jeudi 23 octobre 2025

Saint ROMAIN de ROUEN, évêque et confesseur

 

Saint Romain sur le trumeau du portail des Libraires de la cathédrale Notre-Dame de Rouen


Saint Romain

Évêque de Rouen (+ 639)

Conseiller du roi franc Clotaire II, et peut-être même son chancelier durant quelque temps, il fut choisi comme archevêque de Rouen. Il eut fort à faire pour faire disparaître le paganisme. On lui prête pour cette raison une victoire mémorable sur un horrible dragon au visage jusqu'alors inconnu. Une manière comme une autre de conter ses victoires sur le paganisme. En tous cas, jusqu'au XVIIIe siècle, une procession le rappelait chaque année dans les rues de Rouen, et jusqu'à cette date, par privilège royal, le chapitre de la cathédrale avait le droit de faire libérer des prisonniers. Ce qui est sûr, c'est que cet évêque de Rouen accomplit tous les devoirs d'un bon pasteur.

"Issu d'une famille aristocratique gallo-romaine, Romain est éduqué à la cour du roi mérovingien Clotaire II, puis choisi par lui pour être évêque de Rouen en 626. Bien accueilli dans le diocèse, il mène une vie de prière et de jeûne vouée à la poursuite de l'évangélisation jusqu'à sa mort vers 639."

site du diocèse de Rouen:

- Comment Romain est devenu patron de Rouen

- Qui était Romain? - L'origine de la légende de la gargouille

- Saint Romain: un inconnu célèbre

- Un miracle populaire

Il est le saint patron de la ville de Rouen

À Rouen, vers 644, saint Romain, évêque, qui détruisit les sanctuaires des païens, encore très fréquentés dans la cité, éleva les bons à un état meilleur et s'efforça de détourner les mauvais de leurs mauvaises actions.

Martyrologe romain

SOURCE : https://nominis.cef.fr/contenus/saint/8708/Saint-Romain.html

Statue de Saint-Romain, Église Notre-Dame Beauficel-en-Lyons


Saint Romain, patron de la ville de Rouen

Publié le 23 octobre 2015

Comment Romain est devenu patron de Rouen

Comme pour une douzaine d’autres évêques de Rouen entre le 4ième et le 8ième siècles, c’est d’abord sa vie qui en fait un saint.

Mais la vénération grandit au cours du 10ième siècle. Pendant les invasions normandes, alors que les reliques étaient mises à l’abri dans d’autres villes, le corps de Romain est transporté de l’église hors les murs où il se trouvait, à l’intérieur des murailles.

Sans doute le fait qu’il n’a pas « déserté » a-t-il compté lorsque la paix est revenue : les reliques sont alors reconnues par les autorités religieuses et placées dans l’église qui porte le nom du saint.

Aux alentours de cette église se tient tous les ans à partir des années 1030 la foire saint Romain, fête à la fois religieuse et commerciale, dans laquelle on peut voir l’ancêtre de notre foire saint Romain.

L’influence du saint grandissant, on ramène ses reliques vers 1090 dans la cathédrale romane récemment consacrée.

Origine de la légende de la gargouille

Autour de tous les saints, la piété populaire construit des histoires qui témoignent de la confiance des hommes dans leur pouvoir libérateur et protecteur.

La gargouille vaincue par saint Romain n’échappe pas à la règle. Mais l’anecdote n’apparaît qu’en début du 14ième siècle et on peut penser qu’on cherche à justifier un privilège qu’avait le chapitre de la cathédrale : le jour de l’Ascension, l’ensemble des chanoines avait le droit de délivrer un prisonnier convaincu d’un crime de sang non prémédité. Après qu’il eut porté les reliques de saint Romain, il était libre.

En 1541, on construisit même un édifice au premier étage duquel le prisonnier présentait les reliques à la foule. C’est la Fierte saint Romain, encore visible près de la Halle aux Toiles. Le privilège et la procession se perpétuèrent jusqu’à la Révolution.

Qui était Romain ?

Issu d’une famille aristocratique gallo-romaine, Romain est éduqué à la cour du roi mérovingien Clotaire II, puis choisi par lui pour être évêque de Rouen en 626.

Bien accueilli dans le diocèse, il mène une vie de prière et de jeûne vouée à la poursuite de l’évangélisation jusqu’à sa mort vers 639.

Saint Romain, un inconnu célèbre

Évêque de Rouen durant une douzaine d’années, de 626 à 639 environ, la chronologie n’est pas sûre, – entre Hidulphe et Andoenus, notre saint Ouen, la vie de Romain est bien mal connue.

Sa plus ancienne biographie, fin du VII s., ne fait l’objet que de quelques citations. Une autre, en vers latins, rédigée d’après la première, ne sera redécouverte qu’au XVIIIè s. entre les X et XIIè s., plusieurs récits de sa vie et de ses miracles seront compilés, à Soissons et à Rouen, d’après les œuvres précédentes. L’ensemble a fourni une série d’images propres à illustrer notamment les quadrilobes du portail de la Calende à la cathédrale vers la fin du XIIIè s. et, plus tard, les vitraux justement célèbres du transept (baies 28 et 30).

Ces scènes n’offrent dans leurs sujets qu’une originalité limitée. On les retrouve dans de nombreuses vies de saints ou dans la Bible : naissance inespérée chez un couple d’âge avancé, issu ici de l’aristocratie gallo-romaine ; éducation à la cour du roi mérovingien, ici Clovis II, en un temps où les souverains choisissent les évêques ; il en est de nombreux autres exemples. C’est un vieillard inspiré qui désigne Romain à qui le souverain remet son bâton pastoral. Bien accueilli dans son diocèse Romain poursuit l’évangélisation, détruit des temples encore fréquentés, célèbre pieusement la messe et préside la liturgie de sa cathédrale : miracle de l’ampoule de Saint chrême brisée et reconstituée à sa prière. Il prend le temps de l’oraison dans la solitude et résiste à la tentation comme saint Benoît.

En un temps où la sainteté se reconnaît à une vie ascétique de prière et de jeûne vouée à la poursuite de l’évangélisation des villes et des campagnes, la vox populi porte Romain au nombre de la douzaine de saints reconnus parmi les premiers évêques de Rouen du IV au VIIIè s

Saint Romain, patron de la ville de Rouen

Son culte se développe essentiellement au XIè s. A sa mort, vers 639, Romain est inhumé hors les murs selon la coutume, probablement dans une basilique funéraire élevée pour l’occasion. Ses restes reposent dans un sarcophage de marbre rouge, – peut-être un réemploi, – qui sera longtemps conservé dans la crypte d’une église plusieurs fois détruite, reconstruite et remaniée. Elle est de nos jours dédiée à Saint Godard.

Au temps des invasions normandes, alors que la plupart des reliques conservées à Rouen sont mises à l’abri, – les restes de Saint Godard et le  » chef « de Saint Romain partent pour Saint Médard de Soissons, – le corps de Romain est transporté à l’intérieur des murailles de Rouen. On le conserve sans doute dans une chapelle du palais archiépiscopal, proche des murs, du côté du Robec et des marais du  » Malpalu « . C’est le secteur inondable de la périphérie urbaine mais à une altitude que les débordements les plus menaçants n’atteignent guère. Romain y gagne la réputation de les arrêter. Le fait que, par ailleurs, il n’ait pas  » déserté  » semble être pour beaucoup dans sa désignation comme patron de la ville et du diocèse.

Au cours du Xè s. le calme revenu dans la  » Normandie  » ducale, les restes de Romain réintègrent leur sarcophage dans leur église hors les murs. Cette église qui dépend directement de la Cathédrale porte alors son nom. Elle devient le centre d’un pèlerinage important que les miracles rapportés dans un ouvrage rédigé sous l’épiscopat de Robert (989 – 1037) illustrent encore davantage. Tout ceci aboutit, en mai 1036, à une procédure de reconnaissance officielle des reliques en présence de l’Archevêque Robert et de Gradulphe abbé de Saint Wandrille. Le procès-verbal officiel est déposé dans le reliquaire.

A l’occasion de la vénération annuelle des reliques du saint évêque se déroule, dès les années 1030 semble-t-il, sur les terrains encore peu construits des environs de l’église, une fête populaire cumulant le  » Pardon  » au sens religieux, les réjouissances et bientôt les affaires. Pour cette  » Foire  » saint Romain – le mot dérive de feria, la fête, – on a même semble-t-il battu monnaie pour l’occasion. Au nord de la ville le  » champ du  pardon  » en garde la mémoire.

Dans le même temps, l’abbé de Saint Ouen qui a rapatrié les reliques de son patron agit de même. L’abbaye vient de s’affranchir de la tutelle de l’archevêque et entreprend la construction d’une grande basilique romane.

Peu avant 1090, l’archevêque Guillaume Bonne-Ame (1079-1110) décide de transférer à la cathédrale les reliques de Saint Romain. Il s’agit sans doute de ramener le pèlerinage au cœur de la cité dans une église plus vaste, – la cathédrale romane a été consacrée en 1063, – pour accueillir les fidèles.

En échange Guillaume institue une procession annuelle avec station dans l’ancienne église Saint Romain. Elle prendra le nom de Saint Godard qui passait alors pour y avoir été inhumé également une centaine d’années avant Romain.

La cathédrale devient donc le centre du culte de Saint Romain ce qui renforce le renom du patron du diocèse. On y accueillera en 1140, le chef du saint évêque enfin restitué par l’Abbé de Saint Médard de Soissons.

Un miracle populaire

Il n’a pas été question jusqu’ici du fameux miracle de la gargouille. C’est qu’il n’apparaît que fort tardivement dans la biographie de Romain. C’est dans le vitrail dédié à Romain dans le chœur flambant neuf de l’abbatiale de Saint Ouen que le monstre est signalé pour la première fois. Nous sommes dans la première moitié du XIVè s. Les bas-reliefs du portail de la Calende, sculptés entre 1260 et 1290 et consacrés à la vie de Romain, n’en disent rien. L’épisode est lié au privilège régalien que le chapitre de la cathédrale va revendiquer avec une belle persévérance jusqu’à ce que Georges II d’Amboise en obtienne confirmation définitive.

La première mention qu’on en trouve remonte à 1210. On délivrait, le jour de l’Ascension, à la demande du chapitre, un prisonnier convaincu de crime de sang non prémédité. Après qu’il ait, à la procession de l’après-midi  » levé la fierté », la châsse de Saint Romain qu’il portait pour l’exposer à la vénération de la foule, il était libre. En 1541, on construisit même, devant la halle aux toiles, un édifice spécialement adapté à cette manifestation.

Contestée dès 1210 par le gouverneur de la ville garant de l’intégrité du pouvoir royal, des témoins attestent l’existence de cette pratique du temps des ducs-rois.

Cette délivrance à l’occasion de la fête de l’Ascension semble s’enraciner dans l’affirmation du symbole des apôtres selon lequel le Christ est  » descendu aux enfers  » pour délivrer les hommes morts avant lui. Selon l’iconographie de l’Anastasis, l’enfer, figuré par un monstre gueule ouverte qui happe jusque là l’humanité est détruit. A la façon d’un épieu la Croix du Christ vainqueur de la mort cloue définitivement le monstre, gardien des portes, jetées au sol. Le prisonnier libéré et l’affreuse gargouille enchaînée étaient l’expression populaire de cette affirmation théologique. Le culte de saint Romain en bénéficia.

Confirmé sous Charles VI en 1394 dans un texte qui mentionne la gargouille pour la première fois, le privilège est validé à nouveau en 1425 par Henri VI d’Angleterre sous le régent Bedford et finalement, en 1512, sous Georges II d’Amboise par Louis XII qui n’avait rien à refuser au neveu de son ami Georges 1er. Il devait se perpétuer jusqu’en 1790.

Ainsi s’explique la dissociation entre cette procession solennelle du jour de l’Ascension et le 23 octobre, date de la Saint Romain, fixée sans doute pour célébrer le transfert de ses reliques à la Cathédrale à la fin du XIè s. Disparues à la Révolution, il ne reste plus rien de tangible du saint patron de Rouen hormis le sarcophage, enlevé en 1904 de la crypte de Saint Godard alors désaffectée. Il sera transféré dans l’ancienne église des Carmes déchaussés devenue église paroissiale sous le titre de Saint Romain.

SOURCE : https://rouen.catholique.fr/diocese/articles/292853-saint-romain-patron-de-la-ville-de-rouen/

Peinture de saint Romain, évêque de Rouen, dans les salles basses de l'archevêché de Rouen.


ROUEN : ORIGINE ET HISTOIRE DE…

LA SAINT ROMAIN

Après avoir joué un rôle important à la cour du roi Clotaire II, le futur Saint Romain devint évêque de Rouen en 626. Et, nous lui devons, entre autres miracles, celui de la… « Gargouille » qui a suscité une grande ferveur populaire.

Cette « gargouille » était un monstre qui sévissait dans un marécage proche de Rouen. Devant les ravages qu’il causait, l’évêque décida d’intervenir, mais ne trouva aucun homme assez courageux pour l’accompagner, hormis  un condamné à mort auquel il promit la liberté contre aide et obéissance…

Une fois sur place, s’approchant du monstre avec une croix, Saint Romain qui vit la bête se coucher à ses pieds, ordonna au prisonnier de lui passer son étole autour du cou et de la ramener en ville où on la brûla en public sur le parvis de la cathédrale.

Rouen et ses environs, furent débarrassés du monstre qui les terrorisait. Cela fut, dit-on, l’origine du pèlerinage de la Saint Romain.

Un peu d’histoire…

Dès lors, les fidèles y participaient chaque année, au point qu’en 1080, on trouve trace d’une première foire organisée à cette occasion.

Jusqu’en 1785, elle se tint au Champ du Pardon, au-dessus de la place Beauvoisine, avant de s’installer sur la place du Boulingrin et alentour. Elle fut maintenue pendant la Révolution, et changea de nom en 1793 pour devenir la « Foire de la Montagne », avant de retrouver son nom d’origine en 1795.

Vérité oblige aussi à reconnaître que la renommée de la foire dépassait déjà largement les frontières du pays de Caux pour s’étendre à presque toute la Normandie.

De plus en plus d’attractions

Au début du dix-neuvième siècle, la Saint Romain présentait encore ses deux facettes, associant  activités commerciales et distractions, mais les attractions prirent peu à peu le pas sur le négoce et le public découvrit alors chaque année toujours plus de divertissements, de spectacles forains et de bonimenteurs.. Parmi eux, le pitre Decousu, natif de Rouen, mais aussi des cirques, des ménageries, des théâtres forains, etc.

Après 1848, les attractions s’installèrent entre la place Beauvoisine et la place du Boulingrin. Elles quittèrent néanmoins le Boulingrin un certain temps avant de s’y réinstaller en 1949, puis quitter à nouveau le lieu, même si dans la mémoire collective, ce haut lieu rouennais reste indissociable de la Saint Romain.

Une foire qui se tenait sur 2 jours en 1080, puis à 9 jours en 1450, et à 15 en 1799 avant d’atteindre 20 jours en 1862 et 6 semaines en 1878 !

Cette foire qui, en 1983, a déménagé sur les quais de Seine, et ouvre chaque année fin octobre demeure l’une des plus grandes foires de l’Hexagone. Une foire qui réunit un public familial, fidèle, enjoué et bon enfant, avec son lot de nouveaux métiers pour séduire les plus exigeants !

L’hommage aux forains morts à la guerre

Rouen est aussi, ne l’oublions surtout pas, la ville de France où se dresse le… Monument aux morts des forains morts pour la France, inauguré le 15 novembre 1931.

Œuvre de l’architecte Jean Dahmen d’après une maquette  de Real del Sarte et d’un long combat des syndicats forains de l’époque pour que soit érigé un tel monument en France, ce monument qui représente  un soldat mort emporté sur un char, le tout  encadré par un portique, a été restauré après-guerre par un sculpteur rouennais.

Chaque année, le 11 novembre, pendant la foire, y a lieu une cérémonie en hommage à tous ceux qui ont combattu pour défendre le pays.

SOURCE : http://www.linterforain.fr/actualites/rouen-origine-et-histoire-de-la-saint-romain-579.html

Un « vieux » saint sans cesse rajeuni : l’évêque romain de Rouen

Catherine Vincent

p. 299-317

Résumé

L’histoire du culte de saint Romain de Rouen (évêque du VIIe siècle) atteste comment des saints anciens ont pu, dès le Moyen Âge connaître des temps de réactualisation, fût-ce par la transformation de leur légendaire. La trame banale de la première Vie de saint Romain s’est ainsi prêtée à divers remaniements qui en ont fait un saint évangélisateur permettant d’insérer dans le plan divin la conversion des Vikings, une figure épiscopale exemplaire sur le modèle grégorien et le protecteur de la cité, garant du « Privilège saint Romain », droit de grâce exercé par le chapitre. Il est notable que, dans cette perspective, l’Église de Rouen ait retenu un saint de l’époque mérovingienne, plutôt qu’une figure plus récente, comme l’ont fait de nombreuses cités italiennes et lui a manifesté une fidélité durable. Mais au-delà de sa dimension identitaire normande, le saint évêque pourrait aussi incarner les aspirations d’une Église de France en pleine affirmation à la fin du Moyen Âge.

Texte intégral

Une foire d’automne porte encore de nos jours son nom à Rouen ; aux visiteurs de la cathédrale, on raconte son histoire telle qu’elle a été fixée sur un beau vitrail du début du XVIe siècle ; la « châsse de saint Romain » fait partie des joyaux du Musée des antiquités de Seine-Maritime1… Mais qui, hormis les Rouennais et les visiteurs de la ville, connaît encore le nom de ce saint évêque ? Celui-ci a pourtant joui d’une telle popularité au Moyen Âge que sa légende – au sens hagiographique du terme – a été régulièrement mobilisée et enrichie pour écrire l’histoire de la cité et de l’Église locale. Si saint Romain mérite de figurer dans une réflexion d’ensemble sur le culte des « vieux saints » à l’époque moderne, c’est qu’il constitue un exemple significatif de la manière dont des figures attachées aux premiers siècles de la christianisation d’un diocèse ont pu, dès le Moyen Âge, vivre dans la mémoire. Ce fut, en général, d’une manière discontinue et marquée, au fil de cette longue période, de fluctuations, de temps de déclin, suivis de phases de « recharge », pour reprendre le vocabulaire d’Alphonse Dupront2. Or dans le cas de l’évêque saint Romain de Rouen, les recharges n’ont pas consisté en une simple reprise des données anciennes. Épousant les aléas de l’histoire mouvementée de la métropole neustrienne devenue normande, elles ont opéré des déplacements et des adjonctions révélatrices de ce que les générations successives ont attendu d’une figure de sainteté épiscopale. Autre signe de la dynamique qui a animé l’histoire de ce saint évêque, le fait que l’enrichissement de sa légende ne se repère pas uniquement à travers les réécritures de sa Vie, soit en latin, soit en langue vernaculaire3, mais aussi par le truchement de multiples initiatives cultuelles dont le parcours qui suit va tenter de rappeler les principaux jalons.

Un saint évêque dans l’ombre des grandes figures du siège rouennais

Le nom de Romain figure sur la liste des évêques de Rouen, dont la plus ancienne version date de la deuxième moitié du IXe siècle : il aurait occupé le siège entre 629 et 639 environ, entre Hidulfe, évêque attesté en 614 au concile tenu en cette année à Paris et saint Ouen, référendaire de Dagobert dont la vie et les dates de l’épiscopat sont tout à fait connues (641-684)4. Romain est donc le 19e évêque de Rouen ou le 20e, si l’on suit la tradition qui inclut dans la liste saint Nicaise, cet apôtre du Vexin dont la mission se serait arrêtée aux portes de la ville. Ce sont les moines de Saint-Ouen qui inaugurèrent cette adjonction, alors qu’ils prenaient possession des reliques de saint Nicaise en 10325. Pour leur part, les « Actes des archevêques » de Rouen rédigés après 1070 par un clerc de la cathédrale sont très laconiques sur saint Romain : « À Hidulfe, succéda le bienheureux Romain, de noble origine et très célèbre par sa vertu. »6

Une telle discrétion, qui n’est pas rare, ne doit pas être interprétée abusivement ; à chaque genre littéraire sa mission : aux Vitæ revient la narrativité. En se fondant sur cet indice et sur une mention très explicite dont il sera bientôt question, on peut déduire qu’à l’époque où les Acta ont été rédigés, voire dès l’établissement de la liste épiscopale, le dossier hagiographique de saint Romain aurait été déjà pourvu d’au moins une Vie antérieure à celles qui ont été conservées à partir du Xe siècle : bien que sa trace ait été perdue, elle a sans doute fourni la trame des œuvres ultérieures, toutes postérieures à l’installation des Vikings dans la région.

Romain connut très vraisemblablement une destinée conforme à celles des évêques mérovingiens7. Membre de l’élite par ses origines, il dut être formé au palais, comme le furent ses contemporains saint Éloi et saint Ouen, avant d’être placé par décision du souverain sur un siège épiscopal. C’est du moins ce que retiendront à son propos les hagiographes dont la production nous est parvenue. Romain semble donc être un peu plus qu’un saint totalement obscur des temps mérovingiens, plus qu’un simple nom venu combler un vide dans une liste épiscopale.

Un autre signe de la place que l’évêque occupa dans la vie religieuse et la mémoire rouennaise est fourni par l’histoire de sa dépouille mortelle. À sa mort, Romain aurait été inhumé dans l’église Notre-Dame-hors-les-Murs, dans un sarcophage de marbre rouge encore visible de nos jours, très restauré, en l’église paroissiale Saint-Godard8. Cette église Notre-Dame abrita ensuite les corps des premiers ducs avant leur transfert à la cathédrale sous l’archevêque Maurille (1055-1067) et prit le nom de Saint-Godard, puis de Saint-Romain. Or on apprend qu’après 843, pour satisfaire aux désirs des moines de l’abbaye royale Saint-Médard de Soissons, Charles le Chauve a demandé le transfert des corps de trois évêques rouennais, saint Godard (attesté en 511 et dont on est alors persuadé qu’il est le frère jumeau de Médard), saint Romain et saint Remi (755-762), frère du roi Pépin le Bref9. Alors que le clergé rouennais laissa partir la dépouille entière du dernier, il semblerait qu’il ait exigé de conserver le chef du premier et le corps du deuxième, n’en cédant que la tête. Cette fragmentation des corps saints, qui devient habituelle à l’époque carolingienne, traduit l’importance accordée à certains anciens évêques dont les clercs ne veulent pas priver la cité de la présence protectrice. Réciproquement, l’intérêt porté par les moines de la puissante abbaye Saint-Médard de Soissons à ces trois évêques rouennais, dont saint Romain, attesterait que ce dernier a déjà acquis une certaine réputation, d’autant plus qu’il est désormais établi que, contrairement à ce qui fut écrit à partir du XIe siècle et au-delà, ce transfert ne doit rien à un « exode » des reliques, mises à l’abri par les clercs dans la précipitation devant les raids vikings. Mais il n’est guère possible d’aller plus loin pour cette période.

Aussi, comme l’a dit Lucien Musset, retiendra-t-on que saint Romain apparaît alors comme un « nom célèbre mais dont la vie est à peine connue »10, un saint évêque sans relief particulier, dont le culte s’apparente à celui qui est voué à nombre de ses homologues dans leurs diocèses respectifs. Objet d’un certain attachement de la part du clergé rouennais (il n’est guère possible de se prononcer sur ce qu’il en était pour l’ensemble des fidèles de la cité), voire au-delà de son diocèse si l’on se réfère à la translation de son chef à Soissons, il vit cependant dans la mémoire à l’ombre des plus hautes personnalités comme saint Ouen ou, si l’on entend remonter aux débuts de la christianisation du diocèse, saint Victrice, qui a introduit des reliques de saints italiens et orientaux dans l’ecclesia civitatis, à savoir la cathédrale, et a laissé un sermon De laude sanctorum longtemps attribué à saint Ambroise et dans lequel il expose la légitimité du culte des saints.

L’essor du culte de saint Romain après la conquête normande : une figure fédératrice

C’est à la faveur de la reconstruction de l’église rouennaise, au lendemain des incursions vikings et de la concession faite à Rollon en 911, tandis que s’affermit la principauté normande, que saint Romain sort de ce traitement commun, si l’on ose dire, et fait de plus en plus figure de saint patron de l’Église de Rouen, supplantant en la matière ses plus prestigieux prédécesseurs, dont le grand saint Ouen.

De cette nouvelle phase de l’histoire de saint Romain, portent tout d’abord témoignage plusieurs textes qui viennent enrichir sa tradition hagiographique. L’initiative la plus ancienne qui nous soit connue revient à l’archevêque de Rouen Hugues II (942-989). Celui-ci se préoccupa de faire rédiger une Vie de saint Romain par un dénommé Gérard qui se présente lui-même dans sa lettre d’envoi, placée en tête de l’œuvre, comme pater cœnobitarum, responsable de communauté. Dans le même texte, Gérard précise que la Vie qu’il a rédigée n’est pas la première qui concerne saint Romain : il évoque en effet les difficultés qui furent les siennes pour se procurer la Vita veterana antérieure, dont on ne saurait dire précisément de quand elle date11. L’identité du moine Gérard est controversée : faut-il y voir le grand réformateur monastique Gérard de Brogne ou, comme il semble être désormais admis, un abbé de Saint-Crépin de Soissons qui serait peut-être originaire de la communauté Saint-Remi de Reims d’où il aurait été envoyé à Soissons dans la perspective de réformer l’établissement, à la tête duquel il succéda à deux abbés laïcs12 ? La production de ce texte, destiné à la cathédrale ou au chapitre des clercs qui desservaient l’église Saint-Godard où avait été déposé le corps de saint Romain, a pu être mise en relation avec la translation de ses reliques, effectuée par le même archevêque Hugues qui avait commandé la Vita. Au moment des raids vikings, celles-ci avaient été en effet déposées dans une chapelle de l’enceinte de la ville où saint Romain aurait gagné la vertu de protéger la cité contre les inondations. Hugues les replaça dans l’église Saint-Godard, devenue ensuite Saint-Romain.

Faute de connaître la Vita prima à laquelle Gérard fait allusion, il est impossible de détecter dans quelle mesure et de quelle manière celui-ci a suivi et adapté le texte qu’il a eu sous les yeux. Mais le lecteur peut observer que son œuvre met en valeur, à travers la figure de saint Romain, une sainteté épiscopale au service de l’Église et aux accents déjà réformateurs. Saint Romain y est en effet présenté comme né de parents d’origine aristocratique et illustres pour leurs vertus et leur piété. Sa naissance a fait l’objet d’une annonce angélique ; son éducation soignée le conduisit, en raison de ses propres talents, à la Cour du roi franc, qu’il servit quelques années, brillant à son tour en ce milieu mondain par sa modestie, son humilité et sa fidélité aux vertus chrétiennes. Romain est ensuite élu évêque par le clergé et le peuple de Rouen en raison de sa haute réputation. Dans l’exercice de ses fonctions, il se distingue par ses prières, par sa résistance aux tentations de la chair, incarnées par un diable aux formes féminines, et par ses largesses envers les pauvres, les veuves et les orphelins. À retenir la convergence de ces deux initiatives de l’archevêque Hugues (la commande de la Vita et la translation des reliques) et à considérer la tonalité de la Vie écrite par Gérard – où, de manière significative, le roi n’intervient en rien dans l’élection de l’évêque, à la différence de ce qu’il en est dans des version ultérieures –, il est manifeste que le soin apporté au culte de Romain s’insère dans une entreprise de restauration du pouvoir épiscopal et de promotion de l’idéal réformateur.

Il semble qu’à partir de ce moment, la fortune de saint Romain n’ait cessé de croître, comme en témoigne l’œuvre d’un autre auteur du nom de Fulbert qui rédigea au XIe siècle une nouvelle version de la Vie de l’évêque13. Jacques Le Maho, que nous suivons ici, voit en ce Fulbert, parmi de nombreux homonymes, un archidiacre de l’Église de Rouen, surnommé le Sophiste et qui enseignait dans l’école capitulaire installée à proximité de l’église Saint-Godard14. Fulbert est contemporain de l’archevêque Maurille (1055-1067), ancien moine de Fécamp connu pour ses tendances réformatrices. Dans son œuvre, Fulbert reprend la trame de la Vie de saint Romain du moine Gérard, mais lui fait subir des évolutions sensibles. Il accorde une place beaucoup plus large à la dimension narrative et au merveilleux, introduisant – à moins qu’ils n’aient déjà figuré dans la Vita veterana citée dans la lettre de Gérard – les miracles ensuite retenus dans les images qui le représentent comme dans les diverses réécritures de sa Vita, jusque dans les textes en langue vernaculaire produits pour un large public. Se succèdent ainsi, cités dans l’ordre du texte, les épisodes miraculeux suivants : la destruction d’un temple de Vénus installé dans ce qui a été identifié comme l’ancien amphithéâtre de la ville de Rouen, situé au nord ; l’arrêt d’une violente crue de la Seine ; la lutte sans merci contre le paganisme par la destruction des temples païens, dans les campagnes du diocèse que parcourt l’évêque ; la réparation d’un vase contenant du saint chrême et que le diacre chargé de l’apporter à l’évêque a brisé par mégarde dans sa précipitation ; la vision, par Romain, de sa mort prochaine ; la résistance au démon venu le tenter sous les traits d’une femme. C’est à l’occasion du miracle relatif à la crue de la Seine que l’auteur met dans la bouche de l’évêque la révélation prophétique de la venue d’une armée de pirates par le fleuve, qui, une fois convertis et installés dans la cité, finiront par servir Dieu dans la paix :

Ces eaux ne sont en fait qu’une préfiguration de l’armée de pirates qui surviendra un jour et submergera complètement et avec une brutalité inouïe toute votre contrée et soumettra vos descendants à sa domination. Cependant sachez que cette nation, actuellement encore en proie aux erreurs du paganisme, dès qu’elle entendra le nom du Christ, vénèrera la foi catholique et prendra soin de ses sujets dans une paix parfaite15.

Si riche soit-elle, la tradition hagiographique écrite n’est cependant pas seule à apporter la preuve que le culte de saint Romain devient, à partir du Xe siècle, l’objet d’une mise en valeur toute particulière de la part des archevêques de Rouen. La figure de cet évêque, pasteur de la cité qu’il a su protéger en diverses circonstances et de la région qu’il a convertie au christianisme, incarne aussi, et sans cesse davantage, l’évêque tel que le conçoivent les réformateurs grégoriens. Face aux ambitions du monde monastique qui se présente comme la voie de salut par excellence, les clercs séculiers entendent s’appuyer sur des figures d’autorité qui illustrent l’action pastorale et la puissance des évêques. Dans cette perspective et en complément de la commande d’une Vie qu’il fit au moine Gérard, l’archevêque Hugues érigea la célébration de la fête de saint Romain en obligation pour toutes les paroisses du diocèse. Puis son successeur Robert (990-1037), fils du duc Richard Ier, étendit cette obligation à tous les diocèses normands, affirmant l’autorité du siège métropolitain à travers ses saints patrons.

L’intérêt porté à saint Romain ressort également de dispositions mentionnées dans l’œuvre liturgique de l’archevêque Jean d’Avranches (1068-1078). Parmi les usages propres à Rouen, se trouve la procession qui, le jour des Rameaux, se rendait de la cathédrale à l’église Saint-Godard – ancien lieu de sépulture de saint Romain – choisie comme reposoir pour une hostie consacrée qui était transférée solennellement et rapportée ensuite à la cathédrale, en rappel de l’entrée triomphante du Christ à Jérusalem, dans une châsse où l’on a voulu voir celle de saint Romain. Le jour de l’Ascension, plus de doute : la châsse de saint Romain est portée en procession puis, à l’entrée dans la cathédrale, placée en hauteur de manière à ce que les fidèles passent sous elle pendant que des clercs, installés dans les parties hautes, interprètent le chant du Viri Galilei qui rappelle l’admonestation des anges aux apôtres après la montée du Christ au Ciel16.

De même, le corps de saint Romain était mobilisé pour accueillir des visites solennelles ou sceller, avec d’autres saints locaux, les engagements pris par le duc et l’archevêque en faveur de la cathédrale, par exemple entre 1028 et 1033 pour le duc Robert le Magnifique et son oncle l’archevêque Robert. La fête de saint Romain, le 23 octobre, était l’occasion d’une foire que les historiens ont mise en relation avec l’existence d’un monnayage de saint Romain frappé sous le duc Richard Ier (942-996). Il y aurait là le signe de la diffusion de la mémoire de saint Romain bien au-delà des sphères du clergé de la cathédrale et de la haute aristocratie17. Poursuivant les honneurs rendus à saint Romain par ses prédécesseurs, l’archevêque Guillaume Bonne Âme (1079-1100) fit transférer son corps à la cathédrale, commandant pour la circonstance une très belle châsse, décrite par Orderic Vital. Le même concéda pour la Saint-Romain, le 23 octobre, une indulgence qui reste connue ultérieurement sous le nom de « Pardon »18. Ces initiatives semblent devoir être comprises dans le cadre d’une rivalité qui oppose alors les deux grands centres religieux rouennais, la cathédrale et Saint-Ouen, dont l’abbé est alors Nicolas (1042-1092), fils du duc Richard III. L’abbé entendait attirer les pèlerins dans son monastère dont il se préoccupait de restaurer les bâtiments en conséquence ; à ce titre, il reçut en 1090, avec d’autres reliques restituées par l’abbaye Saint-Médard de Soissons, le chef de saint Romain ; de plus, il enrichit encore la collection de l’abbaye et fit rédiger un livre de Miracles de saint Ouen19.

À partir du Xe siècle, Romain semble donc s’imposer comme une figure majeure de l’Église de Rouen. Le culte qui lui est rendu tranche sur celui dont bénéficient les autres évêques qui illustrèrent le siège rouennais. Il reste à comprendre ce qui a pu provoquer la fortune de cette figure épiscopale banale, si l’on en juge par les maigres éléments livrés par la tradition, et susciter son enrichissement aux Xe et XIe siècles. Précisément, c’est sans doute cette banalité qui a permis de greffer sur la trame classique de la vie d’un saint évêque mérovingien des développements qui allaient épouser l’histoire de la région, en insérer dans le plan divin les événements les plus récents et encore traumatiques, de manière à donner sens à l’intrusion de ces nouveaux maîtres au gouvernement particulièrement efficace et à leur assimilation en cours. Ce faisant, les hagiographes, comme les évêques dans l’agencement des célébrations cultuelles et des fêtes, ont pris soin de faire droit aux aspirations les plus variées, voire antagonistes, illustrant par un miraculeux qui n’a rien d’original la figure apaisante d’un protecteur, celle d’un grand qui se montre loyal serviteur de son souverain et celle d’un pasteur conforme aux idéaux grégoriens. Le prénom de notre évêque, Romanus, doit enfin retenir l’attention. Il offrait l’occasion d’un lien privilégié avec la cité romaine, en un temps où s’affermit l’autorité de son évêque sur l’Occident. L’auteur de la Vie en français du XVe siècle ne se prive pas de le rappeler au moment où Romain est élu archevêque de Rouen, présentant pourtant la chose d’un point de vue plus historique que strictement ecclésiastique, puisqu’il qualifie Romain de « celui qui portoit le nom de la ville la plus renommee de tout le monde et là où se tenoit le siege de l’empire. »20

Mais, outre ses résonances ecclésiastiques en période de réforme grégorienne, ce prénom serait aussi opportunément venu soutenir les prétentions des ducs de Normandie qui, plus que les autres grands féodaux du royaume, se posèrent en rivaux des Capétiens au pouvoir encore mal affermi21. La figure de saint Romain ne saurait donc s’enfermer dans une seule conception « populaire » de la sainteté, à l’inverse de ce que suggère Felice Lifshitz pour justifier sa fortune22. Cette dernière tient sans doute davantage à la polyvalence de ce que représente le saint évêque, qui combine la dimension de l’évangélisateur à un moment où s’est rejoué, pour les Vikings, un épisode de conversion d’un peuple païen, avec la stature épiscopale et la référence impériale, alors que les idéaux réformateurs et les ambitions politiques sont à l’œuvre dans la principauté.

Le saint patron du clergé rouennais

Depuis lors, saint Romain ne cesse de s’affirmer comme le saint patron du clergé rouennais dans le domaine des pratiques liturgiques et de dévotion, sans que le légendaire élaboré au Xe siècle ne soit enrichi.

Les ostensions solennelles des reliques de saint Romain en des circonstances exceptionnelles se poursuivent, telle celle qui est intervenue en 1124 devant le roi Henri Ier et sa seconde épouse, Adelise. Le souvenir en est conservé par la copie d’un document médiéval, réalisée au XVIIIe siècle lors d’un transfert des reliques qui subsistaient après leur destruction par les Huguenots en juillet 1562. Le chapitre de la cathédrale précise alors qu’il est en possession du corps et du chef (in hac ipsa urna totum corpus cum capite Beatissimi Romani)23. Cette mention permet de couper court à toute revendication de la part de l’abbaye Saint-Ouen et de mettre en exergue un prélat à la fois conforme aux idéaux du bon gouvernement épiscopal et entretenant avec le prince des relations d’étroite collaboration, puisque, dans les dernières versions de sa Vie, Romain est présenté comme ayant été envoyé sur le siège de Rouen par le roi Clotaire.

Une autre preuve du rôle de chef de l’Église rouennaise qui est le sien est apportée par les honneurs qui sont rendus à ses reliques pour lesquelles est ordonnée une nouvelle translation, en 1179, dans une châsse commandée par l’archevêque Rotrou, fervent partisan de la réforme grégorienne.

Retenons aussi que, un siècle plus tard, lorsque les bas-clercs de la cathédrale décident de fonder une confrérie pour s’entraider et s’assurer une sépulture décente, c’est précisément sous le double patronage de la Vierge Marie et de Romain qu’ils se placent. La compagnie, implantée dans la dernière chapelle du collatéral sud, dite chapelle du Petit-Saint-Romain, est connue par des statuts de 1292 rédigés en latin et qui comptent parmi les plus anciens du diocèse de Rouen (seuls ceux de la confrérie Saint-Dominique établie au couvent des frères prêcheurs, de 1277, leur sont antérieurs) et même de toute la province. Or leur préambule, qui place l’entreprise sous l’égide de plusieurs archevêques de Rouen (Nicaise, Mellon, Romain, Ouen, Ausbert et Victrice, dans l’ordre du texte qui est aussi celui de la chronologie, à l’exception du dernier nommé), avoue élire plus spécialement saint Romain comme protecteur24. La fondation de cette confrérie est peut-être plus ancienne que la date de ses statuts ne le laisse entendre, si l’on en croit des exemples comparables attestés dans d’autres cathédrales25. Sa composition en fait une compagnie cléricale, destinée à tous les clercs de la cathédrale qui ne sont pas titulaires d’un bénéfice canonial. Rappelons qu’il existe alors quatre collèges de chapelains, avant que les archevêques Guillaume de Flavacourt et Pierre Roger, le futur Clément VI, n’en fondent deux nouveaux, portant le total à six26. Le gouvernement de la confrérie Saint-Romain repose sur une structure simple de trois procurateurs. La compagnie déploie une activité essentiellement cultuelle, de célébration régulière de messes en faveur de ses membres, vivants et décédés, sans qu’il soit fait mention de manifestations particulières en l’honneur de saint Romain, hormis la fête annuelle. Elle assure aussi un minimum d’entraide mutuelle, notamment lors du départ de l’un de ses membres en pèlerinage et, principalement, lors des funérailles. Le culte de saint Romain se trouve donc étroitement associé au clergé de la cathédrale, même si les statuts n’interdisent pas l’adhésion de laïcs, puisque toute personne à jour de sa cotisation sera considérée comme « participant aux bienfaits ». Inclure ainsi des membres laïcs dans une compagnie d’origine cléricale s’observe dans bien d’autres confréries27.

Ce signe manifeste de l’attachement du clergé rouennais pour saint Romain, qui gagne peut-être le milieu des fidèles, trouve une autre preuve quasiment concomitante dans une partie du programme iconographique du portail sud de la cathédrale, le portail de la Calende, réalisé autour des années 1310 et 1335 grâce aux libéralités d’un riche bourgeois de Harfleur, Jean Gorren. Markus Schlicht, puis Franck Thénard-Duvivier, ont analysé les choix iconographiques des quadrilobes sculptés qui figurent aux parties basses des ébrasements du portail et répondent d’un point de vue formel à ceux du portail des Libraires28. Les images placées au portail sud de la cathédrale, celui qui ouvre sur la ville et auquel a été donné le nom de ces assemblées mensuelles du clergé qui avaient pour but d’en resserrer les rangs et de contrôler la correction de son action pastorale, a retenu au sein d’un ensemble biblique et moralisant, la Vie de deux grands évêques rouennais : Romain et Ouen. Sans doute faut-il y voir, pour saint Ouen, de nouveau, une affirmation de sa fonction épiscopale par la cathédrale qui n’entend pas laisser sa célébration au seul monastère éponyme. Mais que l’autre figure épiscopale retenue soit saint Romain est tout à fait suggestif. Le légendaire mis en image suit la trame de la Vie de Fulbert du XIe siècle, fondée sur le modèle grégorien du pasteur, missionné par le roi29. L’évêque Romain est ainsi présenté comme celui qui consacre (le miracle du saint chrême occupe le registre central de la composition), comme celui qui convertit et prêche (les miracles de la destruction du temple de Vénus à Rouen et des temples païens dans les campagnes, figurent aux deuxième et quatrième registres) et comme celui qui vit dans le célibat (le miracle de la tentation féminine déjouée par la force de la prière s’étend sur la dernière scène du quatrième registre et les trois premières du cinquième).

À suivre cet enchaînement de témoignages, il ne fait plus de doute que saint Romain soit devenu la figure tutélaire de l’Église de Rouen et le protecteur de la ville. Peut-on aller jusqu’à voir en lui une figure identitaire normande ? On serait tenté de le penser en observant que, dans la nouvelle abbatiale de Saint-Denis que fit édifier l’abbé Suger, la chapelle haute de la façade occidentale est dédiée à la Vierge, à saint Michel et à saint Romain ; qui plus est, celle-ci a été consacrée par l’archevêque de Rouen, Hugues d’Amiens (1130-1164)30. Ce parti pris de l’abbé de Saint-Denis, que l’on imagine mûrement réfléchi, à la hauteur de son intelligence politique, a été analysé comme l’expression de la volonté de bien marquer les hiérarchies de pouvoir au sein du royaume, à un moment où le Normand manifestait des ambitions hors du commun, dangereuses pour le Capétien. En effet, l’attention portée au siège de Rouen en ses représentants passé (Romain) et présent (l’archevêque consécrateur) n’en est pas moins marquée par leur subordination aux intérêts du roi que sert la réalisation de la nouvelle abbatiale dionysienne31.

Beaucoup plus tard, en 1325, la Nation normande de l’université de Paris célébrait la Saint-Romain à la demande du recteur Hermann, originaire de la province, en suspendant toute lecture publique en ce jour ; le fait est encore attesté au XVIIIe siècle. Pourtant la métropole semble avoir peiné à diffuser le culte de Romain au-delà de la cité, voire du diocèse, si l’on en juge notamment par le faible nombre des dédicaces d’église qui l’ont retenu. Fortement ancré parmi les membres du clergé rouennais, ce culte rencontrait également un véritable écho parmi l’ensemble de la population. Ainsi, en 1296, l’archevêque Guillaume de Flavacourt a fait porter un reliquaire de saint Romain en forme de bras pour arrêter une violente crue de la Seine. Cette dimension identitaire cléricale et citadine va se trouver à l’origine d’un nouvel enrichissement de la légende de Romain.

Le défenseur d’un curieux privilège

Le dernier avatar de l’histoire de saint Romain, associé à un singulier privilège de justice détenu par le chapitre de la cathédrale, est celui qui lui a valu la plus grande popularité – autant que l’historien puisse en juger – et demeure le plus présent dans la mémoire des Rouennais32.

Le « Privilège saint Romain » consiste en un droit de grâce exercé, à l’occasion de la fête de l’Ascension, en faveur d’un condamné à mort choisi par le chapitre parmi les détenus des geôles royales. L’homme gagnait sa liberté après avoir porté en procession la châsse de saint Romain – la Fierte – jusqu’à la cathédrale, depuis la place de la Vieille Tour (ancien emplacement du palais ducal) où il devait la soulever trois fois pour la présenter aux fidèles rassemblés, de manière à rendre public le pardon qui lui était ainsi accordé. Or à suivre les divers mémoires produits pour en obtenir des souverains successifs la reconduction, les origines de la détention par le chapitre de ce droit régalien s’enracineraient dans un miracle de saint Romain, banal mais inconnu des Vies anciennes. Le récit veut en effet que l’évêque ait libéré la ville de Rouen d’un dragon au souffle fétide, en se faisant aider d’un condamné à mort qui aurait été en conséquence gracié.

L’histoire du « Privilège saint Romain », dont les origines demeurent obscures, n’est bien documentée qu’à partir du XIVe siècle. Notons d’emblée qu’aucune des Vies de l’évêque connues avant le XIIIe siècle ne fait allusion ni au dragon ni au condamné à mort. Il faut attendre la production en langue vernaculaire pour voir ces éléments intégrés dans la trame du récit, comme il en est dans le texte de la Vie qui figure dans le petit livret imprimé du début du XVIe siècle et où saint Romain, le condamné et le dragon figurent tous trois sur le bois gravé de l’illustration de couverture. C’est dire le degré de popularité alors atteint par cet épisode, puisque tout laisse penser que ce livret a été conçu à l’intention des assistants à la procession du prisonnier. Il en va de même pour les cycles iconographiques : pas de dragon dompté au portail de la Calende, alors que celui-ci est lové aux pieds de saint Romain sur un vitrail des parties hautes de Saint-Ouen, daté de la première moitié du XIVe siècle et qui en constituerait donc l’une des plus anciennes attestations33. Le dragon est ensuite présent, dans toute sa fougue maîtrisée par le prisonnier, sur les beaux vitraux offerts par Jacques Le Lieur en 1521 pour la nouvelle chapelle de la confrérie Saint-Romain, dite chapelle du Grand-Saint-Romain, située dans le transept sud de la cathédrale34.

Le miracle du dragon et du prisonnier constituerait donc l’ultime enrichissement médiéval du légendaire de saint Romain, dont l’introduction semble avoir été très progressive. Rappelons que la première mention écrite du privilège n’apparaît pas avant le début du XIIIe siècle, même si tous les historiens de la cité se sont évertués à en traquer la piste antérieurement35. La Normandie vient d’être rattachée au domaine royal et les représentants de Philippe Auguste furent sans doute tentés de revenir sur le droit régalien exercé par les chanoines. Mais le conquérant avait promis de respecter les privilèges de la province. Face aux officiers du roi de France, les chanoines ne se justifient que par l’approbation royale antérieure, sous les Plantagenets, laquelle n’a curieusement laissé aucune trace écrite dans les sources actuellement disponibles, ce qui ne manque pas d’intriguer de la part d’un pouvoir fort jaloux de ses prérogatives. À cet argument historique, s’ajoute l’invocation de la protection de la Vierge et de saint Romain, les deux saints patrons de la cathédrale36.

La description de la cérémonie de l’ostension solennelle de la châsse, qui intervient le jour de l’Ascension et se trouve déjà dans le De officiis ecclesiasticis de Jean d’Avranches mais sans mention du privilège de justice, figure pour la première fois dans les statuts de la confrérie Saint-Romain, approuvés en 1346 et complétés en 1375, mais connus par une copie vidimée de 1453 en langue vernaculaire37. Cette cérémonie constitue l’une des deux fêtes annuelles de la compagnie, la seconde, située le 23 octobre pour le Pardon, étant consacrée à régler les affaires internes. Les statuts précisent quelle part est prise par les confrères pour aider les chanoines dans la mise en œuvre de leur privilège. Aux côtés des clercs, les membres de la confrérie interviennent en effet pour le convoi du prisonnier depuis le château du roi, siège de la prison ; la confrérie organise dans sa propre chapelle la célébration de la messe que le prisonnier doit entendre à la fin de la procession, une fois parvenu à la cathédrale ; enfin, les confrères nourrissent le prisonnier libéré avant de le reconduire chez lui, si celui-ci habite Rouen. Mais le document ne mentionne ni le miracle du dragon ni le condamné qui aurait aidé le saint : le premier n’apparaît que dans un mémoire daté de 1394 et de nouveau produit en réponse à une enquête royale, sans qu’il y ait encore allusion au second.

Entre-temps fut produit un curieux exemplum relatif à saint Romain que recèle un manuscrit provenant de la bibliothèque des frères prêcheurs de Poissy38. Celui-ci est inséré dans un rosarius, comme l’auteur désigne lui-même son œuvre, vaste recueil composé en l’honneur de la Vierge et qui comprend cinquante chapitres, tous ordonnés de la même manière : en tête, la description en une trentaine de vers d’une chose ou d’un animal ; puis des développements sur la manière dont les qualités énoncées pour ladite chose peuvent être rapportées à la Vierge ; puis un ou plusieurs contes dévots qui sont souvent des miracles mariaux ou des exempla ; enfin une chanson ou un dit, de tonalité pieuse ou profane, rattaché à ce qui précède. L’une des pièces, dédiée au roi Philippe VI de Valois, permet de dater le manuscrit après 1328. L’auteur, resté anonyme, est un frère prêcheur, fort savant, qui dit avoir touché les reliques de saint Ouen, sans doute lors d’un passage à Rouen. La présence de cet exemplum au sein d’un tel recueil ne laisse pas d’étonner puisque à aucun moment il ne cite la Vierge Marie. Qui plus est, le motif narratif, qui n’a pu être rapproché d’aucun type connu, met saint Romain en position difficile. Le récit expose en effet comment une recluse de la porte cauchoise qui a su, par sa servante, qu’une femme était brûlée publiquement à Rouen, a commenté l’événement en disant que la condamnée n’avait que ce qu’elle méritait. Ce propos lui a valu d’être privée des visions du Christ présent dans l’hostie, dont elle était gratifiée. Elle s’en ouvrit à son confesseur, saint Romain, qui lui fit la réponse suivante :

Par foy dit saint Romain, ne vous scé conseillier.
Si com jugastes celle vous devez vous jugier.

La recluse prit le conseil à la lettre et entreprit de se faire brûler dans le four du boulanger voisin dès qu’elle sut, de nouveau grâce à sa servante, que celui-ci s’était absenté, après avoir fait chauffer ledit four. À son retour, le boulanger, épouvanté, découvre le corps calciné ; il est accusé de meurtre par la population du voisinage, alertée par ses cris, et ne dut la vie sauve qu’à l’intervention de saint Romain. Étant seul en mesure de comprendre l’enchaînement des événements, l’évêque va demander au roi de France (sic) la grâce du prisonnier. Le texte s’achève brutalement, car le manuscrit est endommagé.

Profondément ancré dans le contexte dévot du XIIIe siècle et du début du XIVe, comme le prouvent la mise en scène d’une recluse, l’évocation d’un miracle eucharistique qui illustre la présence réelle et l’importance accordée à la confession, ce texte fait de saint Romain un redresseur d’erreur judiciaire puisqu’il le met en position d’avoir obtenu une grâce, par un concours miraculeux de circonstances. On notera cependant que cette grâce provient du roi et que le saint évêque ne brille pas ici par ses qualités de confesseur… Serait-ce une manière d’exalter a contrario celles des frères prêcheurs, nouvellement venus sur la scène pastorale, par rapport aux évêques et aux clercs séculiers ? Sans entrer davantage dans l’analyse de ce récit, on se bornera ici à suggérer qu’il pourrait bien avoir été un élément – sans suite – d’un argumentaire qui se cherchait en faveur de la défense du privilège de la grâce capitulaire, en un moment où sa justification était encore mal assurée. Le frère prêcheur l’a-t-il entendu lors d’un séjour rouennais ? L’a-t-il lui-même créé ? Autant de questions auxquelles il semble en l’état actuel des connaissances difficile de répondre. Au total, ce récit étonnant, et qui est loin d’être à l’avantage de saint Romain, se serait révélé peu pertinent et aurait laissé place au miracle du dragon, un lieu commun hagiographique beaucoup plus efficace et consensuel, recevable y compris dans le contexte culturel de la pastorale nouvelle développée depuis le XIIIe siècle par l’Église.

De fait, le miracle du dragon, un topos hagiographique, va s’imposer durablement dans le légendaire qui entoure la mise en œuvre du privilège. Il se situe dans la continuité de la trame hagiographique de la Vie de saint Romain, puisque à propos du miracle du Temple de Vénus est évoqué un monstre qui séjournait dans les entrailles de la colline située au nord de la ville. Les figures de saints évêques sauroctones sont fréquentes dans l’hagiographie, à commencer, dans le diocèse de Rouen, par celle de saint Nicaise à la Vie duquel des emprunts explicites auraient été faits39 et, dans un diocèse voisin, celle de saint Marcel de Paris40. De plus, le privilège se situe en un temps de l’année liturgique qui est celui des Rogations, ces trois jours qui précèdent le Jeudi de l’Ascension et durant lesquels se déroulent des processions, ordonnées en faveur des biens de la terre par saint Mamert de Vienne41. Il est fréquent que ces processions soient marquées par la présence d’un dragon, tourné en dérision pour bien signifier la victoire remportée par la christianisme contre les forces du mal ainsi enchaînées. Au fur et à mesure des documents produits par les chanoines rouennais pour défendre leur droit, des détails viennent étoffer le caractère probatoire du miracle, telles ces voix angéliques invoquées en 1425 pour soutenir leur revendication de circuler librement dans les prisons afin d’opérer leur choix, au terme de ce qui doit être compris comme une confession générale des détenus, laquelle demande à se dérouler dans le secret.

C’est la voix notoire au pays de Normendie, ce privilège avoit esté introduit après voix évangélique venant du ciel pour les mérites du glorieux saint Romain42.

La version la plus achevée du miracle du dragon et de la libération consécutive du prisonnier se trouve dans les sources de la fin du XVe siècle, parmi lesquelles on peut citer les mémoires présentés aux rois Charles VIII puis Louis XII en faveur du renouvellement du privilège et les vitraux de la chapelle du Grand-Saint-Romain, sans parler de la Vie de saint Romain en langue vernaculaire à laquelle il a été déjà fait allusion43.

En l’an cinq cens et vingt ou environ ce dict temps, hors la ville et cité de Rouen et prez les murs d’icelle, hantast et habitast une bête horrible et monstrueuse, en forme de grand serpent ou dragon, qui, chaque jour, faisait grand dommages et empeschements à notre dite cité de Rouen, habitantz et voisins d’icelle, dévoroit toutes creatures tant humaines que autres, faisoit périr bateaux et navires navigans par la rivière de Seine et aultres maux innumerables a la chose publique d’icelle cité et de tout le païs environ ; tellement que par veoye humaine ni pouvoit estre donné aucun remède. Jusque a ce que monsieur sainct Romain, lors chancelier de France, soubz notre prédécesseur de bonne mémoire le roy Clotaire deuxième de ce nom fust eslu et promeu par la grâce de Dieu au dit archevesché. Lequel glorieux saint Romain faisoit par ses mérites et vouloir de Dieu, chacun jour, évidents et innumérables miracles qui seroient longs a réciter ; meu de pitié et compassion, et pour affranchir son peuple des périls et dangers d’icellui horrible et cruel serpent, se délibéra aller au lieu ou caverne ou résidoit icelle beste, pour la doubte et crainte de laquelle ne trouva aucune personne audit lieu ou à l’environ, fors un prisonnier du dit lieu de Rouen, pour lors detenu pour cas criminel, pour lequel il avait esté condamné à estre exécuter et souffrir mort, qui luy fust baillé par la justice d’icelui lieu.

[Romain et le prisonnier viennent à bout de la bête ; Romain lui met son étole autour du cou ; puis elle est menée par le prisonnier au peuple devant lequel elle meurt et fut brûlée.]

Et oultre, pour ce que iceluy prisonnier avoit esté en la compaignie dudit glorieux sainct, et aucunement ministre dudict miracle, il fut par lui délivré des prisons, déclaré quicte et deschargé de tout cas criminel quelconques qu’il auroit au précédent commis, sans quelconque punition ou satisfaction.

[Survient la mort de Romain ; saint Ouen lui succède, devenu lui aussi « chancelier de France », ce qui lui permet d’obtenir de la part de Dagobert la perpétuation de ce privilège.]

En contemplation et considération des quelz [faits], iceluy nostre prédécesseur Dagobert, inspiré du Sainct Esprit, meu de bonne affection et dévotion, et affin de réserver le dict miracle à la perpétuelle mémoire des hommes et à la louange de Dieu et du dict glorieux sainct, donna, à perpétuité, privilege, faculté, authorité et puissance aux archevesques, doyen et chanoines de la dicte église et à leurs successeurs, d’eslire en leur chapitre, chascun an, le jour de l’Ascension Nostre Seigneur, un prisonnier ou prisonnière, criminel ou criminelle, pour quelconque cas ou crime qu’il soit détenu ou détenue et icelluy mectre hors des dictes prisons et à pure délivrance44.

Remarquons que, dans la perspective de réunir les deux figures majeures du diocèse, saint Ouen est également mobilisé puisque le récit précise qu’il usa de son pouvoir à la cour de Dagobert pour perpétuer le privilège obtenu par Romain dont on apprend qu’il fut en son temps « chancelier de France ». L’épisode miraculeux est donc rattaché à la grande histoire et à l’échelon suprême du pouvoir. Cette orientation exprime à la fois un trait de la culture des élites bien observé pour la fin du Moyen Âge et les impératifs suscités par l’affirmation croissante de l’État et du pouvoir royal, appuyé sur ses officiers, affirmation qui passe notamment par l’institution judiciaire. Les chanoines avaient en effet à défendre leur privilège face aux officiers de la cour de l’Échiquier qui devient permanente et s’installe à Rouen à la fin du XVe siècle. Plus précisément, faut-il déceler derrière les détails dont s’enrichit le récit l’évolution des pratiques de la justice royale et un plaidoyer de la part de l’Église en faveur d’une commutation des peines ?

Outre le prestige renouvelé de saint Romain, il a fallu toute l’influence des deux cardinaux d’Amboise, qui occupèrent alors successivement le siège de Rouen, pour que le Privilège saint Romain soit maintenu. La popularité des festivités qui l’entourent est alors immense et procure aux chanoines un autre puissant levier pour faire plier les souverains qui se montreraient réticents à confirmer ce droit. Le chapitre ne se priva pas de signifier aux rois qu’il serait de mauvais aloi de priver les Rouennais de cette fête identitaire. L’argumentaire fit mouche puisqu’aucun prince ne remit en cause la grâce capitulaire qui tomba en désuétude au cours du XVIIIe siècle et fut supprimée en 1791, sous la Révolution française.

L’exemple de saint Romain de Rouen atteste donc comment, loin de s’estomper dans les esprits, certains saints anciens ont pu connaître des fortunes glorieuses au fil des siècles. La trame très plate qui semble avoir été celle de la première Vie de saint Romain s’est ensuite prêtée à des reprises et des enrichissements qui en ont fait une figure épiscopale exemplaire, telle que la voyaient les réformateurs grégoriens, un saint évangélisateur qui a permis d’insérer dans le plan divin la venue et l’implantation des Normands et le protecteur de la cité, propre à lui garantir les privilèges les plus singuliers, tel ce droit de grâce, aux origines obscures, exercé par le chapitre. Ainsi, le vieil évêque mérovingien reste très vivant dans la mémoire de la ville de Rouen jusqu’à la fin du Moyen Âge et même bien au-delà.

Mais autant qu’à son ancienneté qui illustre la longue tradition chrétienne du diocèse – encore qu’en la matière il ait des concurrents plus significatifs, tel saint Victrice – il doit son prestige à sa capacité d’épouser pleinement les aléas de l’histoire de la province, revêtant de la sorte une dimension identitaire. Saint Romain rejoint en cela bien d’autres saints45. Il n’en demeure pas moins que, dans cette perspective, l’Église de Rouen a jeté son dévolu sur un saint « ancien », plutôt que de s’en remettre à une figure plus récente, comme l’ont fait à la même époque de nombreuses cités italiennes, par exemple, et lui a manifesté une fidélité durable. Ce choix s’éclaire par le contexte qui fut celui de la région après 911. La Normandie a dû se construire, s’affirmer puis, à partir du début du XIIIe siècle, poursuivre son intégration dans le royaume, tout en sauvegardant jalousement ses privilèges. Plus largement, la mise en valeur de cette figure épiscopale locale pourrait aussi se rattacher aux aspirations d’une Église de France, si l’on ose déjà la formule, traversée de courants gallicans, au lendemain du Grand Schisme, même si, pour être plus probant, l’argument devrait s’appuyer sur l’examen des développements accordés simultanément au culte d’autres saints évêques46.

Dans les aléas de la fortune de saint Romain, la tension entre sainteté ancienne et sainteté nouvelle s’entrelace avec la tension entre sainteté locale et sainteté universelle.

Notes de bas de page

1Cette châsse, en cuivre doré de la fin du XIIIe siècle, est en forme de nef d’église rectangulaire ; elle est connue dans les inventaires comme « châsse de tous les saints » ; elle ne prit le nom de « châsse de saint Romain » qu’en 1776, lorsque l’on y transféra les reliques du saint évêque, provenant d’une ancienne « châsse de saint Romain » encore citée dans un inventaire du trésor de 1786, mais comme étant vide. Ce transfert immédiat d’appellation prouve la popularité dont jouissait encore le saint évêque au XVIIIe siècle. Trésor de la cathédrale 1993, p. 40-45 (notices 19 et 21).

2Dupront 1987.

3Goullet 2005 (important sur le « genre », mais aucune étude relative à saint Romain dans l’ouvrage). Dossier hagiographique latin de saint Romain de Rouen : BHL 7310 à 7320 ; AASS Oct. X, p. 74-103 ; Lifshitz 1995. Dossier hagiographique en langue d’oïl : Philippart 1996, p. 344, notice 118 et Paris BnF : Nouv. Acq. Fr. 10721, fo 9-13 ; version imprimée conservée à la Bibliothèque municipale de Rouen (NORM 274-60) reproduite dans Tougard 1899.

4Chaline 1976, p. 14-20, sur ce qui précède et p. 311, liste des archevêques.

5Violette 1996, p. 49. Voir aussi Allen 2009.

6Violette 1996, p. 49-60 (citation, p. 52).

7Delsalle 2012, p. 409-415.

8Le Maho 2004, p. 50-51.

9Lifshitz 1992, p. 329-340.

10Mollat 1979, p. 34 (chapitre de L. Musset).

11BHL 7312 (le texte n’est pas daté) et AASS Oct. X, p. 91-94 (le texte est présenté prudemment comme la Vita prior s. Romani) : l’auteur cite une Vita veterana, heroico carmine editam (p. 92).

12L’identification du moine Gérard au réformateur Gérard de Brogne, proposée par Lifshitz 1995 est aujourd’hui fortement remise en cause par Jacques Le Maho à partir de l’étude de trois Vies de saints, liées à la cathédrale de Rouen et à la collégiale qui devint abbaye au cours du Xe siècle, Saint-Ouen : Le Maho 2006b.

13Éditée dans Lifshitz 1995, p. 234-267.

14Le Maho 2006a, p. 321-322 ; l’auteur suit ici la datation proposée par les Bollandistes (AASS, Octobris X, p. 75-76).

15Traduction de L. Violette, dans Normandie an mil 2000, p. 131 ; l’attribution du texte à Gérard de Brogne repris de l’hypothèse de F. Lifshitz dans cet article est désormais récusée (voir ci-dessus n. 12).

16Étienne-Steiner 2012, p. 401-402 ne dit pas explicitement qu’il s’agit de la châsse de saint Romain, à la différence de Le Maho 2004, p. 54. Il est vrai que pour la procession de l’Ascension, le texte de Jean d’Avranches est explicite (feretrum sancti Romani), ce qui n’est pas le cas (feretrum) pour celle des Rameaux (PL 147, col. 117-118 pour les Rameaux et 124-125 pour l’Ascension) ; faut-il penser qu’à la cathédrale de Rouen, le terme de feretrum ne renverrait qu’à la châsse de saint Romain ?

17Sur tous ces indices relatifs à la vitalité du culte de saint Romain dans la cité de Rouen aux Xe et XIe siècles, se reporter à Le Maho 2004, p. 54-56.

18Le Maho 2004, p. 54-55 et Delsalle 2012, p. 411.

19Gazeau 2007, p. 244-248.

20Paris BnF : Nouv. Acq. Fr. 10721, fo 10r ; texte identique dans la version imprimée conservée à la Bibliothèque municipale de Rouen (NORM 274-60).

21Bournazel 2010 et Dehoux 2012.

22Lifshitz 1995.

23Spear 2006, p. 117-132.

24Inter quos [sanctos archipontifices] beatissimum Romanum voluerunt habere precipuum fraternitatis sue dominum et magistrum, ut ipsius qui assidue orat pro populo et pro civitate ista apud Dominum precibus adjuventur ; extrait du préambule des statuts de 1292 de la confrérie Saint-Romain de la cathédrale, publiés dans Floquet 1833, t. II, p. 603-607, citation p. 603.

25Vincent 1993, p. 263-274.

26Tabbagh 1998, p. 14-15.

27Vincent 1994.

28Schlicht 2005 et Thénard-Duvivier 2012.

29Schlicht 2005, p. 386 : annexes, tableau 6.

30Suger 1996, p. 22-23, De consecratione, chap. 6, où Eudes de Beauvais et Pierre de Senlis sont cités aux côtés de Hugues de Rouen comme évêques consécrateurs et p. 114-115, Gesta Suggerii abbatis, II, 3, où Manassès de Meaux est cité au lieu de Eudes de Beauvais. Faut-il mettre ce choix en relation avec le fait qu’au VIIIe siècle un abbé de Saint-Denis, Hugues, fut aussi archevêque de Rouen ?

31Dehoux 2012.

32Floquet 1833 : ces deux volumes qui incluent l’édition de nombreux documents constituent la somme sur le sujet.

33Lafond 1970, p. 226-229 : baie no 234 (parties hautes, chœur, 2e verrière à droite en partant de la croisée du transept).

34Delsalle 1996, p. 97-122.

35David Spear la situerait lors de l’ostension solennelle de 1124 (Spear 2006).

36De jure libertatis ecclesie Rothomagensis, intuitu gloriose Virginis Marie et beati Romani, a regibus et principibus antiquitus approbate (Floquet 1833, p. 601-602).

37Statuts publiés : Floquet 1833, p. 607-615.

38Langförs 1916, p. 502-662 (texte publié p. 627-634). Sur ce manuscrit, voir Savoye 2009.

39Tougard 1899, p. VII : ces extraits de la Vie de saint Nicaise, qui présente le saint délivrant une fontaine d’un dragon qui en polluait l’eau, pourraient avoir inspiré le nouveau miracle de saint Romain.

40Le Goff 1977.

41Martimort 1983.

42Floquet 1833, t. I, p. 12.

43Pour la vie, se reporter n. 3 et pour le vitrail n. 33.

44Floquet 1833, t. I, p. 15-18.

45Vauchez 1987 et 1995.

46Matz 2010.

Vincent, Catherine. « Un “vieux” saint sans cesse rajeuni : l’évêque Romain de Rouen ». La mémoire des saints originels entre XVIe et XVIIIe siècle, édité par Bernard Dompnier et Stefania Nanni, Publications de l’École française de Rome, 2019, https://doi.org/10.4000/books.efr.35227

Dompnier, Bernard, et Stefania Nanni, éditeurs. La mémoire des saints originels entre XVIe et XVIIIe siècle. Publications de l’École française de Rome, 2019, https://doi.org/10.4000/books.efr.34982

SOURCE : https://books.openedition.org/efr/35227?lang=fr

Intérieur de la cathédrale Notre-Dame de Rouen (Seine-Maritime, France) : tableaux "Vie de saint Romain" de la chapelle du Petit-Saint-Romain

Interior of Our Lady cathedral of Rouen (Seine-Maritime, France) : paintings about the life of Saint Romain in the Little Saint Romain chapel


Saint Romanus of Rouen

Memorial

23 October

17 June (translation of relics)

Profile

Courtier to King Clothaire II. Bishop of RouenFrance c.629. He worked to convert the remaining pagans in his diocese, and personally tore down a temple to Venus. He ministered to prisoners, especially those on death row, and was known as a miracle worker.

Died

639 of natural causes

Canonized

Pre-Congregation

Patronage

RouenFrance

Additional Information

Book of Saints, by the Monks of Ramsgate

Catholic Encyclopedia

Lives of the Saints, by Father Alban Butler

books

Our Sunday Visitor’s Encyclopedia of Saints

Oxford Dictionary of Saints, by David Hugh Farmer

Saints and Their Attributes, by Helen Roeder

other sites in english

Catholic Online

sitios en español

Hagiopedia

Martirologio Romano2001 edición

fonti in italiano

Santi e Beati

MLA Citation

“Saint Romanus of Rouen“. CatholicSaints.Info. 27 January 2024. Web. 21 October 2025. <https://catholicsaints.info/saint-romanus-of-rouen/>

SOURCE : https://catholicsaints.info/saint-romanus-of-rouen/


Statue Saint-Romain église Saint-Ouen du Tronquay, côté sud du chœur de l'église


Book of Saints – Romanus – 23 October

Article

(SaintBishop (October 23) (7th century) An Archbishop of Rouen in Normandy, a prelate of great zeal and of heroic sanctity, who during his twelve years of Episcopate effected many necessary disciplinary reforms in his Diocese. He died A.D. 639.

MLA Citation

Monks of Ramsgate. “Romanus”. Book of Saints1921. CatholicSaints.Info. 3 May 2017. Web. 22 October 2025. <https://catholicsaints.info/book-of-saints-romanus-23-october/>

SOURCE : https://catholicsaints.info/book-of-saints-romanus-23-october/

Saint Romain et la gargouille. Sculpture sur bois, Rouen, place du Lieutenant-Aubert.


St. Romanus of Rouen

Feastday: October 23

Patron: of then Archdiocese of Rouen; City of Rouen

Death: 639

Bishop of Rouen, France. He owed his elevation to the bishopric to the patronage of the Frankish king Clotaire II in whose court Romanus had grown up. As bishop, he worked to extirpate all lingering paganism, and per­sonally tore down a temple to Venus. He also cared for condemned prisoners. Romanus was famous for performing miracles.

SOURCE : https://www.catholic.org/saints/saint.php?saint_id=4632

Vitrail de la basilique de Bonsecours représentant Saint-Romain.


(7) St. RomanusBishop of Rouendate of birth unknown; d. about 640. His feast is observed on 23 October. The legend of this saint has little historical value (Acta SS., October, X, 91 sqq.), and there is but little authentic information concerning him [cf. "Analecta Bollandiana" (1904), 337 sq.].

Kirsch, Johann Peter. "Sts. Romanus." The Catholic Encyclopedia. Vol. 13. New York: Robert Appleton Company, 1912. <http://www.newadvent.org/cathen/13163a.htm>.

Transcription. This article was transcribed for New Advent by Herman F. Holbrook. For all the Saints . . . thy name, O Jesus, be forever blessed.

Ecclesiastical approbation. Nihil Obstat. February 1, 1912. Remy Lafort, D.D., Censor. Imprimatur. +John Cardinal Farley, Archbishop of New York.

Copyright © 2023 by Kevin Knight. Dedicated to the Immaculate Heart of Mary.

SOURCE : https://www.newadvent.org/cathen/13163a.htm

Église Saint-Clément de Rouen, Sculpture de Saint-Romain sur la chaire.


Butler’s Lives of the Saints – Saint Romanus, Archbishop of Rouen, Confessor

Article

He was born of an illustrious and virtuous French family, brought up in the practice of piety, and placed young in the court of Clotaire II, the third French king who was master of the whole monarchy. He was referendary or chancellor to that prince, when, in 626, upon the death of Hidulphus, he was chosen archbishop of Rouen, and compelled to receive episcopal consecration. The remains of idolatry in that diocess excited his zeal; he converted the unbelievers, and destroyed a famous temple of Venus at Rouen, and three others in the diocess, dedicated to Mercury, Jupiter, and Apollo. Amongst many miracles which he wrought, it is related that the Seine having overflowed a considerable part of the city, the saint, who happened then to be at the court of Dagobert for certain affairs of his church, upon hearing this melancholy news, made haste to comfort and succour his afflicted flock: and kneeling down to pray on the side of the water with a crucifix in his hand, the water retired gently within the banks of the river. If the miracles of this holy prelate raise our admiration, the eminent virtues which he practised ought still more to fix our attention. He macerated his body with continual austerities, and after the fatigues of his ministry, passed almost whole nights in prayer. By his indefatigable zeal he banished vice and superstition, and watched over the souls of all his flock as over his own. He had discharged all the duties of an apostolic pastor thirteen years, when God made known to him that the time was come in which he was to be called to receive his recompence. Romanus, whose whole life had been an earnest preparation for that hour, received the summons with joy; and redoubling the fervour of his penance, prayers, and other good works, disposed himself for that happy moment, in which he entered the joy of his Lord, on the 23d of October, 639. Saint Owen was his successor. Romanus was interred in the church of Saint Godard, one of his predecessors; but, in the eleventh age, his body was removed into our Lady’s, which is the cathedral. The first shrine having been impoverished, the archbishop Rotrou, in 1179, caused a very rich one to be made, which is known by the name of La fierta-saint-Romain. See Le Cointe, and the Life of Saint Romanus, written in Leonine verses, by a clergyman or monk of Rouen, before the reign of Charlemagne, brought to light by the Maurist monks, Martenne and Durand, in 1717. This poem was compiled from a life of this saint, which was more ancient. Saint Romanus’s life was again composed by Gerard, dean of Saint Medard’s, at Soissons, in the tenth age; also by Fulbert, the learned archdeacon of Rouen, in 1091, (not by the second Fulbert, who flourished in 1130.) This last piece was published by Rigaltius, with dissertations and notes.

MLA Citation

Father Alban Butler. “”. Lives of the Fathers, Martyrs, and Principal Saints1866. CatholicSaints.Info. 23 October 2016. Web. 22 October 2025. <https://catholicsaints.info/butlers-lives-of-the-saints-saint-romanus-archbishop-of-rouen-confessor/>

SOURCE : https://catholicsaints.info/butlers-lives-of-the-saints-saint-romanus-archbishop-of-rouen-confessor/

La fontaine Saint-Romain, aménagée en lavoir, accompagnée d'un abreuvoir et surplombée par une statue de Saint-Romain. Près de la RD 159 entre Guiry et Wy.

Statue de Saint-Romain sculpté en 1858 par l'abbé Dheilly, curé de Genainville. Elle surplombe la fontaine Saint-Romain, aménagée en lavoir, près de la RD 159 entre Guiry et Wy. L'ancienne statue a été récupérée par le curé de Guiry, et est conservée en l'église Saint-Nicolas de Guiry.


San Romano di Rouen Vescovo

Festa: 23 ottobre

Martirologio Romano: A Rouen in Neustria, ora in Francia, san Romano, vescovo, che abbattè dalle fondamenta i templi dei pagani ancora molto frequentati nella città, incoraggiò i buoni a progredire nel bene e cercò di dissuadere i malvagi dal compiere il male.

SOURCE : https://www.santiebeati.it/dettaglio/74870

Bannière de procession, église Saint-Romain, Wy-dit-Joli-Village (95)


San Romano arcivescovo di Rouen ( 639 )

23 ottobre

1 Fin dalla sua più tenera infanzia, san Romano fu un esempio di tutte le virtù.

I suoi genitori, che erano molto pii, si preoccuparono di dargli un'educazione cristiana e nobile che l'avrebbe preparato a occupare gli alti posti di responsabilità ai quali era destinato.

E non rimasero delusi, perché Romano profittò molto di tale educazione.

Divenuto Cancelliere di Francia, vigilò sempre su se stesso per conservare la pietà verso Dio, e fu sempre zelante nell'amministrazione della giustizia.

Badò e molto a non macchiare la sua innocenza, pur vivendo in mezzo al gran mondo, come se fosse vissuto in un monastero di stretta osservanza.

Quanto debbono confonderci questi fulgenti esempi di san Romano!

Perché noi, che ci buttiamo a capofitto nelle attività esteriori, perdiamo così facilmente lo spirito di pietà, acquistato in tanti anni di esercizi interiori.

Impariamo a camminare e vivere in mezzo alla gente, senza partecipare alla corruzione delle coscienze causata dalle massime mondane.

2 San Romano che illuminò con il fulgore delle sue virtù le persone secolari, fu scelto da Dio per essere una fiaccola ardente ( Gv 5,35Mt 5,15 ) sul candelabro della Chiesa.

Eletto Arcivescovo di Rouen si diede con zelo infaticabile a distruggere l'idolatria tra i popoli, la simonia tra gli ecclesiastici e a procurare, con ogni mezzo, tanti adoratori a Gesù Cristo e perfetti fedeli alla sua Chiesa, che il diavolo si sforzava di rapire.

Temeva una sola cosa in questo mondo: il peccato.

La sua anima, che indossò sempre la veste dell'innocenza battesimale, non ebbe paura di bloccare un drago che, non solo devastava i frutti della terra, ma divorava anche gli uomini.

Lavoriamo per conservare l'innocenza battesimale nei ragazzi che ci sono o ci saranno affidati; se, purtroppo, anche noi l'abbiamo perduta, sforziamoci di recuperarla con una penitenza proporzionata alla gravità dei nostri peccati.

Che gioia proveremo il giorno in cui rientreremo nello stato di giustizia originale!

Per convincercene maggiormente meditiamo su queste parole di sant'Ambrogio: Ci sono solo due vie per andare in Cielo: l'innocenza conservata o l'innocenza riconquistata con la penitenza.

3 Una vita così pura gli ottenne da Dio la grazia di conoscere in anticipo il momento della sua morte, che sopraggiunse mentre celebrava la santa Messa.

Questa rivelazione gli fece prendere la decisione di ritirarsi in solitudine per pensare solo a sé.

Ma fu proprio qui che il demonio sferrò i suoi più furiosi attacchi.

Però il pensiero continuo delle verità eterne e l'assiduità alla preghiera, lo resero vittorioso; gli fecero anzi aumentare i meriti.

Questi sono i due mezzi che permetteranno alla nostra anima di fortificarsi contro tutti gli attacchi dei nemici della nostra salvezza.

La meditazione delle verità insegnateci dalla fede è una spada a doppio taglio - scrive san Paolo -; essa penetra a fondo e s'insinua tra l'anima e lo spirito nei legamenti delle ossa ( Eb 4,12 ).

Ma non basta accettare con convinzione le verità della fede, bisogna anche chiedere ferventemente a Dio di aiutarci, con la sua grazia, a mettere in pratica - nonostante le nostre debolezze - le ispirazioni del suo Santo Spirito che ci rivela ciò che desidera da noi.

SOURCE : https://www.unionecatechisti.it/Testi/LaSalle/Medit/MF078/M181.htm

Bannière de procession, Confrérie de saint Romain, église Saint-Romain, Wy-dit-Joli-Village (95)


San Román de Rouen. M. 639. 

Martirologio Romano: En Rouen, de Neustria, san Román, obispo, que abatió los símbolos de los paganos que eran aún venerados en su ciudad, convenció a los buenos a mejorar y a los malos a abandonar su modo de actuar.

Cortesano de Clotario II; obispo de Rouen (c.629); se dedicó al cuidado de los prisioneros, particularmente de los condenados a muerte; trabajó para extirpar el paganismo en su diócesis. Se dice que destruyó un templo dedicado a Venus. Su vida está plagada de milagros fabulosos. Patrón de Rouen.

SOURCE : https://hagiopedia.blogspot.com/2013/10/otros-santos-del-dia_23.html

Église de Saint-Romain-de-Lerps. Statue St Romain, patron de la paroisse


Voir aussi :

Saint Romain, patron de la ville de Rouen [archive], archidiocèse de Rouen : https://nominis.cef.fr/contenus/SaintRomaindeRouen.pdf

Saint-Romain. Réalisation Jacques Tanguy : https://www.rouen-histoire.com/Saint-Romain/Index.htm

 Salet Francis, « La châsse de Saint Romain de la cathédrale de Rouen », [compte-rendu], Bulletin Monumental  Année 1956  114-3  pp. 229-230 : https://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1956_num_114_3_4006_t1_0229_0000_1

Vincent, Catherine. « Un “vieux” saint sans cesse rajeuni : l’évêque romain de Rouen ». La mémoire des saints originels entre XVIe et XVIIIe siècle, édité par Bernard Dompnier et Stefania Nanni, Publications de l’École française de Rome, 2019: https://doi.org/10.4000/books.efr.35227 ; https://books.openedition.org/efr/35227?lang=frDompnier, Bernard, et Stefania Nanni, éditeurs. La mémoire des saints originels entre XVIe et XVIIIe siècle. Publications de l’École française de Rome, 2019, https://doi.org/10.4000/books.efr.34982

The legend of Saint Romain & the dragon, in RouenNormandy Then and Now : https://www.normandythenandnow.com/the-legend-of-saint-romain-the-dragon-in-rouen/