Monument de François de Laval, Québec, est situé en
haut de la côte de la Montagne, devant l'édifice Louis-S.-St-Laurent
Bienheureux François de
Laval
Premier évêque de Québec
Les biographes du premier
évêque de Québec ne pourront jamais épuiser l'étude des facettes de sa riche
personnalité. Mgr de Laval fut à la fois un habile administrateur, un
missionnaire au coeur ardent, un homme fier et humble, un mystique héroïque et
discret.
Songeons qu'il a passé
cinquante années à Québec, surmontant mille difficultés et épreuves, tout en
conservant une impressionnante sérénité. C'est vraiment une épopée que sa vie,
comme celle de nombreux fondateurs de l'Église canadienne. Il fut l'ami des
grands et des petits, des Indiens et des Français, des gouverneurs de Québec,
des fondateurs de Montréal et de Trois-Rivières.
UN DESCENDANT DE LA
GRANDE NOBLESSE FRANÇAISE
Ses parents sont tous
deux de la haute noblesse. Son père est un descendant du baron de Montmorency
qui était un contemporain de Hughes Capet, roi de France, fondateur de la
dynastie capétienne. François a six frères et soeurs; âgé de 24 ans, il est
ordonné prêtre le 1er mai 1647, il y a 350 ans. Il est ordonné évêque le jour
de l'Immaculée Conception, le 8 décembre 1658. Il se préparait à partir en
mission au Tonkin quand on lui apprit que les Jésuites de Québec le
réclamaient. Le roi Louis XIV transmet leur requête au Souverain Pontife, en
écrivant ceci: "Nous voulons que le sieur de Laval, évêque de Pétrée, soit
reconnu par tous nos sujets dans la Nouvelle-France, pour y faire les fonctions
épiscopales."
Des chicanes éclatent
dans le clergé local au sujet de cette nomination; mais la reine-mère, Anne
d'Autriche, ratifie le tout en écrivant au gouverneur de Québec: "C'est
mon intention bien arrêtée et celle de mon fils que Mgr de Laval exerçât la juridiction
épiscopale à l'exclusion de tout autre." Elle obligeait le gouverneur de
Québec à faire repasser en France quiconque voudrait contrecarrer son autorité.
Mgr de Laval règle des affaires de famille, renonce à sa seigneurie et à ses
droits d'aînesse en faveur de son frère cadet, Jean-Louis. Son père est déjà
décédé, et sa mère mourra l'année de son départ.
QUÉBEC, VILLE DE TEMPÊTE
La bateau parti de La
Rochelle le jour de Pâques 1659 arrive à Québec le 16 juin 1659. Toute la
colonie est sur le quai, ainsi que de nombreux Amérindiens; la ville retentit
d'exclamations, du son des cloches et du bruit des canons du fort. Le jour
même, Mgr de Laval baptise un petit Huron et il se rend à la cabane d'un
moribond pour lui administrer les derniers sacrements. Plus tard, il baptisera
le grand chef iroquois, Garagonthié.
A peine débarqué à
Québec, l'évêque constate les effets désastreux de l'eau-de-vie que les
sauvages consomment abondamment. Ces boissons alcoolisées sont importées de
France et échangées contre des fourrures. Mgr de Laval s'interpose: les
marchands sont furieux et montent le peuple contre l'évêque. Ne pouvant
ralentir ou faire cesser ce commerce dont il résulte des bagarres, voire des
meurtres, la division dans les familles, Mgr de Laval frappe un grand coup: il
excommunie les chrétiens qui continueront ce commerce. Il aura à affronter la
colère de notables et même de certains gouverneurs. Marie de l'Incarnation
écrit à son fils Dom Claude Martin, bénédictin, "Mgr notre prélat est très
zélé pour ce qu'il croit devoir augmenter la gloire de Dieu. Il a pensé mourir
de douleur à ce sujet, et on le voit sécher sur pied."
Cette lutte contre la
vente de l'eau-de-vie durera vingt ans! Enfin, en 1679, Mgr de Laval obtient du
roi Louis XIV l'interdiction de la vente des boissons aux Indiens. Une longue
bataille épuisante vient de finir... pour un temps!
A Québec, il fait très
froid durant l'hiver. De gros poêles sont installés au milieu des églises, dont
plusieurs passent au feu! Deux fois, la nouvelle basilique de Québec brûlera...
mais l'évêque courageux la reconstruit, aidé par les "corvées" des
habitants.
LE PÈRE DE LA PATRIE
Mgr de Laval travaille
avant tout à l'organisation de la vie religieuse et à la construction d'écoles.
Son immense diocèse s'étend de Québec à l'Acadie et jusqu'à la Louisiane alors
française. Il entreprend de nombreuses visites harassantes, car il tient à
fonder l'Église canadienne sur la force et l'unité de la vie paroissiale,
scolaire et familiale. Son séminaire de Québec a formé, le premier, nos
écrivains, penseurs, chefs politiques et religieux qui lutteront pour les
droits de la patrie après la conquête anglaise. Après 1760, les paroisses sont
restées debout, groupées "serré" autour de leur pasteur, comme le
leur avait appris l'évêque de Québec. Il a bien mérité son titre de "Père
de la Patrie".
UN MYSTIQUE AU COEUR
MISSIONNAIRE
Le frère Housssart, à la
mort de Mgr de Laval le 6 mars 1708, révéla la haute valeur spirituelle et
mystique de celui qu'il servait, en publiant un mémoire. Durant les dernières
années de sa vie, l'évêque de Québec était devenu un grand handicapé physique,
suite surtout à ses tournées missionnaires: "On l'a vu faire de longs
pèlerinages à pied, sans argent, mendiant son pain et cachant son nom. Il
voulait imiter les premiers apôtres de l'Église primitive, et remerciait Dieu
d'avoir quelque chose à souffrir pour son amour." Le vaillant évêque, en
hiver comme en été, parcourt sans relâche son immense vicariat. Sur le fleuve
Saint-Laurent, monté dans un frêle canot, il rame lui-même; en hiver, sa
"chapelle" sur le dos, il s'aventure en raquettes jusqu'à Montréal,
souvent surpris par les vents et la neige.
Il visite les malades de
l'Hôtel-Dieu de Québec et les soigne, les encourage et les assiste à leur mort.
Ce descendant du premier baron de France se rend seul à la basilique tous les
matins à 4 h. Comme un sacristain, il ouvre les portes, sonne la cloche, et
prépare l'autel pour y célébrer la messe dès 4 h 30. On a dit qu'il célébrait
sa messe comme un ange! Et dans sa pauvre chambre du Séminaire, il couche sur
des planches, remettant sous son lit la paillasse que le frère Houssart lui a
prêtée.
UN GRAND SAINT
A sa mort, Mgr de Laval
n'avait plus rien: il avait donné toutes ses possessions aux pauvres. La pape
Jean-Paul II l'a béatifié en 1980, à la suite de l'important dossier de
miracles et faveurs obtenus en le priant. L'évêque de la Nouvelle-France fut un
grand saint que l'on peut encore prier, en ces temps où "sa patrie"
est encore en danger.
Sa spiritualité
Le point de départ de la
spiritualité de François de Laval réside dans un détachement prononcé qui allait
bien avec son tempérament. Il s’en était imprégné auprès de Monsieur de
Bernières dans ses années de séjour à Caen. Ce détachement est « un grand
système de désappropriation » qui se ramène à la maxime spirituelle suivante :
« Nous n'avons pas de meilleur ami que Jésus-Christ. Suivons tous ses conseils,
surtout ceux de l'humiliation et de la désappropriation du cœur » comme écrit
son premier biographe, Bertrand de La Tour.
Pour François de Laval,
la désappropriation n’est autre chose que l’évangile vécu dans toute sa
radicalité. Il conserve à cette désappropriation son sens moral de renoncement
bien entendu. Ainsi, la désappropriation inclut les valeurs de détachement, de
pauvreté, d'humilité puisqu'elle reste toujours une certaine privation, mais l'essentiel
de la désappropriation pour François réside d'abord dans le partage et la mise
en commun des biens. C’est pourquoi la désappropriation devient partage
matériel, puis dans un même mouvement, partage fraternel. Il voulait, écrit
Bertrand de La Tour, « que tout le clergé ne fît qu'une grande famille », et
c'est dans ce but qu'il demandait qu'on ne se départît jamais « de la
désappropriation qui laisse tout en commun entre les mains du supérieur ».
La désappropriation se
refermerait sur elle-même si, en fin de compte, elle ne rendait de plus en plus
libre et accueillant à l’action de Dieu. À mesure que François de Laval avance
en âge, les fruits d'une ouverture amoureuse à la volonté de Dieu à travers les
événements se manifestent dans une constance, une patience et un abandon qui
grandissent. C'est cette expérience de foi confiante que François de Laval a
vécue tout au long de sa vie. Elle est l'aboutissement de la désappropriation
et elle est au cœur de son expérience spirituelle. « Il y a longtemps que Dieu
me fait la grâce de regarder tout ce qui m'arrive en cette vie comme un effet
de sa Providence », écrit-il en 1687. Dans les principaux événements de sa vie,
François de Laval recherche promptement leur signification spirituelle soit
pour son œuvre pastorale, soit dans son itinéraire spirituel personnel. Cette «
expérience de Providence », si l'on peut dire, ne serait pas complète si elle
ne suscitait une réponse. Cette réponse est l'abandon : « Il est bien juste...
que nous ne vivions que de la vie du pur abandon en tout ce qui nous regarde
au-dedans comme au-dehors », dira-t-il après le refus du Roi de le laisser
partir pour le Canada en 1687. À son ami Henri-Marie Boudon, en 1677, il disait
déjà : « Tout ce que la main de Dieu fait nous sert admirablement, quoique nous
n'en voyions pas sitôt les effets ».
François de Laval donne
l’exemple d'un pasteur totalement consacré à sa tâche dans une fidélité
quotidienne et durable. À sa mort en 1708, il laissait la réputation d'« un
pasteur plein de l'esprit des apôtres ». Face aux défis de l’évangélisation, sa
persévérance et sa confiance totale au Seigneur peuvent être une inspiration et
un exemple stimulant.
SOURCE : http://www.carrefourkairos.net/lavalndc.html
(Site web consacré au
bienheureux François de Montmorency Laval)
Saint François de Laval
Premier évêque de Québec (+1708)
François de Montmorency-Laval - Béatifié par le pape
Jean-Paul II le 22 juin 1980 - Décret
du 3 avril 2014, en italien, à l'inscription au Sanctoral, avec
culte étendu à toute l'Eglise.
- homélie
du Pape François à la messe d'action de grâce pour la canonisation de deux
saints canadiens, le 12 octobre 2014.
"...le christianisme canadien nous semble revêtu d'une grande vocation:
celle d'une nouvelle et magnifique expansion. C'est une vocation qui s'enracine
dans des traditions étonnantes: pensons, par exemple, aux martyrs canadiens;
pensons au vénérable François de Montmorency-Laval."
message
du pape Paul VI aux citoyens du Canada, Dimanche 22 septembre 1963
Songeons qu'il a passé cinquante années à Québec, surmontant mille difficultés
et épreuves, tout en conservant une impressionnante sérénité. C'est vraiment
une épopée que sa vie, comme celle de nombreux fondateurs de l'Église
canadienne. Il fut l'ami des grands et des petits, des Indiens et des Français,
des gouverneurs de Québec, des fondateurs de Montréal et de Trois-Rivières.
- Un descendant de la grande noblesse française.
Ses parents sont tous deux de la haute noblesse. Son père est un descendant du
baron de Montmorency qui était un contemporain de Hugues Capet, roi de France,
fondateur de la dynastie capétienne. François a six frères et sœurs; âgé de 24
ans, il est ordonné prêtre le 1er mai 1647, il y a 350 ans. Il est ordonné
évêque le jour de l'Immaculée Conception, le 8 décembre 1658. Il se préparait à
partir en mission au Tonkin quand on lui apprit que les Jésuites de Québec le
réclamaient. Le roi Louis XIV transmet leur requête au Souverain Pontife, en
écrivant ceci: "Nous voulons que le sieur de Laval, évêque de Pétrée, soit
reconnu par tous nos sujets dans la Nouvelle-France, pour y faire les fonctions
épiscopales."
Des chicanes éclatent dans le clergé local au sujet de cette nomination; mais
la reine-mère, Anne d'Autriche, ratifie le tout en écrivant au gouverneur de
Québec: "C'est mon intention bien arrêtée et celle de mon fils que Mgr de
Laval exerçât la juridiction épiscopale à l'exclusion de tout autre." Elle
obligeait le gouverneur de Québec à faire repasser en France quiconque voudrait
contrecarrer son autorité. Mgr de Laval règle des affaires de famille, renonce
à sa seigneurie et à ses droits d'aînesse en faveur de son frère cadet,
Jean-Louis. Son père est déjà décédé, et sa mère mourra l'année de son départ.
- Québec, ville de tempête.
La bateau parti de La Rochelle le jour de Pâques 1659 arrive à Québec le 16
juin 1659. Toute la colonie est sur le quai, ainsi que de nombreux Amérindiens;
la ville retentit d'exclamations, du son des cloches et du bruit des canons du
fort. Le jour même, Mgr de Laval baptise un petit Huron et il se rend à la
cabane d'un moribond pour lui administrer les derniers sacrements. Plus tard,
il baptisera le grand chef iroquois, Garagonthié.
A peine débarqué à Québec, l'évêque constate les effets désastreux de
l'eau-de-vie que les Amérindiens consomment abondamment. Ces boissons
alcoolisées sont importées de France et échangées contre des fourrures. Mgr de
Laval s'interpose: les marchands sont furieux et montent le peuple contre
l'évêque. Ne pouvant ralentir ou faire cesser ce commerce dont il résulte des
bagarres, voire des meurtres, la division dans les familles, Mgr de Laval
frappe un grand coup: il excommunie les chrétiens qui continueront ce commerce.
Il aura à affronter la colère de notables et même de certains gouverneurs.
Marie de l'Incarnation écrit à son fils Dom Claude Martin, bénédictin,
"Mgr notre prélat est très zélé pour ce qu'il croit devoir augmenter la
gloire de Dieu. Il a pensé mourir de douleur à ce sujet, et on le voit sécher
sur pied."
Cette lutte contre la vente de l'eau-de-vie durera vingt ans! Enfin, en 1679,
Mgr de Laval obtient du roi Louis XIV l'interdiction de la vente des boissons
aux Indiens. Une longue bataille épuisante vient de finir... pour un temps!
A Québec, il fait très froid durant l'hiver. De gros poêles sont installés au
milieu des églises, dont plusieurs passent au feu! Deux fois, la nouvelle
basilique de Québec brûlera... mais l'évêque courageux la reconstruit, aidé par
les "corvées" des habitants.
- Le Père de la Patrie.
Mgr de Laval travaille avant tout à l'organisation de la vie religieuse et à la
construction d'écoles. Son immense diocèse s'étend de Québec à l'Acadie et
jusqu'à la Louisiane alors française. Il entreprend de nombreuses visites
harassantes, car il tient à fonder l'Église canadienne sur la force et l'unité
de la vie paroissiale, scolaire et familiale. Son séminaire de Québec a formé,
le premier, nos écrivains, penseurs, chefs politiques et religieux qui
lutteront pour les droits de la patrie après la conquête anglaise. Après 1760,
les paroisses sont restées debout, groupées "serré" autour de leur
pasteur , comme le leur avait appris l'évêque de Québec. Il a bien mérité son
titre de "Père de la Patrie".
- Un mystique au cœur missionnaire.
Le frère Houssart, à la mort de Mgr de Laval le 6 mars 1708, révéla la haute
valeur spirituelle et mystique de celui qu'il servait, en publiant un mémoire.
Durant les dernières années de sa vie, l'évêque de Québec était devenu un grand
handicapé physique, suite surtout à ses tournées missionnaires: "On l'a vu
faire de longs pèlerinages à pied, sans argent, mendiant son pain et cachant
son nom. Il voulait imiter les premiers apôtres de l'Église primitive, et
remerciait Dieu d'avoir quelque chose à souffrir pour son amour." Le
vaillant évêque, en hiver comme en été, parcourt sans relâche son immense vicariat.
Sur le fleuve Saint-Laurent, monté dans un frêle canot, il rame lui-même; en
hiver, sa "chapelle" sur le dos, il s'aventure en raquettes jusqu'à
Montréal, souvent surpris par les vents et la neige.
Il visite les malades de l'Hôtel-Dieu de Québec et les soigne, les encourage et
les assiste à leur mort. Ce descendant du premier baron de France se rend seul
à la basilique tous les matins à 4 h. Comme un sacristain, il ouvre les portes,
sonne la cloche, et prépare l'autel pour y célébrer la messe dès 4 h 30. On a
dit qu'il célébrait sa messe comme un ange! Et dans sa pauvre chambre du
Séminaire, il couche sur des planches, remettant sous son lit la paillasse que
le frère Houssart lui a prêtée.
- Un grand saint.
A sa mort, Mgr de Laval n'avait plus rien: il avait donné toutes ses
possessions aux pauvres. La pape Jean-Paul II l'a béatifié en 1980, à la suite
de l'important dossier de miracles et faveurs obtenus en le priant. L'évêque de
la Nouvelle-France fut un grand saint que l'on peut encore prier, en ces temps
où "sa patrie" est encore en danger.
Le Supérieur général de la Société de prêtres du Séminaire de Québec fondée en
1663 par le Bienheureux François de Laval, nous indique le site internet
sur le bienheureux, https://www.francoisdelaval.org
- Instruction pour la mission par le Bienheureux François de Laval. Cette
instruction mérite d'être reprise car le style en est alerte et elle reste
d'une surprenante actualité. (Diocèse
de Belley-Ars)
- François de Laval (1623-1708), premier évêque de Québec, béatifié le 22 juin
1980. Un évêque d'évangélisation. (diocèse
d'Edmundston)
- Premier
évêque et fondateur de l'Église de Québec, François de Laval voue sa
vie à l'imitation du Christ. La miséricorde est centrale à sa mission.
Dans la ville de Québec au Canada, en 1708, le bienheureux François de
Montmorency-Laval, évêque, qui établit là son siège épiscopal et, durant près
de cinquante ans, mit tout son cœur à confirmer et développer l'Église dans une
région d'Amérique du Nord qui s'étendait jusqu'au golfe du Mexique.
Martyrologe romain
Dans une lettre qu'il adressait en 1668 à des
missionnaires sulpiciens, il donne les conseils suivants:
"Qu'ils tâchent d'éviter deux extrémités qui sont
à craindre en ceux qui s'appliquent à la conversion des âmes: de trop espérer
ou de trop désespérer. Ceux qui espèrent trop sont souvent les premiers à
désespérer de tout à la vue des grandes difficultés qui se trouvent dans
l'entreprise de la conversion des infidèles, qui est plutôt l'ouvrage de Dieu
que de l'industrie des hommes. Qu'ils se souviennent que la semence de la
parole de Dieu porte son fruit dans la patience..."
SOURCE : https://nominis.cef.fr/contenus/saint/9968/Saint-Francois-de-Laval.html
La mission aux païens
Les talents qui font les bons missionnaires
sont :
– Être rempli de l’esprit de Dieu. Cet esprit doit
animer nos paroles et nos cœurs, la bouche parlant de l’abondance du cœur.
– Avoir une grande prudence pour le choix et l’ordre
des choses qu’il faut faire, soit pour éclairer l’entendement, soit pour
fléchir la volonté ; tout ce qui ne porte point là est paroles perdues.
– Avoir une grande application pour ne pas perdre les
moments de salut des âmes et suppléer à la négligence qui souvent se glisse
dans les catéchumènes ; car, comme le diable de son côté rôde
comme un lion rugissant, cherchant qui dévorer (1 P 5, 8), ainsi faut-il
que nous soyons vigilants contre ses efforts, avec soin, douceur et amour.
– N’avoir rien dans notre vie et dans nos mœurs qui
paraisse démentir ce que nous disons ou qui mette de l’indisposition dans les
esprits et dans les cœurs de ceux qu’on veut gagner à Dieu.
– Il faut se faire aimer par sa douceur, sa patience
et sa charité et se gagner les esprits et les cœurs pour les gagner à
Dieu ; souvent une parole d’aigreur, une impatience, un visage rebutant
détruiront en un moment ce que l’on avait fait en un long temps.
– L’esprit de Dieu demande un cœur paisible, recueilli
et non pas un cœur inquiet et dissipé. Il faut un visage joyeux et modeste, il
faut éviter les railleries et les rires déréglés et généralement tout ce qui
est contraire à une sainte et joyeuse modestie. Que la vôtre soit reconnue par
tous les hommes.
St François de Montmorency-Laval
Saint François de Montmorency-Laval († 1708), premier
évêque de Québec, est l’un des fondateurs de l’Église du Canada, en même temps
que sainte Marie de l’Incarnation et que les saints martyrs jésuites de
Nouvelle-France. / Cité in Congrégation des rites, Positio, Rome, Polyglottis
Vaticanis, 1956, p. 212-216.
SOURCE : https://fr.aleteia.org/daily-prayer/mardi-27-avril/meditation-de-ce-jour-1/
LAVAL, FRANÇOIS
DE, évêque in partibus de Pétrée, vicaire
apostolique en Nouvelle-France (1658–1674), premier évêque de Québec
(1674–1688), né à Montigny-sur-Avre (Eure-et-Loir), dans le diocèse de Chartres
(France), le 30 avril 1623, baptisé sous les prénoms de François-Xavier,
fils de Hugues de Laval, seigneur de Montigny, Montbaudry, Alaincourt et
Revercourt, et de Michelle de Péricard, décédé à Québec le
6 mai 1708, inhumé le 9 dans la cathédrale de cette ville.
François de Laval était issu de la branche cadette d’une des
plus nobles familles de France, les Montmorency, dont l’origine remonterait à
la Gaule païenne. Un Montmorency aurait été, en effet, le premier des grands du
royaume de France à recevoir, avec Clovis, le baptême des mains de saint Remi,
à Reims, en 496. Le cri de guerre Dieu ayde au premier baron
chrestien, qui fut aussi la devise de cette lignée et que l’on retrouve
dans les armoiries de Mgr de Laval, perpétuait le souvenir de ce glorieux
événement. Le titre de Premiers barons de France,
également porté par les Montmorency, n’était pas moins mérité : à l’Église
et au Royaume, cette famille donna plusieurs cardinaux, six connétables, douze
maréchaux, quatre amiraux, un grand nombre de généraux et d’officiers civils et
militaires. Au xiiie siècle, Mathieu de Montmorency, dit le Grand, connétable de
France, épousa en secondes noces Emme de Laval, elle-même de haute noblesse.
Guy, né de cette union, prit le nom de sa mère ; c’est de lui que
descendait François de Laval.
Par
sa mère, Michelle de Péricard, fille du seigneur de Saint-Étienne, en
Normandie, François de Laval appartenait à une famille de robe, qui avait
fourni plusieurs officiers royaux au parlement de Rouen et de nombreux prélats
à l’Église. Le siège épiscopal d’Évreux, justement, était occupé vers
cette époque par un frère de Mme de Laval, François de Péricard, qui allait
jouer un rôle important dans la vie du jeune François.
Le seigneur
de Montigny et son épouse, tous deux d’une piété et d’une vertu éprouvées, ne
possédaient point, malgré leur noblesse, de grandes richesses : le fief de
Montigny, le plus important des quatre qu’ils détenaient, n’était à vrai dire
qu’un gros bourg. La situation financière de la famille allait bientôt
devenir assez précaire, et François allait devoir se consacrer un jour à son
rétablissement.
Hugues
de Laval et sa femme eurent six fils et deux filles, dont une, Isabelle (fille
posthume), mourut à l’âge de sept mois. Henri, cinquième fils, entra chez les
Bénédictins et devint prieur de La Croix-Saint-Lauffroy ; Anne-Charlotte
prit le voile chez les Filles du Saint-Sacrement, dont elle fut la supérieure.
Destiné par sa famille à l’état ecclésiastique, auquel lui-même aspirait,
François fut tonsuré et prit la soutane à l’âge de huit ans et demi, selon les
usages de l’époque, peu après son entrée au collège des Jésuites de
La Flèche, que fréquentaient les fils des meilleures familles de France.
François allait passer dix ans (1631–1641) dans cette célèbre institution, y
poursuivant avec grand succès ses études littéraires et philosophiques. En
1637, son oncle, François de Péricard, évêque d’Évreux, le nomma chanoine de la
cathédrale de son diocèse. Ce bénéfice, bien que peu considérable – il fut
augmenté en 1639 –, arrivait à point. Ajouté aux maigres
ressources familiales, il permit à François de continuer ses études, menacées
un moment par la mort de son père survenue le 11 septembre 1636.
Pour
François de Laval, les années vécues à La Flèche furent en quelque sorte
décisives. Sous la direction éclairée des Jésuites, il progressa rapidement
dans la voie de la piété et de la vertu, méritant bientôt d’être admis dans la
Congrégation de la sainte Vierge, alors dirigée par le père Jean Bagot. De
cette époque date sa détermination de se consacrer à Dieu dans le sacerdoce, de
même que son intérêt pour les missions du Canada, fort à l’honneur en ce
collège où résidèrent quelques-uns des plus grands apôtres de l’Amérique
française. En contact constant avec les fils de saint Ignace, François apprit à
les connaître, s’imprégna de leur spiritualité et s’attacha très sincèrement à
eux : « Dieu seul, écrivait-il en 1659, sait combien j’ai
d’obligation à votre Compagnie [la Compagnie de Jésus], qui m’a réchauffé dans
son sein lorsque j’étais enfant, qui m’a nourri de sa doctrine salutaire dans
ma jeunesse, et qui depuis lors n’a cessé de m’encourager et de me diriger
[...]. [Les Jésuites] m’ont appris à aimer Dieu et ont été mes guides dans la
voie du salut et des vertus chrétiennes... »
En 1641, François s’installa à Paris, au collège de Clermont,
également dirigé par les Jésuites, pour y faire sa théologie. Il marchait
allégrement vers le sacerdoce quand, coup sur coup, deux événements tragiques
le frappèrent cruellement : à Fribourg en 1644 et à Nordlingen en 1645,
tombèrent ses deux frères aînés, François et Gabriel, engagés l’un dans l’armée
de Condé, l’autre dans celle de Turenne. Héritier du patrimoine et des
obligations familiales, François prit le nom d’abbé de Montigny. Sa mère,
puissamment secondée par l’évêque d’Évreux, le supplia de quitter l’état
ecclésiastique, de se marier et de soutenir l’honneur de sa maison.
Inébranlable, François décida toutefois de suspendre momentanément ses études.
Il retourna à Montigny, mit bon ordre aux affaires de la famille, et, avec
l’encouragement cette fois de l’évêque d’Évreux, rentra bientôt au collège de
Clermont. Sous-diacre en 1646, diacre l’année suivante, il fut ordonné le 1er mai 1647.
Prêtre
à 24 ans, François était bien préparé pour un ministère qui, des témoignages
les plus autorisés, se révéla très fructueux. À Paris, il avait retrouvé le
père Bagot et plusieurs de ses compagnons de la Congrégation de La Flèche.
Regroupés dans la société des Bons Amis, ils poursuivirent ensemble l’œuvre de
leur perfectionnement spirituel. François s’y distingua par sa piété, son zèle
et sa vertu. Dans l’année qui suivit son ordination, il se consacra au soin des
malades, à l’instruction des enfants délaissés et à l’administration de son
patrimoine. En 1648, il se démit de son canonicat – tout honorifique –
d’Evreux. Peu après, en décembre, il était nommé archidiacre du même diocèse,
qui comptait alors 155 paroisses et 4 dessertes. La tâche était lourde.
Mais « l’exactitude de ses visites, écrivait M. de La Colombière,
la ferveur avec laquelle il s’y comporta, la réforme et le bon ordre qu’il
établit dans les paroisses, le soulagement des pauvres, son application à
toutes sortes de biens, tout cela fit bien voir que, sans être évêque, il en
avait l’esprit et le mérite et qu’il n’y avait pas de services que l’Église ne
dût attendre d’un si grand sujet. » En 1649, il avait obtenu une licence
en droit canon de l’université de Paris, requise pour l’exercice de ses
fonctions d’archidiacre.
Depuis
1642 au moins, François de Laval rêvait en secret d’être missionnaire. Les Bons
Amis, avec lesquels il resta en contact étroit pendant les années de son
archidiaconat, partageaient ses aspirations. (Cette société, du reste, fut le
berceau du séminaire des Missions étrangères de Paris.) Or, en 1652, le jésuite
Alexandre de Rhodes cherchait, avec l’autorisation du pape, des candidats qui
accepteraient d’être nommés vicaires apostoliques au Tonkin et en Cochinchine.
Après consultation avec le père Bagot et les Bons Amis, il choisit
MM. François Pallu, Bernard Picques et François de Laval, que Rome et la
cour agréèrent. François de Laval était destiné au Tonkin. Mais l’affaire
traîna bientôt en longueur : la Propagande, qui désapprouvait la trop grande
indépendance des Jésuites dans les pays de mission, craignait que les candidats
proposés ne leur fussent trop attachés, d’autant qu’ils s’étaient déclarés
prêts à entrer dans la Compagnie de Jésus, et le Portugal s’opposait fermement
à l’envoi d’évêques français en Extrême-Orient. Le projet fut abandonné en
1654. Quelle que dût être son activité future, François de Laval décida de s’y
préparer désormais dans la prière et la retraite. En 1654, sans même en retenir
la pension à laquelle il avait droit, il se démit en faveur de son ami
Henri-Marie Boudon de l’archidiaconat d’Évreux – qui eût pu le mener à
l’épiscopat – et céda à son frère puîné, Jean-Louis, son patrimoine et ses
droits d’aînesse. (Hugues, le plus jeune de ses frères, était décédé en 1642,
âgé d’une douzaine d’années.) Rompus ces derniers liens avec le monde, il prit
la route de Caen.
François
alla frapper à la porte de l’Ermitage, dirigé par M. Jean de Bernières de
Louvigny. Un des grands mystiques de son temps, M. de Bernières, quoique
laïc, avait été choisi pour maître et directeur spirituel par quelques-uns des
plus pieux et des plus vertueux personnages de France. L’Ermitage abritait
depuis 1649 une petite communauté de prêtres et de laïcs, adonnés à l’oraison
et aux exercices de charité, et menant une vie fort réglée et austère.
« Intime ami » de M. de Bernières, François de Laval mit en
pratique ses admirables maximes ; joignant à la prière et à l’oraison les
œuvres de charité, il s’occupa, comme il l’avait fait à Paris, des pauvres et
des malades, dans la grande tradition de Vincent de Paul. Dans le même temps,
il réforma un monastère tombé dans le relâchement et fit éclater jusqu’à la
cour le bon droit d’une communauté d’hospitalières menacée de spoliation.
Administrateur et confesseur, au surplus, de deux communautés de femmes, il
mérita de Mgr Servien, en 1657, un éloge sans équivoque (fait sous la foi du
serment) : prêtre « d’une très grande piété », « très
prudent et supérieur en affaires », qui a donné, dans le diocèse de
Bayeux, de « grands exemples » de vertu.
Mais
voici que, de nouveau, on s’employait à doter la Nouvelle-France d’un évêché.
Le mouvement avait pris naissance parmi les Associés de Montréal, en 1645,
mais avait rencontré par la suite beaucoup d’obstacles. En janvier 1657, les
Associés proposaient un candidat, le sulpicien Gabriel de Thubières* de Levy de Queylus. Agréé par
l’Assemblée du clergé de France, l’abbé de Queylus ne le fut pas par les
Jésuites. Ces derniers, ayant décliné l’invitation de la reine mère Anne
d’Autriche de faire nommer un des leurs au siège épiscopal de Québec, soumirent
le nom de leur ancien élève, François de Laval. La reine mère et la cour,
désireuses que le nouvel évêque vécût en bons termes avec les Jésuites
canadiens, approuvèrent ce choix. François de Laval fut prévenu, à l’Ermitage,
des projets qu’on avait formés pour lui. Il ne pouvait, toutefois, prévoir les
difficultés dont sa route allait être jalonnée désormais.
Le choix
de François de Laval et les circonstances de sa nomination au siège épiscopal
de la Nouvelle-France allaient en effet réveiller et faire éclater au grand
jour le conflit latent qui se développait dans cette colonie, dont Rome et
l’archevêque de Rouen se disputaient discrètement, mais avec beaucoup de
détermination et de ténacité, la juridiction ecclésiastique.
Depuis
le xvie
siècle, le pape avait perdu toute autorité directe sur les missions : il
lui fallait passer par les rois, qui avaient le droit de patronage, par les
évêques, qui poussaient leur influence en dehors des limites de leurs diocèses,
et par les supérieurs généraux des grands ordres missionnaires, qui avaient
acquis une large autonomie. Le général des Jésuites, par exemple, et ses
provinciaux de France pouvaient fonder des missions sans même consulter le
Saint-Siège. Ainsi, à leur arrivée au Canada en 1625, et à leur retour en 1632,
les Jésuites détenaient leurs pouvoirs de Rome, mais par l’intermédiaire de
leur général. Pourtant, dans le but de centraliser l’administration de toutes
les missions et de les placer sous l’autorité immédiate du Saint-Siège, le pape
avait créé en 1622 la Sacrée Congrégation de la Propagande. Celle-ci. avait dès
lors entrepris, avec beaucoup de prudence et de diplomatie, mais avec assez peu
de succès, de réduire l’indépendance quasi totale des Jésuites en pays de
mission.
Au Canada, cependant, les missionnaires de la Compagnie de
Jésus allaient perdre peu à peu leur tranquille assurance des débuts. L’arrivée
des Ursulines et des Hospitalières en 1639 – de ces dernières en
particulier à qui l’archevêque de Rouen avait fait promettre de reconnaître sa
juridiction sur leur communauté –, contribua singulièrement à inquiéter
les Jésuites sur la validité des professions religieuses auxquelles ils
pourraient être appelés à présider et des mariages entre colons qu’ils
bénissaient en se fondant exclusivement sur leurs facultés missionnaires. Leur
juridiction s’étendait-elle au-delà du ministère proprement missionnaire auprès
des Indiens ? Ils en étaient de moins en moins certains. Demander à la
Propagande des pouvoirs plus étendus, c’était se mettre dans sa complète
dépendance et déroger, au surplus, à la politique traditionnelle de la
compagnie que défendait farouchement leur général, à Rome. Par ailleurs,
l’archevêque de Rouen, qui
ne doutait pas du bien-fondé de sa juridiction sur la Nouvelle-France, imposait
graduellement, mais d’une façon irréversible, son autorité épiscopale à la
jeune colonie.
Deux
événements allaient faire pencher les Jésuites canadiens du côté de Rouen. En
1645 et 1646, d’une part, les Associés de Montréal travaillaient à
l’érection d’un évêché au Canada, et proposaient un candidat de leur choix,
l’abbé Thomas Le Gauffre ; s’ils réussissaient, c’en était fait de
l’autonomie des Jésuites en Nouvelle-France. Le nouveau général des
Jésuites, d’autre part, s’était rendu aux pressions de la Propagande, en 1646,
et lui avait rétrocédé, en fait, la plupart de ses pouvoirs en matière de
missions. Dans cette conjoncture, les Jésuites canadiens hésitèrent,
consultèrent discrètement et, finalement, en 1648, acceptèrent la juridiction
de la Propagande en lui demandant de nouveaux pouvoirs, mais sollicitèrent en
même temps, et acceptèrent en 1649, des lettres de grand vicaire de
l’archevêque de Rouen pour leur supérieur de Québec. Cette dernière
démarche – sur laquelle leur général lui-même ne fut pas consulté –
fut tenue secrète jusqu’en 1653, au point que Marie de l’Incarnation [Guyart*],
si proche des Jésuites pourtant, n’en soupçonnait rien. Les pouvoirs de grand
vicaire étaient plus étendus que ceux conférés par la Propagande, et
rassuraient davantage les Jésuites sur la validité des professions religieuses
et des mariages. Aussi, en 1653, rendirent-ils publique leur dépendance de
Rouen, et cessèrent-ils de correspondre avec la Propagande après cette date.
Des deux options qui s’offraient à eux, ils avaient choisi la moins
restrictive : la formule rouennaise leur laissait plus d’autorité et
d’autonomie que ne l’eût fait la romaine.
En
refusant le candidat de l’Assemblée du clergé de France, en janvier 1657, ce
n’est pas la personne même de l’abbé de Queylus que repoussaient les Jésuites,
mais la menace qu’il représentait pour l’indépendance de l’Église canadienne,
qu’ils entendaient restaurer et assurer définitivement. En secret, ils
proposèrent à la cour un candidat de leur choix, François de Laval. Ils
voulaient faire de lui l’évêque en titre de Québec. Pendant 18 mois, ils
poussèrent cette affaire à Paris et à Rome, sans que l’archevêque de Rouen,
François de Harlay de Champvallon, en eût rien soupçonné, semble-t-il. C’est
qu’ils se promettaient, une fois leur candidat nommé et sacré, de détacher
entièrement l’Église canadienne de l’archevêché de Rouen. Dans leur esprit,
l’évêque de Québec devait dépendre directement du pape. Bien sûr, Harlay n’eût
pas été de cet avis...
En
janvier 1657, Louis XIV écrivit donc au pape, lui présentant son candidat
à l’évêché de Québec, le père François de Laval. Rome voulut
d’abord savoir à quelle communauté appartenait ce père.
Première cause de retard ; puis on oublia de transmettre les informations
canoniques. Le temps passait. Les Jésuites faisaient pression surpression,
appuyés par la cour de France. Des mois s’écoulèrent. Tout le monde
s’impatientait ; on multipliait les mémoires, on sollicitait le concours
des cardinaux romains, mais en vain. Seul François de Laval restait muet et
comme indifférent, à la surprise de ceux qui supportaient le plus sa
candidature. Cette nomination, il ne l’avait point recherchée ; se
rappelant peut-être l’affaire du Tonkin, il attendait, à l’Ermitage, et sans
rien faire pour l’influencer, la décision de Rome, qui serait l’expression de
la volonté de Dieu sur lui.
Le retard
de Rome à prendre une décision venait à vrai dire de la Propagande. On y
craignait encore une fois que, par le moyen de François de Laval, qui leur
était très lié depuis son enfance, les Jésuites ne perpétuent leur indépendance
de cette congrégation romaine au Canada. Il ne pouvait être question d’y nommer
un évêque en titre. Aussi souleva-t-on de multiples difficultés, pour enfin
proposer à la cour de France la création d’un vicariat apostolique en
Nouvelle-France plutôt que d’un évêché. La cour obtint sur cette question
l’assentiment des Jésuites et de M. de Laval lui-même. (On a prétendu, à
tort, que les Jésuites avaient eux-mêmes suggéré cet expédient.)
La nomination d’un simple vicaire apostolique mettrait l’Église et la
mission du Canada – Jésuites inclus – dans la dépendance directe de
la Propagande et partant du Saint-Siège ; pour Mgr de Laval et les
Jésuites, elle aurait l’avantage de les soustraire, en théorie tout au moins, à
la juridiction de l’archevêque de Rouen qui le céderait à celle, plus
universelle, du pape.
Les bulles de vicaire apostolique en faveur de François de
Laval furent signées à Rome le 3 juin 1658. Pour sa consécration, Mgr de Laval
choisit le 4 octobre, fête de saint François d’Assise.
L’archevêque de Rouen, qui se considérait l’évêque légitime
du Canada, où il avait depuis dix ans un grand vicaire, ignorait tout,
semble-t-il, des démarches entreprises pour doter cette partie de son diocèse
d’un siège épiscopal. Ardent gallican au surplus, il reçut fort mal la nouvelle
de l’expédition de ses bulles à François de Laval. D’autant que la
dignité – nouvelle dans l’Église – de vicaire apostolique, le plus
souvent obtenue par surprise et sous de fausses représentations, avait fait
l’objet de sérieuses délibérations à l’assemblée du clergé de France, qui
recommanda finalement aux évêques de refuser la consécration à ces prélats
s’ils se présentaient à eux. Le 25 septembre 1658, à Paris,
devant une assemblée particulière du clergé, Harlay souleva la question des
bulles expédiées à François de Laval, et obtint qu’une circulaire fût adressée
aux évêques, les incitant à lui refuser la consécration, conformément aux
recommandations de l’assemblée plénière et à cause du préjudice que cette
intervention romaine causait à l’Église gallicane. Les trois évêques qui
avaient déjà promis leur concours à François de Laval se désistèrent aussitôt.
Outre
l’appui de l’Église de France, Harlay chercha celui des parlements, défenseurs
jaloux et pointilleux des « libertez », droits, privilèges et
immunités de l’Église gallicane. Lui-même siégeait au parlement de Rouen. Il en
obtint, le 3 octobre 1658, veille du jour fixé pour la consécration
de Mgr de Laval, un arrêt interdisant à ce dernier de « s’ingérer dans les
fonctions de vicaire apostolique au Canada » et déclarant qu’en cette
affaire la bonne foi du pape avait manifestement été surprise.
Silencieux
jusque-là, François de Laval le resta cette fois encore ; ses alliés, les
Jésuites et le nonce du pape à Paris, Mgr Piccolomini, tournèrent cependant la
difficulté. Rome avait le droit de nommer des vicaires apostoliques dans les
pays de mission ; les prétentions de l’archevêque de Rouen n’étaient pas
fondées en droit ni reconnues par Rome ; la reine mère, enfin, et le jeune
roi étaient favorables à leur candidat ; ils décidèrent donc de procéder
en secret à la consécration de Mgr de Laval, dans une église exempte de la
juridiction ecclésiastique du royaume. Le 8 décembre 1658, dans
la chapelle de la Vierge (aujourd’hui disparue) de l’abbaye de
Saint-Germain-des-Prés, le nonce imposa les mains à François de Laval, alors
âgé de 35 ans.
La réaction
gallicane ne se fit pas attendre, dès la nouvelle de la consécration.
L’archevêque de Paris, froissé qu’on eût consacré François de Laval dans son
diocèse sans sa permission, et l’archevêque de Rouen, à qui Mazarin refusa,
pour des raisons qui n’avaient rien à voir avec cette affaire, de convoquer
l’assemblée du clergé de France, se rabattirent sur le parlement de Paris.
Entrant dans leurs vues et jugeant qu’il y avait atteinte aux droits de
l’épiscopat et aux libertés de l’Église gallicane, le parlement rendit, le
16 décembre, un arrêt obligeant François de Laval a communiquer ses bulles
à la cour et lui interdisant de s’en autoriser avant d’avoir reçu les lettres
patentes nécessaires en pareille occurrence. Cet arrêt fut signifié à Mgr de
Laval le 19. Le 23, le parlement de Rouen, à son tour, renouvelait son
arrêt du 3 octobre, défendait à tout sujet du roi de reconnaître
M. de Laval comme vicaire apostolique, et enjoignait à tous les officiers
du royaume de s’opposer à son entreprise et d’empêcher qu’il n’exerçât aucune
fonction. Mgr de Laval, cette fois encore, resta silencieux : il voyait bien
que, dans toute cette affaire, il n’était que le prétexte ou l’occasion d’une
bataille depuis longtemps prévue, et que d’autres livraient sur son dos.
Après avoir en vain menacé de sanctions l’archevêque de
Rouen, Rome conseilla à Mgr Piccolomini, en décembre 1658 et en janvier 1659,
de s’appuyer désormais sur « Leurs Majestés », Anne d’Autriche et le
jeune Louis XIV. C’était la seule issue, la reine mère ayant dès le
début favorisé le plan des Jésuites. Mgr de Harlay, cette fois, se sentit menacé.
Le 3 mars 1659, il suggéra à Mazarin un compromis, dont il fut
tenu compte dans les lettres patentes du 27 mars, demandées par Anne
d’Autriche pour casser l’arrêt du parlement. Ces lettres ordonnaient que Mgr de
Laval fût reconnu « pour faire les fonctions épiscopales, sans
préjudice des droits de la jurisdiction ordinaire, et cela, en attendant
l’érection d’un évêché dont le titulaire sera suffragant de l’archevêque de Rouen ». C’était aller entièrement à l’encontre
du plan des Jésuites et de la Propagande. La reine mère, présente au
Conseil du roi, pouvait-elle l’ignorer ? Elle se reprit le 30 mars,
peut-être à la suggestion du nonce. Elle écrivit une lettre à
M. d’Argenson [Voyer],
gouverneur de la Nouvelle-France, lui enjoignant de faire
reconnaître Mgr de Laval en qualité de vicaire apostolique et de « tenir
la main à ce qu’il soit obéi dans toutes les fonctions épiscopales », et
même d’ « empêcher qu’aucun ecclésiastique ou autre n’en puisse exercer ni
avoir aucune jurisdiction ecclésiastique que par les ordres ou
consentement » de Mgr de Laval. Ainsi se trouvait éliminée du Canada, en
théorie tout au moins, l’autorité de l’archevêque de Rouen.
Mgr
de Laval prêta le serment de fidélité au roi, et s’embarqua à La Rochelle
le 13 avril 1659. Il n’avait ni recherché ni repoussé la dignité
épiscopale ; les pires tempêtes avaient soufflé autour de lui sans qu’il
intervînt en quoi que ce fût pour les apaiser, abandonnant entièrement à Dieu
le soin d’orienter sa vie. Une chose était certaine, désormais : Dieu le
voulait en Nouvelle-France. Il y voguait, avec pour seul revenu une rente de
1 000# dont l’avait avantagé la régente.
Dans
le détachement et la pauvreté, commençait une grande et pénible aventure :
l’édification d’une Église canadienne.
Le Canada
de 1659 était, à vrai dire, bien peu de chose. La population française n’y
atteignait pas 2 000 âmes, partagées entre trois centres de peuplement,
sur une distance de plus de 60 lieues. La région de Québec, formée de la
ville proprement dite et des seigneuries de Beauport, Beaupré,
Notre-Dame-des-Anges et Lauson, présentait la plus forte concentration de
population, avec près de 1 200 habitants ; quelques centaines de
colons étaient établis à Trois-Rivières ou dans les seigneuries voisines du
Cap-de-la-Madeleine, de Sainte-Anne et de Champlain, qui commençaient à peine à
se développer ; aux avant-postes, l’île de Montréal était le dernier
centre habité.
La faiblesse
numérique de sa population manifeste le peu de progrès de la colonie depuis sa
fondation par Champlain*
en 1608. Les compagnies à monopole, sur lesquelles l’État se
déchargea entièrement des destinées de la Nouvelle-France, négligèrent tout à
fait de satisfaire à leurs obligations, à l’exception de la Compagnie des Cent
Associés (1627), qui connut cependant un début désastreux dont elle ne se
releva jamais. À partir de 1645, la Communauté des Habitants assuma les charges
du pays, mais ne fit guère mieux, par suite de la guerre iroquoise qui
paralysait presque complètement la traite des fourrures. Une population
insuffisante, des institutions administratives demeurées embryonnaires, les
attaques répétées des Iroquois, une crise économique sans issue, autant de
facteurs qui, même aux plus optimistes, faisaient craindre pour l’avenir de la
colonie.
Colonie
française, la Nouvelle-France était en même temps pays de mission. Les
Récollets, les premiers, y étaient débarqués en 1615 ; les Jésuites les
avaient rejoints dix ans plus tard. Après le traité de Saint-Germain-en-Laye
(1632), les Jésuites revinrent seuls en Nouvelle-France. Ils y représentaient
désormais l’Église, leur supérieur y étant la plus haute autorité ecclésiastique.
Les missions progressèrent d’une façon remarquable : en quelques années,
elles s’étendirent à l’Acadie, au lac Saint-Jean, aux Grands Lacs, à
l’Iroquoisie. Parallèlement, les Jésuites assuraient le ministère aux Français.
La mission allait beaucoup mieux que la colonie.
Les
Jésuites tentèrent en outre de suppléer aux faiblesses des Cent Associés et des
Habitants. Dans leurs Relations annuelles, ils se firent les
propagandistes de la mission, mais aussi de la colonie, empêchant que le Canada
ne tombât dans l’oubli. Ils attirèrent des colons, les établirent dans leurs
seigneuries. Ils intéressèrent des personnes riches et puissantes à la
Nouvelle-France, et la dotèrent ainsi d’un collège (1635), d’un séminaire pour
jeunes filles (1639) et d’un hôpital (1639). Missionnaires, curés, professeurs,
propagandistes, colonisateurs, explorateurs, interprètes, ambassadeurs à
l’occasion, les Jésuites – dont le supérieur était au surplus membre
d’office du conseil – étaient partout, engagés dans les affaires civiles tout
autant que dans les matières proprement religieuses. La mission soutenait
la colonie ; l’inverse eût été plus normal.
Le vicaire
apostolique, arrivé à Québec le 16 juin 1659, débarqué le lendemain,
se mit à l’œuvre sans tarder. Il pouvait compter sur un effectif ecclésiastique
fort réduit : 17 jésuites, 4 sulpiciens et 6 séculiers, dont un n’était
que tonsuré. Aux Jésuites, il laissa les missions indiennes ; aux
Sulpiciens, le soin de la paroisse de Montréal où ils étaient installés depuis 1657,
les séculiers, pour leur part, se chargeraient du ministère paroissial dans la
région de Québec, Trois-Rivières demeurant provisoirement sous la conduite
spirituelle des Jésuites. Le siège épiscopal serait à Québec.
La première
préoccupation de Mgr de Laval fut de faire reconnaître son autorité. Il était
hanté par l’idée qu’il pût rencontrer dans la colonie l’opposition qu’il avait
connue en France ; bien au courant des agissements de l’abbé de Queylus,
qui fut un temps grand vicaire de l’archevêque de Rouen au Canada, il craignait
en particulier quelque entreprise des Sulpiciens de Montréal sur son autorité.
En quoi il ne se trompait point. Nous avons raconté, dans la biographie de
l’abbé de Queylus, les péripéties de ce long conflit de juridiction dont le
vicaire apostolique sortit vainqueur, avec l’appui de la Propagande. Or
l’arrivée d’une lettre de Louis XIV à M. d’Argenson, du
14 mai 1659, lui fournit une occasion inespérée. Le roi y
enjoignait au gouverneur de faire reconnaître partout l’autorité du vicaire apostolique,
et de ne permettre à aucun grand vicaire de l’archevêque de Rouen de
« s’ingérer à faire aucune fonction de juridiction ». Mgr de Laval la
fit publier et afficher d’un bout à l’autre du pays.
Vers
le même temps, le prélat établit une officialité, tribunal ecclésiastique qui
connaîtrait de tout conflit mettant en cause un membre du clergé séculier ou
régulier, et jugerait de toute matière tombant sous la juridiction épiscopale.
La hâte mise par le vicaire apostolique à créer ce tribunal – trois mois
après son arrivée – paraît assez surprenante, quand on pense, par exemple,
que pas une seule paroisse n’était érigée canoniquement. Mgr de Laval s’armait
contre les opposants éventuels. Dans le contexte gallican, cependant, cette
mesure prenait l’allure d’une provocation à l’endroit du pouvoir civil.
De
« grandes brouilleries entre les puissances » survinrent bientôt,
dues à la présence de l’officialité, mais aussi à des querelles nombreuses de
préséance. Ces disputes peuvent, aujourd’hui, paraître futiles. Mais la société
française du xviie siècle avait une conception jalouse de l’honneur. Elle était
imbue de respect pour tout ce qui, de près ou de loin, appartenait ou touchait
au monarque. En cette société au surplus très hiérarchisée, tous les représentants
du roi, du gouverneur jusqu’au plus humble officier de justice, avaient à jouer
un rôle précis, auquel était attachée une certaine somme d’honneurs,
minutieusement évaluée et fixée définitivement. Des honneurs supplémentaires,
qu’ils fussent conférés par l’État ou par l’Église, étaient une récompense
enviable, et parfois tenaient lieu de salaire. Se défendait donc âprement qui
se croyait lésé en ce domaine.
Or,
depuis 25 ans, bien des façons de faire avaient été adoptées, en
Nouvelle-France, qui n’étaient pas toujours conformes aux coutumes observées
dans le royaume, ou qui s’expliquaient par l’absence d’un évêque. C’est ainsi
que le gouverneur avait son prie-Dieu à l’endroit le plus honorable dans le
chœur de l’église, qu’il assistait régulièrement aux délibérations de la
fabrique de Québec, à titre de marguillier honoraire. Mgr de Laval, soucieux de
réprimer les abus et de préserver sa jeune Église contre les interventions
inopportunes de l’État, décida de remettre les choses à leur place avant qu’il
ne fût trop tard. L’intention était louable. Mais peut-être, dans l’ardeur de
ses 36 ans et de son zèle un peu fougueux, n’usa-t-il pas suffisamment de tact
et de diplomatie, brusquant inutilement un gouverneur jaloux de ses privilèges
et mal disposé, au surplus, envers ce jeune prélat dont le premier geste avait
été de créer, en face de la justice civile, un tribunal ecclésiastique.
Le gouverneur s’entêta, ne voulut rien céder, non plus que l’évêque. De
mois en mois le conflit s’aggrava, sans cesse alimenté de nouveaux incidents,
le plus souvent provoqués par Mgr de Laval. « On pensa en venir aux
extrémités », note le supérieur des Jésuites, qui blâme discrètement
l’évêque.
À
l’origine de ces querelles, il y avait sans doute, chez Mgr de Laval, le désir
ardent de voir son autorité reconnue et son Eglise hors d’atteinte des
entreprises de l’État, pour qui – Louis XIV l’écrira en 1665 –
il était absolument nécessaire de « tenir dans une juste balance
l’autorité temporelle qui réside dans la personne du Roi et de ceux qui le
représentent, et la spirituelle qui réside en la personne du Sieur Évêque et
des Jésuites, de manière toutefois que celle-ci soit inférieure à l’autre. » Mais il y avait aussi, chez le gouverneur et chez
plusieurs colons, le refus de reconnaître au vicaire apostolique la même
autorité qu’à un évêque siégeant à la tête de son diocèse. Pour eux, l’évêque
de Pétrée ne pouvait être l’évêque de Québec. Au début, les communautés
religieuses elles-mêmes avaient hésité : fallait-il obéir à ce « commissaire
apostolique » venu au pays « sous le titre étranger d’évêque de
Pétrée », ou au grand vicaire de l’archevêque de Rouen ? Quand elles
passèrent enfin sous la houlette de Mgr de Laval, les religieuses
n’entraînèrent pas toute la population, loin de là. Montréal, en particulier,
restait plus ou moins hostile au vicaire apostolique.
Tous s’accordaient, cependant, sur les vertus personnelles de
Mgr de Laval. On louait sa piété profonde, sa charité, son humilité. « Il
vit saintement et en apôtre », écrit Marie de l’Incarnation. Comme
autrefois à Paris et à Caen, en dépit de ses origines illustres et de sa
dignité nouvelle, il exerçait les plus humbles ministères, soignant les
malades, faisant leurs lits, donnant l’extrême-onction aux Indiens. À l’automne
de 1659, par exemple, une épidémie survint, apportée par un navire : il
fut constamment à l’hôpital, malgré les tentatives faites pour l’en dissuader
et les dangers évidents d’être lui-même atteint. Ne ménageant point sa
personne, il était prodigue de ses biens quand il s’agissait d’aider les
pauvres. Lui qui n’avait que 1 000# de revenu assuré distribua en secret
des sommes énormes (10 000 écus en trois ans, au témoignage de Bertrand de
Latour*).
Il vivait pauvrement, du reste, retiré d’abord chez les Hospitalières, puis
chez les Ursulines, et enfin chez les Jésuites, avant d’acquérir en 1662 une
vieille maison où il réunit son petit clergé.
En
dépit de ses nombreuses difficultés, Mgr de Laval déploya une grande activité.
En 1660, il avait complété sa première visite pastorale, commencée à Gaspé, où
il s’était arrêté lors de sa traversée au Canada. Il avait conféré le sacrement
de confirmation à des centaines de Blancs et d’Indiens. Il s’était en outre
attaqué, dès les débuts, à la traite de l’eau-de-vie : ennemi des
demi-mesures et fort de l’appui de son clergé, consulté à trois reprises sur
cette question, il avait fulminé une excommunication contre les trafiquants
rebelles. Cette intervention énergique lui valut l’opposition déclarée des
commerçants et plus ou moins avouée du gouverneur. De quoi alimenter les
« brouilleries » déjà en cours. Voyant qu’il ne viendrait point à
bout de ce trafic sans l’aide puissante du roi, Mgr de Laval résolut, en 1662,
d’aller exposer à Louis XIV son point de vue sur le commerce des boissons,
de même que les besoins les plus urgents de son Église.
Il
reçut à la cour un accueil fort sympathique. Louis XIV combla tous ses
désirs : il promit d’interdire formellement la traite de l’eau-de-vie, et
de rappeler M. Davaugour [Dubois*], qui l’avait favorisée ; il invita même le prélat à
désigner le nouveau gouverneur, enfin, il nomma dès lors Mgr de Laval à
l’évêché de Québec (1662).
Il est raisonnable de croire que Louis XIV et Mgr de
Laval discutèrent longuement de la réorganisation de la Nouvelle-France, qu’on
placerait sous l’autorité directe du roi. Sans doute, le prélat fut-il également
consulté sur le projet de création d’un Conseil souverain (1663) dont il allait
être le second personnage, immédiatement après le gouverneur. L’abbé Bertrand
de Latour, le plus ancien biographe de Mgr de Laval, va même jusqu’à affirmer
que « le Conseil souverain du Canada fut l’ouvrage de son premier
évêque ». Quoi qu’il en fût, Mgr de Laval reçut du roi des pouvoirs
politiques qui le plaçaient, à certains égards, sur un pied d’égalité avec le
gouverneur : « conjointement et de concert » avec ce dernier, il
était chargé de nommer les conseillers et de concéder les seigneuries. Bien
plus, quand il revint en Nouvelle-France, en 1663, en compagnie du nouveau
gouverneur, M. de Mézy [Saffray*], et d’un commissaire royal, M. Gaudais-Dupont*,
c’est à lui que le roi avait confié le soin d’apporter au Canada l’édit de
création du Conseil souverain.
Ce
Louis XIV qui, en 1662 et 1663, s’emploie à édifier la puissance
politique de l’Église canadienne, est-il bien le même qui, à partir de 1665,
prendra ombrage de toute intervention réelle ou supposée de l’Église coloniale
dans les affaires civiles, et qui se préoccupera si fort de maintenir le clergé
dans la dépendance de l’État, de peur que l’évêque et les Jésuites n’
« establissent trop fortement leur authorité par la crainte des
excommunications et par une trop grande sévérité de vie qu’ils veulent maintenir » ?
Louis XIV n’alla-t-il pas jusqu’à porter de graves accusations, comme s’il
eût perdu le souvenir d’événements pourtant récents : « Pour s’y
maintenir [dans la colonie] ils [les Jésuites] ont esté bien aises de nommer le
Sieur Évesque de Petrée pour y faire les fonctions episcopales comme estant
dans leur entiere dépendance et mesme jusques icy où ils ont nommé les
Gouverneurs pour le Roy en ce pays là, où ils se sont servis de tous les moyens
possibles pour faire revoquer ceux qui avoient esté choisis pour cet employ
sans leur participation... » ? L’attitude du roi en
1662 et 1663 s’explique-t-elle par son ignorance de la situation
politico-religieuse anormale qui prévalait encore à ce moment au Canada ?
Ou bien faut-il attribuer ce changement radical à Colbert, ministre de la
Marine depuis peu et gallican convaincu ? Il reste que Louis XIV a
contribué fortement à dresser l’une contre l’autre, dans la colonie, l’Église
et l’État. Les querelles et les violences qui marquèrent le gouvernement de
M. de Mézy, relativement à la composition du conseil, furent préparées par
le roi lui-même. Louis XIV regretta un jour l’extrême libéralité des
débuts de son règne à l’endroit de l’Église canadienne. En 1677, Colbert
faisait écho à ce sentiment en écrivant : « Je vois que l’évêque de
Québec affecte une autorité un peu trop indépendante de l’autorité royale, et
que par cette raison il serait peut-être bon qu’il n’eût pas de séance dans le
Conseil [...] ».
Fort
de sa nomination au futur évêché de Québec et des connaissances qu’il avait
acquises sur la situation religieuse de la Nouvelle-France, Mgr de Laval
n’avait pas voulu quitter Paris sans jeter les fondements de son Église. Pour
assurer à la colonie les prêtres dont elle avait besoin, il conçut l’idée d’un séminaire,
qui devait être pendant des années le centre et l’âme de la vie religieuse
canadienne. Ce fut par une ordonnance émise à Paris le 26 mars 1663,
confirmée par le roi le mois suivant, que le vicaire apostolique établit le
séminaire de Québec.
Dans la pensée de Mgr de Laval, le séminaire de Québec était,
certes, un grand séminaire, « dans lequel on élèvera et formera les jeunes
clercs qui paraîtront propres au service de Dieu et auxquels, à cette fin, l’on
enseignera la manière de bien administrer les sacrements, la méthode de
catéchiser et de prêcher apostoliquement, la théologie morale, les cérémonies,
le plain-chant grégorien, et autres choses appartenant aux devoirs d’un bon
ecclésiastique. » Mais le séminaire de Mgr de Laval était beaucoup plus
que cela : « nous érigeons [...], déclarait le prélat, un séminaire
pour servir de clergé à cette nouvelle Église, [...] un lieu de réserve d’où
nous puissions tirer des sujets pieux et capables pour les envoyer à toutes
rencontres et au besoin dans les paroisses et autres lieux du dit pays, afin
d’y faire les fonctions curiales et autres auxquelles ils auront été destinés,
et les retirer des mêmes paroisses et fonctions quand on jugera à propos [...] ». Mgr de Laval conçut donc son
séminaire comme une véritable communauté de prêtres séculiers « qui sera
conduit[e] et gouverné[e] par les supérieurs que nous ou les successeurs
évêques de la Nouvelle-France y établirons, et suivant les règlements que nous
donnerons à cet effet. » Clergé et séminaire, c’était tout un, dans
l’esprit de Mgr de Laval : le séminaire de Québec serait le clergé de la
Nouvelle-France.
Le prélat
précisait que le futur chapitre de l’évêché de Québec serait formé « dans
le dit Séminaire et clergé » ; que toutes les cures seraient unies au
séminaire, auquel les dîmes seraient versées ; que le séminaire
pourvoirait aux besoins des curés et s’engagerait à les entretenir « tant
en santé qu’en maladie, soit dans leurs fonctions, soit dans la communauté
quand ils y seront rappelés ». En retour de cet engagement, le séminaire
exigerait la désappropriation, c’est-à-dire la mise en commun des biens et des
revenus de tous ses membres. Les prêtres séculiers, néanmoins, étaient libres d’adhérer au séminaire ; les abbés Le Sueur*
et
Le Bey, déjà dans la colonie en 1659, n’en firent point partie. Mais, dans
la pratique, il était difficile, à qui rêvait d’obtenir une cure, de ne pas
d’abord se joindre au séminaire. À la requête de Mgr de Laval, le séminaire de
Québec fut affilié, le 29 janvier 1665, au séminaire des Missions
étrangères de Paris, avec lequel il allait entretenir des liens très étroits
d’amicale collaboration.
Le séminaire
de Mgr de Laval répondait parfaitement aux besoins de l’Église canadienne de
1663, et lui assurait en outre une admirable unité. Il rendit de très grands
services tant que Mgr de Laval en eut lui-même la direction ; mais il
avait nécessairement, à certains égards, un caractère provisoire. Avec le développement
de la colonie, et une fois les paroisses capables d’entretenir les curés, cette
communauté diocésaine du clergé n’aurait plus sa raison d’être. Sous Mgr de
Laval, dont le prestige était grand, et à cause des liens très forts d’amitié
qui l’unissaient à ses prêtres, le prélat et le séminaire collaborèrent
étroitement, dans l’harmonie la plus entière. Mais, sous un nouvel évêque, tout
ne marcherait peut-être pas aussi bien ; il faudrait d’abord que cet
évêque consentît à n’exercer son autorité sur le clergé et les paroisses que
par l’intermédiaire des directeurs du séminaire. Successeur de Mgr de Laval,
Mgr de Saint-Vallier [La Croix],
pour sa part, s’y refusa catégoriquement.
Le mandement
qui créait le séminaire de Québec, enregistré à Québec le
10 octobre 1663, établissait en même temps la dîme au Canada. Mgr de
Laval la fixa au treizième, mesure que le roi approuva. Malheureusement, le prélat
crut bon, un mois plus tard, d’y faire exception pour les paroissiens de
Québec, qu’il dispensait de payer la dîme pour l’année 1663, tout en la
portant, pour eux seuls, au vingtième pendant les six années suivantes.
Aussitôt, dans toutes les parties de la colonie, l’on se mit à espérer pareil
allégement ; en attendant, on refusa de subvenir aux besoins du clergé. Ce
fut l’occasion de grandes difficultés et d’importantes contestations.
M. de Mézy appuyait les colons. Mgr de Laval étendit d’abord à tout le
pays le privilège accordé à la paroisse de Québec, puis fixa la dîme au
vingtième pour la durée de sa vie, et enfin retarda jusqu’en 1665 le paiement
obligatoire de la dîme. Celle-ci, néanmoins, resta impayée jusqu’en 1667, alors
que, le 23 août, M. de Tracy [Prouville*] la fixa au vingt-sixième pour 20
ans, et au vingtième par la suite. Bon gré mal gré, les colons se conformèrent
à ces dispositions, plutôt que d’être traînés en justice. En 1707, après bien
des avatars [V. Louis-Gaspard Dufournel*], la dîme fut fixée définitivement
au vingt-sixième. En toute cette affaire, Mgr de Laval, si ferme et si
intraitable quand les grands principes ou la morale étaient menacés, se montra
accommodant et compréhensif, voire un peu faible devant la résistance des
colons. Cela seul suffirait à reviser certains jugements sur son caractère.
Quand
M. de Mézy mourut, réconcilié avec l’évêque et le clergé, commença pour
Mgr de Laval une courte période de paix, sinon de parfaite union, avec les
représentants de l’État. La présence de M. de Tracy y contribua
beaucoup. Le prélat, qui avait érigé canoniquement la paroisse de Québec
en 1664, en consacra l’église en 1666. Pendant ces quelques années, il
s’appliqua à implanter au Canada un certain nombre de dévotions, comme celle de
la sainte Famille, à laquelle il tenait particulièrement, et celle de sainte
Anne. En 1668, le 9 octobre, il fondait à Québec son petit séminaire, dit
de l’Enfant-Jésus : huit jeunes Canadiens, que l’on destinait à l’état
ecclésiastique, et six Hurons, que l’on se proposait de franciser, en furent
les premiers élèves. Logés et formés au petit séminaire, ils suivaient leurs
cours au collège des Jésuites. Vers la même époque, Mgr de Laval mit sur pied,
à Saint-Joachim, une école de métiers, de même qu’une petite école où les
enfants apprendraient à lire et à compter.
Soudain,
le 10 octobre 1668, s’amorçait une nouvelle crise. Mais il convient
ici de prendre les choses d’un peu plus loin.
Dès 1657, par un arrêt de son conseil, le roi avait confirmé
l’interdiction de la traite de l’eau-de-vie, en vigueur dans la colonie depuis
l’époque de Champlain. À son tour, le 5 mai 1660, Mgr de Laval avait
défendu, sous peine d’excommunication ipso facto, de donner
des boissons enivrantes aux Indiens ; quelque temps après, il avait
excommunié nommément le trafiquant Pierre Aigron*,
dit Lamothe. La traite ayant cessé sous la double menace
des sanctions civiles et ecclésiastiques, Mgr de Laval leva son excommunication
générale en octobre 1661, pour la renouveler le 24 février 1662, peu
après que, sur un coup de tête, le gouverneur général Davaugour se fut déclaré
favorable à ce commerce. Or, la veille, à Paris, les théologiens de la
Sorbonne, saisis de la question par le vicaire apostolique, avaient exprimé
l’avis que, « vu les désordres qui arrivent de la vente de telles
boissons, faite aux Américains [i.e. aux Indiens], l’Ordinaire
ou Prélat peut défendre sous peine d’excommunication ipso facto
aux Européens la vente de telles boissons, et traiter ceux qui seront
désobéissants et réfractaires comme des excommuniés. » Par suite de
l’attitude conciliante de Davaugour, cependant, la traite avait pris une telle
ampleur et les désordres s’étaient à ce point aggravés que Mgr de Laval avait
décidé de passer en France pour solliciter l’appui de Louis XIV.
Lorsqu’il
revint à Québec, en 1663, le vicaire apostolique constata avec satisfaction que
les trafiquants s’étaient rendus, sous l’effet de la terreur provoquée par le
grand tremblement de terre de 1663. M. de Mézy, le nouveau gouverneur, et
Mgr de Laval s’entendaient pour interdire conjoitement la traite des boissons.
L’union,
à ce sujet, de l’Église et de l’Etat se maintint jusqu’au
10 octobre 1668. Ce jour-là, à l’instigation de l’intendant Talon*,
le Conseil souverain permit la traite de l’eau-de-vie, tout en interdisant aux
Indiens de s’enivrer, ce qui était un non-sens. En réponse, le
21 avril 1669, Mgr de Laval fit un cas réservé du péché qui
consistait à enivrer les Indiens et à leur donner des boissons à transporter
dans leurs villages.
C’est alors qu’éclata la grande querelle de la traite de
l’eau-de-vie. Jusque-là, en effet, et à l’exception de l’incident provoqué par
Davaugour, l’Église et l’État avaient eu, officiellement tout au moins, une
politique commune. Mais, dès lors, Mgr de Laval, les missionnaires et le clergé
furent constamment attaqués par tous ceux – et ils étaient fort
nombreux – qui favorisaient la traite ; on les accusait de s’ingérer
dans une matière de politique commerciale qui relevait exclusivement de la
police civile. On reprochait en particulier à l’évêque son cas réservé. En
1674, Mgr de Laval soumit de nouveau la question aux théologiens de la
Sorbonne. La réponse, datée du 8 mars 1675, lui donnait raison
sur les deux points proposés : la traite de l’eau-de-vie constituait un
péché mortel, et l’Ordinaire avait le droit de prendre les mesures appropriées
pour réduire ce commerce, comme d’en faire un cas réservé.
Dans
ses combats contre la puissance civile, dans ceux en particulier qu’il mena
contre la traite de l’eau-de-vie, Mgr de Laval voyait son autorité épiscopale
partout mise en doute, du fait qu’il n’était que vicaire apostolique. Lui-même,
jusqu’en 1664, ne douta pas qu’il eût tous les pouvoirs d’un ordinaire ;
aussi érigea-t-il en toute bonne foi une officialité, un séminaire et la
paroisse de Québec. Quand il découvrit enfin les limitations de sa fonction, il
implora de Rome l’érection d’un évêché à Québec, de manière à pouvoir organiser
son Église et faire face avec plus d’autorité aux « émules perpétuels et
contempteurs de la puissance ecclésiastique » au Canada.
Cette
requête ne parut point, tout d’abord, devoir soulever d’objections. En 1662,
Louis XIV avait assuré Mgr de Laval de sa nomination au futur siège de
Québec, dont il avait peu après demandé l’érection au pape. Le vicaire
apostolique s’était empressé d’appuyer sa démarche. Sur quoi la Propagande
avait exprimé l’avis que le temps était venu, en effet, de doter la
Nouvelle-France d’un diocèse. Mais Louis XIV avait fini par donner de
telles proportions à l’incident de la garde corse (20 août 1662) que
les relations Rome-Paris s’étaient tout à fait détériorées ; la
Propagande, dès lors, s’était montrée plus réticente sur le projet d’un évêché,
ne promettant plus que de l’examiner attentivement.
Le roi
exigea bientôt que le futur évêché de Québec dépendît de celui de Rouen. Ne
voulant rien céder sur ce point, Rome se désintéressa de l’affaire pendant deux
ans (1664–1666). Or, de Québec, Mgr de Laval expédiait des lettres fort
pressantes au Saint-Siège, expliquant les menées de la Compagnie des Indes
occidentales qui, sous prétexte qu’il n’y avait point d’ordinaire au Canada,
s’apprêtait à y envoyer des prêtres, à créer des paroisses et à nommer aux cures.
Les colons, par ailleurs, contestaient au vicaire apostolique le droit
d’établir et de percevoir la dîme. En 1666, Rome reprit son étude, qu’une
nouvelle exigence de Louis XIV vint encore ralentir : le roi voulait
cette fois que l’érection de l’évêché de Québec se fît dans le respect des
privilèges de l’Église gallicane. Pendant que Mgr de Laval s’impatientait en
vain à Québec, Rome adressait enfin à Paris, le 18 juin 1668, un
modèle de bulle « pour recevoir sur cela les ordres du Roy ».
Le document fut examiné, puis retourné au Saint-Siège. L’obstacle majeur
restait la dépendance de l’archevêché de Rouen.
En
1669, lassé d’attendre et voyant son Église menacer ruine, Mgr de Laval fit la
concession suprême : écrivant à Rome, il accepta que le futur évêché
dépendît de Rouen, si les cardinaux jugeaient qu’il en devait être ainsi. Or,
la même année, Louis XIV et Colbert, comprenant que les discussions avec
le Saint-Siège n’aboutiraient jamais, abandonnaient la condition qu’ils avaient
mise jusque-là à l’érection de l’évêché de Québec, c’est-à-dire la dépendance
de Rouen !
L’affaire
prit une tournure excellente en 1670, mais Mgr de Laval se trouva dans
l’impossibilité de payer les frais élevés de l’érection de son diocèse. Sans
fortune personnelle, il rédigea plaidoyer sur plaidoyer, demandant qu’on lui
expédiât gratuitement ses bulles. En 1671, alarmé, il passa en France,
déterminé à ne jamais revenir au Canada à moins que le diocèse ne fût érigé.
Rome accepta finalement de réduire les frais. Les bulles ne furent expédiées
que le 4 octobre 1674. Mgr de Laval prêta le serment de fidélité au
roi, et s’embarqua pour le Canada à la fin de mai 1675.
Dès
lors, le diocèse de Québec échappait entièrement aux prétentions de
l’archevêque de Rouen, mais non point encore à celles de l’archevêque de Paris,
ce même Harlay de Champvallon qui, de Rouen, avait été promu à Paris. Harlay
tenta, cette fois, de mettre Québec dans la dépendance du
« principal » diocèse de France ; mais il dut, en 1679,
abandonner ce projet que Rome n’eût jamais approuvé.
Mgr
de Laval débarqua à Québec au début de septembre 1675, après une absence de
quatre ans. Évêque en titre, il prit possession de sa cathédrale, renouvela
plusieurs de ses ordonnances, confirma l’érection de l’officialité et de la paroisse
de Québec, et forma un chapitre provisoire, faute de pouvoir l’ériger
canoniquement. Il tira ses chanoines du séminaire, dont il avait, peu avant son
départ de Paris, renouvelé l’acte d’union à celui des Missions étrangères.
Puis, au printemps de 1676, il entreprit la visite de son diocèse.
Au
moment où Mgr de Laval assurait une plus grande stabilité à son Église,
Louis XIV réorganisait le Conseil souverain de Québec.
Le 5 juin 1675, il portait à sept le nombre des
conseillers – outre le gouverneur, l’évêque et l’intendant –, qui
seraient dès lors nommés à vie, par le roi. Mgr de Laval reprenait au conseil
la seconde place, qui avait été la sienne avant la venue de Jean Talon. L’État
conservait donc à l’Église canadienne un rôle important dans les affaires
civiles.
Mgr
de Laval n’ignorait rien des querelles nombreuses qui, en son absence, de 1672
à 1675, avaient mis à dure épreuve l’union de l’Église et de l’État, et qui
furent une des causes de la réorganisation du conseil. Or, en 1676, deux
grandes questions opposaient encore les « puissances » : la
traite de l’eau-de-vie et l’établissement des cures. L’évêque jugea nécessaire
de déléguer à Paris un représentant sûr et dévoué qui défendît la position de
l’Église canadienne et répondît aux attaques de Frontenac [Buade*]
et de ses alliés. Il arrêta son choix sur l’abbé Jean Dudouyt*.
La mission
confiée à M. Dudouyt était d’autant plus nécessaire que le clergé de la
Nouvelle-France n’avait plus son ancienne unité. En 1670, en effet, à
l’instigation de Jean Talon, les Récollets étaient revenus au Canada, chargés
par l’État de faire contrepoids à l’autorité et à la sévérité des Jésuites et
des séculiers canadiens, qu’on accusait de « gehenner les
consciences ». Ces bons religieux, protégés par Frontenac à partir de
1672, prirent leur rôle fort au sérieux et devinrent les instruments dociles du
gouverneur. Sur la traite de l’eau-de-vie, sur l’établissement des cures, sur
la dîme, ils adoptèrent et prêchèrent les opinions de Frontenac, étant du reste
entièrement à ses ordres plutôt qu’à ceux de l’évêque. Mgr de Laval, qui savait
les raisons de leur venue, les avait pourtant accueillis avec beaucoup de
charité, leur avait assigné des terrains d’apostolat, et continua de leur
prodiguer des marques d’estime. Ce fut en vain. Les Récollets enchérissaient
sur les calomnies lancées à la cour par le clan de Frontenac contre l’évêque et
les Jésuites – qui n’auraient interdit la traite de l’eau-de-vie que pour
la mieux faire eux-mêmes, et auraient été plus intéressés à la conversion des
castors qu’à celle des âmes.
Mgr de Laval avait profité de son séjour à Paris pour
consulter de nouveau les théologiens de la Sorbonne sur la question de
l’eau-de-vie. Il reçut d’eux un jugement favorable en tout point à sa thèse.
Dans l’espoir d’obtenir un avis contraire, ses adversaires s’adressèrent aux
théologiens de l’université de Toulouse. La réponse fut toute différente
de celle de la Sorbonne : « M. l’Évêque de Québec ne peut point
licitement faire un péché mortel et moins un cas réservé de la vente des
eaux-de-vie ». Cela était de nature à nuire à la cause de Mgr de Laval.
Aussi M. Dudouyt, dès son arrivée à Paris, sollicita-t-il une entrevue
avec Colbert. Il lui exposa, le 27 avril 1677, les raisons de
l’attitude de Mgr de Laval, mais ne le convainquit pas. Une seconde audience,
le 11 mai, lui laissa quelque espoir, le ministre l’ayant écouté avec plus de
patience. Il recommanda donc à l’évêque de rédiger un mémoire complet sur la
question ; la cour avait adressé la même demande à l’intendant Duchesneau*.
Manifestement, Louis XIV était décidé à trancher le
débat. Il ordonna à Frontenac de convoquer 20 des principaux habitants du pays,
et de recueillir leurs avis sur la traite de l’eau-de-vie. Le Conseil
souverain désigna ces représentants, qui se réunirent le
28 octobre 1678. Presque tous engagés dans le commerce, ils se
prononcèrent en majorité pour la liberté absolue de la traite de l’eau-de-vie.
Le conseil chargea MM. Nicolas Dupont de
Neuville et Jean-Baptiste de Peiras
de porter à la cour le résultat de la consultation. La situation était
critique pour l’Église canadienne. Malgré des infirmités de plus en plus
accablantes, Mgr de Laval se rembarqua immédiatement pour la France, dans un
suprême effort pour convaincre le roi de la justesse de sa cause.
Louis XIV
confia à son confesseur, le père de La Chaise [Aix], et à l’archevêque de
Paris le soin d’étudier les mémoires sur le trafic des boissons reçus du
Canada ; puis, le 24 mai 1679, il rendit une ordonnance
interdisant la traite de l’eau-de-vie en dehors des habitations françaises. Mgr
de Laval s’engagea à ramener son cas réservé aux dispositions de l’ordonnance.
Cet aboutissement d’une lutte de 20 années avait de quoi décevoir profondément
le vieil évêque ; il pouvait, néanmoins, tirer quelque consolation du fait
que les trafiquants d’alcool n’iraient plus, légalement, poursuivre les Indiens
jusque dans leurs villages les plus reculés.
La question
de l’érection des cures fut également débattue en France, pendant l’hiver de
1678–1679, en présence de Mgr de Laval. En confirmant l’établissement du
séminaire de Québec en 1663, Louis XIV avait approuvé le double principe
de l’amovibilité des cures et du paiement des dîmes au séminaire, lequel se
chargeait de les redistribuer équitablement aux desservants des diverses
paroisses. Or, avec le temps et sous l’influence, semble-t-il, de Jean Talon,
ce système – le seul qui fût applicable à la Nouvelle-France
d’alors – fut critiqué, puis vivement combattu. On accusa Mgr de Laval de
ne point vouloir établir de cures. À cela, il y avait deux réponses :
d’une part, tant qu’il fut vicaire apostolique, Mgr de Laval n’eut pas les
pouvoirs nécessaires à l’érection des paroisses – ce qu’il ne découvrit
qu’après avoir « érigé » celle de Québec en 1664 ; d’autre part,
il ne pouvait établir de paroisses que si la subsistance des curés était
assurée. Or, vers 1675–1680, aucune « paroisse » n’était encore en
mesure de faire vivre un curé, encore moins de construire une église et un
presbytère. Pour assurer les revenus nécessaires, il eût fallu augmenter
considérablement le nombre des paroissiens, en reculant indéfiniment les
frontières des paroisses, qui, dès lors, seraient redevenues territoires de
mission.
Sur
la question des cures tout autant que sur celle de l’eau-de-vie, Mgr de Laval
dut céder devant la volonté du roi. En mai 1679, Louis XIV signa un édit
sur les « dîmes et cures fixes » : les dîmes appartiendraient à
l’avenir au curé de la paroisse, « où il serait établi perpétuel, au lieu
du prêtre amovible qui la desservait auparavant ». Mgr de Laval ne mit
aucune mauvaise grâce à l’exécution de cet édit. Déjà, en 1678, il avait
conféré avec Frontenac et Duchesneau sur la façon d’assurer la subsistance des
curés. Il avait, peu après, érigé sept paroisses. « Dans la plupart de ces
paroisses, écrivait-il, les habitants n’ont pas voulu se conformer à la décision
de la conférence pour la nourriture et l’entretien de leurs pasteurs.
N’importe ; j’ai envoyé mes missionnaires hiverner chez eux, m’obligeant à
leur fournir ce qui leur serait nécessaire. » Travaillant de concert avec
l’intendant, Mgr de Laval érigea six nouvelles cures en 1684 ; de nouveau,
aucune d’entre elles ne pouvait subvenir à l’entretien de son curé. Il fallut
l’aide du séminaire et de l’État. Cela prouvait hautement la sagesse de Mgr de
Laval lorsqu’il conçut son séminaire, en 1663 ; malgré le régime nouveau,
instauré en principe par l’édit de 1679, le séminaire n’en continuait pas moins
de soutenir les paroisses.
Mgr
de Laval rentra au pays à l’automne de 1680, après s’être occupé pendant plus
d’un an d’autres questions relatives à son Église, en particulier de l’union
canonique – que toutefois il ne put réaliser – des abbayes de Maubec
et de Lestrées à son évêché. En 1681, il fit la visite de son diocèse.
Cette année 1681 vit le début de nouvelles difficultés entre
l’évêque et les Récollets. Ces derniers venaient d’obtenir du roi l’emplacement
de l’ancienne sénéchaussée, dans le but d’y bâtir un hospice qui leur servît de
retraite lors de leurs séjours à Québec. Mgr de Laval accueillit favorablement
ce projet, mais précisa, conformément au document royal, que ce lieu de
retraite ne devait pas être transformé en couvent ni utilisé pour des
cérémonies publiques du culte. Les religieux n’en firent pas moins un couvent,
le surmontèrent d’un clocher [V. Henri Leroy],
célébrèrent des offices publics et se moquèrent ouvertement des directives de
l’évêque. Ce dernier révoqua la permission qu’il leur avait donnée de
construire un hospice ; les Récollets, par représailles, abandonnèrent leurs
missions ; Mgr de Laval fut finalement contraint de leur interdire toute
fonction ecclésiastique. Le roi, une fois encore, dut trancher le
débat : il ordonna d’abattre le clocher, mais le couvent subsista.
Conciliant à son ordinaire, Mgr de Laval avait invité, au début de cette
querelle, un récollet, le père Adrien Ladan,
à prêcher l’avent à la cathédrale. Le religieux en profita pour fustiger à
plusieurs reprises l’intendant et les adversaires de Frontenac ; les
avertissements de Mgr de Laval n’eurent point d’effet sur lui. Les Récollets
jouaient consciencieusement le rôle que leur avait confié l’État...
Les
relations de Mgr de Laval avec les diverses communautés religieuses de son diocèse,
si l’on excepte les Récollets et, pour un temps, les Sulpiciens, furent
toujours excellentes, empreintes d’estime et de respect mutuels. Le prélat
ne fut pas toujours d’accord, il est vrai, avec les supérieurs des diverses
communautés, mais leur union n’en fut jamais altérée. Mgr de Laval, par
exemple, se montra peu favorable à la multiplication des ordres religieux dans
son diocèse : il eût voulu fondre les deux communautés d’hospitalières, de
même qu’il désira unir les sœurs de la congrégation de Notre-Dame aux
Ursulines. En attendant, il aida chaque groupe de son mieux, et finit par
reconnaître à chacun son existence propre. À partir de 1668, il fut en bons
termes avec les Sulpiciens, faisant même de M. de Queylus, qu’il avait
autorisé à revenir à Montréal, son grand vicaire. La charité et l’humilité
ne laissaient point de place chez Mgr de Laval à la rancune et aux
mesquineries.
Au retour de sa visite pastorale de 1681, le prélat, épuisé,
tomba gravement malade ; « dans l’espace de quinze jours, on
n’espérait que la mort ». Il aurait bientôt 60 ans, et sa santé déclinait.
Il se persuada qu’un évêque plus jeune
et plus solide ferait dès lors plus de bien que lui, et qu’il lui
fallait porter sa démission au roi. Auparavant, il voulut parfaire quelque peu
son œuvre. Il travailla à l’établissement de six nouvelles cures, érigea
canoniquement son chapitre en 1684, et confia au séminaire la réalisation de
quelques projets, laissant 8 000# pour la construction de la chapelle du
séminaire, prévue dans les plans de l’édifice commencé en 1678, 4 000#
pour la construction d’une église à Saint-Joachim et 8 000# pour la
subsistance du curé qui desservirait cette paroisse et dirigerait l’école des
arts et métiers qu’il y avait créée. À l’automne, il s’embarqua pour la France.
Sa
démission acceptée, Mgr de Laval convint de demeurer évêque de Québec jusqu’à
la consécration de son successeur, l’abbé de Saint-Vallier, qu’il avait choisi
avec le plus grand soin. Cependant, les relations tendues qui existaient pour
lors entre Paris et Rome ne permettant pas l’expédition immédiate de ses
bulles, l’abbé de Saint-Vallier passa au Canada, en 1685, avec le titre de
grand vicaire. À son retour à Paris, en janvier 1687, il eut quelques démêlés
avec Mgr de Laval au sujet du séminaire de Québec. C’est alors que le vieil
évêque comprit le dessein de son successeur de modifier profondément
l’organisation de l’Église canadienne, dont son cher séminaire était la clef de
voûte. Une seule solution s’offrait à lui, pour sauver son œuvre : obtenir
de l’abbé de Saint-Vallier, qui n’avait pas encore reçu ses bulles, qu’il
renonçât à cet évêché. En vain Mgr de Laval fit-il intervenir les personnages
les plus influents ; l’abbé de Saint-Vallier ne voulut point céder, se
contentant d’expliquer son attitude et promettant beaucoup de modération.
Au
printemps de 1687, Mgr de Laval s’apprêtait à partir pour le Canada, où il
désirait finir ses jours. Le marquis de Seignelay l’en empêcha, de crainte
que sa présence n’y fût une cause de troubles et de division. Mgr de Laval
écrivit au père de La Chaise, à Seignelay lui-même, mais ne les fléchit
point. Il s’abandonna dès lors à la volonté de Dieu, et rédigea, à l’adresse de
ses prêtres, une lettre admirable, pleine de résignation devant, l’immense
épreuve, qu’il acceptait « avec un cœur rempli de joie et de consolation
au fond de l’âme ».
L’abbé
de Saint-Vallier fut consacré le 25 janvier 1688. Mgr de Laval
devenait Mgr l’Ancien. Avec l’appui du nouvel
évêque, et sur la promesse de ne lui causer aucun embarras, Mgr de Laval obtint
l’autorisation de retourner à Québec. Il y arriva le 3 juin, et Mgr de
Saint-Vallier, le 31 juillet.
Le retour de Mgr l’Ancien dans la colonie réjouit non
seulement ses prêtres, mais toute la population, sur laquelle, au dire du
gouverneur général Brisay de Denonville, il avait
« un grand ascendant par son génie et par sa réputation de
sainteté ». Si certains représentants du pouvoir civil et la plupart des
commerçants intéressés à la traite de l’eau-de-vie s’étaient opposés à lui, les
colons, malgré les difficultés de l’établissement des dîmes, aimaient
sincèrement et vénéraient cet évêque courageux, tout dévoué à son Église, et
dont ils connaissaient bien la piété, l’humilité, et surtout l’immense charité.
On était partout conscient des progrès réalisés sous Mgr de Laval : de
cinq en 1659, le nombre des paroisses était passé à 35 en 1688 ; les
prêtres, de 24 à 102 (36 jésuites, 19 sulpiciens, 14 récollets et 33
séculiers) ; et les religieuses, de 32 à 97 environ. On n’était pas non
plus insensible au fait que 13 prêtres canadiens œuvraient déjà au pays, et que
50 Canadiennes avaient prononcé leurs vœux perpétuels dans les différentes
communautés de Québec et de Montréal. En plus de jeter les bases d’une Église
nationale, Mgr de Laval en avait fort heureusement commencé l’édification.
Il retourna vivre au séminaire. On affecta à son service un
donné, le frère Hubert Houssart. Le prélat ne pensait plus qu’à la prière
et à la mortification, limitant ses interventions extérieures aux seuls actes
d’une charité fort discrète du reste. Il distribua tout ce qu’il possédait, ne
réclamant rien qui ne fût pour ses pauvres, auxquels il réservait même la
meilleure part de ses repas. Quand il n’eut plus rien, il sut que sa mort était
proche. Il assistait à tous les offices de la paroisse, étant le premier à
l’église tous les matins, bien avant le lever du soleil et par les froids les
plus rigoureux. Complètement retiré des affaires, il n’avait plus d’intérêt que
pour son cher séminaire, auquel il continuait de prodiguer ses conseils, et pour
les séminaristes, dont il surveillait de très près les progrès, aimant
converser avec eux pendant leurs récréations. En une courte phrase M. Bochart de Champigny,
intendant, décrit bien la nouvelle existence du vieil évêque : « Il
vit saintement dans la retraite, ne se mêlant que de la conduite de son
séminaire. »
Son
séminaire ! Que de douleurs n’allait-il pas lui occasionner en ses
dernières années ! Mgr de Saint-Vallier, tout d’abord, s’opposa violemment
à ce que les cures lui fussent unies, et en obtint finalement du roi, en 1692,
la séparation complète, le séminaire étant réduit à n’être plus qu’une maison
de formation pour les futurs prêtres. C’était détruire du coup la grande œuvre
de Mgr de Laval. Cela devait se faire, à vrai dire, tôt ou tard ; mais qui
songerait à reprocher au vieil évêque son attachement à l’œuvre de sa
vie – ce séminaire auquel il avait cédé tous ses biens fonciers –,
surtout après la rigidité de Mgr de Saint-Vallier à son égard et envers ses
collaborateurs ? Au plus fort de la querelle de l’évêque avec le
séminaire, Mgr de Laval s’était prudemment retiré à Saint-Joachim, pour éviter
d’avoir à intervenir et à s’opposer ouvertement à son successeur. Dans
l’attitude de Mgr de Saint-Vallier, dont il reconnaissait la sincérité
personnelle, il voyait presque l’action de quelque puissance maléfique acharnée
à détruire cette nouvelle Église. Cette perspective lui arrachait des cris de
douleur. Mais en apprenant la nouvelle de la réforme de son séminaire, il se
plia comme d’habitude aux voies de la Providence, s’oubliant lui-même pour
consoler ses prêtres et les inviter à la soumission. Blessé au plus profond de
l’âme, il prêchait la réconciliation et la paix : jamais sa vertu n’avait
été plus héroïque.
Les plaies causées par la réforme du séminaire n’étaient pas
encore fermées qu’un nouveau malheur s’abattait sur cette institution.
Le 15 novembre 1701, un incendie consuma en quelques heures le
séminaire, la chapelle et le presbytère. Ce fut pour Mgr de Laval une épreuve
très pénible. Fort âgé, reverrait-il son séminaire debout ? On
reconstruisit avec ardeur ; tout fut bientôt rétabli, sauf la chapelle.
Or, à peine voyait-on la fin des travaux que, de nouveau, le 1er
octobre 1705, la presque totalité du séminaire était détruite par le feu. Sa
Grandeur, dit le frère Houssart, « n’en perdit pas pour un seul instant sa
paix, sa joie, ni sa tranquillité, parce que ces accidents n’étaient pas des
sujets capables d’attaquer sa patience et sa vertu qui étaient bien au-dessus
de tout cela. » Et l’humble frère d’ajouter, ce qu’illustre parfaitement
toute la vie de cet évêque, que « les seuls intérêts de Dieu, de la vertu
et de la religion étaient capables de l’émouvoir ».
Au
milieu de ces dures épreuves, Mgr de Laval avait dû sortir quelque peu de sa
retraite, pour remplir à l’occasion les fonctions épiscopales de Mgr de
Saint-Vallier, parti en 1700 et qui ne devait rentrer dans la colonie qu’en
1713. Mgr l’Ancien avait, du reste, toujours secondé son évêque, sans jamais
manifester publiquement ses sentiments sur les questions qui pouvaient
l’opposer à lui. Il tenait, en particulier, en l’absence de son successeur, à
toujours assister aux offices de la cathédrale, pour les rehausser de la
présence épiscopale. C’est ainsi que, dans la semaine sainte de 1708, il
contracta une engelure au talon, qui s’aggrava et le mit bientôt à l’extrémité.
Il mourut le 6 mai, à sept heures et demie du matin. On exposa son corps
dans la cathédrale.
« Aussitôt après son décès les peuples l’ont pour ainsi
dire canonisé, écrit l’intendant Jacques
Raudot, ayant eu la même vénération pour
son corps qu’on a pour ceux des saints, étant venus en foule de tous côtés
pendant qu’il a été exposé sur son lit de parade et dans l’église, lui faire
toucher leurs chapelets et leurs heures. Ils ont même coupé des morceaux de sa
robe, que plusieurs ont fait mettre dans de l’argent, et ils les regardent
comme des reliques. »
Les funérailles eurent lieu le 9 mai. M. de Glandelet prononça
l’oraison funèbre. Puis le premier évêque de Québec fut enseveli dans la
cathédrale.
Il est impossible de citer ici, dans le détail, les milliers
de documents relatifs à la longue carrière de Mgr de Laval, ce qui
nécessiterait un inventaire presque complet des archives du xviie siècle conservées aux AAQ, aux ASQ et, à un moindre
degré, aux AQ. Heureusement, les principaux documents qui nous intéressent
ont été publiés dans l’ouvrage suivant : Quebecen. Beatificationis et Canonizationis Ven. Servi Dei.
Francisci de Montmorency-Laval Episcopi Quebecencis († 1708). Altera Nova Positio Super Virtutibus Ex Officis
Critice Disposita, Typis Polyglottis Vaticanis, MCMLVI. En plus des
documents tirés des archives nommées plus haut, on y trouve de larges extraits
du JJ et des JR, de la correspondance des
gouverneurs, des intendants et de Marie de l’Incarnation, des Jug.
et délib., des Mandements des évêques de Québec
(Têtu et Gagnon), I, des Annales de l’Hôtel-Dieu
de Québec, par la mère Juchereau, etc., de même que la plus ancienne
biographie de cet évêque, Mémoires sur la vie de M. de Laval, premier évêque de Québec, de Bertrand de Latour, publiée
en 1761, et la très utile lettre du frère Houssart sur les dernières années et
la mort de Mgr l’Ancien.
De même, les études sur Mgr de Laval sont nombreuses. Toutes
les histoires générales lui font une large place ; nous ne les énumérerons
pas ici, nous contentant de citer les études suivantes : Émile Bégin, François de Laval (Québec, 1959).— [Étienne-Michel Faillon], Histoire de la colonie française en Canada (3 vol., Villemarie
[Montréal], 1865–1866).— Auguste Gosselin, Vie de Mgr de Laval
(2 vol., Québec, 1890) ; L’Église du Canada,
I ; Henri de Bernières premier curé de Québec (« Les
Normands au Canada », Québec, 1902).— Rochemonteix, Les Jésuites
et la N.–F. au XVIIe
siècle, I, II, III.— H. H. Walsh, The
Church in the French Era (Toronto, 1966)
François de Montmorency Laval, statue de la façade de
l'hôtel du Parlement, Québec. Photographie de Jean Gagnon
FRANÇOIS DE LAVAL (1623-1708)
NOTES BIOGRAPHIQUES ET
ÉVÉNEMENTS
CHRONOLOGIE
1622 Fondation de la
Congrégation de la Propagande.
Canonisations d'Ignace de
Loyola, de François. Xavier et de Thérèse d’Avila. Mort de François de Sales
1622 (22 décembre).
1623 Naissance de
François de Laval à Montigny-sur-Avre (30 avril).
Baptême.
Mort du pape Grégoire XV.
1626 Bérulle devient
cardinal.
1631 Lettres et
Philosophie au Collège des Jésuites à La Flèche.
Première Tonsure.
1634 Admission à la
Congrégation mariale du Collège de La Flèche.
Champlain confie au sieur
Laviolette la tâche de fonder une habitation à Trois-Rivières.
1636 Mort du père (10
septembre).
1637 Chanoine d’Évreux.
1641Théologie à Paris au
Collège de Clermont jusqu'en 1645.
1643 Entrée dans les
"Aa" (Assemblées des Amis).
Louis XIV, roi de France
jusqu’en 1715.
1644 Mort de son frère
François sur le champ de bataille à Fribourg-en-Brisgau en Allemagne (Bade).
Cardinal Mazarin, Premier
Ministre de Louis XIV jusqu’en 1661.
1645 Mort de son frère
Gabriel sur le champ de bataille à Nordlingen en Allemagne (Haut-Palatinat).
Devient chef de la
famille des Montigny.
1646 Sous-diacre.
1647 Diacre.
Prêtre (1er mai).
1648 Archidiacre
d’Évreux.
1649 Licence en Droit canonique.
1651 Les membres de
l'"Aa" décident de vivre en commun.
1653 Renoncement à
l’Archidiaconat d'Évreux.
1654 Renonce à la
Seigneurie de Montigny et à ses droits.
Conversion de
Pascal: Mémorial (23 novembre).
Séjour à l’Ermitage de M.
de Bernières à Caen en Normandie jusqu'en 1658.
Condamnation des ouvrages
jansénistes.
d’Argenson, Gouverneur en
Nouvelle-France jusqu'en 1661.
Arrivée des Sulpiciens à
Montréal.
1658 Consécration
épiscopale à Saint-Germain-des-Prés à Paris comme Vicaire apostolique au Canada
(8 décembre).
Demande pour la fondation
du Séminaire des Missions Étrangères de Paris (1 juillet).
Marguerite Bourgeois
inaugure sa première école à Montréal.
1659 Voyage de France à
Québec (13 avril – 16 juin).
Met le pied à terre à
Percé pour sa première messe en Nouvelle-France (16 mai).
1660 Visite générale de
Québec jusqu’à Montréal.
Mort de Vincent de Paul.
1661 P. d’Avaugour,
Gouverneur jusqu'en 1663.
1662 Canada - France
(départ le 12 août): premier voyage en France.
Lettre de recommandation
de l'ouvrage de saint Jean Eudes Le Coeur admirable de la T.S. Mère de Dieu.
1663 Fondation du
Séminaire des Missions Étrangères de Québec (26 mars).
Voyage de retour de
France (15 mai - 15 septembre).
Institution de la dîme .
de Mésy, Gouverneur
jusqu'en 1665.
Nomination au Conseil
Souverain de Nouvelle-France.
Important tremblement de
terre en Nouvelle France.
1664 Érection de la
Paroisse de Québec (15 septembre) sous le titre de l'Immaculée Conception de la
Bienheureuse Vierge Marie.
Visite pastorale de
Trois-Rivières jusqu’à Montréal.
Réforme de la Trappe en
Normandie par l'abbé de Rancé.
1665 Union du Séminaire
de Québec avec le Séminaire des Missions Étrangères de Paris (29 janvier).
Érection de la Confrérie
de la Sainte-Famille (14 mars).
Érection de la Confrérie
du Mont Carmel (30 août).
Reprise du voeu de 1635 à
l'Immaculée par les prêtres du Séminaire.
Talon , Intendant jusqu’en
1669.
de Courcelle, Gouverneur
jusqu'en 1672.
Canonisation de François
de Sales.
1666 Consécration et
dédicace de l'église paroissiale de Québec à l'Immaculée Conception.
Visite pastorale d'une
partie du vicariat apostolique.
La ville de Québec compte
747 habitants (premier recensement nominatif).
1668 Fondation du Petit
Séminaire de Québec (9 octobre).
Fondation d'une école
d'Arts et Métiers à St-Joachim
Visite pastorale de
Tadoussac à Montréal.
1669 Permission donnée à
Marguerite Bourgeois de poursuivre la vie en commun avec ses compagnes (20 mai
1669).
1670 Approbation du
retour des Récollets au Canada.
Talon, de retour comme
Intendant jusqu’en 1672.
1671 Canada – France
(départ 3 novembre, retour en 1675): deuxième voyage en France.
Mort de Mme de la Peltrie
(18 novembre).
1672 Frontenac,
Gouverneur jusqu’en 1682.
Mort de Marie de
l’Incarnation.
1673 Mort de Jeanne
Mance.
Renouvellement de sa
consécration à Marie.
Louis Jolliet et le Père
Marquette explorent les cours du Wisconsin, du Mississipi et de l'Illinois.
Mort de Molière.
1674 Bulle d'érection du
diocèse de Québec. Évêque de Québec (1 octobre).
1675 France – Canada (29
mai – septembre).
1676 Visite pastorale de
Tadoussac jusqu’à Prairie-de-la-Madeleine (de mai à août).
Approbation officielle de
l'Institut de Marguerite Bourgeois (2 août).
Baptême de la
Bienheureuse Kateri Tekakwitha.
Mort à Paris de Chomedey
de Maisonneuve, fondateur de Montréal.
1677 Inauguration de la
nouvelle maison du Séminaire de Québec (8 décembre).
1678 Canada – France
(novembre – 5 janvier 79): troisième voyage en France.
1679 Innocent XI : décret
en faveur de la communion fréquente.
1680 Donation de tous ses
biens au Séminaire de Québec (12 avril).
France – Canada (voyage
de retour d'un mois).
1681 Visite générale du
diocèse de Beaupré jusqu’à Montréal.
1682 Guerre entre la
colonie et les Iroquois.
de la Barre, Gouverneur
jusqu'en 1685.
Nouvel éloge après la
mort de saint Jean Eudes de son ouvrage sur le Coeur de la Vierge Marie.
1684 Institution de la
fête de la Sainte-Famille (4 novembre).
1684 Canada – France (14
novembre – 20 janvier 1685): quatrième voyage en France.
Institution de la fête de
Saint-Louis (13 novembre).
1685 Démission du poste
d’Évêque de Québec.
de Denonville, Gouverneur
jusqu’en 1689.
Monseigneur de
St-Vallier, nommé vicaire général du diocèse de Québec, visite le diocèse
(1685-1686).
1687 Choix de Monseigneur
de St-Vallier comme évêque de Québec et successeur du bienheureux François de
Laval.
1688 Consécration
épiscopale de Mgr de St-Vallier (25 janvier).
Voyage de retour France -
Canada (avril – 3 juin).
Arrivée de Monseigneur de
St-Vallier et du « donné » le frère H. Houssart (31 juillet).
1689 Frontenac,
Gouverneur jusqu’en 1698.
1691 1er voyage de Mgr de
St-Vallier en France (13 mai 1691- été 1692).
1692 Mgr de St-Vallier
impose un nouveau règlement aux prêtres du Séminaire de Québec.
1694 2e voyage de Mgr de
St-Vallier en France jusqu'en 1697.
1697 Cinquantième
anniversaire d'ordination sacerdotale.
1698 H. de Callières,
Gouverneur jusqu'en 1703.
Avec la permission de Mgr
de St-Vallier, le bienheureux François de Laval envoie des missionnaires du
Séminaire de Québec au Mississipi et en Acadie.
1700 3e voyage de Mgr de
St-Vallier en France (jusqu’en 1713).
1701 Premier incendie du
Séminaire de Québec (15 novembre).
1702 Dernière visite à
Montréal.
Témoignage écrit pour la cause
de béatification de saint Vincent de Paul.
1703 Ph. de Vaudreuil,
Gouverneur jusqu'en 1725.
1705 Second incendie du
Séminaire de Québec (1 octobre).
Le bienheureux François
de Laval, dit Mgr l'Ancien, ne quitte presque plus sa chambre au Séminaire.
1708 Décès (6 mai).
Funérailles (9 mai).
Centième anniversaire de
la fondation de Québec.
1878 Exhumation et
translation du corps de la Cathédrale à la crypte de la Chapelle du Séminaire.
1890 Introduction de la
cause de béatification à Rome (24 septembre).
1950 Translation des
restes de la crypte à la Chapelle du Séminaire (10 mai).
1956 La Sacrée
Congrégation des Rites publie l'« Altera nova positio ».
1959 Fêtes du troisième
centenaire de l’arrivée de Mgr de Laval à Québec dans le nouveau Grand
Séminaire sur la Cité Universitaire à Ste-Foy.
1960 Déclaration par Jean
XXIII de « l’héroïcité des vertus »; Mgr de Laval est déclaré « Vénérable ».
1980 Béatification par
Jean-Paul II (22 juin).
1993 Inauguration de la
chapelle funéraire dans la basilique-cathédrale Notre-Dame de Québec.
2008 "Année
jubilaire François de Laval" pour célébrer le 300e anniversaire de son
décès et le 350e anniversaire de son ordination comme évêque, vicaire
apostolique en Nouvelle-France
SOURCE : http://www.carrefourkairos.net/lav_chronologie.htm
FRANÇOIS DE LAVAL:
PASTEUR ET MYSTIQUE
2e colloque Raison et
Mystère chrétien 14-15 octobre 2006-09-23
Montréal – Fraternités
monastiques de Jérusalem
NOS FONDATEURS
SPIRITUALITÉ ET SAINTETÉ
conférencier : Mgr
Hermann Giguère ptre, p.h.
Supérieur général du
Séminaire de Québec et professeur associé de l’Université Laval
Samedi le 14 octobre 2006
Plan
Préambule
1.0 Le chemin de la «
désappropriation »
1.1 Le mouvement
essentiel à l’émergence d’un sujet mystique
1.2 Le parcours de
François de Laval
2.0 Un abandon « mystique
»
2.1 L’abandon à Dieu de
François de Laval
2.2 L’empreinte mystique
permanente dans le sujet
3.0 Bien-fondé de cette
relecture de l’itinéraire spirituel de François de Laval
3.1 Les sens du mot
mystique
3.2 Mystique et
écrivains/écrivaines mystiques
3.3 Mystique et sainteté
Conclusion
Le 14 octobre 2006
Cet essai sans prétention
m’a été inspiré en partie par l’Année jubilaire qui a été décrétée par le
cardinal Ouellet le 25 septembre dernier pour célébrer en 2008 le 300e
anniversaire du décès de François de Laval le 6 mai 1708 et le 350e
anniversaire de son ordination épiscopale comme vicaire apostolique de la
Nouvelle-France le 8 décembre 1658. Cette Année jubilaire François de Laval
2008 s’inscrira dans le cadre des Fêtes du 400e anniversaire de Québec. Le
comité organisateur de l’Année jubilaire veut durant cette année-là revisiter
et rajeunir l’image de François de Laval en insistant sur l’audace apostolique
d’un jeune évêque de 36 ans qui part comme missionnaire dans des terres
inconnues, qui y passera cinquante ans en service pastoral et où il s’éteindra
à l’âge vénérable de 85 ans.
Cette occasion conjuguée
à des recherches que j’avais entreprises en 1981 pour un article de la revue
Communio [1] où je tentais de brosser les articulations de la spiritualité
vécue par le bienheureux François de Laval, béatifié le 20 juin 1980 par le
pape Jean-Paul II, recherches que j’ai reprises dans un article de la revue
Cap-aux-Diamants [2] et dans mon livre sur François de Laval dans la collection
L’expérience de Dieu [3] dirigée par Fernand Ouellet m’a incité à relire
l’itinéraire spirituel de François de Laval et à en proposer une interprétation
nouvelle au risque de bousculer des images anciennes et bien ancrées.
Introduction
Le jeune évêque de 36 ans
qui débarquait à Québec le 16 juin 1659 portait en lui une maturité spirituelle
déjà remarquable. Lors d’une conférence du Père Alexandre de Rhodes à Paris en
1652 où celui-ci présentait son travail missionnaire en Asie du sud-est,
François de Laval avait littéralement été subjugué ainsi que quelques amis
auxquels il restera lié toute sa vie. Ce serait une trop longue histoire de les
suivre un à un. Il suffit pour notre propos de savoir que François de Laval se
signalait par son ardeur au point où c’est sur lui que se fixa le choix de la
Congrégation « De Propaganda Fide » comme vicaire apostolique au Tonkin en 1653
sous les recommandations entre autres de saint Vincent de Paul [4]. Le jeune
homme de 30 ans alors n’eut rien de plus pressé que de se préparer à ce
ministère. Comment le faire ? Ses contacts le menèrent à fréquenter un groupe
guidé par un laïc à Caen en Normandie, Monsieur Jean de Bernières-Louvigny [5]
qu’il fréquenta de 1654 à 1658. Ces années furent au dire de son premier
biographe, Bertrand de La Tour, une initiation et un apprentissage spirituels
qui le marquèrent pour toute sa vie [6].
Pendant cette période, la
situation politique et les tracasseries de tous genres retardaient son départ.
Finalement, le 3 juin 1658, la Congrégation « De Propaganda Fide » par
l’intermédiaire d’Anne d’Autriche et de concert avec le roi Louis XIV demanda
au jeune François d’accepter de se diriger vers la Nouvelle-France où les
jésuites, missionnaires avant tout, désiraient qu’un évêque et des prêtres
diocésains prennent en charge le service pastoral des gens établis sur place :
colons, marchands, commerçants, militaires et communautés religieuses
féminines.
François de Laval issu du
Collège de La Flèche [7] fondé par Henri IV en 1604 après le retour des
jésuites en France l’année précédente leur paraissait le candidat idéal. Il
était imprégné de l’esprit qui animait la Compagnie de Jésus, ouvert aux
tendances nouvelles et solidement formé en philosophie et en théologie qu’il
avait étudiées au Collège de Clermont à Paris. Que faire devant cette demande ?
François se décida tout de go : « Servir en Asie ou en Nouvelle-France »
qu’importait, puisque l’appel venait de la même source.
Disponible, il reçut
l’ordination épiscopale le 8 décembre 1658 dans une chapelle aujourd’hui
disparue de l’Abbaye St-Germain-des-Prés à Paris et il s’embarqua pour Québec
le 12 avril 1659.
C’est à partir de ce
point de départ où on rencontre un homme encore jeune rempli de rêves et
d’audace évangélique ayant déjà acquis une forte identité spirituelle que nous
proposerons une lecture nouvelle de son itinéraire spirituel. François de Laval
a été mêlé à tant de questions controversées, de querelles même, que celles-ci
ont retenu longuement l’attention des historiens. Son itinéraire personnel de
croyant n’a pas suscité le même intérêt. À la décharge des historiens qui ont
précédé, il faut dire que François de Laval ne leur a pas rendu la tâche
facile. Les traces de ses grâces personnelles sont peu nombreuses quoique très
éclairantes. Les écrits spirituels sont minimes si on le compare à ceux de sa
contemporaine Marie de l’Incarnation [8].
D’où la question qui m’a
habité tout au long de ma réflexion préparatoire à cet exposé : faut-il
réserver la vie mystique et les états mystiques aux écrivains mystiques ?
Pourquoi le bienheureux François de Laval ne ferait pas partie de la famille
des mystiques chrétiens ? En effet, le baptisé doit-il choisir entre « être
mystique » et « être un ou une mystique » ? De là le titre de cet exposé :
François de Laval : pasteur et mystique. Essayons de suivre avec les moyens que
nous avons un itinéraire mystérieux où un sujet mystique émerge et se
constitue.
Notre parcours se fera en
trois temps. Nous commencerons par situer le chemin de « désappropriation »
qu’a suivi François de Laval, chemin essentiel à l’émergence d’un sujet
mystique, puis en second lieu nous verrons apparaître et se consolider ce sujet
mystique chez François de Laval à travers un « pur abandon » qui a toutes les
caractéristiques d’un passage aux états mystiques plus élevés et, enfin, nous
verrons le bien-fondé de cette nouvelle lecture de l’itinéraire spirituel de
François de Laval qui nous posera la question de l’appel à la vie mystique.
1.0 Le chemin de la «
désappropriation »
Les auteurs anciens
devant les détachements, les déracinements et les purifications qu’ils
observaient chez François de Laval les ont lus sur le registre de l’ascèse, de
la mortification, de l’austérité. Ils n’en ont retenu, hélas! que le caractère
moral sans voir que leur signification pouvait se lire sur un autre registre :
celui du déracinement nécessaire au passage aux états mystiques, celui des
purifications actives et passives du sens et de l’esprit pour reprendre le
vocabulaire de Jean de la Croix et de l’école carmélitaine de spiritualité.
1.1 Le mouvement
essentiel à l’émergence d’un sujet mystique
Comment se fait
l’émergence d’un sujet mystique? D’après les écrivains mystiques, le
développement d’une expérience mystique débute par un détachement des biens
sensibles puis des biens intelligibles et se caractérise principalement par le
retournement (conversion) vers Dieu, avec lequel la personne souhaite s'unir
par les liens de la charité dans l’ « union d’amour » qui est une union de
volontés où tout ce que Dieu veut la personne le veut sans conditions [9]. Pour
ce cheminement fait de « nuits » et de « purifications » qui préparent la
réception de cette « grâce » de vivre sa relation à Dieu sous le mode mystique
les étapes sont nombreuses. Thérèse d’Avila les décrit sous la forme de «
Demeures » en employant l’image du « Château intérieur », tandis que Marie de
l’Incarnation les nomme « États d’oraison ». Les moments d'intensité, reliés
très souvent à une conversion ou à une découverte de Dieu, ressemblent à
première vue à des « expériences mystiques » mais ils n'en sont pas encore. Ils
sont des étapes préparatoires. Le passage à la sphère mystique, selon tous les
maîtres spirituels chrétiens, survient toujours après une période plus ou moins
longue de « nuits » ou de « purifications ». L'expérience mystique, dans ce
sens, est un aboutissement et non un point de départ.
L'union transformante ou
l’union d’amour désirée par la personne en cheminement n'est effective que si
la foi et la charité sont à la base de ce désir de la personne qui espère la
venue de ce don, de cette grâce. Ainsi, la vie contemplative et la vie
apostolique sont l'une et l'autre des voies par lesquelles la grâce de Dieu
peut opérer et aboutir à l'expérience mystique.
L’expérience mystique
comme toute expérience spirituelle suit donc un développement fait de passages,
de « nuits » et il n’y a pas de modèle unique. Ainsi, certaines descriptions
qui placent telle ou telle étape avant telle autre ne se vérifient pas dans
tous les cas. Nous en avons un bel exemple dans l’itinéraire mystique de Marie
de l’Incarnation qui ne respecte pas les descriptions que donne saint Jean de
la Croix. En effet, par deux fois après avoir vécu la grâce du « mariage
spirituel », Marie de l’Incarnation expérimente des « purifications » ou des «
nuits » passives [10], alors que dans le schéma de saint Jean de la Croix,
celles-ci devraient normalement précéder le « mariage spirituel ».
Ce chemin de
purifications n’a pas été épargné à François de Laval. Permettez-moi d’en
tracer maintenant le parcours inspiré par la désappropriation [11].
1.2 Le parcours de François
de Laval
François de Laval situe
la désappropriation sur un plan moral et psychologique d'abord. C'est
l'abnégation de soi-même selon l'Évangile, mais dans une perspective de partage
et de soutien fraternel. En effet, même si François de Laval nous a livré peu
de choses sur son expérience intérieure, il ne semble pas exagéré de dire que
le chemin de la désappropriation lui a permis, au témoignage de la bienheureuse
Marie de l’Incarnation, de parvenir à un "sublime degré d'oraison"
[12].
Pour François de Laval la
désappropriation ne réside pas seulement dans ses aspects restrictifs et
privatifs. Elle ouvre un espace de liberté pour le partage et le soutien
mutuel. C'est pour cette raison même que François de Laval va insister sur la
mise en commun des ressources et des biens pour les prêtres de son Séminaire.
Bertrand de Latour rapporte ces propos de M. des Maizerets, second supérieur du
Séminaire, qui disait que: "le prélat ne faisait rien de considérable que
de concert avec nous tous. Nos biens étaient communs avec les siens. Je n'ai
jamais vu faire parmi nous aucune distinction du pauvre et du riche, ni
examiner la naissance et la condition de personne, nous regardant tous comme
frères" [13].
La désappropriation
implique donc toujours un partage matériel en vue de la communion fraternelle.
C'est le sens profond de la donation de ses biens au Séminaire que fit François
de Laval en 1680. Il voulait "que tout le clergé ne fit qu'une
famille" et qu'on ne se départisse jamais "de la désappropriation qui
laisse tout en commun entre les mains du supérieur" [14]. Cependant, bien
entendu, la désappropriation garde toujours un caractère de détachement
ascétique. Elle entraîne, en effet, certaines restrictions et certains
renoncements que le bienheureux François de Laval n'a pas fuis. Le frère
Houssart qui fut au service de Mgr de Laval pendant les vingt dernières années
de sa vie se plaît à énumérer les pratiques concrètes de pénitence du vieil
évêque [15].
Mais au-delà de ces
pratiques, il y a un esprit de dénuement évangélique que François de Laval et
les ecclésiastiques qu'il amène avec lui à Québec en 1659 avaient en commun.
Ils avaient été formés à l'école de Monsieur de Bernières à Caen et ils
"portèrent dans le Nouveau-Monde l'esprit qu'ils y avaient pris", dit
le premier biographe du bienheureux François de Laval, Bertrand de Latour [16].
Celui-ci parle d'un "grand système de désappropriation" et donne six
maximes spirituelles qui en sont la base. Elles se ramènent à celle-ci:
"Nous n'avons pas de meilleur ami que Jésus-Christ. Suivons tous ses
conseils, surtout ceux de l'humiliation et de la désappropriation du
coeur" [17].
Dans cette perspective,
la désappropriation ne se limite pas à son côté ascétique, elle porte en
elle-même un jugement de valeur sur la relativité du créé caractéristique du
cheminement mystique [18]. Monsieur de Bernières avait donné par écrit à ce
qu'il appelait l'Ermitage de Québec ou les frères du Canada des règles dont la
première se lit comme suit: "Dieu est notre centre et notre dernière fin.
Nous sommes créés pour le posséder, non seulement dans le ciel, mais aussi sur
la terre. Tout le désir de Dieu même est de réunir la créature au Créateur,
séparés par le péché et l'affection aux choses créées. La vie n'est qu'un
passage pour arriver à cette heureuse fin. Les Chrétiens ne doivent avoir
d'autre objet que de s'écouler en Dieu, comme les fleuves dans la mer. C'est la
vérité fondamentale dont nous devons être fortement persuadés et pénétrés d'une
manière active" [19]. On ne peut mieux exprimer ce jugement de valeur sur
la relativité du créé. Au sortir d'une maladie qui avait failli l'emporter, François
de Laval réaffirme à son ami Henri-Marie Boudon (1624-1702) la conviction
profonde qui sous-tend son expérience de Dieu lorsqu'il écrit : "C'est en
cet état qu'on reconnaît la vérité qu'il n'y a que Dieu seul et que tout le
reste n'est rien qu'un pur néant" [20].
Le bienheureux François
de Laval a tenu toute sa vie à vivre un détachement prononcé qui allait bien
avec son tempérament, mais c'était aussi la conscience très vive de la grandeur
de Dieu qui habitait cette attitude. Pourquoi ne pas y voir l’entrée
progressive dans une voie mystique à laquelle, après bien des purifications, il
s’abandonnera totalement?
Dès son arrivée, Marie de
l'Incarnation, à Québec depuis déjà vingt ans, l'avait bien perçu. Elle
écrivait à son fils le 17 septembre 1660: "[Mgr notre Prélat] est
infatigable au travail; c'est bien l'homme du monde le plus austère et le plus
détaché des biens de ce monde (...) il est mort à tout cela" [21]. Le
jeune évêque est déjà sur un chemin où la grâce de Dieu pourra se manifester de
façon particulière. Le terrain est propice à l’émergence d’un sujet mystique.
Poursuivant dans cette
ligne d’interprétation, pouvons-nous aller plus loin et reconnaître le passage
au mode mystique qui assure non seulement l’émergence d’un sujet, mais qui le
confirme et l’établit dans cet état de façon permanente? Voilà maintenant la
question à laquelle je vais tenter d’apporter quelques réponses.
2.0 Un abandon mystique ?
D’entrée de jeu, il faut
constater que dans le cas de François de Laval le passage immédiat aux états
mystiques stables se fait dans un itinéraire de service. Comment alors peut se
constituer le sujet mystique ? Voilà une question que se posait, il y plusieurs
années, le Père Louis Lochet dans un livre où il montrait que l’itinéraire mystique
décrit par Jean de la Croix s’applique totalement à celui de l’apôtre et que
les nuits passives notamment sont le passage obligé de tout apôtre après un
certain nombre d’années sur le terrain [22] .
En effet, écrit Louis
Lochet, l’apôtre ou le pasteur est confronté tôt ou tard au dilemme suivant :
ou il continue de bâtir avec ses moyens humains un monde meilleur ou il accepte
de laisser de côté tous ses appuis humains. Devant ce dilemme, il peut se caser
ou s’activer, mais il peut aussi passer à une phase où il abandonne la
direction de tout au Seigneur.
2.1 L’abandon à Dieu de
François de Laval
L’abandon de l’apôtre
n’est pas sans résonances existentielles (psychologiques, affectives,
spirituelles et intellectuelles). Cet abandon se prépare de longue main dans
des nuits liées au ministère ou au travail apostolique et impose une
restructuration de toute la personne. C’est ce mouvement que je qualifie de
mystique. François de Laval l’a vécu de la façon suivante : profondément
imprégné de l’esprit d’abandon depuis son séjour à Caen où il se situe dans la
tendance mystique du « pur abandon », du « Dieu seul », il développe cette
attitude dans de multiples choix où il accepte les revirements de sa carrière.
Qu’en est-il alors de son « intérieur » ? Peu de traces. Mais il y en a
quelques-unes qui sont des plus parlantes. Permettez-moi d’en citer l’une ou
l’autre.
Dans les principaux
événements de sa vie, François de Laval recherche promptement leur
signification spirituelle soit pour son oeuvre pastorale, soit dans son
itinéraire spirituel personnel. Il s'en ouvre à son ami Henri-Marie Boudon
auquel il écrit en 1677: "Tout ce que la main de Dieu fait nous sert
admirablement, quoique nous n'en voyions pas sitôt les effets. Il y a bien des
années que la Providence conduit cette Église, et nous par conséquent, par des
voies fort pénibles et crucifiantes tant pour le spirituel que pour le
temporel. Pourvu que sa sainte volonté soit faite, il ne nous importe"
[23].
"Il y a longtemps
que Dieu me fait la grâce de regarder tout ce qui m'arrive en cette vie comme
un effet de sa providence" [24]. Le "fond de l'âme" du
bienheureux François de Laval émerge avec beauté dans cette phrase qui est des
plus révélatrices de son expérience spirituelle. Il l'a laissé tomber dans une
lettre au P. de la Chaize en 1687 au moment où, démissionnaire, il sollicitait
du Roi la permission de revenir au Canada.
Devant le refus du Roi de
le laisser partir pour le Canada en 1687 il écrira: "Il est bien juste ...
que nous ne vivions que de la vie du pur abandon en tout ce qui regarde au
dedans comme au dehors" [25]. Je reviendrai sur ce texte un peu plus loin.
Et devant des tensions
qui se font jour entre le Séminaire et le nouvel évêque, Mgr de St-Vallier,
l'évêque démissionnaire retenu à Paris se confie ainsi durant l'automne 1689 à
M. Milon du Séminaire des Missions-Étrangères de Paris: "La Providence de
Dieu, qui vous inspire de prendre avec tant de bonté part à notre peine et à
nos intérêts, nous oblige plus particulièrement de nous abandonner entièrement
à son adorable conduite et y mettre toute notre confiance" [26]. Et il
continue: "Vous jugerez bien, mon cher Monsieur, que s'il y a eu jamais
une croix amère pour moi, c'est celle-ci, puisque c'est l'endroit où j'ai toujours
dû être le plus sensible, je veux dire le renversement du Séminaire, que j'ai
toujours considéré, comme en effet qu'il l'est, comme l'unique soutien de cette
Église et tout le bien qui s'y fait ( ... ). Mais au milieu de toutes ces
agitations, nous ne devons pas nous abattre si les hommes ont du pouvoir pour
détruire, la main de Notre-Seigneur est infiniment plus puissante pour édifier.
Nous n'avons qu'à lui être fidèles et le laisser faire" [27].
Rappelons ici, à titre
d'exemple, les difficultés causées par son successeur, les deux incendies du
Séminaire (en 1701 et 1705), les infirmités dont il a été affligé pendant les
vingt dernières années de sa vie.
Après le premier incendie
du Séminaire en 1701, le supérieur de Paris témoignera de la constance qu'ont montrée
"nos Messieurs du Canada" et "surtout Mgr l'ancien Évêque, qui a
vu de ses yeux son ouvrage de quarante ans détruit en peu d'heures, en
bénissant Dieu sans verser une larme ni jeter un soupir, quoiqu'il soit âgé de
quatre-vingts ans" [28].
À mesure que Mgr de Laval
avance en âge, les fruits d'une ouverture amoureuse à la volonté de Dieu à
travers les événements se manifestent dans une constance, une patience et un
abandon qui grandissent.
Où se situe le passage à
l’abandon mystique?
Force nous est de le
supposer puisque les écrits n’en font pas de mention explicite. Il me semble
que dans la ligne de l’itinéraire que je viens de décrire, le passage s’est
fait de façon expérimentale lors des difficultés avec son successeur et avec le
Roi au moment de sa démission qui l’amènent à tout remettre à Dieu et à
abandonner tout appui humain. Voir détruire son œuvre et se voir refuser la
permission de revenir en Nouvelle-France seront pour lui l’occasion d’une
remise à Dieu dans la foi pure et d’un abandon sans retour possible comme dans
le cas du mariage spirituel. L’obscurité et la nuit accompagneront cet abandon,
mais ne le remettront jamais en question.
Je vous cite un des plus
beaux textes de François de Laval où cet état d’âme se révèle avec éclat. Il
s’agit d’une lettre écrite aux directeurs du Séminaire, la communauté de
prêtres qu’il avait fondée en 1663. Il s’ouvre le cœur à ceux-ci qui étaient sa
famille spirituelle et qu’il regardait comme ses frères. Cette lettre est datée
du 9 juin 1687. Mgr de Laval a alors 64 ans et il venait de recevoir la
nouvelle que le Roi lui interdisait de revenir en Nouvelle-France comme il le
souhaitait « pour avoir la consolation de mourir dans le sein de mon Église »
[29].
Je n'eus pas plus tôt
reçu ma sentence que Notre-Seigneur me fit la grâce de me donner les sentiments
d'aller devant le Très [Saint-] Sacrement lui faire un sacrifice de tous mes
désirs et de ce qui m'est de plus cher en ce inonde. Je commençai en faisant
amende honorable à la justice de Dieu, qui me voulait faire la miséricorde de
reconnaître que c'était par un juste châtiment de mes péchés et infidélités que
la Providence me privait de la bénédiction de retourner dans un lieu où je
l'avais tant offensé, et je lui dis, ce me semble de bon coeur et en esprit
d'humiliation, ce que le grand-prêtre Héli dit lorsque Samuel lui déclara de la
part de Dieu ce qui lui devait arriver: « Dominus est, quod bonum est in oculis
suis faciat ».
Mais comme la bonté de
Notre-Seigneur ne rejette point un coeur contrit et humilié et que humiliat et
sublevat, il me fit connaître que c'était la plus grande grâce qu'il me pouvait
faire que de me donner part aux états qu'il a voulu porter en Sa vie et en sa
mort pour notre amour, en action de grâces de laquelle je dis un Te Deum avec
un coeur rempli de joie et de consolation au fond de l'âme, car pour la partie
inférieure, elle est laissée dans l'amertume qu'elle doit porter.
C'est une blessure et une
plaie qui sera difficile à guérir et qui apparemment durera jusqu'à la mort, à
moins qu'il ne plaise à la divine Providence, qui dispose des coeurs comme il
lui plaît, apporter quelque changement à l'état des affaires. Ce sera quand il
lui plaira et comme il lui plaira, sans que les créatures puissent s'y opposer,
n'étant en pouvoir de faire que ce qu'elle leur permettra. Il est bien juste
cependant que nous demeurions perdus à nous-mêmes et que nous ne vivions que de
la vie du pur abandon en tout ce qui nous regarde au dedans comme au dehors.
Et il continue plus loin
:
Quoi qu'il en soit, c'est
de la main de Notre-Seigneur et de sa sainte Mère que nous devons tout recevoir
comme une grâce bien spéciale, et je puis dire pour moi la plus grande et la
plus précieuse que j'aie encore reçue de ma vie. Priez-les que j'en fasse un
saint usage et j'espère néanmoins qu'ils me feront la miséricorde de mourir en
Canada, quoique j'aie bien mérité d'être privé de cette consolation. Verumtamen
non mea sed Dei voluntas fiat. Je possède sur cela par sa bonté infinie une
paix profonde dans le fond de l'âme. [30]
2.2 L’empreinte mystique
permanente dans le sujet
La question maintenant se
pose pour François de Laval comme pour tout chrétien dont on reconnaît la
qualité de l’expérience commune de vie chrétienne : son abandon prend-il
véritablement une couleur mystique? L’expérience mystique est-elle hors de
portée dans l’itinéraire d’un pasteur?
Une première réponse se
situe dans le cadre du dynamisme inhérent à l’expérience chrétienne dont la
charité-agapè est l’essentiel incontournable. Le progrès spirituel n’a pas de
limite de ce point de vue et ainsi les plus hauts degrés de charité sont
accessibles à tous. C’est la vocation universelle à la sainteté que François de
Sales prônait et que le Concile Vatican II a mis en lumière dans le chapitre V
de la Constitution sur l’Église. La sainteté n’est pas la mystique et nombre de
saints et saintes ne semblent pas avoir connu les états mystiques. Leur vie
s’est déroulée dans l’exercice constant des vertus chrétiennes, dans le souci
des autres et dans la fidélité à la prière sans les remous et les nuits qui se
rencontrent dans un itinéraire mystique.
Ceci étant dit, pourquoi
limiter l’appel à la vie mystique à un groupe à part? Pourquoi en faire une
catégorie de baptisés distincte? Reconnaissant la gratuité de la grâce de Dieu
et les limites de nos perceptions, il faut se dire que la voie mystique est
possible pour tous. C’est pourquoi, je tenterai dans ce deuxième point de
montrer la naissance du sujet mystique chez François de Laval en utilisant les
signes que Jean de la Croix utilise dans ses écrits [31]. Il y a trois signes
qui figurent dans la Montée du Carmel et qui sont repris dans un ordre
différent dans la Nuit obscure [32]. Après un bref rappel, j’en ferai une
application à l’itinéraire spirituel de François de Laval.
Jean de la Croix indique
un passage majeur qui transforme les attitudes, les désirs et les attentes au
moment il parle de l’entrée dans les « nuits passives » caractéristiques des
étapes mystiques que Thérèse d’Avila situe à partir des quatrièmes Demeures. Ce
mode nouveau où « Dieu met la main » se caractérise par un détachement des
façons anciennes et humaines de vivre la relation à Dieu au profit d’un « mode
divin » où se joue le tout pour le tout et où l’issue devant laquelle se trouve
le sujet est la « foi pure ». Tous les appuis humains, toutes les ressources de
l’intelligence (de l’entendement, de l’esprit) et toutes celles des désirs (des
tendances, de l’appétit) deviennent inutiles et il ne reste que le saut dans
l’inconnu de la « foi pure ».
Cette remise totale à
Dieu, à l’Époux dira la mystique sponsale, engendre à travers maints
bouleversements et adaptations un abandon mystique où toute la personne est
prise et impliquée à tous les niveaux de son être et de ses facultés. Le corps
y est même engagé de plein fouet et les descriptions d’une Thérèse d’Avila ou
d’une Marie de l’Incarnation nous en donne un tableau saisissant.
Comment reconnaître
qu’une personne arrive à cet état nouveau dans son cheminement spirituel?
Reprenons les trois signes de Jean de la Croix: la difficulté de s’adonner à la
méditation méthodique, un certain affaissement psychologique où se manifeste
une lassitude et même une forme de dégoût et enfin une sollicitude amoureuse
envers Dieu. Les signes que décrit Jean de la Croix proviennent de son
expérience et de ses observations personnelles. Ils ne sont pas des absolus,
mais des critères de discernement. Ils demandent à être complétés par des
signes plus généraux comme, par exemple, le critère de la charité fraternelle
et les fruits de l'Esprit : bonté, joie, amour, longanimité, etc. (Ga 5, 25).
En utilisant ces signes, on doit faire attention à leur présence simultanée, à
leur concomitance, et être sensible au fait qu'ils peuvent apparaître dans des
ordres différents, notamment les deux premiers. Jean de la Croix lui-même ne
les présente pas dans le même ordre selon qu'il s'adresse aux «progressants» ou
aux «commençants». Ainsi dans La nuit obscure où il se place du point de vue du
cheminement dans l'oraison et où il s'adresse aux « progressants », c'est au
niveau de l'impuissance à méditer que l'entrée dans les voies de la
contemplation va commencer par se manifester. Tandis que dans La montée du
Carmel où il s'adresse aux « commençants » et où il adopte un regard plus global
s'intéressant non seulement au cheminement dans l'oraison mais au cheminement
de toute la personne dans la « refonte » de ses tendances (la partie sensitive
– les sens – l'affectivité) et de son entendement (la partie spirituelle –
l'esprit – la connaissance), il met en tête de liste le «manque de goût» pour
le créé.
Si nous tentons
d’appliquer à François de Laval ces trois signes, nous sommes en manque
d’indices vérifiables pour les deux premiers hormis le témoignage de Marie de
l’Incarnation cité plus haut qui affirmait que Mgr de Laval était rendu à « un
sublime degré supérieur d’oraison » [33]. Concernant la lassitude de tout, même
de son ministère, nous n’en avons pas de traces, ce qui ne l’exclut pas pour
autant.
Cependant, le signe le
plus important pour Jean de la Croix, celui de la sollicitude amoureuse envers
Dieu, s’impose avec force. Il est suffisant pour marquer cette entrée dans le «
pur abandon » où tout est remis à Dieu sans conditions et sans retour.
Ce troisième signe est
beaucoup plus sûr que les deux premiers qui ne sont pas toujours faciles à
discerner et à lire. Il s'agit ici de s'en remettre à Dieu avec amour sans se
préoccuper du reste. Cette « sollicitude amoureuse » est comme une présence à
Dieu qui en donne une connaissance générale, une perception globale qui inspire
toute la vie, qui donne une vigueur dans l'agir, dans l'engagement. C'est le
signe qu'on voit le plus chez les gens qui mènent une vie active dans une
profession, dans une famille etc., ou qui se consacrent à la pastorale ou à
l'apostolat. Il est facilement perçu par l'entourage.
Comme on l’a vu plus
haut, François de Laval a été sans cesse sur le qui-vive sur ce terrain.
L’itinéraire spirituel d’un pasteur le confronte à tout moment à des choix
pastoraux qui ont un retentissement important dans le sujet. Les quelques
textes que j’ai cités l’illustrent à merveille. Le moment que j’ai identifié
comme le seuil irréversible de la consolidation d’un sujet mystique, celui de
1687, ne peut à lui seul rendre compte du statut de ce sujet naissant, mais il
illustre à coup sûr, l’apparition d’un état stable dans lequel l’évêque
démissionnaire vivra le reste de ses jours.
Pourquoi ne pas rappeler
ici le mot de Bernard Lonergan, pour qui la réponse à la question « qui parle?
» est « la vie parle ». En effet, on pourrait peut-être appliquer au type de
situation que je viens de décrire, le concept d’« incarnate meaning », la «
signification incarnée », qu’a développé le Père Lonergan. Dans un article de
la revue Science et Esprit. Pierre Robert la décrit ainsi :
Spontanément, on
identifie le sens au sens des paroles, d'un écrit, d'un texte, celui qui est
porté par le langage. Mais il y a d'autres façons de porter un sens, ainsi les
gestes spontanés de l'intersubjectivité, l'art, le symbole et enfin la
signification incarnée…Ainsi y a-t-il un certain type de sens qui est constitué
par les gestes décisifs, par le sens d'une vie. La signification se trouve
alors dans ces gestes eux-mêmes et dans la trajectoire suivie. Elle est alors
plus pleine et concrète; ainsi est-elle dite incarnée. En ce sens, on dira que
« la vie parle », que tel geste est particulièrement significatif, qu'il est
révélateur. Et plus quelqu'un a cherché à vivre un idéal, plus il a fait ses
choix et orienté sa vie en fonction d'un dessein, plus alors cette vie se
trouve à incarner un sens. La signification s'accroît avec l'engagement comme,
à rebours, une vie laissée à la dérive est menacée d'insignifiance [34].
La question se pose
maintenant du statut de cet état dans la multitude des états mystiques décrits
par les écrivains mystiques. C’est ce que nous allons voir dans la dernière
partie de cet exposé en commençant par cerner de plus près le terrain de la
mystique et ensuite en proposant une interprétation adaptée à un itinéraire
comme celui de François de Laval qui ne peut être classé parmi les
écrivains/écrivaines mystiques.
3.0 Bien-fondé de cette
relecture de l’itinéraire spirituel de François de Laval
Commençons par rappeler
les sens du mot mystique.
3.1 Les sens du mot
mystique
Le sens premier du mot
réfère à ce qui est secret, caché (même famille que « mystère »). Dans le grec
profane, l'acception la plus ancienne et commune du mot mystikos n'a jamais que
ce sens général de « caché », « secret ». Il ne désigne jamais une expérience
spirituelle. Il a toujours un « sens objectif ». On l'a employé surtout dans
les religions à mystères. Certains chercheurs font dériver le mot « mystique »
du verbe myeô qui a donné « muet » et dont la racine signifie fermer, parce que
les initiés aux mystères devaient garder pour eux ce qu'ils connaissaient et
fermer la bouche [35].
Ainsi, le mot « mystique
» employé comme adjectif en vient à signifier l'effort de quelqu'un qui cherche
la présence de Dieu. L'attention se porte alors sur la personne, sur le sujet
qui découvre la présence cachée de Dieu dans sa vie, qui essaie de déceler la
présence du Christ à travers les Écritures et la liturgie, et le mot « mystique
» en vient à désigner petit à petit « l'expérience intérieure de la possession
de Dieu ». C'est sur ce « sens subjectif » qu'insiste Denys l’Aréopagite au VIe
siècle lorsque, dans sa théologie « mystique », il développe une voie «
apophatique » ou « négative » de connaissance de Dieu qui est au-delà de toute
vision, de toute connaissance. Pour Denys l’Aréopagite, une théologie «
mystique » nous renvoie à la personne elle-même dans sa quête de Dieu, et,
par-dessus tout à « la connaissance du Dieu mystérieux », c'est-à-dire une
connaissance de Dieu non pas tel que nous le définissent les enseignements des
théologiens de métier, mais une connaissance de Dieu tel qu'il se manifeste de
façon indéfinissable dans l'expérience des personnes individuelles.
Ce sens profond s'est
maintenu par la suite chez de nombreux écrivains chrétiens. Dans les traces de
Denys l’Aréopagite, on parlera volontiers de « connaissance mystique », «
d'amour mystique », de « vie mystique », etc.
Au XVIe siècle, il se
produit un pas important. L'adjectif « mystique » commence à être employé comme
substantif. On ne parle plus seulement d'une « théologie mystique », d'une «
lecture mystique » de l'Écriture, d'une « vie mystique », mais « d'un mystique
» ou « d'une mystique ». Cela fait une énorme différence et amène à créer de
plus en plus une classe de chrétiens qui serait à part. Il se produit comme un
durcissement de l'aspect subjectif déjà présent dans l'usage ancien. On en
vient insensiblement à « séparer le sujet de l'objet », pourrait-on dire. Cette
coupure et cette brisure, tout en développant l'attention au langage qui
exprime l'expérience mystique, a aussi contribué à mettre le focus sur les «
phénomènes mystérieux ou extraordinaires » qui accompagnent parfois
l’expérience mystique. On en vient même à réduire l'expérience mystique à ces
derniers, au XIXe siècle notamment. Les « mystiques » deviennent un vaste champ
de recherche, de terrain d'observation à partir des phénomènes extraordinaires observables
comme extases, lévitations etc.
En résumé, l’expérience
mystique, dans la tradition chrétienne, désigne simultanément la grâce
elle-même que Dieu fait à une personne, le contenu de celle-ci (les réalités
surnaturelles de la foi), la conscience qu'on peut en avoir, et le mode de
présence de Dieu.
3.2 Mystique et
écrivains/écrivaines mystiques
Mais comment reconnaître
la naissance et le développement de cette expérience à nulle autre pareille
dont témoignent les textes mystiques? Voilà la question qui se pose. Une façon
courante de faire ce repérage c’est d’investiguer les récits des personnes et
leurs témoignages, notamment concernant leur cheminement dans les voies de la
prière. L’interprète de l’expérience alors sera le dire et le langage puisqu’en
elle-même l’expérience a un caractère indicible, ineffable.
La question du dire et du
langage est-elle essentielle à l’expérience mystique ? Certains le pensent.
Joseph Beaude exprime cette constatation de façon imagée en écrivant : « La
mystique n'est pas une spécialité d'écrivains. Mais elle rend écrivains ceux
qu'elle pousse à devoir dire [36] ».
Ainsi chez la personne
qui jouit d'une expérience de type mystique, les mots, les similitudes, les
images quoique inaptes à dire la réalité deviennent un canal privilégié pour
communiquer quelque chose de ce qui est expérimenté par la personne. Autre
chose est d’avoir l’expérience, de la percevoir et de pouvoir l’expliquer
constate Thérèse d’Avila et elle s’en explique longuement au chapitre XII de sa
Vie [37] Chez le lecteur et l'observateur le langage deviendra une merveilleuse
clef pour s'introduire dans le champ de la mystique.
Qu’en est est-il lorsque
cette clef fait défaut ?
Jean de la Croix tout en
partageant cette conviction que les traces de l’expérience mystique prennent
forme dans le dire et le langage principalement constate que ces traces peuvent
aussi prendre la forme de ce qu’il appelle des « effets d’amour ».
En effet, commentant pour
Anne de Jésus les strophes poétiques du Cantique spirituel, il note dans le
prologue de son commentaire qu’il se gardera de réduire les images, les
similitudes et les comparaisons utilisées « à un sens qui ne conviendrait pas à
ce que chacun peut apprécier. Ainsi, tout en en donnant jusqu'à un certain
point l'explication, je demande qu'on ne se croie pas tenu de s'y attacher
[38]».
Et il ajoute cette phrase
riche d’expérience et qui touche directement notre propos : « En effet, la
sagesse mystique qui opère par l'amour – et c'est d'elle qu'il est question
dans ce chant – n'a pas besoin pour produire dans l'âme ses effets d'amour
d'être entendue d'une manière distincte. Il en va d'elle comme de la foi, qui
nous fait aimer Dieu sans le comprendre [39] ».
C’est ce constat de Jean
de la Croix qui nous ouvre une porte sur une autre façon de reconnaître
l’irruption du Tout Autre dans une vie. En effet, que dire de ces personnes où
transparaissent les « effets d’amour » ? Sans être des mystiques, ne
pourraient-elles pas être mystiques ?
3.3 Mystique et sainteté
Pour répondre à cette
question, il faut prendre soin de rappeler que mystique et sainteté ne sont pas
identiques, ni coextensifs : la sainteté ne s'identifie pas à la mystique, mais
les mystiques sont souvent de grands saints. Il reste que l’expérience mystique
chrétienne ne peut se dissocier du dynamisme du baptême, puisque le dynamisme
du baptême n’a pas de frontière.
Si nous nous plaçons sur
le terrain de l’expérience chrétienne, il faut tenir fermement à la continuité
de l’expérience chrétienne commune avec l’expérience mystique vécue par un
baptisé. C’est pourquoi, j’ai toujours apprécié une distinction que le Père
André Ravier proposait dans la Mystique et les mystiques [40]. La distinction
du Père Ravier permet de respecter l’éventail des états mystiques sans enlever
à l’expérience commune toute sa densité et sa richesse. La solution du Père
Ravier est simple. Tout en marquant la continuité entre l’expérience chrétienne
commune et l’expérience mystique, ce qui fait de tout baptisé un mystique en
puissance, qu’il appelle la mystique « ordinaire », il fait place aux écrits
mystiques qui témoignent selon lui d’un chemin qu’il appelle « trans-ordinaire
». Ces mystiques écrivains perçoivent et expliquent par un dire « quelle que
soit la forme de cette parole, musicale, discursive, orale ou poétique » [41]
la grâce offerte à tous qu’ils ont accueillie dans la foi.
Ainsi, en empruntant les
catégories du Père Ravier, on dirait que François de Laval est amené sur les
sentiers d’une vie mystique « ordinaire » par opposition à une vie mystique «
trans-ordinaire » qui émane à travers les écrivains mystiques.
François de Laval n’est
pas un écrivain mystique comme Marie de l’Incarnation, il est simplement un de
ces baptisés qui croit que Dieu est avec lui et en lui et, par grâce, il a
conscience d'une communion avec lui. Il a la révélation perceptible d'une
présence. Il anticipe d'une certaine façon ce que sera la rencontre avec Dieu
dans la gloire du ciel. Il vit une union de Personne à personne unique que
racontent les mystiques sous des images comme celle du mariage spirituel. Il
expérimente dans ses facultés et dans con corps même la rencontre entre deux
êtres mus par un même désir. On pourrait lui appliquer ce que le Père Louis
Roy, professeur au Boston College, écrit de la conscience mystique qui permet
de voir Dieu en toutes choses et toutes choses en Dieu, et de s'engager dans la
société avec une motivation et un détachement plus respectueux de la nature et
des humains [42].
Ainsi, sans enlever rien
aux écrivains et écrivaines mystiques, force nous est de reconnaître qu’un
grand nombre de baptisés et baptisées font la rencontre de Personne à personne
dans l’union d’amour sans pouvoir l’exprimer ou en l’exprimant bien pauvrement
et tout à fait occasionnellement.
Pourquoi, la mystique ne
serait-elle pas ouverte à tous ? [43]
Pourquoi pas ? Il en va
de la vérité du choix de vie à la suite de Jésus Christ. Fermer les sommets de
la vie mystique à la cohorte des sans noms et des sans voix ne peut rendre
compte de l’universalité de l’appel à la rencontre personnelle avec le
Bien-Aimé, Celui en qui le Père a mis tout son amour. « Depuis le jour où je
suis descendu sur lui avec mon Esprit au sommet du Thabor, en prononçant ces
paroles : ‘Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui j’ai mis toutes mes
complaisances, écoutez-le’ (Mt 17, 5), j’ai mis fin à tout autre enseignement, à
toute autre réponse, je les lui ai confiés. Écoutez-le car je n’ai plus rien à
révéler, plus rien à manifester…Si tu souhaites que je te découvre des choses
cachées…jette seulement les yeux sur lui et tu trouveras renfermés en lui de
très profonds mystères, une sagesse et des merveilles de Dieu suivant cette
parole de mon Apôtre ‘En lui qui est le Fils de Dieu sont cachés tous les
trésors de la sagesse et de la science de Dieu’ » [44] écrit Jean de la Croix
dans un des plus beaux chapitres de la Montée du Carmel (Livre 2, chapitre 22)
dont on lit un extrait à l’Office des lectures le jour de sa fête le 14
décembre.
Le Père de Lubac dans sa
préface au livre La mystique et les mystiques se range dans le même camp
lorsqu’il écrit :
La mystique chrétienne est
dans la logique de la vie de foi. Elle se nourrit d'autre chose que
d'elle-même. Elle reçoit le mystère, non pour être professé des lèvres, ou pour
être compris de la seule intelligence, mais, au sens propre pour être vécu.
[Elle] fait passer le mystère du plan de l'instruction religieuse à celui de la
vie intérieure [45].
Un fait raconté par Carlo
Carretto à propos de la vie contemplative me revient à l’esprit. À un moine
visiteur qui voyait les novices travaillant aux champs et qui demandait à Carlo
Carretto : « Explique-moi une chose, comment est-il possible de parler de
contemplation lorsque ces jeunes gens reviennent, le dos rompu par la fatigue,
après huit heures de travail, comment est-il possible de contempler ? »,
celui-ci répondait :
On ne pourrait donc
contempler que dans le silence de ton monastère, dans tes corridors calmes et
pacifiques ! Alors les pauvres mamans ne peuvent devenir contemplatives… ? Et
le mineur qui sort de la mine avec un mal de tête ne pourra être un
contemplatif ? S’il en était ainsi Dieu ne serait pas juste, Un Dieu de ce
genre ne m’intéresserait pas, un Dieu qui n’aimerait pas les pauvres, les
paysans, les mineurs, qui n’accorderait pas la contemplation à une pauvre
maman… Je voudrais savoir comment tu contemples, toi. J’ai l’impression que tu
ne contemples rien parce que tu me poses cette question, parce que tu ne sais
même plus ce qu’est la nature de la contemplation. La contemplation n’est pas
un acte intellectuel, elle est un acte d’amour. [46]
Pourquoi n’en serait-il
pas ainsi de la grâce de l’union mystique ? Un Dieu qui ne se laisse goûter que
par ceux et celles qui peuvent le comprendre et le dire ne m’intéresse pas. Un
Dieu lié à mes mots pour ses visites sans paroles, n’est pas le Dieu de
Jésus-Christ. Un Dieu enfermé dans les réduits du cosmos et des facultés
humaines, n’est pas le Tout Autre, l’Indicible [47].
On le voit, faire place
aux mystiques sans nom n’enlève rien aux écrivains/écrivaines mystiques. Au
contraire, c’est reconnaître la puissance sans limites de la grâce de Dieu dans
une vie sans états extraordinaires, au ras de la vie courante et totalement
imbibée de la présence/absence du Tout Autre.
Oui, François de Laval a
été mystique, même s’il n’a pas été un mystique. Être mystique ou être un
mystique ? La question ne se pose pas dans un itinéraire de sainteté
chrétienne. C’est l’appel à la sainteté qui est premier et celle-ci est ouverte
à tous. Vatican II a rappelé avec à propos que la sainteté chrétienne «
s'exprime différemment en chacun de ceux qui, dans la conduite de leur vie,
parviennent en édifiant le prochain, à la perfection de la charité » [48]. La
vocation mystique, partie intégrante de l’expérience chrétienne commune, ne se
transforme en itinéraire mystique personnel où l’émergence d’un sujet mystique
apparaît que par grâce particulière. Certaines dispositions naturelles peuvent
favoriser cette émergence, mais elle survient, elle advient comme un don que le
sujet n’a pas recherché, qu’il reçoit et accueille dans la foi. Sa vie concrète
n’est pas changée, mais elle devient pour lui ou pour elle un lieu de rencontre
du Dieu Autre qui blesse et comble en même temps que le critère de vérification
d’une sainteté qui se manifeste dans les fruits de charité et de service. « Si
je n’ai pas la charité je ne suis plus qu’airain qui sonne ou cymbale qui
retentit… La charité prend patience… Elle excuse tout… La charité ne passe
jamais... Maintenant demeurent foi, espérance et charité, mais la plus grande
d’entre elles c’est la charité » [49].
Conclusion
Loin de moi la prétention
de vous avoir présenté le véritable itinéraire spirituel de François de Laval.
Je n’ai fait que dire ce qui est présent en moi de cet itinéraire inaccessible,
car comme l’écrit saint Augustin au livre XI des Confessions: « …tout récit
vrai du passé fait sortir de la mémoire non point les événements passés tels
quels, mais des mots conçus d'après les images imprimées dans l'esprit comme
des traces lors de leur passage le long des sens. » [50].
La lecture de la vie des
saints, la célébration de leur souvenir, la réminiscence de leurs actions, la
vénération de leurs restes etc. apportent beaucoup, mais elles ne suffisent pas
à les rendre actuels. Je me dois d’entrer dans un processus de relecture
spirituelle. Ce processus m'invite à suivre un chemin où se déploie la
dynamique du sujet-interprétant qui reçoit et recueille à travers des traces de
l'expérience passée quelque chose du non-dit, de l’indicible, un "je ne
sais quoi", un murmure de la Source. Lorsque je rappelle la vie de
François de Laval (1623-1708) ou de Marie de l'Incarnation (1599-1672), ou de
Marguerite Bourgeoys (1620-1700) ou de Jean de Brébeuf (1593-1649), je puis en
dessiner les contours dans l'espace et dans le temps, mais je n'ai là que les
traces d'un ailleurs qui reste sans cesse ouvert pour moi, sujet-interprétant.
La question de
l'actualité d'une expérience spirituelle d'un saint ou d'une sainte nous
renvoie non seulement à lui ou elle, mais elle enclenche un processus de
"réception" en nous. C'est le "sujet-lecteur" qui fait
l'actualité de l'histoire d'une vie, d'un saint, d'une sainte, d'un itinéraire
spirituel passé mais redevenu présent sous une forme autre.
La mémoire est la
condition même de l'actualité de la présence de nos devanciers. C'est à partir
de la relecture des traces laissées qu'un visage de saint ou de sainte se
dégage avec plus ou moins de netteté pour nous. Ce visage varie comme peuvent
varier les représentations picturales. Les statues et images de Thérèse de
l'Enfant-Jésus en sont une très bonne illustration. Elles ne se présentent pas
comme les photographies d'elle que nous avons, elles les interprètent selon
telle ou telle aspect d’elle. Et que dire de l’art de l’icône ? Ces variations
du visage des saints et des saintes conditionnent leur actualité. Pas de
variations, pas de relectures, absence d'actualité, traces perdues, saints et
saintes ignorés et laissés dans l'oubli. La mémoire ne serait-ce pas selon un
mot paradoxal qu’on prête à Fernand Dumont « se souvenir d’où l’on s’en va »
[51].
Il n'y a pas de mémoire
sans agir, sans que nous ne nous disions quelque chose de nous-mêmes dans les
réalisations, les joies, les peines, les inquiétudes, et les questionnements de
notre vie. C’est ce que j’ai essayé de faire bien modestement dans cette
conférence. Le souvenir de François de Laval ne fait donc pas que célébrer des
faits de sa vie, il "reçoit" maintenant et "raconte" dans
notre aujourd'hui ce que, grâce à lui et à sa suite, nous pouvons et voulons
être: des témoins de l'Évangile et des disciples de Jésus. Oui! « se souvenir
d’où l’on s’en va ».
Hermann Giguère, ptre,
p.h.
Supérieur général du
Séminaire de Québec et professeur associé à la Faculté de théologie et de
sciences religieuses de l'Université Laval
14 octobre 2006
[1]"L'itinérairespirituel
d'un Bienheureux" dans Françoisde Laval, premier évêque de
Québec numéro spécial hors sérieprintemps 1993 de la revue Cap-aux-Diamantspp.
16-20.
[3] GIGUÈRE,
Hermann, Les
principaux documents concernantFrançois de Laval ont été rassemblés dans l'ouvrage
suivant: Quebecen. Beatificationis et Canonizationis Ven. Servi
Dei Francisci de Montmorency-Laval episcopi Quebecensis (+1708)Altera nova
positio super virtutibus ex officio critice disposita (Sacra Rituum
Congregatio, Sectio historica,93), Polyglottis Vaticanis,
1956. Dansle cours de l'article, Altera nova positio désigneracet
ouvrage. Celui-ci reproduit la plusancienne biographie de Mgr de
Laval, Mémoiressur la Vie de M. de Laval, premier évêque de Québec, de
Bertrand deLa tour publiée à Cologne en 1761. Pourla vie de Mgr de
Laval on pourra se référer avec profit à Auguste GOSSELIN, Vie de Mgr de
Laval, 2 vol., Québec,1890; Émile BÉGIN, François de
Laval, Québec, 1959 et surtoutà l'excellent article d'André VACHON dans
le DictionnaireBiographique du Canada, vol. 11 de 1701 à 1740, Les
Presses del'Université Laval/University of Toronto Press, 1969, pp. 374-387.
[9] Montée
du Carmel,livre II, chapitre 5 dans JEAN DE LACROIX, Œuvres, traduction
par Mère Mariedu Saint-Sacrement, carmélite déchaussée. Édition établie,
révisée et présentéepar Dominique Poirot, carme déchaux, Paris, Cerf, 1990, pp.
644-648.
[10] Cinquième
étatd’oraison à son entrée au Noviciat des Ursulines en 1631 et Neuvième
étatd’oraison qui s'attache à la périodedu 1er août 1639 à l'octave de
Noël 1645 couverte par le douzième étatd'oraison
[11] GORÉ,Jeanne-Lydie,
« Désappropriation » dans Dictionnairede spiritualité ascétique
et mystique, t. III , Beauchesne, Paris,1957, col. 518-529
[12] Lettre
de Marie del'Incarnation à son fils Dom Claude Martin, 1659, dans Altera
novapositio, p. 53.
[13] Bertrand
deLa Tour, Mémoires surla Vie de M. de Laval, premier évêque de
Québec, Cologne, 1761, dansAltera nova positio, p. 740.
[14] Altera
novapositio, p. 54.
[22], (Foi vivante, 17) Cerf, Paris, 1966,
pp.83-116.
[23] Lettre
de Mgr deLaval à Henri-Marie Boudon, 6 novembre 1677, dans Altera
novapositio, p. 207.
[24] Lettre
de Mgr de Lavalau P. de la Chaise, 1687, dans Altera nova positio, p.407.
[25] Lettre
de Mgr deLaval aux directeurs du Séminaire de Québec, 9 juin 1687, dans Altera
nova positio, p. 411.
[26] Lettre
de Mgr deLaval à M. Milon, automne 1689, dans Altera nova positio, p.452.
[27] Ibidem, p.
452.
[28] Lettre
de M.Brisacier à M. Charmot, 1er mai 1702, dans Altera nova positio, p.619.
[29] Lettre
à M. de Seigneley, Ministre duRoi Louis XIV, mai 1687, dans Altera
novapositio, p. 408.
[30] Extraits
d'une lettre aux directeurs duSéminaire de Québec, 9 juin 1687dans Altera
nova positio, p. 410-416
[31] La
perspective de Jean de la Croix est beaucoupplus large que celle de
Thérèse. Iltouche l'ensemble de la personnalité et non seulement
l'oraison. Il va le faire du point de vue de larestructuration de la
personne par la grâce de Dieu qui fait apparaître lacréature nouvelle dans
toute sa splendeur, ce qui l'amène à décrire longuementles purifications. Il y
a peu de mystiques qui ont cette pénétration et cetteanalyse des nuits comme
Jean de la Croix le démontre dans la description qu'ilfait des purifications
passives ou des nuits passives. Il faut noter que Jeande la Croix s'adresse à
des carmélites (et des carmes) qui ont déjà pris unedécision de vivre
évangéliquement, qui ont une option fondamentale pourl'Évangile et pour le
Christ. Cette première conversion est toujours supposéedans ses écrits. En
bref, on pourrait décrire ainsi la restructuration de la créaturenouvelle. Au point
de départ il y a la décision de servir Dieu (premièreconversion) qui est suivie
d'une adaptation plus ou moins longue au plan del'affectivité ( nuit active des
sens) et au plan de l'esprit (nuit active del'esprit). Survient alors un
passage des plus importants où "Dieu met lamain" en invitant la
personne à se livrer totalement et sans retour. Cepassage est suivi encore là
d'une adaptation à un environnement spirituelnouveau qui se révèle petit à
petit. L'affectivité doit s'y ajuster (nuitpassive des sens) ainsi que la
partie spirituelle de l'être humain (nuitpassive de l'esprit). Le résultat de
ce cheminement et de ces purifications estl'expérience de l'union transformante
avec Dieu, de "l'union d'amour"(Montée du carmel, livre II,c.5).
[32] La
montée du Carmel , L. II, chap. XIII ou XII dans certaineséditions.
et La nuit obscure,L. I, chap. IX
[33] Lettre
de Marie del'Incarnation à son fils Dom Claude Martin, 1659, dans Altera
novapositio, p. 53.
[34] ROBERT,
Pierre, « Recherchessur la notion d'Incarnate Meaning chez
BernardLonergan», Église et Théologie, no 26,1995, p. 222-223.
[35] BERNARD,Charles
André, Le Dieu des mystiques, t 1,Paris, Cerf, 1994, p. 188.
[36] Beaude,
Joseph, La mystique, Paris/Montréal, Cerf/Fides,collection
« Bref », no 27, 1990, p. 35.
[37] THÉRÈSE
D’AVILA, Œuvres complètes, Seuil, Paris, pp.
[38] JEAN
DE LA CROIX,Œuvres, traduction par Mère Marie duSaint-Sacrement, carmélite
déchaussée. Édition établie, révisée et présentéepar Dominique Poirot, carme
déchaux, Paris, Cerf, 1990, p. 341.
[39] Ibid.
p. 342.
[40] RAVIER,
André, « Vie humaine et vie divinedans la mystique chrétienne »,
dans La Mystiqueet les mystiques, Paris, DDB, 1965, surtout p. 124-128.
[41] Thérèse NADEAU-LACOUR, Le
temps de l'expériencechrétienne. Perspectives spirituelles et éthiques, préfacede
Jean Ladrière, Montréal/Paris, Médiaspaul, 2002, p. 132.
[42] ROY,
Louis, Le sentiment de transcendance, Paris, Cerf, 2000, p. 132.
[43] ARMINJON,
Blaise,"La voie mystique est-elle ouverte à tous?", dans Christus,
142 (1989), 171-181.
[44] JEANDE
LA CROIX, Montéedu Carmel, livre 2, chapitre 22,dans Œuvres, traduction
par Mère Marie du Saint-Sacrement, carmélite déchaussée.Édition établie,
révisée et présentée par Dominique Poirot, carme déchaux,Paris, Cerf,
1990, p. 736.
[45] Ibid.,
p. 24.
[46][49] II
Co 13, 1ss.
[50] Saint
Augustin, Les Confessions, livre XI. Trad. nouvelle de Louis deMONDADON,
Paris, Pierre Horay Éd. de Flore, 1954, p. 306.
[51] Fernand
Dumont.(probablement tirée de Le lieu de l'homme. La culture comme
distance et mémoire).
Dernière mise à jour 17
octobre 2006
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SOURCE : http://www.carrefourkairos.net/sme/fdl_mystique_061014.htm
Inauguration du monument de François de Laval le 21 juin
1908, avec l’édifice du bureau de poste en arrière-plan.
Le monument de Monseigneur de Montmorency-Laval
(1623-1708), premier évêque du diocèse de Québec et fondateur du Petit
séminaire, s'élève en face de l'ancien Bureau des postes, aujourd'hui nommé
l'édifice Louis-S.-St-Laurent. Pour installer cet imposant monument d'environ
13 mètres de hauteur et les rampes et murs de fondation, il a fallu faire
disparaître un pâté d'une dizaine de maisons et bureaux, incluant l'hôtel dit
du Chien d'Or. Le monument fut dévoilé le 25 juin 1908, à l'occasion du
troisième centenaire de la fondation de Québec par Champlain et du deuxième
centenaire de la mort de Mgr de Laval. Il est l'œuvre du sculpteur montréalais
Louis-Philippe Hébert. La statue en bronze présente l'évêque debout, coiffé de
la mitre, tenant sa crosse de la main gauche, et posant un geste d'accueil avec
la main droite. Il regarde les personnages des hauts-reliefs fixés au
piédestal : une femme assise qui personnifie la Religion; à ses pieds, un
collégien qui rappelle la fondation du Séminaire; debout à l'arrière un Indien
qui écoute; et un ange qui élève vers l'Évêque les palmes de la Gloire. Le
piédestal comprend quatre faces : la première porte une inscription et les
trois autres présentent des bas-reliefs en bronze évoquant : à droite, une
audience de Louis XlV; à gauche, le Baptême de Garakontié; et du côté de la rue
De Buade, l'Épiscopat de Mgr de Laval.
Le piédestal, richement décoré de sculptures dans la
pierre, est entièrement formé de granite gris de Stanstead. La statue de bronze
de Mgr de Laval repose directement sur une pierre ornée de cartouches sculptés
dans ce granite et où est gravé le nom de LAVAL. En dessous de la corniche
moulurée apparaît un bas-relief représentant une chapelle façonnée dans la
colonne de granite. Le socle de granite comprend, en plus des moulures, quatre
contrebutants et consoles qui séparent une plaque et trois bas-reliefs en
bronze. La double rampe et les murs de soutien sont en pierre de taille
bossagée de granite gris rose de Rivière-à-Pierre.
Le granite gris de Stanstead est remaquablement bien
conservé, seulement quelques petites taches de rouille apparaissent dans les
noeuds de biotite mordorée causées par la présence de pyrite, et les surfaces
concaves du socle sont légèrement teintées verdâtres sous les bronzes. Des
coulures de rouille dues aux ancrages de la clôture de fer forgé entachent le
granite de Rivière-à-Pierre de la rampe.
SOURCE : http://www2.ggl.ulaval.ca/ledoux/arret51.html
Bas-relief fixé sur le socle du monument de François
de Laval de Montmorency représentant le baptême de Garakontié, œuvre de Louis-Philippe Hébert.
Saint Francis de
Montmorency Laval
Also
known as
François de Montmorency
Laval
Memorial
6
May
Profile
Third son of Hughes de
Laval, an aristocrat soldier,
and Michelle de Péricard. His was an old, distinguished and religious family,
and Francis early felt a call to the priesthood. Educated by Jesuits at
La Fleche from ages eight to fourteen. His father died when
the boy was
thirteen, and as clerical positions were often as much politics as religion,
Francis was made a parish canon so
that his salary could help support the family. Studied for
the priesthood at
the Jesuit Clermont
College in Paris, France at
age nineteen, but withdrew for a while in 1645 when
his two older brothers died and
he was forced to manage the family estates. Ordained on 1
May 1647. Archdeacon of
Evreux. Member of the Paris Foreign Mission Society at age thirty.
Vicar apostolic of Tongkin, Indochina (modern Vietnam)
in 1653,
but family obligations and the turmoil of the region prevented him moving
there. Resigned his position in 1654 to
spend four years in a hermitage in
Caen. Titular
bishop of Petraea.
Appointed vicar apostolic
of New
France (modern Canada)
by Pope Alexander
VII in 1658.
Consecrated as bishop on 8
December 1658.
Arrived in Quebec
City, population 500, to take up his new duties on 16
June 1659.
His territory covered all of Canada and
the central section of what would become the United
States. It was an enormous frontier diocese in
need of administration, stability, and evangelization,
and Francis approached it as spiritual work. He promoted missionary work,
and supported missionaries from
the Jesuits and
Recollect Franciscans.
Restored the shrine of Saint Anne
de Beaupré, and built the cathedral of
the Immaculate
Conception. Founded the seminary of Quebec in 1663,
and started the Catholic school system
throughout Canada. Quebec was
established as a diocese in 1674,
and Laval consecrated its first bishop.
Fought the alcohol trade to the Indian tribes, had it outlawed within his
territory, and excommunicated those
who dealt in it. His work slowed the trade and improved the lives of the
natives, but made him many enemies within the liquor trade.
In 1684 he
went into retirement, becoming a hermit at
the seminary in Quebec,
hoping to live out his life in prayer.
However, disastrous fires in November 1701 and
October 1705 brought
him out of retirement to oversee needed re-construction, he was ever involved
in charitable work
for the poor,
and available to consult with his successor. Laval University in Quebec is
named for him.
Born
30
April 1623 in
Montigny-sur-Avre, Normandy, France
Died
6
May 1708 in Quebec, Canada of
natural causes
Venerated
28
February 1960 by Pope Blessed John
XXIII (decree of heroic
virtues)
Beatified
22
June 1980 by Pope John
Paul II
Canonized
3
April 2014 by Pope Francis (equipollent
canonization)
Patronage
bishops
of Canada
Additional
Information
New
Catholic Dictionary
books
Our Sunday Visitor’s Encyclopedia of Saints
other
sites in english
Catholic
Hierarchy
Catholic Insight
Centre
d’animation François-de Laval
Find A Grave
HagiograFaith
Hagiography
Circle
sitios
en español
Martirologio Romano, 2001 edición
fonti
in italiano
Dicastero delle Cause dei Santi
Santi e Beati
MLA
Citation
“Saint Francis de
Montmorency Laval“. CatholicSaints.Info. 5 May 2024. Web. 1 June 2024.
<https://catholicsaints.info/saint-francis-de-montmorency-laval/>
SOURCE : https://catholicsaints.info/saint-francis-de-montmorency-laval/
François Montmorency de
Laval
First bishop of Canada,
b. at Montigny-sur-Avre, 30 April, 1623, of Hughes de Laval
and Michelle de Péricard; d. at Quebec on 6 May, 1708. He was a
scion of an illustrious family,
whose ancestor was baptized with Clovis at Reims,
and whose motto reads: "Dieu ayde au primer baron chrestien." He
studied under the Jesuits at
La Flèche, and learned philosophy and theology at
their college of Clermont (Paris),
where he joined a group of fervent youths directed by Father
Bagot. This congregation was the germ of the Seminary of
Foreign Missions, famous in the history
of the Church, and of which the future seminary of Quebec was
to be a sister institution. His two older brothers having died in
battle, François inherited the family title
and estate. But he resisted all worldly attractions and a mother's entreaties,
and held fast to his vocation. After ordination (1747),
he filled the office of archdeacon at Evereux.
The renowned Jesuit missionary, Alexander
de Rhodes, having obtained from Innocent
X the appointment of three vicars
Apostolic for the East, Laval was chosen for
the Tonquinmission. The Portuguese Court opposed the plan
and from 1655 to 1658 the future bishop lived
at the "hermitage" of Caen, in the practice of piety and good works,
emulating the example of the prominent figures of that period
of religious revival, Olier, Vincent of Paul, Bourdoise, Eudes,
and others, several of whom were his intimate friends. This solitude was a
fitting preamble to his apostolic career. Appointed Vicar
Apostolic of New
France, with the title of Bishop of Petrea, Laval was consecrated on
8 Dec., 1658, by the papal
nuncio Piccolomini in the abbatical church of
St-Germain-des-Prés, Paris.
He landed on 16 June, 1659, at Quebec, which then counted hardly 500
inhabitants, the whole French population of Canada not
exceeding 2200 souls.
Laval's first relation to
the pope (1660)
breathes admiration for the natural grandeur of the country, courageand hope for
the future, and praise for the zeal of
the Jesuits.
From the outset he had to assert his authority, which was contested by
the Archbishop of Rouen,
from whose province came most of the colonists, and whose pretensions
were favoured by the court. Laval claimed jurisdiction directly
from Rome.
This conflict, whichcaused trouble and uncertainty, was ended when
the See of Quebec was definitively erected by Clement
X into a regular diocese depending solely on Rome (1674).
But the hardest struggle, the trial of a life-time, was against
the liquor-traffic with the Indians. The problem, on whose
solution depended the civilization and salvation of
the aboriginies and the welfare of New
France, was rendered more arduous by the intense passionof the savage
for firewater and the lawless greed of
the white trader. Laval, after exhausting persuasive measures and
consulting the Sorbonne theologians,
forbade the traffic under pain of excommunication.
Thecivil
authorities pleaded in the interest of commerce, the eternal obstacle
to temperance. First d'Avaugourrelaxed the severity of the
prohibition, but, through Laval's influence at court, was recalled.
De Mésy, who owed his appointment to the bishop,
first favoured, but then violently opposed
his authority, finally dyingrepentant in his arms.
His successors, envious of clerical authority
and over-partial to commercial interests, obtained from the king a mitigated
legislation. Thus, the Intendant
Talon and Frontenac, notwithstanding their statesmanship
and bravery,
were imbued with Gallicanism and too zealous for
their personal benefit. The viceroy de Tracey, however, seconded the bishop's action.
At this period
the Diocese of Quebec comprised all North America, exclusive of New
England, the Atlantic sea-board, and the Spanish colonies to
the West, a territory now divided into about a hundred dioceses. Laval'szeal embraced
all whom he could reach by his representatives or by his
personal visitations. In season and out of season, he made long and
perilous journeys by land and water to minister to his flock. His fatherly
kindness sustained the far-off missionary. "His heart is always with
us", writes the Jesuit Dablon.
He was a protector and guide to the religious
houses of Quebec and Montreal.
He was deeply attached to the Jesuits,
his former teachers, and recalled to Canada in
1670 the Franciscan Recollets,
who had first brought thither the Gospel. By the solemn baptism of Garakontie,
the Iroquois chief,
an effacacious promoter of the true Faith was
secured among his barbarous fellow-countrymen, who received
the black-robed Jesuit and
gave many neophytes. Laval's foresight
made him foster the most cherished devotions of the Church: belief in
theImmaculate Conception, the titular of his cathedral,
and the cult of the Holy Family, which flourished onCanadian soil
(Encyclical of Leo
XIII). He was a devout client of St.
Anne, whose shrine
at Beaupre was rebuilt in 1673. As a patron of education Laval occupies
a foremost rank. At that early period, with a handful of colonists and scanty
resources, he organized a complete system of instruction: primary, technical,
and classical. His seminary (1663)
and little seminary (1668)
trained candidates for the priesthood.
An industrial school,
founded at St-Joachim (1678), provided the colony with skilled farmers and
craftsmen. To these institutions, and particularly to the seminary, destined to
become the university which
bears his name, he gave all his possessions, including the seigniory
of Beaupré and Isle Jésus. In view of the future he built the seminary on
a relatively large scale, which excited the envy and criticism of Frontenac.
No regular parisheshaving
been yet established, the clergy were
attached to the seminary,
and thence radiated everywhere forparochial or
mission work, even as far as the Illinois. The tithes,
after much discussion and opposition, had finally been limited to the
twenty-sixth bushel of grain harvested, an enactment still legally in
force in the Province
of Quebec. These tithes were
paid to the seminary,
which, in return provided labourers for Christ'svineyard. Laval's patriotism was
remarkable. The creation of the Sovereign Council in lieu
of the Company of New
France was greatly due to his influence, and conduced to the proper
administration of justice,
to the progress of colonization, and the defence of the country against the
ever-increasing ferocity and audacity of the Iroquois.
He later concurred in obtaining the regiment of Carignan for the
last-named object (1665).Exhausted by thirty years of a
laborious apostolate, and convinced that a younger bishop would
work more efficaciously for God's glory and
the good of souls,
he resigned in 1688. His successor, Abbé de St-Vallier,
avirtuous and generous prelate,
did not share all his views regarding the administration. Laval might
have enjoyed a well-earned retreat in France,
whither he had sailed for the fourth time. He preferred returning to the
scene of his labours, where many opportunities occurred of displaying his zeal during
the many years ofSt-Vallier's absence, five of which were spent
in captivity in England.
During that period, the seminary was
twice burned (1701 and 1705) To Laval's intense sorrow, and rebuilt
through his energy and generosity. The end was near. The last three years he
spent in greater retirement and humility,
and died in the odour ofsanctity.
His reputation for holiness,
though somewhat dimmed after the Conquest, revived during the nineteenth
century, and the cause of his canonization having
been introduced (1890), he now enjoys the title of
Venerable. Laval has been accused of attachment to his own authority
and disregard for the rights of civil
authority, a reproach that savours somewhat of
the Gallican spirit of the time, and of
the historians who endorsed their prejudices. The truth is
that he had to protect his flock from the greed,
and selfishness of worldly potentates for whom material interests were often
paramount; to defend the immunities of
the churchagainst a domineering Frontenac, who pretended
to arraign clerics before
his tribunal, and oblige missionariesto
secure a passport for each change of residence, and refused the bishop the
rank due to his dignity andsanctioned by the king, in
the council of which the prelate was
the chief founder, the soul and life.
In an age when churchmen like Mazarin and Richelieu virtually
ruled the State, Laval's authority, always exercised for the
country's weal, was probably not exorbitant. He was loyal to
the Crown when superior rights were
not contradicted, and received nought but praise from the Grand Monarque.
The charge of ambition and
arbitrariness is equally groundless. In the
Sovereign Council, Laval showed prudence,
wisdom justice,
moderation. His influence was always beneficent. Although firm and inflexible
in the accomplishment of dutyhe
was ready to consult and follow competent advice. He was of the race of Hildebrand,
and to him likewise might have been applied the text: "Dilexisti justitiam
et odisti iniquitatem." His sole ambition was
to be abishop according
to God's heart.
His spirit and practice of mortification and penance,
his deep humility,
his lively faith,
his boundless charity towards the poor,
rank him among the most holy personages.
Sources
GOSSELIN, Vie de
Mgr. De Laval (Québec, 1890); GARNEAU, Histoire du Canada (Montréal,
1882); FERLAND, Cours d'histoire du Canada (Québec,
1882); ROCHEMONTEIX, Les Jésuites et la Nouvelle-France (Paris,
1896); MARIE DE L'INCARNATION, Lettres (Tournai,
1876); Souvenir des fêtes du Monument Laval (Québec,
1908).
Lindsay, Lionel. "François
Montmorency de Laval." The Catholic Encyclopedia. Vol.
9. New York: Robert Appleton Company,1910. 6 May
2015 <http://www.newadvent.org/cathen/09045a.htm>.
Transcription. This
article was transcribed for New Advent by John Looby.
Ecclesiastical
approbation. Nihil Obstat. October 1, 1910. Remy Lafort,
Censor. Imprimatur. +John M. Farley, Archbishop of New York.
Copyright © 2020 by Kevin
Knight. Dedicated to the Immaculate Heart of Mary.
SOURCE : http://www.newadvent.org/cathen/09045a.htm
Saint François de Laval
Saint Francois de Laval was born at St. Martin de Montigny-sur-Avre,
Normandy, France. He wanted to become a priest from his earliest childhood.
When he was eight years old, his father placed him with the Jesuits, where he
lived for fourteen years far from his family.
Francois lost his father
in 1636. His uncle, a bishop, appointed him a canon of Evreux to assist his
family. He was ordained a priest on May 1, 1647. King Louis XIV chose him as
the first Bishop of New France. On December 8, 1658, the feast of the Immaculate
Conception, the thirty-eight year old prelate was consecrated a bishop. He left
for Quebec on June 16, 1659, and immediately began making pastoral visits
throughout his immense diocese.
Upon his arrival, he won
everyone’s confidence with his charity, piety, discernment and impartiality.
His first concern consisted in advancing the organization of the Church in
Canada. He contributed greatly towards both the civil and religious formation
of the country. Even though he had to face many difficulties, with his wise,
firm action, he succeeded in implanting the Faith all over North America
Bishop de Laval first
founded the Seminary of Quebec which gathered together a community of priests;
in 1663 he entrusted the formation of his clergy to this seminary. Five years
later, a Minor Seminary was opened for the recruitment of his clergy. In
conformity with holy practice in the early centuries of the Church, all the
clerics and churchmen lived out of a common fund.
Blessed Francois de Laval
had to fight with all his might against disorders that had been introduced into
the country at the beginning of its colonization, chiefly the traffic of
intoxicating liquor. Saint Mary of the Incarnation wrote, “The bishop has had
many conflicts in New France concerning liquor given to the natives which
almost led to the total ruin of this new Church.” Thanks to his apostolic zeal,
this shameful commerce was absolutely forbidden.
The secular powers raised
serious opposition to his evangelizing activities, but Bishop de Laval never
capitulated in the face of his adversaries’ odious proceedings. With firmness
and perseverance, the holy bishop resisted all encroachments of civil
authorities in Church government. He rose up with authority against anyone who
wanted to hinder the implantation of Christianity in the blessed land of New
France. With supreme patience, he endured all the wicked actions that earthly
magnates wrought against him, as well as two major fires that demolished his
seminary, for which he had labored so hard.
This holy bishop, a
pioneer of the Church in New France, lived in constant, heroic renouncement. He
wore a hair shirt and slept very little, so as to be able to pray all his
offices and rosaries. As for the brief rest he granted himself, he took it on a
wretched mat laid on a bed of boards, without even a sheet to cover himself.
His great evangelical simplicity was also very praiseworthy, for never did any
man have a greater horror of showmanship and vanity, especially when it
presented itself under a cover of religion.
This worthy, virtuous
prelate wore old, patched garments. For twenty years he owned only two winter
cassocks. At his death one of them was still good; the other, threadbare and
patched, attested to his wonderful spirit of poverty. Hard on himself, this
admirable man of God was prodigal to excess towards Christ’s poor. Every year
he never failed to give the needy 1,500 to 2,000 pounds.
Blessed Francois de Laval
endured the sufferings of his last years with great serenity and resignation to
God’s will. During Holy Week in 1708 he contracted the illness that was to take
him to the grave. On May 6, 1708, he died in the company of his priests,
reciting the Rosary and the Litany of the Holy Family, which devotion he had
propagated throughout Canada.
SOURCE : https://ucatholic.com/saints/francois-de-laval/
Blessed Francois was the first bishop of Quebec
City, Canada. He was born in 1623 in a small town in France. Francois received
a good, Catholic education. He studied with the Jesuits and then went to Paris
to complete his preparation for the priesthood. Francois became a priest in
May, 1647. He was consecrated a bishop on December 8, 1658, and arrived in New
France in 1659.
Bishop Laval had a missionary spirit. He accepted the
pioneer life of his people. Even more, Francois had the courage to take on a
huge task. He was to organize the Church in Canada which was still mission
territory. Bishop Laval asked the Jesuit missionaries to minister to the native
people. He created new parishes for the French-speaking Catholics. He started
the seminary of Quebec in 1663. This was of great importance because a good
seminary would train future priests for God's people.
Bishop Laval loved the people of his vast territory.
He was a caring bishop and a prayerful man. His particular cross was the
constant interference by civil authorities. He was particularly outspoken about
the harm of alcohol trafficking.
In 1688, he retired and was replaced by Bishop de
Saint-Vallier. Bishop Laval devoted the last twenty years of his life to charitable
and spiritual works. He died in 1708. Pilgrims prayed at his tomb and miracles
were reported. Pope John Paul II declared Bishop Laval "blessed" on
June 22, 1980.
Let us pray for all missionaries around the world that
they find comfort and courage in the Lord Jesus.
LAVAL, FRANÇOIS DE, bishop in partibus of Petraea,
vicar apostolic in New France (1658–74), first bishop of Quebec (1674–88); b.
30 April 1623 at Montigny-sur-Avre (department of Eure-et-Loir), in
the diocese of Chartres (France) and baptized François-Xavier; son of Hugues de
Laval, seigneur of Montigny, Montbaudry, Alaincourt, and Revercourt, and of
Michelle de Péricard; d. 6 May 1708 at Quebec and buried
9 May in the cathedral there.
François de Laval was descended from
the younger branch of one of the noblest families in France, the Montmorencys,
whose origins are believed to go back to pagan Gaul. A Montmorency, in fact, is
supposed to have been the first of the nobles of the kingdom of France to
receive baptism with Clovis from St Rémi at Reims in 496. The battlecry
“Dieu ayde au premier baron chrestien [God aid the first Christian baron],”
which was also the motto of this line and is found in Bishop Laval’s arms,
perpetuated the memory of this glorious event. The title of “First Barons of
France,” which was likewise borne by the Montmorencys, was no less deserved:
this family gave the church and the kingdom several cardinals, 6 constables,
12 marshals, 4 admirals, and a great number of generals and civil, naval,
and military officers. In the 13th century Mathieu de Montmorency, called the
great Constable of France, took as his second wife Emme de Laval, who was also
of noble birth. Their son Guy took his mother’s name; François de Laval was
descended from him.
Through his mother, Michelle de
Péricard, daughter of the seigneur of Saint-Étienne, in Normandy, François de
Laval belonged to a family of the legal nobility which had supplied the parlement of Rouen with several officers of the crown and the
church with numerous prelates. Indeed, the see of Évreux was occupied about
that time by a brother of Madame de Laval, François de Péricard, who was to
play an important role in young François’s life.
Despite their noble birth the
seigneur of Montigny and his wife, who were both of proven piety and virtue,
were not possessed of a large fortune: the fief of Montigny, the most important
of the four which they held, was in reality only a good-sized market-town. The
family’s financial situation was soon to become rather precarious, and François
was one day to have to devote himself to restoring it.
Hugues de Laval and his wife had six
sons and two daughters, one of whom, Isabelle, a posthumous child, died at the
age of seven months. Henri, the fifth son, entered the Benedictine order and
became prior of La Croix-Saint-Lauffroy; Anne-Charlotte took the veil with
the Nuns of the Blessed Sacrament and became their superior. Destined by his
family for the ecclesiastical state, to which he aspired himself, François
received the tonsure and took holy orders at the age of eight and a half, as
was the custom of the period, soon after entering the Jesuit college at
La Flèche, which was attended by the sons of the best families of France.
Francois was to spend ten years, from 1631 to 1641, in this famous institution,
pursuing his literary and philosophical studies with great success. In 1637,
his uncle, François de Péricard, bishop of Évreux, appointed him a canon of the
cathedral of his diocese. Even though it was not large – it was increased
in 1639 – this benefice came just at the right time. Added to his family’s
meagre resources, it allowed François to continue his studies, which for a time
had been endangered by his father’s death on 11 Sept. 1636.
The years that he spent at
La Flèche were, in a way, decisive for François de Laval. Under the
enlightened guidance of the Jesuits he advanced rapidly in the paths of piety
and virtue, soon earning admission into the Congrégation de la Sainte Vierge,
which was at the time directed by Father Jean Bagot. His resolution to devote
himself to God in the priesthood dated from that period, as did his interest in
the Canadian missions; these were held much in honour at the college where
lived some of the greatest apostles of the French possessions in America. Being
constantly in contact with the sons of St Ignatius, François got to know
them, was imbued with their spirituality, and became sincerely attached to
them. “God alone,” he wrote in 1659, “knows how much I am indebted to your
Society [the Society of Jesus], which warmed me in its breast when I was a
child, nourished me with its salutary doctrine in my youth, and has not ceased
since then to encourage and guide me. . . . [The Jesuits] taught me
to love God and have been my guides in the path of salvation and the Christian
virtues. . . .”
In 1641 François went to Paris and
lived at the Collège de Clermont, also run by the Jesuits, to study theology.
He was proceeding at a good pace towards the priesthood when two tragic events
in rapid succession struck him cruel blows: his two older brothers were killed.
François, who had enlisted in Condé’s army, fell in 1644 at Freiburg, and
Gabriel, who was serving in Turenne’s army, was killed in 1645 at Nordlingen.
François, who inherited the patrimony and the family obligations, took the name
of Abbé de Montigny. His mother, with the powerful backing of the bishop of
Évreux, begged him to leave the ecclesiastical state, to marry, and to uphold
the honour of his house. François was immovable but nevertheless decided to
interrupt his studies momentarily. He returned to Montigny, put the family’s
affairs in order, and soon went back to the Collège de Clermont, this time with
the encouragement of the bishop of Évreux. In 1646 he was ordained subdeacon,
the following year deacon, and on 1 May 1647 priest.
At 24 years of age, François was well
prepared for a ministry that, it appears from the most authoritative testimony,
was fruitful. At Paris he had again met Father Bagot and several of his
associates of the Congrégation at La Flèche. They had come together once
more in the society called the Bons Amis and continued as a group their work of
seeking their spiritual improvement. François stood out in this group through
his piety, zeal, and virtue. In the year following his ordination he devoted
himself to caring for the sick, teaching abandoned children, and administering
his patrimony. In 1648 he resigned his canonry at Évreux. Shortly afterwards,
in December, he was appointed archdeacon of the same diocese, which at that
time comprised 155 parishes and 4 chapels. It was a heavy task. But, wrote
M. de LA Colombière, “the regularity of his visits, his
fervour in carrying them out, the improvements that he effected and the order
that he established in the parishes, the relief of the poor, his application to
all sorts of good works, all these things indicated clearly that although he
was not a bishop, he had the mind and ability of one and that there were no
services that the church could not expect from such a great person.” In 1649 he
had obtained from the University of Paris a licentiate in canon law, which he
required for carrying out his duties as archdeacon.
From 1642 on at least François de
Laval had secretly dreamed of being a missionary. The Bons Amis, with whom he
remained in close touch during his years as archdeacon, shared his aspirations.
This society was, besides, the cradle of the Séminaire des Missions Étrangères
in Paris. In 1652 the Jesuit, Alexandre de Rhodes, was looking, with the pope’s
permission, for candidates who would accept appointments as vicars apostolic in
Tonkin and Indochina. After consulting with Father Bagot and the Bons Amis, he
chose François Pallu, Bernard Picques, and François de Laval, who were approved
by Rome and the court. François de Laval was destined for Tonkin. But the
appointment soon began to drag on. The Congregation for the Propagation of the
Faith, which disapproved of the excessive independence of the Jesuits in the
mission countries, feared that the proposed candidates were too closely linked
with them, all the more since they had declared their readiness to join the Society
of Jesus. Moreover, Portugal was firmly opposed to French bishops being sent to
the Far East. The project was given up in 1654. Whatever his future activity
was to be, François de Laval decided to prepare for it henceforth in prayer and
seclusion. In 1654, without even keeping the pension to which he was entitled,
he resigned the archdeaconry of Évreux – which might have led him to the
bishopric – in favour of his friend Henri-Marie Boudon and made over to
his younger brother Jean-Louis his patrimony and his birthright. (Hugues, the
youngest of his brothers, had died in 1642 at about 12 years of age.) When
these last links with the world had been broken, he set off for Caen.
François went to knock at the door of
the Hermitage, which was directed by M. Jean de Bernières de Louvigny. One
of the great mystics of his time, M. de Bernières, although a layman, had
been chosen as teacher and spiritual director by some of the most pious and
virtuous persons in France. Since 1649 the Hermitage had sheltered a small
community of priests and laymen who devoted themselves to preaching and
charitable activities and who led an austere and severely regulated life.
François de Laval, who was an “intimate friend” of M. de Bernières, put
his admirable maxims into practice: he combined charitable works with prayer
and preaching and, as he had done in Paris, engaged in helping the poor and the
sick, in the great tradition of St Vincent de Paul. In between, he
reformed a monastery whose rule had become lax and brought out into the open,
even before the court, the rights of a community of nuns hospitallers which was
threatened with spoliation. He was, furthermore, the administrator and
confessor of two communities of nuns, and in 1657 he earned from
Bishop Servien an unequivocal commendation (which was given upon oath): he
was described as a priest “of great piety,” “prudent and of unusually great
competence in business matters,” who had set “fine examples” of virtue in the
diocese of Bayeux.
But once again there was a movement on
foot to endow New France with a bishopric. This movement had originated in 1645
with the Associates of Montreal, but it had subsequently encountered many
obstacles. In January 1657 the Associates put forward a candidate, the
Sulpician Gabriel de Thubières* de Levy de Queylus. Although he was
accepted by the assembly of the clergy of France, Abbé Queylus was not received
favourably by the Jesuits. They, declining an invitation from the queen mother,
Anne of Austria, to have one of their members appointed to the episcopal see of
Quebec, submitted the name of their former pupil, François de Laval. Being
anxious that the new bishop should be on good terms with the Jesuits in Canada,
the queen mother and the court approved this choice. François de Laval was
informed at the Hermitage of the plans which had been made for him. He
could not, however, foresee the difficulties with which his path would
henceforth be strewn.
The choice of François de Laval and
the circumstances surrounding his appointment to the episcopal see of New
France were, in fact, going to stir up and bring into the open the latent
conflict which was developing in this colony, for the ecclesiastical jurisdiction
over it was being disputed by Rome and the archbishop of Rouen quietly but with
great determination and tenacity.
Since the 16th century the pope had
not had any direct authority over missions. He had to go through the kings, who
had the right of advowson, the bishops, who extended their influence beyond the
boundaries of their dioceses, and the superiors general of the great missionary
orders, which had acquired wide autonomy. The general of the Jesuits, for
example, and his provincials in France could found missions without even
consulting the Holy See. Thus, on their arrival in Canada in 1625 and when they
came back again in 1632 the Jesuits held their powers from Rome, but through
the intermediary of their general. In 1622, however, with the object of
centralizing the administration of all missions and putting them directly under
the control of the Holy See, the pope had created the Congregation for the
Propagation of the Faith. The Congregation had thenceforth attempted, with
great prudence and diplomacy but rather limited success, to reduce the
virtually complete independence of the Jesuits in mission countries.
In Canada, however, the missionaries
of the Society of Jesus were to lose gradually the quiet assurance that they
had enjoyed at the beginning. The arrival in 1639 of the Ursulines and Nuns
Hospitallers – particularly the latter, who had been induced by the
archbishop of Rouen to promise that they would recognize his jurisdiction over
their community – contributed especially to alarming the Jesuits about the
validity of the religious professions which they might be called upon to
receive or the marriages among settlers which they solemnized, relying solely
upon their powers as missionaries. Did their jurisdiction extend beyond the
strictly missionary ministry to the Indians? They were less and less certain
about it. To ask the Congregation for the Propagation of the Faith for wider
powers would mean that they would be putting themselves under its complete
domination and would, moreover, be a departure from the Society’s traditional
policy, which their general in Rome defended fiercely. Besides, the archbishop
of Rouen, who had no doubts about the legality of his jurisdiction over New
France, was gradually but irreversibly imposing his episcopal authority upon
the young colony.
Two events were to cause the Jesuits
in Canada to lean towards Rouen. In 1645 and 1646, on the one hand, the
Associates of Montreal were working for the creation of a bishopric in Canada
and proposed a candidate of their choosing, Abbé Thomas Le Gauffre. If
they were successful, the autonomy of the Jesuits in New France was finished.
On the other hand, in 1646 the new general of the Jesuits had given in to the
pressure exercised by the Congregation for the Propagation of the Faith and had
ceded back to it, in reality, most of his powers as far as missions were
concerned. At this juncture the Jesuits in Canada hesitated, deliberated
cautiously, and finally in 1648 accepted the jurisdiction of the Congregation
for the Propagation of the Faith by asking it for new powers; but at the same
time they sought from the archbishop of Rouen letters, which they accepted in
1649, making their superior in Quebec his vicar general. This last step, on
which not even their general was consulted, was kept a secret until 1653, one
so well kept that despite her close connections with the Jesuits Marie de
l’Incarnation [Guyart*] did not suspect anything. The
powers of a vicar general were broader than those conferred by the Congregation
for the Propagation of the Faith and gave the Jesuits greater reassurance about
the validity of the religious professions and marriages. In 1653, therefore,
they made public their dependence upon Rouen and ceased to correspond with the
Congregation for the Propagation of the Faith after that date. Of the two
options presented them, they had chosen the one which imposed fewer
restrictions upon them: the Rouen formula left them greater authority and autonomy
than that of Rome would have done.
In refusing the candidate of the
assembly of the clergy of France in January 1657 the Jesuits were not
rejecting Abbé Queylus as a person, but rather the threat that he represented
for the independence of the church in Canada, which they intended to restore
and to secure for good. Secretly they proposed to the court a candidate of
their choosing, François de Laval. They wanted to make him the titular bishop
of Quebec. For 18 months they pushed this matter in Paris and Rome, apparently
without the archbishop of Rouen, François II de Harlay de Champvallon,
having the slightest suspicion of it. The fact was that, once their candidate
had been appointed and consecrated, they intended to separate the church in Canada
completely from the archbishopric of Rouen. In their minds the bishop of Quebec
should be directly responsible to the pope. Of course, Harlay would not have
been of that opinion.
In January 1657, then,
Louis XIV wrote to the pope, presenting to him his candidate for the
bishopric of Quebec, Father François de Laval. Rome first
wanted to know to what community this father belonged. This
was the first cause of delay, Then someone forgot to forward the canonical
information. Time passed. Backed by the court of France, the Jesuits kept
applying pressure. Months went by. Everyone was becoming impatient; the number
of memoranda kept increasing, help was sought from the cardinals in Rome, but
to no avail. Only François de Laval remained silent and as though indifferent,
to the surprise of those who were supporting his candidature most strongly. It
was not he who had sought this appointment; perhaps mindful of the Tonkin
affair, he waited at the Hermitage, without doing anything to influence Rome’s
decision, which would be the expression of God’s will for him.
Rome’s delay in reaching a decision
came, to tell the truth, from the Congregation for the Propagation of the
Faith. Once more it was feared there that through François de Laval, who had
been closely linked with them since his childhood, the Jesuits would perpetuate
their independence from this Roman congregation in Canada. There could be no
question of appointing a titular bishop for Canada. Consequently difficulties
of all sorts were raised, until finally it was proposed to the court of France
to create a vicariate in New France rather than a bishopric. The court obtained
the Jesuits’ assent and that of M. de Laval himself on this question. (It
has been claimed, incorrectly, that the Jesuits had suggested this expedient
themselves.) The appointment of a simple vicar apostolic would make the church
and the mission in Canada, including the Jesuits, directly subordinate to the
Congregation for the Propagation of the Faith and thus to the Holy See; for
Bishop Laval and the Jesuits it would have the advantage of withdrawing
them, at least in theory, from the jurisdiction of the archbishop of Rouen,
which would yield to the more universal jurisdiction of the pope.
The bulls appointing François de
Laval vicar apostolic were signed in Rome on 3 June 1658.
Bishop Laval chose 4 October, the feast-day of St Francis of
Assisi, for his consecration.
The archbishop of Rouen, who
considered that he was the rightful bishop of Canada, where he had had a vicar
general for ten years, seems to have known nothing of the steps taken to endow
this part of his diocese with a see. Being, moreover, an ardent Gallican, he
took the news of the dispatch of his bulls to François de Laval very badly. All
the more since this dignity of vicar apostolic, newly created in the church and
most often obtained by stealth and under false pretences, had been the subject
of earnest deliberations in the assembly of the clergy of France, which finally
recommended to the bishops that they refuse to consecrate these prelates if
they applied to them. On 25 Sept. 1658 at Paris, before a
special assembly of the clergy, Harlay brought up the question of the bulls
delivered to François de Laval and succeeded in having a circular letter sent
to the bishops urging them to refuse to consecrate him, in conformity with the
recommendations of the plenary assembly and because of the prejudice which this
intervention on the part of Rome caused the Gallican church. The three bishops
who had already promised François de Laval their co-operation immediately
desisted.
In addition to the support of the
church of France, Harlay sought that of the parlements, the
jealous and punctilious defenders of the “liberties,” rights, privileges, and
immunities of the Gallican church. He himself had a seat in the parlement
of Rouen. On 3 Oct. 1658, on the eve of the day set for
Bishop Laval’s consecration, he obtained a decree forbidding the latter to
“take upon himself the functions of vicar apostolic in Canada,” and declaring
that in this matter the pope’s good faith had obviously been abused.
François de Laval, who had maintained
silence up till then, continued to do so even now; his allies the Jesuits and
the papal nuncio to Paris, Monsignor Piccolomini, however, got around the
difficulty. Rome had the right of appointing vicars apostolic in mission
countries; the claims of the archbishop of Rouen were not based on legal
grounds or recognized by Rome; and finally, the queen mother and the young king
were favourable to their candidate. They decided therefore to go ahead in
secret with Bishop Laval’s consecration in a church that was exempt from
the ecclesiastical jurisdiction of the kingdom. On 8 Dec. 1658,
in the Lady-chapel (which no longer exists) of the abbey of Saint-Germain-des-Prés,
the nuncio laid hands upon François de Laval, who was 35 at that time.
As soon as this consecration was
known, the Gallican reaction was not long in coming. The archbishop of Paris,
who was offended because François de Laval had been consecrated in his diocese
without his permission, and the archbishop of Rouen, for whom Mazarin refused
to convene the assembly of the clergy of France for reasons having nothing to
do with this affair, fell back upon the parlement of Paris.
The parlement agreed with their views and considered that the
rights of the episcopate and the liberties of the Gallican church had been
infringed. On 16 December it issued a decree calling upon François de
Laval to transmit his bulls to the court and forbidding him to claim authority
through them before receiving the letters patent necessary in such a case.
Bishop Laval was served this decree on 19 December. On
23 December the parlement of Rouen in its turn renewed its decree of
3 October, forbade any of the king’s subjects to recognize M. de
Laval as vicar apostolic, and ordered all the officers of the kingdom to resist
him in his attempt and prevent him from fulfilling any function. Once more
Bishop Laval remained silent: he clearly saw that in all this affair he
was only the pretext or the occasion for a battle that had long been shaping up
and which others were involving him in.
After vainly threatening the
archbishop of Rouen with penalties, Rome advised Monsignor Piccolomini in
December 1658 and January 1659 to rely henceforth upon “Their
Majesties,” Anne of Austria and young Louis XIV. It was the only way
out, as the queen mother had approved the Jesuits’ plan from the beginning.
This time Archbishop Harlay did feel that he was being threatened. On
3 March 1659 he suggested to Mazarin a compromise which resulted in
the letters patent of 27 March requested by Anne of Austria to annul the
decree of the parlement. These letters directed that
Bishop Laval be recognized “to fulfil the functions of the bishop, without prejudice to the rights of the regular jurisdiction, and
that he do so while awaiting the establishment of a bishopric whose
titular incumbent will be suffragan of the archbishop of Rouen.” This ran
entirely counter to the plan of the Jesuits and the Congregation for the
Propagation of the Faith. Could the queen mother, who was present at the king’s
council, be unaware of this? On 30 March, perhaps at the nuncio’s
suggestion, she recognized her error. She wrote to Voyer d’Argenson, the governor of New
France, giving him strict injunctions to have Bishop Laval recognized as
vicar apostolic and “to see that he is obeyed in all the functions of the
bishop,” and even “to prevent any ecclesiastic or other person from exercising
or holding any ecclesiastical jurisdiction except by the orders or consent” of
Bishop Laval. Thus, at least in theory, the authority of the archbishop of
Rouen was eliminated from Canada.
Bishop Laval took the oath of
loyalty to the king and sailed from La Rochelle on
13 April 1659. He had neither sought nor rejected the dignity of
bishop; the worst storms had raged about him without his intervening in any way
whatsoever to calm them, leaving the direction of his life entirely to God’s
care. One thing was henceforth certain: God wanted him in New France. He was on
his way, his sole income an allowance of 1,000 livres with
which the queen-regent had favoured him.
Thus, in detachment from worldly
goods and in poverty, began a great and laborious adventure, the building of a
Canadian church.
Canada in 1659 was, in truth, of
little account. Its French population did not amount to 2,000 people, divided
among three centres of settlement over a distance of more than 60 leagues. The
region of Quebec, formed of the town proper and the seigneuries of Beauport,
Beaupré, Notre-Dame-des-Anges, and Lauson, offered the largest concentration of
population with nearly 1,200 inhabitants; a few hundred settlers were
established at Trois-Rivières or in the neighbouring seigneuries of
Cap-de-la-Madeleine, Sainte-Anne, and Champlain, which were barely beginning to
develop; the island of Montreal, an outpost, was the last inhabited centre.
The numerical weakness of its
population illustrates how little the colony had progressed since its
foundation by Champlain* in 1608. The companies holding
monopolies, on to which the state shifted the entire responsibility for the
destinies of New France, completely neglected to meet their obligations, with
the exception of the Compagnie des Cent Associés (1627), which, however, got
off to a disastrous start from which it never recovered. The Communauté des
Habitants took over entire responsibility for the country from 1645 on but did
scarcely any better, as a result of the war with the Iroquois which almost
completely paralysed the fur trade. An insufficient population, administrative
institutions which had remained at the embryonic stage, the repeated attacks by
the Iroquois, an economic crisis that had no solution, all these factors made
even the most optimistic fear for the future of the colony.
As well as being a French colony, New
France was a mission country. The Recollets had arrived first, in 1615; the
Jesuits had joined them 10 years later. After the treaty of
Saint-Germain-en-Laye in 1632 the Jesuits came back to New France alone.
Henceforth they represented the church there, as their superior was the highest
ecclesiastical authority in the country. The missions made remarkable progress:
in a few years they extended to Acadia, Lac Saint-Jean, the Great Lakes, the
Iroquois country. The Jesuits similarly ministered to the French. The mission
was in better shape than the colony.
The Jesuits attempted, moreover, to
make up for the weaknesses of the Compagnie des Cent Associés and the Communauté
des Habitants. In their annual Relations they became
propagandists for the mission, but also for the colony preventing Canada from
falling into oblivion. They attracted settlers and established them on their
seigneuries. They aroused in rich and powerful people an interest in New France
and were thus able to endow the colony with a college in 1635, a seminary for
girls and a hospital in 1639. Missionaries, parish priests, teachers,
propagandists, colonizers, explorers, interpreters, on occasion ambassadors,
the Jesuits – whose superior was in addition an ex officio
member of the council – were everywhere, being involved in civil affairs
just as much as in purely religious matters. The mission kept the colony going;
the contrary would have been more normal.
The vicar apostolic, who reached
Quebec on 16 June 1659, landed the next day and went to work without
delay. He could count upon a limited number of ecclesiastics: 17 Jesuits, 4
Sulpicians, and 6 secular priests and lay brothers, one of whom had received only
the tonsure. To the Jesuits he left the Indian missions, to the Sulpicians the
care of the parish of Montreal, where they had been installed since 1657. The
lay brothers were for their part to take charge of the ministry to the parishes
in the region of Quebec, with Trois-Rivières temporarily under the spiritual
guidance of the Jesuits. The bishop’s see would be at Quebec.
Bishop Laval’s first
preoccupation was to have his authority recognized. He was obsessed by the idea
that he might encounter in the colony the opposition that he had known in
France. He was quite well aware of the activities of Abbé Queylus, who was for
a time the archbishop of Rouen’s vicar general in Canada, and he particularly
feared some attempt against his authority by the Sulpicians of Montreal. He was
not mistaken. The biography of Abbé Queylus [Thubières*] relates the many episodes of the
long jurisdictional dispute from which the vicar apostolic, supported by the
Congregation for the Propagation of the Faith, was to emerge victorious. Now,
the arrival of a letter from Louis XIV to M. d’Argenson and dated
14 May 1659 provided Bishop Laval with an unhoped-for opportunity.
In this letter the king directed the governor to have the authority of the
vicar apostolic recognized everywhere and not to allow any vicar general
appointed by the archbishop of Rouen to “take it upon himself to exercise any
jurisdictional function.” Bishop Laval had this letter published and
posted up from one end of the country to the other.
Around this time also the prelate set
up an officiality, an ecclesiastical court which would deal with all disputes
involving a member of the secular or regular clergy and judge all matters
falling under the jurisdiction of the bishop. The haste with which the vicar
apostolic created this tribunal – three months after his arrival –
seems rather surprising when one considers, for example, that not a single
parish was set up canonically. Bishop Laval was arming himself against
possible opponents. In the context of Gallicanism, however, this measure looked
like a challenge to the civil authority.
“Great disagreements among the
authorities” soon arose as a result of the presence of the officiality, but
also of numerous quarrels over precedence. Today these disputes may seem
trifling. But French society in the 17th century was sensitive about the
concept of honour. It was imbued with respect for everything that appertained
to the monarch or concerned him directly or indirectly. In this society which
was, furthermore, built on a strongly hierarchical system, all the king’s
representatives, from the governor down to the humblest legal officer, had
precise roles to play to which were attached certain allotted honours that had
been minutely evaluated and rigidly fixed. Supplementary honours, whether
conferred by the state or by the church, were an enviable reward and sometimes
took the place of a salary. Consequently, anyone who felt that he was being
wronged in a question of position defended himself bitterly.
For 25 years many ways of doing
things had been adopted in New France which were not always in conformity with
the customs observed in the kingdom or which could be attributed to the absence
of a bishop. Thus the governor had his prie-dieu in the place
of greatest honour in the choir of the church and regularly attended, as
honorary churchwarden, discussions of the parish council of Quebec.
Bishop Laval, who was anxious to suppress abuses and defend his young
church against inopportune interference by the state, decided to put things in
order before it was too late. His intention was laudable. But perhaps, in the
ardour of his 36 years and his somewhat impetuous zeal, he did not use enough tact
and diplomacy and was needlessly abrupt with a governor who was jealous of his
own privileges and who was, moreover, ill disposed towards this young prelate
whose first act had been to set up an ecclesiastical court in the face of civil
justice. The governor became stubborn and absolutely refused to give way, as
did the bishop. Constantly refueled with new incidents, which were most often
provoked by Bishop Laval, the conflict grew worse month by month. ‘We
thought it would end in violence,” observed the superior of the Jesuits, who
discreetly blamed the bishop.
At the root of these quarrels there
was doubtless a burning desire in Bishop Laval to see his authority
recognized and his church out of the reach of the state's enterprises; for
this, as Louis XIV was to write in 1665, it was absolutely necessary “that
the right balance be maintained between the temporal authority, which resides
in the person of the king and those who represent him, and the spiritual, which
resides in the person of His Excellency the Bishop and the Jesuits, in such a
way, however, that the latter authority be subordinate to the other.” But there
was also, on the part of the governor and several settlers, a refusal to accord
the vicar apostolic the same authority as a bishop sitting at the head of his
diocese. For them the Bishop of Petraea could not be the bishop of Quebec. At
first the religious communities had hesitated themselves: must they obey this
“apostolic commissioner” who had come to Canada “under the foreign title of Bishop
of Petraea,” or the vicar general of the archbishop of Rouen? When they finally
accepted Bishop Laval’s authority, the nuns did not bring with them the
adherence of the whole population – far from it. Montreal in particular
remained more or less hostile to the vicar apostolic.
All were in agreement, however, about
Bishop Laval’s personal qualities. His deep piety, his charity, his
humility were praised. “He lives like a saint and apostle,” wrote Marie de
l’Incarnation. Despite his illustrious origins and his new dignity, he
performed the most humble services, as he had done formerly in Paris and Caen,
caring for the ill, making their beds, administering the last sacrament to the
Indians. In the autumn of 1659, for example, an epidemic, brought by a ship, broke
out. Bishop Laval was constantly at the hospital, despite the efforts made
to dissuade him and the obvious danger of being stricken himself. He did not
spare his energies, and he was prodigal of his own possessions when it came to
aiding the poor. He who had only 1,000 livres of guaranteed
income distributed enormous sums secretly (10,000 écus in
three years, according to Bertrand de Latour*). He lived shabbily, moreover, first
in seclusion with the Nuns Hospitallers, then with the Ursulines, and finally
with the Jesuits, before acquiring in 1662 an old house where he brought
together his little group of ecclesiastics.
Despite the numerous difficulties he
encountered, Bishop Laval was extremely active. In 1660 he had completed
his first pastoral visit, which had begun at Gaspé, where he had stopped off at
the time of his crossing to Canada. He had conferred the sacrament of
confirmation upon hundreds of whites and Indians. He had, in addition, attacked
from its very beginnings the trade in spirits: being an enemy of half measures
and having the support of his clergy, whom he had consulted about this question
on three occasions, he had fulminated an excommunication against refractory
traffickers. This energetic intervention on his part incurred the opposition of
the businessmen, which was open, and that of the governor, more or less
admitted. It added more fuel to the already existing “disagreements.” Seeing
that he would never stamp out this trade without the powerful aid of the king,
Bishop Laval decided in 1662 to go to explain to Louis XIV both his
viewpoint on the liquor trade and also the most urgent needs of his church.
He received a sympathetic welcome at
court. Louis XIV gratified all his wishes: he promised to forbid
explicitly the trade in spirits and to recall Dubois* Davaugour, who had favoured it; he
even invited the prelate to choose the new governor; and finally, he appointed
Bishop Laval as of then (1662) to the bishopric of Quebec.
It is reasonable to believe that
Louis XIV and Bishop Laval discussed at length the reorganization of
New France, which would be put under the direct authority of the king. Probably
the prelate was likewise consulted about the idea of creating a Conseil
Souverain (1663), in which he was to be the second personage, right after the
governor. Abbé Bertrand de Latour, Bishop Laval’s earliest biographer,
even goes so far as to affirm that “the Conscil Souverain of Canada was the
work of its first bishop.” However that may be, Bishop Laval received from
the king political powers which put him in certain respects on an equal footing
with the governor: “conjointly and in agreement” with him, he was charged with
appointing councillors and granting seigneuries. More than that, when he
returned to New France in 1663 in company with the new governor, Saffray* de Mézy, and a royal commissioner, Gaudais-Dupont*, it was he whom the king had
entrusted with the responsibility of bringing to Canada the edict creating the
Conseil Souverain.
Was this Louis XIV, who in 1662
and 1663 interested himself in building up the political power of the Canadian
church, the same person who from 1665 on was to take umbrage at any
interference in civil affairs, real or supposed, by the church of the colony,
and who was to concern himself so much with keeping the clergy in a state of
subordination to the state for fear that the bishop and the Jesuits “might
establish their authority too firmly through the fear of excommunication and
through an excessively severe way of life that they wish to maintain”? Did not
Louis XIV go so far as to make grave accusations, as if he had forgotten
events that were, however, recent: “To maintain their position [in the colony]
they [the Jesuits] were very pleased to designate the Bishop of Petraea to
carry out the duties of bishop there since he was entirely under their
domination, and up till now they have even designated governors for the King in
that country, where they have employed all means possible to obtain the recall
of those who had been chosen for that post without their
participation . . .”? Is the king’s attitude in 1662 and 1663 to
be explained by his ignorance of the abnormal politico-religious situation
which still prevailed in Canada at that time? Or must this radical change be
attributed to Colbert, who had become minister of the Marine just previously
and who was a convinced Gallican? The fact remains that Louis XIV
contributed greatly to setting the church and the state in the colony at odds.
The quarrels and acts of violence over the composition of the council which
characterized M. de Mézy’s government were prepared by the king himself.
One day Louis XIV was to regret the extreme liberality towards the church
in Canada that marked the beginning of his reign. In 1677 Colbert echoed this
feeling when he wrote: “I see that the bishop of Quebec pretends to an
authority a little too independent of the royal authority, and for this reason
it would perhaps be good that he not have a seat on the council. . . .”
Strong in his appointment to the
future see of Quebec and the knowledge that he had acquired of the religious
situation in New France, Bishop Laval had not wanted to leave Paris
without laying the foundations of his church. To assure the colony of the priests
that it needed, he conceived the idea of a seminary, which for years was to be
the centre and soul of religious life in Canada. By an ordinance published in
Paris on 26 March 1663 and confirmed by the king the following month,
the vicar apostolic founded the seminary of Quebec.
In Bishop Laval’s mind the
seminary of Quebec was, to be sure, a theological seminary, “in which will be
educated and formed the young clerics who appear fitted to God’s service and to
whom, for this purpose, will be taught the way to administer the sacraments
properly, the method of catechizing and of doing missionary preaching; they
will be taught moral theology, the ceremonies, the Gregorian plain-song, and
other things pertaining to the duties of a good ecclesiastic.” But Bishop Laval’s
seminary was much more than that: “We are setting up,” declared the prelate, “a
seminary which will act as the clergy for this new church, . . . a
reserve from which we can draw pious and capable persons, to send them on all occasions
and when need arises to the parishes and other places in this country in order
to fulfil the functions of a parish priest and any others for which they have
been intended and whom we can withdraw from the same parishes and functions
when the moment is judged opportune. . . .” Bishop Laval
conceived his seminary then as a true community of secular priests “which will
be directed and governed by the superiors whom we or the bishops of New France
who succeed us appoint to it, and according to the regulations which we
establish to this purpose.” Clergy and seminary were all one in
Bishop Laval’s mind: the seminary of Quebec would be the clergy of New
France.
The prelate specified that the future
chapter of the bishopric of Quebec would be constituted “within the said seminary
and clergy”; all pastoral charges would be united with the seminary, to which
the tithes would be paid; the seminary would provide for the needs of the
parish priests and would promise to support them “in sickness as in health,
either in the exercise of their functions or in the community when they are
recalled to it.” In return for this promise the seminary would demand the
renunciation of property, that is to say, the pooling of all its members’
wealth and revenues. Membership in the seminary was nevertheless free for
secular priests; Abbés Le Sueur* and Le Bey, who had already been
in the colony in 1659, did not join it. But in practice it was difficult for
anyone who dreamed of receiving a charge not to join the seminary first.
At Bishop Laval’s request the
seminary of Quebec was affiliated on 29 Jan. 1665 with the Séminaire
des Missions Étrangères in Paris, with which it was to maintain close links of
friendly collaboration.
Bishop Laval’s seminary
corresponded perfectly to the needs of the church in Canada in 1663 and in
addition ensured admirable unity in it. It rendered great services as long as
Bishop Laval directed it himself; but of necessity it was, in certain respects,
provisional in nature. With the development of the colony and once the parishes
were able to support the parish priests, this diocesan community of the clergy
no longer had any reason to exist. Under Bishop Laval, whose prestige was
great, and because of the strong friendship which united him with his priests,
the prelate and the seminary collaborated closely and in the most complete
harmony. But under a new bishop everything would perhaps not go so well; it
would first be necessary that this bishop agree to exercise his authority over
the clergy and the parishes only through the intermediary of the directors of
the seminary. Bishop Laval’s successor, Bishop Saint-Vallier [La Croix], refused categorically to do so.
The ordinance which founded the
seminary of Quebec and which was registered at Quebec on 10 Oct. 1663
instituted the tithe in Canada at the same time. Bishop Laval set it at a
13th, an amount to which the king gave his approval. Unfortunately the prelate
deemed it fitting a month later to make an exception for the members of the
parish of Quebec: they were dispensed from paying the tithe for the year 1663,
and it was set for them alone at a 20th for the following six years.
Immediately, in every part of the colony, people began to hope for a similar
reduction; in the meantime they refused to provide for the needs of the clergy.
This was the cause of great difficulties and serious disputes. M. de Mézy
supported the settlers. Bishop Laval first extended to the whole country
the privilege that had been granted to the parish of Quebec, then he set the
tithe at a 20th for his lifetime, and finally he postponed until 1665 the
application of this regulation. Nevertheless the tithe remained unpaid until
1667, when, on 23 August, Prouville* de Tracy set it at a 26th for 20
years and a 20th after that. Willy-nilly, the settlers submitted to these
arrangements rather than be dragged before the courts. In 1707, after an
unsuccessful challenge by Louis-Gaspard Dufournel*, the tithe was finally set at a
26th. In this affair Bishop Laval, who was so firm and intractable when
questions of principle or morality were threatened, proved to be easy to deal
with and understanding, even a little weak in the face of the settlers’ resistance.
That alone would be sufficient to warrant a revision of certain opinions of his
character.
When M. de Mézy died, after a
reconciliation with the bishop and the clergy, there began for
Bishop Laval a short period of peace, if not of perfect harmony, with the
representatives of the state. M. de Tracy’s presence contributed greatly
to it. The prelate, who had established the parish of Quebec canonically in
1664, consecrated its church in 1666. During these few years he gave his
attention to introducing into Canada a certain number of devotions, such as
that to the Holy Family, to which he was particularly attached, and that to
Saint Anne. On 9 Oct. 1668, at Quebec, he founded his Petit
Séminaire, called the Seminary of the Infant Jesus. Eight young Canadians who
were destined for the ecclesiastical calling and six Hurons whom it was
proposed to acculturate were its first pupils. They were accommodated and
brought up at the Petit Séminaire and took their courses at the Jesuit college.
Around the same period Bishop Laval set up at Saint-Joachim a trades
school, as well as a primary school where children would learn reading and
arithmetic.
Suddenly, on 10 Oct. 1668,
a new crisis began to build up. But here it is advisable to go back a little.
In 1657, by a decree of his council
the king had confirmed the prohibition of the trade in spirits which had been
in effect in the colony since Champlain’s time. On 5 May 1660
Bishop Laval had in turn forbidden, under pain of excommunication ipso facto, the giving of intoxicating beverages to the Indians.
Some time later he had excommunicated by name the trafficker Pierre Aigron*, dit Lamothe. Since
the trade had ceased, under the double threat of civil and ecclesiastical
sanctions, Bishop Laval lifted his general excommunication in
October 1661, to reimpose it on 24 Feb. 1662, shortly after the
governor-general, Davaugour, had in an unreflecting moment announced that he
was in favour of this commerce. Just previously in Paris the theologians of the
Sorbonne, who had been called upon by the vicar apostolic to consider the
question, had expressed the opinion that “in view of the disorders which arise
from the sale of such beverages to the Americans [i.e. the Indians], the
ordinary or prelate may, under pain of excommunication ipso facto,
forbid the Europeans to sell such beverages and may treat those who are
disobedient and refractory as being under excommunication.” As a result of
Davaugour’s conciliatory attitude, however, the trade had reached such
proportions and the disorders had become so serious that Bishop Laval had
decided to go to France to seek Louis XIV’s support.
When he returned to Quebec in 1663
the vicar apostolic noted with satisfaction that the traffickers had given in
under the effect of the terror produced by the great earthquake of 1663.
M. de Mézy, the new governor, and Bishop Laval agreed to forbid
conjointly the trade in alcoholic beverages. The union of church and state on
this matter lasted until 10 Oct. 1668. Then, at Intendant Talon*’s instigation, the Conscil Souverain
permitted trade in spirits, although forbidding the Indians to get drunk, which
was an absurdity, considering their particular dispositions. In answer to this,
on 21 April 1669 Bishop Laval made a reserved sin of getting
Indians drunk and giving them alcoholic beverages to take to their villages.
At that moment the great quarrel of
the trade in spirits broke out. Until then, in fact, and except for the
incident caused by Davaugour, the church and the state had had a common policy,
at least officially. But from then on Bishop Laval, the missionaries, and
the clergy were under constant attack from all those – and they were
numerous – who were in favour of the trade. They were accused of
interfering in a matter of commercial policy which rested exclusively with the
civil police. The bishop in particular was reproached for his reserved sin. In
1674 Bishop Laval again submitted the question to the theologians of the
Sorbonne. The reply, dated 8 March 1675, decided in his favour on the
two points that had been proposed: the trade in spirits constituted a mortal
sin, and the ordinary had the right to take appropriate measures to curtail
this commerce, such as making a reserved sin of it.
In his fights against the civil
authority, particularly in those which he waged against the trade in spirits,
Bishop Laval found his episcopal authority questioned everywhere, owing to
the fact that he was only the vicar apostolic. Until 1664 he himself had not
doubted that he had all the powers of an ordinary; consequently he created in
all good faith an officiality, a seminary, and the parish of Quebec. When he
finally discovered the limitations on his office, he besought Rome to establish
a see at Quebec, so that he could organize his church and confront with greater
powers the “perpetual and scornful rivals of the ecclesiastical authority” in
Canada.
At first this request did not seem to
be of a nature to stir up any objections. In 1662 Louis XIV had assured
Bishop Laval of his appointment to the future see of Quebec, which shortly
afterwards he asked the pope to establish. The vicar apostolic had lost no time
in backing up this initiative. Thereupon the Congregation for the Propagation
of the Faith had expressed the opinion that the time had come, indeed, to endow
New France with a diocese. But Louis XIV had finally given such
proportions to the incident of the Corsican guard (20 Aug. 1662),
that relations between Rome and Paris had deteriorated completely; after that
the Congregation for the Propagation of the Faith had proven to be more
reticent about the plan for a see, no longer promising to do other than examine
it attentively.
The king soon demanded that the
future see of Quebec should be attached to that of Rouen. Not being willing to
give way on this point, Rome paid no attention to the matter for two years,
from 1664 to 1666. But from Quebec Bishop Laval was sending urgent letters
to the Holy See, setting forth the activities of the Compagnie des Indes
Occidentales which, on the pretext that there was no ordinary in Canada, was
preparing to send priests there, set up parishes, and appoint priests to
them. Besides, the settlers were contesting the vicar apostolic’s right to
institute and collect tithes. In 1666 Rome resumed its examination of the
matter, but a new demand from Louis XIV again slowed it up: this time the king
wanted the establishment of the see of Quebec to be carried out in a manner
which would respect the privileges of the Gallican church. While
Bishop Laval was fretting vainly in Quebec, Rome finally sent Paris, on
18 June 1668, a model of a bull, “to receive thereon the King’s
orders.” The document was studied, then sent back to the Holy See. The chief
obstacle continued to be the question of subordination to the archbishopric of
Rouen.
In 1669, tired of waiting and seeing
his church threatened with ruin, Bishop Laval made the supreme concession:
he wrote to Rome and accepted that the future see be subordinated to Rouen if
the cardinals considered that it should be. That same year Louis XIV and
Colbert, realizing that the discussions with the Holy See would never end, gave
up the condition that they had maintained till then for the establishment of
the see of Quebec, that is to say the subordination to Rouen!
The matter was proceeding extremely
well in 1670, but Bishop Laval found it impossible to pay the high costs
of the creation of his diocese. Not having a personal fortune, he wrote one
plea after another, requesting that his bulls be sent him free of charge.
Having become anxious, he went to France in 1671 with the determination never
to return to Canada unless the diocese was established. Rome finally agreed to
reduce the costs. The bulls were not sent until 4 Oct. 1674.
Bishop Laval took the oath of loyalty to the king and sailed for Canada at
the end of May 1675.
From that time on the diocese of Quebec
escaped completely from the claims of the archbishop of Rouen, but not yet from
those of the archbishop of Paris, the same Harlay de Champvallon, who had been
promoted from Rouen to Paris. This time Harlay tried to make Quebec subordinate
to the “principal” diocese of France. But in 1679 he had to give up this
project, to which Rome would never have given its approval.
Bishop Laval landed at Quebec at
the beginning of September 1675, after an absence of four years. As
titular bishop he took possession of his cathedral, renewed several of his
ordinances, confirmed the creation of the officiality and the parish of Quebec,
and formed a temporary chapter, since he could not establish it canonically. He
drew his canons from the seminary; shortly before leaving Paris he had renewed
the act of union of the seminary with the Séminaire des Missions Étrangères.
Then in the spring of 1676 he set out to visit his parish.
At the moment when Bishop Laval
was ensuring greater stability for his church, Louis XIV was reorganizing
the Conseil Souverain of Quebec. On 5 June 1675 he raised the number
of councillors to seven – in addition to the governor, the bishop, and the
intendant – who would henceforth be appointed by the king for life.
Bishop Laval got back the second place, which had been his before the
arrival of Jean Talon. The state therefore maintained an important role for the
church in civil affairs in Canada.
Bishop Laval was perfectly aware
of the numerous quarrels which, during his absence from 1672 to 1675, had
sorely tried the union of church and state and which were one of the reasons
for the reorganization of the council. Now in 1676 two important questions
still set the “authorities” against each other: the trade in spirits and the
creation of parishes. The bishop considered it was necessary to assign to Paris
a trusty and devoted representative who would defend the position of the church
in Canada and reply to the attacks of Louis de Buade* de Frontenac and his allies. He
chose Abbé Jean Dudouyt*.
The mission that was entrusted to
M. Dudouyt was all the more necessary since the clergy in New France was
no longer as united as it had been earlier. Indeed, in 1670 the Recollets had
returned to Canada on Jean Talon’s instigation and had been commissioned by the
state to counterbalance the authority and severity of the Jesuits and the
secular clergy in Canada, who were accused of “tormenting people’s
consciences.” These worthy religious, who from 1672 on were patronized by
Frontenac, took their role seriously and became docile tools of the governor.
On the trade in spirits, the creation of parishes, the tithe, they adopted and
preached up Frontenac’s opinions, being moreover entirely at his orders rather
than the bishop’s. Bishop Laval, who knew the reasons for their coming,
had nevertheless received them charitably, had assigned them missionary fields,
and continued to lavish marks of esteem upon them. It was to no avail. The
Recollets surpassed Frontenac’s clan in the calumnies spread at court against
the bishop and the Jesuits – who, it was said, had forbidden the trade in
spirits simply to engage in it themselves on a greater scale and who were more
interested in converting beaver skins than in converting souls.
Bishop Laval had taken advantage
of his stay in Paris to consult the theologians of the Sorbonne again on the
question of trafficking in spirits. He received from them an opinion favourable
in every respect to his own thesis. In the hope of obtaining a contrary
opinion, his adversaries applied to the theologians of the University of
Toulouse. The reply differed entirely from that given by the Sorbonne: “The
Bishop of Quebec cannot legally make a mortal sin, and even less a reserved
sin, of the sale of spirits.” This conclusion was likely to harm
Bishop Laval’s cause. Therefore, upon his arrival in Paris M. Dudouyt
requested an interview with Colbert. On 27 April 1677 he explained to
him the reasons for Bishop Laval’s attitude but did not convince
him. A second audience on 11 May left some hope, as the minister had
listened to him more patiently. He therefore recommended that the bishop
prepare a complete report on the question; the court had sent a similar request
to the intendant, Duchesneau*.
Obviously Louis XIV was
determined to settle the dispute. He ordered Frontenac to convoke 20 of the
leading inhabitants of Canada and collect their opinions on the trade in
spirits. The Conseil Souverain chose these representatives, who met on
28 Oct. 1678. Since almost all of them were engaged in commerce, the
majority declared themselves in favour of complete freedom for the trade in
spirits. The council charged Messrs Nicolas
Dupont
and Jean-Baptiste de Peiras with taking the result of the
consultation to the court. The situation was critical for the church in Canada.
Despite infirmities which were becoming more and more overwhelming,
Bishop Laval sailed immediately for France, in an ultimate effort to
convince the king of the rightness of his cause.
Louis XIV entrusted to his
confessor, Father La Chaise, and the archbishop of Paris the task of
studying the reports received from Canada on the trafficking in alcoholic
beverages. Then, on 24 May 1679 he published an ordinance forbidding
trade in spirits outside the French settlements. Bishop Laval promised to
bring the case of reserved sin into accord with the dispositions of the ordinance.
This outcome of a struggle that had lasted 20 years was enough to disappoint
the old bishop profoundly; he could, nonetheless, gather some solace from the
fact that the traffickers in alcohol would no longer be able legally to seek
out the Indians even in their most remote villages.
The question of the creation of
parishes was likewise debated in France during the winter of 1678–79, in
Bishop Laval’s presence. In confirming the founding of the seminary of
Quebec in 1663 Louis XIV had approved the double principle of the
removability of parish priests and the payment of tithes to the seminary, which
assumed responsibility for redistributing them equitably to the officiating
priests of the various parishes. Now, with time and, it seems, under the
influence of Jean Talon, this system – the only one which could be applied
to New France at that period – was criticized and then violently opposed.
Bishop Laval was accused of not wanting to set up parishes. To that there
were two replies: on the one hand, as long as he was vicar apostolic
Bishop Laval did not have the necessary powers for setting up
parishes – which he found out only after he had “erected” that of Quebec
in 1664; on the other hand he could set up parishes only if the subsistence of
the parish priests was assured. Around the period 1675–80 no “parish” was yet
capable of keeping a parish priest, not to speak of building a church or a
presbytery. To assure the necessary income it would have been necessary to
increase considerably the number of parishioners by extending indefinitely the
boundaries of the parishes, which would consequently have become mission
territories again.
On the question of parishes, just as
on that of the trade in spirits, Bishop Laval had to give in to the king’s
will. In May 1679 Louis XIV signed an edict concerning “tithes and
fixed parishes”: the tithes would in the future belong to the priest of the
parish, “in which he would be established permanently, in place of the
removable priest who ministered to it previously.” Bishop Laval carried this
edict out without any bad grace. As early as 1678 he had consulted with
Frontenac and Duchesneau on the manner of assuring the subsistence of the
parish priests. Shortly afterwards he had created seven parishes. “In most of
these parishes,” he wrote, “the settlers have not been willing to conform to
the decision of the conference concerning the feeding and upkeep of their
priests. No matter; I have sent my missionaries to spend the winter among them,
binding myself to furnish them what they would need.” Working in conjunction
with the intendant, Bishop Laval created six new parishes in 1684; again,
not one of them was capable of providing for the upkeep of its priest. Help
from the seminary and the state was necessary. This was abundant proof of Bishop Laval’s
wisdom when he conceived his seminary in 1663; despite the new regime, which
was instituted in principle by the edict of 1679, the seminary continued
nevertheless to support the parishes.
Bishop Laval returned to Canada
in the autumn of 1680, after being busy for more than a year with other
questions concerning his church, in particular with the canonical union of the
abbeys of Maubec and Lestrées with his bishopric – which, however, he was
not able to bring about. In 1681 he visited his diocese.
The year 1681 saw the beginning of
new difficulties between the bishop and the Recollets. The latter had just
obtained from the king the site of the former seneschal’s court, with a view to
building on it a hospice, which would serve as a retreat for them when they
were staying in Quebec. Bishop Laval received this project favourably but
specified, in conformity with the royal document, that this place of retreat
was not to be transformed into a convent or used for public religious services.
The religious nonetheless made a convent of it, topped it with a belfry [see Henri Le Roy],
held services for the public, and openly disregarded the bishop’s instructions.
The latter rescinded the authorization he had given them to build a hospice; in
retaliation the Recollets gave up their missions. Bishop Laval was finally
compelled to forbid them to exercise any ecclesiastical functions. Once more
the king had to settle the dispute: he ordered the belfry to be destroyed, but
the convent continued to exist. Conciliatory as usual, Bishop Laval had,
at the beginning of this dispute, invited a Recollet, Father Adrian Ladan,
to preach the Advent sermons at the cathedral. The religious took advantage of
this to reprimand the intendant and Frontenac’s adversaries;
Bishop Laval’s warnings had no effect on him. The Recollets were
conscientiously playing the role that the state had entrusted them with. . . .
With the exception of the Recollets
and, for a time, the Sulpicians, Bishop Laval’s relations with the various
religious communities in his diocese were always excellent and were
characterized by mutual esteem and respect. The prelate, it is true, was not
always in agreement with the superiors of the different communities, but their
harmony was never disturbed by that. For example, Bishop Laval was not
very much in favour of the multiplication of religious orders in his diocese:
he would have liked to join together the two communities of nuns hospitallers,
just as he wanted to unite the nuns of the Congrégation de Notre-Dame with the
Ursulines. In the meantime he helped each group as best he could and finally
acknowledged the separate existence of each. From 1668 on he was on good terms
with the Sulpicians, even making M. de Queylus, whom he had allowed to
return to Montreal, his vicar general. His charity and humility left no room in
Bishop Laval for rancour or shabby actions.
On his return from his pastoral visit
in 1681 the prelate, who was exhausted, fell seriously ill: “Within two weeks
all hope had been given up.” He would soon be 60, and his health was declining.
He became convinced that a younger and more robust bishop would do more good than
he from then on and that he had to present his resignation to the king. Before
doing so he wanted to complete some aspects of his work. He saw to the founding
of six new parishes, set his chapter up canonically in 1684, and entrusted to
the seminary the executing of some projects, leaving 8,000 livres
for the construction of the seminary chapel, foreseen in the plans for the
building which had been started in 1678, 4,000 livres for the
construction of a church at Saint-Joachim, and 8,000 livres
for the upkeep of the priest who would minister to this parish and would direct
the arts and crafts school that he had created there. In the autumn he sailed
for France.
When his resignation had been
accepted, Bishop Laval agreed to remain bishop of Quebec until the consecration
of his successor, Abbé Saint-Vallier, whom he had chosen with the utmost care.
However, as the strained relations existing at the time between Paris and Rome
did not permit the bulls to be sent immediately, Abbé Saint-Vallier went to
Canada in 1685 with the title of vicar general. On his return to Paris in
January 1687 he had some disputes with Bishop Laval about the
seminary of Quebec. At that point the old bishop realized that his successor
intended to alter profoundly the organization of the church in Canada, of which
his beloved seminary was the keystone. Only one solution was open to him to
save his work: induce Abbé Saint-Vallier, who had not yet received his bulls,
to renounce his see. Bishop Laval had the most influential personages intervene,
but in vain; Abbé Saint-Vallier would not give in, but contented himself with
explaining his attitude and promising to be moderate.
In the spring of 1687
Bishop Laval was preparing to leave for Canada, where he wanted to finish
his days. The Marquis de Seignelay prevented him from doing so, fearing that
his presence there would be a source of quarrels and division.
Bishop Laval wrote to Father La Chaise, to Seignelay himself, but had
no success in moving them. From then on he gave himself over to God’s will
and wrote his priests an admirable letter full of resignation before this
immense trial which he accepted “with a heart filled with joy and consolation.”
Abbé Saint-Vallier was consecrated
bishop on 25 Jan. 1688. Bishop Laval became Monseigneur
1’Ancien. With the support of the new bishop and after
promising not to cause him any difficulty, Bishop Laval received
permission to return to Quebec. He arrived there on 3 June, and
Bishop Saint-Vallier on 31 July.
Monseigneur l’Ancien’s return to the colony delighted not only his priests
but the whole population, over which, according to the governor-general, Brisay de Denonville, he had “great
influence because of his character and his reputation for saintliness.” Though
certain representatives of the civil authority and most of the businessmen, who
were interested in the trade in spirits, were opposed to him, the settlers,
despite the difficulties caused by the establishment of tithes, sincerely loved
and venerated this courageous bishop who was completely devoted to his church
and whose piety, humility, and above all immense charity they were well
acquainted with. People everywhere were conscious of the progress accomplished
under Bishop Laval: from 5 in 1659 the number of parishes had become 35 in
1688; the number of priests had increased from 24 to 102 (36 Jesuits, 19
Sulpicians, 14 Recollets, and 33 secular priests), and from 32 the number of
nuns had risen to about 97. Nor were people indifferent to the fact that 13
Canadian priests were already at work in Canada and that 50 Canadian nuns had
pronounced their perpetual vows in the various communities at Quebec and
Montreal. In addition to laying the bases of a national church,
Bishop Laval had made a very successful start on its erection.
He went back to the seminary to live.
A donné, Brother Hubert Houssart, was assigned to serve
him. The prelate no longer gave thought to anything but prayer and
mortification, limiting his outside activities entirely to acts of charity, a
charity that was, moreover, very unobtrusive. He gave away everything he owned,
asking for nothing that was not for his poor, for whom he even kept the greater
part of his meals. When he had nothing left, he knew that his end was near. He
attended all the parish services, being the first in the church every morning,
well before sunrise and even in the coldest weather. He was completely
withdrawn from church affairs and was no longer interested in anything but his
beloved seminary, upon which he continued to lavish his counsels, and the
seminarists, whose progress he followed closely, and with whom he was fond of
chatting during their periods of relaxation. Bochart de Champigny, the intendant,
described aptly the old bishop’s new existence in one short sentence: “He lived
in his retirement in a saintly manner, concerning himself only with the
direction of his seminary.”
His seminary! How much grief it was
to cause him in his last years! At first, Bishop Saint-Vallier was
violently opposed to the parishes being united with it, and finally, in 1692,
he obtained from the king a complete separation, the seminary being reduced to
nothing more than an institution for training future priests. This meant the
destruction of Bishop Laval’s great work. It had to happen sooner or
later, it is true; but who would think of reproaching the old bishop for his
attachment to his life’s work – this seminary to which he had made over
all his landed property – especially after Bishop Saint-Vallier’s
severity towards him and his collaborators? At the height of the bishop’s
quarrel with the seminary, Bishop Laval had prudently withdrawn to Saint-Joachim
to avoid having to intervene and oppose his successor openly. In the attitude
of Bishop Saint-Vallier, whose personal sincerity he recognized, he saw
almost the action of some evil power bent upon destroying this new church. The
prospect wrung cries of pain from him. But on learning the news of the
re-formation of his seminary, he submitted as usual to the ways of providence,
forgetting himself to console his priests and incite them to submission. Even
though he was wounded to the depths of his soul, he preached reconciliation and
peace: never had his virtue been more heroic.
The wounds caused by the re-formation
of the seminary were not yet healed when a new disaster fell upon this
institution. On 15 Nov. 1701 a fire destroyed in a few hours the seminary,
the chapel, and the presbytery. This was a painful trial for Bishop Laval.
As he was very old, would he see his seminary standing again? The rebuilding
was done with great fervour; everything but the chapel was soon restored. But
scarcely was the end of the work in sight when on 1 Oct. 1705 almost
all the seminary was again destroyed by fire. His Excellency, wrote Brother
Houssart, “did not lose for a single moment his peace, his joy, or his
tranquillity, because these accidents were not matters capable of affecting his
patience and his virtue, which were far above all that.” And the humble brother
added that “only the interests of God, virtue, and religion were capable of
moving him,” which illustrates perfectly this bishop’s whole life.
In the middle of these harsh trials
Bishop Laval had to come out of his retreat somewhat to fulfil on occasion
the episcopal functions of Bishop Saint-Vallier, who had left in 1700, not
to return to the colony until 1713. Monseigneur 1’Ancien
had, besides, always helped his bishop, without ever revealing in public his
feelings on questions which were likely to set him against Saint-Vallier. In
his successor’s absence he particularly insisted always upon attending services
in the cathedral, to enhance them by a bishop’s presence. It was in so doing
that during Holy Week of 1708 he contracted a chilblain on his heel which
became worse and soon brought him to death’s door. He died on 6 May, at
half past seven in the morning. His body lay in state in the cathedral.
“Immediately after his death the
people canonized him, as it were,” wrote Intendant Raudot, “having
had the same veneration for his body as for those of the saints, when they had
come in crowds from all parts while he was exposed on his bed of state and in
the church, to touch him with their chaplets and prayer-books. They even cut
off pieces of his robe, which several have had enshrined in silver, and they
treat them as relics.”
The funeral took place on 9 May.
M. Glandelet pronounced the funeral oration. Then
the first bishop of Quebec was buried under the cathedral.
It
is impossible to list here in detail the thousands of documents concerning
Bishop Laval’s long career; that would require an almost complete
inventory of the archives of the 17th century preserved at the AAQ, the ASQ,
and to a lesser degree at the AQ. Fortunately the principal documents of
interest have been published in the following work: Quebecen. Beatificationis et Canonizationis Ven. Servi Dei.
Francisci de Montmorency-Laval Episcopi Quebecencis (†1708). Altera Nova Positio Super Virtutibus Ex Officis
Critice Disposita, Typis Polyglottis Vaticanis, MCMLVI. In this are to be
found, in addition to the documents drawn from the archives mentioned above,
long extracts from the JJ and JR, the
correspondence of the governors, intendants, and Marie de l’Incarnation, the Jug. et délib., the Mandements des
évêques de Québec (Têtu et Gagnon), I, the Annales de l’Hôtel-Dieu de Québec by Mother Juchereau, etc., as well as
the earliest biography of this bishop, Mémoires sur la vie de M. de Laval, premier évêque de Québec, by Bertrand de Latour,
published in 1761, and the useful letter from Brother Houssart on the last
years and death of Laval.
Studies on Bishop Laval are also
numerous. All the general histories devote much space to him; we shall not list
them here, contenting ourselves with mentioning the following studies. Émile
Bégin, François de Laval (Québec, 1959). [Faillon], Histoire de la colonie française. Auguste Gosselin, L’Église du Canada, I; Henri de Bernières, premier curé
de Québec (Les Normands au Canada, Québec, 1902); Vie de Mgr
de Laval. Rochemonteix,
Les Jésuites et la N.-F. au XVIIe siècle, I, II, III. H. H. Walsh, The church in the French era (A history of the
Christian church in Canada, ed. J. W. Grant, I, Toronto, 1966).
SOURCE :
http://www.biographi.ca/en/bio.php?id_nbr=890 Gisant
de François de Laval, basilique-cathédrale Notre-Dame de Québec
San Francesco de
Montmorency-Laval Vescovo
6
maggio
Montigny-sur-Avre,
Chartres, 30 aprile 1623 – Québec, 6 maggio 1708
Nato a Montigny-sur-Avre
nel 1623 in una delle famiglie più in vista della Francia, Francesco de
Montmorency-Laval fu ordinato prete nel 1647 e operò come vicario generale di
Evreux. Sei anni dopo venne designato come amministratore apostolico del Tonchino.
Ma non vi andò mai per divergenze politiche delle potenze coloniali. Si mise
allora a disposizione delle missioni canadesi. Consacrato vescovo e nominato
nel 1658 Vicario apostolico della Nuova Francia, in Canada si mise subito al
lavoro per quella Chiesa: sorsero parrocchie, ospedali, scuole. Per
l'educazione fondò la Congregazione femminile di Notre Dame. Difese gli
indigeni e restò fedele a Roma nonostante le spinte di chi voleva una Chiesa
nazionale sul modello gallicano. Divenuto vescovo della neonata diocesi del
Quebec nel 1670, si ritirò per motivi di salute dieci anni dopo. Morì nel 1708.
È beato dal 1980 e santo dal 2014.
Martirologio
Romano: A Québec in Canada, beato Francesco de Montmorency-Laval, vescovo,
che istituì in questa città la sede episcopale e per circa cinquant’anni si
dedicò con tutto se stesso a consolidare e accrescere la Chiesa in un’ampia
area dell’America settentrionale fino al golfo del Messico.
E' il quarto beato,
proclamato da papa Giovanni Paolo II dall’inizio del suo pontificato. Francesco
de Montmorency-Laval nacque in una delle maggiori famiglie di Francia, il 30
aprile 1623 a Montigny-sur-Avre, nella diocesi di Chartres; i suoi genitori
Hugo de Laval e Michaela de Pericord lo educarono ad una vita con solidi principi
cristiani.
Continuò gli studi presso i Gesuiti nel Collegio di La Flèche, dove nel 1631 si
iscrisse alla Congregazione Mariana e ricevette la tonsura, perché a contatto
con i missionari che tornavano dall’estero, decise di scegliere la vita
religiosa.
Nel 1635 un anno dopo la morte del padre, fu nominato canonico di Évreux dal
vescovo, suo zio. Per dare seguito alla sua vocazione sacerdotale, entrò nel
Collegio di Clermont a Parigi, dove completò gli studi di teologia, ma a
seguito della morte dei suoi due fratelli maggiori nel 1645, fu costretto ad
occuparsi degli affari di famiglia, essendone diventato il capo.
Fu per questo ordinato sacerdote il 1° maggio 1647 e svolse il suo ministero
sacerdotale a Parigi; nell’anno successivo fu nominato arcidiacono di Évreux
(Vicario generale) iniziando subito una serie di visite nella diocesi.
Nel 1652 ritornò in Francia il gesuita padre Alessandro de Rhodes, per cercare
sacerdoti disposti ad andare nel lontano Oriente, e nel 1653 il Consiglio della
Regina, del quale faceva parte anche s. Vincenzo de Paoli (1551-1660), designò
Francesco de Laval come Vicario Apostolico per il Tonchino in Indocina; il
quale si dimise dalla carica di arcidiacono, affidando il governo della
famiglia al fratello minore.
Ma quest’incarico non poté essere eseguito, per le divergenze sorte nei Paesi
dell’Oriente, da parte delle Nazioni colonizzatrici europee, quindi si ritirò
per quattro anni (1654-1658) all’Hermitage, che era una scuola di spiritualità
a Caen diretta da Jean Bernières de Louvigny (1602-1659) mistico
francese.
Anche i missionari del Canada, nel contempo richiesero un Vicario Apostolico e
papa Alessandro VII nel 1658, nominò Francesco de Montmorency-Laval Vicario
Apostolico della Nuova Francia e vescovo titolare di Petra e così questa volta
partì subito, lasciando la Francia e sbarcando in Canada il 16 maggio 1659 e un
mese dopo giunse a Québec.
Il suo instancabile apostolato durato oltre trent’anni, lo vide impegnato a
creare in qualche modo tutta un’organizzazione, praticamente dal nulla;
parrocchie, missioni, scuole, comunità religiose, combattendo contro lo
sfruttamento degli indiani da parte dei mercanti e lottando contro il
gallicanesimo dei successivi governatori (movimento di rivendicazione della
massima libertà ed autonomia nei confronti della Curia Romana, creatasi in seno
alla Chiesa di Francia a partire dall’epoca di Filippo il Bello).
Nel 1662 ritornò in Francia per una visita, ottenne dal re Luigi XIV molti
privilegi per la Chiesa del Canada; al suo ritorno, il 26 marzo 1663 fondò il
Seminario di Québec, che dal 1852 è diventato l’Università Laval.
Di fronte all’allargarsi del campo apostolico del suo Vicariato, chiese alla
Santa Sede di erigerlo a Diocesi, cosa che avvenne per decreto di papa Clemente
X del 9 ottobre 1670, e dal 1° ottobre 1674 il Vicariato della Nuova Francia,
divenne Diocesi di Québec e Francesco de Laval fu il suo primo vescovo.
L’ordinazione episcopale ebbe luogo l’8 dicembre del 1674, per mano del
Delegato pontificio. La sua opera di pastore si profuse nel portare la
coesistenza pacifica tra le popolazioni indigene e quelle europee, combatté il
deplorevole fenomeno del commercio delle bevande alcoliche agli Indiani; diede
il suo sostegno alle Istituzioni.
Consolidò le fondamenta della sua diocesi, che tanto beneficio portarono alla
vitalità della Chiesa nel Canada e in tutta l’America del Nord; si consultava
con il clero per le decisioni importanti; con il suo zelo ispirò il fervore
delle Comunità religiose, stimolando il loro apostolato; fu l’apostolo della
Sacra Famiglia, la cui devozione propagò in tutte le case e presso gli
Indiani.
Favorì nel 1676 la nascita della “Congregazione di Notre-Dame”, che diventando
poi una comunità di religiose non di clausura, ma dedite all’insegnamento, sarà
una novità per la Chiesa dell’epoca.
La sua instancabile opera si estese nell’aiuto ai poveri, nel creare e
moltiplicare piccole scuole, nel preparare gli artigiani necessari per la vita
della colonia, istituendo una scuola d’arti e mestieri.
Volle rimanere sempre fedele e legato alla Chiesa di Roma, nonostante il
gallicanesimo imperante. Personalmente condusse una vita di preghiera e
mortificazioni, con una povertà volontaria; i suoi beni li donò al Seminario,
riducendosi a dipendere dal Superiore per ogni necessità; si prodigò di persona
ad aiutare gli ammalati, sia dell’Ospedale Hotel-Dieu di Québec, sia
dell’infermeria del Seminario, sia nelle capanne degli Indiani.
Impose a se stesso uno stile di vita molto duro, fino agli ultimi anni ebbe
l’abitudine di dormire sul pavimento, di alzarsi alle due del mattino, di
celebrare la Messa alle quattro e mezza per gli operai del Québec. Tanta
abnegazione diede i suoi frutti: le parrocchie da 5 salirono a 35, i sacerdoti
da 24 a 102 e le religiose da 22 a 97.
Per causa di salute, dopo dieci anni d’intenso episcopato, nel 1684 fu
costretto a dimettersi, pur continuando ad essere un valido aiuto per il suo
successore.
Visse ancora vent’anni, rinchiuso nel suo Seminario di Québec, in povertà,
umiltà e preghiera e dove morì ad 85 anni il 6 maggio 1708. Fu sepolto nella
cripta della cattedrale; nel 1878 fu iniziato a Québec il processo ordinario
per la sua beatificazione; il 28 febbraio 1960 gli fu riconosciuto il titolo di
venerabile.
Papa Giovanni Paolo II lo ha beatificato il 22 giugno 1980, con festa
celebrativa al 6 maggio. Il 30 maggio 1993 i suoi resti mortali sono stati
traslati nella cappella a lui dedicata, all’interno della nuova
basilica-cattedrale di Notre-Dame de Québec. Papa Francesco ha decretato
la sua canonizzazione equipollente in data 3 aprile 2014 ed il 12 ottobre 2014
ha presieduto la celebrazione in piazza San Pietro a Roma in cui è stato
proclamato santo.
Autore: Antonio Borrelli
SOURCE : http://www.santiebeati.it/dettaglio/91844
Johanne Chagon. « Les portraits de François de Laval », Cap-aux-Diamants, printemps 1993 : https://www.erudit.org/fr/revues/cd/1993-cd1040748/8251ac.pdf
Voir aussi : http://www.carrefourkairos.net/lavalndc.html
http://www.carrefourkairos.net/msp/nouvfrance.htm
https://www.ecdq.tv/saint-francois-de-laval-2/
http://id.erudit.org/revue/schec/1958/v25/n/1007440ar.pdf