutes. Ruysbrœck lui aurait répondu:
— Maître Gérard, sachez vraiment, que jamais je
n'ai écrit une parole dans mes livres, que sous la motion de l'Esprit-Saint.
On sera étonné d'apprendre qu'après la mort de
Ruysbrœck, ses écrits, toujours si fidèles à la doctrine catholique,
rencontrèrent quelques difficultés avec Jean Gerson, le célèbre docteur en
sainte Écriture et Chancelier de Paris. C'est une lettre de Gérard Groot aux
moines de Groenendael, qui nous fait connaître les premières critiques dirigées
contre le livre de Ruysbrœck intitulé "L'Ornement des Noces
spirituelles". En effet, ayant examiné ce livre et n'ayant pas vraiment
compris la pensée de l'auteur exprimée dans la troisième partie du livre, Jean
Gerson le déclara d'abord suspect d'hérésie. Mais, ayant mieux approfondi la
doctrine de Ruysbrœck, Jean Gerson revint sur sa déclaration et reconnut
l'inspiration divine de ses œuvres. Toutefois, dans une seconde lettre, il
redit que les expressions, dont Ruysbrœck s'était servi pour exprimer sa
pensée, étaient parfois défectueuses. Gérard Groot ne précise pas les griefs
formulés contre Ruysbrœck: mais il ajoute "qu'il prit à partie le docteur
en question[11] et qu'il le mit à la raison."
Une autre attaque, rapportée par Gérard Groot, vint
d'Allemagne. "Un des nôtres, écrit-il, nous a fait savoir qu'un autre
savant et vénérable docteur, maître Henri de Hesse, a dit publiquement que le
livre des Noces contient beaucoup d'erreurs. Pour ma part, comme je vous l'ai
déjà dit ailleurs, j'avoue qu'il y a des expressions qui seraient à modifier:
si on les prenait au pied de la lettre, elles seraient fautives; mais pour ce
qui regarde le fond même de la doctrine je suis fermement convaincu de sa parfaite
orthodoxie..." Il est certain "que Ruysbrœck n'a pas
toujours employé les formules théologiques usitées alors, et Gerson était en
droit de le faire remarquer", affirme Gérard Groot. Mais il ne faut
pas oublier que Ruysbrœck écrivait pour le peuple et en langue vulgaire.
Par ailleurs, et il importe de le faire remarquer, la
matière qui est traitée dans Le Livre des Noces, concerne les plus hauts
sommets de l'union mystique. Les termes utilisés pour exprimer cette union
mystique échappent parfois à la terminologie technique habituelle en théologie.
10-PRÉSENTATION
RAPIDE DES ÉCRITS DE JEAN DE RUYSBRŒCK
Une certaine personne, ayant vécu à Groenendael, peu
de temps après la mort du Maître, proposa un ordre suivant lequel la lecture de
ses œuvres lui semblait le plus profitable. Dans la suite de notre étude nous
approfondirons les œuvres de Ruysbrœck pour tenter d'en dégager la
spiritualité. Nous ne suivrons pas dans notre étude des œuvres de Ruysbrœck
l'ordre indiqué par cette personne, mais pour l'information de nos lecteurs,
nous présentons ici, en quelques mots et selon cet ordre, le contenu des œuvres
de Ruysbrœck:
– Le livre des Douze vertus insiste
particulièrement sur l'humilité, inspirée par la contemplation de la puissance
de Dieu et de sa souveraine bonté. À partir de là, le lecteur peut, par
l'obéissance et la pauvreté d'esprit, embrasser totalement la volonté du
Seigneur.
– Le livre des Douze points de la vraie foi est
essentiellement une paraphrase du Credo.
– Le Miroir du salut éternel, résume la
doctrine de Ruysbrœck.
– Les Sept degrés de l'échelle d'amour spirituel présentent
l'échelle mystérieuse par laquelle on s'élève jusqu'à l'intimité amoureuse avec
Dieu. Cette échelle indiquée par Ruysbrœck a très certainement inspiré sainte
Thérèse d'Avila.
– Les Sept clôtures énumèrent les enceintes
dans lesquelles une âme doit s'enfermer pour arriver à la cohabitation avec les
trois personnes de la Sainte Trinité.
– Le livre des Quatre tentations, très court,
s'élève contre les principales tendances de toutes les époques: l'amour de ses
aises et du confort, l'esprit d'hypocrisie, l'orgueil de l'esprit qui veut tout
comprendre, et la fausse liberté, qui, déjà au temps de Ruysbrœck, inspirait la
secte des Frères et des Sœurs du libre esprit, comme le font, de nos
jours, la plupart des sectes.
– Le livre du Tabernacle Spirituel, décrit
le Tabernacle de l'Ancien Testament, avec les prescriptions données par Dieu
pour sa construction. Il en fait l'application aux sept demeures spirituelles,
celles que les âmes doivent habiter pour posséder Dieu. Ces demeures indiquées
par Ruysbrœck ont, également, inspiré sainte Thérèse d'Avila.
– Le Royaume des Amants, explique comment Dieu,
après avoir créé et racheté l'homme, le conduit par ses voies et au moyen des
sept dons du Saint-Esprit, jusqu'à la contemplation et la possession de son
Royaume. Ce traité peut être considéré comme un véritable traité de théologie
ascétique et mystique.
– Les Noces spirituelles, ouvrage écrit par
Ruysbrœck probablement vers 1335 ou 1336, expose les diverses formes de vie
spirituelle: la vie active, la vie intime et la vie contemplative, étapes
indispensables par lesquelles l'âme aboutit à l'union avec Dieu.
– La Pierre brillante, serait le résultat
d'un entretien de Ruysbrœck avec un ermite. Appliquant aux justes un texte de
l'Apocalypse, l'auteur distingue trois catégories d'hommes qui reçoivent et
possèdent la grâce de Dieu. Il les appelle les serviteurs fidèles, les amis
intimes et les fils cachés.
– Le Livre de la plus haute vérité, est une
explication de quelques passages difficiles du Royaume des amants.
– Le Livre des Douze Béguines est formé de
divers traités qui se suivent sans ordre apparent.
QUELQUES FIORETTI
Le bonheur en Dieu
"Un jour tandis qu'il[12] passait dans les rues de Bruxelles,
l'esprit occupé des choses célestes, deux séculiers considérant la simplicité
de son habit, l'un d'eux se prit à dire: 'Plût à Dieu que je fusse doué d'une
sainteté de vie aussi grande que celle de ce prêtre!' A quoi l'autre répondit:
'Pour tout l'or du monde, je ne voudrais certes pas être à sa place; car alors,
je n'aurais pas un seul jour de bonheur!' Ce que le saint homme entendant par
hasard, pensait au fond de son âme: Ah! Tu connais peu de quelle suavité sont
pénétrés ceux qui ont goûté l'esprit de Dieu!"
La sainteté
"On raconte du dévot Prieur qu'une fois il fit
comprendre brièvement ces choses à deux clercs de Paris, qui étaient avides de
recevoir de lui un mot d'édification. Il leur dit en effet entre autres choses:
— Vous pouvez être aussi saints que vous le
voulez.
Ce que ceux-ci ne comprenant guère, ils se
détournèrent de lui scandalisés, et lui absent, ils racontèrent à quelques
frères du monastère, d'un esprit troublé, ce que le dévot prieur leur avait
répondu. Car ils voyaient en ces paroles plutôt une ironie qu'une réponse
aimable et paternelle. C'est pourquoi les frères susdits les ramenant vers leur
père, lui demandèrent humblement d'exposer à ces clercs sa pensée. Alors il
leur dit :
— N'est-ce pas vrai, comme je l'ai dit, que vous
êtes aussi saints que vous le voulez? Oui, assurément. Car la mesure de votre
sainteté dépend de la bonté de votre volonté. Considérez donc en vous-mêmes à
quel degré votre volonté est bonne, et la mesure de votre sainteté vous sera
manifeste. Car chacun est saint dans la mesure même où il est attaché au bien.
Ce qu'ayant entendu, ils se retirèrent avec un grand
profit d'édification."
L'ORTHODOXIE DES ÉCRITS DE RUYSBRŒCK
"Gérard Magne[13] qui était fort docte, commença à
interpeller de cette manière le très Saint Père, à propos de certains de ses
écrit :
-J'admire, Père Prieur, que vous écriviez des œuvres
sublimes; toutefois vous vous préparez par elles de nombreux émules, et de
multiples détracteurs pour vous et votre doctrine.
Entendant ces paroles, l'homme très humble répondit
avec beaucoup de mansuétude :
— Maître Gérard, prenez pour certain et avéré,
que je n'ai jamais mis un seul mot dans mes écrits, si ce n'est sous
l'inspiration du Saint-Esprit, et la présence singulière et très douce de la
Très Sainte Trinité."
Conseils enflammés et conférences silencieuses
Ruysbrœck, le dévot Prieur devait parfois faire des
conférences dans des monastères ou ailleurs. Beaucoup de monde venait à lui,
pour lui demander des conseils et le dévot Prieur s'appliquait à répondre à
toutes leurs demandes. Parfois, il était si plein de l'Esprit qu'il se
répandait en paroles enflammées. Ce qui était merveilleux c'est que, rempli des
dons de la grâce, il aurait pu faire jaillir le feu de la pierre en pénétrant
les cœurs endurcis. Pourtant, il arrivait que devant des personnes d'un rang
élevé et noble, "il oubliait tout ce qu'il savait et demeurait silencieux
et muet, comme s'il n'avait jamais goûté le témoignage de l'Esprit. Chaque fois
que cela lui arrivait, il se mettait humblement la tête entre les mains pour
recueillir son esprit. Lorsqu'il reconnaissait que cette absence se
prolongeait, il disait à ses auditeurs:
— Mes enfants, il n'y a rien à faire pour le
moment.
Et leur disant adieu, il partait aussitôt..."
Ruysbrœck tourmenté par Satan
Le diable, antique rival du salut des hommes,
s'efforçait de lui susciter de grandes tentations. Il venait souvent sous la
forme d'un crapaud ou de toute autre bête malfaisante : c'est lui-même qui
le rapportait à ses frères les plus familiers. Très souvent, quand il prévoyait
la venue du diable, il se prémunissait contre lui avec des armes spirituelles.
"Ainsi il arriva un jour qu'étant couché dans une petite chambre en
compagnie du supérieur du monastère, en raison de sa vieillesse, il perçut
l'approche de l'ennemi et s'écria, de sorte que le supérieur l'entendit :
— Mon Père, voilà qu'il vient, mon Père, voilà
qu'il vient."
Nous indiquons ci-dessous quelques sites Internet où
l'on peut lire les textes de Ruysbrœck traduits en français.
http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/Ruysbroek/Ruysbrœck/tome6/frere.html
http://alexandrina.balasar.free.fr/jean_de_Ruysbrœck_extrait.htm
On peut aussi consulter :
1997 Encyclopædia Universalis France S.A.
[1] Le
néerlandais populaire.
[2] En
relations fréquentes avec Ruysbrœck dont il lisait les écrits, et qu'il avait
reçu chez lui, cet auteur nous a laissé de son ami un portrait plein de vie et
d'amour.
[3] Bien
que beaucoup de ses contemporains aient cru le contraire, en raison de sa très
grande humilité, Ruysbrœck bénéficiait d’une vaste érudition théologique
et patristique, et d’une grande maîtrise du latin qui lui permit de traduire
ses sources en langue vulgaire. Son talent littéraire lui fit choisir de
rédiger en moyen néerlandais des ouvrages qui marquent une date dans la
formation de la langue des Pays-Bas.
[4] Chanoine
régulier anonyme qui vécut quelque temps dans le village natal de Ruysbrœck:
Ruysbrœck ou Ruusbroec, en flamand
[5]C'était
la résidence d'un pieux personnage, appelé Lambert, qui succédait lui-même en
ce lieu à deux autres ermites, Jean de Busco et Arnold de Diest. Sur la demande
de Franco van Coudenberg, Lambert consentit à aller fixer un peu plus loin sa
cellule, au désert de Boetendael, afin de faire place à Ruysbrœck et à ses
compagnons.
[6] Situé
dans la forêt de Soignies, près de Bruxelles
[7] Le
bon cuisinier
[8] L'imprimerie
n'existait pas encore.
[9] Gérard
le Grand.
[10] Un
certain frère avait cherché à se procurer une des dents de son prieur, et il
conservait précieusement cette relique.
[11] Jean
Gerson
[12] Jean
de Ruysbrœck, le dévot Prieur
[13] Ou
Gérard Groot.
SOURCE : http://voiemystique.free.fr/ruysbroeck_vie_pl.htm
Halfverheven beeldhouwwerk, dat Jan van Ruusbroec voorstelt, van Georges Vandevoorde, ingewerkt in de Ruusbroeck-bank, ontworpen door architect Daniël Peremans, bij de priorij van Groenendaal (Hoeilaart).
Stèle van de Ruusbroeck-bank, ontworpen door architect Daniël Peremans, bij de priorij v
Halfverheven beeldhouwwerk, dat Jan van Ruusbroec
voorstelt, van Georges Vandevoorde, ingewerkt in de Ruusbroeck-bank, ontworpen
door architect Daniël Peremans, bij de priorij van Groenendaal (Hoeilaart).an Groenendaal (Hoeilaart), met halfverheven
beeldhouwwerk van Georges Vandevoorde.
DOCUMENTS RELATIFS A LA VIE DE RUYSBROECK.
Le XIVè siècle a été pour les
Pays-Bas le point de départ d'une efflorescence merveilleuse de vie mystique,
et il est juste d'en faire remonter la gloire à celui que la postérité a pu
nommer Ruysbroeck l'Admirable.
La vie de Jan van Ruysbroeck nous
est connue par l'écrit d'un contemporain, Henri Pomerius (Bogaerts), qui fut
bien placé pour obtenir des renseignements sûrs. Né en 1382, un an seulement
après la mort de Ruysbroeck, il occupa d'abord la charge de recteur des écoles
à Bruxelles et à Louvain, puis fut secrétaire des échevins de cette même ville.
Ayant résolu de quitter le siècle, il entra au monastère des chanoines
réguliers de Groenendael, où Ruysbroeck avait passé toute sa vie religieuse.
Devenu prieur, c'est au cours de sa prélature qu'il vit mourir deux disciples
immédiats du saint homme : Jean de Hoelaere († 16 mars 1431) et Jean de
Scoonhoven († 22 janvier 1431). Le second surtout est célèbre par la défense
qu'il fit de la doctrine de son maître contre les attaques de Gerson. Nous aurons
l'occasion d'en parler bientôt.
Pomerius mourut probablement au
monastère de Sept-Fontaines, où il avait voulu passer dans la solitude les
dernières années de sa vie (1) (†
2 juin 1469). Dès avant 1420, il avait écrit son ouvrage : De origine
monasterii Viridis Vallis et de gestis patrum et fratrum in primordiali fervore
ibidem degentium , qui comprend trois parties : 1° l'histoire de la
fondation de Groenendael ; 2° la biographie de Ruysbroeck, et 3° celle de
Jean van Leeuwen, le « bon cuisinier ». Moins de quarante ans après
la mort du saint prieur de Groenendael, les grandes lignes de sa vie avaient
été ainsi fixées par un homme bien au courant des faits et que ses qualités
morales et intellectuelles rendaient très apte à cette tâche.
Ce que nous savons, en effet, de
Pomerius, tant par la chronique d'Impens que par le nécrologe de
Groenendael (2) ,
nous permet de le juger comme un écrivain grave et sincère, désireux d'édifier,
mais surtout de dire le vrai. Il a soin de citer ses témoins, qu'il appelle des
« personnages dignes de foi », et il fait une mention spéciale des
deux religieux que nous avons cités plus haut. Qu'entend-il au juste par le
terme « relation » dont il se sert pour désigner les renseignements
obtenus à cette source ? Il est assez difficile de le définir. Cependant
comme le nécrologe de Groenendael fait mention, au 2 décembre, dans la notice
consacrée à Ruysbroeck, d'une vie écrite par Jean de Scoonhoven, et que deux
autres notices font allusion à cette même vie, les Bollandistes ont admis
l'existence d'une source écrite, qui aurait passé tout entière dans la relation
de Pomerius (3) .
En tout cas, l'ouvrage de Scoonhoven a disparu, et, dans les divers manuscrits
de ses œuvres encore inédites, il n'y en a aucune trace.
Quant au texte de Pomerius, il a
été édité dans les Analecta Bollandiana, t. IV, 1885, p. 263, d'après un
manuscrit de la Bibliothèque royale de Belgique à Bruxelles (4) .
En tête de sa traduction des
œuvres de Ruysbroeck (5) ,
Surius donne aussi une vie qu'il dit avoir eu pour principal auteur un chanoine
régulier. S'agit-il d'une source autre que l'écrit de Pomerius ? C'est ce
qu'on a pensé jusqu'en ces derniers temps. Mais la comparaison attentive des
deux biographies ne permet pas de douter qu'il n'y ait entre elles relation
immédiate. On ne peut même pas supposer, comme le fait Auger dans sa thèse
latine De doctrina et meritis Joannisvan Ruysbroeck, qu'il y ait eu un
intermédiaire (6) .
Surius a suivi fidèlement le travail de son devancier, qu'il s'est efforcé
seulement de rendre en meilleur latin.
Un autre document précieux sur la
vie de Ruysbroeck est un prologue inséré en tête du manuscrit le plus complet
de ses œuvres. Ce manuscrit, aujourd'hui à Bruxelles, appartenait jadis au
prieuré même de Groenendael. Il n'est que de 1461 (7) ,
mais le prologue en question est d'un contemporain de Ruysbroeck, Maître
Gérard, prieur d'une Chartreuse proche de Groenendael. En relations fréquentes
avec Ruysbroeck, dont il lisait les écrits et qu'il avait reçu chez lui, cet
auteur nous a laissé de son ami un portrait plein de vie et tracé avec
amour (8) .
APERÇU BIOGRAPHIQUE.
Jan van Ruysbroeck a gardé le nom
du village qui le vit naître en 1293. Situé sur la Senne, entre Bruxelles et
Hal, ce village portait autrefois le nom de Ruusbroec, dont on a fait
aujourd'hui Ruysbroeck. Malgré qu'il n'y ait pas accord sur ce point, nous
avons préféré conserver à notre mystique l'orthographe moderne de ce nom, sous
lequel il est plus universellement désigné aujourd'hui.
Élevé par sa mère dans de grands
sentiments de piété, il quitta, dès l'âge de 11 ans, la maison paternelle, pour
se mettre sous la direction de Maître Jean Hinckaert, chanoine de
Sainte-Gudule, à Bruxelles. A l'école, il éprouva peu de goût pour les arts
libéraux ; mais les leçons de Hinckaert eurent sur lui une grande
influence et lui firent préférer bientôt la seule science théologique, à
laquelle il s'adonna dès lors exclusivement. Il devait puiser dans cette étude
la précision de langage et l'élévation de vues doctrinales que nous aurons
maintes fois l'occasion de remarquer dans ses écrits. A 24 ans, il fut ordonné
prêtre et fait chapelain de Sainte-Gudule. Ainsi qu'il le raconta souvent
lui-même, c'est au jour de son ordination qu'il put voir sa pieuse mère
délivrée du Purgatoire et entrer au Ciel.
À Sainte-Gudule, Ruysbroeck devait
vivre en compagnie de Maître Hinckaert et de Franco van Coudenberg, chapelains
de la même église et animés des mêmes désirs de vie vertueuse. C'est de cette
époque sans doute que datent ses premiers écrits, aussi bien que la lutte
engagée contre Bloemardinne, qui paraît s'être mise à la tête de la secte
« du libre esprit » vers 1307. Nous rencontrerons souvent dans les
traités de Ruysbroeck des allusions aux théories pernicieuses répandues alors
par les faux mystiques.
Mais les trois amis trouvaient que
la vie à Bruxelles était trop bruyante et, d'autre part, ils souffraient de la
façon dont l'office divin était célébré à Sainte-Gudule. Aussi, à l'instigation
de Franco van Coudenberg, résolurent-ils de quitter Bruxelles et de se retirer
dans la solitude. Au milieu de la forêt de Soignes se trouvait un ermitage qui
portait le nom de Groenendael (Viridis Vallis), ou le Vauvert. C'était la
résidence d'un pieux personnage, appelé Lambert, qui succédait lui-même en ce
lieu à deux autres ermites, Jean de Busco et Arnold de Diest. Sur la demande de
Franco van Coudenberg, Lambert consentit à aller fixer un peu plus loin sa
cellule, au val désert de Boetendael, afin de faire place à Ruysbroeck et à ses
compagnons.
Ainsi débuta, en 1343, le prieuré
de Groenendael. Ruysbroeck, Franco van Coudenberg, Jean Hinckaert et le frère
Jean van Leeuwen, surnommé « le bon cuisinier », qui devait bientôt
les rejoindre, formèrent la petite communauté naissante. Ils ne devaient
prendre que plus tard, en 1350, l'habit des chanoines réguliers de saint
Augustin, dont ils adoptèrent aussi la règle, observée dans la suite tant à
Groenendael que dans les prieurés qui s'y rattachèrent. Jean Hinckaert
cependant ne suivit pas l'exemple de ses compagnons et demeura à Groenendael à
titre privé.
Ruysbroeck put, dès lors,
s'adonner tout entier à la contemplation et se livrer à l'influence divine.
Lorsqu'il se sentait envahi par l'inspiration, il s'enfonçait dans la forêt et
se mettait à écrire tout ce qui lui venait à la pensée. Puis il revenait au
monastère et faisait part à ses frères des enseignements merveilleux qu'il
avait reçus. La plupart de ses écrits furent composés de cette façon, et,
malgré qu'il mît souvent de longs intervalles entre deux passages, la
composition n'en demeure pas moins ordonnée et suivie.
Tant que vécut Franco van
Coudenberg, Ruysbroeck voulut lui demeurer soumis comme à son prévôt ;
lui-même portait le titre de prieur. Mais son humilité ne pouvait empêcher sa
renommée de s'étendre : les visites devenaient fréquentes à Groenendael,
et le saint prieur avait ainsi l'occasion de faire participer les autres aux
richesses spirituelles dont il était comblé.
Déjà ses livres se répandaient,
ainsi que nous l'apprend Maître Gérard, le prieur des Chartreux, dont nous
avons parlé plus haut « Les écrits et les livres de Maître Jean
Ruysbroeck, dit-il, ont été fort multipliés dans le Brabant et dans les
Flandres ainsi que dans d'autres pays avoisinants... Et moi, frère Gérard, de
l'ordre des Chartreux, de la maison de Notre-Dame de la Chapelle près Hérinnes,
toutes les fois que je rencontrais de ces livres, je les annotais
soigneusement, selon la force de mon intelligence (9) . »
Il en avait lui-même pris une copie et comme il y trouvait certains passages
obscurs, il pria Ruysbroeck de venir lui en donner l'explication. C'est ce que
fit le saint prieur, et Maître Gérard a rendu compte, en ces termes, de
l'impression produite par cette visite : « Nous pourrions parler de
son visage tranquille et joyeux, de sa parole pleine de bonté et d'humilité, de
son maintien extérieur si conforme à l'état ecclésiastique, ainsi que de sa
manière d'être si religieuse dans son vêtement et dans tous ses actes... Les
trois jours environ que ce saint homme a passés avec nous ont été trop courts,
car personne ne pouvait lui parler ni le voir sans devenir meilleur (10) »
Gérard n'est point le seul
personnage qui ait été à cette époque en relations suivies avec Ruysbroeck. Des
hommes comme Tauler, Gérard Groot, dont nous aurons à parler bientôt,
fréquentaient Groenendael et profitaient de l'influence aussi bien que des
enseignements du prieur. Celui-ci vit venir la mort avec une grande sérénité,
et le 2 décembre 1381, il remit paisiblement son âme à Dieu. Il était âgé de 88
ans et avait soixante-quatre ans de sacerdoce. Son corps, enseveli à
Groenendael, y demeura jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, et lors de la
suppression du monastère (1783) il fut transféré à Sainte-Gudule de Bruxelles.
LES ÉCRITS DE RUYSBROECK.
Ce n'est point encore le lieu de
faire une étude complète sur l'œuvre de Ruysbroeck ; il ne s'agit ici que
d'une vue d'ensemble, qui permette déjà de se rendre compte de son admirable
fécondité comme écrivain mystique.
Pomerius nous apprend qu'il commença
à écrire étant encore séculier (11) ,
puis qu'une fois dans le cloître il poursuivit sa tâche jusqu'à l'extrême
vieillesse. Dans les dernières années de sa vie (12) ,
il emmenait avec lui dans la forêt un frère chargé de transcrire sur des
tablettes ce qu'il dictait sous l'action de l'Esprit-Saint. Le biographe a
conservé les titres de onze traités qu'il énumère en les accompagnant de
l'incipit de chaque livre. Il ne faut chercher d'ailleurs dans cette liste
aucun ordre méthodique. De même, serait-il difficile de fixer la date de
composition de chacun des traités. Quelques conjectures permettent seulement de
penser que la grande activité littéraire de Ruysbroeck s'exerça à Groenendael
entre les années 1350 et 1359 (13) .
La liste donnée par Pomerius
comprend: Le Royaume des amants, les Noces spirituelles, la Petite pierre,
les Quatre tentations, la Foi chrétienne, le Tabernacle spirituel, les Sept
clôtures, le Miroir du salut éternel, les Sept degrés de l'amour, le Livre des
rétractations, les Douze béguines.
Nous possédons, d'autre part, à la
fin du codex D dont il a été question plus haut, une liste un peu différente,
avec l'indication de l'ordre dans lequel il convient de lire les ouvrages de
Ruysbroeck. Cette liste appartient à un Traité sur les œuvres et la doctrine de
Jean Ruysbroeck, par un de ses disciples. L'auteur anonyme, reçu à Groenendael
peu après la mort du Maître, avait été à même d'étudier à bonne source ses
écrits et sa doctrine ; il avait pu recueillir également la tradition
vivante de ceux-là mêmes qui avaient vécu avec Ruysbroeck. À tous ces titres,
il mérite d'être cité : « On lira d'abord, dit-il, le livre
des Douze vertus ; ensuite celui des Douze points de la vraie
foi ; puis celui du Saint Sacrement. ensuite les Sept degrés, puis
les Sept clôtures, les Quatre tentations , le Tabernacle, le Royaume
des amants, les Noces spirituelles , la Pierre brillante, enfin
celui que l'auteur semble avoir fait après tous les autres, le Livre de la
plus haute vérité , qui commence ainsi : « Le prophète Samuel,
qui a pleuré le roi Saul... » Il y a encore le livre des Douze béguines,
qui commence en vers et se termine en prose parla Passion de
Notre-Seigneur (14) . »
En somme, nous retrouvons dans ce passage tous les écrits mentionnés par
Pomerius et, en plus, le livre des Douze vertus , dont l'authenticité
est contestable. Il y a seulement entre les deux listes divergence dans l'ordre
des traités et dans les titres qui leur sont donnés. Surius a inséré dans sa
traduction quelques autres écrits, mais leur authenticité demeure au moins
douteuse.
La langue employée par Ruysbroeck
est le flamand ou, d'une façon plus précise, le dialecte brabançon, Il ne
semble pas qu'il ait jamais écrit en latin, ce qui a donné à penser qu'il
ignorait cette langue. Mais une telle opinion est insoutenable Ruysbroeck était
prêtre, il était chanoine régulier, il avait certainement étudié la théologie
ses écrits le prouvent et nous le savons d'ailleurs par des témoignages
historiques formels. Or, la théologie ne s'enseignait qu'en latin :
comment donc Ruysbroeck eût-il pu se passer de la connaissance de cette
langue ? Le but, d'ailleurs, qu'il se proposait dans ses écrits suffit à
expliquer la préférence qu'il a donnée au flamand, compris de tous ceux qui
l'entouraient. Il écrivait, en effet, pour tous et en particulier pour ses
frères et ses sœurs dans la vie religieuse ; telle cette clarisse de
Bruxelles, à qui sont adressés, semble-t-il, les trois traités dont nous
publions la traduction.
Sans doute aussi Ruysbroeck se
sentait plus à l'aise dans sa propre langue. D'ailleurs, à l'occasion, il s'y
crée des mots, lorsqu'il n'en trouve pas d'assez précis pour rendre sa pensée.
C'est alors que l'on sent l'influence du latin qui, parfois, passe à peine
transformé dans le flamand.
Il ne faudrait pas non plus
exagérer ce que dit Pomerius du peu de science de Ruysbroeck. Ses livres dont
pas, sans doute, la prétention d'être des traités théologiques et la méthode
scolastique n'y est point suivie. Mais la terminologie même dont il fait
ordinairement usage montre suffisamment qu'il était versé dans les sciences
philosophiques et théologiques.
La composition d'ouvrages tels que le Royaume des
amants et les Noces spirituelles en particulier, témoigne d'une
solidité de doctrine incontestable.
Si donc il est vrai de dire que
Ruysbroeck a eu pour premier maître l'Esprit-Saint et qu'il a reçu de lui
l'expérience des choses de la vie spirituelle, en même temps que la faculté de
les exprimer en langage humain, il reste néanmoins qu'une solide formation
théologique se trahit sans cesse dans ses écrits. C'est là ce qui le met
absolument hors de pair entre les écrivains mystiques de son temps (15) .
Il ne sera pas inutile,
croyons-nous, de donner dès maintenant une analyse succincte des ouvrages de
Ruysbroeck ; nous suivrons, pour le faire, l'ordre où ils se trouvent dans
le codex D.
Le livre des Douze
vertus met à la base de tout l'édifice spirituel l'humilité, inspirée par
la contemplation de la puissance de Dieu et la considération de sa souveraine
bonté. De là on s'élève à l'obéissance, au renoncement, à la pauvreté d'esprit,
à la patience, à l'abdication surtout de la volonté propre pour embrasser celle
du Seigneur.
Le livre des Douze
points de la vraie foi est une paraphrase du symbole de Nicée.
Le Saint Sacrement,
ou Miroir du salut éternel , mérite une place de choix parmi les
traités de Ruysbroeck. C'est comme un résumé de toute sa doctrine, en même
temps que l'exposé fondamental de sa théorie sur l'image et la ressemblance de
Dieu, qui reviendra sans cesse dans ses écrits. Nous donnerons bientôt plus de
détails sur ce livre et les deux suivants.
Les Sept
degrés constituent une échelle mystérieuse, par laquelle on s'élève dans
la pratique de l'amour jusqu'à la possession intime de Dieu.
Les Sept
clôtures énumèrent les retranchements toujours plus serrés dans lesquels
s'enferme l'âme, pour arriver à la cohabitation secrète avec les trois
personnes de la Sainte Trinité.
Le livre des Quatre tentations,
qui est de peu d'étendue, s'élève contre les principales tendances de
l'époque : l'amour des aises et du confort, l'esprit d'hypocrisie,
l'orgueil de l'esprit, qui veut tout comprendre, enfin la fausse liberté, la
plus grave de toutes ces tentations subtiles et, qui, au temps de Ruysbroeck,
inspirait la secte des Frères et des Sœurs du libre esprit.
Dans le Tabernacle, le plus
long de tous ses ouvrages, notre auteur suit pas à pas la description du
Tabernacle de l'Ancien Testament, avec les prescriptions données par Dieu pour
sa construction. Il en fait ensuite l'application aux sept demeures
spirituelles dans lesquelles l'âme doit s'établir pour posséder Dieu d'une
façon toujours plus haute.
Le Royaume des amants, qui
occupe la première place dans la liste de Pomerius, est un commentaire
spirituel du texte : Justum deduxit Dominus per vias rectas et
ostendit illi regnum Dei (16) .
On y voit comment Dieu, après avoir créé et racheté l'homme, le conduit par ses
voies, au moyen surtout des sept dons du Saint-Esprit, jusqu'à la contemplation
et la possession de son royaume. Ce traité est comme un abrégé de tout
l'ascétisme et de la mystique.
Les Noces
spirituelles sont probablement l'œuvre la plus méthodique et la plus
parfaite qu'ait écrite Ruysbroeck. Il y expose en trois livres les diverses
formes de vie spirituelle, qu'il appelle la vie active, la vie intime et la vie
contemplative. À chacun de ces stades il applique les paroles de
l'Évangile : Ecce sponsus venit, exite obviam ei (17) ,
qui marquent les étapes successives par lesquelles l'âme aboutit à l'union avec
Dieu.
La Pierre brillante, au
rapport du prieur des Chartreux Gérard de Hérinnes, serait le résultat d'un
entretien de Ruysbroeck avec un ermite, qui lui demanda d'écrire ce qu'il lui
avait expliqué. Appliquant aux justes le texte de l'Apocalypse, Dabo illi
calculum candidum, et in calculo nomen novum scriptum (18) ,
l'auteur distingue trois catégories d'hommes qui reçoivent et possèdent la
grâce de Dieu. Il les appelle les serviteurs fidèles, les amis
intimes et les fils cachés .
Le Livre de la plus haute
vérité , composé à la demande du même prieur Gérard, est une explication
de quelques passages difficiles du Royaume des amants .
Enfin, le livre des Douze
Béguines est formé de divers traités qui se suivent sans beaucoup d'ordre,
et se termine par une application de la Passion de Notre-Seigneur aux sept
heures du Bréviaire.
L'INFLUENCE DE RUYSBROECK.
L'ermitage de Groenendael, dont
nous avons relaté les humbles débuts, était cependant appelé à rayonner au
loin. La renommée de Ruysbroeck se répandait, en effet, dans tous les Pays-Bas,
et les visiteurs venaient souvent s'édifier auprès de lui. Parmi ceux-ci, il
faut citer en première ligne Gérard Groot, qui allait être le trait-d'union
entre Groenendael et la future congrégation de Windesheim.
Né à Deventer, en octobre 1340,
Gérard, après avoir fait ses premières études à l'école du chapitre de cette
ville, puis à Aix-la-Chapelle et à Cologne, était allé prendre le grade de
maître ès arts à l'Université de Paris. Rentré dans son pays, il avait commencé
par mener une vie assez mondaine ; puis, converti par les remontrances de
Henri de Calcar, prieur de la Chartreuse de Monnikhuisen, près d'Arnhem, il
changea totalement de conduite, résigna ses bénéfices et fit même don de sa
maison paternelle « à l'usage des pauvres qui voudraient se consacrer au
service de Dieu » (20 septembre 1374). Ce fut le berceau de l'association
dite « de la vie commune ». Gérard y mena lui-même une vie fort
retirée, tout adonné à la prière et à l'étude.
C'est de cette époque (1374 -1377)
que datent ses relations avec Ruysbroeck. Il vint le voir, dit Pomerius (19) ,
accompagné de Maître Jean Sceele, recteur des écoles de Zwolle, et le saint
prieur les accueillit avec joie, reconnaissant en Gérard, qu'il voyait
cependant pour la première fois, un futur disciple. Dès lors de nombreuses
lettres s'échangèrent, et de fréquentes visites amenèrent à Groenendael Gérard
Groot, désireux de puiser là les saines traditions de la vie religieuse et de
s'instruire en même temps de la haute doctrine mystique de Ruysbroeck. C'est ce
qui lui permit plus tard de défendre son maître contre les attaques dont il
était l'objet et de témoigner, en toute rencontre, de la vénération qu'il
professait pour sa personne et de la haute estime en laquelle il tenait ses
écrits.
En 1377, Gérard Groot conçut le
projet de se retirer définitivement du monde et il se rendit dans ce but à la
Chartreuse de Monnikhuisen. Mais au bout de deux ans de séjour, durant lesquels
il ne s'était pas agrégé d'ailleurs à la communauté, il comprit, sur les
conseils du prieur, son ami, qu'il devait s'employer plutôt au ministère de la
parole.
Revenu à Deventer, il eut à
s'occuper tout d'abord d'une association de pieuses femmes, connues sous le nom
de «Sœurs de la vie commune », et il les groupa en communauté. Puis, ayant
reçu le diaconat, il se livra à la prédication avec un zèle si ardent et si
âpre contre les désordres de son époque, qu'il souleva contre lui des rancunes
puissantes et tomba en disgrâce. Il devait demeurer dans cette retraite forcée
jusqu'à sa mort (1384). Mais Gérard avait eu le temps de jeter les bases de son
œuvre. Dès avant sa conversion, il était grand amateur de livres et
s'appliquait avec soin à s'en procurer. Plus tard, ce goût ne fit que
s'accroître, et comme, pour le satisfaire, il lui fallait faire exécuter des
copies nombreuses, il occupa à ce travail les jeunes clercs de l'école du
chapitre de Deventer, qui se trouvèrent ainsi sous son influence continue.
L'instrument providentiel qui
devait grouper tous ces éléments fut un certain Florent Radewijns de Leerdam,
maître ès arts de l'Université de Prague. À la suite des prédications de Gérard
Groot, Florent s'était joint volontairement aux jeunes copistes et avait
renoncé à sa prébende de Saint-Martin d'Utrecht pour devenir simple vicaire à
Saint-Lebuin de Deventer. Or, un jour de l'année 1381 ou 1382, il proposa à son
maître de réunir tous les clercs copistes de bonne volonté et de vivre avec eux,
en mettant en commun leurs petites ressources. Après quelques hésitations,
Gérard approuva le projet et aida son ami de tout son pouvoir à organiser la
nouvelle confrérie.
Les «Frères de la vie
commune » ne se liaient pas par les vœux de la religion. Librement rangés
sous l'autorité de Florent Radewijns et profitant des conseils et des
enseignements de Gérard, ils menaient une vie réglée, partagée entre le labeur
quotidien et les exercices de la prière en commun. Bientôt cependant l'on
songea à donner à l'institution une forme plus durable, et Gérard Groot, tout
rempli encore des souvenirs que lui avaient laissés ses visites à Groenendael,
voulut rattacher les « Frères de la vie commune » aux chanoines
réguliers de saint Augustin. Mais il ne devait pas voir la réalisation de ses
desseins, et sur son lit de mort, comme le raconte J. Busch dans sa chronique,
il insistait encore pour que l'on adoptât sans tarder la règle des
chanoines (20) .
Florent Radewijns, seul désormais
à la tête des Frères de la vie commune, en fut en réalité le véritable
organisateur, et par ses soins l'influence de Groenendael devint définitivement
prépondérante.
Dès 1382, ainsi que nous l'apprend
la chronique d'Impens (21) ,
un monastère avait été fondé à Eemstein, entre Dordrecht et Geertruidenberg,
par Reinalt Minnenvosch, sur l'instigation de Gérard Groot. C'est aussi à la
demande de ce dernier qu'un prêtre profès de Groenendael, Godefroid Wevel,
disciple de Ruysbroeck, était venu tout exprès afin d'initier les premiers
religieux à leur vie nouvelle. Lorsque Florent Radewijns, quelques années plus
tard (1386), résolut de faire prendre l'habit de chanoines réguliers à un
certain nombre de ses frères, c'est à Eemstein qu'il les envoya se former selon
la tradition de Groenendael. En même temps, il faisait construire un monastère
à Windesheim, entre Deventer et Zwolle, avec l'autorisation et l'appui de
l'évêque d'Utrecht, Florent van Wevelinkhoven. Le 17 octobre 1387, eut lieu la
consécration de l'église, suivie de la profession des premiers chanoines, et
c'est ainsi que débuta la Congrégation de Windesheim, appelée à devenir bientôt
florissante.
L'association des «Frères de la
vie commune » conserva sa physionomie propre et servit comme de noviciat
de recrutement pour Windesheim, qui ne tarda pas, en effet, à faire école. Dès
1392, deux fondations en étaient sorties, tandis que le monastère d'Eemstein
s'était joint à ce premier groupement. Trois ans plus tard (16 mai 1395),
Boniface IX pouvait approuver la Congrégation nouvelle et lui donnait comme
supérieur général le prieur de Windesheim (22) .
En 1464, quatre-vingt-deux monastères s'y rattachaient : Groenendael et
ses fondations en faisaient partie depuis 1412.
Windesheim devint dès lors le
centre d'une véritable réforme dans la vie religieuse, dont l'influence se fit
sentir non seulement dans toute la Congrégation, mais dans de nombreux
monastères, soit en Allemagne, soit en France: En même temps les principes très
sages de réforme liturgique, dus à Raoul de Rivo, prévôt de Tongres, trouvèrent
dans la Congrégation de Windesheim un moyen rapide de diffusion (23) .
En 1433, la Congrégation bénédictine de Bursfeld les lui emprunta, comme étant
plus conformes à la vraie tradition romaine.
Par ses origines et par ses
traditions, Windesheim se rattachait donc à Groenendael et à Ruysbroeck. Aussi,
l'influence de la nouvelle Congrégation contribua-t-elle à répandre les écrits
et la spiritualité du saint prieur non moins que ses principes de vie
religieuse. La recherche de la vie intérieure, l'éloignement du monde et la
pratique assidue de toutes les vertus, conformément à la doctrine du Maître,
distinguèrent les chanoines réguliers de Windesheim, et toute une école
d'écrivains mystiques prit bientôt naissance dans leurs rangs. Il suffit de
citer quelques noms.
C'est d'abord Jean de Scoonhoven,
qui vécut à Groenendael et put puiser à la source même la tradition spirituelle
de son maître. Nous avons relaté déjà le zèle avec lequel il prit la défense de
Ruysbroeck contre les attaques de Gerson. La lettre qu'il écrivit à cette
occasion a été publiée plus tard parmi les œuvres du chancelier de l'Université
de Paris (24) .
Mais Scoonhoven a composé lui-même de nombreux traités mystiques, dont le style
fait penser déjà à l'Imitation de Jésus-Christ (25) .
Thomas a Kempis († 1741) qui passe à bon droit pour être l'auteur de cette
œuvre immortelle, appartient, en effet, lui aussi, à l'école de Windesheim,
dont il est l'un des écrivains les plus féconds (26) .
Deux autres membres de la même Congrégation, Henri Mande et Gerlach Peters,
portent dans leurs œuvres la marque évidente de l'influence de Ruysbroeck.
En dehors du cercle de Windesheim,
on peut citer Henri Harphius, franciscain († 1478), et Denis le Chartreux (†
1471). Ce dernier surtout reconnaissait pour ses maîtres de choix Denis
l'Aréopagite et Ruysbroeck.
Nous avons enfin nommé déjà Tauler parmi ceux qui visitèrent Groenendael. On a quelques raisons, en effet, de reconnaître le célèbre dominicain dans le personnage que Pomerius appelle Canclaer (27) , et qui sous la plume de Surius devient Johannes Thaulerus (28) . Ce n'est pas cependant qu'on puisse accorder grand crédit au récit de la conversion de Tauler, rapporté par Surius d'après le Meisterbuch de Rulman Merswin († 1382). Le P. Denifle en a démontré, semble-t-il, la fausseté (29) . D'autre part, Tauler n'a pu faire de fréquentes visites à Ruysbroeck, car il est mort dès 1361 et ce n'est guère que dans les dernières années de sa vie qu'il fut à même de venir à Groenendael. Bossuet a bien reconnu l'influence de Ruysbroeck, en particulier dans la critique faite par Tauler des doctrines hérétiques des Béguards (30) . Encore Bossuet ne fait-il allusion qu'au premier et au deuxième sermon pour le premier dimanche de Carême, qui contiennent, en effet, des emprunts à différents chapitres des Noces spirituelles, et surtout à l'opuscule des Quatre tentations . La lecture assidue de Ruysbroeck et de Tauler permettrait de signaler d'autres traits de ressemblance entre les deux auteurs ; mais, en somme, il est difficile de fournir des preuves péremptoires de relations suivies (31) .
MANUSCRITS, TRADUCTIONS ET ÉDITIONS.
Les ouvrages de Ruysbroeck ont joui de
bonne heure d'une grande célébrité, et ceci peut se mesurer au nombre
considérable de manuscrits qui se sont répandus un peu partout, soit du vivant
même de l'auteur, soit aussitôt après sa mort. M. le professeur Willem de
Vreese, bibliothécaire en chef de l'Université de Gand, a entrepris l'étude
complète de cette littérature (36) .
Nous lui devons la description de quatre-vingt-quatre manuscrits, désignés dans
une première série par les lettres A, B, C,... Z ; a, b, c,.. z,
et dans la seconde par les lettres Aa, Bb, etc.
Pour ce grand travail, l'auteur a
dû fouiller les principales bibliothèques de l'Europe et même les collections
privées. C'est à Bruxelles que se trouvent réunis en plus grand nombre les
manuscrits de Ruysbroeck. La Bibliothèque royale n'en compte pas moins de
vingt-trois ; et ce sont les plus complets et les plus précieux, car ils
proviennent pour la plupart de la bibliothèque de Groenendael, transportée à
Bruxelles en 1783. Les autres sont à Amsterdam, Berlin, La Haye, Gand, Cologne,
Leyde, Londres Oxford, Paris, etc. Plus de soixante-dix restent encore à
étudier (37) .
Il ne peut être question ici de
donner une étude même abrégée de tous ces documents. Nous nous contenterons
d'indiquer en tête de chacun des traités que nous traduisons ceux dont s'est
servi le professeur David, pour son édition des œuvres de Ruysbroeck.
Nous avons déjà eu l'occasion de
mentionner une traduction latine faite du vivant même de Ruysbroeck par
Guillaume Jordaens († 1372). C'est la première en date : elle comprenait
trois traités : les Noces
spirituelles, le Tabernacle et la Petite pierre
brillante. Malheureusement l'auteur a plutôt paraphrasé que traduit
fidèlement, et Jean de Scoonhoven a tiré de ce fait un argument contre les
attaques de Gerson. Un peu plus tard, Gérard Groot traduisit à son tour
les Noces spirituelles et les Sept degrés de l'amour.
Cependant, malgré la grande
diffusion de ces traductions et des manuscrits du texte original, les écrits de
Ruysbroeck ne furent que relativement tard livrés à l'impression. Le De
ornatu spiritualium nuptiarum, selon la traduction de Jordaens, fut édité
à Paris en 1512, par Lefèvre d'Etaples. Un peu plus tard (1538), parut à
Bologne la traduction de Gérard Groot : De septem scalœ
divini amoris seu vitœ sanctœ gradibus, suivie du traité De
perfectione filiorum Dei.
Mais il n'y avait pas encore de
traduction complète des œuvres de Ruysbroeck. Ce travail fut entrepris par
Surius, qui en donna une première édition en 1552. D'autres vinrent ensuite en
1609 et 1692. Celle de 1609 est réputée la meilleure. Traduction très fidèle,
malgré quelques amplifications, l'œuvre de Surius a contribué à faire connaître
Ruysbroeck tant en France qu'en Espagne, en Italie et en Allemagne. Elle
conserve aujourd'hui encore sa valeur, et elle est souvent un précieux
auxiliaire pour l'interprétation du texte original.
Des traductions françaises,
allemandes, italiennes suivirent celle de Surius, et en 1696 parut à Madrid une
édition complète des œuvres de Ruysbroeck traduites en espagnol.
Malgré cette vogue toujours
croissante, nul n'avait encore songé à publier le texte original. Les
manuscrits, cependant, ne manquaient pas, et au milieu du XVIe siècle on
continuait à en prendre des copies. Le premier essai d'édition flamande date
seulement de 1624. Sous le titre de : T'Cieraet der gheestelyker
Bruyloft, le capucin Gabriel de Bruxelles fit paraître le traité
des Noces spirituelles. Il est regrettable que l'auteur, au lieu de
reproduire fidèlement le texte, ait eu la pensée d'en rajeunir les expressions,
afin de le rendre plus clair ; ses retouches ne sont pas toujours
heureuses.
Il faut ensuite descendre jusqu'au
milieu du XIX esiècle pour rencontrer de nouvelles tentatives, sous forme
d'abord de fragments publiés par J. van Vloten, en 1851, dans Verzameling
van Nederlandsche proza-stukken, puis d'une édition complète entreprise
par les soins de la Société des Bibliophiles flamands. De 1858 1868, le
professeur J. David, de l'Université de Louvain, donna en six volumes toutes
les œuvres de Ruysbroeck citées par Pomerius, ainsi que le livre des Douze
vertus (38) .
Pour cette œuvre, qui n'est point
parfaite, mais qui rend encore de grands services, l'auteur a utilisé les
manuscrits qui étaient plus facilement à sa portée, c'est-à-dire ceux de
Bruxelles et de Gand. Malheureusement l'édition, tirée seulement à cent
exemplaires, est aujourd'hui fort rare, et afin de remédier à cet inconvénient
on a commencé récemment à Louvain une publication nouvelle dans la collection
des Studïen en Textuitgaven.
Dom Ph. Muller, chanoine régulier
de Latran, a inauguré la série par le traité des Sept degrés de
l'amour, précédé d'une introduction et accompagné de la traduction latine
de Gérard Groot (39) .
Pour clore la liste des
traductions, nous pouvons signaler encore l'ouvrage d'Ernest
Hello : Rusbrock l'Admirable (Œuvres choisies), Paris, 1869 et
1902, qui se compose de quelques fragments épars traduits d'après Surius ;
puis l'essai de Maurice Maeterlinck : l'Ornement des noces
spirituelles, de Ruysbroeck l'Admirable, traduit du flamand et accompagne'
d'une introduction (40) ,
qui réclamerait plus d'une réserve ; une traduction d'après le texte
original du Livre des XII Béguines ou de la vraie contemplation, par
l'abbé P. Cuylits ; enfin la Vie de Ruysbroeck et deux de
sestraités traduits par M. Chamonal, sur le texte latin de Surius.
Il nous a semblé préférable, pour
le dessein que nous formons à notre tour, de recourir non point à une
traduction latine, mais au texte de Ruysbroeck lui-même, tel au moins que nous
l'avons dans l'édition de David. Les trois traités que nous présentons
aujourd'hui au lecteur n'ont pas été choisis au hasard. L'unité de doctrine,
l'identité probable de la destinataire, l'enchaînement qui les relie entre eux
nous ont paru des raisons suffisantes pour les publier ensemble. Les deux
listes que nous connaissons réunissent d'ailleurs ces traités, qui ont sans
doute été composés vers le même temps, et dans l'ordre où nous les donnons. En
tête de chacun d'eux nous avons mis une introduction particulière, afin d'en faciliter
la lecture.
Dans la traduction, l'on s'est
efforcé de rendre, aussi fidèlement que possible, la pensée de l'auteur, en
même temps que la forme très simple et un peu naïve de sa phrase. La tournure
française en souffrira peut-être parfois, mais il y avait lieu de suivre de
très près le texte, de peur de trahir le sens exact, en des matières surtout où
les termes demandent à être pesés avec grand soin. Puisse ce nouvel effort
contribuer à faire connaître le grand mystique flamand et à répandre une
doctrine digne d'être comparée à celle des plus célèbres auteurs spirituels
Juin 1915.
Abbaye Saint-Paul de Wisques, Oosterhout (Hollande).
NOTE POUR LA TROISIÈME ÉDITION.
Le premier volume des Œuvres
de Ruysbroeck arrive, après quelques années, à sa troisième édition, que
l'on s'est efforcé de rendre définitive. Le texte en a donc été de nouveau
soigneusement revu et corrigé, et l'on s'est appliqué surtout à l'éclairer en
le rapprochant des passages parallèles qui se rencontrent dans les autres
ouvrages de notre grand mystique. La doctrine apparaît ainsi plus une et plus
lumineuse, et l'on s'aperçoit combien l'auteur demeure toujours conforme à
lui-même et fidèle au plan majestueux selon lequel il a conçu la vie
surnaturelle à ses différents stades. La lecture attentive et assidue de ces
pages, où abondent les sublimes envolées, fait que l'on apprécie toujours plus
la justesse de ce nom d'Admirable donné à Ruysbroeck par la
postérité.
Pour les références aux divers
ouvrages de l'auteur, nous citons toujours, autant que possible, d'après la
traduction française.
Juillet 1919
(1) Ces
détails sont empruntés au Chronicon Bethleemiticon de Pierre Impens,
chanoine régulier du monastère de Bethléem, près de Louvain. Le manuscrit en
est conservé à la bibliothèque de l'abbaye d'Averbode. Cf. Acquoy, Het Klooster
te Windesheim, t. III, pp. 56 et suiv.
(2) MASTELINUS, Necrologium
Viridis Vallis, Bruxelles, sans date (vers 1630).
(3) Cf. Anal. Bolland., t. IV, p. 257 et suiv. Le P.
J. van Mierlo n'est point du même avis, et dans sept articles du Dietsche
Warande en Belfort, Anvers, 1910, il soutient que Pomerius n'a point connu de
source écrite.
(4) Manuscrit
2926-28. La description s'en trouve dans le Catalogus codicum
hagiographorum bibliothecæ regiæ Bruxellensis, Bruxelles, 1886, part. I, t. II,
p. 379.
(5) D.
Joannis Rusbrochii Opera omnia, Coloniæ, 5609.
(6) Dans
l'Étude sur les mystiques des Pays-Bas du moyen âge , p. 16o, le même
auteur est d'ailleurs moins affirmatif et reconnaît que Surius a reproduit
Pomerius. Cf. Mémoires couronnés de l'Académie royale de Belgique, t.
XLVI (avril 1892).
(7) Le
Dr DE VREESE désigne ce manuscrit sous le nom de codex D. Cf. De
Handschriften van Jan van Ruusbyoecs's Werken, 1er vol., pp. 24 et suiv.
(8) Le
prologue de Maître Gérard a été édité par le Dr DE VREESE dans Bijdragen
tot de hennis van het leven en de werken van Jan van Ruusbroec, Gent, 1896.
(9) DE
VREESE, op. cit., pp. 10 et 11.
(11) POMERIUS,
II, c. XVI, Anal. Boll., 1. C., p. 295.
(12) Ibid.,
c. XIV, Anal., p. 293-
(13) Cf.
AUGER, op. cit., pp. 183 et suiv.
(14) Cf.
DE VREESE, op. cit., p. 30, et De Handschriften van Jan van
Ruusbroec's Werken, eerste stuk, pp. 28-34.
(15) On
peut comparer à ce point de vue le livre IIIe des Noces
spirituelles avec la septième demeure du Chateau intérieur de
sainte Thérèse, ou avec les dernières pages de la Vive flamme
d'amour de saint Jean de la Croix.
(16) SAP.,
X, 10.
(17) MATTH.,
XXV, 6.
(18) Apoc.,
II, 17.
(19) POMERIUS,
II, c. VIII, Anal. Boll., 1. c., pp. 288-90.
(20) BUSCH, Chronicon
Windesemense, pp. 22 et 23. ACQUOY, op. cit., t. I, c. I, pp. 46-47, conteste
ce détail, qui n'est point relaté par Thomas a Kernpis dans la Vita
Gerardi Magni. Il admet toutefois que tels avaient été les désirs de Gérard
Groot durant sa vie.
(21) Chron.
Bethl., 1. I., a. § 3.
(22) Cf.
ACQUOY, op. cit., t. III, p. 303.
(23) Cf.
D. CUNIBERT MOHLBERG. O. S. B., Radulph de Rivo, der letzte Vertreter der
altrömischen Liturgie, Louvain, 1911, pp. 202 et suiv.
(24) Libellus
fratris Joannis de Schoenhovia, qui nititur defendeve quœdam dicta fratris
Joannis Ruysbroeck, contra magistrum Joannem de Gerson, cancellarium Parisiensem.
Cf. Gersonii opera, édit. Dupin, Anvers, 1706, t. I, p. 63.
(25) Les
écrits de Schoonhoven sont encore inédits. Le principal manuscrit, autrefois à
Groenendael, est aujourd'hui à Bruxelles, à la Bibliothèque royale, et porte la
cote 15219.
(26) Cf.
Dr POHL, Thomae Henserken a KenIis opera omnia, Fribourg, Herder.
(27) POMERIUS,
II, c. xviii, Ci. Anal. Boll., L C., p. 296.
(28) SURIUS, Rus
brochii opera, édit. 1609, p. 8.
(29) DENIFLE, Taulers
Bekehrung kritisch untersucht, Strasbourg, 1879.
(30) BOSSUET, Instruction
sur les états d'oraison, tr. I, 1. X, n° 2.
(31) Cf.
X. DE HOENSTEIN, Jean Tauler, sa vie, ses écrits, sa doctrine , Rev.
Thom., 1918, p.244.
( 32) Cf.
NOLTE, Theologische Quartalschrift, 1870, PP. 281 et suiv.
(33) Epistola
Joannis Gersonii, cf. Gersonii opera, édit. Dupin, Anvers, 1706, t.
I, p. 59.
(34) BOSSUET, op.
cit., tr. I, 1. I, n. I.
(35) Gersonii
opera, t. I, p. 63-78. Cf. AUGER, De doctrina et meritis Joannis van
Ruysbroeck, Louvain, 1892, p. 121 et suiv.
(36) Koninklijke
Vlaamsche Academie voor taal- en letterkunde : De Handschriften van Jan
van Ruusbroec's Werken, door Willem DE VREESE, eerste stuk, 1900 ;
tweede stuk, eerste aflevering, 1902, Gent, A. Siffer.
(37) Cf.
D DE VREESE, art. Ruysbroeck dans la Biographie nationale
publiée par l'Académie royale de Belgique.
(38) Maeschappij
der Vlaemsche Bibliophilen. Werken van Jan van Ruysbroec, Gent,
Annoot-Braeckman.
(39) Jan
van Ruysbroech, Van den VII Trap pen, met Geert Groote's latijnsche
vertaling, Bruxelles, 1911.
(40) Bruxelles,
Paul Lacomblez, 1891 et 1908.
Small chapel near ruins of monastery at Groenendaal
where Jan van Ruysbroeck lived and contemplated
Quiconque veut être sauvé et atteindre la vie
éternelle, doit nécessairement posséder et garder jusqu'à la mort la foi
chrétienne, puisque par la foi l'âme est attachée à Dieu et lui est unie comme
l'épouse à son époux. La foi conduit l'âme à la confiance en Dieu et lui donne
une bienheureuse connaissance de Dieu et des choses éternelles. Cette
connaissance, commencée ici-bas, s'achèvera dans l'éternité, où, dans la clarté
infinie, Dieu est contemplé face à face tel qu'il est. La foi chrétienne nous
enseigne comment il nous faut vivre, et nous apprend ce que Dieu a fait pour
nous par amour, et ce qu'il veut encore faire dans l'éternité. Aussi sans la
vraie foi, nul ne peut-il vivre comme il faut, ni plaire à Dieu, ni enfin se
sauver, quelques bonnes œuvres qu'il eût accomplies par ailleurs.
En premier lieu, la foi chrétienne nous
apprend comment sans hésitation ni crainte chaque fidèle doit tenir d'un cœur
sincère et libre, et confesser de bouche cette vérité : Je crois en un seul
Dieu, Père tout-puissant, qui a fait le ciel et la terre, toutes les choses
visibles et invisibles c'est-à-dire les choses matérielles ou corporelles, et
les êtres spirituels, anges et âmes : tout a été créé et fait par Dieu de rien,
sans matière préalable.
Ensuite la foi nous dit : Je crois en
Notre-Seigneur Jésus-Christ, le Fils unique de Dieu, né du Père avant tous les
siècles, c'est-à-dire sans commencement, de toute éternité. Dieu de Dieu,
lumière de lumière, vrai Dieu de vrai Dieu, engendré et non t'as tait ; une
seule substance avec le Père, c'est-à-dire une seule nature indistincte avec
lui. Par ce même Fils toutes choses ont été faites : car il est la sagesse du
Père, en qui toutes choses vivent. Et bien qu'il y ait altérité et distinction
de personnes, il est néanmoins une nature unique avec le Père. Et nous croyons
que ce même Fils unique de Dieu est descendu des cieux pour nous autres hommes
et pour notre salut. Il a assumé notre nature humaine, a été conçu du
Saint-Esprit, c'est-à-dire par l'opération et la vertu du Saint-Esprit, est né
de la vierge Marie et est devenu véritablement homme : car de même que l'âme et
le corps font ensemble un seul homme, ainsi le Fils de Dieu et le fils de Marie
ce n'est qu'un seul Christ. Pour notre salut il a souffert et enduré des
peines, a été crucifié, est mort et a été enseveli, sous le juge qui était
alors à Jérusalem et qui s'appelait Ponce Pilate. Et aussitôt son âme descendit
aux enfers avec grande puissance et grande joie ; et dans sa vertu divine, il
brisa les portes d'airain et les barres de fer pour délivrer les patriarches et
les prophètes, qui avaient cru en lui et qui l'avaient attendu avec un grand
désir. Il délivra encore tous ceux qui l'avaient servi fidèlement, depuis le
commencement du monde, et étaient morts sans péché mortel ; mais nul autre ne fut
délivré par lui. Car ceux qui n'aimaient pas Dieu et qui avaient été mauvais et
infidèles comme les démons, devaient être laissés éternellement aux enfers,
ainsi que le dit Abraham au riche avare, enseveli au plus profond de l'enfer,
très loin en dessous de tous ceux qui appartenaient à Dieu. Le troisième jour
le Christ se leva d'entre les morts, de sa propre vertu, ce que nul autre ne
peut faire. C'est que son âme glorieuse et vivante était unie à Dieu aux
limbes, tandis que son corps inanimé conservait la même union dans le sépulcre.
Et lorsque l'âme et le corps se rejoignirent, il ressuscita glorieux - et
beaucoup d'autres morts avec lui, - à la gloire de son Père et pour la
glorification et la joie de tous les anges, de tous les saints et de tous les hommes
de bien. À son humanité furent donnés pouvoir et honneur au ciel, sur la terre
et aux enfers ; par lui aussi et en lui, la sainte Église possède tout son
pouvoir. Et de même qu'en sa propre vertu, il ressuscita les morts, avant comme
après sa résurrection, de même les saints, qui en reçurent de lui la puissance,
tant dans le Nouveau que dans l'Ancien Testament, ressuscitèrent-ils des morts
selon le corps ou selon l'esprit. Ensuite, le quarantième jour, il monta au
ciel, c'est-à-dire, selon l'Apôtre, au-dessus de tous les cieux matériels,
jusqu'aux cieux spirituels que sont les anges ; et même au-dessus de tous les
anges dans le ciel caché, en cette sublimité impénétrable où il a été élevé
bien au-dessus de tous les esprits. Ainsi selon son humanité il est assis à la
droite de Dieu, son Père tout-Puissant. Non pas que Dieu le Père céleste puisse
être assis ou debout, ou qu'il ait des mains : car il est esprit ; mais la
glorieuse nature humaine du Christ a été élevée au-dessus de toute nature
créée, dans la puissance la plus haute et dans la perfection la plus noble que
Dieu ait produites. Puis, au dernier jour, il viendra en gloire et en vertu
divine, avec les chœurs immenses de tous les anges et de tous les saints, pour
juger les vivants et les morts, c'est-à-dire les bons et les méchants. Et
jamais son règne n'aura de fin.
Il nous faut croire aussi que le Saint-Esprit est un amour qui s'écoule et qui a rempli de tout bien le ciel et la terre. Grâce à cet amour la sainte Église est une et universelle par tout l'univers. Elle est dite apostolique, parce que le souverain prince saint Pierre et les autres apôtres l'ont fondée et basée sur une pierre inébranlable, Jésus-Christ. Il est le fondement, et nous sommes tous, comme le dit saint Pierre (I PETR., II, 5.), des pierres vivantes dans le temple de Dieu, aussi longtemps que nous gardons la charité et la foi chrétienne La sainte Église, c'est l'assemblée de tous les fidèles. Par le Saint-Esprit, en effet, qui est lien d'amour, tous sont unis dans une seule foi, un seul baptême, et une seule économie de commandements et de sacrements. Aussi sous peine de devenir infidèle, nul ne peut-il rester en doute ou en erreur vis-à-vis de tel ou tel point que la sainte Église tient et confesse communément.
La vraie foi, ornée de l'amour, est la joie la plus intime et la plus haute que je connaisse ici-bas. L'union de tous les fidèles est sainte, puisque tous ont été lavés du sang de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qu'ils ont été oints de la grâce du Saint-Esprit, et sanctifiés par l'inhabitation de la sainte Trinité. L'unité de la sainte Église est comme l'arche de Noé : tous ceux qui demeurèrent hors de l'arche, durent périr ; de même en va-t-il pour tous ceux qui se séparent de l'unité et s'opposent en tel ou tel point à la sainte Église ou à la foi chrétienne, par fausse doctrine, fausse espérance, ou par hésitation et doute injustifié. Quiconque met son espoir et sa consolation en des pratiques de divination, dans les songes, la magie, l'invocation du démon ; tous ceux encore qui honorent, craignent ou aiment une créature quelconque au-dessus de Dieu, et qui ont plus de confiance et plus d'espoir en quelque créature qu'en Dieu, sont des membres séparés et corrompus, qui ne vivent plus dans l'unité de l'Église. Car de même que le corps vivifié par l'âme compte beaucoup de membres, ainsi le Christ et la sainte Église ont-ils une multitude de membres qui tous vivent par le Saint-Esprit. Et de même que l'homme par la bouche nourrit tous ses membres et que chaque membre est au service des autres, ainsi le Christ, et avec lui chaque homme vertueux, nourrit-il de ses bonnes œuvres tous les membres de la sainte Église. Les œuvres de tel saint ou de tel homme vertueux, certes, lui sont propres et personnelles quant à la gloire et quant à la récompense : néanmoins ces œuvres atteignent aussi tous les membres de la sainte Église, puisque tous les saints et tous les fidèles sont un en Notre Seigneur Jésus-Christ, et tous sont membres les uns des autres. Le Christ est le membre principal de la sainte Église ; il forme la tête et nous sommes ses membres, et la tête donne vie à tous les membres. Ceux donc qui n'ont pas en eux l'esprit et la vie du Christ, ne sont pas de ses membres : ce sont des membres séparés et morts.
Voilà pourquoi les apôtres nous disent de croire encore à la communion des saints. Car de la façon que je viens de dire, Notre-Seigneur Jésus-Christ nourrit de son esprit et de sa vie les saints du ciel, les âmes du purgatoire et les hommes de bien sur la terre, tous selon leur état propre. Tous, en effet, forment une seule Église, la communion des saints, selon laquelle tous les biens sont communs. Et afin que personne ne demeure en dehors de cette communion sainte, le Saint-Esprit nous dit par les apôtres de croire à la rémission de tous nos péchés. Cette rémission se fait en premier lieu au baptême, où nous sommes baptisés et purifiés dans le sang de Notre-Seigneur, et rendus à la vie, grâce à sa mort sainte. Là sont pardonnées coulpe et peine de tous les péchés que l'homme a commis auparavant. Mais on ne peut recevoir le baptême plus d'une fois. Le Saint-Esprit ne veut pourtant pas nous perdre, si nous avons souillé par nos péchés le premier baptême. Un second baptême a été préparé pour tous les pécheurs qui regrettent leur péché, cherchent grâce et désirent rentrer dans la communion des saints et de la sainte chrétienté : tous ils sont baptisés dans le Saint-Esprit, c'est-à-dire dans la bonté débordante de Dieu, pour laquelle il ne peut y avoir de péchés trop grands ou trop nombreux, pourvu qu'on cherche sa grâce selon la droite règle établie dans la sainte Église.
Suit l'article où, par la bouche des apôtres, le Saint-Esprit nous enseigne que nous devons moire attendre avec tous les saints la résurrection universelle de tous les corps, depuis le premier homme jusqu'au dernier : à savoir que chaque âme retrouvera son propre corps à elle, celui qu'elle portait et avec lequel elle vivait sur terre. Car Dieu qui peut tout, qui créa toutes choses de rien quant à la matière première et qui forma le corps d'Adam du limon de la terre, a bien pouvoir aussi de refaire notre corps de cette même poussière de terre, qui est venue de lui, fût-elle dispersée aux extrémités du monde. Il est équitable, en effet, et Dieu l'a vu de toute éternité, que les bons qui l'ont aimé et servi d'âme et de corps, soient récompensés dans l'âme et dans le corps. Il est bien juste aussi que les méchants soient punis et tourmentés de la même façon, puisqu'ils se sont mis au service du diable et du péché, sans vouloir durant toute leur vie se corriger ni se convertir. Ainsi au dernier jour, au jour du jugement, quand la trompette sonnera, tous les morts ressusciteront, nous dit saint Paul ( Cf. COR., xv, 52.), et le Christ, le Fils de Dieu, descendra du ciel dans les airs avec tous les anges et les saints, en gloire et grande puissance. Ceci se passera près de Jérusalem, là où fut créé le premier homme et où, par sa sainte mort, le Christ répara autant qu'il était en lui, l'homme déchu. C'est là qu'il descendra, là qu'il fera entendre la voix de son commandement, en seigneur et juge souverain du monde entier : et de par sa puissance et son ordre, les corps de tous les hommes seront rétablis et ressusciteront en un instant, différents quant à l'ordre et à la récompense, mais tous égaux quant à l'âge, qui sera celui qu'avait Notre-Seigneur Jésus-Christ, lorsqu'il mourut pour nous. Un homme de cent ans et l'enfant d'une seule nuit auront un corps d'égale grandeur. Les bons qui ici-bas étaient boiteux, aveugles, paralysés ressusciteront intègres, avec tous leurs membres, sans tache ni souillure, glorieux comme le corps de Notre-Seigneur Jésus-Christ : mais pour les damnés il en sera tout autrement. Ainsi donc toute âme reprendra son propre corps et chacun viendra au jugement de Dieu avec son âme et son corps. Et comme dit le saint homme job (Cf. JOB, XIX, 26-27.), de nos yeux de chair nous verrons Dieu, ce qui s'entend de Notre-Seigneur Jésus-Christ selon son humanité, qui se manifestera à tous les hommes dans ce même corps dans lequel il vécut et est mort pour nous. Les bons verront sa face joyeuse et glorieuse : aux méchants par contre il se montrera terrible, en grande indignation et colère. Alors par la justice et la sagesse de Dieu qui voit clairement toutes choses, chacun recevra un jugement équitable, selon ses paroles et ses œuvres et tout ce qu'il aura jamais fait. Et ce jugement demeurera immuable : car les méchants seront éternellement condamnés et perdus, et les bons sauvés éternellement.
Ensuite le Saint-Esprit nous apprend, par
la bouche des apôtres, que nous devons croire à la vie éternelle. Cette vie,
nous devons la désirer, et c'est pourquoi les apôtres et la sainte Église
disent à la fin du symbole Amen, en signe que nous devons tous attendre et
désirer la future béatitude que Dieu nous a promise : c'est là, en effet, la
fin et la consommation de tout ce que nous croyons maintenant. Cette béatitude
parfaite consiste en ceci, qu'après cet exil nous serons élevés, âme et corps,
dans la gloire divine, et que nous verrons Dieu clairement, l'aimant et le
possédant dans une fruition sans fin. Car au-dessus de toute chose notre
récompense essentielle sera Dieu lui-même, en qui nous croyons et à qui nous
nous confions par-dessus tout, et pour qui nous opérons toutes nos vertus. Et
lorsque nous aurons acquis et que nous posséderons cette récompense, toutes
choses seront consommées de la manière la plus haute et la plus noble. Car
alors nous verrons Dieu éternellement, nous l'aimerons avec ardeur et nous lui
rendrons grâces, le louant sans nous lasser jamais. Chaque saint aura sa
récompense particulière, selon ses mérites et sa sainteté ; mais il aura aussi
une récompense accidentelle, en relation avec la multitude des saints. Chacun,
en effet, se réjouira de la béatitude de l'autre, comme de la sienne propre ;
mais toutes les récompenses et les joies que chacun aura en lui-même et en tous
les autres sont le secret de Dieu, qu'il ne révèle que selon son bon plaisir.
Là nous posséderons sagesse, connaissant et sachant tout ce que nous voudrons. Là nous aurons toute puissance : car nous serons rois et enfants de Dieu, agissant en toute liberté. Notre richesse sera si grande, que nous en serons inondés et en aurons plus que nous ne pourrons en saisir ; beauté éternelle et impérissable, paix sans fin et inaltérable, richesses surabondantes, affluence de toute béatitude, de bonté et de jeunesse immortelle. Rien dès lors qui puisse donner tristesse, tout au contraire pour réjouir : allégresse et abondance de bonheur seront si grandes, si nombreuses et si profondes, qu'elles défieront tout calcul, toute mesure ou pensée, toute description ou manifestation quelconque. Ce sera au-delà de tout ce que nous pouvons penser ou souhaiter, dépassant tous désirs ou puissance d'imagination. C'est que Dieu lui-même, incompréhensible et infini veut être notre récompense, notre joie et notre allégresse Et il dit : « Bon et fidèle serviteur, entrez dans la joie de votre Seigneur (MATTH., XXV, 21.)». Nous serons, en effet, comblés et déborderons de la gloire divine, et ainsi nous entrerons dans la joie de Notre-Seigneur, qui est sans mesure et sans fond. Et là flous nous perdrons, et resterons essentiellement dans une fruition éternelle. Et nous demeurerons en nous-mêmes, chacun à sa place et à son rang. Et dans le Christ Jésus nous serons élevés vers notre Père céleste dans une révérence et une louange éternelles. Au-dessus de nous, nous aurons la beauté du ciel, de la terre et de tous les éléments, avec la splendeur que leur aura donnée le dernier jour. Auprès de nous, seront dans la gloire les anges et les saints qui, avec nous, aimeront et loueront Dieu sans fin. Et nous aurons dans notre corps glorieux une âme vivante, ornée de toutes les vertus. Nos corps eux-mêmes seront sept fois plus clairs que le soleil et transparents comme le cristal ou le verre, si impassibles que ni le feu d'enfer, ni tous les glaives tranchants ne sauraient en aucune manière nous blesser ou nous nuire. L'agilité et la légèreté de notre corps seront telles, que notre âme pourra, en un instant, le mener où elle voudra de même sera-t-il si subtil, qu'un mur de métal épais de cent milles pourrait être traversé par lui comme le verre par un rayon de soleil. De nos yeux de chair, nous contemplerons Notre-Seigneur Jésus-Christ et sa glorieuse Mère, avec tous les saints, dans la splendeur corporelle dont j'ai parlé plus haut tandis que de nos yeux intérieurs, nous fixerons le miroir de la Sagesse, où brilleront et resplendiront toutes choses, qui ont jamais été aptes à nous réjouir. L'oreille extérieure percevra les mélodies célestes et les chants suaves des anges et des saints louant Dieu éternellement : mais c'est à l'oreille intérieure que résonnera la Parole, née au sein du Père, nous transmettant toute science et toute vérité. Le parfum très noble de l'Esprit divin, plus suave que tout baume ou toutes herbes odoriférantes, s'exhalera devant nous et nous ravira hors de nous-mêmes jusqu'en l'amour éternel de Dieu. Sa bonté infinie, plus douce que le miel, nous remplira de suavité, nourrira et pénétrera notre âme et notre corps, et de cette bonté sans mesure nous aurons toujours faim et soif. Sentir cette faim et cette soif sera cause d'une permanence et d'un renouvellement continu du goût céleste et de la nourriture divine et c'est la vie éternelle.
Par l'amour nous saisirons l'amour, et
l'amour nous saisira. Possédant Dieu, nous serons possédés par lui en unité, et
jouissant de lui, nous nous reposerons avec lui dans la béatitude. Cette
fruition sans mode et ce repos superessentiel constituent le plus haut sommet
de la béatitude. On y est englouti dans la satiété au-dessus de toute faim, qui
n'y peut pénétrer, car il n'y a plus là qu'unité. Là tous les esprits aimants
s'endormiront dans la ténèbre superessentielle, toujours vivants néanmoins et
éveillés à la lumière de gloire, chacun en particulier, à sa place et à son
rang, avec toute la beauté et l'activité glorieuse dont je viens de vous
parler.
Que personne donc ne vous trompe, en parlant de fausse oisiveté, car ce que je vous dis maintenant est attesté par notre foi et par la sainte Écriture c'est une vérité éternelle. Nous aimerons et nous jouirons, nous agirons et nous reposerons, nous nous exercerons et posséderons, tout cela en même temps dans un éternel présent sans avant ni après. Et si l'on vous dit le contraire, n'y ajoutez pas foi. Nous pourrions encore énumérer les récompenses spéciales et l'éminente dignité des martyrs, des vierges et des docteurs ; mais nous laisserons cela, en ayant assez dit.
Telle est la vie éternelle, la part de
ceux qui, au jugement divin, se trouveront à la droite et entendront du Christ
ces paroles : « Venez les bénis de mon Père, possé-dez le royaume qui vous a
été préparé depuis le commencement du monde (MATTH., XXV,
34.) » Puis se tournant à gauche, il dira à tous les infidèles
et à ceux qui, depuis le commencement du monde jusqu'au dernier jour, seront
morts en péché mortel : « Retirez-vous de moi, maudits, et allez au feu
éternel, qui a été préparé pour le démon et pour ses anges (MATTH., XXV,
41.) », c'est-à-dire pour Lucifer et pour tous les pécheurs, ainsi que
pour tous les démons ; car le pécheur est l'envoyé du diable et son propre
esclave, et non seulement esclave du démon, mais aussi esclave du péché, comme
le Seigneur le dit lui-même (Cf. JOA.,
VIII, 34.).
Alors le Christ montera avec ses anges et
avec les justes dans la vie éternelle ; mais le démon avec les siens tombera
dans le puits infernal, dans les tourments éternels de l'enfer. Et parce que
les damnés ont péché dans leur vie contre un Dieu éternel et infini, et que
leur volonté perverse avec la tache du péché demeure éternellement, la peine
qui répond au péché est éternelle. Volontairement et sciemment ils ont repoussé
d'eux la grâce divine, et ils ont préféré les choses temporelles aux choses éternelles.
C'est parce qu'ils ont méprisé Dieu et ses grâces, qu'ils doivent être privés
de lui pour toujours : car ce que l'homme vend volontairement et sciemment, et
ce à quoi il renonce, il est juste qu'il en soit privé à jamais.
La privation éternelle de Dieu et de
toute béatitude constitue la peine du dam. Cette peine est spirituelle, et plus
terrible qu'aucun mal qu'on puisse éprouver dans le corps. Les petits enfants
qui meurent sans baptême avant d'être arrivés à l'âge de discernement, sont seulement
privés de Dieu, à cause du péché originel, et ils n'ont pas d'autre peine. Pour
ceux, au contraire, qui par leur propre volonté se détournent de Dieu,
l'abandonnent et le méprisent, la privation éternelle de Dieu est la principale
et la plus grande peine : mais puisqu'ils se sont tournés vers les créatures
dans un amour désordonné contre l'honneur de Dieu, ils souffrent encore du feu
éternel correspondant à cet amour désordonné. Que ce feu soit spirituel ou
matériel, ou tous les deux (ce qui me semble plus probable), nous nous en
remettons à Dieu : car Dieu est assez puissant pour faire brûler d'un feu
matériel l'âme et le corps.
Ensuite vient la troisième peine, qui est
encore plus intérieure, et c'est le froid infernal sans fin. Car celui qui n'aime
pas Dieu porte avec lui une grande froideur, et dans ce froid il doit
éternellement périr. De même celui qui a un amour désordonné des créatures doit
brûler, car il porte lui-même le feu qui est l'amour mauvais. Ceux qui viennent
au jugement de Dieu, sans l'amour divin, auront l'intérieur de l'âme tremblant
de froid infernal. Et ceux qui y apportent un amour désordonné et étranger
brûleront dans l'âme et le corps d'un feu infernal. Ils auront des ténèbres
intérieures à cause de leurs péchés, et ils seront privés de toute lumière
extérieure en dehors de ce qu'il faut pour voir l'horrible aspect des démons et
des corps en ce lieu immonde. Et le ver de la conscience ne mourra point, mais
toujours il rongera et blâmera et témoignera qu'ils auraient pu mériter la vie
éternelle, mais qu'à cause de leurs péchés et par leur propre faute, ils sont
venus dans les tourments éternels. Dans leur grande angoisse ils gémiront et
soupireront, non pas par regret ou par haine du péché, mais par l'horreur des
peines éternelles. Sans cesse ils subiront la mort, et jamais ils ne mourront
complètement : et de là vient que la peine infernale est appelée une mort
éternelle : « et la mort les consumera », dit le prophète (PS. XLVIII, 15.).
Car de même que la gloire de Dieu nourrit les saints de joie, de même la peine
infernale consume les damnés dans une tristesse éternelle. Il y aura là un
désespoir sans fin car ils seront sûrs que la peine ne se terminera jamais.
Comme maintenant les péchés sont
multiples et de différentes espèces, une peine spéciale répondra à chacun des
péchés : Ainsi ceux qui sont maintenant arrogants et superbes seront alors les
plus bas placés, comme un escabeau pour les diables et les damnés. Car l'enfer
est un cachot où s'exerce la justice divine et où toute chose sera vengée selon
un juste jugement. Le ladre avare aura le cœur traversé et rempli de flammes
brûlantes, comme d'argent et d'or incandescents et de métal fondu. La mort sera
désirée, mais ne viendra pas. La haine mutuelle et l'envie de l'un contre
l'autre seront là plus grandes que jamais elles ne furent dans ce monde ;
cependant les damnés devront rester éternellement ensemble, comme une masse
compacte qui bout dans une marmite. L'insolence, la colère et le courroux y
seront si grands, que les damnés seront comme des chiens enragés, prêts à se
déchirer et à s'entre-dévorer.
Ils seront saisis d'une telle torpeur
d'âme et de corps, que jamais plus ils ne pourront ni ne souhaiteront faire
œuvre vertueuse quelconque. Leurs corps seront plus lourds et pesants que des
meules, et sembleront liés et attachés par des chaînes de fer.
Ceux qui se seront adonnés à la gourmandise et à
l'intempérance, oublieux de Dieu et esclaves des plaisirs de la bouche, s'ils
meurent en cet état, recevront en nourriture et en breuvage du soufre et de la
poix bouillante, qui feront couler de leurs membres une sueur infernale. Une
goutte de cette sueur, tombant sur une statue de métal, suffirait à la mettre
en fusion.
Que je vous conte, à ce propos, un fait
qui s'est passé dans un monastère, situé près du Rhin. Là vivaient trois moines
gourmands, qui, avides de bonne chère, la cherchaient souvent hors du cloître.
Deux d'entre eux moururent subitement et à l'improviste, l'un étouffé et
l'autre noyé au bain. Le survivant vit un de ces malheureux lui apparaître et
lui déclarer qu'il était damné. Comme il lui demandait quelle était sa peine,
celui-ci laissa tomber de sa main une goutte de sueur sur un chandelier de
bronze, qui fondit aussitôt comme graisse ou cire au feu. Et après que le damné
eut disparu, il laissa après lui puanteur si grande que les moines durent
quitter le monastère pour trois jours. Celui à qui est arrivé ce fait abandonna
son cloître, pour se faire frère mineur, et celui qui me l'a raconté est devenu
frère prêcheur.
Je pourrais vous dire encore un autre
exemple, touchant le sort réservé à ceux qui vivent et meurent dans le
désordre, sans avoir pu ni s'en repentir, ni s'en confesser. Mais il est mieux
de taire ces choses peu édifiantes. Qu'il vous suffise de savoir, en toute
certitude, que la mesure des tourments correspondra à celle des jouissances que
l'on aura recherchées, en opposition avec la loi divine et les préceptes de la
sainte Église. Les membres qui auront servi à rendre esclave du démon, seront
plus particulièrement punis et tourmentés. Car c'est la main puissante de la
justice divine, qui dirige les vengeances du feu infernal, et proportionne les
châtiments aux crimes de chacun. Jamais ne s'éteindra ni ne diminuera ce feu
éternel, les damnés étant incapables de faire, ni même de désirer aucune œuvre
bonne.
C'est pourquoi Notre-Seigneur ordonne,
dans l'Évangile de saint Matthieu (MATTH., XXII,
13.), pour celui qui vient au festin sans la robe nuptiale,
c'est-à-dire qui se présente au jugement divin sans la charité, qu'on lui lie
les mains et les pieds, et qu'on le jette dans les ténèbres extérieures, dans
l'éternel oubli, loin de toute joie et de toute grâce. Là seront, dit le
Seigneur, des pleurs et des grincements de dents, le chant infernal, qui doit
durer éternellement. Rugissements et hurlements des démons et des damnés,
spectacles horribles, telle peut être la vision de l'enfer, de ce puits de feu
éternel, où il n'y aura que gémissements, tressaillements de douleur,
grincements de dents, obscurité et fumée opaque, larmes et cris d'angoisse. La
vue des démons et des visages ravagés par le feu, les injures, les mépris, la
chaleur desséchante, la soif mortelle, tout cela s'unira à l'absolu
dépouillement de tout bien, pour tourmenter, dans la prison d'enfer, les
misérables damnés, liés de chaînes, suffoqués par les vapeurs de soufre et la
puanteur, dévorés de crainte, de honte, et d'amère tristesse, rongés à jamais
par le ver de la conscience, par la haine et l'envie, par la fureur et le
regret sans remède d'être éternellement privés de la contemplation de la face
divine.
Telle est la peine infernale. Au jour du
jugement, l'enfer engloutira tous les damnés, d'où qu'ils viennent, et avec eux
toutes les immondices et toute la puanteur du monde. Puis il se fermera par en
haut, pour que nul homme ni démon n'en puisse sortir. Ils seront là maintenus,
comme par un couvercle de chaudière, et la justice de Dieu, ainsi que leur
propre malice, les y fera bouillir et se consumer à jamais et sans fin.
SOURCE : http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/Ruysbroek/Ruysbroeck/Tome5/foichr.html
Also known as
John Ruysbroeck
Jan van Ruusbroec
Jan van Ruysbroek
John the Admirable Doctor
John the Divine Doctor
Ruysbroeck the Admirable
Profile
Nothing is known of John’s father,
but history remembers his mother as
a very pious woman who
eventually entered a convent.
At age eleven John moved in with and was educated by
his uncle, Father John
Hinckaert at Saint Gudule’s, Brussels, Belgium. Ordained in 1317.
Served as chaplain at
Saint Gudule’s for 26 years.
In response to pamphlets teaching heresy,
John began to write his
own, primarily on false mysticism being
taught. None of these writings have
survived.
In 1343,
John and his uncle retired to a hermitage in
Groenendael. His reputation for wisdom and holiness began to spread, and
the hermitage attracted
like-minded men. The group founded a formal community of Augustinian
canons regular on 13
March 1349 with
John as prior.
Many people came for spiritual guidance by the canons,
and especially from John. He led a life of extreme austerity, became famous as
a sublime contemplative and skilled director of souls. As the Spirit moved him,
he resumed writing.
Noted as the greatest of the Flemish mystical writers.
Born
Died
2
December 1381 at
Groenendael of natural causes
relics translated
to Saint Gudule’s, Brussels, Belgium in 1783,
but were lost or destroyed during the French
Revolution
1
December 1908 by Pope Pius
X
in canonical habit,
seated in the forest with his writing tablet on his knee, rapt in ecstasy and
enveloped in flames, which encircle without consuming the tree under which he
is resting
Additional Information
Book
of Saints, by the Monks of
Ramsgate
—
A Mediaeval Mystic, by Father Vincent
Joseph Scully
Ruysbroeck, by Evelyn Underhill
The Adornment of the Spiritual Marriage, by Blessed John
van Ruysbroeck
read online
The Book of Supreme Truth, by Blessed John
van Ruysbroeck
The Sparkling Stone, by Blessed John
van Ruysbroeck
books
Our Sunday Visitor’s Encyclopedia of Saints
other sites in english
Christian Classics Ethereal Library
New Schaff-Herzog Encyclopedia of Religious Knowledge
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sitios en español
Martirologio Romano, 2001 edición
nettsteder i norsk
Readings
Where I assert that we are one in God, I
must be understood in this sense that we are one in love. – Blessed John
MLA Citation
“Blessed John van
Ruysbroeck“. CatholicSaints.Info. 29 January 2021. Web. 2 December 2021.
<https://catholicsaints.info/blessed-john-van-ruysbroeck/>
SOURCE : https://catholicsaints.info/blessed-john-van-ruysbroeck/
Blessed John Ruysbroeck
Surnamed the Admirable Doctor, and the Divine Doctor,
undoubtedly the foremost of the Flemish mystics, b.
at Ruysbroeck, near Brussels,
1293; d. at Groenendael, 2 Dec., 1381. He was blessed with a devout mother, who
trained him from infancy in the ways of piety and holiness. Of his father we know nothing;
John's only family name, van Ruysbroeck, is taken from his native hamlet. At
the age of eleven he forsook his mother, departing without leave or warning, to
place himself under the guidance and tuition of his uncle, John Hinckaert, a
saintly priest and
a canon of St. Gudule's, Brussels, who with a
fellow-canon of like mind, Francis van Coudenberg, was following a manner of
life modelled on the simplicity and fervour of Apostolic days. This uncle
provided for Ruysbroeck's education with a
view to the priesthood.
In due course, Blessed John was presented with a prebend in St.
Gudule's, and ordained in
1317. His mother had followed him to Brussels, entered a
Béguinage there, and made a happy end shortly
before his ordination.
For twenty-six years Ruysbroeck continued to lead, together with his uncle
Hinckaert and van Coudenberg, a life of extreme austerity and retirement. At
that time the Brethren of the Free Spirit were causing considerable trouble in
the Netherlands,
and one of them, a woman named
Bloemardinne, was particularly active in Brussels, propagating
her false tenets
chiefly by means of popular pamphlets. In defence of the Faith Ruysbroeck
responded with pamphlets also written in the native tongue. Nothing of these
treatises remains; but the effect of the controversy was so far permanent with
Ruysbroeck that his later writings bear constant reference, direct and
indirect, to the heresies,
especially the false mysticism, of the day,
and he composed always in the idiom of the country, chiefly with a view to
counteracting the mischief of the heretical writings
scattered broadcast among the people in their own tongue.
The desire for a more retired life, and possibly also
the persecution which
followed Ruysbroeck's attack on Bloemardinne, induced the three friends to
quit Brussels in
1343, for the hermitage of Groenendael, in the neighbouring forest of Soignes,
which was made over to them by John III, Duke of Brabant. But here so many
disciples joined the little company that it was found expedient to organize
into a duly-authorized religious body. The hermitage was erected into a
community of canons regular, 13 March, 1349, and eventually it became the
motherhouse of a congregation, which bore its name of Groenendael. Francis van
Coudenberg was appointed first provost, and Blessed
John Ruysbroeck prior. John Hinckaert refrained from making the canonical
profession lest the discipline of the house should suffer from the exemptions
required by the infirmities of his old age; he dwelt, therefore, in a cell
outside the cloister,
and there a few years later happily passed away. This period, from his religious profession (1349)
to his death (1381), was the most active and fruitful of Ruysbroeck's career.
To his own community his life and words were a constant source of inspiration
and encouragement. His fame as a man of God, as a sublime
contemplative and a skilled director of souls, spread beyond the
bounds of Flanders and
Brabant to Holland, Germany, and France. All sorts and
conditions of men sought his aid and counsel. His writings were eagerly caught
up and rapidly multiplied, especially in the cloisters of
the Netherlands and Germany; early in the
fifteenth century they are to be found also in England. Among the more
famous visitors to Groenendael mention is made of Tauler, but though the
German preacher certainly knew and
appreciated his writings, it is not established that he ever actually saw
Ruysbroeck. Gerard
Groote in particular venerated him as a
father and loved him
as a friend. And through Groote, Ruysbroeck's
influence helped to mould the spirit of the Windesheim School, which in the
next generation found its most famous exponent in Thomas à Kempis. Just
now strenuous efforts are being made to discover authentic Flemish manuscripts of
Blessed John Ruysbroeck's works; but up to the present the standard edition is
the Latin version of Surius,
all imperfect and probably incomplete as this is. Of the various treatises here
preserved, the best-known and the most characteristic is that entitled
"The Spiritual Espousals". It is divided into three books, treating
respectively of the active, the interior, and the contemplative life; and each
book is subdivided into four parts working out the text; Ecce Sponsus
venit, exite obviam ei, as follows: (1) Ecce, the work of the vision, man
must turn his eyes to God;
(2) Sponsus venit, the divers comings of the Bridegroom; (3) exite,
the soul going
forth along the paths of virtue; and finally (4) the embrace of the soul and the
heavenly Spouse.
Literally, Ruysbroeck wrote as the spirit moved him.
He loved to
wander and meditate in
the solitude of the forest adjoining the cloister; he was
accustomed to carry a tablet with him, and on this to jot down his thoughts as
he felt inspired so to do. Late in life he was able to declare that he had
never committed aught to writing save by the motion of the Holy Ghost. In no
one of his treatises do we find anything like a complete or detailed account of
his system; perhaps, it would be correct to say that he himself was not
conscious of elaborating any system. In his dogmatic writings he is
emphatically a faithful son of the Catholic Church, explaining,
illustrating, and enforcing her traditional teachings with remarkable force and
lucidity; this fact alone is quite sufficient to dispose of the contention,
still cherished in certain quarters, that Ruysbroeck was a forerunner of
the Reformation,
etc. In his ascetic works, his favourite virtues are detachment, humility, and charity;
he loves to dwell on such themes as flight from the world, meditation upon the
Life, especially the Passion of Christ, abandonment to the Divine
Will, and an intense personal love of God. But naturally it is
in his mystical writings that the peculiar genius of Ruysbroeck shines forth.
Yet here again it is the manner rather than the matter that is new, and it is
especially in the freshness, originality, boldness, variety, detail, and truth of his
imagery and comparisons that the individuality of Ruysbroeck stands out.
Students of mysticism from
the pages of the Areopagite onwards
will scarcely discover anything for which they cannot recall a parallel
elsewhere. But there are many who maintain that Blessed John stands alone,
unrivalled, in his grasp of what we may term the metaphysics of mysticism, in the
delicateness and sureness of his touch when describing the phenomena and
progress of the mystic union, and in the combined beauty, simplicity, and
loftiness of his language and style.
In common with most of the German mystics Ruysbroeck
starts from God and
comes down to man, and thence rises again to God, showing how the two
are so closely united as to become one. But here he is careful to protest:
"There where I assert that we are one in God, I must be
understood in this sense that we are one in love, not in essence and
nature." Despite this declaration, however, and other similar saving
clauses scattered over his pages, some of Ruysbroeck's expressions are
certainly rather unusual and startling. The sublimity of his subject-matter was
such that it could scarcely be otherwise. His devoted friend, Gerard Groote, a
trained theologian,
confessed to a feeling of uneasiness over certain of his phrases and passages,
and begged him to change or modify them for the sake at least of the weak.
Later on, Jean
Gerson and then Bossuet both
professed to find traces of unconscious pantheism in his
works. But as an offset to these we may mention the enthusiastic commendations
of his contemporaries, Groote, Tauler, à Kempis, Scoenhoven,
and in subsequent times of the Franciscan van
Herp, the Carthusians Denys
and Surius,
the Carmelite Thomas of Jesus,
the Benedictine Louis
de Blois, and the Jesuit Lessius. In our own
days Ernest Hello and
especially Maeterlinck have done much to make his writings known and even
popular. And at present, particularly since his beatification, there is
a strong revival of interest in all that concerns Ruysbroeck in his
native Belgium.
A word of warning is needed against the assumption of
some writers who would exalt the genius of Ruysbroeck by dwelling on what they
term his illiteracy and ignorance. As a matter
of fact the works of Blessed John manifest a mastery of the sacred sciences, and a
considerable acquaintance even with the natural science of his day.
His adaptation of the slender resources of his native tongue to the exact
expression of his own unusual experiences and ideas is admirable
beyond praise; and though his verse is not of the best, his prose writings are
vigorous and chaste, and evidence not only the intellect of a
metaphysician, but the soul also of
a true and
tender poet.
Blessed John's relics were
carefully preserved and his memory honoured as that of
a saint. When Groenendael Priory was suppressed by Joseph II in 1783,
his relics were
transferred to St. Gudule's, Brussels, where,
however, they were lost during the French Revolution. A
long and oft-interrupted series of attempts to secure official acknowledgement
of his heroic
virtues from Rome was crowned at length by
a Decree, 1
Dec., 1908, confirming to him under the title of "Blessed" his
cultus ab immemorabili tempore. And the Office of the Beatus has
been granted to the clergy of Mechlin and to
the Canons Regular of
the Lateran. No authentic portrait of Ruysbroeck is known to exist; but the
traditional picture represents him in the canonical habit, seated in the forest
with his writing tablet on his knee, as he was in fact found one day by the
brethren—rapt in ecstasy and
enveloped in flames, which encircle without consuming the tree under which he
is resting.
Sources
ARTHUR, The Founders of the New Devotion (London,
1905); BAILLIE, Reflections from the Mirror of a Mystic (London, 1905); SCULLY,
Life of Bl. John Ruysbroeck (London, 1910); STODDART, Ruysbroeck and the
Mystics by Maurice Maeterlinck (London, 1894); UNDERHILL, Mysticism (London,
1911); AUGER, Etudes sur les Mystiques des Pays-Bas au moyen age in Acad. Roy.
de Belg., tom. xlvi; AUGER, De doctrina et meritis Joannis van Ruysbroeck
(Louvain, 1892); BOURGIGNON, Le b. Jean Rusbrok (Liege, 1910); ENGELHARDT,
Richard von St. Victor und Joannes Rusbroek (Erlangen, 1838); FOFI, Vita e
Dottrine del B. G. Rusbrochio (Rome, 1909); GERSON, Opera (Antwerp, 1708);
GRUBE, Gerhard Groot und seine Stiftungen (Cologne, 1883); HELLO, Ruysbroeck
l'Admirable (Paris, 1902); MAETERLINCK, L'ornement des noces spirituelles de
Ruysbroeck l'Admirable (Brussels, 1908); MIERLO, articles in Dietsche Warande
en Belfort, Feb.-Nov. (Antwerp, 1910); MULLER, Jan van Ruysbroeck, Van den VII
Trappen (Brussels, 1911); PENNOTTUS, Ordinis canonicorum historia tripartita
(Cologne, 1630); POMERIUS, in Bollandists, tom. IV; SURIUS, Opera (Cologne,
1692); THOMAS A KEMPIS, Opera (Freiburg, 1901); ULLMANN, Reformatoren vor der
Reformation (Hamburg, 1842); VREESE, Jean de Ruysbroeck (Brussels, 1909);
Processus, anno 1624. . .de vita et miraculis Ruysbrochii, in Mechlin archives;
Decretum Mechlin confirmationis cultus (Rome, 1909).
Scully, Vincent. "Blessed John
Ruysbroeck." The Catholic Encyclopedia. Vol. 13. New York:
Robert Appleton Company, 1912. 1 Dec.
2021 <http://www.newadvent.org/cathen/13280c.htm>.
Transcription. This article was transcribed for
New Advent by Herman F. Holbrook. O Blessed John, and all ye holy Doctors,
pray for us.
Ecclesiastical approbation. Nihil
Obstat. February 1, 1912. Remy Lafort, D.D.,
Censor. Imprimatur. +John Cardinal Farley, Archbishop of New York.
SOURCE : https://www.newadvent.org/cathen/13280c.htm
Beato Giovanni di Ruysbroeck Canonico
Regolare
Ruysbroeck, Belgio, 1293 – Groenendael, Belgio, 2
dicembre 1381
Nato nel 1293 a Ruysbroeck, nei pressi di Bruxelles,
Giovanni è uno dei maggiori mistici fiamminghi. Ordinato prete nel 1317, fu
cappellano di Santa Gudula a Bruxelles. Nel 1343 si ritirò con due compagni nel
bosco di Groenendael, vicino Waterloo. Molti si unirono e dal romitaggio sorse
una comunità di canonici regolari, di cui Giovanni fu priore. Morì nel 1381 ed
è beato dal 1903. Le sue opere furono così note, da meritargli i soprannomi
"doctor divinus" e "secondo Dionigi".
Martirologio Romano: Nel monastero di Groenendaal
nei pressi di Bruxelles in Belgio, beato Giovanni Ruysbroeck, sacerdote e
canonico regolare, che espose insegnamenti mirabili sui vari gradi della vita
spirituale.
Giovanni nacque nel 1293 a Ruysbroeck, paesino nella valle della Senna, a sud di Bruxelles. Nulla sappiamo del padre, le fonti antiche parlano soltanto della madre e di uno zio, Giovanni Hinckaert, ricco cappellano della chiesa principale di Bruxelles, dedicata a Santa Gudula. Questi nel 1304 accolse il nipote per fargli frequentare la scuola capitolare, ove Giovanni apprese la lingua latina e studiò per quattro anni grammatica, retorica e dialettica. Appena sedicenne, Giovanni si sarebbe subito consacrato al Signore con la sola ricerca della scienza divina. Ma forse questa informazione non va presa letteralmente, in quanto il biografo intende presentare il santo come colui che non necessita di una lunga formazione umana. Non va perciò escluso anche per Giovanni l’impegno di altri anni di studio, per giungere ad una buona formazione teologica, culturale ed umana. In effetti, però, non risulta che egli abbia frequentato l’Università di Parigi o di Colonia, come molti altri suoi contemporanei, e di conseguenza non conseguì alcun titolo accademico superiore. Egli ostentò comunque un elevato livello culturale: nelle sue opere figurano lunghe traduzioni di testi latini, impensabili senza un’approfondita conoscenza della lingua, forse frutto di studi privati. Probabilmente la stessa scuola capitolare di Bruxelles, in conformità alle disposizioni del III Concilio Lateranense del 1179, si era dotata di un “magister” per la formazione degli aspiranti al sacerdozio.
Il Ruysbroeck ricevette l’ordinazione presbiterale nel
1317, ormai orfano, ma continuava a sentire la madre spiritualmente presente e
sua guida nella missione sacerdotale. Per ben venticinque anni fu cappellano a
Santa Gudula, ove quotidianamente celebrava l’Eucaristia, partecipava
all’Ufficio corale, predicava, catechizzava, si prendeva cura delle persone
bisognose di consiglio. Nei Paesi Bassi dilagavano le idee eretiche dei
movimenti del “Libero spirito”, dalle quali occorreva porre in guardia gli
ignari fedeli che rischiavano di cadere in preda allla confusione ed al
disorientamento. Nacquero così nei suoi scritti spirituali importanti passi per
controbattere le teorie dei “falsi mistici”, forse anche su richiesta di alcuni
suoi amici e figli spirituali.
Queste nuove dottrine da combattere erano contenute
negli scritti di una beghina di Bruxelles, Heilwtg Bloemaerts, meglio
conosciuta come Bloemardina, ma purtroppo nessuna fonte ha tramandato nulla di
certo circa tali scritti. Forse però questi non sono mai esistiti, in quanto
Giovanni mai citò la Bloemardina nei suoi libri, neppure indirettamente. Pare
dunque probabile che Pomerius si sia confuso con Margarete Porete, morta sul
rogo nel 1310: del suo scritto “Speculum simplicium animarum” (Specchio delle
anime semplici) circolavano infatti copie nei beghinaggi e la sua peregrina
dottrina era assai stimata negli ambienti del “Libero spirito”. Giovanni, che
frequentava il beghinaggio di Bruxelles, sembra aver conosciuto e anche letto
lo “Speculum della Porete”. Infatti nel suo “Splendore delle Nozze spirituali”
si trovano tre capitoli in cui egli espone gli errori, prendendo dura posizione
contro chi sosteneva una vita spirituale in assoluta passività: “Costoro
credono di essere dei contemplativi; anzi i più santi che ci sono al mondo,
invece la via che seguono è totalmente contraria a Dio, ai santi e a tutti i
buoni”.
Nei venticinque anni di fedele servizio alla chiesa di
Santa Gudula, Giovanni fu sempre semplice cappellano, vivendo ritirato,
dedicandosi all’apostolato sacerdotale e componendo ben cinque trattati
spirituali. Lo zio, prete mondano ed immerso in molte faccende, nel 1327 si
convertì in seguito a una grazia interiore. Si ritirò nella sua casa insieme
con Giovanni ed una altro canonico di Santa Gudula, Franco van Coudenberghe. Il
rimanere a Bruxelles comportava però per loro il rischio di non poter
svincolarsi del tutto da una società clericale di cui vedevano e comprendevano
in pieno i difetti e la decadenza morale. Con la testimonianza della vita, con
la predicazione, e Giovanni anche con gli scritti, essi avevano accusato il
clero della loro Chiesa locale, criticando l’insoddisfacente situazione della
diocesi ed auspicando un rinnovamento morale e sociale. Ciò senza dubbio creò
loro nemici ed oppositori, quindi dovettero abbandonare Santa Gudula e cercare
un altro posto.
La scelta di Groenendael pare fu dovuta ai buoni
rapporti di Franco van Coudenberghe con il duca Giovanni III di Brabante. Sin
dal 1304 vi esisteva un eremitaggio, poi abbandonato. Il 16 aprile 1343 i tre
sacerdoti presero possesso della nuova abitazione ed del terreno circostante.
Il duca Giovanni III aveva posto quale condizione di costruirvi una casa per
almeno cinque persone, tra cui dei sacerdoti, che s’impegnassero a “celebrare
l’Ufficio divino per la lode, la gloria e l’onore dell?onnipotente Dio, della
gloriosa Vergine e di tutti i santi”. In tal modo il duca voleva assicurarsi i
suffragi per l’anima della sua sposa, Maria d’Evreux, morta nel 1335. L’impegno
di celebrare la lode divina corrispondeva pienamente alle intenzioni dei tre
preti. Questi non si proponevano una fondazione di tipo monastico, non sentendo
il bisogno di avere un superiore, una Regola ed obblighi fissi sigillati con i
voti religiosi. Bastava invece loro costruire una cappella, che nel 1345 venne
benedetta dal vescovo ausiliare di Cambrat. Franco van Coudenberghe fu nominato
parroco. Passarono in tal modo i primi anni e la piccola comunità continuò a
vivere con maggiore intensità la vita liturgica iniziata a Bruxelles.
Il loro singolare rifiuto di una forma di
consacrazione già determinata dalla Chiesa, era determinato principalmente dal
loro desiderio di restare “canonici”, sacerdoti e cantori della lode di Dio.
Per mettere a tacere le mormorazioni contro di loro, Franco van Coudenberghe si
recò a Cambrai per sottoporre la situazione al giudizio del vescovo. Questi
volle fare una visita pastorale a Groenendael, ove decise di trasformare il
gruppo in Ordine religioso, sotto la Regola di Sant’Agostino. Il 10 marzo 1350,
infatti, Franco e Giovanni ricevettero l’abito dei Canonici Regolari dalle mani
del vescovo, con l’obbligo di professare la Regola agostiniana. L’anziano
Giovanni Hinckaert, zio del beato, fu esentato, in quanto la sua fragile salute
e l’età avanzata non gli avrebbero permesso di condurre la vita austera del
religioso. Dopo la vestizione dei fondatori, il vescovo nominò Franco prevosto
della comunità, con la piena autorizzazione di ricevere candidati e nuovi
confratelli, e Giovanni quale priore.
L’aver accettato sotto ispirazione divina lo stato
religioso garantì la sopravvivenza della comunità dopo la morte dei fondatori,
infatti da subito si accolsero nuovi aspiranti, ed inoltre permise di erigere a
Groenendael un Capitolo di Canonici Regolari, potenziale tessitore di rapporti
di reciproca stima con il Capitolo secolare dei canonici di Santa Gudula,
facendo così tacere ogni mormorazione. Inoltre, nel 1360 nacque la tradizione
che i canonici del Capitolo minore di Bruxelles, di cui Franco van Coudenberghe
aveva fatto parte, si recassero ogni anno a Groenendael per cantare insieme la
messa e trovarsi poi nel refettorio del monastero per l’agape fraterna.
A Groenendael Giovanni proseguì la sua attività
letteraria, scrivendo “sotto l’ispirazione dello Spirito Santo”, come fu
convinzione dei contemporanei e confratelli che lo circondavano di sincera
ammirazione. L’immagine rimasta impressa nella loro memoria fu incentrata
infatti su due qualità: “sanctus”, per il carattere vissuto della sua dottrina
mistica di incomparabile sublimità, ed “inspiratus”, per l’influsso divino con
il quale si cercò di spiegare il suo insegnamento difficile, per molti
addirittura “oscuro”. Per quasi quarant’anni Giovanni fu direttore spirituale,
educatore e guida dei confratelli più giovani. Anche i certosini di Hérinnes
subirono l’influsso del “santo priore” di Groenendael, ma egli rifiutò la
proposta di aderire al loro Ordine per rimanere fedele ai suoi impegni di
Canonico Regolare.
Gli ultimi anni di Giovanni trascorsero tranquilli,
con una profonda vita di preghiera contemplativa. La sua profonda devozione
eucaristica lo portava a celebrare la messa con grande raccoglimento, quasi
estaticamente. Ciò fu segnalato al prevosto, con il suggerimento di proibirgli
la celebrazione della messa. Ma tutta la sua gioia, tutta la sua felicità,
tutta la forza della sua lunga vita era sempre stata l’Eucaristia, ed egli
spiegava così i lunghi periodi di raccoglimento in cui talvolta cadeva: “Dio si
ricorda di me. Nostro Signore, egli stesso è venuto e si è manifestato a me”.
Implorò dunque il superiore di non proibirgli “la celebrazione della messa,
nella quale Nostro Signore viene e si fa vedere a me, riempie il mio cuore di
gioia e di allegrezza. No, il non dire messa sarebbe troppo penoso per me”.
Giovanni di Ruysbroeck morì il 2 dicembre 1381, dopo circa due settimane di grave malattia, assistito sino all’ultimo momento dai confratelli e dai discepoli, tra i quali un sacerdote amico esperto di medicina. Giovanni aveva 89 anni di età e ben 64 di sacerdozio. La sua beatificazione giunse solo nel 1903 e, nonostante le sue opere gli abbiano meritato i soprannomi di “doctor divinus” e “secondo Dionigi”, è ancor oggi in attesa di canonizzazione.
SOURCE : http://www.santiebeati.it/dettaglio/91898
Katholische Pfarrkirche St. Johannes der Täufer,
ehemalige Kirche des Augustiner-Chorherrenstiftes Kloster
Rebdorf, in Rebdorf, einem Stadtteil von Eichstätt (Oberbayern),
Wandmalerei von Joseph Dietrich (1696—1745), Darstellung: Jan van Ruysbroek
Den salige Johannes Ruysbroeck (1293-1381)
Minnedag: 2.
desember
Den salige Johannes Ruysbroeck (nl: Jan van
Ruysbroeck; lat: Ioannes Rusbruochius) [Ruusbroec, Rusbrochius] ble født i 1293
i Ruysbroeck nær Brussel i Brabant i det nåværende Belgia. Det var den gangen
en liten landsby og Johannes kom fra beskjedne kår. Ingenting er kjent om hans
far, og om moren vet vi bare om hennes godhet og hennes kjærlighet til sønnen.
Den viktigste personen i Johannes' barndom var ikke
noen av foreldrene, men hans onkel Johannes Hinckaert, som var sekulær kannik
ved kollegiatskirken Sainte-Gudule (St. Gudula) i Brussel. (En kollegiatskirke
er en kirke som har kapittel uten å være domkirke). Fra han var elleve år bodde
Johannes hos sin onkel og gikk på skole i Brussel. Noen år senere kom hans mor
og sluttet seg til dem. Hun ble beginer (béguine) og levde i
et béguinage. Beginene var kommuniteter av legkvinner som avla
tidsbegrensede løfter.
Kort etter morens død ble den 24-årige Johannes
presteviet i 1317. Han ble selv utnevnt til kannik ved Sainte-Gudule. En tid
senere ble hans onkel Johannes dypt imponert over en preken han hørte i
Sainte-Gudule. Han ga bort alt han ikke trengte og bestemte seg for å leve et
liv i kontemplasjon så langt det var forenelig med sine kirkelige plikter. Han
fikk følge av en yngre kannik, Franco van Coudenberg, og av Johannes.
De neste 26 årene levde de tre mennene et liv i ekstrem
askese, tilbaketrukkethet og kontemplasjon. I denne tiden bekjempet Johannes
aktivt kjetteriene og den falske mystisismen til «Brødrene av den frie ånd», og
han skrev flere pamfletter hvor han angrep deres lære. Men de følte seg kalt
til å vie seg fullstedig til Gud i kontemplasjon, og dette var umulig i byen.
Mange av prestene der var forsimplet og verdslige, Johannes hadde fått fiender
på grunn av sin kamp mot kjetteriet og Franco hadde vært i konflikt med hertug
Johannes III av Brabant.
Med hertugens tillatelse forlot de tre prestene våren
1343 Brussel og trakk seg tilbake til den avsidesliggende eneboerhytten
Groenendaal («Den grønne dalen») ved Waterloo sør for Brussel for å leve som
eremitter. Hertugen av Brabant ga dem stedet på den betingelse at de ba for
hans elskede avdøde hustru. Der bygde de et større kapell og etablerte seg. Men
livet var ikke fredelig der heller. De tre tilhørte ingen orden, så de hadde
ikke noen beskyttelse mot kritikken fra munker i nærheten og fra kapitlet i
Sainte-Gudule. Det var også vanskelig å forholde seg til hertugens jakt og
følge, som ofte krevde gjestfrihet fra dem. Men i 1349, da to kanniker til
hadde sluttet seg til dem, opprettet Johannes en kommunitet av kontemplative
augustinske regelbundne kanniker eller augustinerkorherrer (Ordo
Canonicorum Regularium Sancti Augustini – CRSA; konføderasjon fra 1959).
De avla sine løfter til biskopen av Cambrai. Året
etter døde kannik Hinckaert. Franco van Coudenberg ble prost for klosteret,
mens Johannes ble den første prioren i kommuniteten. Dette var et godt
partnerskap, for Franco hadde de administrative evnene til å bygge opp livet i
klosteret, mens Johannes hadde en dyp spiritualitet. Han var rolig, tålmodig,
lydig og glad i manuelt arbeid, men var temmelig klossete og kanskje en bedre
underordnet enn leder.
Johannes pleide å tilbringe timer i skogen som omga
klosteret, hvor ingen menneskelig forstyrrelse kom mellom hans øre og Guds
stemme. Han gjorde notater på voksede plater og skrev dem ut detaljert og
arrangerte dem i sin celle. Han skrev på den lokale Brabant-dialekten av flamsk
slik at hans verker både kunne leses av prester og legfolk, og mens noen av
skriftene ble oversatt til latin mens han selv levde, synes de å ha sirkulert
langsomt. Det var ikke før hundre år senere at hans komplette arbeid ble
oversatt av karteusermunken Laurentius Surius og utgitt i Köln.
Johannes' verker er vanskelige å klassifisere. De
fleste av hans større verker er udaterte, og det har vært en betydelig debatt
blant forskere om når spesielle verker ble skrevet. Han ga ikke bøkene sine
noen tittel, så titler som «Boken om elskerne av Guds rike», «Boken om den
sprudlende steinen» og «De syv gradene av kjærlighetens stige» er bare
oversettelser av titler som opprinnelig ble brukt av tidlige kommentatorer på
Brabant-flamsk eller latin.
Johannes var den fremste flamske mystikeren og en av
de fremste og mest berømte forfattere av kristen mystikk, alt skrevet på
flamsk. Allerede som kannik i Brussel hadde han begynt å skrive mystiske
verker, og han utøvde en stor innflytelse på sin samtid, blant annet med «Boken
om det åndelige tabernakel» og hovedverket «Det åndelige ekteskaps
pryd» (Die Chierheit der gheesteleker brulocht). Han fikk tilnavnene
«Doctor divinus»og «den andre Dionysius».
Johannes Ruysbroecks skrifter uttrykker en
himmelstrebende tro, ofte i en poetisk form. I likhet med andre mystikere fra
samme periode, som Richard Rolle eller Thomas à Kempis, går han i inspirasjon
fra vanlig prosa til rytmisk tonefall og noen ganger til rim eller bokstavrim.
Likevel skriver han enkelt og ofte på en hverdagslig måte om de store kristne
sannheter. Han skriver direkte ut av sin egen erfaring som kontemplativ, uten
konsesjoner til akademisk formulering eller litterær presentasjon.
Hans skrifter om Guds absolutte natur, i hvem han så
forsonet antitesene evighet og tid, å være og å bli, av konstant bevegelse og
fullstendig ro, og om Den hellige Treenighet, var svært forskjellig fra
teologien hos de skolerte på 1300-tallet, men de har et klart slektskap med
arbeidene til andre mystikere fra samme tid, Richard Rolle, Dame Julian av
Norwich og Mester Eckhart.
På grunn av at han ikke brydde seg om akademiske
formuleringer, og kanskje fordi han skrev på sin egen dialekt, har noen
kommentatorer spekulert i at Johannes var analfabet eller at han ikke kunne
latin. Men det finnes beviser i hans skrifter på at han var en kompetent
filosof og teolog, godt kjent både med verkene til de samtidige skolastikerne
og til dem fra tidligere generasjoner.
Johannes' ry spredte seg, og han fikk besøkende fra
hele Europa. Groenendaal ble en skole i hellighet, og hans Devotio
moderna skulle øve dyp innflytelse på «Brødrene av det felles liv» og
deres grunnlegger Gerard Groote, og gjennom ham nådde innflytelsen De regelbundne
kannikene av Windesheim, fremtredende blant dem var Thomas à Kempis og
Dionysius Karteuseren. Det er signifikant at Windesheim ikke ble karteusisk
eller cisterciensisk, men augustinsk. Senere sluttet Groenendaal-kongregasjonen
seg til Windesheim.
I de siste årene av sitt liv var ikke Johannes i stand
til å forlate den cellen han delte med prost Franco, som var enda eldre enn ham
selv. Han var fysisk svak og nesten blind, men hans åndelige visjon var
fortsatt klar. En natt drømte han at hans mor kom til ham og sa at Gud ville
kalle ham til seg før advent. Neste dag ba han om å bli brakt til den vanlige
sykestuen, hvor han med høy feber forberedte seg på døden med hengivenhet og en
urokkelig ånd.
Han døde den 2. desember 1381 i Groenendaal og ble
gravlagt der. Snart etter hans død ga de troende ham tilnavnet «den
vidunderlige». En gang i året, på den andre søndagen etter pinse, pleide
kapitlet i Sainte-Gudule å gå i prosesjon til Groenendaal til ære for Johannes
Ruysbroeck. Da klosteret ble nedlagt av Josef II i 1783, ble hans relikvier
brakt til Sainte-Gudule i Brussel, bare for å gå tapt i Den franske revolusjon.
Det ble gjort mange forsøk på å få ham saligkåret.
Dette kunne ha godt fortere hvis han hadde levd mer i sentrum av den katolske
tradisjon og hvis han hadde skrevet på latin i stedet for på sitt morsmål
flamsk. Han ble saligkåret først den 9. desember 1908 ved at hans kult ble
stadfestet av den hellige pave Pius X (1903-14).
Hans minnedag er dødsdagen 2. desember.
Kilder:
Attwater/Cumming, Butler (XII), Benedictines, Delaney, Schauber/Schindler,
Index99, CE, CSO, Patron Saints SQPN, Infocatho, Bautz, Heiligenlexikon,
santiebeati.it, augustiniancanons.org - Kompilasjon og oversettelse:
p. Per Einar
Odden - Opprettet: 2000-09-01 00:01 -
Sist oppdatert: 2006-07-06 11:35
SOURCE : http://www.katolsk.no/biografier/historisk/rusbroch